Guerre n'était plus pour elle. Elle l'avait répudié. Pourquoi? Parce qu'il avait osé l'embrasser sans lui demander son avis au préalable. Quel genre de créature peut donc se montrer aussi suicidaire? Eris n'était pas réputée pour son instabilité émotionnelle pour rien... Il avait eu de la chance qu'elle ne le tue point séance tenante, mais qu'elle se contente de le libérer de la charge qui lui incombait, à savoir, guerroyer en son nom. C'était triste, mine de rien. A présent qu'ils n'oeuvraient plus de concert, Eris aux commandes et Guerre faisant office de jambes, la vie était d'une morosité...
Les humains comme les terranides l'ennuyaient profondément. Quant aux autres Dieux de l'Olympe, elle ne voyait en eux que des tirs au flanc tout juste bons à cuver le vin de Dyonisos, se complaire dans leur oisiveté, ou encore s'adonner à des pratiques sexuelles... Certes, c'est agréable. Mais... On ne peut tout de même pas passer son temps à ne faire que ça? Si? Apparemment, certains des divins semblaient persuadés que oui. Grand bien leur fasse. La déesse de la Discorde préférait se stimuler autrement. Elle préférait éveiller ses sens d'une façon beaucoup plus... Efficace, avant de les satisfaire. Elle voulait pouvoir ressentir l'adrénaline couler dans ses veines. Ou, si elle ne pouvait atteindre ce niveau, au moins stimuler son intérêt, d'une façon ou d'une autre.
La déesse du Chaos remplissait sa charge à merveille, à la perfection comme disaient ses frères et soeurs. Elle était chaotique dans ses relations, dans sa façon d'agir et de se comporter, et bien entendu dans son style de vie. Anarchique, anachronique, l'envers devient l'avant et l'avant devient l'envers, le haut devient le bas, et vice versa. Qui recherche la stabilité ne saurait jamais trouver son bonheur avec Eris, mais quiconque cherche une femme toujours renouvelée, avec plus de personnalités qu'une centaine de schyzophrènes et plus de reliefs que toutes les chaînes montagneuses du globe serait comblé. Elle n'est jamais la même, jamais. La seule chose perpétuelle chez elle est l'ennuit.
Ennuit dû à la désertion, enfin à la trahison, de son homme de main favori. Soit, qu'il en soit ainsi. Elle se trouverait un nouveau jouet. C'est pour cette raison qu'elle arpentait les contrées du chaos terranides, car c'est en cet endroit qu'elle risquait le plus de trouver son bonheur. Elle ne voulait pas d'humain ou d'esper, trop chétifs, trop vite passés et cassés. Elle voulait un jouet robuste et intéressant, un défi à relever, qu'elle ne pourrait aisément contraindre et qui l'amuserait autant qu'il l'obligerait à le détester... En un mot comme en cent, elle était à la recherche d'une créature susceptible de susciter chez elle des sentiments. Mais pas n'importe lesquels. Elle ne voulait pas d'amour, de tendresse ou encore de l'apaisement... Non, elle voulait de la colère, de la passion, de la haine, de la fougue! Elle voulait quelque chose d'intense, de prenant! Comme c'était difficile à trouver...
Lasse d'arpenter bois et chemin sans trouver sa perle de lunatisme, la déesse décida d'interrompre ses recherches l'espace d'un instant. Elle troqua donc son corps impalpable de fumée pour son originel, aux orbites vides et à la chevelure incomparable et unique. En cela cependant, elle était redondante. Ses formes étaient toujours aussi voluptueuses, et toujours mises en valeur par des vêtements qui n'en étaient pas vraiment. Corset de cuir et cape de velours, rouge à l'intérieure et noir à l'extérieur, ainsi que bottes à talons, elle aimait particulièrement se donner le style de la dominatrice qu'elle était et souhaitait être reconnue telle quelle. Une fois solide, elle profita de la forêt pour tester ses propres connaissances en matière de plantes et quant à leurs utilités. Elle n'en oubliait pas pour autant le but premier de sa présence dans les bois et restait à l'affût d'un signe de vie intéressant, quoiqu'elle commençait fortement à se dire que finalement, aucune créature, pas d'avantage sur le plan de Terra que sur Terre, ne valait le déplacement...