Le contrat

La taverne était à moitié remplie cet après-midi. Les quelques badauds, sans doute des habitués, étaient tous accoudés au comptoir conversant bruyamment en tapant le zinc avec leur chope pour ponctuer chaque blagues salaces ou pour saluer les commentaires de leurs camarades sur des sujets tel que le postérieur des dames  ou la météorologie.

Selene détestait les tavernes. Ces cloaques soi-disant conviviaux étaient plutôt, d’après elle, des repères à cas sociaux. Ce qui était sur, c’est que ce n’était pas un haut lieu de culture voué à l’élévation de l’âme.

Elle s’était placée à une table le plus loin possible des gens, près de la fenêtre. Elle regarda son reflet dans le verre immaculé et même celui-ci ne parvint pas à la faire sourire comme de coutume. Elle détestait la proximité des gens du peuple. A un moment elle avait même cru entendre un ivrogne demander à son compère si les singes se mariaient. Quelqu’un comme elle n’avait rien à faire ici et elle le faisait savoir à toutes personnes qui l’approchait.

Le crépuscule arrivait et commençait à obscurcir la rue que Selene regardait depuis des heures. Non pas par intérêt mais plutôt par ennui justement. Elle commandait de temps en temps une consommation et un badaud l’avait presque dragué. Le « presque » étant l’œuvre de Selene qui lui avait balancé son verre dans la face avant que le pauvre homme ne fasse une demande qu’il regrette par la suite.

Selene jeta un coup d’œil à sa montre ; c’était bientôt l’heure du rendez-vous avec son contact et elle commençait à regretter sa fâcheuse habitude d’arriver toujours en avance aux rendez-vous. Mais pour ce genre d’affaire c’était préférable, cela lui permettait de se détendre ; ce qui était mission accomplie grâce aux deux verres de scotch qu’elle s’était envoyée derrière le gosier.
Ici, Il valait mieux commander des alcools fort pour désinfecter les verres…

Elle attendait une certaine Melinda, fille de célèbres voleurs qui avaient sévis dans son monde. Elle s’était renseigné un minimum sur elle mais rien qui n’aille plus loin que ses faits d’armes. Sa vie privée ne l’intéressait pas et elle n’était pas du genre à se régaler de commérage. Elle n’appréciait pas forcement les voleurs mais leur présence ne la dérangeait pas non plus.
De toute façon elle ne devait pas se lier d’amitié avec celle-là car elle avait peu de chance de survivre…

La nuit. Tout y est tellement plus simple. Voler, derober, tout ce faisait a ces heures la, ou généralement, on ne trouvé que les individus peu recommandables. Melinda etait l'un d'eux, ce qui la fit sourire, tandis qu'elle marchait, envellopée dans son manteau long noir, de quoi cacher ses courbes, qui avaient la facheuse habitude d'exciter le moindre pervers du coin. Elle avait ce soir rendez vous avec une nouvelle cliente... Séléne, voila le nom qu'elle devait donner. Contacté par divers moyens, si cette femme avait reussi a obtenir son nom, c'est deja qu'elle devait avoir un sacré reseau de connaissance. A la différence des autres voleurs de bas étages, Melinda elle, etait une experte. Elle ne laissait jamais rien au hasard, et n'accépté que les contract qu'elle savait réalisable.. Si bien que pour l'engager, il fallait connaitre du beau monde. Ainsi, cette Séléne avait reussi. Pourtant, elle n'avait jamais entendut parler d'elle, ou que ce soit d'ailleurs... Ce qui la rendait encore plus interessante. Melinda etait curieuse de nature, méme si habituellement, elle préféré ne pas trop connaitre ses commanditaires, pour aussitot le travail achevé, les oublier et eviter tout ennuis.

La taverne etait en vue. Melinda n'appreciait pas forcement cet endroit, mais il y avait grandit, sous couvert de son pére et de sa mére, qui trouvaient la d'innombrables contract et d'informations. Si bien qu'elle y etait connue, connaissant chacuns des habitués, qui avaient tous revé un jour de la glisser dans leurs lits... Mais Melinda etait la "petite", et personne n'aurait osé tenter quoi que ce soit auprés d'elle. Ouvrant la porte, elle sentit la chaleur, la puanteur et les vapeurs d'alcools la frapper de plein fouet. Elle sourit, en reconnaissant Bourdu, le barman, qui lui rendit son sourire de ses dents jaunatres. Il indiqua alors la direction d'une table dans le fond, ou semblait patienter une jeune femme, certainement pas une habituée des lieux, ce qui fit comprendre a la Voleuse, que cela devait étre la fameuse Séléne. Remerciant rapidement son ami, la jeune femme se dirigea vers la table, avant de s'installer sur le tabouret d'en face, commandant silencieusement un verre de Scotch.

"Vous devez étre Séléne. Je suis Melinda."

Les présentations etaient faites, inutile de perdre du temps pour les connaissances, elles avaient toutes deux beaucoup mieux a faire. Son verre arriva, en méme temps qu'un autre pour la cliente. Attendant que le barman s'eloigne, Melinda regarda la jeune femme de plus prés. Elle la qualifié de jolie, méme si son coté suffisant resorté de ses yeux, qui fixait l'auditoire d'un air de degout totale. Ses Iris Violine etait tout simplement magnifique, rarement la voleuse avait vu couleur aussi belle.

"Vous devez connaitre du monde pour avoir reussi a me contacter... C'est aussi pour ca que je suis la, je ne prend que rarement des contrats de gens que je connais pas..."

Elle but quelques gorgées de son verre avant de poursuivre.

"Alors, que puis je pour vous?"

Elle était dans une sorte d’état d’ennui léthargique lorsque quelqu’un prit place en face d’elle et se présenta aussitôt. Son contact, ou bien son employé… associé ? Elle se demandait comment elle devait la qualifier. En tout cas, elle correspondait parfaitement à l’archétype de la voleuse ; toute encapuchonnée, elle avait un joli visage mais elle ne voyait pas le reste de son corps.

…

« Si je connais du monde ? » On pouvait le dire. Mais dans son cas, c’était plutôt ses parents qu’elle connaissait de réputation. Un couple à la Bonnie and Clyde très doué dans l’art du cambriolage et du larcin en tout genre. Elle espérait que leur fille soit leur reflet, voir bien meilleur car elle avait besoin de l’élite pour cette mission.
Une mission qui comptait plus pour elle que tout ce qu’elle a fait durant les deux derniers millénaires. Rien que d’y penser son cœur battait la chamade.

Elle regarda son interlocutrice boire une gorgé d’alcool ; Selene n’avait toujours pas dit un seul mot, elle préférait l’écouter parler en essayant de cerner le personnage. Cependant, ses phrases simples et concises ne laissaient deviner qu’une personne franche et directe.

Lorsqu’elle lui demanda la teneur de la mission, Selene su que c’était à elle de parler. Elle inspira un coup pour se calmer, afficha un sourire poli et commença son monologue d’une voix calme et stoïque :

J’aurais besoin de quelqu’un qui soit expert dans l’art de l’infiltration, du combat et de l’effraction. Une personne ayant la peau dure.

Elle marqua une pause le temps que toutes les qualités requises soient bien digérées par son interlocutrice puis elle reprit sur le même ton :

L’objet que je cherche se trouve dans la ville d’Ashnard, et plus précisément dans le palais du roi. Il faudra traverser les landes dévastées, s’infiltrer dans Ashnard, rentrer dans le château ; puis, bien sur, s’échapper de ce trou à rats. Je considèrerais que vous avez échoué si je n’ai pas le livre, si vous mourrez ou si nous sommes capturées et vendues comme esclaves. Je ferai le voyage avec vous mais je ne rentrerai pas dans le palais car je n’en ai  pas les compétences. C’est d’ailleurs pour ça que je fais appelle à vous. Pour le reste, je ferai en sorte que vous surviviez.
Des questions ?

Elle n’aima pas parler au gens de la sorte. Ce qui devait être, aux yeux de la voleuse rien de plus qu’un langage professionnel concis, était pour Selene un grave manque de considération pour la vie d’autrui. Cela la dégoutait de parler de la voleuse comme un moyen mais c’était ce qui se faisait lorsque des gens faisait affaire. L’un était intéressé par le service et l’autre par l’argent. On en oubliait toute notion d’humanité.

Bref, elle avait hâte que la négociation finisse pour qu’un nouveau climat de « compagnon de route » s’installe. Elle fit un petit sourire à la voleuse qui se voulait encourageant.

Un bref silence succeda a ses questions. Un silence qui lui laissa le temps d'analyser la personne qu'elle avait face elle. Aux regards qu'elle lançé a l'assemblée, cette fameuse Séléne, si tel etait son vrai nom, ne semblait pas trés enclin aux endroits de ce genre, ou la vermines des bas fonds viens se retrouver pour picoler, et se raconter leurs derniers exploits sexuels ou non. Mais elle ne laissait rien transparaitre d'autre, méme quant ce sourir apparut sur son visage, Melinda ne parvient pas a distinguer si elle etait sincérement navré de ce qu'elle allait lui demander, ou si elle prenait un malin plaisir a lui annoncer que sa mission serait un suicide pure et dur.

Elle l'ecouta alors parler, en silence, prenant soins de garder en mémoire les mots clefs. Et les premiers mots furent des plus simples. Elle voulait un voleur de haut rang, capable d'aller ou personne d'autre ne peux aller, et si possible en secret. Voila qui aiguisa la curiosité de Melinda. Que pouvait donc vouloir cette femme, pour qu'elle soit pret a debourser un bon pactole, et surtout a risquer sa vie? Qu'est ce qui valait tant la peine que ca? Alors elle ecouta la suite, et comprit pourquoi elle lui demandait a elle... Elle seule etait assés dingue pour se rendre a Ashnard, sous dictature, echappant au contrôle des plus hautes autorités de Terra... Ashnard et sa milice... Un mince sourire, tandis que sa cliente lui annonce la suite... Il etait evident qu'elle echouerai si elle etait capturé. Mais chose plus étrange, Séléne venait faire le trajet avec elle... Bizzare. Cet objet devait avoir une valeur immense a ses yeux. Prendre le risque de traverser la moitié d'un pays.

Le monologue se termina par l'habituel "des questions" et un sourire, qu'elle trouva bien plus franc que le premier. La voleuse reflechit alors a grande vitesse... Ashnard, ca restait faisable, méme si trés trés difficile. Elle devait amener quelques objets utiles avec elle. Le palais... C'etait une autre paire de manche. PLus difficile de passer inaperçut la dedans, et surtout, en ressortir en vie. Mais voila un challenge que la jeune voleuse ne pouvait refuser... Elle qui cherchait a prouver a tous qu'elle etait encore meilleure que ses parents, elle ne pouvait refuser un tel contrat.

Levant son verre, sans ajouter mots, elle trinqua contre celui de Séléne. Elle lui rendit également son sourire, sincére.

"Quant partons nous?"

La question la laissa perplexe. Elle s’attendait à un océan de question sur les modalités de paiement, l’objet de la quête. Elle avait préparé des arguments aux différentes questions qu’elle avait imaginé et se sentie bête devant ce dénouement incongrue.

Elle mit un moment avant de comprendre que Melinda avait trinquée avec elle, ce qui devait sans doute signifier qu’elle était d’accord. Dire qu’elle c’était attendu à devoir faire un long monologue pour la convaincre. « Cette gamine est suicidaire. »
Elle pensait tomber sur une voleuse froide et revêche dont le caractère aurait été tanné par la vie difficile qu’elle devait mener mais celle-ci lui fit un magnifique sourire qui lui fit presque oublier la mission. Presque…

Nous partons dans trois jours, le temps que vous vous prépariez. Moi je suis déjà prête donc si vous voulez partir plus tôt n’hésitez pas, lui répondit-elle d’un ton plat.

Selene finit rapidement son verre puis se leva. Elle posa la main sur la table pour attirer l’attention de Melinda et ajouta d’une voie neutre d’où perçait un soupçon de menace :

Encore une chose. L’objet que je convoite n’a de valeur que pour moi et il est même possible que son propriétaire le considère sans intérêt. Il est très probable que la sécurité qui ait été placée ne soit pas très élevée. Bref, c’était au cas où vous auriez voulu trouver un autre acheteur… Bonsoir.

Elle fit mine de se diriger vers la porte.

Trois jours... Long comme préparation finalement. Certes la Mission etait dangereuse mais plus elles iraient vite, moins les bruits sur leurs vols s'étendrés vers Ashnard. Terra est une petite nation, ou les bruits vont bon train. Inutile de dire que certains ames peu recommandable avaient deja entendut parlé de ce contrat la, méme avec toutes les précaution possible et inimaginables. Melinda reflechit alors rapidement au temps qu'il lui faudrait pour recuperer ses diverses affaires... Quelques heures au maximum. Tout en sachant que les voyages de nuit étaient bien plus dangereux... Elle se decida a prendre une chambre ici, tout en allant rapidement recuperer ses quelques bricoles. Mais avant qu'elle ne puisse ajouter quelques chose, la voix de sa cliente s'éleva de nouveau.

Un avertissement, une mise en garde. La jeune voleuse en fut presque indignée. Trouver un autre acheteur, elle. La doubler. Elle secoua la téte, comme pour se reveiller d'un mauvais réve, mais non. Cette femme avait fait appel a elle, mais visiblement ne connaissait en rien la guilde des voleurs... Un contrat resté un contrat. Un signataire, un objet a derober, on le donne, on prend la monnaie, tout le monde est contant... Pas de double jeu, c'etait bien trop dangereux et sans interet. Tandis que la jeune femme faisait mine de se diriger la sortie, Melinda posa son verre bruyement sur la table, captant a nouveau son attention.

"Que les choses soient aussi clairs pour vous. Je suis une pro, pas une gamine qui veux juste faire comme papa et maman. J'ai un carnet de client trié sur le volet, je ne me vend pas au plus offrant, mais a celui ou celle qui m'interesse moi. C'est MOI et moi seule qui définit mes clients, et en cela, j'ai un code. Pas de double jeu."

Elle marqua une pose, posant un regard vers le Barman.

"POur ce qui est de votre objet... Un livre, simplement un livre, je doute qu'il ne soit pas precieux pour l'actuel propriétaire. Vous ne debourseriez pas autant pour m'acheter si cela n'avait aucun interet pour le Comte. Un simple sourire de votre part, peut étre votre corps nue sous ses assauts, et il vous le donné... Mais qu'importe, je n'analyse jamais un contrat avant de me trouver en face des differantes sécurités..."

Une fois le discourt passé, elle finit par reprendre son sourire splendide.

"Une nuit. Je la passerais ici, juste une heure pour récuperer mes affaires, et une bonne nuit de sommeil. Il est préférable de voyager dans les landes de jours. Demain matin, nous pourrons partir a l'aube si vous prenez aussi une chambre ici."

Selene prit un infini plaisir à entendre Melinda évoquer son soi-disant Code. Elle avait vaguement entendu parler d’un code suivi par les chasseurs têtes et les tueurs à gages mais elle ignorait que cela s’appliquait aussi aux voleurs. Sornettes. Ce code n’avait rien de chevaleresque, il servait simplement à mettre le client en confiance.

Pourtant son expression amusée s’effondra lorsqu’elle parla du livre. Paniqué, elle se demanda si elle ne l’avait pas divulgué sans faire attention mais elle ne voyait pas quand elle aurait pu faire cette erreur. Sale petite … « Calme toi, tu n’y arriveras pas seul» se morigéna-t-elle.

Lorsque Melinda eut fini, elle se retourna pour voir qu’elle affichait un splendide sourire. Elle devait sans doute être fière de l’avoir déstabilisé. Fichu morveuse.
Selene ne souriait pas. Elle considéra un instant la voleuse avec un regard froid puis prit la parole d’une voix lasse :

Je ne t’ai pas menti. Nos avis ne font que diverger. Je ne pense pas que l’on puisse négocier avec le roi d’Ashnard sans qu’il fasse de vous son esclave et je pense vraiment que ce livre est sans intérêt pour lui. Nous en reparlerons durant notre voyage si tu y tiens, ca ne pourra être que bénéfique.
Ceci étend dit. Je tiens à préciser que celui qui me fera dormir dans cette cabane à puces n’est pas encore né. Je te retrouve ici demain matin.

Selene sorti de l’auberge en lançant un regard mauvais au tenancier qui le lui rendit.
Celle-ci marchait dans la rue pour rejoindre la coquette chambre qu’elle avait loué dans les haut-quartiers. Le fait qu’elle sache pour le livre la tourmentait encore, mais bientôt elle devrait faire face à des dangers qui lui feront oublier ses inquiétudes. De plus, elle réalisa qu’elle faisait confiance à Melinda. Elle avait été convaincante avec ses histoires de code à la noix. En y repensant, elle se mit à glousser toute seul, sa bonne humeur revenue. Finalement, elle aimait bien cette petite voleuse.

[Hj] La suite dans les landes dévastées. A toi, l’honneur [Hj]

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