Il était rare pour Lorkhan de sortir de son royaume, du moins de manière prolongée. En quelques millions d’années, le dieu du viol ne s’était aventuré chez les mortels qu’une dizaine de fois, se contentant la plupart du temps de les faire venir à lui plutôt que de faire l’inverse. Toutefois, il s’avérait parfois très amusant de se fondre parmi les mortels, d’adopter leur quotidien et de se faire passer pour l’un des leurs. Lorkhan avait l’habitude d’user de son aura divine et de tous les pouvoirs qui en découler pour asservir ses proies… mais user de son seul charisme pouvait toutefois proposer un défi intéressant. Du moins lorsqu’il ne décidait pas d’outrepasser le consentement des dames.
Ainsi en ce jour, Lorkhan avait décidé de se vêtir comme les mortels. Chemise blanche à col légèrement ouvert, pantalon de costume noir assorti à ses brogues, il attendait simplement adossé au mur de la gare, cigarette en bouche à observer les filles allant et venant. Inhalant la fumée qui ne lui fit aucun effet, il s’attarda quelques secondes sur une blonde avant que son regard ne saute sur une autre. Lorkhan se contentait d’observer. Peut-être n’allait-il pas trouver chaussure à son pied ce soir, le dieu qu’il était n’était pas toujours obligé de choisir quelqu’un. Il fallait dire qu’il ne manquait pas de femmes à besogner. Il s’avérait de plus en plus difficile de trouver quelqu’un éveillant véritablement son intérêt, bien que sa nature de dieu du viol et de la domination rendait son attrait pour la chose inévitable.
Finalement, son regard se porta sur un petit brin de femme. Beaux cheveux bruns, poitrine opulente, lunettes renforçant ce côté lubrique qu’il devinait chez elle… Lorkhan se trouva tout à coup intéressé par le profil. Ce fut sans un mot qu’il lui emboîta le pas, quelques mètres derrière elle. A mesure de la marche, la foule se fut de moins en moins grande, jusqu’à ce qu’elle finisse par passer par une ruelle. Le cliché de la demoiselle seule dans une ruelle hostile à la merci du premier venu, un scénario tant répété au fil des années… bien qu’avec lui, elles finissaient toujours par aimer cela. Être un dieu a ses avantages, si bien que les mortels ne peuvent pas vous résister.
Lorkhan se déplaça instantanément dans l’ombre d’une poubelle juste avant qu’elle ne passe devant. Surgissant de la pénombre, il vint l’acculer contre le mur, brusquement mais sans violence. Difficile de se défaire de sa poigne, tant sa force dépassait l’entendement. Et que dire de cette aura masculine, dont il réprimait intentionnellement la divinité pour ne pas révéler tout de suite sa véritable nature ? Ce soir, Lorkhan n’était qu’un homme.
“ Bonsoir mademoiselle. Personne ne vous a jamais appris à éviter ce genre d’endroits ? A moins que… “
Peut-être était-elle venue dans l’intention qu’il lui arrive quelque chose ? Les mortels sont parfois si joueurs.