Le soir tombait sur l’urbanisme furieux de Seikusu. A travers les fenêtres de l’appartement, Mykkie pouvait voir les néons des bars et des restaurations rapides dans la rue et le bal des phares de voiture sur la route. Comme ces éclairages étaient vulgaires pour un être habitué à vivre sous les rayons de la lumière divine. Dans un gros sac à de sport posé nonchalamment sur le canapé du salon, Mykkie fourrait des vêtements à sa taille, directement volés dans le placard de la locataire. Il lui fallait enjamber le corps profondément endormi de Junko, la jeune étudiante qui vivait ici, pour accomplir son petit manège. Mykkie et Junko avait vécu ensemble pendant quelques semaines. En utilisant l’hypnose, Mykkie se glissait dans la vie des gens sans que ceux-ci ne s’en rendent compte. Junko croyait avoir depuis le début cette étrange colocataire diaphane qui dormait dans la chambre tandis ce qu’elle-même restait dans le salon.
En réalité, le bel ange avait débarqué un soir chez cette inconnue du même âge physique qu’elle. Le soir, Junko, totalement inconsciente d’être sous emprise, lui faisait à manger et lavait ses affaires. Mykkie lui prenait de l’argent et se servait dans ses vêtements sans qu’elle n’y trouve rien à redire. Ce mode de vie de parasite convenait à Mykkie qui n’avait aucun respect pour les humains. Néanmoins, sa capacité naturelle à hypnotiser les hommes comportaient quelques défauts. Les anges dégagent autour d’eux une énergie très forte qui emplit l’atmosphère. Les humains se sentent toujours apaisés dans cette belle énergie angélique. Même s’ils ne savent pas à quoi ils ont à faire, quelque chose d’instinctif en eux est attirés par cette aura divine. Elle dissipe leur peur. Mais les humains sont des imbéciles incapables de traduire correctement cette information. Pour eux, souvent, leur excitation est dû à la beauté étrange de Mykkie qui peut parfois finir par les obséder. Ce soir, alors que Mykkie somnolait dans la chambre, Junko ne résista plus et se glissa sous son drap. Cela faisait des jours qu’elle avait envie de goûter de ses lèvres l’intérieur des jambes de sa colocataire mystérieuse, de toucher son peau diaphane avec sa bouche et sa langue et de tirer du plaisir de son corps. Même si Mykkie en avait honte, elle aimait qu’on la touche ainsi. Junko et elle échangèrent des heures de plaisir dans le creux du lit brûlant. Puis, une fois le désir consumé, Mykkie redevenait un ange inflexible. Elle plongea Junko dans un sommeil profond pour prendre la fuite en volant tout ce dont elle avait besoin. Il était hors de question de rester dans ce nid de débauche. C’était indigne d’un ange de céder à la pulsion…
D’un coup sec, elle referma le sac avec tous ses trophées. Avant de partir, elle s’octroya une longue douche bien chaude car elle ignorait quand est-ce qu’elle trouverait de nouveau un chez-soi. Elle abandonna son jeu de clé dans l’entrée et quitta l’immeuble. Elle portait un jean serré sous un blouson en fourrure synthétique blanche. L’errance nocturne commençait.
Mykkie déambula d’abord à pied dans la ville. Elle avait faim et s’arrêta quelque part pour manger un peu. Le froid était horrible dans les rues. Il lui fallait absolument vite retrouver quelqu’un chez qui s’installer. Peut-être quelqu’un de plus aisé que son ancienne colocataire qui n’était qu’une minable petite étudiante sans le sou. L’ange errant fit signe à un taxi et se laissa balader dans la ville en attendant de trouver une idée. Au bout d’une bonne heure et demie, elle aperçut une foule amassée devant les grosses portes noires d’une institution privée. Elle ordonna au taxi de s’arrêter et s’extirpa du véhicule sans payer. Le chauffeur n’y trouva rien à redire, bien sûr.
La foule était composée de jeunes et moins jeunes gens extrêmement élégants. Les femmes portaient des fourreaux noirs, les hommes des costumes. Mykkie s’avança parmi eux alors qu’elle n’était pas spécialement sur son 31. Tous attendaient devant les portes d’un club très sélect qui donnait ce soir une soirée spéciale, privatisé pour l’occasion par un puissant discret. Mykkie haïssait les lieux de débauche dont les humains avaient le secret. C’était la cause de leur chute en enfer et on ne pouvait pas les plaindre. Mais l’errance et le froid la faisait penser autrement. Il y aurait à boire et il y aurait une issue à sa situation à l’intérieur, c’était probable. Elle avait tellement honte d’avoir cédé au sexe quelques heures plus tôt qu’il lui prenait aussi l’impulsion de se cacher aux yeux du ciel, dans un intérieur clos. Elle avança parmi la foule sans difficulté et passa la sécurité par la grande porte sans que rien ne lui soit dit. Aux vestiaires, elle abandonna son sac, son manteau, révélant ce top noir particulièrement échancré dans le dos qu’elle avait volé à Junko.
A l’intérieur du club, on n’y voyait presque rien. Seuls les faisceaux du DJ permettaient épisodiquement de se faire une idée de l’espace. Mykkie se dirigea automatiquement vers le bar où elle commanda quelque chose sans alcool. L’expérience récente lui avait appris que son corps pur supportait très mal ces substances. Avec sa boisson, elle s’installa sur un haut tabouret. Quelque chose dans l’atmosphère la dérangeait beaucoup. Il y avait dans l’air une aura pourrie… un goût familier dans l’air, un goût répugnant… Son expression était fermée tandis ce que son instinct reconnaissait la présence proche d’un démon. Le battement de son cœur s’accéléra un peu et ses pupilles s’ouvrirent grand tandis ce qu’elle continuait de siroter son jus. Si la présence s’approchait, peut-être serait-il plus prudent de s’enfuir au plus vite…