Bon! Alana avait du boulot, et pas qu'un peu! John lui avait donné rendez-vous pour le deuxième soir suivant leur dernière rencontre, et, avouons-le, elle s'était tâtée à lui poser un lapin, mais s'était dit qu'un homme qui désirait la revoir, alors que ça n'était guère le cas d'habitude, méritait un peu plus qu'un lapin.
Il fallait dire qu'elle avait beaucoup à se faire pardonner pour leur dernière entrevue, même si elle s'y était beaucoup ammusée, le capitaine avait eu des hauts et des bas, il n'avait pas semblé déprécier, la preuve en avait été le bout de papier leur indiquant la plage de la suicidée, là où ils s'étaient vus la première fois, où il lui avait remonté le moral après les coups de fouets... Le souvenir douloureux était encore présent et particulièrement frais dans sa mémoire, raison pour laquelle elle ne pu retenir sa main lorsque celle-ci parti à tatôner son dos, à la recherches de marques potentielles... Mais il n'y avait rien, aucune aspérité sous sa peau, aucune marque. Elle avait la peau lisse comme du marbre, comme l'avait voulu la divine, comme si les trente coups de fouet n'avaient jamais claqué dans son dos. Un frisson la parcouru.
Emergeant de bon matin, la prêtresse commença immédiatement après ses ablutions personnelles à concocter des offrandes pour sa déesse, comme un rituel qu'elle répétait inlassablement tous les jours, en jeune femme zêlée. Pour une fois, elle ne rechigna pas devant ses corvées et les expédia très vite, pour en être débarassée et recouvrer la liberté. Personne ne trouva rien à lui reprocher, elle s'était bien conduite depuis sa punition. Donc, une fois que tout fut plié, elle put se livrer à ses préparatifs.
D'abord, emportant des grands bouts de tissus et des piquets, elle se téléporta sur la plage de la suicidée, et, un peu en retrait, elle monta une sorte de hauvent, rien d'intime attention, juste de quoi les abriter du vent, du sable et le cas échéant de la pluie. Alana ne voulait pas passer de messages qui n'y étaient pas, elle ne voulait donc la chose ni trop intime ni trop romantique. Pour ne pas que le capitaine se méprenne sur ses intentions. Elle voulait lui faire un petit plaisir, certes, mais pas lui accorder tout ce qui lui passerait par la tête, elle n'était pas folle au point de se rendre esclave de pareil bonhomme.
Après avoir monté la tente, avec l'aide de la magie bien evidemment, pour se faire bien enfoncer les pieux qui la tiendraient dans le sol, Alana alla chercher du bois, et en fit deux tas. Un petit et un grand. Un petit auquel elle mettrait le feu un peu plus tard, et le grand servant de réserve pour le plus petit. Après cela, elle retourna au temple pour prendre quelques coussins et autres, pour qu'une fois assise, la prêtresse n'ait pas mal à son derrière. Ah oui! Des torches. De grandes torches qu'on piquait dans le sol et qui éloignaient les moustiques. Elle aimait bien tous ces trucs exotiques. Ca avait du charme, le charme de choses dont on ne possédait que des répliques.
Après l'installation du décor, la prêtresse se tâta. Ou bien elle prenait son bain de mer maintenant, ou bien elle retournait en cuisine. Jetant un oeil au soleil, elle jugea qu'elle pouvait prendre le temps de se baigner une vingtaine de minutes. Ce qu'elle fit avec beaucoup de plaisir. L'eau froide était très vivifiante. C'était un régal. Une fois parfaitement rafrachie, la prêtresse retourna en cuisines.
De là, elle mijota une variété impressionnante de plats, tous en petite quantité, pour qu'il n'y ait pas beaucoup de restes. Ca serait un peu comme un tour culinaire, où on goutait à tout, mais en si petite quantité que ça pouvait rendre fou. Surtout que s'il y avait quelque chose en quoi Alana n'avait jamais douté, c'était ses talents de cuisinière. Le reste, elle ne s'estimait ni meilleure ni remarquable, juste à peu près au niveau.
Bref, une fois que tous les plats devant cuire au four, comme le canard laqué, le porc au caramel, du boeuf aux champignons noirs et légumes, du saumon sur son lit de patates douces, j'en passe et des meilleures; et les plats froids placés au frais dans la loge creusée près du permafrost, comme de l'anguille fumée, du carpaccio et du tartare de boeuf, elle quitta les fourneaux où elle avait passé les trois quarts de sa journée pour aller se préparer.
Dans le simple, elle faisait joli. Décidée à ne pas en faire trop, dur avec toute la nourriture qu'elle lui avait préparé, elle avait opté pour la robe la plus simple qu'elle possédait, blanche, avec les mêmes armatures qui lui étaient personnelles et la coupe qui lui revenait, avec les mêmes prétentions au niveau de la coiffure puisqu'elle se contenta de glisser une fleur de vanille dans ses cheveux, les laissant librement onduler. La simplicité type de la prêtresse moyenne. Une fois lavée de fond en comble, sêchée et habillée, elle passa en cuisine, envoya tous les mets à la tente et les accompagna.
Une fois sur place, il lui restait une toute petite chose et un tout petit peu de temps avant l'arrivée du pirate. Raison pour laquelle elle se pressa. Farfouillant dans le sable, elle retrouva péniblement la chaîne de la trappe, l'ouvrit, descendit, en fit le tour et tomba donc sur le trésor. Elle sourit en secouant la tête. Les hommes avaient beau parler des femmes et des bijoux, ils n'étaient guère mieux! ELle eut alors une idée.
Au milieu de la pièce, il y avait un piedestal avec deux magnifiques couronnes. Très simples, mais superbes. Une masculine et une féminine. La masculine était un simple cercle d'or, gravé et travaillé par un orfèvre de génie, la couronne féminine était encore plus belle. C'était un diadème d'or blanc, composé de plusieurs lignages emberlificottés comme des vignes qui se rejoignaient derrière la tête et faisaient gouter au milieu du front entre les deux yeux, un magnifique rubis. Ni trop ostentatoire, ni pas assez. Très élégant, très classe.
Alana ôta du piedestal les deux couronnes, les posa juste à côté, et posa à la place d'honneur sur une petite aspérité qui la rendrait visible la pièce que le pirate lui avait donnée en récompense de sa distraction des forces de l'ordre lors de son larcin. Ca serait comique, lui qui était déjà si riche, de se voir offrir ce genre de présents!
Cela fait, la prêtresse ressorti, emportant ce pourquoi elle était descendue à la base, à savoir... Du rhum.
Une fois à l'extérieur, elle referma la trappe, cacha la chaîne et alla disposer les plats qu'elle avait préparé ici et là, pour que John, une fois assis, puisse avoir accès à tout sans se lever.
Moins une tentative de séduction qu'une preuve flagrante de grande dévotion sous son caractère revêche.