Au sein du lycée Mishima, Mélinda Warren était une sorte de célébrité locale. Quiconque se serait plongé dans son dossier aurait vite compris qu’il y avait quelque chose de profondément anormal chez cette adolescente à la beauté virginale... Comme le fait qu’elle était au lycée depuis de nombreuses années sans prendre une ride. Mélinda avait eu le temps de faire son trou, usant de séduction et de corruption (ses armes préférées) pour obtenir le soutien de l’administration locale, et usant plus rarement de la menace, de l’intimidation, du chantage, face à des fonctionnaires un peu trop récalcitrants et un peu trop désireux de savoir ce que cette femme était. De cette manière, personne ne songeait à se demander pourquoi Mélinda Warren était encore élève du lycée après de nombreuses années, ni pourquoi son dossier scolaire comprenait tant d’irrégularités. Officiellement, Mélinda Warren avait, aux yeux de l’administration scolaire, des parents assez absents, qui ne se rendaient presque jamais aux réunions parents/profs, et qui, en réalité, étaient des esclaves de Mélinda. D’ailleurs, la vampire disposait même de personnes très proches parmi les enseignants... Comme
Sochiya-sensei, qui était à l’origine une esclave de Mélinda, et qu’elle avait utilisé pour l’amener à exercer le métier de professeur au sein du lycée.
Sochiya-sensei lui servait de couverture pour les quelques clubs parascolaires que Mélinda entretenait. Parmi ces clubs, il existait un club d’ésotérisme qui était une couverture. Le club avait officiellement pour but de se renseigner sur les forces mystiques locales, sur les légendes et les superstitions, une sorte de club découverte qui s’insérait plutôt bien dans un pays comme le Japon, qui était resté très superstitieux. Le club disposait ainsi d’un petit salon dans le lycée avec quelques bibliothèques abritant des livres fictifs, comme le
Malleus Maleficarum, ou encore le
Necronomicon... Et quelques grimoires qui, eux, étaient en revanche véritablement magiques. Car, sous ses allures de club hippie, Mélinda utilisait surtout ce club pour « sacrifier » des élèves vierges, ou très innocents, afin d’invoquer des succubes. Les sacrifiés ne craignaient en soi rien, si ce n’est de finir ensuite esclaves de Mélinda, et dépucelés par une succube, ce qui, somme toute, restait un bien modique prix à payer, et qui tenait d’ailleurs généralement plus du fantasme que de la punition.
Ce soir, Mélinda présidait une nouvelle réunion du club. Les séances d’invocation avaient toutefois lieu, pour plus de mysticisme, et pour moins de curiosité, dans la cave du lycée. Leur « sacrifié » était, ce soir, un jeune androgyne qui était récemment arrivé au lycée. D’ailleurs, l’individu avait reçu à la base un uniforme scolaire féminin, car, en voyant sa photographie et ses mensurations, le prestataire s’était trompé. Mélinda avait vu en lui une cible idéale, et avait chargé l’une de ses esclaves,
Hotaru Shidare, de se rapprocher de lui.
«
Il manifeste un intérêt certain pour l’occultisme, Maîtresse, lui avait expliqué Shidare.
Bien plus que pour ma poitrine » avait-elle ensuite noté, non sans une certaine pointe d’amertume.
Autant dire qu’il n’avait pas été difficile de l’appâter en lui proposant de rejoindre le club. Et, là, en fin de journée, le club attendait donc. Les cultistes portaient de longues bures noires dissimulant leurs formes, mais, sous ces tenues de prélats, ils étaient, soit tout nus, soit portaient des tenues d’un érotisme très prononcé. Une tenue inutile pour le rituel, mais autant donner à ce rituel une touche de mysticisme, non ? En tout cas, au milieu de la salle, on avait tracé à la craie et à la chaux un pentagramme complexe, des bougies étant posées à des endroits très précis.
Une certaine énergie magique résiduelle émanait de cette construction magique, qui n’attendait désormais plus que son « sacrifice »... Soit l’arrivée du jeune Doli.