-Force-toi à prendre une grande inspiration, la douleur refluera plus vite après.
La cliente me frotte le dos, comme pour m'aider à me remettre du coup. Je reprends doucement ma respiration alors que je lève doucement la tête vers la jeune femme. Je vois de la tristesse dans ses yeux. Elle doit sûrement être venue pour moi, pour m'ajouter à sa collection. Les collectionneurs ne sont pas les pires maîtres mais pas les meilleurs non plus. Ils ont une fâcheuse tendance à m'enfermer dans une cage ou un enclos plus ou moins grand et à me laisser seule avec mon ennui. Ils ne viennent que pour m'exhiber en tant que pièce importante de leur collection. Mais bon, au moins, ils ne me frappent pas.
- Désolée de vous avoir dérangée. Ne vous inquiétez pas pour moi.
-Veuillez excuser le comportement de mon collègue, mademoiselle.
-Vous êtes bien conscient qu'en abîmant la marchandise sous mes yeux, vous allez devoir revoir son prix à la baisse, n'est-ce pas ?
La cliente est apparemment sûre d'elle. Elle doit sûrement s'y connaître en esclave de terranide. Assez pour exiger des réductions. Ou du moins elle en donne l'air. L'esclavagiste terrien n'hésite pas un instant à répondre, en tant que professionnel.
- Bien sûr, mademoiselle. Nous vous proposons une réduction de trente pourcents. Il se tourne ensuite vers Arclo. La différence sera retirée de ton salaire.
Arclo part en gromelant. Alors que je l'observe s'éloigner, je ne peux pas m'empêcher d'avoir un petit sourire de satisfaction sur les lèvres. Quand Arclo se tourne vers moi et me lance un regard meurtrier, mon sourire disparaît immédiatement et je me recule vers ma cage, les oreilles et la tête baissées.
Pendant ce temps, l'esclavagiste terrien s'installe à son bureau situé étrangement dans la même pièce que les cages. Il aime sûrement signer ses contrats rapidement, notamment quand un de ses employés fait des erreurs comme Arclo. Il s'assoit donc et sort un papier et un stylo.
- Vu que vous n'avez encore jamais acheté chez nous, je vais vous expliquer notre fonctionnement. Nous favorisons énormément le client car en signant ce contrat, vous faites en sorte qu'après nous avoir donné l'argent correspondant à la valeur du produit, vous obtenez tous les droits sur celui-ci. Même celui de vie ou de mort. Notre seule contrainte est que si vous voulez vous séparer de votre bien ou que vous êtes dans l'incapacité définitive de vous en occuper, nous le récupérons. Et vous ne serez pas remboursée.
Il suffisait au client de signer ce papier pour obtenir un esclave. Il payait ensuite, en liquide pour des raisons évidentes de confidentialité, et l'esclavagiste signait à son tour la feuille, pour confirmer avoir bien reçu l'argent. À partir de ce moment là, on retirait le collier électrique du cou de la marchandise et on en attachait un nouveau, en cuir, avec une laisse. Et le nouveau propriétaire pouvait repartir aussitôt avec son petit esclave animalier.
C'est le schéma normal d'une vente. Je me met en tailleur devant l'entrée de ma cage en observant, attendant de savoir si la vente allait se dérouler comme je l'avais prédit.