Il faisait jour et une ombre rôdait près de la cime des arbres les plus près du parc pour enfants. Ces derniers jouaient paisiblement, insouciants. Ils n’étaient pas vraiment surveillés, leurs mères discutaient toutes ensemble à quelques mètres de là sans leur prêter la moindre attention. Fait troublant, ce sont ces mêmes mères qui, si leur précieux bambin est tué, feront mine d’être éplorées et rejetteront la faute sur les autres. Quoi qu’il en soit, la silhouette sortit des arbres. Le soleil l’illumina et les enfants cessèrent brusquement leurs jeux. Elle était belle, du moins ils en avaient l’impression. Le haut de son visage était caché par un masque blanc en forme de tête de chat, il y avait même des oreilles. La seule note de couleur était des marques sanglantes de griffure gravées sur le masque, qui s’harmonisait fort bien avec la teinte pourpre des lèvres de la jeune femme. Son kimono était court et lui arrivait au-dessus des cuisses. Il était d’une douce couleur bleue et des motifs de pétales de cerisiers le parcouraient. À chacun de ses mouvements gracieux, on pouvait comprendre qu’elle était bien plus qu’un simple être humain. Sa peau était pâle, si pâle… On aurait dit qu’elle n’avait jamais vu le soleil de sa vie.
Comme hypnotisés, les enfants continuaient de se rapprocher. Ils ne se rendaient pas compte que la créature n’attendait que ça, qu’elle avait soif de leur sang, qu’elle avait un regard de braise. Littéralement. Ses pupilles flamboyaient à l’idée du banquet qu’elle allait avoir. Ils la prenaient pour un Yokai ou pour un autre être mystérieux, mais pensaient qu’elle était gentille. Après tout, un être aussi parfait physiquement ne pouvait leur vouloir de mal, pas vrai ? Kira laissa un rire cristallin s’échapper de sa gorge, tandis qu’elle tendit la main vers une petite fille, qui l’attrapa. Le contact gelé de la peau du vampire ne sembla pas déranger cette dernière tant elle était fascinée. Alors, avec un dernier rire, la femme s’enfuit dans les bois, sa proie dans les bras. Derrière elle, des cris retentirent, mais il était trop tard et les mères avaient trop peur de rentrer dans les bois. La gamine était perdue. Ravie, la créature parcourut quelques kilomètres avant de s’arrêter dans une clairière. Le soleil se coucherait dans moins d’une heure et il n’y aurait qu’alors qu’elle aurait assez de forces démoniaques pour sortir ses crocs et s’abreuver du sang de l’innocente. Pour le moment, elle pourrait avaler de la nourriture normale mais ça ne la tentait pas, loin de là.
La petite ne bougeait pas, elle était allongée sur un rocher aux pieds nus du vampire, qui ne bougeait pas, figée dans une position gracieuse et ressemblant à une statue, ses traits adoucis par l’idée qu’elle aurait bientôt satisfait sa soif. Plus le temps passait, plus le soleil disparaissait. Il manquait peu de temps lorsqu’un bruit la tira de sa solitude intérieure. Elle n’était plus seule. Quelqu’un se rapprochait. Un danger, peut-être. Levant sa tête masquée vers l’endroit d’où venait le bruit, la vampire se tendit et ses muscles, aussi peu saillants qu’ils soient, se bandèrent, prêts à la propulser vers sa nouvelle proie.
