Le hasard fait bien les choses. Dangereux, ce proverbe suggérait qu’il fallait parfois abandonner le contrôle de son existence, et la laisser être véhiculée par... Par l’absence de contrôle, par le chaos, par la chance, par le hasard. Ce proverbe que Mélinda appréciait peu laissait entendre que, parfois, la chance, un évènement imprévu, une rencontre aléatoire, pouvaient avoir des effets bénéfiques. Si l’inverse était naturellement vrai, et si le recul amenait bien souvent à considérer une heureuse rencontre comme un évènement malheureux, Mélinda en était encore au stade où, bien malgré elle, elle devait reconnaître la justesse de ce programme.
«
Nous y sommes, Anderson... Cette pièce est le pont qui relie mes deux demeures : mon manoir, que tu viens de voir brièvement, et le harem, où ta nouvelle vie aura lieu. »
La pièce en question était circulaire, avec des murs violets, et quelques fenêtres en hauteur, donnant à la pièce une lueur assez sombre. Anderson l’accompagnait, et était, depuis quelques semaines, son nouvel esclave. Leur rencontre avait été le fruit du hasard, et ça avait été, entre eux, une forme de coup de foudre. Il s’était naturellement soumis à elle, et elle l’avait naturellement accepté. Elle avait laissé cette relation particulière mûrir un peu, le temps de voir si elle se confirmerait, ou si Anderson chercherait à nier ce qui s’était passé. Rien de tout ça n’avait cependant eu lieu, le brave aimant visiblement l’idée d’être l’esclave d’une belle vampire arrogante. Mélinda ne pouvait à vrai dire que le comprendre, dans la mesure où, si elle avait été à sa place, elle aurait sans problème accepté. La liberté, de son point de vue, était un cadeau illusoire, un piège que les humains voulaient attendre, alors qu’ils ne savaient pas quoi en faire. Il suffisait de voir l’état catastrophique dans lequel ils avaient plongé leur monde pour le réaliser. La servitude, en comparaison, était... Tellement plus reposante, tellement plus sûre. A choisir entre une vie de souffrance en étant libre, et une vie de bonheur en étant servile, Anderson avait fait le bon choix. Il s’était abandonné à Mélinda, et il ne le regretterait pas.
Elle lui avait déjà offert l’occasion de coucher avec d’autres femmes, de simples lycéennes qui l’avaient accepté dans leurs chambres du manoir sans difficulté. Et, bien sûr, ils avaient refait l’amour. A plusieurs reprises. L’homme était un très bon étalon, et elle avait donc décidé de le conduire au harem. Elle se retourna vers lui. Mélinda portait sa belle robe ample et longue, ouverte au niveau des jambes, et ouverte au niveau de son ventre, formant un décolleté curieux. Tout l’ensemble était retenu de manière complexe par le lacet noir à hauteur de ses seins. Elle se rapprocha d’Anderson, et caressa lentement l’une de ses joues, avant de l’embrasser avec une douceur et une tendresse infinies.
«
Tu te sens prêt, mon beau ? Prêt à vivre cette nouvelle vie qui t’attend ? »
Elle parlait d’une voix douce, cajoleuse, envoûtante. Comment résister les avances d’une telle femme ? Personne ne le pouvait. Et sûrement pas lui. Mais on n’était pas dans un film. Elle n’allait pas dévorer son âme. Non, il n’y avait que dans les contes que les démons s’intéressaient aux âmes. Les âmes des humains avaient si peu de valeur... Ce qui intéressait Mélinda chez Anderson, c’était tout simplement son corps, son sang, ses performances sexuelles, et la promesse d’avoir un prostitué dans son harem pour satisfaire sa clientèle féminine. Toutes les femmes, après tout, n’étaient pas des lesbiennes ou des bisexuelles, et, dans l’Empire, les femmes n’étaient pas considérées comme le sexe inférieur. L’égalité des sexes n’existait certes pas, mais les femmes étaient généralement assez influentes. Après tout, chez les démons, les femmes étaient généralement plus intelligentes que les hommes. Faites-en l’expérience ; la plupart des démons inférieurs, des chiens infernaux, des simples gobelins, étaient généralement masculins. Et, à choisir entre une succube et un gobelin, on opte naturellement pour la succube. Ainsi donc, en Enfer, la femme n’était pas considérée comme le sexe inférieur. Même l’Enfer avait ses bons côtés, après tout. Et, l’Empire d’Ashnard étant très proche des démons, il était logique qu’on retrouve cette influence.
«
Je te rappelle que ta vie en tant que lycéen sera révolue... Tu ne reviendras sur Terre que pour d’éventuelles vacances. Si cela ne t’effraie pas, mon beau, il te suffit de traverser le Portail. »
Le Portail en question était au centre, et ressemblait à une espèce de vortex translucide. Cette faille dimensionnelle conduirait directement Anderson sur Terra, dans le harem de Mélinda.