23h00 passé, tout était calme. Les lumières de la ville s'étaient doucement éteintes il y avait deux heures à peine. Seul l'éclairage des quelques réverbères présents sur les trottoirs protégeait le quartier d'une obscurité quasi totale. A cette heure tardive, la plupart des gens étaient déjà rentrés chez eux depuis longtemps, interrompant leur promenade en raison du froid mordant de cette nuit. C'était le moment que Rubis préférait. Dès l'instant où le crépuscule touchait à sa fin, elle se délectait de la baisse des températures. Plus celles-ci chutaient, mieux la jeune ange se sentait. Et puis au moins, elle était certaine que les rues ne grouillaient pas de monde. Etre prise dans la foule, elle avait suffisamment donné la veille.
Rubis ouvrit à demi les paupières. Jetant un coup d'oeil furtif au ciel, elle se rendit compte qu'elle s'était quelques peu assoupie, mauvaise habitude, en particulier en ce moment. Elle se releva, décidant d'aller faire quelques pas avant de rentrer dans le lieu où elle logeait. Bien que la nuit lui portait à coeur, elle n'était pas encore prête à inverser ces cycles de sommeil, particulièrement avec ce qu'elle avait à faire.
Poussant un soupir à cette idée, elle laissa flotter une buée froide dans l'air par le flux de sa respiration. Autant ne pas penser à cela pour le moment et profiter un maximum de ce moment de tranquillité... tranquillité?
- Hm?
Rubis se stoppa, plissant légèrement les yeux essayant d'entrevoir ce qui résidait sur le trottoir à quelques mètres d'elle. Intriguée, elle s'avança pour ensuite se baisser, rendant son observation plus minutieuse. Du sang? La jeune femme releva la tête, attentive à l'environnement de son périmètre. Excepté quelques passants dont le son des pas résonnait en une fréquence répétée, il n'y avait pas âme qui vive aux alentours. A part les nombreuses trainées de sang, le décor n'offrait aucune séquelle d'un quelconque conflit. Or, le plasma n'était pas sec. Fronçant un sourcil, Rubis se redressa et fixa le chemin devant elle. Les stigmates sanguines continuaient à longer la route, parfois abondantes, parfois restreintes. Intriguée, la jeune femme les suivit, ignorant sur qui ou sur quoi elle allait tomber. La personne, ou l'animal, blessé n'avait pas avancé à vive allure, tant le sang s'agglutinait à certains endroits. Rubis en conclu qu'elle devait être également désorientée, examinant certains passages reproduis à plusieurs reprises sur plusieurs mètres de pavés.
Après une dizaine de minutes passées à suivre l'empreinte d'une blessure à proprement parler, Rubis remarqua que les traces bifurquaient enfin. Jusque maintenant, elle n'avait avancé qu'en ligne droite. Considérant l'étroite ruelle qui s'offrait à elle, la jeune femme hésita. Elle pouvait tout aussi bien tomber sur un animal au bord de l'agonie comme elle pouvait se retrouver nez à nez avec un cadavre. Dans les deux cas que lui proposait son intuition, elle n'avait pas de soucis à se faire. Silencieusement, elle s'avança dans la pénombre, respirant silencieusement, attentive au moindre bruit ou mouvement suspects qui pourraient surgir sans crier gare.
Hormis la faible lumière au bout de la ruelle qui indiquait son aboutissement, Rubis n'y voyait rien. En absence de toute lumière, elle ne pouvait qu'attendre que ses yeux s'habituent à l'obscurité. Elle s'arrêta après environ dix mètres et attendit. Enfin, elle pu percevoir une forme humaine, assise, et adossée contre le mur. Théories erronées. Si elle n'avait pas songé à une personne contusionnée par des blessures, c'est parce que pour elle, la logique voulait que la personne en question aurait été demandé de l'assistance. Les humains ne s'entre aident-ils donc pas? Avançant de nouveau, Rubis se retrouva à quelques mètres à peine de, ce qu'elle pouvait appeler, une victime. Ce qui attira en premier son regard, ce fut la flaque de sang en dessous d'elle. Mais pourquoi diable restait-elle là? Les risques d'infections étaient nombreux et l'endroit qu'elle avait choisis pour se stopper était parfait pour attirer la vermine avec une plaie pareille. Se stoppant dans ses pensées, elle remarqua enfin la queue de canidé. Elle n'en fut pas bien surprise, elle avait appris au cours de son apprentissage que les êtres, appelés Terranides, résidaient également sur le monde d'en bas, mais... sur Terre? Rubis secoua la tête. Le moment n'était pas aux réflexions, si elle la laissait là, la... louve, renarde? Qu'importe, cette hybride n'allait pas passer la nuit avec ce froid. En temps normale, la jeune ange ne s'en serait pas mêlée, mais elle n'était pas sans coeur pour autant. Elle lança un regard autour d'elle, pour ensuite le reposer sur la jeune terranide. Tant pis si elle allait l'effrayer, elle n'était pas d'humeur à jouer sur la délicatesse. Elle retira le pull qu'elle portait d'une traite et le lança sur la silhouette de Shad qui n'avait pas bougé depuis son arrivée furtive.
- Dépêches toi d'enfiler ça, ce n'est pas ta queue qui va te protéger d'un sérieux refroidissement.
Détournant le regard après ses paroles, Rubis fronça les sourcils. Se mordant la lèvre inférieure, elle fourra ses ailes dans le fin t-shirt qui lui restait sur la peau en l'absence de son pull. Pas pratique pour cacher ses attributs, mais elle n'allait pas faire la difficile et même si le manque de lumière pouvait à lui seul les cacher, elle préférait jouer sur la précaution.