La journée fut rudement longue pour la belle Française. Elle passa sa journée de travail en crèche en plein cœur de Seikusu, à s'occuper des petites têtes brunes, à faire des coloriages et des découpages, mettant des petits bouts de papier et des paillettes partout. Mademoiselle Moreau avait beau aimé les enfants comme s'il s'agissait de sa propre chair, elle reconnaissait que cela restait fatiguant. Bien que les enfants japonais étaient sûrement moins agités, plus sages que les petits monstres français, ils n'en restaient pas moins des enfants. Il fallait savoir les tenir, les rappeler à l'ordre si jamais, mais aussi les débarbouiller, etc...Tout cela pouvait être usant d'une journée à l'autre.
Cependant, quand la rondouillette revenait en ses murs, sa journée était loin d'être finie. Déposant ses affaires dans sa chambre, la jeune femme à la chevelure de feu se défit de ses habits tâchés de chocolat et autres peintures, pour mettre des vêtements bien plus confortables et chauds. Ses débuts et fins de journée rimaient toujours avec soin de ses bêtes. La demoiselle avait réussi à avoir un terrain avec assez de place pour accueillir quelques animaux. Cela lui rappelait un peu sa Provence natale. Elle avait même gardé un petit lopin de terre pour en faire un potager, histoire d'avoir quelques légumes. Il faut dire que tout ce qui est fruits et légumes, c'était très cher au Japon. Il était loin le temps où elle se promenait au marché et que parfois, certains marchands lui offraient des légumes ou fruits touchés.
Hier, Lucie s'était occupée de son potager et avait bêché toute la journée pour refaire des rigoles et ainsi aérer la terre. Elle se disait qu'un jour, elle essayerait la culture de riz. C'était quelque chose que les Japonais mangeaient absolument tous les jours ! Cela lui ferait peut-être une réserve...Quoiqu'il en soit, aujourd'hui, elle s'occuperait de ses animaux. Ouvrant les portes de la grange, elle salua ses amis à quatre pattes, visiblement ravis de la retrouver. S'armant de la fourche située non loin de l'entrée, la Française retira la paille salie, tout en la déposant dans la brouette, et la remplaça par de la chaude et toute propre. Lucie rajouta également du foin pour ses herbivores, quelques grosses poignées de grains pour ses volailles, ainsi que des croquettes pour ses chats. Elle remplit également les gamelles d'eau. Les chiens, eux, mangeraient dans la maison. Elle préférait les avoir avec elle, si jamais il y avait un souci, que ce soit aussi bien une intrusion qu'un simple malaise...
Après sa rude journée, Lucie appela ses deux chiens, Starky et Lola, deux bouviers bernois, et les emmena dans la maison. Bien sûr, pour les régaler, elle prit le temps de leur remplir les gamelles d'eau et de croquettes, mais aussi, dans deux petits bols à part, y mettre un peu de pâtée pour gros chiens. C'était une façon de leur faire plaisir, parce qu'ils avaient été sages toute la journée et avaient protégé la maison. Non pas qu'il y a beaucoup de problèmes au Japon, mais il existe tout de même, et il vaut mieux être prudent que trop laxiste. Elle les laissa ensuite tranquille, pouvant voguer calmement dans la maison. Lucie savait pertinemment qu'ils ne feraient pas de bêtises...
La jeune femme bien en formes se rendit ensuite dans sa salle de bain et prit quelques temps pour se débarbouiller. Une bonne douche ne faisait de mal à personne ! Une fois fait, elle se couvrit d'une
simple nuisette noire, la demoiselle à la chevelure de feu se dirigea dans sa cuisine, vers son frigo plus précisément, ne se prenant que de quoi faire un petit sandwich. Elle avait la flemme, ou plutôt, n'avait plus de force pour faire quoique ce soit d'autre. Sa journée avait été longue et difficile. Elle méritait bien le repos du guerrier. À la base, la Française avait prévu de s'installer dans son lit et de se regarder quelques épisodes d'une série très en vogue sur une plateforme de streaming, mais trop épuisée de sa double journée, elle savait que ce ne serait pas le cas. Mettant un pied dans son lit, puis l'autre, se couvrant de sa délicieuse couverture, il ne fallut pas longtemps avant qu'elle ne sombre dans les bras de Morphée...
La nuit se passa calmement. Mais alors qu'elle était en train de rêver de son ex, non pas que ça lui plaisait sincèrement, un grognement la fit se réveiller. Un de ses chiens, Lola, venait de se dresser sur ses quatre pattes, les oreilles légèrement haussées, la truffe en direction de la grange. La chienne semblait sentir quelque chose, ou peut-être avait-elle entendu quelque chose que Lucie n'avait pas capté dans son profond sommeil...La Française devait s'assurer qu'il n'y avait personne dans sa propriété, aussi bien dans sa maison que sur son terrain. Il était même fort possible que quelqu'un lui vienne voler des légumes dans son potager pour lequel elle avait durement travaillé. Elle fit le tour de sa maison bien rapidement, mais Starky et Lola grognaient de plus en plus vers l'extérieur.
Se chaussant de ses sabots de plastique, de son gilet vert par dessus sa nuisette, ainsi que d'une lampe torche, ou plutôt de l'application lampe torche de son téléphone, la jeune femme prit son courage à deux mains et s'avança prudemment vers la grange, là où les chiens semblaient aller...Lucie entama une lente inspection extérieure de la bâtisse, mais comprit rapidement que quelque chose clochait à l'intérieur, vu l'agitation de ses chiens qui grattaient à la porte, mais aussi des animaux restés à l'intérieur.
Au cas où on l'attaquerait, la jeune femme décida de s'armer de la bêche restée à l'extérieur, et la tenant fermement à deux mains, ouvrit brusquement la porte rouge de la grange d'un coup de pied. Elle leva la bêche au dessus d'elle, prête à frapper. Elle n'avait pas vu qui était là, elle ne savait pas pourquoi la personne était là, mais il y avait bien quelqu'un. Levant la bêche au dessus de son épaule, elle s'annonça, en japonais bien sûr, les mains et jambes tremblantes, alors que ses chiens montraient les dents, prêts à attaquer.
- Qui...Qui est là ? Ne touchez pas à mes animaux ! Sortez de ma grange ! Je...Je suis armée et bien entourée!Elle ne faisait clairement pas la fière, mais elle était prête à se battre s'il le fallait...