Solace chantonnait joyeusement alors que son équipier (temporaire) la fusillait copieusement du regard. Bras croisés, pied qui tapotait frénétiquement sur le sol pavé, la jeune femme s'impatientait depuis un bon quart d'heure déjà. C'était ce que faisait les "hauts gradés" ? Faire poireauter les nouvelles recrues jusqu'à ce qu'elles craquent. Mmm... une méthode intéressante qui portait plus sur les nerfs de Solace qu'autre chose. Mais soit. Elle patienterait. La porte était, de toute façon, désespéramment close et l'homme qui attendait à ses côtés n'avait pas vraiment l'air prêt à bavarder avec la miss. Alors, celle-ci se distrayait comme elle pouvait, soufflant dans l'air glacé un panache de vapeur. Les minutes s’égrenaient et l'attente ne semblait pas finir. Alors qu'elle s'apprêtait à avancer et à taper de grands coups sur la porte métallique celle-ci s'ouvrit sur une petite silhouette, une vieille dame qui faisait une tête de moins que Solace et qui invita le petit duo à entrer. L'intérieur de la petite bâtisse devant laquelle ils avaient attendus (un vieux bar abandonné) était moins décevant que le taudis qu'elle avait imaginé. En fait, il était nettement plus correct que l'extérieur décrépi et abîmé. Fascinée, la bouche ouverte, elle scrutait les murs ornés de photographies et le papier peint (qui dénotait un certain goût) à l'instar d'une touriste qui visitait les rues de Seikusu. Elle se retint avec grand mal de secouer l'homme qui l'avait accompagné pour agrémenter de commentaire leur petite balade dans le QG des yakuzas. Celui-ci lui avait bien fait comprendre qu'il ne voulait pas lui parler. Le type en lui même n'avait pas l'air de vouloir rire : il s'agissait d'un grand chauve engoncé dans un costume. Bien heureusement, ce ne serait pas lui qui l'accompagnerait lors de la mission de ce soir, une mission, se rappela-t-elle, qui était destinée à prendre connaissance des capacités de Solace et voir si on pouvait lui accorder la confiance nécéssaire pour l'accepter, au moins temporairement, en tant qu'"homme de main" des yakuzas.
La réalité était tout autre.
La mafia russe l'avait balancé dans une mission d'espionnage (apparemment le directeur des ressources humaines de l'organisation avait des progrès à faire, se disait-t-elle en blaguant). Un choix "judicieux" selon certains, qui servaient surtout à la balancer dans les pattes d'autres. Qu'elle casse les pieds aux concurrents ça leur fera des vacances ! Si elle se faisait descendre tant pis, si elle revenait bredouille pas grave, et si elle se ramenait avec de l'intel, des informations croustillantes, c'était tout bon. Il n'y avait aucun perdant dans l'histoire. Pour Solace, c'était l'occasion d'aller voir un peu ailleurs, et qui sait.... de trouver de nouveaux employeurs ?
« Bonjour. » lui adressa un homme. Solace venait de s'engouffrer dans une petite pièce où un attroupement d'individus louches la dévisageait à loisir. Bon, elle n'était pas du genre à être facilement mal à l'aise donc peu importait. Se tortillant sur place, elle leur fit bien comprendre qu'elle souhaitait en finir. Qu'on lui balance les consignes et elle serait en route pour faire ce qu'elle faisait de mieux : atteindre son but, si possible avec quelques dommages collatéraux. Mais elle était efficace ! Alors on ne lui en tenait pas trop rigueur. Les consignes, que le lieutenant débita d'un ton monocorde, était simples : se rendre dans une des planques des adversaires et essayer de récupérer un chargement de drogues diverses et variés, ainsi qu'une liste qui renseignait sur d'autres réserves similaires. Bien, bien. C'était tout tracé, on se serait presque cru dans un jeu vidéo tant l'objectif était clair. La mission serait (normalement) simple. Ne faites pas trop d'éclat. La jeune femme se retint de grommeler. Après tout elle pourrait facilement mettre la responsabilité sur l'autre camp... malheureusement le fait qu'elle ait de la compagnie rendrait le mensonge un peu plus ardu. En parlant du loup... songeait-t-elle. Le petit boss ponctua sa présentation en indiquant un homme qui venait tout juste de franchir la porte. Son camarade désigné de ce soir. Super !
« Salut ! » s'exclama-t-elle, un énorme sourire aux lèvres, tranchant avec le sérieux de la situation. Bon, au moins il saurait à quoi s'attendre.