Le râteau de Kazari fit sourire certains Vierges, et toutes laissèrent Ciaphas partir. Kazari aurait pu le poursuivre, lui sauter après, et le violer sur place... Mais la créature zombifiée avait son propre orgasme, et se contenta d’un sifflement.
« Il faudra que j’attende de retourner à un Bastion pour me faire sauter par un vrai mâle, alors... »
Une rumeur persistante au sein de l’escouade voulait que, à l’époque d’Ekkadon, le précédent écuyer, ce dernier ait été un amant régulier de Kazari, et que ce soit leur relation intense qui ait pu expliquer, en partie, pourquoi il avait tenté de violer une Vierge. Si Kazari était vraiment une fidèle de Slaanesh, ce dont peu de gens doutaient en réalité, alors, quand elle faisait l’amour, elle pouvait dégager inconsciemment des spores spéciales, qui avaient tendance à désinhiber, sur la longueur, ses amants. Il n’y avait aucune étude scientifique sérieuse sur le sujet, simplement une théorie du partie de l’Escouade, qui justifierait bien, selon les partisanes de cette théorie, qu’on se débarrasse de Kazari. De fait, si cette femme n’était pas aussi utile au combat, en pouvant encaisser bon nombre de coups sans mourir, elle aurait depuis longtemps été exclue de Repentia. Il était connu qu’Amara ne l’aimait pas des masses. Cette femme était une ancienne Inquisitrice, une femme qui, dans son passé, passait justement à traquer les créatures comme Kazari, afin de les brûler. Il fallait faire contre mauvaise fortune bon cœur. L’humanité n’était plus en état de vouloir refuser les aides s’offrant à elle. Du passé, il fallait faire table rase, afin d’affronter une menace commune qui, trop souvent, avait été négligée.
Karen, elle, loin de ces badinages (du moins, en apparence), songeait fugacement à ce que Ciaphas avait dit sur les armures Crown et le manque de solsticium. C’était un problème préoccupant pour l’Ordre. Pour l’heure, l’Ordre n’avait pas trouvé de meilleures armures que les Crown, qui reposaient sur le solsticium, mais les gisements étaient épuisés... Et ceux qui étaient connus étaient envahis par tellement de Formiens que les libérer frôlait l’impossible. Le problème des Vaporéens avait toujours été que leur technologie avancée reposait sur une source énergétique rare. Inversement, les Tekhanes n’avaient pas ce souci... Et certains Bastions disposaient d’usines en état de marche, ce qui amenait l’Ordre à se demander s’il ne fallait pas remplacer les Crown par d’autres modèles d’armure. Malheureusement, les schémas techniques de la plupart des armures tekhanes avaient été perdus lors de l’Excellion Day, ce qui, notamment, impliquait ceux des combinaisons des Ghosts. Ces combinaisons étaient réputées pour être les meilleures armures jamais conçues par les ingénieures tekhanes, alliant résistante, souplesse, fiabilité et confort, et étant autant taillées pour l’infiltration que pour le combat, par le biais d’un système de nanofibres qui permettait de modifier leur texture. Des combinaisons extrêmement onéreuses, et dont il ne restait aujourd’hui que des répliques foireuses utilisées comme combinaison sexuelle dans le passé. Karen savait que l’Ordre avait mené des missions pour tenter de retrouver des schémas tactiques, et, de fait, la récupération de technologies tekhanes était aussi l’une des missions prioritaires de Repentia. C’était d’ailleurs la raison d’être de la mission à Fort Victoria. D’après des informations récupérées sur plusieurs manifestes, des ingénieures tekhanes s’étaient réfugiées dans ce fort, avec leurs affaires, et avaient été piégées par les Formiens. Leur matériel était peut-être ici... Ou peut-être que l’Escouade pouvait tomber sur elles en les explorant. Auquel cas, et contrairement à ce que Karen avait dit préalablement, même elle tenterait de les sauver. Les survivants manquaient beaucoup trop d’un personnel qualifié pour s’occuper des technologies complexes. Les ingénieurs nains étaient connus pour leur savoir-faire sur les armures médiévales, améliorées par la magie, mais, quand il s’agissait des armures assistées, de composants électroniques, de circuits imprimés, de câbles filant dans tous les sens, ils étaient beaucoup moins prolixes.
Entre-temps, Ciaphas s’était réfugié dans l’un des Baneblades, et personne ne se faisait d’illusions sur ce qu’il voudrait y faire. Après la trahison d’Ekkadon, il avait sérieusement été envisagé de castrer tous les Écuyers des Escouades de Vierges. L’idée avait toutefois été refusée pour des raisons pratiques : il restait si peu d’hommes et de femmes qu’on ne pouvait pas se permettre de castrer ceux qui étaient viables. À défaut, Ciaphas était resté. Contrairement à Ekkadon, qui avait toujours été un bourrin dans l’âme, Ciaphas était l’exact opposé, ce qui, assurément, lui avait empêché de se faire sauter le caisson par Karen dans la foulée, quand elle avait abattu Ekkadon. Elle n’y avait pris aucun plaisir ; elle, elle voulait tuer des Formiens, pas ses propres frères raciaux. Cependant, même maintenant, avec le délitement de l’humanité, cette dernière avait continué à démontrer qu’elle ne méritait pas d’être sauvée. Des mouvements de solidarité spontanées, il y en avait eux, mais il y avait aussi eu l’inverse. Alors que le monde s’écroulait, certains seigneurs médiévaux, certains barons esclavagistes, s’étaient enfermés chez eux, et avaient opprimé leur population. D’autres groupes s’étaient isolés, et avaient sombré dans le barbarisme le plus primaire. En mission, bien souvent, les Vierges avaient dû, non seulement se battre contre les Formiens, mais aussi contre des humains voulant les capturer pour les violer. Il n’y avait aucune raison mercantile derrière ça. L’humanité était à l’agonie, le système économique mondial s’était effondré quand des Formiens avaient pondu dans les coursives du Palais d’Ivoire, ce n’était que de la méchanceté gratuite. Karen n’éprouvait en soi aucune joie à avoir sauvé des humains d’autres humains, alors même que ces derniers s’étaient répandus en remerciements et en larmes sur son armure quand son épée tronçonneuse avait découpé en deux leurs bourreaux dans des caves putrides où ils s’amusaient à écorcher vivants leurs prisonniers pour les manger ensuite... Et encore, si ça avait été le pire... Elle se rappelait également de ces refuges et ces abris souterrains où, pour survivre à la faim, les réfugiés avaient mangé des Formiens, plutôt que de répondre aux appels de l’Ordre. Ils étaient devenus des déments. Comment croire à nouveau en l’humanité après avoir vu tout ça ? Tout ce que Karen voulait, c’était tuer, car elle ne se faisait aucun doute sur l’issue de cette bataille. Les Formiens gagneraient... Elle, elle voulait venger Vapeur. Elle voulait tuer Kerrigan. Ensuite, elle pourrait crever.
Loin des pensées sinistres de Karen, EVA-004, elle, avait terminé de relire toutes les archives sur Fort Victoria. Elle avait été de la création historique de la colonie minière jusqu’à la situation actuelle, et les derniers rapports des sondes et des satellites. L’une des plus belles réussites de l’Escouade-09 avait été de permettre de récupérer dans une ancienne base militaire tekhane des Badlands des schémas et des manuels très spécifiques qui avaient permis de remettre en marche plusieurs paraboles. Par ce biais, l’état-major avait réussi à accéder à d’anciens satellites tekhans qui fonctionnaient encore. Cette récente victoire avait permis une meilleure communication entre tous les Bastions, la communication satellite étant plus efficace, plus rapide, et plus discrète, que les ondes radio, que les Formiens pouvaient intercepter ou brouiller. EVA-007 vit donc Ciaphas s’enfermer dans le Baneblade, et, au bout de quelques secondes, elle sortit de la lecture de ses innombrables archives, puis se rendit vers le véhicule. Elle avait perçu sur Ciaphas, en le voyant passer, différents signes thermiques et physiques, notamment capillaires, ou encore au niveau de la contraction de ses muscles, qui trahissaient ce que, techniquement, les humains appelaient : « une envie de baiser » Le sexe était une chose qui intriguait EVA. Là encore, les androïdes EVA reposaient sur des technologies subsidiaires, car, tout ce que l’Ordre avait réussi à récupérer de ses archives, c’était des schémas d’androïdes que l’Ordre avait pendant un temps prohibé sur Tekhos : les androïdes sexuels. EVA-004, comme ses trois précédents modèles, avaient été conçus en suivant ce modèle. Il en résultait donc que le sexe restait un fondement, et il était d’autant plus fort, chez EVA, qu’elle avait eu accès à la mémoire des trois anciens modèles. Toutes avaient fait l’amour, et en avaient ressenti un profond plaisir... Mais elle, elle était encore vierge, ce qui était d’autant plus troublant que, si sa nouvelle enveloppe corporelle n’avait pas goûté au sexe, elle se souvenait de coïts brutaux.
C’était une énigme pour elle, et, comme toute énigme, elle voulait la résoudre. C’est donc sans aucune réelle pudeur qu’elle entra à l’intérieur du Baneblade. Elle écarta le rideau et tomba ainsi, en moins d’une minute, nez-à-nez avec Ciaphas, dont le pantalon glissait sur ses jambes, révélant sa verge, entre ses doigts. Là encore, ses capteurs analysèrent le corps de l’homme en quelques secondes, et se focalisèrent sur son sexe, mesurant immédiatement sa taille et son épaisseur, la comparant avec les autres chibres dont EVA se souvenait.
« Vous ne devriez pas vous masturber tout seul, Monsieur Cain. Dans le cadre des programmes de repeuplement civil initiés par l’Autorité, la pratique sexuelle est recommandée à plusieurs. Les cas d’impuissance et de frustration doivent être traités par le recours à des sexologues confirmés... Ce qui rentre aussi dans mes fonctions. »
EVA-004 n’avait pas été programmée avec une voix robotique sombre et métallique, mais avec une voix sensuelle et chaude. Sans vraiment laisser le temps à Ciaphas de réagir ou de s’opposer, elle fléchit les genoux, et sa main se posa sur son sexe, venant le masturber. Pour repeupler le monde, la fécondation in vitro était une technique de plus en plus envisagée, et dans laquelle les androïdes comme EVA pouvaient être utiles, notamment en formant, par leurs organismes, de la mouille. Des travaux encore expérimentaux, mais qui étaient envisagés pour permettre de pallier à la disparition des reproducteurs de la planète. En attendant, elle s’exerçait sur le sexe de l’homme, suivant des manuels précis sur l’art de la masturbation... Des manuels datant bien évidemment de l’ancienne époque, avant l’Excellion.
« Laissez-vous aller, Écuyer Cain. Laissez-moi prendre votre sexe en main et vous faire plaisir. J’ai été conçue pour assister l’intégralité de l’Escouade, ce qui implique aussi son Écuyer... Me repousser dans ce domaine ne fera que dire que j’ai échoué dans ma programmation, et me rendra triste... Et vous ne voulez pas me rendre triste, n’est-ce pas ? »
Sa main glissait donc, de haut en bas, serrant et comprimant sa verge. La texture de sa main était douce et chaude, faite pour glisser et pour adhérer, un peu comme la texture d’une peau humaine. Tout en le masturbant d’une main, elle avait rapproché son visage de lui, ses lèvres des siennes.
« Mes lèvres et mon visage ont été conçus pour ressembler à celle de n’importe quelle femme. M’autorisez-vous à vous embrasser ? Je n’ai encore jamais embrassé personne... »
Tout en parlant, et en détaillant le visage de l’homme, elle n’avait aucun problème pour danser des doigts sur son sexe. Est-ce que Ciaphas était beau ? Cette question l’interpellait, et, pour y répondre, elle avait, là encore, analysé son visage, sa corpulence, son sexe, devinant ainsi sa nudité intégrale, et l’avait comparé aux bases de données d’EVA, ainsi qu’aux standards de beauté figurant dans ses paramètres et ses manuels. En vertu de tout ce savant calcul, très compliqué, elle en avait déduit que la beauté de Ciaphas, pour un être masculin, était d’une valeur estimée à « 96.73% ». Et, suivant ses lignes, quand un score de beauté dépassait la valeur des « 95.00% », c’est que le sujet en face pouvait être considéré comme « d’une beauté exceptionnelle, avec des chances extrêmement faibles que le sujet soit encore vierge »... Mais, sur ce point, sa configuration initiale se trompait.
Comme quoi, les hommes pouvaient parfois défier la logique.