L’homme la saisit par l’épaule avec force avant de relâcher sa prise. Zuë recula d’un pas. Elle regrettait déjà son geste mais il était trop tard. Elle n’avait pu se retenir. La peur de perdre son bandage autour des yeux lui était insurmontable. C’était sa seule protection. L’unique chose qu’elle possédait vraiment et qui cachait qui elle était vraiment. Si jamais on le lui enlevait…
La jeune femme fut parcourue d’un frisson glacial le long de sons dos. Elle allait de nouveau tenter de s’excuser platement devant son nouveau maître quand celui-ci prit la parole. Ces mots furent cinglants.
« Non, je ne veux pas de tes excuses, chienne Zuë, je veux des explications, et tu as intérêt à être douée avec les mots pour cela. Car si je puis tolérer que chacun ait son petit caractère, dans une certaine mesure, mais d'un autre côté… d'un autre côté… je ne tolère pas la moindre désobéissance, aussi, si je veux voir te yeux, je les verrai, et le jour où je les verrai tu payeras pour chaque fois où tu as refusé que je les vois… nous sommes-nous bien compris ? »
La jeune esclave hocha la tête sans un bruit, baissant de nouveau la tête. Elle sentit la main de l’homme se rapprocher de son visage et lui caresser la joue. Zuë se braqua, puis se pris une belle claque avant de sentir à nouveau les doigts de l’homme parcourir doucement sa peau.
Mais elle ne moufta pas d’un cil pour autant. Elle était punie, elle avait l’habitude et quelque part, elle le méritait. C’est lorsqu’elle fut mise face contre terre, mordant la poussière qu’elle laissa échapper un léger gémissement de douleur. L’envie de lui arracher la tête passa dans l’esprit de Zuë mais rapidement seulement. Il ne fallait pas imaginer un seul instant qu’elle puisse tenir tête à un tel spécimen.
Son maître lui indiqua alors qu’ils allaient trouver un endroit plus intime afin de la tester. La tester ? Qu’est ce qui passait par la tête de ce fou furieux ? Qu’attendait-il d’elle ? Question idiote. Elle savait bien ce qui l’attendait. Elle vivait ça depuis des années maintenant. Il fallait s’y faire, penser à autre chose.
Elle tenta de se remémorer l’odeur des pins de la forêt et la douceur de l’herbe grasse sous ses pieds (le plus beau souvenir de sa vie), lorsqu’elle fut brusquement inviter à se déplacer. En tendant l’oreille elle devina qu’ils se rapprochaient de l’auberge non loin de là. Evidemment…
Arrivés là-bas, l’homme paya une chambre et mit la clé dans la main de Zuë. Ah. Il voulait jouer. Premier test donc. Il voulait la laisser se débrouiller à trouver cette satanée chambre. Troisième porte à gauche. Bien monsieur…a part obéir docilement que pouvait-elle faire ?
« Tu as toutes les cartes en main pour être prête, je veux régler quelque chose avant, alors je veux que tu sois prête à montrer de quoi tu es capable dès que j'arriverai en haut… tu as cinq minutes... »
5 minutes… largement assez normalement. Mais il ne fallait pas non plus lui mettre un doute sur ses facultés. Elle fit donc mine de tâtonner mollement autour d’elle, contourna quelques tables et tendit l’oreille. Un grincement un peu plus loin signe d’un bois longuement foulés et déjà vieux. L’escalier. Elle prit cette direction et gravit les marches. L’endroit ne lui était pas inconnu, elle avait été amenée ici à quelques reprises dans un contexte presque identique.
Arrivée à l’étage, elle passa sa main sur le mur de gauche et compta le nombre de portes. Elle entendit des pas se rapprocher, quelqu’un la bouscula. Elle se cogna contre le mur et faillit perdre l’équilibre mais garda tout le poids de son corps contre le mur et réussit à rester sur ses deux pieds.
Elle continua d’avancer et, arrivée à la troisième porte elle inséra la clé dans la serrure et la tourna. La porte s’ouvrit dans un grincement sinistre. Elle tendit l’oreille, l’homme était encore au rez-de-chaussée, discutant avec le propriétaire.
Elle entra dans la chambre qui sentait la poussière, le bois pourris et le sexe à plein nez. Zuë grimaça puis s’avança doucement vers les draps qui sentaient presque le propre à quelques mètres d’elle. Elle s’assit donc au bout du lit, reprenant ses esprits. Faire fonctionner tous ses sens était très utiles mais parfois fatigants, surtout dans les moments de stress ou d’angoisse.
Et maintenant ? Que faire ? Elle avait bien compris qu’elle devait montrer de quoi elle était capable. En général elle avait plutôt l’habitude de fermer les yeux et d’attendre que sa passe. Bizarrement elle était toujours en position de soumission et on ne lui demandait pas grand-chose. Celui-ci en revanche avait surement l’intention de la faire participer à son petit jeu malsain.
Zuë eut envie de vomir mais elle se retint. Il fallait être forte. Tenter de se rebeller n’était pas une bonne idée mais dieu sait à qu’elle point elle aimerait pouvoir s’évader d’ici. Chose qui lui était impossible pourtant…
Elle chercha un instant puis entendit des pas gravir l’escalier. C’était lui. Il fallait qu’elle fasse quelque chose. Elle se redressa, et se dirigea vers le mur opposé. Elle buta contre quelque chose et caressa du bout des doigts un dossier de chaise. Elle agrippa celle-ci et recula jusqu’à la porte. Lorsque celle-ci s’ouvrirait, elle se tiendrait prête. Un coup de chaise en pleine face et elle aurait peut-être l’occasion de s’échapper si l’homme était sonné. Il allait voir de quoi elle était capable justement !
La porte s’ouvrit à la volée. L’homme parla mais Zuë se concentra, tous ses sens en éveil et les muscles bandés. Prêts à frappés. Dès que son nouveau maître fut à sa portée, elle laissa retomber lourdement la chaise sur son crâne. La chaise explosa en morceau, un morceau du dossier resta dans ses mains.
Le souffle coupé par l’adrénaline, aucun autre son ne se fit immédiatement entendre. Zuë commença à avoir peur. Si l’homme avait été sonné il se serait effondré à terre mais ce n’était pas le cas. Il était donc toujours debout et ne semblait pas avoir souffert de sa pauvre attaque. Un mouche écrasée contre un mur en somme…
La jeune esclave se mit alors à trembler légèrement, reculant contre le mur qui la soutenait. Elle était perdue. Il allait la tuer. Elle s’était complètement foiré. Elle n’avait pas réfléchit. Quelle stupidité !! Elle pouvait sentir la colère monter chez cet homme. C’était probablement foutu pour elle… -papa, maman… j’arrive…-