Avec mon infinie désolitude pour ce temps de réponse absolument honteux !
Le temps de se remettre en route est donc arrivé ! Il ne faut qu'une poignée de minutes pour que la charrette soit attelée et l'équipage embarqué sur la banquette du conducteur. La petite charrette n'était pas très large, les deux étaient obligés de se serrer. La jeune bergère se plaint-elle ou cherche t'elle à faire déplacer son sauveur ? Certainement pas. Un vague sourire flotte sur le bord de ses lèvres alors qu'elle mène l'attelage. L'ombre de l'horreur qu'elle a failli vivre semble loin de ses pensées. C'est peut-être là l'avantage d'avoir un esprit simple, on ne s'encombre que du présent et on apprend à chasser de sa tête le superflu. L'humeur de la paysanne est maintenant au beau fixe et elle répond aux questions avec entrain.
- Oui toute seule. Sans mes parents. Elle hoche deux fois la tête, amplement.
Je vous mentirai en disant que je manque d'occupation, c'est sûr.
La mention de la perte de ses parents et des rudes conditions de sa survie ne semblent pas émousser le sourire de la jeunette. Elle mène avec tranquillité l'âne docile sur la route sinueuse alors qu'autour d'eux les ombres du soir s'étirent sur la campagne qui les entoure. Et pendant ce temps, au rythme des cahots de la charrette chahutée par les ornières et les pierres du chemin, Marguerite bavarde. Elle raconte sa vie. Une vie paysanne simple et sans artifice qui fait sans doutes écho au passé mystérieux de l'étranger à ses côtés. Une vie laborieuse qu'elle raconte sans se plaindre et avec un optimisme non feint. Et bientôt, le détour d'une route fait apparaitre leur destination : une fermette sans prétention à l'orée d'un village tout ce qui a de plus ordinaire. La paysanne déclare :
- Nous sommes arrivés ! Pour sûr le logis est modeste. Les murs sont en torchis. Le chaume n'est pas changé aussi régulièrement qu'on pourrait le souhaiter et les mauvaises herbes reprennent peu à peu le contrôle d'une cour où quelques volailles s'égayent. Une minuscule bergerie jouxte le corps principal. Des bottes de foin sont visibles dans une grange de taille modeste. Sitôt débarqué, la paysanne ouvre la porte de son logis et dévoile son chez-elle. L'espace de vie de la bergère ne semble composé d'une seule grande pièce. Elle est meublée chichement. Une table et des tabourets en bois massifs occupent le centre de la pièce. Une table et quelques baquets font office de cuisine, juste à côté d'un âtre actuellement éteint. Un rouet et des sacs de laine non filée trainent non loin. Et dans le fond, une unique paillasse est surélevée sur une petite estrade en bois. Bien que petit, l'endroit n'est pas dénué de touches de vie. Des bouquets de fleurs sauvages sont disposés ci et là. Des décorations discrètes mais coquettes ornent la vaisselle en terre-cuite. L'intérieur bien que dénué de toute ostentation est objectivement propre et bien rangé.
Elle a un sourire étrange après avoir ainsi montré son habitat. Une gêne est visible sur ses traits mais en même temps un plaisir qu'elle n'arrive à dissimuler entièrement.
- J'espère que ... et bien ... ca vous conviendra.Elle a un sourire plein de timidité et se triture un instant les mains. Tentée d'abord de baisser le regard, elle finit par oser regarder l'étranger pendant quelques instants avant qu'elle ne semble se rappeler de quelque chose.
- Oh heum ... les animaux. Oui je vais aller m'occuper d'eux ! Votre bidigon devra lui aussi s'accomoder de peu. Il partagera sa paille avec le vieil Aristote. Prenez vos aises, je vais vite revenir. Il y a un peu d'eau dans le baquet si vous souhaitez vous rafraichir.Elle replace machinalement une mèche de ses cheveux derrière l'oreille et après une hésitation, retourne dans la cour pour s'occuper de la ménagerie. Elle mettra quelques bonnes minutes à revenir sans doutes, le temps d'offrir au destrier de son sauveur le traitement qu'il mérite !