Les contrées du Chaos / Re : Krieg ohne Hass
« le: dimanche 17 juillet 2016, 19:33:57 »- Comment dit-on je t'aime dans la langue de ton pays ?
- Je t'aime.
- Non, comment le dit-on.
- Comme chez vous, Princesse. Avec le corps.
- Ne sois pas stupide. Je t'offre mon corps, mais je ne t'aime pas. Comment dit-on je t'aime ? Dans cette langue là. Avec ces mots là.
- Je ne sais pas.
- Tu ne veux pas me le dire.
- Je ne veux pas l'entendre dans votre bouche. Ca me rendrait fou.
- Dis moi. C'est un ordre. Dis moi je t'aime dans ta langue.
- Ich liebe dich. On dit Ich liebe dich.
- C'est laid.
- C'est laid ? Vous êtes remplie de cette langue. Pourquoi ?
- C'est laid."
C'est laid, murmureras-tu encore une fois. Oui. C'est laid. Tu te mureras dans le silence. Tu l'écouteras, tu le comprendras. Tu feras tout pour apprendre cette langue. Mais impossible de trouver les mots. Tu sembleras perdue dans un océan de pensées et de sables. Incapable de refaire jouer les grains à ta guise, cela te déprime. Incapable de parler à ta guise, cela te mine. Même incapable de baiser. L'étranger est mauvais, tes frères sont dégoutés par ce corps qui n'est plus le leur. Pendant vos conversations dans la nouvelle langue, l'étranger te parle de sa famille. La société te semble différente, de son point de vu. Tu remets en question tes traditions. Tu passes tes nuits sans dormir, le regard perdu dans le plafond dont tu connais les aspérités par coeur. Impossible de reprendre ta vie d'avant. Tu ne sais déjà plus ce que tu faisais avant cette réalité onirique. Tu ne sais plus qui tu étais. Tu écris, tu redessines les tatouages qui ont marqués ta peau. Des carnets entier pour les redessiner une fois de plus, comme si tu pouvais t'y accrocher, encore un peu, comme si cela te rapprochait de tes fantasmes. Mais tu coules, tu fonds, tu ne sais pas comment remonter respirer à la surface. Le temps passe et tu étouffes. Tout te semble dégoutant, ton corps t'est étranger. Il en faudra des semaines, il en faudra des mois pour que vous trouviez comment vous échapper. Le moment est parfait, le moment est magique. Quand vous passez ce portail, tu découvres un autre monde. Le sien. Et il te paraît ... Agressif.
" - Je ne comprends pas comment vous faîtes pour vivre ici. Il fait froid. Il fait laid. C'est comme votre langue. Et personne ne la parle ici. Je ... Je n'aime pas ce monde.
- Vous n'y avez aucun pouvoir. C'est cela qui vous rend folle. Avouez !
- Je ne veux pas du pouvoir. Il ne me plaît juste pas. Il est froid. Il est laid.
- Vous vous répétez.
- Immortel. Votre monde est comme le désert. Immortel, sans fin, sans menace. Vous y vivez comme s'il vous était dû. Comme si tout allait de soi. Il y a quelque chose de fou dans votre monde. Il parait tourner seul, et vous ne vous en inquiétez pas. Rien ne va.
- Il vous échappe, n'est-ce pas ?
- Je ne te comprends pas. Pourquoi n'as-tu pas peur ? De n'avoir aucun pouvoir sur la vie. Aucun contrôle sur le monde dans lequel tu survis ?
- Vous n'en aviez pas plus, dans votre Royaume.
- Avant, j'en avais. Maintenant je cherche à retrouver le contrôle. Mon monde ne tournera pas seul, comme le vôtre.
- Bien sûr que si.
- Non. Fin de la conversation.
- Vous êtes capricieuse.
- Tais toi. Trouve ta soeur et tais toi.
- Pourquoi voulez-vous la voir ?
- Tu m'as dit que tu voulais la retrouver.
- Vous devez bien retrouver quelqu'un. Je ne vous vois pas le chercher.
- Tais-toi.
- Rappelez vous... Vous n'avez pas de pouvoir ici.
- Assez pour te faire taire."
Vous l'abandonnez dans cette ville qu'elle ne connaît pas. Vous la laissez errer. Elle a changé votre vision de votre vie. Vous passez de magasins en magasins, de rues en rues, mais tout vous semble tasteless. Elle a sa vision de la vie, si particulière et pourtant si claire. Elle veut pouvoir toucher le monde du bout de ses doigts d'enfant capricieuse. Vous lui obéissez. Elle a cette façon si autoritaire d'être, incandescente. Quand vous vous éloignez d'elle, son regard vous manque, cette yeux de cendres mates, et ces lèvres charnues qui tremblent sous la colère enfouie. Vous obéissez, mais vous êtes incapable de retrouver le plaisir primaire des retrouvailles. Même votre ville qui vous avez manqué, même votre appartement, même votre famille, tout vous paraît inutile maintenant. Vous comprenez finalement ce qui la faisait trembler d'envie quand elle parlait de lui. Vous comprenez la chaleur qui parcourait son corps quand elle évoquait ses cheveux bruns, vous saisissez l'excitation brûlante qui faisait vibrer sa voix lascive quand elle perdait son regard dans le vide en pensant à lui. Elle avait été transie de désespoir de l'avoir perdu. Vous pouvez maintenant comprendre son attitude, elle vous a donné cette maladie d'amour, frivole et pourtant lancinante. Vous attrapez le poignet de votre soeur pour lui expliquer où vous l'amener. Vous lui parlez d'elle, elle vous rit au nez. Elle vous dit que vous êtes fou. Elle est jeune, blonde comme l'or, avec les yeux bleus. Elle a seulement ce petit défaut étrange, avec sa lèvre inférieure coupée en son milieu par une vieille cicatrice. Vous avez toujours trouvé que ça lui donnait son charme fragile. Vous ne pouvez vous empêcher de la trouver trop blonde, trop blanche, trop pure en pensant à votre Princesse. Vous lui caressez le menton pour la faire rire, elle sourit et finit par accepter de vous accompagner. Quel âge a-t-elle déjà ? Votre souvenir de la vie avant de découvrir le désert de feu et de sable est devenu oppressant. Cette vie que vous retrouvez, elle a été capable de vous la faire oublier. Vous glissez l'air de rien une camaraderie sur l'âge de votre soeur, elle vous reprend. Ah oui. Bientôt 19 ans.
" - C'est elle ?
- Présente-toi au moins.
- Je dois la vouvoyer ? Sérieusement, c'est une junkie ta nana.
- C'est pas ma nana.
- Même pas ? Mais c'est qui ?
- Yamiha. On m'appelle Yamiha.
- Putain d'rebeu.
- Tu es Olympe ?
- Tu lui as parlé de moi ? T'es sérieux ? Mais ouais c'moi.
- Olympe arrête d'être comme ça ...
- Avoue, elle fait junkie arabe sortie de la rue de force.
- Est-ce que Anton, ça te dit quelque chose, Olympe ? Anton. Le nom Anton.
- Je ... Ouais. P't-être bien. Pourquoi ?
- Tu veux bien nous laisser ?"
Et il s'exécutera. Bien obéissant le petit, murmure sa soeur. La princesse des sables passe la main dans les cheveux blonds de la jeune femme, l'autre lui parle de ses tatouages. Elle gémira bientôt, allongée sur le sol par la belle orientale, les lèvres brûlantes de la mage se perdant sur sa peau. Elles mêlent leur souffle dans un baiser brûlant, dans un gémissement aigu. Ce soir là, elle prend plaisir à découvrir un corps féminin avec ses lèvres, sa langue se faisant languissante sur la peau blanche de la jeune allemande. Elles roulent sur le drap au sol, s'enroulent dedans, s'endorment, corps contre corps. Le lendemain, la première à se réveiller glisse ses doigts pour éveiller le corps de la brune avec ses ongles. Elle caresse encore ses tatouages, elle vient les dévorer, elle tire la Princesse d'un lourd sommeil. Elle est calmée de cette frustration sexuelle qu'elle ressentait depuis son éveil en pensant à lui. Elle se tourne sur le dos. Elle sourit un peu en voyant Olympe lui monter sur les hanches pour venir téter ses seins. Elle se cambre en arrière dans un couinement adorable, perd ses mains sur les fesses de l'européenne alors que l'autre vante le parfum de cannelle de sa peau ambrée. Quand il entre, il trouve sa soeur en train de faire crier la Princesse comme il ne l'a jamais fait. Il en serait presque vexé si l'image n'était pas tout autant excitante que perturbante. Il claque la porte, et les laisse se perdre dans les méandres du plaisir. Olympe l'a fait tourner sur elle même, se décide à la maquiller à la mode de l'époque et du monde, elle caresse ses hanches avant de lui pincer une fesse. Elle lui dit qu'elle a un corps parfait pour faire du mannequinat. Pourquoi n'en fait-elle pas déjà ? C'est du gâchis. Elles disparaissent dans la ville, toutes les deux, jusqu'à l'appartement de la jeune Olympe, qu'elle partage avec une colocataire étudiante. Elle la met de nouveau nue, ne peut s'empêcher de l'embrasser encore, et l'orientale en profite pour se rassasier. Elle lui prête des habits, elle en fait sa poupée parfaite, assure que ses cheveux méritent d'être mieux entretenus, mêle les couleurs pour qu'elle soit parfaite. Elle lui tend une bière. La Princesse grimace. Elle n'apprécie pas. Elle croque dans une pomme, découvre le fruit, rit un peu. Elles passent ainsi des jours entiers.
" - Alors, Anton, tu le connais ?" La tête de la blonde est perdu sur les genoux de la brune. L'orientale joue avec les cheveux de l'européenne. Olympe semble réfléchir un peu.
" - Ouais, ouais. J'en connais un, d'Anton. Mais on l'appelle Monsieur Siegfried.
- Siegfried. Siegfried. C'est lui.
- C'est notre professeur. Enfin, un de nos professeurs. Tu le connais ? Ca m'étonnerait que tu le connaisses.
- Hm ?
- A quoi tu penses ?
- C'est lui qu'il faudrait que je vois.
- Mais tu le connais ?
- Olympe ... Il faut que je le vois. Anton Siegfried.
- Je sais où il habite. Comment dire ... Ouais je sais.
- Tu peux m'amener ?
- Il aime pas les rebeus. Je suis sûre qu'il aime pas les arabes. Il est genre ... Particulier, t'sais.
- Tu m'amènes. Demain. Demain dans la nuit, d'accord ?
- Mais ... Non.
- Olympe.
- J'ai pas envie.
- Allez, ça sera rapide. On va lui faire une surprise. Toi et moi. Tu le connais bien, hein ?
- Comment ça une surprise ? Genre une merde ?
- Genre une surprise."
Aussitôt dit, aussitôt fait. C'est une surprise. Dans la nuit, la porte est ouverte, le sable étalée, la porte est fermée. Olympe a froid, elle a sommeil. Yamiha l'embrasse doucement et lui dit que c'est bientôt finit. Elle accepte finalement de rester encore. Et elle est poussée, assez soudainement, en avant, par son amante venue des pays chauds. Elle trébuche presque, relève la tête, fait face à son professeur. Elle rougit un peu. Elle pense à Yamiha, cachée dans la rue d'à côté, qui les observe. Elle reste dans l'ombre. Elle se concentre sur la scène, elle enfonce nerveusement ses ongles dans ses mains. Elle se souvient de ses jours qu'elle a passé à se faire saigner la paume des mains, pour lui. Olympe mordille sa lèvre inférieure. Elle se relève de toute sa hauteur, et se rappelle tout ce qu'elle lui a expliqué. Tout ce qu'elle lui a dit. La blonde esquisse un sourire, peu convaincu cependant. Elle porte sa main à son cou et arrache d'un coup sec le collier et le pendentif. Elle n'ose pas le lui jeter. Elle le connaît après tout. Elle lui apporte. Il le reconnaîtra sans doute. C'est celui que la Princesse Yamiha portait au raz du cou, représentant un serpent enroulé autour d'un crâne. Elle lui donne et finit par parler, d'une voix peu assurée. Elle toussote un peu, reprend plusieurs fois. On ne comprend pas bien ce qu'elle raconte. Elle se fait brutalement tirée en arrière, couine de surprise, sous le regard interdit du bel Anton. Elle décale la Blonde.
Yamiha lui fait face. Elle le fixe quelques secondes. Silencieuse.
" - Guten Abend, Anton." Son accent est irréprochable. "Ich war kein Traum. Sie waren kein Wahnbild." Olympe reste étonnée. Elle ne comprend pas trop ce qu'elle fout là, en réalité. Elle recule d'un pas. Avant qu'elle n'ai pu réagir, Yamiha lui souffle de retourner à l'appartement. Elle a des choses à régler avec son professeur. Surprenant, la jeune immigrée allemande obéit pour cette fois, trouvant cela trop surréaliste. La Princesse attrape les boutons de la chemise qu'elle porte, une de celles d'Olympe. Elle tire dessus, sans pitié, pour les détacher, et dévoiler son corps, qu'il doit reconnaître. Elle ne porte pas de sous-vêtements dessous, trop peu habituée à avoir autant de couches sur elle. "Je vous ai retrouvé. Prouvez moi que vous pouvez le faire. " Elle lui montre le sol d'un mouvement de menton. Le sable. Elle se laisse tomber par terre. A genoux. Aura-t-il une réaction ? Elle n'en a rien à faire. Elle glisse sa main dans le sable étalé pour le monter à ses lèvres, l'embrasser, lui tendre. A genoux devant lui, comme à prier son retour. Sa tête au niveau de son entrejambe, sa poitrine nue, son sourire audacieux. Et son regard sombre, perdu dans le sien. "Vous pouvez le faire."
Sait-elle qu'il n'y est pas arrivé jusqu'à maintenant ? En a-t-elle conscience ? Elle le scrute. Elle le prie. Elle le supplie.
" - Vous pouvez le faire, mon Dieu."