Les landes dévastées / Aux marques qui nous laissent amères [ Pv ~ Thanasia ]
« le: lundi 02 octobre 2023, 16:02:57 »Lentement, elle se redressa dans la cage mobile qui lui servait de chambre. Ses vêtements, en grande partie arrachés, ne lui servaient plus qu'à dissimuler le strict minimum. Autant dire que la fraîcheur des lieux agressait son corps, faisant que les trois petites heures de sommeil qu'elle venait de glaner étaient presque un soulagement pour son être passablement meurtrie, elle dont les nuits étaient généralement synonymes d'insomnie à cause de la température ambiante. Enfin, la torpeur passée, elle s'assied dans un recoin de cette prison en perpétuel mouvement et observa les environs. Toujours les même plaines qu'elle avait parcourue le mois dernier. Point de surprise à l'horizon, mais visiblement la journée avait bien progressée, quelques reflets rougeâtres commençant à dominer le ciel. Un spectacle qui raviva une nouvelle fois ses souvenirs, celui d'un acte violent où elle pensait déjà en avoir fini avec les sales races qui s'étaient attaqués à elle, mais où malheureusement les cartes furent redistribuées au beau milieu de l'affrontement, menant à son état des deux dernières semaines.
Cet assaut frontal fut son erreur. Elle ne le comprit qu'au moment où elle commença à sentir ses forces la quitter. Puis son agilité, suivit de sa capacité à réfléchir clairement. Quelque part dans le convoi, bien protégé derrière les panneaux de bois, il y avait un de ces mages humains dont la couardise n'a d'égal que la faiblesse physique. Pourtant, à son plus grand malheur, sa propre charge effrontée l'avait amenée dans le rayon d'action de cet adversaire invisible, ce dernier semblant lui saper une par une ses forces, espérant peut-être ainsi la rendre capturable. Elle n'y comptait sûrement pas. Plus enragée que jamais, la terranide avait alors abandonnée son arme, devenue trop lourde malgré sa force encore titanesque, puis entamée un carnage sauvage en sautant d'un ennemi à l'autre, broyant les os, tordant les jointures, arrachant la chair de ses dents ou de ses griffes... Les blessés s'accumulaient rapidement, assez pour qu'elle puisse croire en sa victoire. Ce fut l'instant ou un ultime sort la toucha; celui-ci réveillant elle ne savait comment la marque du premier sorcier qu'elle avait éliminé. La malédiction éveillée ne mit qu'une fraction de seconde pour envahir son être, et alors en plein élan, la pauvre se retrouva à choir sur le sol, dénuée de toute force, haletante.
Sans le savoir, ils venaient de la priver de ses crocs, de sa capacité à combattre et lutter. Son acquisition fut brutale, plus d'un se permirent de lui rendre quelques bons coups pour se venger de l'humiliation première qu'elle leur avait fait connaître... Puis elle avait été jetée dans cette cage à roues, y perdant alors lentement tout honneur à mesure que les jours passaient.
" Alors chaton, on a décidé de se montrer gentille ? "
L'homme à cheval qui passait à côté de sa cage semblait prendre un malin plaisir à lui pomper l'air, notamment parce qu'il passait quasiment tout les jours pour en remettre une couche avec ses propos disgracieux. Bien sûr, elle avait beau éviter de lui répondre, non sans parler de le foudroyer du regard comme pour lui signifier que si on la tirait hors de cette cage elle se ferait une joie de lui arracher la cordes vocales une par une, il ne s'embêtait pas plus pour revenir à la charge de plus belle. Toutefois, ce crétin aux cheveux sombres et à l'air narquois semblait d'encore plus bonne humeur aujourd'hui, quelque chose qui ne manqua pas d'aigrir un peu plus Karm, celle-ci pouvant parier que ce qu'il allait lui dire aujourd'hui allait sûrement piquer encore un peu plus son coeur et son honneur. Cela ne manqua pas, l'homme constatant qu'elle se comportait de la même manière que les dernières fois, il alla tirer un petit anneau de fer de sa pochette avant de le montrer à la terranide, non sans s'exprimer d'un ton hautain et narquois.
" Tu sais ce que c'est ? J'imagine que les bêtes dans ton genre ne savent pas bien ce qu'est la magie, mais je te présente un anneau enchanté. Devines donc quel est cet enchantement !
- Va pourrir, humain.
- Moi qui voulais te prévenir, comme c'est vilain de parler ainsi. Cet anneau a été enchanté par notre mage. Après avoir étudié la formule qu'il a utilisé pour te dominer, il nous a conçu ces petits bijoux pour que tu sois bien docile avec nous ! N'est-ce-pas merveilleux, tu vas bientôt pouvoir sortir de ta cage ma minette ! "
Le regard salace qu'il posa sur elle ne manqua pas de lui faire comprendre le message implicite. L'envie de le trucider lui monta d'un coup au nez, son souffle s'échauffant pour préparer son corps à lui bondir dessus pour mieux lui déchirer le corps, lui dévorer la chair et lui arracher le coeur encore battant. Mais que ce soit les chaînes qui la maintenait bien ancrée au sol de sa prison, non sans parler des barreaux de sa cage parcourus de petites runes de protection, elle savait très bien qu'une tentative comme celle que son esprit lui hurlait d'accomplir ne résulterait qu'en un échec cuisant et douloureux. Alors elle s'éloigna de ce rat, trouva place dans le coin opposé de la cage, l'ignorant le plus difficilement du monde tandis que les chariots du convois continuaient leur route à rythme lent. La nuit tomba ainsi alors qu'elle se mordait la lèvre inférieure pour ne pas enrager. Jamais elle ne permettrait ces rats de faire ce qu'il voulait d'elle. Il voulait la tirer de cette cage ? Qu'ils essayent, elle saura leur faire comprendre qu'elle est parfaitement capable de lutter face à leurs petits tours de charlatan.
Karm était tant dans ses pensées qu'elle ne remarqua d'ailleurs même pas que les chariots avaient visiblement cessés de progresser. Plus de remous pourtant, c'est ce qui aurait dû lui permettre de s'en rendre compte. Pourtant, bien loin de la tirer de la colère primale qui enveloppait son coeur, l'immobilisme du convoi ne fit rien de plus que l'aider à se laisser porter par sa rage, la femme en haillons se redressant péniblement pour faire quelques pas sur la surface de planche de bois épais. Le manque de nourriture, le manque d'eau, ainsi que son sommeil disparate commençaient vraiment à lui ôter bon nombre de ses forces. Sans parler du froid. Le froid des nuits, presque polaire. Cette nuit encore, elle le sentait déjà, comme s'il neigeait déjà sur ces terres, que la glace prenait forme et enveloppait les lieux d'une température si faible qu'encore ce soir elle allait...
Elle n'eut pas le temps de finir sa pensée qu'elle vit, au travers des barreaux de sa cage, un gigantesque pilier de glace aiguisée se planter dans le sol, arrachant l'herbe et la terre sous son impact dans une gerbe impressionnante. Enfin ses oreilles se mirent à nouveau à fonctionner, la vision de cet objet nivéen complètement invraisemblable l'ayant coupée nette dans la rage qu'elle accumulait dans son esprit. Elle laissa son ouïe faire le travail, entendit au loin, bien devant elle, les bruits d'un affrontement brutal. Hurlements et éclats de rire hautain se mêlait à la cohue de ces barbares idiots tandis qu'ils s'armaient et tiraient parfois de leurs armes à feu rudimentaires. Visiblement, le convoi avait rencontré quelque chose de suffisamment intéressant pour oser tenter de l'acquérir... à moins que quelques créatures monstrueuses se soient prit de l'idée de se repaître de quelques pourceaux à forme humanoïde. Instinctivement, Karm commença à prier les dieux tutélaires de son peuple. Pitié, faites que ce qui est en train de se passer lui donne la maigre chance de s'enfuir, de retrouver la liberté.