Les alentours de la ville / Re : Larmes de crocodile [Nô]
« le: samedi 29 mars 2014, 02:20:25 »La Californienne ne dit rien tandis que Nô se releva, tournant autour d’elle, faisant comprendre à Jane que Mayo avait très certainement envie de lui faire l’amour. Jane se contenta d’un sourire sur le coin des lèvres, légèrement insolent, et haussa les épaules.
« Je pourrais en dire tout autant. »
Entre Mayo et Nô, le contraste vestimentaire était saisissant. Comme Nô, Jane pensait aussi que les vêtements étaient un élément d’extériorité du corps, permettant d’en savoir plus sur la personne à qui on faisait face. C’était bien simple : les pauvres portaient toujours des vêtements de péquenauds, des survêtements aux couleurs criardes, des pantalons moches, des survêtements...Autant de choses qui témoignaient d’une certaine classe sociale. On aurait pu objecter que ce n’était qu’une question d’argent, mais Jane savait qu’on trouvait des chemises à un prix qui était très abordable. Il n’était pas nécessaire de porter un costume fait sur mesure par un tailleur européen pour donner le sentiment d’être puissant : il suffisait d’une bonne coupe de cheveux, d’une chemise rentrée dans le pantalon, et le tour était joué. Jane pouvait tout à fait classer les gens par leurs vêtements, et, même au lycée japonais, qui était un symbole de conformisme, à travers tous ces uniformes, on pouvait voir différentes approches. Certains portaient l’uniforme plus facilement que d’autres. Oui, on pouvait réellement faire toute une corrélation entre la personnalité d’un individu et ses vêtements. Après tout, c’était comme la relation entre le fond d’un écrit et sa forme : « la forme, c’est le fond qui remonte à la surface ». Ça, c’était vrai partout.
Mayo finit par partir, ce qui attrista un peu Jane. Pas de partie à trois, finalement... Néanmoins, elle revint vite à elle-même quand Nô lui demanda si elle était une « bisexuelle extravertie », ce à quoi Jane se contenta d’un sourire goguenard :
« Soit c’est ça, soit je suis une jeune nonne effarouchée. »
Toujours ce ton désinvolte, toujours cet humour incisif, toujours cette tentation à ne jamais vouloir rentrer dans les clous. On pouvait dire bien des choses sur Jane Watson, on pouvait volontiers dire qu’elle était arrogante, égocentrique, moqueuse, méchante, mais, en tout cas, ce dont on pouvait être sûr, c’est qu’on était sûr de ne pas l’oublier de si tôt. Elle crachait sur les marginaux, sur les gens qui se voulaient atypiques en s’habillant comme des poubelles, tout comme elle crachait sur ceux qui faisaient tout leur possible pour se fondre dans le moule. Son honnêteté était déconcertante, car, d’une manière ou d’une autre, elle arrivait toujours à dire ce qu’elle pense, sans se soucier des autres. Elle avait même été jusqu’à se heurter à une Yakuza. Il était probable que, si elle voyait Obama lui griller la priorité à un feu rouge, elle abaisserait la vitre pour le traiter de « sale négro bon à sucer des bananes », pour la forme.
Nô lui proposa alors un challenge intéressant :
« Je te propose d’exhiber ta nouvelle tenue de la façon que tu désires dans le but de montrer ton sex appeal. Si je juge que les résultats sont satisfaisants, tu en seras récompensée. Sinon, et bien il ne se passera pas plus de choses que sous la toge d'un pape
- J’crois qu’on serait curieuse toutes les deux devoir ce qui se cache sous la toge d’un pape » rétorqua Jane avec un sourire malicieux.
Un défi ? Sounds good ! Elle vit ensuite Nô se rapprocher, pour la metre au défi, et Jane hocha la trête :
« Right, darling ! May the show begin ! » lâcha-t-elle en anglais.
Elle portait une belle guêpière, et regarda autour d’elle. Pas de barre pour faire de la pole dance, et, de toute manière, Jane n’était pas très douée là-dedans. Nô lui laissait carte blanche, mais, sur le coup, Jane peinait à voir ce qu’elle pouvait faire... Elle décida donc de revenir à la base : un bon vieux strip-tease. Nell, sur ce point, avait été une bonne source d’informations. Aussi perverse qu’elle, sa grande sœur lui avait déjà fait des strip-teases, et avait plus ou moins éduqué Jane. C’était le genre de trucs dont les mecs se raffolaient, même s’il valait mieux faire attention... Un homme qui a la trique et qui voit un cul remuer devant lui avait du mal à se calmer, et pouvait lui sauter dessus... Surtout si c’était un Américain de bonne famille, un héritier des WASP.
Jane commença donc par lever les mains, les joignant au-dessus de sa tête, puis se mit à remuer, balançant des hanches, devant la femme. Elle fit alors lentement glisser sur son corps ses mains, caressant ses seins, et continua à les faire descendre, le long de ses hanches, puis continua à danser, écartant ses gestes. C’était une danse lente, sensuelle, où elle fixait intensément les yeux de Nô, comme pour la mettre au défi... Au défi d’abaisser les yeux pour observer ce corps qui se dandinait. Jane savait que les Japonais avaient un goût assez prononcé pour la sensualité, et que les Japonais traditionnels refusaient la vulgarité occidentale. La geisha illustrait ce schéma : une geishaavait pour tâche d’éveiller la sensualité de l’homme en étant le plus habillée possible. Un curieux paradoxe, difficilement perceptible pour des Occidentaux baignant dans une culture judéo-chrétienne marquée par l’interdit du nu.
L’apprentie-sorcière se déhanchait donc, en espérant que Nô apprécierait le spectacle. Parfois, elle tournait sur elle-même, donnant ainsi à Nô l’opportunité d’observer sa chute de reins, ainsi que son joli derrière.
N’était-elle pas agréable à voir ?