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« le: jeudi 12 août 2010, 02:48:06 »
Non mais quelle ironie...à croire que sa vie était destinée à porter cette caractéristique comme un sceau. 3000m de chute pour finalement finir noyé, fallait le faire... Il parvenait encore à aligner quelques idées, à demi pris dans les serres de l'inconscience, mais incapable de bouger. Le cerveau refusait de transmettre un ordre aux membres. Cette impuissance l'exaspérait.
Il sentait le sang s'échapper de son corps comme si ce fut sa vie elle-même qui lentement s'écoulait en filet pourpre.
Les secondes s'égrenaient tandis qu'il sentait à présent l'eau envahir lentement ses poumons. Il savait que bientôt il allait même couler. Et cette immonde odeur de chlore ! Il avait toujours eu horreur de ça. Pourtant, cette odeur typique signifiait qu'il était tombé dans une piscine, donc qu'il pouvait y avoir du monde alentour.
A cette idée, une petite chandelle vacillante d'espoir s'illumina dans les tréfonds de ce qui lui restait de conscience. Et comme une illustration, il senti bientôt une petite main mal assurée, puis des bras l'entourer et le tirer. Mais il doutait encore. Peut être était-ce une production de son cerveau privé d'oxygène.
Mais bientôt, le contact froid et dure du rebord du bassin lui prouvèrent qu'il s'agissait bien de la réalité. Puis alors que l'eau libérait ses tympans, il entendit une voix féminine au timbre pas des plus rassuré. C'est que si il y avait des spectateurs dans le coin, il avait du faire sensation. Cette idée ne lui plaisait guère, lui qui était plutôt du genre à vouloir passer inaperçue.
En attendant, les raisonnances de cette voix semblaient vouloir s'immiscer dans les replis de son cerveau jusqu'à titiller et accrocher son esprit comme un hameçon. Il saisit mentalement ce fil d'Ariane immatériel et arriva enfin à émerger.
Dans un crépitement thoracique, il expulsa convulsivement l'eau de ses poumons en tournant la tête sur le coté, puis toussa à s'en arracher la gorge. Enfin, il regarda au dessus de lui, apercevant dans le flou de son regard pas encore tout à fait remis, une vague forme de visage. Il cligna des yeux et vit Elsa, son visage doux au teint si chaud, ses grands yeux noisettes qui le fixaient avec appréhension et ses cheveux qui avaient l'air fais de lumière lui retombant de part et d'autre de la tête, formant une corolle qui, avec le soleil de l'après-midi, l'illuminait d'un halo presque surnaturel.
Instant fugace de bonheur que l'esthète qu'il était n'avait pas manqué, mais qui tourna court lorsque, avec violence, sa blessure au côté le lança sans pitié. Avec une grimace risible, il articula un "oui" qui ressemblait plus à un borborygme qu'à un mot.
Puis il ajouta..ou du moins essaya: "Me...merci...b..beaucoup...vous n'auriez p...pas une comp..comp...raaah ! Compresse je vo..vous prie ?
Puis il porta la main à sa blessure en tentant d'appuyer dessus pour arrêter l'hémorragie.