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Bitia
Un désert, ce n’est pas un très bon endroit pour y implanter une communauté. Surtout un désert dans les landes dévastées, qui doivent bien figurer parmi les zones les moins attractives de Terra. Un ensemble de villes en ruines, de châteaux-forts désolés, de marécages sinistres, de jungles ravagées par des incendies, d’arbres pourris, le tout dominé par d’immenses déserts. Si la chaleur étouffante, l’absence d’eau, les nuits glaciales, ne suffisent pas à décourager les visiteurs, on peut compter sur la faune locale, particulièrement agressive. Les landes dévastées sont par excellence une zone de non-droit où des meutes de monstres sévissent, et où la civilisation se résume à des bandes de raiders et de pillards, des criminels en fuite qui savent que les autorités tekhanes, nexusiennes, ou ashnardiennes, y réfléchiront à deux fois avant de les poursuivre dans cet endroit.
Bitia songeait silencieusement à cela alors que le convoi était en marche. Elle se disait que cette expédition était tout simplement suicidaire, et qu’elle n’aurait jamais du quitter les chambres réconfortantes de sa tour alchimique. La sorcière des sables faisait partie des quelques passagers qui avaient rejoint ce long convoi s’avançant dans le désert pour rejoindre le refuge de la Déesse Bastet, une petite cité perdue dans les profondeurs des sables, entourée de boucliers magiques qui la rendaient virtuellement impossibles à attaquer... A moins d’avoir des complices à l’intérieur pour affaiblir les défenses magiques, et une solide armée dehors.
Le plus difficile n’était pas, en soi, d’être dans la cité, mais bien de la rejoindre. Le convoi comprenait plusieurs caravanes, et amenait tout ce qu’une petite cité désertique ne pouvait pas avoir, soit essentiellement des vêtements et de la matière première, comme du bois. La cité avait un petit oasis pour se nourrir et s’abreuver, mais, dans les landes dévastées, on ne pouvait pas tout avoir. Le convoi venait de la dernière grande ville avant le désert, Balterossa. Elle se trouvait d’ailleurs à l’entrée du désert, et de nombreux convois traversaient le désert pour faire du commerce avec les petits villages isolés et les mines reculées. Le désert était riche en gisements naturels, et faisait la fortune des marchands de Balterossa.
*Bastet... Je sais que ma fidélité est vouée à quelqu’un d’autre, mais je ne peux m’empêcher d’éprouver de la gratitude pour elle...*
Bitia était une sorcière qui avait eu des problèmes pour avoir un enfant. Contrairement à de nombreuses sorcières, elle n’avait qu’un seul mari, qu’elle aimait, et il lui avait donné un enfant. Néanmoins, la grossesse avait été compliquée, et Bitia avait bien failli faire une fausse couche... Et elle l’aurait fait, si la Déesse Bastet n’avait pas jugé bon de l’aider. A Balterossa, Bitia était une figure locale, une marchande philanthrope, qui avait notamment créé une fondation caritative prenant en charge plusieurs orphelinats, afin de les rénover, de les entretenir, et d’éduquer les orphelins. A partir de ces orphelinats, Bitia avait fondé toute une entreprise, utilisant les orphelins comme employés dans des ateliers de tisserands pour faire vivre son commerce. Elle avait eu droit d’enfanter, probablement en raison de son aide.
Le convoi comprenait des hommes du désert, de silencieux nomades avançant sur des chameaux et des dromadaires. Les caravanes étaient tirées par d’énormes aurochs, et Bitia était sur l’un des dromadaires. Elle avait décidé d’accompagner cette expédition pour voir Bastet. Religieusement parlant, Bitia servait la Déesse Sha, mais n’était pas l’une des religieuses les plus assidues du Culte. Elle vouait avant tout son âme à Balterossa, et, depuis l’intervention de Bastet, Bitia avait des doutes sur sa foi.
Elle se souvenait encore très bien de ce qui s’était passé. Chaque jour, Bitia priait au principal temple de Balterossa, et c’était là qu’elle avait accouché. On lui avait dit que son enfant serait mort né, mais, quand elle avait réussi à accoucher, l’enfant était bien vivant. Les prêtres avaient attribué cela à un miracle divin, et avaient déduit que Bastet avait agi. Si Bitia voulait se rendre dans cette cité, c’était aussi pour en avoir le cœur net, et pour remercier la Déesse.
Le convoi s’enfonçait dans le désert, et la tête de Bitia se tourna machinalement vers une caravane. Le hasard avait voulu qu’il y ait dans cette ville une autre femme qui vouait un culte à la Déesse Sha : Kiriko Hattori. Une Celkhane que Bitia connaissait, en l’ayant vu lors des Douze Épreuves de Wallündrill. Bitia lui avait offert l’hospitalité, et avait même fait plus que partager le pain et l’eau, puisqu’elles avaient dormi ensemble. Elle avait beau aimer son mari, Bitia restait quand même une sorcière du Culte de Sha.
Elle pensait à tout ça quand un éclaireur arriva rapidement, frappant son dromadaire pour avancer plus vite. Il tendit la main vers Bitia, comme pour dire quelque chose, et elle put constater qu’il était paniqué. Il n’eut cependant le temps de rien dire, car une flèche se planta dans sa nuque, et l’envoya s’écraser sur le sable. Il y eut alors des hurlements d’avertissement de la part des guerriers protégeant le convoi. On les attaquait ! Des archers se tenaient depuis les dunes, envoyant des flèches sur les caravaniers. Bitia s’entoura d’un bouclier de protection, et deux flèches s’écrasèrent sur ce bouclier.
La situation empira quand des colonnes de sable explosèrent, révélant des formes mouvantes qui avançaient rapidement, pour jaillir hors du sable, prenant alors des formes horribles, avant de fondre sur des soldats, les avalant dans le sable dans des hurlements de douleur et des explosions de sang.
« Djinns ! Des djinns ! hurla l’un des gardes.
- Ce ne sont que des djinns mineurs rétorqua Bitia. Repoussez-les ! »
Les djinns se dissimulaient dans le sable. Ils étaient les esprits des sables, des Élémentaires. Que les pillards des sables puissent en utiliser était troublant. Ils avaient sûrement avec eux un mage.