Le Grand Jeu

Plan de Terra => Ville-Etat de Nexus => Discussion démarrée par: Andrea Leevi le mardi 30 novembre 2010, 21:45:53

Titre: L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mardi 30 novembre 2010, 21:45:53
Quand on y réfléchit bien, la plus belle chose dans le jour c’est la nuit. On peut alors observer le premier décliner, offrir galamment sa place à sa compagne. Faire semblant de disparaitre avec honneur, mais regrettant l’instant fatal où la victoire et la domination lui échapperaient tout à coup. Le moment qui permettait au commun des mortels de profiter d’une fraicheur appréciée dans ces chaudes soirées d’un été particulièrement lourd. Mais la température n’était pas la seule à baisser, et les ombres nées du berceau de l’astre solaire mourraient elles aussi en silence, agonie muette dont personne ne remarque le caractère dramatique qui revient encore et encore. De la multitude d’ombres nous différenciant et marquant nos pas sur les allées pavées des ruelles d’une ville ou de l’autre ne ressortait alors plus qu’une, unique et rutilante de la fierté qu’elle abordait en s’imposant, seule maitresse de la nuit. Linceul d’obscurité qui semblait protéger autant qu’il exposait aux regards, jetant sur les silhouettes qui passaient la même impression de mystère et de danger. Quiconque se livre au regard impartial de la nuit peut devenir qui il veut. Dans cette sensation de liberté, de délivrance n’importe qui pouvait devenir le roi du monde, au moins pour un soir. Dans l’obscurité des rues, la classe sociale, l’âge ou le sexe n’avaient plus aucune importance et seuls comptaient la force, la persuasion ou l’argent. Le règne de l’animal sur l’homme, le monde nocturne qui se réveille peu à peu.

C’est dans ces moments-là qu’Andrea appréciait le plus les rues courant entre les bâtisses l’entourant. Ses heures perdues en journée, elle les passait sans rien faire, profitant de son ancien établissement scolaire pour se rappeler de bons souvenirs. Mais le coucher du soleil lui en rappelait trop de mauvais, aussi se plaisait-elle à se perdre, en ces instants de fuite en avant délibérée, ailleurs. Dans un monde qui ne lui appartenait pas et qui l’enserrait pas après pas, gravant en elle l’odeur de la nuit, celle que l’on reconnait si bien une fois qu’on la côtoie régulièrement. Certains diraient qu’Andy ne vivaient que pour ces instants de liberté, où elle allait enfin contre la volonté de quelqu’un. Tout lui était passé sauf cela, et elle jouissait des règles qu’elle enfreignait, sachant pertinemment que cette illusion de tranquillité n’était qu’un prétexte à la vengeance. Ils auraient raison, ces gens-là. Existait-il un plaisir plus grand que celui de déambuler à travers les fantômes et leurs existences si rapidement oubliées, un confort plus ultime que celui de simplement marcher dans un monde qui démarrait seulement à une heure tardive, dans un endroit que la jeune femme ne pouvait prétendre s’approprier ?

Col de sa grande chemise remonté pour terminer une fermeture appliquée dans laquelle chaque bouton avait un rôle, Andrea croisa son regard dans la vitrine sobre d’une boutique à présent fermée. Son allure n’avait rien d’habituel, elle qui aimait à se balader en uniforme lorsque les rayons du soleil étaient là pour faire irradier ses cheveux blonds. Ce soir, elle ressemblait à toute autre chose, avec son long pantalon de toile bleue rigide, sa longue chemise noire tombant négligemment sur le haut de ses cuisses et remontant consciencieusement jusqu’à son cou, à peine visible dans cet enchevêtrement de tissu. Sa nuque, découverte pour capter le moindre souffle de vent, était libérée de toute mèche de cheveux indésirable, ceux-ci étant habilement remontés et coincés sous un chapeau de feutre gris. Ce dernier descendait un peu sur son front, cachant son regard à toute personne la croisant qui ne ferait pas attention. Dans ce flottement de vêtements principalement adressés aux hommes, Andrea en était presque un. Bien loin de la jupe à volants pour aérer son corps et le préserver de la chaleur de saison, elle préférait très largement cette tenue, confortable et adaptée à toute situation. D’autant plus qu’on lui laisserait d’avantage de liberté si elle n’affichait pas sa féminité. Dernier avantage, Seiji ne viendrait pas à la reconnaitre si jamais il se donnait du bon temps quelque part dans un de ces appartements qui bordaient chaque côté de la rue qu’elle traversait.

Seiji. Rentrer. Trop facile. Inintéressant de se plier aux contraintes simplement pour faire plaisir, même si tout le reste ne la dérangeait pas. Son frère ne lui avait d’ailleurs jamais directement reproché une sortie tardive, une nuit passé dehors. Elle était suffisamment grande pour avoir le droit de faire ce qu’elle voulait, tant qu’elle en payait le prix. Alors oui, rentrer eût été trop simple, en se conformant à ses habitudes, à ses directives. Andrea ne voulait pas se sentir conne, à reprendre à présent le chemin de chez elle, aussi s’enfonçait-elle toujours un peu plus dans les détours de la ville, sans bien savoir où ses pas la menaient. Elle était là, entourée du vacarme des bruits de pas et du silence de conversations qui ne naissaient par ici qu’en pleine journée. Tranquille, une silhouette presque masculine comme toutes les autres, à qui on ne prêtait pas plus d’attention que nécessaire. Ce soir, elle faisait partie du décor et embrassait le paysage qui la portait sans crainte. Et puis rentrer, c’était aussi ne pas dormir. Ne jamais fermer les yeux avant de payer son dû, mais ne pas sombrer après l’avoir payé. C’était les insomnies, les cauchemars éveillés qui la faisaient sursauter sans cesse. Alors tant qu’à ne pas réussir à se reposer, autant errer dans les rues et profiter de la chaleur étouffante. Celle-là même qui la faisait transpirer sous sa chemise, collant quelques mèches blondes sur le devant de son front, alourdissant sa démarche.

Andrea aurait aimé échapper à cette peur de dormir, à cette incapacité à se reposer dans la même maison que celle qui l’avait vu grandir. Et tant qu’elle n’en prenait pas les moyens, la jeune femme en serait réduite à dormir là-bas, tout du moins à s’allonger dans un lit jamais totalement défait. Les draps flottaient sur son corps immobile, ses pensées vagabondant toujours vers des souvenirs assez désagréables. Si seulement elle pouvait écarter d’un revers de main la réalité pour en enlacer une autre. Plus douce, plus belle. Moins douloureuse, moins fatigante. Andy aurait voulu s’assommer et dormir à n’en plus pouvoir, souffler au bouillonnement de ses veines de se taire, supplier les murmures de sa respiration de se calmer. Prier ces anges vicieux du sommeil qui en piègent plus d’un, tentateurs dans leur déchéance. Mais voilà, il n’en était pas moins une réalité affligeante et lourde de pitié. Une jeune femme à l’apparence un peu trop asexuée, aux pensées vagabondantes et aux cernes se creusant chaque soir un peu plus sous ses yeux azurés. Une pauvre âme en peine qui ne regarde pas devant elle, et finit immanquablement par ne plus trop savoir où elle est. Et si elle avait pris une ruelle qui l’avait menée loin, bien loin de sa Terre natale ? Et si un autre monde s’étalait sous ses pieds sans qu’elle le remarque, sans qu’elle s’en soucie ? Possible. Mais cela n’a aucune importance, aucune influence sur Andrea. Une femme qui n’avait aucune preuve apparente de ce qu’elle était, une gamine hésitante, un homme que l’on oubliera bien vite. Et un juron, qui se perd dans la nuit non pas par des sonorités nippones bien connues mais dans une langue plus froide, révélant avec art une culture de la même trempe. Un mot, scandinave. Finlandais. Que tout le monde comprend comme suit :

- Et merde.

Tout d'un coup, notion de perdition et regrets qui s'installent. Andrea ne savait plus où elle était, à force d'errer sans but.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 01 décembre 2010, 10:21:20
La stratégie nous enseigne d'apprendre de nos erreurs, pour ne jamais réitérer un exploit qui nous serait défavorable. Comme, par exemple, sauter dans une falaise au-dessus de récifs. Quoique dans ce cas-là, la personne qui plongera aura de grandes chances de ne plus pouvoir faire d'erreur... de ne plus pouvoir rien faire du tout. En vérité, l'humain est cruellement attaché à sa bêtise, et malgré l'auto-persuasion permanente qu'il s'inflige ("je ne le referais plus, je ne le referais plus, je ne le referais plus.."), il finit toujours par perpétrer la même connerie qu'autrefois. Combien de femmes auront vécu un énième couple malheureux après s'être juré de garder un célibat préservé des affres de l'Amour ? Combien d'hommes auront été ruinés, après avoir juré ne plus dépenser un seul sou dans une établissement de jeu ? Et combien d'idiot auront sauté une deuxième fois de cette falaise, pour épater la galerie ?
Concevons que ces cas de figures sont tous particuliers, mais leur source est toute la même : Le vice. Le vice, Law le connaît par coeur, pour faire son business dessus. L'alcool. La drogue. Le sexe. L'argent. Le pouvoir. Ces 5 mots résuments l'industrie du crime, et l'industrie de Law. Mais pour réitérer une erreur, la composante essentielle à l'accomplissement de cette erreur vient du risque. Sans risque, pas de frisson. Sans frisson, pas d'intérêt. Sans intérêt.. pas d'action. Et donc, pas d'erreur.

Pour une fois, c'est Law qui s'aventure dans ses travers. Il met une sacrée claque à son prétendu "culte de la sécurité" en s'engageant seul dans ses rues. Il ne revient pas d'une réunion occulte, il ne vogue pas entre ses établissements. Non, il a simplement décidé de faire une balade. Retrouver l'odeur de la rue, de cette chienne qui l'a tant fait souffrir et qu'il a désormais domestiqué. La rue n'a rien d'un lieu merveilleux et unique pour Law, lui pense simplement qu'elle se prostitue, elle se vend au plus offrant, au plus courtisant ; parfois, elle sait se parer de ses beaux atouts. Mais les leurres ne prennent pas. C'est dans les bas-fonds que se révèlent sa vraie nature. Elle prend, elle retient, et elle tue. Combien de gens se sont résolus à dormir en son sein lorsqu'ils n'avaient plus de foyers ? Combien de pauvres types se sont fait buter dans ces artères et ces impasses à la suite d'un différend ?
Il sait. Il sait tout d'elle. Lui aussi y a dormi, et lui aussi y a tué.

Entorse à son protocole de sûreté donc, qui l'oblige habituellement à se balader avec ses colosses rôdés aux arts du combat, alors qu'il est actuellement seul. Engouffré dans l'un des plus sombres réseaux d'allées de la capitale, il venait de refourguer une petite fiole de sérum hallucinogène à un bon père de famille. Les pires. Ils se défoncent et baisent comme des chiens, mais n'assument pas. Ils se font passer pour des gens corrects. Ils ne supportent pas d'avoir des besoins réprouvés par sa société modèle, le style de vie bourgeois, là où ils se gaussent des plus pauvres. Pfeuh. Law vendait sans faire de distinction, peu lui importait le client, et l'utilisation qu'il devait faire de son produit.
La transaction terminée, il s'enfonçait plus profondément dans le vice et la meurtrissure de cette cité. Il croisait un type avec qui il s'était battu, bien qu'il en soit pas certain que ce soit le même bonhomme. Il le regardait à peine, et le type ne l'avait même pas vu. Plus loin encore, un type, et une prostituée affairée à son travail. Rien de bien singulier. Il les esquivait, bifurquait pour une autre ruelle. Plus rien désormais, le silence.

"Et merde."

Du finlandais ? Hm. Une égarée, peut-être. Une de plus. La voix était proche. Le loup humait l'odeur de la chair fraîche. Ca y est, ses sens étaient en éveil. Il violerait peut-être ce soir, pour changer de ses habitudes. Malgré tout, ça l'embête. Il a de nouvelles esclaves à dresser, et il veut être au top pour elles. Bon, voyons le morceau.
Il se rapproche, et s'engage dans le boyau où elle se trouvait. Derrière elle. Son long manteau de cuir devra se tenir à carreau, et ne pas faire un bruit donc. Il s'approche. Un homme ? Peut-être un jeune garçon.. Il n'est pas friand des jeunes garçons. En esclavage alors ? Bon. Tentons de faire preuve de retenue.


Hey. On est perdu ?

Et tout cela dans un finlandais parfait, sans accent étranger et sans accroc dans la voix.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 01 décembre 2010, 16:34:16
Il y a des lois dans la vie qui se targuent d’être absolument et définitivement immuables. On n’y touche pas, on se contente de les observer de loin, éventuellement de leur faire coucou de la main. Mais surtout, on acquiesce lorsque leur réalité en vient à se poser sur nos épaules. Qu’on les aime, qu’on les haïsse, qu’on les comprenne, peu importe : il faut s’y faire. Parce qu’une loi universelle qui vous botte le cul, ça fait mal. Et elles sont nombreuses, rutilantes et d’une diversité tout en sourires teintés d’interdits. Elles vous narguent avec facilité, vous passent sous le nez de temps en temps pour se rappeler à vos bons souvenirs. Des exemples ? Si l’ampoule électrique de votre salle de bains claque, ne gueulez pas - jusqu’ici, il n’a pas encore été prouvé que de brailler y changerait quoi que ce soit. Quand l’étiquette d’un yaourt vous informe du dépassement de la date de péremption, ne le reposez pas dans votre frigo afin de l’y laisser une semaine de plus ; ça n’arrangera pas la fiesta des bactéries. Ne hurlez pas non plus à votre chien de la fermer lorsqu’il aboie : si vous vous attendiez à l’entendre miauler, c’est que vous vous êtes trompé de film. La pluie mouille. Un son n’est jamais qu’un agencement de décibels capables de refroidir l’atmosphère. Une tartine beurrée retombe sur ses pattes et un chat, sur la face tartinée. Ou l’inverse. Bref, ça tombe. Et, dans le cas de la première, vos jurons n’y changeront rien.

Et quand votre boite de clopes est vide, c’est que vous n’en avez plus. Inutile de la retourner encore et encore et de l’examiner sous toutes les coutures comme Andrea le faisait à présent. Personne n’a encore inventé la vingt-et-unième cigarette sacrée. Cependant, tout ceci ne touchait jamais qu’à des éléments purement matériels. Il était d’autres lois, plus gracieuses encore, ne s’appliquant qu’en égard aux dieux. La première d’entre elles était : quand Andrea Leevi fait la gueule, ne venez pas en rajouter une couche. La seconde était : quand Andrea Leevi fait la gueule, ne venez pas en rajouter une couche. Et la troisième : si Andrea vous demande d’aller vous faire voir, c’est une idée que de l’écouter. Encore faut-il qu’elle le fasse, me direz-vous. Certes, certes. Et la jeune femme n’était pas stupide au point d’envoyer bouler le premier venu, trop sûre de ce qu’il se passerait si quelqu’un l’agrippait par le col de sa chemise dans le but de réparer un affront, pour dévoiler dans le même son visage, et sa faiblesse tant qu'on y est. Elle préférait alors baisser les yeux et prendre sur elle, vérifiant encore et encore son paquet de cigarettes. Elle le savait, elle n’aurait pas dû griller la dernière ce matin. Cela avait été une grossière erreur, puisque quelque chose démangeait cruellement ses doigts en manque d'action.

Écrasant sans ménagement la boite de carton entre ses phalanges, Andy poussa un long soupir sans même se douter qu’au même instant, quelqu’un se trouvait à quelques mètres d’elle à peine. Perdue qu’elle était dans un endroit qu’elle ne reconnaissait pas, sans le soutien de sa chère fumée cancérigène, elle ne prêtait attention qu’à sa lamentable situation dont elle aurait pu, à postériori, rire. La journée n’avait pourtant pas si mal commencé, lorsqu’elle y pensait. Émergeant sous le coup des dix heures, Andy avait vaguement été tirée du lit par une sonnerie stridente de réveil. Elle qui était enfin parvenue à s’endormir, à moitié évanouie de fatigue sur son matelas, voilà qu’elle s’était faite réveiller par cette saleté de réveil qui ne lui appartenait même pas. Mais tout cela était habituel, en quelque sorte. Ce matin donc, elle n’avait pas ouvert les yeux avant de sauter au bas de son sommier rayonnante et pimpante. C’était plutôt le sol qui était venu à sa rencontre prématurément, comme si son propre lit l’éjectait. Ouvrir une paupière. Une, pas deux. Histoire de commencer doucement, et la seconde avait suivi bien plus tard. Réveil encore et toujours difficile, mais qui se faisait tranquillement normal dans son existence.

Alors qu’Andrea pestait encore quelques mots dans sa langue natale, elle entendit une voix s’élever juste derrière elle, ce qui la fit se retourner vivement. Surprise, elle ne s’était pas attendue à tant de discrétion et cela la fit se mettre immédiatement sur ses gardes, peu sûre de ce qui arriverait dans ces rues. Elle se trouvait face à un homme, qu’elle ne fixa pas longtemps. Sans prendre le temps de le dévisager, elle baissa les yeux et insista sur la chute de son chapeau sur son front. Difficile, dans une telle situation, de se faire découvrir. Restait la question de la réponse. Cet inconnu venait de lui adresser la parole, et Andy n’avait pas spécialement envie d’énerver quiconque dans ce quartier, même dans le but de préserver son identité. Mais ce qui la poussa à réagir, ce fut bien évidemment la langue qu’il avait pris la peine d’employer. Elle n’y décelait aucune faute de diction, et il avait même l’air de mieux maitriser qu’elle des sonorités qu’elle se pensait seule à posséder par ici. Rendant sa voix un peu plus grave qu’à l’ordinaire, Andrea s’aida des intonations du finlandais pour ne pas se trahir avec trop de facilité. S’il était observateur, cela ne durerait pas longtemps. Mais avec un peu de chance, ce n’était qu’un balourd de la rue qui ne prêterait pas attention au petit jeu de ce jeune homme. Oui, avec un peu de chance.

- Egaré, momentanément seulement. Pas de quoi vous inquiéter.

Andrea avait envie, ce soir, d’être quelqu’un en capacité de renvoyer ce curieux dans sa solitude afin de la laisser profiter de la sienne. Elle aurait aimé pouvoir l’ignorer, mais la diligence était encore sa meilleure arme, étant donné que le reste ne lui servirait ici pas à grand-chose.
 
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 01 décembre 2010, 18:13:52
La règle d'Or du parfait petit castor junior, celle qui prime sur toutes les autres : Toujours avoir de quoi palier à n'importe quelle situation. Et voilà ce qui en coûte à Andrea de ne pas être une vraie castor : Elle est dans une situation de merde, et en plus, sans clopes.

Law a un attirail impressionnant dans son manteau, ses vêtements, et disséminés sur son corps. D'abord, le plus important de tout : De quoi manger, et boire. Un sac en papier de gâteaux secs, avec une toute petite bouteille d'eau, de quoi se sustenter pendant toute une journée. Ensuite, un arme ! L'arme permet de se défendre contre une autre arme. Le Fier préfère utiliser ses poings, mais jamais sa dague ne lui paraîtra superflu en combat, parce qu'elle est une assurance supplémentaire de ressortir vainqueur d'une situation qui paraîtrait ombrageuse au péquenaud moyen. Vient après l'engin explosif. Un dispositif très peu puissant qui ne fera pas tomber une maison en ruine, mais qui, à coup sûr, pourra tuer un homme si Law se trouvait dans une situation vraiment compliquée - au risque de se faire sauter avec, et donc de perdre un bras, voire même la vie (soyons fou !). Ajoutons quelques menus bricoles qui rendent l'attirail vraiment passe-partout : une seconde lame plus petite (pour la nourriture), un peu de drogue pour la revente ou l'utilisation sur autrui, un archaïque briquet qui fonctionne à merveille, une fine corde qui doit bien faire, complètement tendue, ses 3 mètres, quelques feuilles, un crayon, de l'argent, un manuel des castors juniors, quelques bonbons, une reconnaissance de dette d'un noble. Pour lui, tout avait son utilité plus ou moins précise.
Ha, et surtout, des clopes.
Une boîte en métal garnie de ces "outils à lent suicide" précédemment extraite de l'intérieur de son imper qu'il tendait vers Andrea après s'être lentement rapproché, d'où dépassait l'une d'elle mise en évidence exprès. Les tiges artisanales de Law ne sont sans doute pas comparables avec les merdes industrielles dont la jeune fille respire les émanations fumeuses. Il restera comme ça, le bras tendu, jusqu'à ce qu'elle prenne, ou refuse.


Si, j'm'inquiète. T'es pas le genre de personne qui traîne habituellement dans les bas-fonds. Papa-Maman t'ont jamais dit de pas sortir dans des endroits comme ça après le coucher du soleil quand t'étais jeune ?

Offensant ? Bof. Même pas. Il était à son minimum, là. Andrea ne va sûrement se mettre à pleurer. Pas pour l'instant.

Wodan. Je m'appelle Wodan. Qu'est ce que tu glandes ici, tu cherches à te faire piquer ta thune ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 01 décembre 2010, 18:44:54
Y’a de ces jours, on regrette de ne pas être resté au pieu. Quitte à bouffer n’importe quoi planté devant la télé, la vie est belle quand on s’ennuie ferme au point de ne pas décoller les fesses d’un matelas qui devient, au fil du temps qui passe, tout sauf agréable. Des journées comme ça, il y en avait à la pelle dans l’existence d’Andrea. Des heures à passer le corps affalé contre un drap, la tête à moitié dans les nuages, à ne rien faire du temps qui se carapate. Combien de fois elle était restée ainsi toute une journée, mangeant quand son ventre grondait, passant des moments indescriptiblement longs à tenter de dormir ou à imaginer ce qui se passait dans la vie des gens ? Lui, monsieur tout le monde, qui va bosser tôt le matin avec son costard repassé de la veille, sa femme au foyer et son gosse brayant dès les premières lueurs de l’aube. Le junkie du troisième étage de l’immeuble d’en face qui passait son temps à se remplir les veines pour acquérir un énième laisser passer pour l’hosto. Andy croyait au jour béni où les ambulances ne retentiraient plus, où l’Epouvantail n’aurait plus l’intelligence de s’arrêter avant la mort. Histoire de pouvoir appeler au secours.

Un lapin dans une cage, voilà ce qu’il était. Tentant de s’enfuir, sans réussir à obtenir son aller simple pour l’autre monde, sans parvenir à se libérer enfin totalement, se débattre. Et Andrea aimait le voir revenir, attendant patiemment qu’il recommence, encore et encore. Un lapin face à un prédateur, c’était un peu ça aussi, ce soir. Pauvre petite proie tremblante intérieurement, à la fois détachée de ce qui pourrait lui arriver et inquiète que son instinct de survie ne se réveille. Contradiction merveilleuse de l’être humain dont l’inconscient cherche toujours à se protéger. Et si Andy se sentait aussi démunie que l’Epouvantail face à la mort, elle aurait aimé avoir la force du père de famille qui se bat tous les jours pour du vent, du vide. Puisque les sentiments ne se voient pas, puisqu’ils partent en fumée, c’était un courage héroïque ou une folie pure que de se battre pour les obtenir et les chérir. Qui, du junkie qui nage dans la réalité ou du quadragénaire croyant à des chimères invisibles devrait donner l’exemple ? Andrea choisissait son modèle, fuyant le monde obscur des émotions pour se réfugier dans la tangibilité du danger. Un lapin face à un prédateur dans une cage, un prédateur face à une proie en cage. Au choix.

Et la boite de métal rutilante qui avait surgie devant son nez lui donnait ce même effet de liberté, de soulagement et de danger. La réalité est là, dans une simple clope qui a l’air bien plus complexe que celles de d’habitude. Andrea hésita l’espace d’un instant, son éducation tentant de la pousser vers le vieux monsieur aux croyances dépassées. Elle préférait l’Epouvantail. D’un geste qu’elle voulait sur, Andy vint se servir à la source, sa propre proie étant tendue et accessible, criant de venir la cueillir et de la savourer avec plaisir. D’un signe de tête rapide, elle remercia vaguement l’inconnu. Le pas était franchi, il y avait plus qu’une simple injonction entre ces deux êtres qui ne se connaissaient même pas.

Et voilà que l’autre en venait à lui faire des remontrances. C’est tout juste si elle ne se sentit pas obligée de tendre les doigts pour se les faire taper. Pas offensée pour un sou, la jeune femme ne pouvait cependant retenir sa langue. Peut-être l’effet du coin pas trop touristique, sans doute l’envie irrépressible de chaque Homme à faire ses preuves.

- Je suis quel genre, alors ?

Pause, menton qui se relève un peu histoire de jeter un regard furtif vers la machoire de l’inconnu qui s’agitait lorsqu’il prenait la parole pour se présenter et en rajouter une couche. Puis reprise, un peu plus assurée.

- Faudrait déjà que j’en aie, du fric. Et je crois pas que ce que je puisse faire ici te regarde.

Impolitesse la plus totale, alias gros risque. Andrea ne prit cependant pas la peine de le regarder, et sortit un briquet de la poche de son pantalon pour allumer finalement le cocktail bizarre que ses lèvres enserraient à présent. Dans cette tenue, elle se permettait bien des choses. Ses mots dépassaient sa raison, sa pensée applaudissait des deux mains. Restait à espérer que ce Wodan -si c’était un nom véridique- ne soit pas du genre violent. Mais Andrea ne savait pas pourquoi, elle avait comme un sérieux doute sur sa dernière affirmation. Qu’est-ce que son esprit pouvait bien faire pour oublier son rôle de contenir les conneries qu’elle se savait capable de débiter à la seconde ? Cet air arrogant était un visage qu’on ne lui connaissait que peu, et si elle l’abordait ici c’était que son allure lui donnait une certaine confiance, comme si elle tentait de croire à toute cette mascarade. Elle si souvent fragile en jupe de lycéenne n’avait rien à faire là, à fumer n’importe quoi et se montrer dédaigneuse avec le premier type qui passait.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 01 décembre 2010, 19:11:56
... OK.
La page 38 du Manuel des Castors Juniors (je l'aime bien celui-ci, j'le ressortirais souvent maintenant) est clair à ce sujet :
"Si quelqu'un t'es désagréable, fais-lui avaler ses dents."
Bon, c'est une vieille version, et elle constitue peut-être un trop gros outrage pour être actuellement distribuée dans le Picsou Magazine. Tant pis, les lecteurs ne savent pas ce qu'ils ratent.

Law commence déjà à fulminer. C'est un changeant, son humeur fait sans cesse des bonds, prend des virages, emprunte une singulière artère, y fait demi-tour pour rouler en contresens, joue incessemment avec le bouton de l'ascenseur. Bref. Pour l'instant, il a envie de rester calme. Alors il inspire calmement, vidant ensuite bruyamment ses poumons - purs, vu qu'il n'a pas prit de clope pour lui. Il dissimule l'écrin dans son manteau, et reprendra son souffle encore une fois. Zen, a dit Bouddha.


Tu es censée me donner ton nom après que je t'ai donné le mien. Et t'es aussi censée te montrer courtoise avec un type qui pourrait te donner comme repas les briques pourries du mur contre lequel il t'aura violé auparavant.

Là en revanche, ça apparaissait clairement comme une menaçe. Sa main gauche, qu'il tente de rendre discrète, titille le poignet du couteau savamment fixé par un système de lanière à son bras, qu'il a défait pour l'avoir à portée de main au cas où la situation devait dégénérer. Mais Law le savait : Si telle était la suite des évènements, ce sera sûrement lui qui aura détérioré les circonstances. Law est un destructeur de nature. L'amélioration pour l'annihilation ; L'annihilation pour l'amélioration. Mais il n'était pas défenseur du chaos et de l'anarchie. Il tenait absolument à un ordre respecté, où les gens continueraient à trimer, à souffrir, à se ronger et à en mourir, et tout cela pour rien, sans comprendre qu'ils pourraient très bien faire la même chose pour devenir meilleurs, atteindre un stade supérieur. Il ne vise pas l'extinction de la race, mais bien son perfectionnement.

Bande d'inutiles. Ils ne comprenaient rien de toute façon.


T'es sûrement pas du genre à bouffer des briques, alors tu devrais profiter qu'un donateur de clopes sois là pour, éventuellement, protéger ton cul si t'en avais besoin.

Elle devait se douter, et il s'y attendait, que Wodan était le type de personnes contre qui il vaut mieux avoir un garde, un abri, ou n'importe quoi qui permettrait de préserver ses fesses en sécurité.
Et si l'on devait lui poser cette question, est-ce que c'était son type ? Il répondrait allègrement : Oui.

Ici, loin de la civilisation, et de son monde, elle était vulnérable, jupe ou pas. Aucun oripeau ne pourrait la protéger d'un véritable prédateur. Law a d'ailleurs hâte de lui arracher ses vêtements le plus sauvagement du monde, et lui faire regretter amèrement son impertinence. Crier grâce ne suffira pas, et des excuses non plus.
Ca y est, son esprit commence à être transpercé de ses idées les plus malsaines.

Mais la vraie tragédie, c'est que le manuel ne dit rien à propos de ce genre de pensées.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 01 décembre 2010, 19:45:21
Ouais, bon. Faut dire que y’a des gens parfois un peu dénués de raison dans la vie. De ces gens qui tentent quelque chose juste histoire de voir si ça marche. Ou pas. De ces gens qui vont te faire exploser leur maison sous prétexte de vouloir devenir prix Nobel. De ces gens qui atterrissent aux urgences en s’improvisant cracheur de feu. De ces gens qui élèvent simplement un peu le ton contre quelqu’un d’inadéquat. Un peu comme Andrea, avec sa raison à deux sous à peine qui ne servait absolument à rien, alors que son rôle est de clore ses lèvres quand elle commence à dérailler. Et, oups, apparemment elle y est allée un peu fort. C’est ça, de croire que même quand on sait que ça va mal finir y’a toujours peut être un espoir. C’est ça d’être naïve au-delà du raisonnable, de ne rien connaitre de la rue, de la boue dans lesquels les perdants vont se rouler. D’ignorer encore un peu, de faire semblant que le monde n’est pas dirigé par les plus forts. De croire que le despotisme du pouvoir n’est pas une réalité avérée. C’est Andrea.

Au soupir difficilement maîtrisé de Wodan, Andy sentit immédiatement que c’est malchance pour elle. Monsieur n’a pas l’air patient, et ce n’est certainement pas quelqu’un de prêt à comprendre que ce n’est pas sa faute, pauvre petite proie qui ne sait pas ce qu’elle dit. Encore faudrait-il que la demoiselle s’y abaisse. Car quand Andrea s’engageait sur une voie, ce n’était pas pour en changer. Et puis, aux dires soudainement jetés avec colère qui se perdirent dans ses tympans, il était un peu tard pour s’excuser. Alors quoi, il allait lui faire subir outrage sur outrage ? La prendre pour une marionnette et la jeter une fois qu’il n’en aurait plus besoin ? Hum. A vrai dire, Andrea s’en fichait. Elle était l’Epouvantail, à ne plus rien ressentir. Mais elle le dépassait, et en venant ici elle devait bien s’avouer que la fin ne lui faisait pas peur. Elle n’avait pas spécialement hâte de se voir disparaitre, mais rien ne la retenait à cet endroit ou même ailleurs, et se raccrocher désespérément à un monde qui ne veut pas de vous est une attitude des plus ridicules. Alors oui, les paroles violentes que lui jeta Wodan ne la firent pas ciller. Elle avait peur sans en avoir conscience, et seule la sueur perlant de son front pouvait la trahir.

Alors enfin, la jeune femme remonta son bras jusqu’à son crâne et repoussa le bord du feutre sur les hauteurs de son front, laissant se dévoiler son regard encore gorgé d’aplomb que toute femme de son âge n’aborderait pas en une telle situation. Elle planta ses grands yeux dans ceux de son individu et put enfin le regarder vraiment. Des cheveux couleur chocolat, mais sans cette douceur sucrée qu’on retrouvait parfois dans des cascades auburn. Aucun reflet n’attirait le regard, pas de lueur maligne qui se dissimulait entre les mèches. Une carrure importante, pour une taille des plus classiques. L’homme qui se tenait en face d’elle avait globalement le profil qu’elle s’attendait à voir. Elle l’imaginait seulement plus grand, et ses grandes jambes à elle la faisait presque le rattraper. Puis Andrea resta un petit moment silencieuse, avant d’hésiter puis de finalement reprendre la parole. Rien ne lui servait de mentir et de se confondre en excuses auxquelles elle-même ne croyait pas. Une brutale vérité, sans moquerie, ne serait pas plus efficace mais sans doute pas moins.

- Andrea, si tu y tiens. Mais pour la courtoisie, je vais avoir du mal. Et pour le reste … ça marche peut être sur la plupart des gens que tu croises mais sérieusement, je m’en fous.

Et aussi surprenant que cela pouvait paraitre, c’était vrai. Le sexe n’était rien d’autre qu’un banal acte, comme se faire la bise. Pour elle, ce n’était pas plus dégradant ni plaisant qu’un serrement de mains. La plupart du temps, elle faisait semblant d’aimer ça pour combler des partenaires qu’elle appréciait alors qu’eux seuls éprouvaient le besoin de copuler. Le reste du temps, elle s’en fichait totalement. L’atteindre avec ça était une bien mauvaise méthode, ce qui démontrait clairement des quelques cases qu’il manquait à son esprit.

Andy ne remarqua pas le geste furtif de Wodan, pas plus qu’elle ne s’en soucia. Il reprenait d’ailleurs déjà, dans un langage aussi châtié qu’auparavant qu’elle ne relevait même pas. Qu’est-ce qu’il voulait exactement ? Qu’elle le remercie ? Qu’elle tremble devant lui ? Qu’elle le supplie ? Il n’aurait certainement pas les deux dernières options. Il n’y avait aucune raison, c’était tout juste si elle s’était montrée un peu froide. Si cet homme s’énervait autant pour si peu, c’est qu’il devait avoir une intolérance brusque et intense à la frustration, et que son ego prenait une place disproportionnée dans sa vie. Elle faillit le lui faire remarquer, pour opter finalement sur autre voie, qui lui semblait en effet relever de la plus élémentaire politesse. Ou presque, vu comme elle le formula.

- Ta clope, je te la rends si ça te pose problème.

Et zut, au départ elle aurait dû le remercier. Oh et puis tant pis, advienne que pourra. Dans tous les cas, elle s’en fichait presque intégralement. S’il tenait à asseoir son autorité et s’il n’était venu lui parler que pour ça, autant qu’il le fasse rapidement. Andrea tira une dernière taffe de la cigarette qui lui pendait aux lèvres avant de la tendre vers son propriétaire originel. Quitte ou double.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le jeudi 02 décembre 2010, 13:38:11
Blasé, blasé. Il était désabusé de toute cette mascarade. Cette fille lui tenait tête, et il n'avait pas la motivation de lui briser les reins pour lui apprendre. Peut-être en a-t-il marre ? Peut-être. C'est d'ailleurs ce qu'il trouve de plus pénible dans cette histoire : Lui, le Fier, le Dominant, le Méprisant, il n'arrivait pas à se donner l'envie de reprendre ses droits de "supérieur" par rapport à cette vermine. Il fait glisser l'arme jusqu'à la faire disparaître totalement dans sa manche, sa position initiale, et ses doigts habiles saisissent l'une des lanières de cuir qui dépassent pour resserrer l'étreinte des liens autour de son bras. Il est, pour ainsi dire, de nouveau désarmé.

T'as raison. On s'en fout de la courtoisie.

En temps normal, il aurait volontiers offert une menaçe supplémentaire de son cru, bien sarcastique, du genre "Si je veux ton nom, c'est pour savoir ce que je marquerais sur ton collier quand je te vendrais", ou encore, "retiens bien le mien, de nom, quand tu m'imploreras pour t'épargner tu seras contente de t'en souvenir". Mais non, il n'a pas la volonté de se lancer dans une joute verbale, dithyrambique de sa cruauté et élogieuse de ses vices.
Law, c'est avant tout l'homme des paradoxes. Ses laïus à propos de destruction représentent l'exemple même de ses contradictions. De même pour la discipline et la subversion. La pureté et les péchés. La justice égalitaire et la violence despotique. D'ailleurs, il refuse la cigarette d'un geste poli de la main.


Non merci, je ne fume pas.

.. Qu'est ce qu'il fout à se trimballer avec des clopes alors ? Et bien, voilà le paradoxe. Disons qu'il a sûrement une bonne raison qui doit lui est propre - et obscur aux autres - et qu'il ne dévoilera sûrement pas là. Il enchaîne.

T'es perdue, c'est ça ? J'crois savoir d'où tu viens et, en toute sympathie, t'es pas prête de retrouver ton chemin. C'est quoi ton histoire de merde, pour que tu veuilles te la jouer fille-qui-traîne, désinteressée, sans-peur ?

Nul ton paternaliste dans ses questions. Pourquoi les gens posent des questions ? Dans la quasi-totalité des situations, ils veulent juste qu'on leur retourne la question pour pouvoir parler. L'humain est égoïste. Peu lui importe de savoir que le chien de machin est mort. Non, il veut juste raconter l'histoire de SON propre chien qui, lui a frôlé la mort.
Fait assez pathétique, ces mêmes gens ne s'en rendent pas compte, pour la plupart. Et on ne peut véritablement nier l'inconscient, même si on s'y évertue.
En revanche, Law n'a nulle véritable envie de raconter sa propre histoire, pour une fois. Aussi étrange que ça puisse paraître, cette gamine effrontée apparaît comme spéciale. Cause : Law est dans une humeur spéciale en ce moment, voilà tout. Alors, comme rarement ça lui arrive dans sa vie, il a juste envie de l'écouter parler. Sans devoir répondre à son tour. Sans arrière-pensée. Simplement la connaître, qu'elle raconte sa vie, rien qu'un peu.

Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le jeudi 02 décembre 2010, 14:07:05
Andrea ne se doutait pas du tout des mécanismes de pensée qui prenaient place peu à peu dans l’esprit de son interlocuteur. Nul doute que si elle en avait eu vent, la jeune fille aurait été moins surprise par la suite. Là, elle imaginait plutôt quelque chose ressemblant à ses craintes premières. A savoir une grosse brute qui allait s’énerver sur elle pour un rien. Une jeune fille de plus malmenée dans une ruelle obscure, quoi de plus banal ? ça ferait la une des journaux, ravissant les amateurs de scandale. Ou pas, et dans ce cas là tout le monde l'ignorerait. Adieu la célébrité ... Et pourtant, Wodan ne semblait pas l’entendre de cette oreille. De deux choses l’une : soit il était seulement un beau parleur, avec ses menaces à deux balles et ses réactions peu réfléchies, soit il venait d’avoir un éclair de raison. Dans les deux cas, Andy avait quelques doutes. Aussi ne put-elle expliquer clairement ce qu’il se passa par la suite. Sans pour autant chercher plus loin, ravie de voir toute agressivité disparaitre des traits du visage de Wodan, la jeune femme fit profil bas et se résolut au silence. Un silence courtois, qui fut bien vite balayé par une réplique de son interlocuteur. Contradictoire. Plissant les yeux, Andrea renforça l’attention qu’elle prêtait à l’homme en face d’elle. Il avait cette logique un peu particulière que lui seul pouvait comprendre, ce petit air plutôt intelligent –du moins dans la moyenne- et qui ne justifiait qu’à moitié le paradoxe qu’il illustrait. Phénomène peu rencontré, tant les hommes sont d'ordinaire faciles à comprendre. Qu'est-ce qui pouvait bien expliquer cette nuance, presque folle, dans un comportement aussi impulsif que changeant ?

Se voyant refuser la cigarette qu’elle rendait avec morgue et d’un ton sec à son propriétaire, Andrea la porta de nouveau à son visage, sans plus chercher à comprendre d’où venait cette marque soudaine de politesse. Surement un défaut d’audition. C’était comme entendre un poisson rouge imiter un chat ou un tigre se rouler par terre en demandant des caresses. Ce n’était pas logique, encore une fois. Andrea attendait de cette mascarade un enchainement plausible, une suite prévisible. Si Wodan commençait à adopter le ton qu’elle-même aurait dû employer, ce n’était qu’un illogisme flagrant. Une blague, sans doute le calme avant la tempête. Alors Andy se tenait toujours sur ses gardes, toujours muette. Elle ne savait plus comment réagir, face à une situation qui dérape dans le bon sens. Il y a des règles universelles qu’on ne transgresse pas, et Wodan piétinait la cause à effet de la proie et de son chasseur. Tout ça en enchainant tranquillement sur le sujet premier de leur rencontre totalement imprévue. Restant un instant la bouche ouverte de surprise, Andrea eut l’impression que son cerveau grillait à moitié. Nan mais il n’était pas normal ce type, à parler de viol puis tout d’un coup à lui demander des précisions sur sa vie. Comme si elle allait lui raconter, comme si elle allait se confier au premier con venu. Comme si …

- Je finirai bien par retrouver … Enfin je crois. Et ma merde à moi, c’est simplement que y’a des jours où on a pas envie de rentrer chez soi. Ça t’arrive jamais ? Moi c’est tout le temps.

Pourquoi lui avait-elle finalement répondu ? Peut-être parce qu’il n’y avait ni moquerie ni remontrances dans le ton qu’il avait employé. Peut-être parce qu’il lui avait filé une clope, ou sans doute qu’Andy avait simplement besoin de ne pas laisser filer ce paradoxe aussi rapidement. Une erreur de la logique naturelle qui parle, ça ne passe pas tous les jours sous votre balcon, alors autant en profiter pour essayer de comprendre quand on en tient une. Et Andrea avait Wodan, totalement métamorphosé dans ses dires et son attitude. Revirement non prévu, mauvaise ou bonne surprise à bord. Andrea soupira longuement, chassant la tension que son corps avait sans le savoir accumulée depuis que son interlocuteur avait engagé une conversation plutôt étrange. Se passant une main dans le dos afin de le détendre tant bien que mal, elle enleva son chapeau et s’éventa brièvement avec, tentant avec espoir de chasser la lourdeur de l’atmosphère. Puis, le remettant enfin en place et faisant de nouveau disparaitre la couleur blond terne de ses longs cheveux, elle reprit la parole sans même y penser.

- Et puis je ne joue rien du tout, j’en ai réellement rien à faire.

Qu’ajouter de plus ? Pas grand-chose, à vrai dire. Elle n’allait pas non plus sortir les mouchoirs et faire semblant de pleurer sur son épaule en lui racontant que Seiji l’attendait sûrement. Pas plus lui faire remarquer que sa stupidité la mettait dans une situation délicate où elle était totalement dépourvue de ressources. Un morceau de viande, surpris que le chien le renifle et lui demande comment il va, en somme. Ouais, quelque chose comme ça. Entre deux maux, fallait-il mieux risquer beaucoup ici mais profiter en contrepartie d’une liberté peu commune, ou bien retourner dans sa cage, protégée du monde extérieur mais totalement vide de sens, abandonnée par toute substance, toute consistance ? Le danger, y’en a certains que ça fait vivre. Surtout que Wodan pouvait encore retourner sa veste et revenir à son point de départ.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le vendredi 03 décembre 2010, 10:37:13
Non, nul ne saurait vraiment le prévoir, y compris ceux qui le côtoient chaque jour depuis des mois, voire des années. D'aucun diront qu'il est tout simplement fou, mais lui se sent bien dans sa tête. Hm, ce n'est pas le cas de tout les fous justement ? Alors que les sains d'esprit se trouvent toujours plus ou moins une tare. Tiens, voilà un sacré paradoxe dont Law n'est pas une illustration. Pour une fois.

Il répondra laconiquement, regardant derrière lui.


[/b]Si, ça m'arrive. Tout le temps.[/b]

Encore quelque chose de pas net chez lui. Contrairement à Andrea, Law avait tout ce qu'il voulait. Son empire, ses serviteurs dévoués, le pouvoir, l'assurance de ne pas manquer d'argent, des relations importantes et le statut social qui va avec, des intrigues obscures, son lit de mystères occultes avec des démons, de la magie et des divinités, du combat et de l'action comme ça lui plaît. Orgueil, Colère, Envie, Luxure, Gourmandise. Thomas d'Aquin pèterait une durite si il devait croiser le Fier.
Il hésite désormais quant à la ligne de conduite à tenir. Il n'a pas spécialement l'envie d'être agressif et violent. Mais il n'a pas non plus envie d'être gentil. Il va falloir trouver un juste milieu. Ne pas passer pour un faible, mais ne pas se montrer trop fort.


La vraie question c'est, pourquoi tu veux pas rentrer chez toi. On a tous une raison plus ou moins valable selon les individus. C'est ça qui est intéressant..

Là encore, il esquive la gentillesse mielleuse, sans verser dans l'agression verbale. Finalement, il se retrouvait bien dans ce genre. Le contact se fait enfin : Une simple main sur le bras, en-dessous de l'épaule, qui paraît totalement excessif et déplacé, pour lui montrer le chemin à suivre. Ca en devenait presque amical, cette histoire. Il va falloir corriger ça au plus vite.

Suis-moi. Le bordel d'ici n'est sûrement pas pire que ce qui t'attend chez toi, mais tu verras qu'il y a de quoi regretter d'être venue. Et magne-toi, c'est peut-être une occasion unique.

Sa main perchée s'envole - pas même le temps de pouvoir le repousser ou lui demander gentiment de s'éloigner - et il fait demi-tour, entamant sa route dans les rues de Nexus. Contrairement à sa route initiale, il ne s'enfonce pas plus profondément dans la sordide crasse des promenades urbaines du secteur, mais cherchait véritablement la lumière, les artères plus fréquentées.
 Parangon des patrons du crime en ce territoire, Andrea n'était plus censée craindre pour sa vie maintenant qu'elle l'accompagnait, mais ça, elle n'en était pas encore consciente. Il connaissait le dédale par coeur, et, si il devait révéler sa véritable identité, il pourrait exiger des petites brutes et des dealers qu'ils lui baisent les pieds. Il restait pour l'instant discret sur sa nature auprès des autres, rien que pour le plaisir de jouer au simple promeneur malfaiteur auprès de ceux qui étaient sous sa gouverne, consciemment ou inconsciemment. Et aussi auprès d'Andrea, qui ne sait pour l'instant rien de lui, sinon un faux nom, et la lucidité quant à son esprit dérangé et versatile.

Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le vendredi 03 décembre 2010, 11:26:26
C’est marrant, les à priori qu’on peut avoir sur quelqu’un. Andrea, qui détestait les jugements trop vites imposés, sur un simple coup d’œil ou une conversation minimaliste, se retrouvait à se réprimander elle-même. La jeune femme avait lancé sa question par pure rhétorique et à vrai dire, elle n’attendait pas de réponse. A la place de Wodan, sans doute n’en eut-elle pas donné. Mais lui reprenait la parole tranquillement, et la surprenait une fois de plus. Au premier contact, Andy avait fait un rapide portrait de la personne qui lui faisait face. Une brute, mal élevée et habituée à traiter tout le monde comme un déchet se noyant dans la boue de cette ville qu’elle ne connaissait plus. Un de ces hommes qui se croient puissants parce qu’ils ont tout ce qu’ils souhaitent, parce que le monde tremble devant eux. Un ego surdimensionné, un être quasiment abject qui ne comprenait pas ou bien avait oublié la souffrance de ceux qui se trainent par terre. Et pourtant, Wodan venait de lui répondre succinctement que lui aussi. Lui aussi avait quelque chose à fuir, quelqu’un à éviter ? Andrea n’en saurait sans doute pas plus, et à vrai dire elle ne voulait pas commencer à s’intéresser à lui. La simple curiosité pouvait parfois être fatale quand on la dirige vers quelqu’un de dangereux. Et Wodan était manifestement de ceux-là. Quoi qu’on en dise, ce n’était pas forcément prudent de réveiller les mauvais souvenirs de gens capable de vous briser la nuque en quelques secondes.

Alors oui, surprise. Interrogations, qu’Andy tâchait de faire fuir rapidement. Une fourmi ne doit pas éprouver d’intérêt ou même de d’envie de savoir envers l’humain qui écrase sa demeure. Et pourtant, pourtant. Y’a des moments où on se demande si c’est réellement utile de tout avoir, de posséder une aura écrasante aux yeux des autres si c’est pour avoir les mêmes emmerdes. Car pour ne pas vouloir rentrer chez soi, il fallait de sacrées bonnes raisons. Et quand Wodan lui demanda les siennes, Andrea ne sut trop que répondre, en première intention. Partagée entre l’attitude de défense et de provocation verbale qu’elle avait jusque-là adoptée et un adoucissement, suite au comportement nettement moins agressif de son interlocuteur, Andy pencha pour un doux compromis qu’elle voulait subtil.

- Une personne que je n’ai pas envie de voir. Tu sais, ces dettes qu’on a pas forcément hâte de payer …

Elle ne parlait bien sûr pas d’argent, mais ça elle n’allait pas le préciser. Genre elle était de celles à raconter Seiji à tout le monde et en peu de mots. Non, Seiji c’était à moitié elle, c’était une part de mystère que personne n’avait réussi à percer. Hors de question qu’elle lâche des vannes solides en plein milieu d’une rue, devant un inconnu dont elle ne connaissait que le nom et le comportement inquiétant, presque instable. Ce presque qui veut tout dire, ce presque qui classe automatiquement Wodan dans la case des dérangés, pour Andrea. Et encore, encore ces réprimandes automatisées de ne pas stigmatiser, de ne pas réduire un homme à sa plus sommaire définition apparente. Peut-être était-ce aussi une forme de protection, pour s’empêcher de connaitre, pour s’empêcher de pardonner une attitude déplorable.

Plongée dans ses réflexions hautement primordiales et philosophiques, Andy ne sentit pas venir la paume de Wodan. En même temps, ce n’était jamais que la seconde fois qu’il l’approchait sans qu’elle le soupçonne, et être plus attentive n’aurait sans doute rien changé. La nature humaine est mal faite, devant le danger. Les antilopes ont ce don de prescience lorsque le fauve attaque, mais les hommes restent tranquillement à attendre le rugissement annonciateur. Comme une nécessité, un code qu'il faudrait instaurer pour laisser la moindre chance au plus faible des deux êtres. Sauf que le monde parfait n’existe pas, et que tout ce qui simplifie la vie aux frêles victimes n’est que superflu. Une paume, donc, qui se posa brutalement sur elle puisqu’Andrea n’avait rien vu venir. A deux doigts de dégager son bras ainsi enclavé, la jeune femme n’en eut même pas le temps. Il la lâcha dans l’instant, presque comme si son contact l’avait brûlé. Geste de répugnance, geste pressé, geste nonchalant, qui sait ce qu’il se passe dans l’esprit de cet homme étrange qui ordonne à Andrea de le suivre ? Sans assimiler ses paroles, la jeune femme se contenta de mettre un pied en avant. Puis l’autre. Redécouverte de la marche, comme un nourrisson qui serait fier d’avancer sans savoir où.

Mais Andy s’en fichait. Comme elle l’avait dit et répété, peu lui importait d’être trimballée, d’être liée pieds et poings. Tant que sa volonté, ses rêves étaient libres elle n’en avait que faire. Ce qui pouvait lui arriver importait peu dans cette mare de boue que sont les petites rues d’une ville comme celle-ci. Elle n’était qu’un microbe parmi les autres, inexistence faible et inutile qui se débattait tant bien que mal dans un océan trop grand, trop profond. Et elle s’en fichait. Même à côté de cet homme qui l’entrainait peu à peu dans les ruelles, sans qu’elle connaisse la destination, elle s’en fichait. Désabusée, blasée si vous voulez. Mais d’un autre côté, libre d’être comme les autres une merde parmi le reste de la plèbe. Chez elle prix de raffinement et de plaisir pervers dissimulé sous de grands sourires et des marchandages obscurs, ici marionnette de chair ramenée enfin à la juste valeur de ce qu’il se tramait. Remontant vers la lumière quelques pas derrière Wodan, Andrea pensait à tout cela, un petit sourire aux lèvres. Puis celles-ci s’écartèrent afin de la laisser parler.

- Qu’est-ce que tu cherches exactement, avec moi aux basques ? T’amuser, amuser la galerie, me jeter quelque part sans ménagement ? Simplement que je sache quelle occasion unique je vais avoir l’honneur de vivre …

Encore ce ton qui volait de sa bouche malgré elle, encore cette attitude de défense hautaine qu’elle employait alors qu’elle suivait Wodan de son plein gré. Encore un comportement illogique, un de plus sur cette terre de délicieuses contradictions. Andrea était comme les autres, réduites aux mêmes règles et soumises enfin à quelque chose. Ce quelque chose qui arrivait dans son existence vide de tout, que ce soit en bien ou pas.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le dimanche 05 décembre 2010, 14:46:28
Law avait l'habitude de provoquer la surprise. Il submergeait souvent ceux qui avaient le privilège de tenir sa présence par des interrogations quant à ses intentions, son caractère et ses pensées. Mais était-ce vraiment inconscient, cette faculté de toujours devoir faire ou dire quelque chose à laquelle on ne s'attendait pas de lui ? Et si il y mettait un peu du sien, aussi ? On ne pourrait en douter. Il se complaît dans cette situation.

Donc, il marche calmement, son esprit se questionnant quant à la direction qu'il devait prendre. Il savait où il allait, mais il n'avait pas de but. Une lumière se fait entrevoir dans ses pensées : Voilà, il sait, il va l'emmener dans un endroit où ils pourront s'amuser. Il passera sous silence ce qu'il pense concernant les dettes, il y reviendra plus tard. Il a beaucoup de choses à dire à ce sujet, c'est plutôt un connaisseur. D'ailleurs, c'est l'évocation des créances qui a fait se manifester cette idée dans son esprit.


C'que je cherche ? Je vais te faire faire visiter deux trois endroits de Nexus, tu vas aimer. T'as un avis très négatif sur moi je trouve. J'vais changer ça illico.

Quelle est cette volonté de se soucier de ce qu'une inconnue pense de lui ? Qui plus est, une terrienne ? Et puis, Nexus ? Avait-elle déjà entendu ce nom ? Le Polyglotte pensait bien que non, si il ne s'était pas trompée à son sujet, elle débarquait d'une faille, et Law était très content d'en avoir découvert une nouvelle. La localisation de cet endroit reste gravée dans son esprit : Pour rien au monde il ne vendrait cette information. Ces portails lui permettaient d'étendre son pouvoir jusqu'à un autre monde, n'était-ce pas merveilleux ? Oh que si. Mais ce n'était pas le sujet actuellement.
Il avance désormais prudemment. Vérifie de ne pas tomber dans une rue malsaine pour lui, dont la possession serait revendiquée par un quelconque adversaire commercial. Mais tout ira bien jusqu'à l'arrivée dans une artère plus fréquentée.


T'aimes jouer ? Les cartes, les dés, tout ça. Moi j'adore, j'suis excellent dans ce domaine. Si tu en as envie, on va boire un verre et on fera quelques parties. J'espère que tu sais mentir.. Ou te battre, au moins.

Alors donc il faudra jouer de l'esprit, ou des poings. Ca semble une éventualité très probable. Law rentrait dans un établissement de jeu fort modeste, mais tout de même respectable. Pas le sien, d'ailleurs, mais ça Andrea n'en savait rien.
Il souriait aux gens, des futurs clients sans doute, du moins, il l'espère. Il allait directement coller ses fesses sur un tabouret de bois, à un bar. Finalement, cette "Nexus" avait des aspects très terriens.


Un verre d'eau pour moi. Et la demoiselle prendra ce qu'elle veut.

Combien de criminels boivent de l'eau, franchement !? Il ne pouvait être qu'un ange. CQFD.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le dimanche 05 décembre 2010, 15:51:53
Dans ses propres pas, Andrea trouvait de l’indécision et de l’envie. Dans son attitude, une peur certaine et viscérale, qui ne pouvait disparaitre au contact de cet homme changeant, mais également une confiance qui naissait. Pas envers Wodan, non. Il était encore un peu trop louche pour que la jeune femme se départît de toute méfiance. Mais une sympathie crédule, pleine d’illusions et d’espérance. Des murs qu’elle ne connaissait pas suintaient déjà des promesses que toute autre personne aurait sans doute perçues comme mauvais présages. Andy se délectait des sueurs froides qui coulaient le long de sa nuque, de la moiteur de ses paumes qui devaient régulièrement finir leur course sur un pantalon bien malmené. Il en allait de même pour le rouge qui lui montait aux joues, de peur et de colère contre elle-même d’être ici. Elle savourait sa peur et ses angoisses, comme autant de signes qui la rendaient bien plus consistante et intéressante que la gamine qu’elle était d’ordinaire. Ne jamais rien faire, fuir les sources de plaisir, se réfugier dans des relations superficielles … Elle qui n’avait pas depuis longtemps senti son cœur battre aussi fort dans sa poitrine retrouvait les manifestations de son corps. Enfin, celui-ci s’exprimait en phase avec son esprit. D’ordinaire si dissociés, les deux éléments qui faisaient d’elle ce qu’elle avait l’habitude d’être se rencontraient. Merveilleux moment d’incertitude, choc un peu violent quand on se rend compte que la peur peut être aussi présente.

Et pourtant, il n’y avait plus aucune raison d’avoir peur. Enfin si l’on oubliait le lieu peu rassurant qu’étaient ces rues inconnues, les loubards qui ne manquaient sans doute pas de trainer dans les ruelles que Wodan et Andrea dépassait doucement. La jeune femme ne se doutait pas le moins du monde qu’elle était en pseudo-sécurité, ne savait pas ce que son interlocuteur représentait ici. Et tant mieux. Car ce sentiment d’incertitude, de flottement, l’instant où tout peut arriver … est délectable pour qui n’a plus l’habitude de le ressentir. Suspension au bord du gouffre, ultime pas avant le plongeon final. Et tout cela sans exagérer, puisque la menace était réelle pour une jeune fille à cette heure-ci. Mais danger il n’y avait plus. Comment eut-elle put le savoir ? Sans doute seulement si Wodan le lui avait expliqué. Cependant, ses paroles firent d’ores et déjà baisser le seuil de crainte que tout un chacun aurait pu éprouver ici. Une simple phrase, et l’avis si négatif d’Andy vis-à-vis de Wodan s’évanouit presque dans la chaleur estivale de la soirée. La pression retomba dans le même temps, et son cœur cessa de vouloir transpercer ses côtes pour seulement rester dans un rythme acceptable, la laissant fébrile de tant de force dans la manifestation inconsciente de la peur humaine. C’est presque comme si la jeune femme avait voulu qu’il continue à lui faire croire que son avenir proche était très incertain, comme si elle avait désiré que Wodan reste dans cette position de toute puissance effrayante et tyrannique. Seulement pour pouvoir le vivre.

D’un autre côté, il y avait du bon à garder un fond incertain mais de profiter de l’instant présent sans croire au danger imminent. Son désir d’expérience, le vide de ses émotions criaient au besoin de sensations fortes tandis que son esprit se contentait d’une simple tension. Et sans s’en rendre compte, alors qu’Andrea avançait les yeux fixés sur le dos large de sa nouvelle connaissance, ils arrivaient déjà. Une rue plus large, au dallage moins sombre et à l’activité nettement plus intense, quelque chose qui lui rappelait chez elle. Chez elle. Wodan n’avait-il pas mentionné un nom qui lui avait échappé, de ses profondes et troubles réflexions ? Un nom qu’elle ne connaissait pas et qui avait semblé désigner l’endroit où ils se trouvaient. Un instant, la panique. Celle de ne pas pouvoir rentrer, celle de perdre ses repères, celle de briser des habitudes tant et tant installées … Mais Andy fut ramenée bien vite à la réalité de la chose par la voix de Wodan. De toute façon, elle n’y pouvait rien et se savait bien heureuse d’avoir quitté momentanément tout ça. On verrait le reste plus tard, et son retour devenait une priorité bien lointaine devant ce que l’homme en face d’elle lui proposait.

Jouer. Mentir. Se battre. Trois mots qui s’incrustèrent comme au fer rouge dans l’esprit d’Andrea. Non, elle ne connaissait rien de tout ça, ou presque. Wodan allait lui demander l’impossible, mais en même temps il devait bien se douter au vu de son allure qu’elle n’était pas une habituée. Et il l’emmenait tout de même, dans son monde, dans ce qu’il appréciait et pas du tout dans ce qu’elle avait pensé être trainée. Il avait eu raison, Andy gardait une bien noire image de cet homme peut être simplement impulsif, sans doute pas si mauvais que ça. Jouer. Ses yeux se remplirent d’étoiles d’espoir, et si elle ne répondit pas immédiatement, la jeune femme s’empressa de rattraper Wodan qui ne s’était pas arrêté, contrairement à elle qui avait tiqué à l’évocation de ces termes. Elle revint donc à la hauteur et, alors qu’ils se dirigeaient déjà vers un établissement de la rue dans laquelle ils avaient échoués, lui adressa de nouveau la parole.

- Mentir, je sais faire. Jouer un rôle ou des expressions, je maitrise. Tout le reste, j’apprendrai.

Le laissant entrer d’abord, Andrea fit une courte pause sur le seuil, se retourna et jeta un dernier regard à la rue animée, au paysage qu’elle découvrait à chaque instant. Puis, renfonçant son chapeau sur son crâne, la jeune femme murmura doucement en regardant désormais à l’intérieur, assez faiblement pour que personne ne l’entende :

- Et je plonge dans ton monde.

Une simple petite phrase prononcée si légèrement qui suffit à illuminer ses prunelles azurées, lui rendre un air sûre d’elle et un pas assuré qu’elle dirigea vers le comptoir où Wodan était déjà installé. Sans savoir pourquoi, l’ambiance austère du lieu, les vapeurs d’alcool qui montaient des tables et du bar lui étaient inconnus mais la rassurait. Elle était presque certaine de trouver ici un univers qui n’était certainement pas le sien mais qui serait sans doute prêt à l’adopter pour un soir. Après tout, il y a de ces endroits où tout le monde peut entrer quelques heures. Qu’il en ressorte en bon état est une autre chose. Toujours est-il qu’Andrea se sentait de plus en plus sereine au fur et à mesure que le temps passait. Elle posait encore un regard méfiant sur Wodan, sentait toujours son sang pulser dans ses veines et son cœur battre plus rapidement qu’à l’ordinaire, mais la terreur passive et inconsciente était piétinée par des ressentis plus concrets, plus proches d’elle. Andrea devinait par rares touches l’effet que c’était d’amener un sentiment, une émotion à naitre et à se développer. Que ce soit l’envie de répondre à une promesse de jeu, le désir de découvrir ou la curiosité d’en apprendre plus sur quelqu’un.

Ce même quelqu’un qui passait commande et la laissait choisir. Andy s’approcha à son tour et sans s’asseoir elle se contenta de s’accouder au chambranle de bois afin de pouvoir observer à sa guise un environnement peu familier. Ce qu’elle voulait boire ? Sans hésitation, Andrea répondit, non pas au teneur du bar mais à Wodan.

- La même chose. Il ne s’agirait pas de perdre quelque capacité de discernement s’il faut jouer par la suite.

Image amusante d’une gamine ayant peur de se mouiller ou vision plus mature d’une jeune femme qui se prépare à une suite des évènements où il fallait tout envisager ? A interpréter comme bon vous semble. En tout cas, Andy était impatiente. Jouer avec elle-même, c’était facile. Mentir un détail qui ne lui posait pas de problèmes. Se battre sur la persuasion une évidence. Let’s start !
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le dimanche 05 décembre 2010, 16:33:11
Encore à cette heure-ci (Ou déjà ?) l'ambiance était plaisante. L'atmosphère respirait ces sensations que Law appréciait plus que bien d'autres : La frustration d'une partie à laquelle on a lamentablement échoué, l'euphorie d'en avoir remporté une. La crainte, le doute, l'interrogation, l'audace, tout flottait dans l'air comme un léger parfum aguicheur, que Law respirait à plein poumon comme le pire des drogués en manque.

Deux verres, pas forcément totalement clean, mais au moins, remplis d'eau, étaient posés devant les deux intrus. Intrus, oui. Law était un intrus dans ce casino, quant à Andrea, elle n'avait rien à faire dans ce monde qui n'était pas le sien. Mais peu importe. Le tarif est annoncé par le barman, qui s'éloigne. Law sourit vers son invitée, puis examine son verre.


Oh. De l'eau d'or. Enfin, vu le prix, ça doit en être. Pourtant elle a l'air normale, hm..


Il en boiera une gorgée, enfin ravi de se désaltérer après ses quelques émotions, puis le repose négligemment. Un nouveau regad vers elle, plein de questionnements. Pourquoi être tombée sur lui ? Non, vraiment, elle mérite mieux. Law est une plaie pour les gens. Il se dit soudain qu'il aurait dû la laisser tranquille, l'abandonner. Qui que soit la personne qui aurait pu la recueillir, elle serait sûrement plus en sécurité actuellement. Comme un geste affectueux, amuseur, il tend le bras de nouveau pour soulever un petit peu le couvre-chef qui masque, de par son volume et l'ombre qu'il provoque, l'entièreté de la beauté d'Andrea.

T'es plus jolie que dans le noir.


Un compliment, tiens. C'est même pas de la drague, c'est juste de la gentillesse. Attends.. Non, n'importe quoi, c'était de la drague. Ca y est, il se débecte ! Faire du gringue à une gamine, t'es qu'un naze, Law. Pfeuh. Il détourne le regard pour éviter la honte de devoir la regarder.
C'est là que son esprit de Castor Junior frémit. Trois malabars approchent lentement. Law perd son expression quelque peu enjouée, enfantine. Il regard Law avec le plus de sérieux possible.


Dès que ça dégénère, cours. Dehors. Le plus vite possible.

Les molosses entourent Law. Une discussion s'engage, dans la langue locale, donc, celle d'Andrea aussi. Mais lui n'était pas sûr qu'elle puisse comprendre ce qu'ils se racontent, vu que, depuis tout à l'heure, ils se parlent en Finnois.

-"Tyler Raine ?"
-... Oh. Euh. Enchanté, Mr Raine. Wodan Thunaraz pour ma part.
-"Non. Vous êtes Mr Tyler Raine."

Law semble réfléchir un instant, regardant celle qui se tient à ses côtés.
-Je suis Tyler Raine ?... Hm.. Oui, vous devez avoir raison. Je suis Tyler Raine.
-"Mr Raine, nous devons vous demander de quitter les lieux."
-Désolé, les mecs, mais je ne peux pas. Votre patron me doit de l'argent. Il a tué un de mes hommes. Il doit me le rembourser.


La désinvolture dont il faisait preuve depuis quelques secondes disparaissaient, et Law descendit rapidement quelques gorgées de son eau, à la vitesse d'un esclave ayant dû traverser le Sahara en courant pour fuir ses tortionnaires, et se retournait bien vite, lançant son verre en pleine face de l'un d'eux. Le deuxième se prendra un coup de poing, et le troisième devait subir le même tarif, mais il pare efficacement, quoique trop justement. Law lui lance son genou dans le ventre, et réitère ensuite avec son pied dans la face. Habile. Agile. Guerrier ?
Sans. Aucun. Doute.

Oh ouai ! Allez venez mes grosses !

Il se la joue un peu, sous l'oeil horrifié des flambeurs et des pétasses, qui s'étaient consciensieusement écartés pour tracer inconsciemment autour de la scène une sorte de ring de combat. C'est parti.


C'est celui au verre d'eau qui revient le premier à la charge. Une formalité : Tandis qu'il veut le frapper, Law se baisse et lui assène un violent coup de talon latéral dans le genou. Le pauvre s'écroule sans pouvoir résister. Aussitôt redressé, le polyglotte lui fait bouffer son genou. Une dent en moins. Le nez éclaté. Hop, à terre.

Au deuxième. Celui qui a prit sévère juste avant se lance de nouveau. Il attaque, Law esquive sur le côté, lui saisit le bras, et lui donne tout ce qu'il a de sa poigne libre : Une véritable rafale de directs au visage qui s'abat, avant de terminer par un coup de la tranche de sa main au niveau du cou. L'homme tient encore debout, complètement sonné. Son adversaire l'achève : La tête qui frappe contre le bar. Eliminé.


WOUUUUH !!!

Au troisième, qui s'était sagement tenu à l'écart. Attaque frontale, Law pare, et se lance lui aussi. Mais cette fois-ci, l'adversaire sera plus malin : Une esquive, et la contre-attaque dans le bide du polyglotte. Evidemment, ça surprend. Ce dernier ne s'attendait sûrement pas à ce que l'un de ces gros bras sans cervelle puisse lui opposer une véritable résistance. Le temps de la surprise, il se mange un uppercut dans les gencives. Il est projeté à terre, dans un sale pétrin. Et il reste au sol, tentant de réunir ses forces pour se lever de nouveau, devant la vindicative brute qui attend des renforts.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le dimanche 05 décembre 2010, 17:45:37
Pour quelqu’un qui voulait de l’action, Andrea allait être servie. Un verre d’eau. Deux, en réalité et bien qu’on puisse très largement douter du contenu des contenants. Ces mêmes contenants qui pouvaient difficilement porter le nom de verre, ne collant pas réellement à la définition qui impose de pouvoir voir à travers. Deux verres, donc, sans doute d’une qualité irréprochable sous la crasse au vu du prix relevé ironiquement par Wodan. Si Andrea se sentit mal à l’aise de commander si chèrement ce qu’on peut avoir gratuitement les jours de pluie ? Non. Elle saisit l’un des deux morceaux peu translucides entre ses mains, et hésitait à y tremper les lèvres. Mais ici elle n’était plus chez elle, tranquillement entourée. Et sans répondre à Wodan, la jeune fille fit honneur à ce geste qui par ici pouvait sembler gracieux en le portant généreusement à son visage, engloutissant la moitié du breuvage qui avait comme un arrière-goût d’alcool. Qui dit verre mal nettoyé dit mélanges étranges en bouche. Action débordante donc, pour la jeune femme qui ne se séparait plus du verre, de peur de le voir se salir d’autant plus sur un comptoir qui pouvait avoir accueilli de nombreuses paumes pas forcément des plus propres. Relents de la bonne éducation, mixée à des pulsions de banalisation.

Perdue dans l’admiration des ondulations du liquide si inspiré en parfums qui s’éloignaient de plus en plus de sa définition propre de l’eau qu’elle avait demandée, Andrea ne remarqua pas immédiatement le regard que Wodan lui lança. Si elle l’eut vu, sans doute se serait-elle demandé pourquoi elle n’y voyait plus ce qu’elle avait pensé déceler lors de leur rencontre première. Ce n’était comme plus la même personne, et l’obscurité des ruelles joua sans doute beaucoup sur les impressions initiales d’Andy. Ce ne fut que lorsqu’elle leva la tête, souhaitant tout de même le remercier d’offrir de quoi boire à la première inconnue qui passe, qu'elle le remarqua. Elle y croisa donc ces yeux qui l’observaient, sans trop bien savoir quoi y comprendre. Avec surprise, Andrea suivit avec attention la main qui se porta jusqu’à elle. Petite appréhension qui s’efface instantanément sans trop de raison, avant même qu’il ne l’atteigne. Comme quelque chose qui soufflerait à la jeune femme que cette main n’a rien de dangereux, et bien vite Wodan le lui confirme. Cela lui permet d’ailleurs de mieux lui montrer à quel point ses prunelles s’écartent lorsqu’il reprend la parole.

Jolie ? Si elle récapitule rapidement la situation, Andrea s’entend dire par un homme qu’elle a cru violent et prêt à la faire taire de la plus innommable façon qui soit qu’elle est jolie. Bon, c’est sûr, son cerveau a du griller quelque part entre la ruelle et cet établissement. Hallucination de confort, Andy doit certainement être restée là-bas, étendue quelque part et à moitié crevée par le premier mec qui passait. C’est un scénario d’autant plus logique que de se faire complimenter par un presque inconnu au milieu d’une salle un peu glauque. Encore une fois, il la prend par surprise. Mais comment fait-il pour, à chaque instant, la bousculer dans un schéma qu’elle pensait comprendre ? Andy connait un certain nombre de personnes, et elle peut se targuer de savoir qui ils sont et ce assez rapidement. Quand on ne pense qu’avec l’esprit et que le cœur ne s’en mêle pas, il est facile de deviner comment réagira quelqu’un, ce qu’il faut dire à un autre pour en arriver là où il convient d’arriver. Et pourtant, Andrea est certaine que ce dysfonctionnement n’est pas seulement dû à cet endroit. Elle sent bien qu’ici aussi, les gens sont simples et inscrits dans des raisonnements classiques et prévisibles. Et pas lui. Pourquoi pas lui ? Trop occupée à réfléchir pour rougir comme n’importe quelle gosse l’aurait fait, Andrea se contenta d’une expression figée dans l’incompréhension. Et quand Wodan sembla déjà regretter ses paroles en regardant ailleurs, Andy leva à son tour le bras, prête à attraper ce visage et le tourner de nouveau vers elle pour y lire une explication.

Echec critique. Le claquement de la porte ramena Andy à une brutale réalité, où une foultitude de gens les entourait. Un lieu qui n’était pas celui des questionnements incessants et analyse d’une spontanéité qu’elle ne connaissait pas. Rangeant d’office ses doigts tendus, la jeune femme les ramena autour du verre crasseux et les y promena à la surface froide et un peu collante, dessinant des sillons imaginaires sur l’extérieur. Ce même claquement de porte s’accompagne rapidement du chuintement de souliers sur un parquet craquant. Des bruits qui se rapprochent, et en relevant qu’à moitié le visage pour ne pas l'exposer aux nouveaux arrivants, Andrea voit trois brutes arriver. Autant pour elle, la jeune femme avait tout intérêt à réviser son jugement de grosse brute. C’est comme ça qu’elle avait un peu plus tôt envisagé Wodan, alors que manifestement elle n’y connaissait rien. Des peaux tendues sur du muscle exposé, des regards perçants mais pas vraiment vifs d’une intelligence entière, une mâchoire pressée de s’exprimer. Et Wodan qui lui intime doucement de fuir en cas de litige. Non, pas en cas de litige. Au début de celui-ci, qui semble apparemment imminent.

Se faisant toute petite dans un coin, Andy n’acquiesce pas l’injonction de son compagnon d’un soir pas plus qu’elle ne la contredit. Et tandis que le dialogue s’instaure enfin entre les trois molosses peu engageants, Andy réfléchit. Alors comme ça, il ne lui a pas donné son vrai nom. Ou peut-être est-ce l’autre le faux. Ou les deux. Une pointe de rancœur pointe dans l’esprit de la jeune femme, qui regrette d’avoir été assez naïve pour lui livrer le sien. Sans doute n’est-il en effet pas homme de confiance. Sans doute le compliment de tout à l’heure était-il calculé, tout comme sa réaction difficilement interprétable. Sûrement qu’il se foutait royalement de sa gueule. Alors oui, se carapater quand l’occasion se présenterait lui semblait être une bonne idée. Surtout que plus l’échange avançait, plus elle se faisait une idée de la nature de l’activité de Wodan. Il était bien quelqu’un de peu fréquentable, et ses rêves de connaitre la vraie vie s’évanouissaient au fur et à mesure qu’Andy enregistrait les informations qui circulaient, tant par les mots que par les attitudes. Il n’était pas celui qu’elle avait cru vouloir rencontrer, pas quelqu’un pour elle. Andrea n’avait rien à faire ici, et elle était à présent déterminée à rentrer au plus vite chez elle. Tout ceci était d’un ridicule affligeant, alors autant s’en libérer dès à présent.

Sauf que.

Sauf que lorsque le premier coup partit, elle fut incapable de bouger. Toute l’attention était focalisée sur Wodan, que ce soit celle des trois agresseurs, celle des clients ou la sienne. Captivée par la danse qu’il interprétait en quelques mouvements, Andrea ne décollait pas, ses paumes se raffermissant autour de sa boisson. Il était impressionnant, à la fois fragile et adroit, coulant sous les attaques de ses adversaires comme l’eau sur la pierre, portant ses propres coups avec une expérience qui la figeait sur place. Plus d’une fois, elle eut peur. Evidemment. Mais pas peur du combat en lui-même, plutôt de Wodan qui libérait quelque chose auquel elle n’était pas confrontée. L’imaginer ainsi était difficile, même si elle le connaissait mal. Comme dans un état second, elle suivit l’échange, ravie que personne ne se préoccupe de sa petite personne. Andrea n’exista plus jusqu’au moment où l’autre se prit un coup.

Pas infaillible, le si compétent Wodan. Un coup, deux coups, à terre. Et là, Andy se réveille. Incroyable comme l’adrénaline fait des miracles. La jeune femme jauge en un instant la masse de muscle qui s’approche de Wodan. Elle n’a aucune chance, mais il est seul et il ne se préoccupe pas d’elle. Alors Andrea tend négligemment la jambe lorsqu’il passe à côté d’elle, ce qui suffit à lui faire perdre l’équilibre. Il ne s’y attendait pas, jackpot. En un éclair, la jeune femme abat son poing sur le comptoir, brisant ainsi le verre si admiré auparavant, se coupant au passage. Sans se soucier plus que ça de cette sensation de douleur qu’elle ne connait pas, Andrea se baisse et plante avec toute la force dont elle est capable un éclat dans la paume du gros balourd, avant de sauter à pied joints sur son dos, vidant du même coup tout l’air qu’il gardait dans les poumons. De quoi lui donner quelques secondes pour envoyer un violent coup de pied dans sa tempe avant de se baisser à nouveau.

Plus qu’une seule priorité. Wodan. Sans se préoccuper de savoir s’il a mal quelque part, elle le relève tant bien que mal et le traine rapidement jusqu’à la porte. Dieu qu’il est difficile comme opération de tenter de faire sortir un homme correctement sonné. Tant bien que mal, la porte. Plus facilement, la rue. Une rue, au hasard. La première qui vient, si tant est que les imbéciles ne pensent pas à y aller. Cela lui donnera au moins le temps de faire ce qui la démange. Et puis Wodan –ou Tyler, peu importait à présent-, ne donnait sans doute pas pour habitude de fuir. Aussi leurs poursuivants s’attendraient-ils, avec un peu de chance, à le trouver non loin de là prêt à en découdre. Andrea quant à elle, se retourne vers l’idiot fini qui lui fait à présent face avant de lui coller une claque et de hausser la voix en tentant de ne pas faire trop de bruit.

- Imbécile ! Fini de jouer au héros ? Où tu veux que je coure si c’est pour retomber sur quelqu’un de pas fréquentable ?

Soupir, gros soupir d’agacement.

- Un contre trois, tu espérais quoi ? Que je me batte pour tes beaux yeux ?

Elle lui jeta un regard noir et passablement énervé avant de radoucir la voix, enfin, et de s’enquérir de quelque chose de beaucoup plus pragmatique.

- Bon, rien de cassé ? T’as un endroit plus sûr que le derrière d’une poubelle pour te réparer ?

Et qu’on ne vienne pas lui reparler de la tendance des hommes à se mettre dans le pétrin … Ni de leur fierté à ne pas vouloir s'esquiver en cas de déséquilibre. Parce qu'elle allait regretter de ne pas avoir pris ses jambes à son coup. Et elle ne voulait pas le regretter. La poussée d'adrénaline de tout à l'heure, le calme tendu après la tempête ... délectable.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le dimanche 05 décembre 2010, 18:34:56
Non mais, il aurait bien trouvé quelque chose pour se sortir du pétrin, hein. Du genre.. Frapper la brute quand elle se serait trop approchée, ou autre. Se dépatouiller au dernier moment c'est assez son genre - et sur ce point-là il reste fort constant. Mais non, il faudra la main tendue inespérée d'une jeune fille à qui il venait d'offrir un verre d'eau. Enfin, offrir.. Il ne l'a pas payé et, pour le coup, ne le paiera pas. La manoeuvre relevait de l'amateurisme, mais il faut admettre qu'elle est efficace, puisque l'agresseur se retrouve à terre, et Law sera tiré vers le dehors, bénéficiant soudain de toutes ses facultés pour marcher, ou presque. En bref, heureusement qu'elle était là.

Qu'est ce qui pousserait une jeune inconnue à l'aider ? Merde, il allait l'agresser dans cette ruelle. Il ne l'a fait, bon. Mais il comptait le faire ! Pourquoi avoir risqué sa vie pour sauver un criminel de Nexus ? Dans sa tête, le fait qu'il ait été un tant soit peu sympathique ne devrait pas le rattraper comme ça. Pfeuh. Les faibles natures servent décidemment bien Law.

Celui-ci s'appuie contre le mur et souffle. Pfouh, que c'était bon. Et soudain, voilà qui brouille ses pensées, la tarte (d'amateur, encore) qu'elle lui assène sur un joue, ramenant le polyglotte à une réalité un peu plus dure que ses bons vieux souvenirs d'il y a à peine 5 minutes. Tss.. Allez, on arrête de ressasser le passé, et on en revient au présent.
Il attendit qu'elle eut fini de parler, avant de la saisir brutalement par la gorge. Une envie assassine animait son regard.


Je t'avais dit de partir !

Ce n'est pas tellement ça qu'il lui reproche en vérité, c'est plutôt d'avoir osé le frapper. Mais non, il ne fera pas cas. Il la relâche bien vite, et ses traits se radoucissent.

Pardon. Excuse-moi.. Je voulais pas. Je supporte mal qu'on me mette un taquet comme ça.

Ce n'est pas comme si il venait de s'en prendre d'autres. Il est confondu, et se sent un peu coupable sur le coup. Il se rattrape en passant à autre chose ; jaugeant sa mâchoire avec application. Il regarde encore ailleurs, pour ne pas avoir à supporter un regard qu'il imagine triste, défait, peiné. Bref, il fait l'air de rien, comme l'humain bien entraîné sait si bien le simuler.


Non.. Ca va bien.. Wo, c'était marrant quand même, non ? Moi ça faisait longtemps que j'avais pas fait une petite baston tranquille chez un de mes grands amis !

Souriant, le jeune homme se détache du mur, baissant ensuite le regard vers le sol. Et.. Oh.

Ta main ! Qu'est ce que t'as fait à ta main !?

Il se saisit de son poignet et le lève vers lui. Il l'engueule, là, et proprement. On dirait une maman sévère qui vient de voir son fils revenir du foot avec un short sale et le genou ensanglanté. La tenant toujours fermement, il tentera de faire une réparation de fortune : D'abord, il tente de capter la moindre lumière pour voir si il n'y a pas de bout de verre planté. Si c'est le cas, il tentera de l'enlever avec extrème délicatesse. Puis il sort un mouchoir blanc de sa poche, sans motif brodé, parce que Law c'est pas le genre à avoir un mouchoir avec ses initiales cousues dessus par sa maman, 'faut pas déconner, et l'applique sur la blessure. Ensuite, il plonge sa main dans sa manche. Il en sort.. une lame. Il veut la tuer ? Non, il passera celle-ci dans sa botte, longeant sa jambe. Et sans fourreau s'il vous plaît. Peu lui importait. Les doigts s'insinuent de nouveau dans la manche, et après quelques manipulations, il en sort une longue lanière de cuir. Avec celle-ci, il fera des allers-retours autour du pansement improvisé. Un noeud, et c'est calé !

Essaye de remuer ta main même si ça fait mal. Tant pis si tu pisses le sang, il vaut mieux pas que ça se referme, c'est un coup à avoir des saloperies à vie coincée dans ta peau. Allez, viens.

Il s'enfonce alors dans la ruelle où elle les avait emmené. Son chemin ?... Un autre casino.
(...)
Quelques déambulations plus tard, silencieuses sur ordre de Law. L'établissement était à la limite des bas-fonds.. Il avait tout ce que le précédent avait, mais en mieux. Plus d'espace, plus de luxe, plus de clients, plus d'animation, plus de propreté, plus de sécurité, et surtout.. C'était le domaine de Law.
Quand celui-ci entra, tout le monde le saluait chaleureusement, en particulier les employés. D'ailleurs, l'une d'elle lui fit remarquer qu'il avait du sang sur la lèvre. Il touchait : Ha, oui, en effet. Bon, ça ira pour l'instant, ce n'est pas une grave hémorragie.
S'arrêtant en plein milieu de l'établissement, il s'arrêtait, et murmura sur le ton de la confidence :


Au fait, moi c'est Law. Tyler c'est mon identité pour tout le monde, publique j'ai envie de dire, ce qu'il y a marqué sur les documents officiels. Quand je joue aux petits malfrats dans la rue, je suis Wodan. Quand je passe des annonces anonymes pour trouver des clients, je suis Klaus. Hm, bref. En vrai, c'est Law. Law tout court. Mais appelle-moi Tyler, devant tout le monde c'est mieux, tu comprends ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le dimanche 05 décembre 2010, 19:30:32
Pourquoi l’avoir aidé ? Est-ce qu’elle l’avait sorti du pétrin ou bien est-ce qu’elle n’avait fait que lui apporter d’autres ennuis ? Mais surtout, pourquoi elle s’en souciait ? Des questions qui passaient en boucle dans l’esprit d’Andrea, qui aurait préféré ne pas être mêlée à tout cela. Dans la mesure du possible. Et sur l’instant, Wodan ne faisait pas partie du possible qu’elle était prête à laisser derrière elle. Altruisme stupide ou fond de curiosité qui demeurait, qui sait ? Toujours est-il qu’en ce moment, elle pestait plus contre son instinct qui l’avait obligé à secourir un homme dont elle ne connaissait même pas le vrai nom que contre celui-ci. Quoique. Elle lui en voulait plus de s’être comporté avec flegme et assurance que de l’avoir mise dans une situation peu confortable. Parce que ça, ça ne la dérangeait pas. Andy préférait encore mourir de peur à en faire une crise de nerfs plutôt que de rentrer chez elle et retourner brutalement à son quotidien vide, où son esprit se barricadait derrière des protections qui ne laissaient filtrer aucune émotion. Tout plutôt que ça. Même une bagarre, même la violence, même les emmerdes. Emmerdes qui continuaient apparemment. Wodan ne sembla pas particulièrement apprécier le traitement qu’elle venait de lui infliger, et il lui fit bien vite comprendre.

Tout à coup, sa gorge fut privée d’air. Celui-ci passait avec difficulté au travers de la poigne assurée et imposante de l’homme au regard soudainement assombri, presque dangereux. Andrea faillit se reprendre pour le petit lapin en guise de proie de choix, mais maintenant qu’elle avait vu à quel point Wodan pouvait se montrer stupide et qu’avec elle il n’avait jamais été réellement violent, la peur était moins présente. Bien qu’elle ne put s’enfuir totalement, à cause des yeux effrayants fixés dans ceux de la jeune femme. Celle-ci se vit proprement réprimandée pour sa présence, et ne put lui répondre qu’elle avait bien fait de rester, trop occupée qu’elle était à tousser et à reprendre sa respiration alors qu’il la lâchait enfin. Pliée en deux, Andy avait porté ses paumes à con cou et le massait délicatement, tentant de vérifier s’il n’avait pas été déformé sous la poigne de Wodan. Levant les yeux, elle n’y croisa pourtant pas ceux de son interlocuteur, trop occupé qu’il était encore à l’esquiver. Mais cette fois-ci, Andy ne tenta pas de récupérer le visage de son compagnon, le laissant fuir si cela lui plaisait. Elle venait quand même de se prendre une leçon qu’elle n’appréciait guère. Et si Andrea le pensait toujours stupide dans les situations comme celle qui venait de passer, elle ne savait pas qu’il imaginait parfaitement les traits de son propre visage. Déçue, elle l’était. Pas parce qu’elle n’avait pas droit aux remerciements qu’elle n’attendait même pas, non. Parce qu’il ne supportait pas une simple claque, parce que la frustration et les réprimandes étaient de trop dans son monde, parce qu’il s’était aventuré trop loin dans la domination pour comprendre son geste. Ce fut assez froidement qu’elle lui répondit donc, la voix encore un peu rauque.

- Je te pardonne pour le geste, mais pas pour le principe. Tu aurais dû accepter ma gifle, tu la mérites.

Mais lui était déjà ailleurs, et Andrea n’eut pas le plaisir de se voir une seconde fois collée au mur par la puissance de son bras. Et s’il ne comprenait pas pourquoi elle avait fait cela, eh bien tant pis. De toute façon, il rigolait déjà de la situation et la voyait avec un détachement qui laissait la jeune femme sans voix. A cet instant, Andrea hésita franchement à partir. Ses traits se fermèrent, elle pinça les lèvres et se contenta de hausser des sourcils réprobateurs au mot « marrant ». Elle n’avait pas trouvé ça drôle. Stimulant, passionnant, délicieux pour elle mais pas franchement amusant. Et qu’il ne le reconnaisse pas montrait bien que les deux personnes qui se faisaient face n’appartenaient pas au même monde. L’un vivait dans cette ambiance chaque jour, se complaisait dans la violence et qui sait jusqu’où il allait. Andrea ne voulait pas le savoir. Sa gorge se noua tout de même après cette constatation, sans qu’elle sache bien pourquoi. La silhouette en face d’elle semblait tout d’un coup floue, et le ton qu’il prit pour reprendre la parole très lointain. Ce ne fut que lorsqu’il prit d’office sa main qu’elle comprit le sens de sa précédente intervention.

Ah oui, sa main. Le truc qui faisait mal, à en irradier le bras. Cette douleur qui se réveillait alors qu’Andy n’en avait pas franchement l’habitude. Et comme une enfant, elle se laissa faire bien gentiment. Les remontrances et la voix mécontente de Wodan lui parvenaient difficilement, concentrée qu’elle était sur le mal de chien que cela faisait. Elle ne s’était pas loupée, et cette simple coupure pourtant bénigne lui donnait une raison de plus de laisser tomber cet étrange compagnon qui n’avait rien de bon pour elle. Mais elle ne put s’y résoudre, alors qu’il pansait avec précaution sa blessure, avec la dextérité d’un habitué. Deuxième serrement au cœur. Troisième, quand Andrea vit la lame que son interlocuteur cachait dans ses vêtements. N’était-il que ça, ne pouvait-il que se résumer à la violence qu’elle avait vue ? Andrea préférait croire à la maladresse non feinte dans ses gestes, à sa spontanéité difficilement contrôlable, à ses paroles parfois dures, et d’autres incroyablement attentionnée. Ainsi, le sermon qu’il lui passait en ce moment même sonnait comme une douce rengaine à son oreille, et Andy voulait embrasser cette hypothèse sans doute pleine d’illusions qu’elle se faisait sur le personnage. Et ces pensées lui permirent de ne pas sentir l’irradiation de la douleur pendant qu’il s’appliquait à la soigner, avant de lui demander de mobiliser son poignet et ses doigts. Ce qu’elle fit immédiatement. Le sang ne coulait pas beaucoup, mais sa peau piquait et Andrea sentait à chaque instant une lame s’enfoncer encore et encore dans sa main, comme si le verre crasseux ne cessait de se briser.

Puis quand il l’entraina à sa suite, elle se laissa trainer. Après son accès de colère, Andrea retombait platement, quelque part entre la déception de s’être trompée et l’espoir de ne pas l’avoir fait. Elle aurait voulu l’arrêter, lui offrir une seconde claque et lui expliquer pourquoi il devait cesser cette attitude détachée, lui faire accepter son geste, lui faire comprendre. Et ce sans savoir pourquoi, encore une fois, cela lui tenait à cœur. La différence entre deux êtres est-elle nécessairement l’explication du désir de faire changer l’autre ? Mais Wodan changé serait-il encore le même ? Andrea ne put s’empêcher de soupirer alors qu’elle empruntait encore d’autres rues, d’autres passages. Elle ne les voyait même plus, et c’est le moral beaucoup moins haut qu’elle repartait. Ses pensées la rongeaient, elle aurait souhaité redevenir comme à l’ordinaire, vide de toute émotion. Parce qu’un cœur qui se serre fait parfois bien plus mal qu’une coupure en plein milieu de la paume.

Ce ne fut que devant un autre établissement qu’elle cessa enfin de se tourmenter, d’autant plus que le silence imposé par Wodan n’avait pas aidé à la faire songer à d’autres choses plus agréables. C’était … pareil. En différent. Le même type de services proposés, sûrement. Et la simple vue d’un espace moins glauque et apparemment plus sécurisé, au vu des salutations que Wodan recevait de toutes parts suffit à Andrea pour la faire retrouver son envie de découverte, chassant quelque peu l’épisode déjà oublié. Et alors qu’elle s’apprêtait à suivre son guide en traversant la salle, celui-ci s’arrêta, effleura la lèvre suite à une remarque qu’Andy n’avait pas entendue, trop occupée qu’elle était par l’animation environnante, et lui adressa la parole. Et ce qu’il dit la surprit une fois de plus. Law, Tyler, Wodan, Klaus. Law. Etait-ce une réalité ou encore un moyen de se justifier face à la conversation qu’elle avait entendue ? Cherchait-il encore à fuir ? Andrea planta son regard dans celui de … Law, admettons, et chercha sa réponse sur un visage qu’elle ne sondait que très difficilement. Où était le réel, où commençait le rêve du mensonge ? Après tout, c’est lui qui un peu plus tôt lui avait dit que mentir était primordial dans son monde.

Elle voulut répéter ce nom, mais c’était apparemment déconseillé et elle voulait bien comprendre pourquoi. Et pourtant, pour s’assurer qu’une chose est réelle il faut parfois se l’entendre dire. Alors Andrea, sans quitter son interlocuteur des yeux, répliqua, elle aussi dans un murmure.

- Ça me semble clair. Simplement … tu me le dis uniquement parce que je sais que Wodan et Tyler sont des faux ? Tu pourrais en inventer un autre.

Mais Andrea posait cette question plus par dépit que par réelle envie de savoir. Il pouvait encore lui mentir. Puis, voulant redescendre son chapeau sur son front et l’empêcher une fois de plus de la fixer, Andy se rendit compte qu’elle avait perdu celui-ci dans leur fuite. Ses cheveux blonds étaient alors libérés sur ses épaules, lui donnant une apparence fragile qu’elle détestait. On aurait dit une poupée, poupée qui n’avait rien à faire ici. Alors, fouillant dans ses poches elle en ressortit un élastique étiré jusqu’à la corde et remonta sa tignasse en un chignon fragile, laissant échapper de nombreuses mèches bouclées récalcitrantes. Et maintenant ? On efface tout, et on recommence ? Andrea avait du mal à oublier, mais revenir vers le but principal de leur entrée dans le précédent établissement ne lui posait pas de problème. Découverte, vivre, encore et toujours. Sentir, éprouver. Des mots d’ordinaire bannis de son vocabulaire.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le lundi 06 décembre 2010, 10:35:01
La confiance. C'était au moins une chose que l'on pouvait donner à Law sans craindre qu'il ne la trahisse. Car Law avait des principes bien à lui : Dealer, d'accord. Vendre le corps d'une fille, d'accord. Employer des esclaves, d'accord. Violer, torturer et tuer, d'accord ! Mais négliger les espoirs que quelqu'un a mit en soi, jamais. C'est connu dans son entourage qu'on peut lui remettre n'importe quel secret, lui demander n'importe quel service, et compter sur lui quand il dit qu'on peut compter lui, et que jamais il ne faillisse à ce pacte. L'amitié, c'est de la confiance tacite ; aussi, après les évènements qui viennent de se dérouler, Law n'a qu'une envie : Qu'Andrea devienne son amie, pour qu'elle puisse lui faire confiance.
Il se tournait vers elle lorsqu'elle émettait subitement ses doutes. Il reste perplexe : Comment lui prouver la véracité de ses dires ? Lui présenter des documents officiels ? Non, trop aisément falsifiable.. Tiens ! Il voit, en la personne d'un type en costume impeccablement taillé posté à une table de Black Jack, la solution à son problème identitaire.


Suis-moi !

Il saisit le bras d'Andrea et l'emmène se faufiler parmi la masse de clients, la relâchant pour poser la main sur l'épaule du type, et le retourner. Dans ce costume, un homme à l'air très serein, calme, posé, même pas surpris de l'irruption de Law dans ses affaires.

-Isaac, je te présente... Andrea. Andrea, voilà Isaac.

L'hébreu adresse un salut poli de la tête à ce qu'il pense être une nouvelle employée, ou quelque chose du genre.

-Isaac.. Quel est mon nom ?
-"... Tyler Raine ?"
-Nan nan nan, mon vrai nom.
-"Pas Tyler Raine ?"
-Mais non, crétin, mon vrai de vrai.
-"Je dois le dire, vraiment ?"


Là, il pataugeait carrément dans la soupe, le pauvre administrateur, le bloc-note en main, où étaient griffonées des dizaines de lignes écrits très petit, à la va-vite. Pour changer, son supérieur lui en faisait voir de toutes les couleurs.

-Ouiiii.. Mon vrai nom, celui que mes parents m'ont donné à ma naissance.
-"Euh... L... Law ?"


Triomphal, le trentenaire se retournait vers la jeune fille, avec un sourire des beaux jours, désignant Isaac de la main, comme pour signifier qu'il n'avait pas menti, et que son second venait de le prouver.

-"Mais.. Je ne suis pas censé ne pas le dire ?"
-Mais là ça compte pas, je t'ai demandé de le dire.
-"J'ai pensé que vous vouliez que je dise ce que je dis d'habitude."
-Oui mais là non. Tu devais dire mon vrai nom.
-"Il est convenu depuis longtemps que je ne dois pas le dire."
-Là, tu devais le dire. Et tu l'as dit, donc, je suis très fier de toi. Va me chercher Fu.


Abasourdi, ses yeux finissaient par se détourner, et ses pas avec. Il s'éloignait sans trop comprendre : Il avait arrêté de tenter d'assimiler clairement la logique de son patron, mais là, il devait admettre que le Boss avait fait fort. Bien content de sa réussite, Law balayait les tables du regard, trouvant deux places libre à une autre table de carte.

Tu aimes le 21 ? Enfin, le Black Jack. C'est connu sur ton monde je crois. Tu sais, c'est un jeu où il faut faire 21 avec les cartes, sans dépasser. Si tu fais moins de 21, tu dois espérer que la banque fasse moins que toi encore. Si c'est le cas, tu remportes la mise. Si tu dépasses 21, t'as perdu. Si la banque dépasse 21, elle a perdu. Tu tentes ? Viens, j'te montre.

Il va donc caler ses fesses sur le siège, salué hypocritement par les autres joueurs autour de la table. Le croupier fini le tour de jeu, et ramène les cartes à lui, pour redistribuer une donne. Law l'arrête avant qu'il ne commence.

-Hey. File-moi des jetons.
-".. Pardon Monsieur ?"
-T'as vu qui je suis ? Des jetons. 50 de 10 pour moi, et 50 de 10 pour elle.


Ne voulant surtout pas contrarier son supérieur, celui-ci obéit, sortant de la banque les sommes demandées. "Petites mises", murmure le polyglotte à ce qu'il pense être une sorte d'apprentie, une novice qui va apprendre le frisson du jeu. Petites, oui, car ici, on est bien plus habitué à voir défiler des très, très gros montants. Quoique le Black Jack n'est pas l'endroit où on brasse le plus d'argent..
Après avoir aligné devant chacun d'eux 5 petites piles de disques verts entouré par un anneau blanc et noir, où trône sur chaque face le logo de ce qui semble être l'établissement de Law, il commence à distribuer. D'un geste, le grand patron signifiait à son employé que pour le premier tour, Andrea n'aurait pas le droit d'avoir de jeu. Tout les autres sont servis. Chacun mise en conséquence. Un type joue à côté d'eux. Un 7. Il demande une carte. Un 6. Il demande une carte. Un 9. Score total 23. Eliminé. Le croupier passe à Law, qui rajoute encore des jetons. Il est à 8. Carte. 5. Carte. As. Carte. 6. Soupir de soulagement.


L'as vaut à la fois 1 et 11. Là, en l'occurence, si il vaut 11, je dépasse 21. Donc évidemment, il compte pour 1. Mon score, là, est à 20. Je prends pas de carte. J'attend que la banque joue à son tour.

Le croupier finit le tour des autres, puis aligne ses propres cartes. Un Roi et un 8. 18. Il félicite les joueurs gagnants, dont Law, et leur rend leur mise, doublée cette fois-ci.

Voilà. C'est aussi simple. Il suffit d'avoir le feeling. Jamais dépasser 21. Allez, essaye.

Nouvelle donne distribuée, en attendant ce fameux "Fu". Law s'engage dans une discussion un peu plus sérieuse. Il appréhende la réaction de sa partenaire de jeu.. Il espère juste qu'elle ne va pas se crisper, se renfermer, se mettre en rogne, ou sceller définitivement l'espoir qu'il a qu'il puisse l'aider, rien que pour la remercier de passer une soirée plus agréable que d'habitude.

Tu sais.. Comme je te disais, moi aussi j'ai des dettes. Je les règle. Mais parfois, les gens à qui je dois quelque chose ne méritent pas que je leur rende. Alors je.. je m'arrange pour que les comptes soient remis à zéro d'une façon qui me serait plus profitable. J'ai peut-être de quoi régler tes comptes à toi, si tu voulais bien me dire ce que je pourrais t'offrir.. Et j'ai bien compris que ce n'était pas l'argent ton problème.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le lundi 06 décembre 2010, 15:05:10
Manifestement, il avait parfaitement assimilé les reproches qu’Andrea avait placés dans sa voix. Ceux de la déception du mensonge, mais d’autres bien plus profonds encore qu’il ne devait même pas imaginer. Savait-il au moins pourquoi elle était réellement mortifiée par son attitude ? Ce n’était pas le mensonge, pas la tromperie ni même le reste, pourtant si énervant. C’était cette défense, cette volonté constante de devoir s’éloigner avant de se rapprocher. D’être toujours dans le retrait, dans la méfiance, pour seulement tenter d’effacer les premiers doutes par la suite. Etait-il allé si loin pour ne ressentir que cette peur d’être approché ? Qu’il avance des raisons de sécurité, elle s’en fichait. Andy se doutait bien que s’il avait besoin de se protéger, c’est que les raisons étaient solides. Et, bien qu’elle ne veuille en aucun cas savoir ce qu’il faisait pour en avoir besoin, elle le regrettait. Jouer avec les gens qu’il côtoyait était-il aussi simple que de manier les cartes ou les pions dans une partie ? Andrea faillit lui poser la question. Elle en brûlait d’envie, de savoir s’il était véritablement trop aveugle pour voir l’essentiel, pour voir l’illogisme dans son rapport aux autres. Avec ses représentations à elle, la jeune femme arrivait sans se soucier de juger, sans craindre de rejeter. Son regard se faisait toujours plus lourd à mesure qu’elle se rendait compte que Law avait pris la plus longue route pour arriver à un bonheur fragile et éphémère.

Est-ce que quelqu’un l’attendait au moins, au bout ? Y avait-il une personne patiente prête à panser ses blessures comme il l’avait fait pour elle ? Celles de son corps, celles de son âme, qu’importe. Andrea doutait de cette présence, elle ne voyait pas cette chaleur commune à ceux qui ont un port d’ancrage fort en émotion. Peut-être se trompait-elle, sans doute le cachait-il aussi bien que le reste. Et pourtant, cette pensée était d’une tristesse sans nom. Parce qu’Andrea avait ce même vide, parce que seuls les bons souvenirs de quelques années d’études lui permettaient de se raccrocher à son quotidien, de revenir toujours au même point, en sécurité. Son port à elle s’était effondré voilà maintenant deux ans, et elle savait bien qu’il en découlait un état chez elle un peu étrange. Ce qui l’avait poussé à suivre Law n’importe où, ce qui l’obligeait inconsciemment à rester. Sensation aussi pure que l’alcool qui coure dans les veines, vous renverse quelques neurones au passage et fait de vous un pantin soumis entièrement aux ressentis de votre corps, aux manœuvres délirantes de votre esprit. Quelque chose dont on a pas l’habitude, exprimé avec une violence inouïe qui perce la raison, les barrières d’éducation et piétine ce qui survit encore. Son alcool, c’était la peur, la découverte, l’inconnu ou l’adrénaline. Son coma éthylique, le déversement d’émotions qui la prenait doucement à la gorge depuis quelques temps, ce soir. Quelque chose de différent à chaque instant, qui ne retombait jamais totalement. Quelque chose qui hurlerait que tout est voué au changement, et qui plongerait Andrea dans un rêve éveillé où plus rien n’a la même saveur.

En tous les cas, elle fut au moins rassurée sur un point. Car elle ne croyait pas Law aussi torve et manipulateur que cela, car il était difficile d’envisager que la surprise du dénommé Isaac était feinte. Le pauvre homme semblait perdu lorsque Law lui demanda, après avoir trainé la jeune fille à sa suite, son véritable nom. Law, donc. Andrea le répétait en boucle, alors qu’elle adressa un sourire de remerciement à ce même Isaac, un peu déstabilisé par ce qu’on lui demandait. Sans doute son premier sourire de la soirée, mais peut-être pas le dernier. Simple signe de remerciement spontané, étant donné qu’Andy était heureuse de pouvoir enfin être sûre d’une chose à propos de l’homme qui lui faisait visiter la ville par moyens interposés. Son sourire ne mourut cependant pas tout de suite, et il glissa jusqu’au visage de son interlocuteur principal, fière qu’elle était d’avoir réussi à dévoiler une première couche. De toute façon, que pouvait-elle faire de son nom réel ? La jeune femme ne connaissait ici personne, ne pouvait que le garder pour elle et en savourer le côté apparemment très précieux qui lui était attribué. Alors en retour, Andrea pouvait bien lui offrir un petit sourire de remerciement. Il suffirait, sans doute, d’autant plus que son visage n’était manifestement pas fait pour ça.

Et puis c’était trop attendrissant de voir les efforts déployés par Law pour lui prouver une vérité, au moins une. Il tenait manifestement à ce qu’elle ne se trompe pas trop sur lui, et cette constatation l’intriguait. Que pouvait-il bien trouver d’intéressant dans une gamine perdue envers laquelle ses premières intentions n’étaient pas les meilleures ? Encore cette question, redondante dans l’esprit d’Andy qui ne parvenait pas à mettre la main sur une explication plausible. Quand bien même, elle finirait sans doute par lui demander directement. Se prendre la tête ? Très peu pour elle. Après tout, la jeune fille n’y était pas allée de main morte pour lui tenir tête dans les pires moments, elle n’allait pas le faire dans les autres.

Mais eut-elle le temps de s’arrêter, de répondre, d’acquiescer ? Non, et à peine celui de sourire. Voilà que son hôte l’emmenait déjà vers une partie plus creusée de son univers, celle qu’il lui avait promis en premier lieu. Le monde du jeu, des paris, de l’argent. Les paillettes et leurs revers, bien qu’Andrea était presque sûre qu’elle n’apercevrait ce soir que la partie principale, qui fait briller les yeux en donnant envie de revenir. Essayer, encore et encore. Croire. En s’installant à la table, Andy sentit d’ailleurs nettement les relents du jeu émaner des concurrents. Le 21, hein. Oui, elle en connaissait vaguement les règles pour y avoir joué dans des heures perdues lors de vacances passées avec son frère. Mais elle laissa Law lui expliquer, histoire de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Car il y a le jeu ludique, l’affrontement manquant de sérieux entre des individus cherchant plus l’amusement que quelconque autre profit. Et puis il y a LE jeu. Celui qui prend aux tripes, celui qui avale l’argent et le rend à sa guise. Le monde du hasard, du bluff et de l’intimidation. La stratégie, le combat. Et pourtant, pourtant Andrea ne sentit rien de tout cela lorsque son compagnon d’un soir lui fit une démonstration qu’elle suivit avec attention. Encore une fois, attendrissant de le voir tenter de lui apprendre, de lui expliquer les bases et de la faire rentrer un pied à l’intérieur du plateau de jeu. Comme un gosse, un peu. Andy dut d’ailleurs réprimer toute réflexion de sa part, et elle se contenta de lui répondre avec des yeux brillants d’excitation.

- Je veux jouer. C’est exactement ça.

Ça, ça qu’elle cherchait. Une forme de déclic, un changement total et entier qui mettait sur le tapis bien plus de choses que de simples rondelles de plastiques peintes. Merveilleux jetons de mise aux couleurs attirantes, tapis si doux au contact et ambiance si sérieuse et détendue à la fois … Andrea retrouvait des couleurs, retrouvait des sensations disparues après leur fuite du précédent casino. Puis tout à coup, quand on posa la première carte devant elle, un frisson. Qui se multiplia bien vite, comme si elle pouvait bouillir d’impatience. Elle perdait même le contrôle de ses muscles, qui dansaient ainsi le long de son dos … puis tout s’arrêta. Ce pouvoir qui l’alimentait, c’était électrifiant. Tenir les cartes, regarder son jeu. Miser, tenter de réfléchir, puis abandonner. Se laisser porter par son instinct, agir sans plus penser. A quoi cela servait-il ? Andrea devait simplement additionner, soustraire, croiser les doigts. Face à Seiji, elle perdait souvent. Faute d’audace, défaut de prise de risque. Annihilation totale de sa capacité à prendre des initiatives, la jeune femme n’avait jamais compris comment jouer vraiment. Ici, maintenant, c’était bien différent. Comme une drogue, Andrea buvait les hésitations de chacun, se délectait de sa propre incertitude, du pari qu’elle faisait parfois sur une seule carte. Et puis, la chance du débutant faisait son office, parfois, bien qu’elle ne mise jamais beaucoup, mal à l’aise de participer avec quelque chose qui n’était pas à elle. Même si Law ne lui en voudrait probablement pas …

Un 9.

Et voilà qu’il reprenait la parole. Andy pensait l’écouter d’une oreille, mais les premiers mots et surtout le ton qu’il employa suffit à la tirer de sa concentration. Un instant, les cartes dans ses mains ne signifiaient plus rien et seules comptaient les phrases qui venaient s’écouler dans son oreille sans qu’elle parvienne à en saisir le sens. L’aider ? Lui offrir quelque chose ? Il était soudainement gentil. Etrange constatation, alors qu’Andrea se souvenait encore d’une paume serrant violemment sa gorge. Et les mots se perdaient désespérément, sans prendre de logique, sans s’harmoniser entre eux pour créer quelque chose de tangible, de réel. Carte.

Un 8.

Coup de chance, coup de jeu ? Une carte, encore. Peu importait de perdre, gagner était la seule chose importante, et il lui suffisait d’avoir un quatre, ou moins. Ne pas s’arrêter maintenant, ne pas perdre. En demandant clairement une carte, encore, au croupier, Andrea sentit encore ce délicieux frisson le long de son échine. Ce qui n’avait rien de particulier ni d’exceptionnel pour tous les gens rassemblés autour de cette table allumait quelque chose dans son regard, la rendant intérieurement fébrile alors que son regard était figé dans un masque impassible que seuls ses yeux pouvait trahir, pour qui sait y lire. Incertitude, serrement au cœur, les deux pour des raisons différentes l’un de l’autre. Carte.

Un 3. Bingo.

Tournant un visage un peu interloqué vers Law, elle lui répondit enfin. Elle avait gagné son pari, même minime, de ne pas sauter au premier tour, alors elle pouvait bien prendre le temps d’enfin répondre à ce discours inattendu qui venait de lui rendre une claque, pourtant pas physique, en compensation de celle qu’Andrea lui avait administrée un peu plus tôt.

- M’aider ? Pourquoi t’en soucier, si nous ne sommes même pas originaires du même monde ?

Ce n’était pas méchanceté, juste surprise. Encore trop de découvertes sur lui. Et pour faire un premier pas et tenter d’approcher dans sa direction, la jeune femme reprit à voix basse afin que les autres ne l’entendent que peu.

- Mais puisque tu y tiens … tu le fais déjà. Ici, maintenant, le jeu, la bagarre, les menaces. Ça me fait vivre. Je crois que j’ai simplement besoin de ça, de m’évader et de profiter de tout ce que je ne connais plus. Ce qui m’arrive depuis que tu m’as adressé la parole. Parce que la source du mal, je crois que personne ne peut y remédier.

Ah, et la banque avait perdu. Mais à vrai dire, ce n’était plus trop ça qui capturait le regard d’Andrea, qui fixait le bois de la table avec un air consciencieux. Allait-il encore l’envoyer bouler ou son questionnement était-il sincère ? En tous les cas, elle venait d’avouer qu’elle n’était plus rien, et sans intérêt. Pas forcément super pertinent, à placer dans une conversation …
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 07 décembre 2010, 09:51:26
De la fierté paternelle. C'est un peu ce qu'il ressentait en constatant la victoire d'Andrea, alors que lui, sur le même tour, faisait un nul avec son 19. Son sourire s'étirait, bienveillant, fixant Andrea à son tour, portant dans son regard tout l'espoir qu'il portait de la voir gagner encore, et se contenter de ces petits plaisirs qui, apparemment, étaient tout, sauf son lot quotidien. Alignées une à une, les cartes qu'elle avait abattues étaient un fabuleux coup de chance, quoique fort statistique, et au-delà du simple hasard, il y avait du courage : à 17, elle avait osé prendre une nouvelle carte, un pari des plus risqués mais qui avait payé puisqu'elle arrachait au propre établissement de Law un peu d'argent. À cette pensée - qu'elle venait de le "voler", en quelques sortes -, il fit une petite grimaçe. Paradoxe de plus. Il venait de venir en aide à une jeune fille pour qu'elle fasse perdre de l'argent. Distreyant. La somme importe peu : Ce qu'il veut, c'est lui faire un peu plaisir. Et apparemment, ça marche.

Il s'attache, en fait. Tout simplement. Law n'a jamais eu trop d'amis. Ni d'amour. Il se targue d'avoir toujours marché tout seul, par la force de ses bras, et de sa tête, s'être élevé, grandit, comme peu de gens peuvent se vanter d'avoir réussi. À chaque palier atteint, il entamait un nouvel escalier. Les corridors étroits et sombres, parsemés d'embûches étaient des complications qu'il avait l'habitude de traverser. Sans personne.
Alors, maintenant qu'il regarde quelqu'un comme un être humain, et non comme un employé, un adversaire, ou un client - trois catégories quasi immuables pour trier tout ceux qui ne sont pas lui, soit le reste du monde -, ça lui fait tout drôle. Comme un chaton qui découvrirait la neige, un matin d'Automne, hasardant ses coussinets contre la substance pure et froide, qui lui gèle les pattes, qu'il remuera en l'air à chaque pas pour se débarasser de l'eau solide qui reste fixé à ses poils. Il se tournera vers son propriétaire, et semblera l'interroger du regard. Quid ? Qu'est ce que c'est ? Pourquoi est-ce là ? Pourquoi est-ce froid ?
Les pensées se réveillent quand Andrea lève la voix.

Là encore, le manuel des Castors Juniors est clair à ce sujet. Si tu as un problème, résouds-le. Si quelqu'un que tu apprécies à un problème, résouds-le. À vrai dire, Law ressentait un peu de peine à savoir qu'il ne peut pas lui apporter son assistance dans l'épongement de sa fameuse dette.


Je peux remédier à tout.. sauf si ça vient de toi. Et c'est apparemment le cas.

Donc, lui aussi était impuissant. Euh ? Retour sur image. Il venait de dire qu'il ne pouvait rien faire ? Non, ce n'était décemment pas son genre. Rendez-nous le vrai Law !! èé. Auparavant, même face à cette situation, il aurait annoncé que "quelque chose était possible". Le pire, c'est qu'il le pense. Il n'a pas envie de forcer Andrea à résoudre ses propres incertitudes. Tout ce qu'il pouvait faire, c'est l'aider un peu. Et en d'autres situations, il l'aurait secouée, en lui disant que son avenir est dans ses mains, qu'elle devait se bouger le cul, elle saisit tout ce qui l'ennui à bras-le-corps pour qu'ils disparaissent. Bon, histoire de ne pas rester passif, il tentera de prodiguer un conseil, tout de même.

Aucune guerre n'a jamais été gagnée par l'inaction. Je ne peux peut-être pas définitivement régler ton problème mais.. je ne sais pas, peut-être.. peut-être puis-je le rendre moins pénible.

Une nouvelle partie était commencée. Law décidait de recourir à ses quelques capacités de manipulation de carte. Sans même avoir besoin de toucher le jeu, c'était un valet noir qui apparaissait, suivi d'un as rouge. "Black Jack !" s'exclame discrètement un voisin. Law reste détaché, alors qu'il vient de forcer le destin à aligner la meilleure combinaison de tout le jeu.

Tu veux rester ici cette nuit, peut-être ? Voire un petit peu plus.

Un certain Isaac paraissait, un peu plus loin, conversant avec un asiatique avec une singulière tenue de médecin, blouse serrée au niveau de la taille, tablier dont le style faisait penser à ceux des bouchers, et petites lunettes de sadiques. Hm. Agréable. 
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mardi 07 décembre 2010, 15:47:57
Pas facile de se douter qu’un plaisir est partagé quand on a pas l’habitude de le côtoyer. Andrea était tellement hermétique au déferlement qu’un sourire pouvait faire naître à l’intérieur de soi qu’elle ne remarqua même pas l’attitude de Law. Trop plongée dans ses propres ressentis, il était bien plus important de saisir cette douce chaleur qui se répandait dans toute sa poitrine pour irradier jusque chaque muscle de son visage. Tenter de garder près de soi l’enivrante mais éphémère sensation de satisfaction. Pour un détail peut-être, mais qui avait le mérite d’exister. Et c’est bien dommage qu’en cet instant, Andy ne se montre pas d’avantage tournée vers l’extérieur comme elle l’était en temps normal. Parce que le plaisir d’un hôte encore difficile à cerner aurait pu fortement contribuer à son plaisir d’être ici. Après tout, la jeune femme avait pour credo de se nourrir de l’apparent bonheur de ceux qui l’entouraient, pour espérer le ressentir à son tour. Et maintenant que c’était le cas, Andrea ne parvenait plus à se concentrer sur autre chose. Cette simple effervescence, cette tension dans le cœur au moment de demander encore une carte, ce banal jeu de casino réveillait petit à petit de vieux souvenirs. L’époque où elle y avait déjà joué, avant bien avant son anniversaire de fin de lycée. Le temps qui berçait ses sourires innocents.

Celui-ci l’était évidemment beaucoup moins. A la fois débarrassé de toute dimension profonde et habité par bien plus que la découverte, un geste ordinaire peut se charger de sens. Parce que c’était le premier depuis longtemps qu’Andy se permettait le luxe de s’offrir. Parce que c’était toujours pour les autres, jamais pour elle, et que découvrir l’égoïsme était quelque chose d’assez singulier. Imaginez qu’on vous fasse toujours vous sentir au service du bien être des gens, pliée à leurs humeurs changeantes et spectatrice de leur destinée. Puis tout d’un coup, quelqu’un vous prend par la main et vous jette au milieu d’eux. Au même rang, à la même place. Dans un univers où le cœur s’emballe, où les yeux scintillent, où les mots prennent du sens et font écho à quelque chose en vous. Quelque chose de profondément enfoui, d’oublié. Et bien en toute fatalité, il ne reste qu’une alternative : en avoir plus, toujours plus. Alors que les mises évoluaient sur le plateau de jeu suite à son petit exploit personnel, Law insista, comme si l’aider lui tenait réellement à cœur. Il fallut donc bien retenir un autre sourire, afin que ceux-ci ne la fassent pas passer pour une petite écervelée inconnue du monde. Ce qu’elle était. D’un raclement un peu difficile de la gorge, Andy répondit avec hésitation, comme pour bien choisir ses mots.

- Quelqu’un de ma famille m’a beaucoup aidée et je dois simplement faire quelques minimes choses pour le remercier. Ce n’est ... pas grave.

Les derniers mots eurent du mal à passer, et Andrea espéra que Law ne le remarque pas, ou bien s’appesantisse sur autre chose. Déjà, elle en avait trop dit et la dernière phrase pourtant si vraie et évidente jusqu’à présent sonnait comme faux. Cette simple difficulté de prononciation remettait en cause tout le raisonnement de la jeune femme, et ça il n’en était pas question. Ce n’était pas grave, rien n’était grave. La sensation de malaise qui la prenait en rentrant chez elle chaque soir n’était pas due à Seiji, certainement pas.

Tu parles.

Du moins ne voulait-elle pas se l’admettre à elle-même. Et si elle avait buté, c’était simplement qu’Andy ne souhaitait pas que son interlocuteur ne devine, ne la regarde autrement. Elle aimait les yeux qu’il posait sur elle, avec beaucoup plus de prévenance qu’auparavant. Et y lire de la pitié ou du dégoût serait bien trop difficile à admettre. Law devenait quelqu’un d’appréciable, et pour une fois qu’Andrea se sentait bien avec une personne, vraiment, elle ne comptait pas le laisser la fuir par sa faute. Rien ne servait de lui dire une vérité qui ne lui plairait pas, rien ne servait de lui imposer sa vie, aussi facilement qu’on parle du beau temps. Et puis c’était difficile à comprendre. Trop, sans doute. Andrea n’allait pas lui avouer qu’elle n’était qu’une coquille vide depuis deux ans, prête à se remplir de toutes les émotions qui n’étaient jusqu’ici pas les siennes. Alors rapidement, elle embraya à sa suite.

- Je te l’ai dit, tu m’aides déjà beaucoup.

Ces mots furent prononcés alors que la jeune femme posait une paume rassurante sur la main de Law, comme pour lui promettre la vérité et le remercier déjà, sans plus de paroles. Mais elle ne put rester que quelques instants à vouloir le persuader de son rôle dans la bonne soirée qu’elle passait envers et contre tout, puisque le jeu redémarrait enfin. Reprenant son poignet, Andy fixa de nouveau son regard sur le tapis pour suivre la partie. Qui ne dura pas, et son propre jeu ne l’intéressa même pas. Il suffisait de voir Law gagner avec panache pour s’amuser d’un rien. Elle l’aurait presque applaudit avec humour si sa main gauche ne la lançait pas encore un peu, malgré le bandage bienfaiteur de son compagnon de soirée. Se contentant alors d’une moue appréciative et d’un hochement de tête, elle perdit bien vite la nonchalance que ses traits affichaient à la proposition de Law.

Rester ? Ici ? ... Elle avait le droit, vraiment ? Andy lui aurait presque sauté au cou de soulagement. Elle ne pensait plus à rentrer depuis déjà un moment, et le fait de demeurer dans un rêve simplement un peu plus longtemps était déjà beaucoup. Le plus, par contre ... La jeune femme ne pouvait pas se le permettre. Abandonner Seiji quelques heures ne serait pas trop grave, mais il fallait bien que la réalité la rattrape un jour ou l’autre. Et puis, plus sérieusement, elle n’avait rien à faire ici. Andrea ne collait pas dans le décor, et elle gênerait bien vite. Sans doute cette proposition n’était-elle que politesse. Ou peut-être pas. Dans tous les cas, Andy ne pouvait se permettre de fuir indéfiniment. Bien que la fuite se trouve plutôt, sans qu’elle veuille le réaliser, dans un retour au point de départ. Mais à trop se sentir vivante, la sensation s’échapperait encore. Et puis Andrea avait peur. Peur de ne pas savoir quoi lui répondre, peur de refuser autant que d’accepter. Un moment, elle resta silencieuse comme concentrée sur tout autre chose que les cartes volant devant ses yeux. Puis ceux-ci se relevèrent pour croiser le visage encore interrogateur de Law. C’était ... difficile, d’imaginer pourquoi il lui proposait cela. Difficile parce qu’imprévu, parce qu’illogique. Et c’était ça qu’elle aimait, tout en angoissant de ne pas savoir comment l’aborder. Sa voix se fit un peu incertaine alors qu’elle répondait toutefois.

- Je vais déranger. Et puis il ne faut pas trop faire attendre ceux qui comptent sur vous, non ?

Silence, un instant. Andrea ne répondait pas à la question. Et son sourire revint percer avec persévérance les barrières solides de ses angoisses pour pointer le bout de son nez et tenter de lui redonner un baume au cœur. La soirée n’était pas terminée, peut-être avait-elle le droit de prendre quelques heures pour elle, encore. Alors c’est rapidement qu’elle ajouta, comme si la proposition s’était déjà envolée.

- D’accord, je veux. Mais seulement si tu me dis pourquoi tu me le proposes.

En fait, Andrea commençait à apprécier Law. Malgré sa brutalité, malgré leurs univers totalement opposés, malgré la divergence de leurs points de vue. Et elle ne voulait pas que ses rares espérances d’amitié se disloquent à cause de faux espoirs. S’il avait voulu être poli, si c’était seulement pour ne pas qu’elle ne se fasse crever dans la rue, si c’était pour toute autre raison comme celles évoquées, elle refuserait. Tout simplement, Andy voulait savoir ce que lui pensait, tant elle échouait encore à le comprendre ne serait-ce qu’un peu. Et voir s’il pouvait être sincère, aussi. Et tout ceci dans la plus totale ignorance des gens les entourant, y compris ceux auxquels Law pouvait attribuer son attention.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 07 décembre 2010, 18:49:30
Intéressant.
"Quelqu'un de ma famille". Cela expliquerait qu'elle veuille le couvrir. Le comportement des gens est bien étrange quand on touche à la famille : C'est précieux, c'est sacré. Pis encore si on les côtoie. Mais quelle importance ? Quel intérêt ? Pourquoi faudrait-il absolument sacrifier son âme pour sauver ceux qui partagent nos gènes ? Law n'a jamais été impliqué concernant ses proches, sauf ses parents qui l'ont élevé, et ont eux-même fait don de leur temps et de leur argent pour qu'il puisse vivre. Hormis ceux-là, ils peuvent tous mourir, comme tout les autres. C'est à peine si il accorderait à un cousin ou une grand-mère un vague sourire. C'est à dire, moins que l'un de ses clients, et beaucoup moins qu'à un larbin.
Alors, Law serait ravi de laminer personnellement le visage de son frère si il savait que c'était lui qui causait ces maux d'esprit à la petite Andrea dont il se fait un devoir personnel de lui rendre la vie plus légère.

S'apprête-t-il à répondre, ainsi qu'à miser, que l'hébreu toussote derrière eux, manifestant sa présence accompagné de l'asiatique, et de ses talents médical.


Oh, euh. Andrea, je te présente le Docteur Fu, qui s'occupe de.. de tout ce qui rentre dans ses compétences de Docteur. Docteur, c'est sa main.

La quarantaine, et l'air franchement nerveux, il pose une petite sacoche de cuir brun au sol et s'accroupit, pour tendre une main tremblotante et le bandage de fortune qu'avait fait Law, et le défaire. Un nouveau tour de jeu s'engage à table, sans que Law et Andrea n'y soit convié, bien évidemment. Du matériel de soin sorti de tout l'attirail qu'il trimballe, histoire d'extraire les éventuels morceaux de verre restants, appliquer un désinfectant "maison" qui ne pique presque pas - avouons que c'est suspect -, et y appliquer des bandes de tissu médical, constituant un pansement bien plus sain et présentable que les vagues soins de Law.

Donc, je disais. Le seul qui compte sur moi ici, c'est Isaac. D'ailleurs, habituellement, je compte sur lui pour ne pas compter sur moi. Mais il ne m'écoute pas. Tss.

Terminant son oeuvre, Fu se relève et remet correctement ses lunettes sur son nez, se tournant vers le patron pour toucher sa mâchoire. Ce dernier fit un geste pour dégager le contact chevrotant du professionnel.

-"C'est pas très beau tout ça. Un coup ?"
-Une formalité. Ca saigne pas, donc c'est pas grave.


L'asiatique grimaçe, examinera un court instant la paume d'Andrea qu'il venait de couvrir de ses attentions, puis salue le juif et s'éloigne. Aussitôt, Law fait signe à son adjoint de se pencher vers lui.

-J'ai fait un tour chez Melios. J'ai fichu une branlée à trois de ses gars. Enfin, moi deux, et elle s'est occupée du troisième alors qu'il allait me régler mon compte. Bref. Il est possible qu'il tente de revenir à la charge. Pendant que ses hommes viendront ici, ils ne seront pas auprès de lui. On en profites pour lui faire manger ce qu'il mérite. Dis à.. Sibrand de s'en charger.
-"Bien. Chef, il faudrait.."
-Pas maintenant.
-"C'est t..."
-Pas maintenant.


Exaspéré, mais tentant de garder son légendaire calme, l'administrateur s'enfonçait dans la foule, marchant jusqu'au fond de la salle, et la partie réservée au personnel sans rajouter le moindre mot. Law se retourne vers la partie.

Bon.. J'en étais où.. Ha. Pourquoi je fais ça ? Parce que je comptais te violer dans la rue, finalement je vais le faire ici. C'est plus confortable, et beaucoup moins risqué pour ma peau. Ca va, je plaisante..

L'ironie et la dérision sont des moyens d'auto-défenses inconscients, à ce qu'il paraît. Il veut sûrement garder ses sentiments de faible pour lui. Se montrer attaché ? Protecteur ? Conneries. Il voulait qu'on le voit comme un carnassier. Il s'agissait alors de la jouer fine : En dire, mais pas trop. Si le fauve ose courber l'échine parce qu'il est devant sa femme, un autre, plus féroce que lui, n'hésiteras pas à lui déchiqueter la nuque. Là où la loi du plus fort règne, Law se doit de se dresser de toute sa stature, imposant, fier, et de rugir à tout rompre, jusqu'à ce que tous s'inclinent et se soumettent. Une main de fer.. dans un gant de fer.

Je fais ça parce que tu as l'air mieux ici que là-bas. Et comme je t'aime bien, je voudrais que tu restes ici.

Bon, ben, foiré. Il a montré ses sentiments. Il n'a plus qu'à se pendre désormais. Du moins c'est ce qu'il pense. Il se concentre de nouveau sur le jeu. À moitié. En voulant se procurer une combinaison semblable à l'autre, il se donne deux as identiques. Euh ? Les gens autour de la table regardent cela fort bizarrement. Un problème dans le jeu de carte ? .. Oui, sans doute. D'ailleurs, c'est ce qu'il va avancer. La magie, sorcellerie et toutes ses conneries, ça demande au moins un peu de concentration.

Il doit y avoir quelque chose qui ne va pas dans le jeu. Disons que tout les joueurs remportent trois fois leur mise, pour la peine. (Et, se retournant vers Andrea) Tu as envie de faire quelque chose de particulier ? Ici ou ailleurs. C'est toi qui voit. C'est pour savoir si.. Enfin.. Je ne sais pas, dis-moi ce que tu voudrais faire.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mardi 07 décembre 2010, 21:25:59
Heureusement, heureusement que Law n’avait pas relevé sa première remarque. Parce qu’elle avait eu envie de lui dire tout en le regrettant instantanément, parce qu’il était hors de question qu’il apprenne quoi que ce soit à ce sujet, maintenant que son esprit avait repris ses directives. Andrea n’allait pas se laisser aller à la nostalgie. Surtout qu’en étant là ce soir, c’était pour oublier. Oublier ce qui la retenait chez elle, ce souvenir qui l’appelait en lui ordonnant de rentrer. Et tout compte fait, la jeune femme préférait tirer un trait sur cette discussion et en oublier les détails. Le masque de bonheur feint lui seyait finalement mieux. Sans savoir qu’elle était passée à deux doigts de la confiance aveugle, de la définition même de l’amitié qui est d’ouvrir son cœur, Andy se renfermait une fois de plus sur elle-même. Les mots qui n’étaient pas loin,  et qui auraient même pu s’exprimer autrement étaient retournés se cacher au plus profond de son cœur. Celui-ci qui continuait de ne pouvoir cicatriser tant que personne ne la prendrait en main pour la mener vers un autre chemin, bien plus sain et adéquat.  Quand on a perdu la notion de normalité sur tout ce qui nous concerne de près, il est difficile de s’en sortir seule. Lorsque les sentiments de répulsion, de dégoût et de tristesse ont soudainement cessés tout simplement d’exister, il n’est pas évident de les apprivoiser de nouveau pour les comprendre et leur faire une place.

La morale n’était qu’une institution, et là-dessus elle unirait très certainement beaucoup de monde dans la salle. Il était facile de porter un jugement de valeur, de condamner l’autre sans même se questionner soi-même. Il n’y a jamais de tout noir ou de tout blanc, alors la morale ne pouvait être qu’un lointain concept vers lequel tendre quand on a tout à perdre et qu’on a besoin à en crever d’un idéal. Alors oui, Law ne lui jetterait pas la pierre. Quoique, il fallait une certaine dose de compréhension et de tolérance dans le mauvais sens pour accepter sans broncher un tel type de révélations ... qu’Andy ne voulait de toute façon pas faire. Hors de question. Seiji était loin, et ici il ne la trouverait pas. Ici, elle était libre. Comme si on lui avait brutalement collé deux paires d’ailes dans les omoplates en la poussant du haut d’une falaise pour lui apprendre à voler. Elle se démenait tant bien que mal, pataugeait souvent dans l’incompréhension. Mais jusqu’ici, aucune chute libre n’était à déplorer. Elle était libre. Et blessée, accessoirement.

Un homme de petite taille qui lui rappelait décidément plus son environnement habituel fit irruption devant elle, accompagné d’un Isaac que la jeune femme connaissait déjà. Par réflexe, elle tendit sa main au médecin qui vint à sa rencontre et lui prit d’office l’avant-bras, l’empêchant de continuer à jouer. Law l’accompagna galamment dans son inactivité tandis que le dénommé Fu s’agitait autour de sa main endolorie. Andrea ne la sentait plus tellement jusqu’à présent, mais dès que la plaie se retrouva à l’air, elle fut agressée par une atmosphère pas des plus saines. Dans un geste réflexe de rétractation, la blessée se vit retenir le poignet vers son médecin attitré pour le moment. Tandis qu’il refaisait avec soin un pansement qui ressemblait d’avantage à quelque chose que le précédent, Andrea se rendit compte qu’elle n’avait presque plus mal, alors même qu’il venait au contact des chairs endolories. Quand Fu eut finit son office, Andrea lui lança un « Merci » avant que le doc’ se retourne vers Law sans plus la regarder. La jeune femme sut avant même que sa nouvelle connaissance ouvre la bouche que Fu n’obtiendrait pas ce qu’il désirait. Bingo, un médecin d’écarté, un. Bien sûr, ce n’était pas une égratignure qui allait ternir l’image du téméraire Law qui affronte trois grosses brutes comme il offrirait une poignée de main. Peut-être plus facilement, en fin de compte. 

S’en suivit une conversation entre le maître et le second, qu’Andrea ne voulut même pas écouter, se repenchant rapidement vers sa main ornée d’un tout nouveau bandage, propre et rutilant. Moins amusant que le précédent. Tout comme ce qui suivit. Ah ah. Très amusant, le cynisme détaché qui faisait que lui rappeler ce qu’il était et ce à quoi il avait pensé en la croisant. Andrea fit mine de ne rien laisser paraitre, mais ses lèvres se pincèrent inconsciemment, son expression devenant plus dure. Elle savait qu’il ne le pensait pas. Mais le dire était ridicule, loin d’être drôle et tout à fait inapproprié. Simplement pour lui montrer sa position à elle par rapport à la sienne à lui ? Andrea le savait, elle avait bien compris au fil du temps que son statut était celui de n’importe qui. A peine plus intéressante, du fait peut-être de sa provenance étrangère à cette ville. Une curiosité qu’on aime à cajoler quelques instants. Et Law ne faisait encore aucun pas vers elle. Il restait loin, tentant de fuir toute question difficile ou regard réprobateur. Qu’elle ne manqua pas de lui lancer d’ailleurs, et sa phrase suivante n’arrangea que peu la situation. Ce fut sans doute pour cela que sa réponse parut d’une banalité déconcertante, prononcée sur un ton assez froid.

- Tu ... ouais, difficile de savoir avec toi. On va dire que je prends l’option qui m’arrange, donc pas la première évidemment.

En fait, qui d’elle ou Lui faisait le plus de chemin vers l’autre ? Andrea lui avait tant reproché son attitude, ne faisant que voir les maladroits défauts mis en exergue par une habitude apparemment limitée et des manières qui laissaient à désirer. Elle, qui imaginait très bien ce qu’était ce sentiment, cette notion de rapprochement, ne faisait rien pour. Se contentant de juger et de regretter qu’il ne fasse pas plus d’efforts ... Andrea se rendait compte qu’elle n’en faisait aucun. Abject comportement qui lui aurait bien valu une claque ou deux. Elle eut envie d’effacer ses paroles, de les faire oublier rapidement et de passer à autre chose. Il ne devait pas retenir ça, tout comme elle tentait de ne pas se focaliser sur tout ce qu’elle ne préférait pas savoir sur lui. C’est donc plus timidement qu’elle tenta de rectifier le tir sans paraitre trop paradoxale.

- Bon, c’est d’accord alors. Je reste un peu, curiosité oblige.

Curiosité sur lui, bien sûr. Sur ce qui l’entourait, ce qu’il maniait avec tant d’adresse, ce dans quoi il baignait sans même s’en rendre compte. Un monde à la fois merveilleux et oppressant pour la demoiselle aux yeux sans cesse écarquillés. Cet homme au bar, qui boit tranquillement un liquide translucide qui ne semble pourtant pas être de l’eau. Cette femme au décolleté impressionnant qui la regardait la fixer d’un œil étrange. Cet homme qui triche honteusement au jeu ... Hum. Andrea jeta un regard en coin à Law qui s’en tirait par une pirouette des plus maladroites. Alors comme ça, le jeu et le goût du risque, hein. Ou la triche. Il ne manquait pas d’air, tiens. Andy savourait d’autant plus ses prises d’initiatives, quitte à tout perdre. Elle au moins gardait cette sensation qu’elle avait tant voulu retrouver. Et lui, était-il déjà blasé de cette ambiance qui électrifiait chacun des sens d’Andrea ? Elle n’en avait jamais assez, il lui fallait en apprendre beaucoup plus. Ce qui induit l’idée qui suivit. Faire un pas vers lui, oui mais comment ? Le mettre à l’aise tout en lui faisant comprendre qu’elle s’intéressait, qu’elle voulait le découvrir ... Prendre son pied en ouvrant toujours d’avantage les yeux sur ce qui l’entourait, se délecter de toutes petites choses ... Idée.

Andrea se leva, réajusta sa chemise noire en remontant légèrement les manches longues sur ses avant-bras afin de masquer les traces de sang séché ayant perlé de sa blessure. Elle jeta un regard alentours puis reposa ses yeux curieux sur Law. Elle debout, lui assis, elle paraissait tout d’un coup plus grande et assurée qu’en réalité. Ce qu’elle voulait faire ? Aucune idée, mais elle ne tenait pas en place. D’un ton pressé et une pointe de supplique dans la voix pour tenter d’amadouer son hôte, Andy lui demanda d’un ton plein d’espoir :

- Visiter. Ce que tu veux, mais apprendre ce qu’est ce monde qui me fait oublier le reste. Tout ce qui t’es évident et banal. Possible ?

Elle l’espérait, en tout cas. Du moment que le temps s’arrête et lui laisse profiter un maximum d’une errance imprévue qui l’avait fait tomber dans la boue pour découvrir tant de choses déjà chères à son cœur.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 07 décembre 2010, 23:01:00
Perplexe. Il était perplexe. Il était doué en relations humaines, quand il fallait prendre l'ascendant sur son adversaire. Là, il était clairement question de se comporter d'égal à égal. Et tout de suite, c'est un poil plus dur. Il se perd dans ses techniques de combat. Se réveler ? Non, nous avons déjà éliminer cette solution. Avancer ? Au risque de se brûler.. Pas l'idéal. Reculer ? Non, malheureux ! La fuite n'est pas une option chez toi. Voyons, Law, tu affrontes tes problèmes de face, sans ciller. Hm. Ne surtout pas défendre. Se défendre trop longtemps, c'est lâche. Bon, il reste quoi.. L'esquive. Mouarf, pas l'idéal. Bon. Tentons l'attaque. Il ne reste plus que ça. L'estoc, c'est ce qu'il préfère. Une attirance perverse pour le coup porté de la pointe d'une lame ou d'un poing, pour perforer les chairs, briser les os, faire reculer, opposer toute sa force à celle de l'autre. On va faire ça. D'abord, jouer avec l'arme de l'opposant.

Tu fais le bon choix en restant ici. Tu verras.. Il y a de quoi faire sur Nexus. Mais.. De là à savoir si ça te plaira..

Voilà. Et un joli pas sur le côté. Testons le jeu de jambe d'Andrea, histoire de voir.


Je vais te montrer un objet que j'ai acheté il y a très longtemps. Je m'en suis servi très peu.. Pourtant, il m'a coûté une blinde. Je pense que tu aimeras.

Il posait ses deux pieds à terre et s'éloignait vers le fond de la salle. Il constatait Isaac descendant l'escalier avec une bande de molosse. Il lui fit signe qu'il montait dans ses quartiers à son tour.. Quand, devant Law, paraissait un couple. Deux gros bourgeois de bonne famille, avec des tenues luxueuses dont Andrea n'avait pu voir l'apparence que dans des oeuvres de fantasy. La femme portait une robe blanche avec pléthore d'enjolivures dorées inutiles, onéreuses et aggressives au regard. L'homme, une tunique rouge et noir, avec de très larges manches, une cape avec un blason, et beaucoup de bijoux en argent. Le patron s'immobilise.. Et leur sourit. Politesses d'usage. Courbette devant Monsieur, baisemain à Madame.

-Merci de me faire l'honneur de votre présence. Comment allez-vous ?
-"Bien, merci. Ma femme et moi avions un peu d'argent à perdre..."
-Et moi j'ai beaucoup d'argent à perdre. Prenez-le moi plutôt que de me donner le vôtre.
-"Pourvu que vous soyez dans le vrai."


À grands renforts de gestes élégants et de sourires forcés, Law effectuait une parfaite démonstration d'hypocrisie commerciale.

-Votre fille va bien ?
-"Plutôt, oui.  Mais depuis sa défaite ici, elle ne veut plus revenir."
-Quel dommage. Ecoutez, je dois y aller, quelques affaires urgentes, vous-même savez ce que sont les responsabilités.


Après les salutations pour clore, Law passait son bras autour des épaules d'Andy pour l'emmener plus loin en vitesse. Il presse le pas. Il n'a décidemment pas envie de se livrer à ce genre de cirque toute la soirée. Etait-ce si évident qu'il détestait faire ça ? Il dépasse le groupe d'Isaac et le salue, puis monte les marches que l'administrateur vient de descendre. Engouffrement dans un dédale de couloirs.
Ces couloirs respirent le luxe, beaucoup de bois, des peintures, des tapisseries, des chandeliers tout les mètres. C'est chaleureux, mais peut-être qu'Andrea ne se sent pas à l'aise dans ce genre d'atmosphère. Law s'en fout : Tout ce qui lui importe, c'est qu'ici, entre ces murs inviolables, il est en sécurité absolue.
Des servantes les croisent, des clients qui entrent et sortent de quelques chambres les accompagnant, libidineux flambeur lorgnant ostensiblement sur leur croupe. À la vue de Law, ce sera un sourire poli, et à Andrea à côté, juste un regard dédaigneux. Affligeant.
Double-porte gardée passée sans problème. L'ambiance est la même, sinon que les couloirs sont un peu plus étroits, moins éclairés, et plus aucun intrus ici : Uniquement quelques rares hommes bien bâtis pour faire la surveillance.
Une salle. Il s'arrêtait devant.


Je crois que c'est là.. Non, en fait, j'en suis sûr, mais je ne sais pas vraiment si c'est là-dedans.


La porte s'ouvre.
Une salle des coffres. Avec, donc, des coffres. Des coffres anciens, tout carrés, en bois très solide, renforcés de métal aux encoignures, doublé à l'intérieur d'un solide blindage, sans aucune serrure.. Donc, sans moyen apparent de le verrouiller.


Ces trucs ne sont censés s'ouvrir qu'à ma volonté. Bon.. Ca marche pas à chaque coup.

Il passe en détail, un par un, tout ces inviolables receptacles à trésors. Et.. Enfin. C'est celui-là. Il se penche dessus, et l'ouvre. À l'intérieur, une cassette recouverte de cuir noir, qu'il extrait. Hop, celui-ci aussi est ouvert. À l'intérieur, un objet.. Et bien.. magique.
C'était une enchevètrement sphérique de fins anneaux d'or. Flottant en son sein, une petite boule blanche lumineuse. Law détournait le regard, pour l'offrir à Andrea. Il la forçait à le prendre.


Observe-le bien.. Et pense.. pense.. pense à ce que tu désires le plus.

Quelques secondes après avoir plongé ses yeux dedans, ce qui est dans son esprit (et donc, Law l'espère, "ce qu'elle désire le plus") se matérialise. Si elle a autre chose en tête, alors il apparaîtra tout pareil, remplaçant la salle des coffres par la vision de son esprit. Si jamais elle pense à quelque chose de trop abstrait pour être matériel, alors il apparaîtra sous forme de symboles et d'allégories.
Le voilà, son coup d'estoc. Zou !
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 08 décembre 2010, 07:40:51
Bon, manifestement elle avait le droit de demander à voir quelque chose de plus. Quoi que ce soit, Andrea serait sans doute comblée puisqu’elle ne voulait que s’abreuver d’images et de sons qui lui étaient inconnus. Alors si ça lui plairait, eh bien il faudrait attendre pour le voir. Mais pas longtemps, puisque Law prenait son impulsion et quittait déjà la table de jeu sans un regard en arrière. Andy, elle, s’attarda quelques secondes afin de hocher la tête en direction des autres participations. Une manière détournée de dire merci et bonne chance à la fois. Chance. Ce qu’elle avait touché du bout du doigt et ce que Law maitrisait. Comme tout le reste ici, sans doute. Pauvre petite naïve ignorante, Andrea ne s’était pas douté que la reluisance d’un monde où tout le monde peut tenter sa chance n’est parfois que poudre aux yeux. Pour elle, il y avait véritablement ce risque, cet espoir permanent, envers tout et contre tous. Evidemment, Andy n’était pas stupide au point d’imaginer qu’un jeu d’argent, quel qu’il soit, soit totalement exempt de fraudes et autres contournements à la pratique habituelle. Mais quand même, dommage.

Et l’autre qui était déjà parti, laissant encore en plan la jeune femme qui prenait le temps de savourer chaque instant, même celui du départ, en présence de ce qu’elle découvrait. Se retournant et pressant le pas pour rattraper son guide de la soirée, Andrea arriva peu avant que son compagnon ne croise les premiers clients qui allaient lui adresser la parole. Un homme et une femme aux habits étranges qu’elle ne voyait jamais portés dans la réalité, d’avantage dans le monde imaginaire des films médiévaux. Ils se tenaient là, à sentir bon et à étaler leur richesse sur leurs vêtements, dans leurs sourires et jusque dans leur intonation de voix. Et malgré ça, Law courbe l’échine devant eux. Andrea faillit laisser s’échapper un éclat de rire qu’elle contint avec mal devant l’attitude ridiculement empli de bonhomie  d’un homme fier et impitoyable. Le revers de la médaille, les obligations mondaines et courtoises pour tout homme d’affaire qui veut garder ses clients dans sa compagnie. Classique, et pourtant tellement inattendu de sa part. Baissant les yeux pour ne pas croiser le regard charmé des clients et laisser son hilarité prendre le dessus, Andrea jetait de simples coups d’œil aux expressions, forcées tant bien que mal, de Law.

Mais manifestement, il ne compte pas s’attarder et c’est sans attendre que son hôte reprit la route, l’enserrant dans une prise qui l’obligea à accélérer la cadence en même temps que lui. Entrainée encore et encore, Andrea se laissa faire jusqu’à la naissance d’un dédale de couloirs. Un endroit qu’elle n’aima instantanément pas. La jeune femme ne s’y sentait pas tant en décalage que cela, mais il lui était difficile de supporter la vue des fioritures et autres décorations qui parsemaient le chemin que Law et elle empruntaient. Rien de chaleureux pour elle, plutôt un décor factice de théâtre qui cache bien d’autres choses sans vouloir se l’assumer aux yeux des autres. Une protection bien maigre contre la réalité des faits, encourageant les visiteurs à ne pas penser à la simplicité et la laideur de leur but en venant ici. Car bien qu’Andrea ne sache pas ce qu’il se passait entre ces murs, elle se doutait que ce n’était pas un simple salon de thé. Et alors qu’elle jetait des airs réprobateurs à ce qui l’entouraient, les visiteurs le lui rendaient bien et la fixaient avec une expression hautaine où filtrait une animosité certaine et un dédain impérieux. Avant d’aller plus loin, Andrea glissa dans un sourire moqueur :

- Tu fais ça très bien, te faire respecter. Dommage qu’il faille en faire des tonnes avec certains.

Simple réflexion sans autre but que de couper le brouhaha des passages autour d’eux. Tintamarre qui se calma bien vite alors que Law et Andy se dirigeaient vers une autre partie de l’établissement, gardée sérieusement et au calme le plus profond. Les murs les entouraient maintenant de plus près, comme pour les prévenir de ne pas aller trop loin pour ne pas se retrouver coincer. Puis ce fut une porte comme les autres, devant laquelle le maître des lieux s’arrêta. Derrière, une salle dont le sol était jonché de coffres, de malles de bois peint et enjolivé d’une certaine couche de protection, sans aucun moyen pour les ouvrir. Là, Andrea mettait un pied dans un monde encore plus étrange, celui de la magie. Plus rien ne réussissait à l’étonner concernant cette ville, mais c’est sûr qu’elle ne s’attendait pas à ce que Law la manie avec autant de normalité. Etait-ce chose commune ici-bas ? Sans avoir de réponse à sa question muette, Andy regarda son guide se saisir d’un coffre de taille réduite et en extraire un objet qu’elle ne vit que lorsqu’il lui mit dans les mains.

Apparemment, le pulse lumineux de la bille immaculée entouré de cercles dorés était supposé avoir un rapport avec ce qu’elle désirait le plus. En réfléchissant un instant, Andy eut pu se douter de la suite, puisque Law s’empressa de ne pas regarder l’objet avant de le lui mettre dans les mains sans qu’elle puisse le refuser une seconde. C’était alors presque évident ce qui allait lui arriver, si seulement elle n’avait pas ignoré totalement l’existence d’objets  magiques. On ne se prépare pas à ce qu’on ne connait pas suffisamment. Ceci-dit, Andrea se serait sûrement fait la réflexion qu’il lui aurait été plus précieux de voir ce à quoi Law pensait, elle qui ne pouvait une seconde imaginer ce qu’il avait dans le crâne. Mais comme elle ne devina rien, Andrea laissa son regard se faire happer par l’artefact pour ne plus en bouger.

Ce qu’elle désire le plus ? A cet instant, c’est simple. Ce n’est pas Seiji. En temps normal, son souhait le plus cher serait de le voir enfin sur le point de déménager avec sa future femme, s’en allant très loin d’elle. Ou un retour en Finlande aux cotés de sa mère, dans la même optique de fuite. Mais ce soir, alors qu’Andrea a enfin réussi à oublier son frère et les tourments qu’il lui cause, c’est bien autre chose qu’elle désire. Amusant de voir comme l’esprit fait de priorités des choses éphémères qui ne demeurent qu’un temps, mais avec force dans les envies d’une jeune femme. En fait, plus qu’amusant, il est absolument passionnant de décrypter, ou ne serait-ce que tenter d’imaginer ce que notre cerveau fabrique seul. Des images qui n’existent pas se créent juste pour nous parfois, des souvenirs sont tronqués, la volonté n’entrant que partiellement en jeu. Peut-on maîtriser les rêves ? Pas plus qu’on ne maîtrise la magie lorsqu’on y connait rien. Et la magie de la genèse d’images sorties tout droit d’un cerveau tournant à plein régime où celle qui sort d’un artefact, c’est la même contrainte à maîtriser. Difficile, impossible, la conscience s’attachant à rejeter quelque chose que l’inconscient se fait alors un plaisir de mettre sur le devant de la scène.

Si bien que lorsque les couleurs se mélangent pour s’imposer à elle, Andrea ne sait pas trop ce qu’elle va voir. Elle espère juste ne pas croiser un visage qu’elle n’aimerait pas. Se compromettre. Avoir trop de détails dans cette expérience qui l’emporte aussi bien mentalement que physiquement. Comme transportée ailleurs, Andy ne fait plus attention qu’à ce qui se forme devant elle. Une silhouette. A première vue, elle ne reconnait pas la personne qui lui tourne le dos. Puis le contour se précise, l’ombre se retourne et ... la jeune femme n’en sait pas plus. Car c’est un visage vide qui lui apparait. Pas de trou noir, pas d’effacement, juste le néant. Rien. Pas de traits, pas d’expression. Et au fur et à mesure que les yeux de la spectatrice Andrea s’accommodent, c’est une chevelure blonde qu’elle voit coiffer ce vide. Ses cheveux. Et tout d’un coup, l’identité de cette silhouette inquiétante lui parait évidente. La révélation la prend à la gorge comme la main de Law l’a fait plus tôt dans la soirée, lui coupant la respiration. C’est elle, et à la fois personne.

Andrea est devenu une sorte de fantôme sans âme ni émotions, sans visage pour les exprimer. Tout est parfait chez elle, sauf cette tache noire d’inexistence qui vient tout gâcher. Incompréhension, d’abord. Est-ce qu’elle désire le plus en ce moment, s’horrifier devant ce qu’elle est devenue ? Mais un instant, le paysage se brouille. Quelqu’un arrive. De totalement différent, même de la réalité. Car son esprit invente ce qu’elle voit avec le cœur, aussi le monde et ses représentations n’ont de réel que ce qu’Andrea veut bien leur prêter. Un manteau vole, un coup de poing part. Andy voit son autre elle-même se faire projeter au tapis et disparaitre. Le propriétaire du poing se retourne, et encore une fois l’envie est trop floue pour que la jeune femme puisse reconnaitre celui qui vient de lui coller un coup. Et à mesure que son esprit turbine, modifiant ses souhaits et se mettant d’accord avec le reste de son corps sur le scénario auquel elle a réellement envie d’assister, la scène devient plus nette. L’action se répète encore et encore, et à chaque fois Andrea distingue mieux l’inconnu. A chaque fois, il se redresse un peu plus pour enfin finir, alors que le coup parti est si réel que la véritable Andy doit se frotter la joue pour se sentir intacte, par évoluer. La silhouette du vainqueur se retourne, tend la main et son visage s’illumine d’un sourire très doux.

Et là, Andrea réalise vraiment que ce n’est qu’un souhait. Parce que Law ne sourit pas comme ça.

Eh oui, c’est Law qui vient de donner une bonne leçon à celle qu’elle est tous les jours. C’est Law qui tente malgré elle de la pousser un peu vers le haut pour la sortir de ce néant affectif. Lui qui l’aura menacée, mise en danger, fait fuir, jouer, se blesser et tout cela sans savoir que c’était le meilleur des remèdes. En somme, c’est un peu ce qu’il s’est passé ce soir. Sauf que pas du tout, puisque le néant est toujours là quelque part en elle et que personne ne se retourne pour lui sourire de cette manière et l’inviter elle à venir dans le monde réel, à mettre un pied dans la joie et le plaisir spontané. Personne n’assomme sa réflexion d’un simple étirement de lèvres pour lui demander d’arrêter de penser et de simplement profiter de ce qu’elle ne connait plus. Et là, alors que la scène se répète sans qu’elle y accorde encore beaucoup d’attention, trop surprise de désirer à ce point qu’il la sorte de là, Andrea se rend compte d’un minuscule petit détail.

Law, le vrai, est là aussi.

- Et merde.

Comme il y a plusieurs heures de cela, un juron prononcé en une des deux langues maîtrisées par Andrea. Laquelle ? Impossible à dire. De toute façon, les deux auraient exprimé exactement le même sentiment. Bon, c’est le moment de se montrer un peu pitoyable et d’assumer de retomber un peu si elle ne veut pas se faire cracher à la figure qu’elle peut toujours rêver. Il n’allait sans doute pas apprécier ce qu’il avait pu voir aussi, alors quand les pots se brisent un à un on essaye au moins d’en sauver un.

- Non en fait c’est pas ce que tu crois ... Plutôt une association d’idées. Ou alors ton objet ne marche pas.

Cling. Echec critique.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 08 décembre 2010, 10:34:41
Le moment de la découverte est toujours quelque chose de délicieux. Pour la première fois, faire quelque chose, subir quelque chose. Pas n'importe quoi. Pas goûter des céréales, pas utiliser une perforeuse. Quelque chose de grand, comme sauter d'une falaise pour plonger dans des flots déchaînés, parler devant des centaines de gens. Jouer dans un casino ? Se battre ? .. Et utiliser la magie. Oui, c'est toujours les quelques secondes qui précèdent ce déniaisement qui sont fabuleuses. En l'occurence, Law aura pu sentir une véritable tension en remettant l'objet à Andrea, en la voyant tenir cette chose qui ne lui était que d'une piètre utilité, car il avait vite compris pourquoi les anciens possesseurs s'en étaient successivement débarassés. Apparemment, quelques pièces d'or leur avait semblées plus utiles que ce bibelot mystique.

Donc, la matérialisation de sa volonté la plus immédiate. Etrange. C'est elle qu'elle voit ? En effet. Les contours se précisent.. Mais pas les traits. Il doit y avoir une signification à cette malice. Ne se trouve-t-elle pas assez jolie ? Non, c'est sûrement plus profond. Peut-être est-ce qu'elle se considère sans âme ? Law l'a trouvée assez passive, malgré quelques relans d'un caractère bien trempé et passionné, elle ne faisait que suivre sans broncher les aléas de la volonté du tortionnaire de Nexus. Est-ce que, sans s'en rendre compte, le polyglotte ne faisait que manipuler une poupée ? Ca y est, il se posait des questions. Son attention voguait entre la vraie et la fausse. Et puis, une autre apparition. Le manteau ? La frappe ? Dans son esprit, tout de suite, il se gausse : Tiens, elle rêve de moi, pense-t-il en plaisantant. Le croquis se précise peu à peu.. et là, il se reconnaît franchement. Avec un sourire. Eurk. Il se trouve débectant avec un sourire. Faire la gueule ça lui va beaucoup mieux ! De toutes façons, les expression joyeuses, c'est pour les petites filles de 4 ans, avec leur insouçiance répugnante, leur gaieté, leur énergie exaspérante. Une petite robe, un jouet dans la main, des souliers tout neuf, maman qui gronde parce qu'à force de courir partout, elle va finir par se faire mal. Mais peu importe pour ces gamines : Elles continuent de courir, et de rire à tout va, comme si la vie était une fête et que des années plus tard, rien ne sera important, sinon de devoir continuer à lever ses pieds maladroits pour déambuler dans tout les sens, dans des éclats de voix joyeux et incontrôlé.

S'appuyant sur un mur proche, comme il le fait souvent, ses traits se durcissent. Pourquoi sourit-il ? Pourquoi la frappe-t-il ? Aurais-t-elle exprimé ses peurs plutôt que ses volontés ? Non, elle ne peut pas savoir le véritable but de cet objet. Si Law lui a demandé de penser à ses désirs, elle doit y penser sans dériver. Elle ne sait pas que si elle devait penser à une souffrance passée, à un cauchemar futur, à elle en petite fille, cela apparaîtra comme réel autour d'elle. Elle n'est pas encore au courant. Donc, elle n'a pas dû y penser. Donc elle pense à ce qu'elle veut. Donc elle pense à.. à.. ça.

Elle objecte. C'est un peu pitoyable, dans le sens où, dans ce cas, elle cherche à se défendre, ce qui conforte Law dans l'idée que, justement, l'objet ne s'est pas trompé. Si elle s'était montrée aussi étonnée que lui devant le spectacle de son propre esprit, il aurait pu exprimer un doute quant à la validité de l'image créée, et de sa provenance dans les pensées d'Andrea. Il aurait pu se dire que, comme elle vient de l'annoncer, le produit de cette magie n'était en fait qu'un mélange de quelques idées confuses. Mais elle vient de commettre un epic fail en tentant de discréditer l'artefact.


Non, il marche très bien, Andrea.

Avouant alors qu'il pensait bien qu'elle ne s'était pas trompée, et que tout n'était qu'une métaphore. Il ne voulait pas spécialement qu'il lui colle un pain - quoique, si, un peu - mais désirait surtout quelque chose "d'autre" par rapport à son monde à elle. S'immerger totalement là où Law patauge péniblement chaque jour. Il prend la sphère des mains d'Andrea, et hésite à regarder à l'intérieur.

Je.. Tiens, mettons-nous sur un pied d'égalité. Je vais essayer moi aussi.

Bon. Un peu de concentration, et son regard travers les interstices des anneaux dorés, plongeant tout droit vers la lumière. Il laisse ses pensées vagabonder.. Et le paysage d'Andrea disparaît faiblement pour laisser place à celui de Law.

Nous sommes plus ou moins au courant que ses pensées sont changeantes et confuses, alors il faudra un sacré temps d'adaptation pour arriver à manifester ce qu'il veut vraiment montrer à la finnoise. Il a néanmoins un avantage sur sa cadette : il sait comment marche l'objet pour l'avoir manipuler plusieurs fois. Il aurait donc moins de mal à lui faire comprendre des choses.

Passons en revue quelques aperçus de ce qui se trame parmi ses désirs. Bien vite se matérialisera un Law sur un trône, en haut d'un escalier de quelques petites marches, tapissées de rouge noble. Il n'a pas de couronne, il est juste bien habillé, mais bien plus simplement que le bourgeois de tout à l'heure. Le hic : Il semble mort. Les deux mains sur les accoudoirs, voûté, la tête tombante, les yeux fermés. Une majesté se dégage de lui, une prestance naturelle, mais morbide. L'image change. Toujours Law, mais nu, et cette fois-ci, assit sur un matelas désordonné. Une jeune femme, à la plastique rappelant celle d'Andrea, le chevauche, face à lui, frottant sa poitrine contre les pectoraux du polyglotte au rythme de son empalement sur lui. Le véritable Law peste, tout en continuant de fixer son objet magique : Ce n'est pas ça qu'il veut. Il serre les dents, et continue de laisser aller ses pensées. Un peu de concentration, que diable. Et enfin, tout s'estompe. La pièce est envahie d'un noir immense, le chaos absolu, le néant, rien. Ca y est, Law est en rage. Il sait comment fonctionne cet objet, il sait comment il doit s'y prendre. Ce n'est pas tellement son esprit qui déconne, que sa volonté. Ne veut-il donc rien dans la vie ? Sans lâcher du regard l'objet - sans le lâcher tout court - son poing part s'écraser contre le mur qui lui est proche. Un "bom" sourd retentir, et le bois aura même blanchi à l'endroit où il a frappé. Le noir se brouille enfin, comme si, dans une bouteille d'encre, on aurait laissé tomber quelques filets d'eau bénie, parfaitement blanche. Le vide se trouble, et se rempli. Le paysage qui les entoure devient.. Une magnifique plaine recouverte par la neige. Celle-ci tombe, très légèrement. Ce n'est pas un blizzard, juste une fine pluie de délicats flocons, purs. Quelques arbres, un chemin de terre qu'on distingue vaguement un peu plus loin, par les traces de roues qui y passe. Là encore, Law ne porte aucun vêtement. Il est accroupi, nu dans l'étendue blanche, tout aussi pur qu'elle. Son visage est levé vers le ciel, mais ses yeux sont une nouvelle fois clos. Quelques minuscules plumes glacées tombent sur son visage, et fondent. Bras contre son corps, avant-bras écartés, comme si il recevait une bénédiction. Désormais, le film est fixe. La neige continue de tomber. Il ne semble pas avoir froid. La béatitude flotte autour de lui.

Le Vrai fixe cette scène, presque passif. Le fond de son coeur est atteint. Les sentiments c'est de la merde. Cet objet, c'est de la merde. Cette vision c'est de la merde. Pourquoi ressent-il une tristesse si profonde à se voir seul, aussi heureux qu'un Saint, aussi pur que le Christ ? Il n'a plus d'attention pour Andrea. Il se regarde. Au bord des larmes, au bord d'une colère insoutenable, prêt à tout lâcher, tout faire exploser. L'objet qu'il tient en main n'a jamais eu quelque chose de si compliqué à faire apparaître, de toute son existence, au fil de ses différents propriétaires.. Et pourtant, rien n'a jamais été aussi clair.

Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 08 décembre 2010, 18:26:32
Admettons, c’est totalement stupide. Andrea aurait bien fracassé l’objet sur le sol s’il avait été à elle. Quelle idée d’exposer comme ça les envies des gens, dont ils n'ont parfois même pas conscience ? C’était profondément gênant de voir ainsi s’exposer des pensées dont elle ne se savait même pas maîtresse, sous les yeux d’un autre qu’elle. La jeune femme virait peu à peu au rouge, hésitant entre la colère et la honte. Inconvenante que cette vision, elle aurait bien imité le Law de son envie dévoilée et se coller un poing dans la figure. Juste histoire de lui remettre les idées en place. Y’a des gens comme ça qui ont besoin d’un bon traumatisme crânien pour arrêter de penser à des choses stupides. En cet instant, Andrea n’était pas difficile et simplement arrêter de penser lui suffirait. Amplement. Tout plutôt que de voir ainsi sa tête ouverte et grandement libérée. Heureusement pour elle, une seule image tournait en boucle. Cela lui évitait d’avoir droit à d’autres situations on ne peut plus dérangeantes, mais d’un autre côté ... La jeune femme ne supportait plus de voir le sourire irréel d’un Law retouché. Il avait l’air tellement différent qu’Andy se demandait même si ce qu’elle souhaitait c’était Law, ou le sourire.

Dans le premier cas, son esprit était tombé dans un sentimentalisme ridicule et déplorable, ressemblant à ceux de bien d’autres filles de son âge avec qui elle n’avait pourtant aucun point commun. Donc cette hypothèse tenait difficilement devant la critique, et s’écroulait dès qu’on la connaissait un peu. Faire du sentiment superflu, très peu pour elle. C’était donc le sourire la clé, et peut-être la main tendue. Et si Law avait enfilé ces attributs, c’est peut-être parce qu’Andrea n’avait aucune idée de l’apparence de celui ou celle qui la sortirait de ce cauchemar. Ne sachant pas du tout quelle silhouette l’aiderait, la jeune femme avait naturellement souhaité que chose soit faite le plus rapidement possible. Et la seule personne avec qui elle avait un peu parlé ces derniers temps, c’était Law. Dénouement logique pour son esprit un peu simplet parfois, donc, que d’associer ces deux constatations. Oui, quand on y réfléchissait, c’était bien évidemment ce qu’elle avait tenté de soutenir dans sa maigre défense, des idées qui s’enchainent bout à bout pour former une image qui révèle deux faits qu’elle souhaite en effet sans les associer. Parce que se dire qu’elle voulait que Law change, ce n’était pas totalement exact. Autre argument en faveur de la situation non désirée et ridiculement gênante, puisqu’Andrea appréciait celui qu’elle avait rencontré. Joueur, tricheur, avec ce petit air de héros des bas-fonds qui aurait trainé dans la rue un certain temps avant de se hisser à une place honorable. Bourreau et victime, quelqu’un de bien plus complexe, bien trop pour sortir ce sourire si pur et dénué de profondeur.

Car Andy, qui ne connaissait pas encore le sentiment que sa vision tentait d’exprimer, à savoir le plaisir d’être comprise et accompagnée, n’envisageait, elle non plus, pas une telle expression sur le visage de quelqu’un. Si le véritable Law devait être profondément dégoûté par cette image, elle-même ne se sentait pas à l’aise avec ce sourire. Celui de quelqu’un de plat, inintéressant qui n’a rien à monter. Du moins tentait-elle de s’en persuader pour justifier qu’elle ne désirait pas voir Law ainsi et donc donner un sens à son raisonnement. Celui-là même qui aboutissait simplement à la conclusion que ce désir était plus dur à comprendre qu’il n’y paraissait et que toute erreur d’interprétation pouvait lui être fatale. Mais alors, pourquoi ses joues restaient colorées de rouge si elles n’avaient soudainement plus aucune raison de l’être ? Honte de soi et de sa faiblesse, peur qu’on ne comprenne pas totalement la situation ? Sans doute un peu des deux. D’ailleurs, Andrea n’osait pas fixer Law dans les yeux, elle d’ordinaire si franche et honnête dans ses paroles et ses actes. Là, le malaise. D’autant plus quand il lui répondit d’une phrase claire et précise qui mettait un terme à toute autre tentative ridicule de justification. En ces simples mots il avait mis fin à son maigre espoir de le voir indulgent et de ne pas lui tenir rigueur de ... ça. D’autant plus qu’elle n’avait rien décidé de manière consciente. Et certainement pas eu le choix de prendre l’objet entre ses mains, ou de savoir ce qui allait se passer avant que tout ne se déclenche.

En gros, c’était difficile de remonter la pente quand on vient soi-même de se jeter à bas de la montagne dans un délibéré espoir de se faire piétiner puis oublier. Tout ça parce qu’on a changé d’avis et que le regard de l’autre compte finalement plus qu’on ne l’aurait cru, alors que ce genre de détails n’étaient d’ordinaire que futilités. Tout ça à cause d’un simple objet de malheur. Andy jeta un regard noir à ce qu’elle tenait entre les mains, et crut sauter de joie quand elle se le fit prendre par Law. Surprise, la jeune femme pensait voir se ranger l’artefact et passer à autre chose. Une réplique moqueuse, quelque chose. Mais au lieu de cela, il plongea de son plein gré les yeux dans la sphère laiteuse en déclarant essayer.

Était-il complètement fou pour vouloir ainsi exposer son être, lui qui n’avait jusque-là fait que fuir ? Ou alors trop curieux pour attendre ? En tout cas, c’était une réaction bien étrange et totalement inattendue de la part d’un homme qui a l’air de tout mettre en œuvre pour se protéger, tout le temps. Et ceci plus sur le plan moral que physique. D’autant plus que le temps lui donna raison. Parce que ce qui défila sous leurs yeux n’était pas visible par tous, parce qu’Andrea se sentait de trop. Contrairement à l’envie qu’elle avait précédemment exprimée de savoir ce qu’il se passait si son compagnon prenait en main ce révélateur bien embêtant, elle aurait préféré être ailleurs. Andy aurait beaucoup donné pour s’en aller très loin et laisser Law avec lui-même. Elle se sentait en trop là où lui avait cru normal de rester. La jeune femme sentait un goût amer remonter dans sa bouche lorsque les premières images apparaissaient. Vu de l’extérieur, ça n’avait plus rien à voir. Car celui qui tient l’objet sait ce qui va lui arriver, car celui qui le possède se connait mieux que quiconque et saura interpréter, définir les limites entre la réalité et ses désirs. Et l’autre, non.

Et la danse commence. Comme pour Andrea, les couleurs mettent du temps à arriver. Successivement se suivent plusieurs scènes, toutes plus déconcertantes les unes que les autres. La première est globalement ce que la jeune femme pouvait attendre, un souverain sur son trône gardant ses ouailles d’un regard lointain. Un peu trop lointain, le regard. Le cœur d’Andy manque un battement quand elle se rend compte que le roi est seul, mais surtout qu’il le sera pour l’éternité, aussi froid qu’un mort peut l’être. Et cette ambiance qui écrase, broie tout ce qui fait d’un être humain un corps vif et habité par quelque chose. Mais ce n’est apparemment pas ce que Law désire, et Andrea se demande si l’objet ne fait au final que montrer ce à quoi on pense ... Ou pas. Ignorant le fonctionnement de quelque chose de magique, elle se contente de s’écarter de Law de quelques pas et d’attendre la suite. Car déjà, tout se trouble comme un millier de pixels qui se mélangent à nouveau pour créer un autre paysage, plus humain. Quoique. Plus bestial, oui. Humain, Andy ne sait pas. Pour elle la scène qui suit a bien plus de sens que pour son propriétaire, sans doute. Elle observe un décor qu’elle retrouve presque tous les soirs, un contexte qu’elle a souvent connu. Mais à la différence que la fille qui chevauche son amant –sans qu’elle voie son visage- parait prendre un plaisir véritable. Dans une action à laquelle elle-même n’accorde pas plus d’attention qu’en serrant une main. Alors oui, cette vision la surprend puisqu’elle est persuadée que la simulation est une constante en matière de relations humaines. Elle ne connait plus que ça.

Cela ne lui fera pourtant que hausser un sourcil presque amusé, persuadée encore que Law est plus complexe qu'il n'y parait pour réellement désirer cela et uniquement cela. Et la suite lui donne raison. Par une première image surprenante, et qui lui rappelle étrangement quelque chose. Oppressant néant qui s’abat sur la pièce, effaçant tout et avalant chaque détail de la réalité. Andrea n’aperçoit plus que le maître des lieux, qui ne semble pas apprécier ce qu’il voit. Andy aurait été légèrement désappointée également si l’objet s’était figé là-dessus. Elle préférait encore le tableau précédent. Law aussi, manifestement et comme le montra sa colère partant se ficher dans le mur, laissant résonner le bruit de l’impact dans l’immensité réduite de ce vide qui serait supposé représenter son plus grand souhait ... Cela lui ressemblait trop et Andrea ne voulait pas croire que c’était simplement ça, Law. Résumé à un rien, résumé à un tout qui n’existe pas, sans volonté ni désirs.

Et beaucoup plus. La scène finale, Andrea ne tenta même pas de la décrire. Laissant ses yeux voyager sur cette poésie inattendue, elle se refusa à mettre des mots là-dessus. Et tout le temps que Law se regarda dans une situation des plus poignantes, Andy se mordait la lèvre inférieure tout en le fixant lui. Le Vrai. Un coup d’œil lui avait suffi pour voir le fruit de ses désirs, et c’était l’original qui l’intéressait à présent bien plus.

Andrea ne peut en supporter d’avantage. Quitte à ce qu’il colle une rouste pour déranger ce qui n’appartient qu’à lui, quitte à ce qu’il lui parle comme à une malpropre. Impossible de respecter ce moment sans bouger et de le regarder, d’un coup, perdre tout ce qui jusqu’à présent le définissait. Alors elle s’approche sans bruit, convaincue du fait qu’il n’a plus aucune conscience de sa présence. Son esprit doit simplement être centré sur lui-même, et l’entourage lui importe peu. Cela paraitrait logique. Arrivant enfin à sa hauteur, elle passe devant lui, se frayant un passage dans son champ de vision qui ne doit pourtant que voir son autre lui-même. Fermant ses mains autour de celles de Law pour cacher l’objet puis lui retirer délicatement, elle l’éloigne de lui et de son regard en le passant dans sa poche de chemise. Mais, gardant ses paumes sur les siennes, elle ne peut s’empêcher de murmurer quelque chose. Et tant pis s’il le prend mal et se défend en réagissant comme il le fait d’ordinaire. Andy est trop retournée pour laisser passer cela. Comme la claque qu’elle lui a administrée un peu plus tôt dans la soirée, elle n’a d’autre choix que cette alternative.

- Law. Reviens-ici.

C’est la première fois qu’elle peut l’appeler par son nom véritable. La première fois qu’elle lui donne un ordre, la première fois qu’elle n’a aucune méfiance alors que la situation est peut-être la plus dangereuse de la nuit. Et elle espère qu’il revienne, trouvant un point d’ancrage autre que le blanc immaculé de la neige froide que son cœur crie et imagine pour lui. S’il faut faire plus pour le ramener, elle le fera. Resserrant son emprise autour des mains de l’homme fébrile en face d’elle, elle cherche son regard et tente d’y trouver quelque chose qui ne soit pas parti loin d’elle. Puis elle libère les poignets de Law pour porter ses doigts jusqu'à sa nuque et l'obliger à incliner la tête et à ficher ses yeux dans les siens. Mine de rien, il est un peu plus grand qu'elle. Qu’il revienne, qu’il reste là. Que la soupape de sécurité que son corps a l’air de craindre ne cède pas. Et que ce putain d’objet aille se faire voir ailleurs.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 08 décembre 2010, 20:12:09
Il s'était perdu. Pas dans le sens où il ne trouve plus son chemin, mais dans le sens où lui-même ne sait plus où il est, ni ce qu'il est. Le physique est absent ; le mental est, lui, totalement évaporé. Dissous dans les limbes d'un passé et d'un futur dont il contemple impuissant l'atroçe scène d'une christique solitude. Qu'est ce que ça signifie ? Pourquoi était-ce cette image qui se manifestait en particulier ? Law voulait du sexe, du sang, du pouvoir.. Quelle raison y avait-il à faire apparaître, comme ultime volonté, celle de lui agenouillé dans cette étendue de neige, tombeau de ses sentiments enfouis ? Il a tellement envie de tendre la main vers cet autre lui, et de lui demander ce qu'il fait nu ainsi. Mieux, il veut le secouer. Marche ! Saisis-toi de ce qui t'appartiens ! Tu sais que tu peux le faire. Tu es Law, tu peux tout faire. Tu as souffert pendant des années pour devenir quelqu'un de grand, et tu dois encore souffrir pour tout avoir. Bouge ! Lève-toi ! .. Et alors qu'il se perd dans ces considérations, l'ersatz de lui-même baisse le visage pour plonger son regard dans le sien. Comme un miroir. Un reflet imparfait cependant : Tandis que l'un est fatigué, las, habillé d'un manteau quelque peu usé, empli d'une rage folle, d'un désir de vengeance perpétuel, l'autre n'est que lui-même, sans émotions négatives, dépouillé de sa haine, dénué de sa folie.

C'est à ce moment-là que la rétine de Law capte un mouvement, Andrea venant se mettre devant lui. Il a plus de hauteur qu'elle, il continue alors de se contempler. Comme si la réplique culte allait être lancée maintenant. Mais rien ne venait de la part de son double aussi blanc que le paysage.


Attends. Attends..

Elle lui retire la sphère, mais la bobine n'est pas terminée pour autant. Il faudra attendre que l'objet soit caché pour que l'image commence à se brouiller. Et quand enfin, elle le force à rompre le contact visuel, la lumière alentour se crispe, comme broyée par l'envie destructrice d'un Dieu vengeur, tout se dissipe, s'efface.. Et le décor originel revient : la salle des coffres.

Law commence seulement à se retrouver. Fixant Andrea, les yeux dans le vague, il respire lentement, trop lentement. Se demandant si il devait l'embrasser, la frapper. Se mettre nu et courir dehors ? Envoyer chier Isaac et son sens du zèle. Péter la gueule à Magnus et ses 4 bras. Violer la femme du Baron. Faire sauter ses établissements et partir, loin, là où personne ne le retrouvera jamais, pour devenir quelqu'un d'autre. Mais non, il sent qu'il n'a pas envie de devenir quelqu'un d'autre que ce qu'il est maintenant. Alors pourquoi cet objet le lui montre ? Ses lèvres s'agitent sans qu'aucun son ne puisse en sortir avant plusieurs secondes. Quand enfin il pourra parler, il n'aura pas bougé d'un pouce depuis ces 5 dernières minutes.


Désolé. De.. Enfin.. Ce truc ne doit pas marcher très bien.


Mais désormais, tout les deux savaient très bien que si. Si, il marchait bien, si, il avait réussi à matérialiser plus ou moins leurs désirs à tout les deux, même si cela n'était pas forcément très clair. Eut-elle pensé à retirer ses mains ? Law l'en empêche. Il lui saisit les poignets, pour qu'elle garde son emprise sur lui.

J'suis là. Tout va bien. C'est quelque chose, la magie, n'est-ce pas ?

Un sourire. Rassurant, simple. Pas loin de celui qu'Andrea a pu apercevoir dans sa propre vision.. Mais pas le même encore.
Les angoisses s'envolent instantanément. La nature de Law aura repris sa place, apaisée de quelques unes de ses souffrances. Plus léger, juste pour quelques instants. D'ailleurs, là, ce serait le moment rêvé pour l'embrasser. Un moment infiniment propice à la sensualité, où, si la passion apparaissait, elle aurait été tellement palpable qu'il eût été possible de la saisir. Un moment où Law était enfin fragile.
Mais Law ne connaissait pas l'amour et pour lui, toute attirance était avant tout sexuelle. Ne voyant pas Andrea comme une proie à livrer à son désir charnel, la situation précise de la jeune fille naviguait dans un flou parfait dans les tréfonds de l'âme d'un tourmenté, sans qu'il ne puisse aucunement la mettre dans une catégorie claire.


Je sais pas où t'emmener.. Pour te changer les idées après cette expérience.. J'ai pensé à te traîner dans une baston de rue.. C'est toujours agréable.. Mais je ne pense pas que tu as tellement envie de te lancer là-dedans..

Fausse bonne idée.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 08 décembre 2010, 21:52:36
A ce moment-là, fini l’Epouvantail, fini le père de famille, fini tout autre personnage qui servait de référence à Andrea. Celle qui aimait tant analyser le comportement des autres pour en extirper des pistes de compréhension, des modes de conduites et des émotions qu’elle pourrait imiter pour faire semblant de les vivre se trouvait démunie. Même Law en était comme dépourvu à cet instant, où il ne faisait que contempler le vide d’un regard vide et morne. C’était ça aussi. Andy se sentait toujours obligée de rendre son visage expressif et vivant, mais la réalité des faits c’est également pouvoir s’oublier quelques minutes et demeurer là, totalement soumis à l’incertitude absolue. Oui, il la regardait. Sans la voir. Oui, il respirait. Inefficacement. Oui, il parlait. Du moins tentait. La personne qui faisait de lui ce qu’il était avait soudainement disparue, et Law n’était plus que réduit à de simples manifestations physiques qu’il conduisait tant bien que mal. Ce n’était plus qu’une marionnette, un enfant qui se réveille d’un long rêve où il a bien cru perdre pied. La première phase est celle d’hébétude, où le cerveau s’engourdit et refuse d’intégrer. Typiquement le genre de sensation où le corps plonge encore dans un océan de coton qui vous coupe presque le souffle et vous oblige à ne penser qu’à la chute. La chute, rien d’autre. Inconsciemment, bien sûr. Law voyait-il la fin de son rêve arriver ? Allait-il sortir de l’irréel avec douceur ou en sursaut ?

La deuxième phase est celle de la prise de conscience. Un temps de latence vous englobe, protégeant vos sens des agressions extérieures, trop fortes à supporter dans un état aussi vulnérable. L’esprit est endommagé de visions qu’il ne prévoyait pas ni n’envisageait. Le corps doit subir les répercussions d’une agression trop rapide et insidieuse. Comme un enfant qui ouvre les yeux après une mauvaise nuit et hésite avant de fondre en larmes, personne n’étant là pour les essuyer. Et si personne n’est là pour les voir, les pleurs n’ont ni fondement ni impact. Il fallait toujours une mère bienveillante pour que les enfants fondent en sanglots. Law émergeait d’un état regroupant un peu toutes ces caractéristiques, et lui-même avançait la thèse si stupidement évoquée auparavant de la défectuosité de l’appareil. Encore à moitié parti, il cherche ses mots et tente d’avancer une raison qui ne le fera pas paraitre trop faible, trop atteint. Andrea connait bien ça, et elle aimerait laisser passer cette sensation. Afin que lui conserve la dignité d’au moins faire semblant de croire. Mais si Andy laissait passer ça, c’était bien autre chose qui se faufilait par la porte ouverte. C’était l’impact que devait avoir cette expérience. C’était la formulation tout haut de ce qu’il s’était joué en silence. Difficile de passer pour le rôle de sermonneur mais il en fallait un, et la jeune femme était également passé par l’autre situation. Aussi c’est doucement, toujours d’une voix qui l’encourageait à revenir progressivement ici, avec elle, qu’Andrea prit la parole, avec résolution.

- Tu sais aussi bien que moi qu’il marche, et que ce que tu as vu doit rester là.

En disant cela, elle pointa un endroit de son torse et l’effleura du bout de l’index, ses poignets étant soudainement enclavés par les mains de Law. Elle ne pouvait plus les bouger, et sans doute n’en avait-elle pas envie. Ainsi, elle gardait en quelque sorte la main mise sur lui. Ce simple contact lui rappelait que la réalité, ce n’était pas ce qu’il avait vu. Qu’elle seule ici était tangible, elle n’avait rien de magique et ne bougerait pas. Il fallait se raccrocher à ce que l’on pouvait, à ce dont on était sûr. Et Andrea voulait devenir un élément sûr, de confiance. Ces quelques minutes, la jeune femme avait beaucoup progressé en direction de Law, et elle se félicitait que celui-ci n’ait pas envie de fuir sur le champ. Malgré l’image qu’elle lui avait prêtée dans sa vision qui n’avait pas dû lui plaire. Ou alors était-il encore trop assommé pour comprendre ce qui lui arrivait, qui il tenait aussi fermement. Peut-être que le réveil complet allait changer la donne et raviver le souvenir, pourtant négligeable par rapport à l’expérience de Law, qu’Andy avait de lui.

Mais qui était-elle pour critiquer et supputer ? Cet homme lui avait maintes et maintes fois montré au cours de la soirée qu’elle n’avait aucune raison de se baser sur des à priori. Ce qui rendait les choses compliquées, puisqu’elle avançait totalement en aveugle. Ne sachant pas où se diriger, ce qu’il accepterait ou non, Andrea pataugeait seule en face de ses émotions à elle. Guidée par aucun signe extérieur fiable, elle se retrouvait comme dépossédée de son don d’extrapolation. Andy ne devait faire confiance qu’à elle-même et à ses sentiments propres, qu’elle pensait ne pas avoir. Voilà sans doute ce qu’elle appréciait autant au contact de Law. A chaque instant, c’était le goût du risque de ne pas savoir quelle attitude adopter pour obtenir telle réaction. A chaque minute, l’angoisse de faire un pas de travers et pourtant l’envie de le faire. Au fur et à mesure, la jeune femme sentait son cœur se gonfler d’un peu plus de courage et de volonté. Elle n’avait pas peur. Tout le monde était à la recherche de quelque chose. Law étant un être mystérieux mais influent dans un domaine prolifique, certains voudraient l’utiliser ou se plier à ses ordres et lui servir de jouets. D’autres encore tentaient très certainement de l’abuser, alors qu’eux même renversaient la situation sans le savoir et se faisaient piétiner. Andrea, elle, voulait tout à la fois. S’il fallait passer par chacune des étapes, c’était envisageable. La jeune femme voulait savoir ce qu’il y avait là, devant elle. Sous la chaleur de ces paumes qui la maintenaient encore sans s’en rendre compte. Derrière le regard parfois dur. Derrière le sourire.

Le sourire. Il le lui offrait presque sans noirceur, presque sans complications. Presque. Et cet à peu près suffit à en déclencher un similaire chez la jeune femme. Communicatif, ce comportement surprenant de sa part. Un simple étirement de lèvres qui le faisait paraitre étrangement apaisé, presque serein. Des mots qu’Andy n’aurait jamais pensé attribuer au Law qu’elle avait rencontré dans la ruelle. Et sur ce simple geste qui en disait bien plus qu’il ne voulait le laisser paraitre, il pensait déjà à l’après. Comme si ce qu’il venait de se passer était banal. Pour le coup, Andrea l’aurait bien saisit par les épaules pour le secouer vivement et lui demander ce que c’était que cette attitude nonchalante. Surtout que ce n’était pas tant se changer les idées qui importait, juste les créer. Lui faire appréhender ce que tout un chacun connait parfaitement. Et pour ça, il n’y avait peut-être pas besoin d’aller encore chercher la violence. Si lui ne connaissait que cela, Andrea ne connaissait rien et pouvait donc partir de l’un ou l’autre côté. Ce fut un chemin différent qu’elle entreprit. Son esprit cynique et son sens de la répartie habilement rangés, c’est la jeune femme qui ressortait alors et qui se désespérait de voire Law régler un flottement par une solution peu adaptée. S’il fallait vraiment tout lui apprendre comme à un gamin, eh bien il fallait qu’Andy s’y colle. Alors qu’elle-même ne savait pas exactement ce qu’il faille faire. En théorie, oui. En pratique, c’était souvent qu’on le lui demandait. Mais pas dans cette dimension de réalité et de prise de risque. Elle avait l’habitude de satisfaire, pas d’engager volontairement, sous le coup d’une impulsion à elle.

- Si tu commençais par te taire deux minutes ? J’aimerais essayer quelque chose avant que tu ne m’emmènes ailleurs. Vu qu’apparemment tu ne vas pas le faire.

Et là, Andrea se hissa légèrement et dégagea une main pour satisfaire son équilibre en s’appuyant sur l’épaule de Law. Elle avait envie, alors elle faisait. Et tant pis pour les conséquences, c’était bien la première fois qu’une telle impulsion lui prenait. Andy déposa donc un baiser sur le visage de l’homme qui lui faisait face. Mais pas celui de l’amie chastement déposé sur la joue, ni celui de l’amante affirmée qui possède sans hésiter ce qui ne lui appartient pas. Juste entre les deux, d’un effleurement très discret et pudique. Simplement pour vérifier quelque chose ... Oui, ce risque de ne pas savoir ce qui allait arriver était toujours là. Et, chose toute nouvelle, Andrea trouva cela agréable. Après, restait à voir ce que Law allait faire d’un geste dont il n’avait sans doute pas l’habitude. Au pire, elle allait s’entendre dire qu’elle était totalement à côté de la plaque. Bah ouais, et alors ? En attendant, elle pouvait ajouter une chose.

- Merci.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le jeudi 09 décembre 2010, 10:08:29
Il redescendait tout doucement sur terre. Enfin, sur Terra. Il serait bien resté dans son rêve un instant de plus, juste pour pouvoir tenter d'en déceler la signification. Mais non, c'était terminé, et ce définitivement.. Car il ne pense pas qu'il puisse un jour, même lointain, se retrouver dans cet état de faiblesse psychologique qui lui a permit d'accéder plus loin dans les différentes sphères de son mental déséquilibré, aux fondations rongées par des doutes dévorants et des certitudes pourtant instables, car le proverbe bien connu annonçant qu' "il n'y a que les cons qui ne changent pas d'avis" illustre le fait que camper sur des positions établies sans prendre la peine de devoir les remettre en cause de temps en temps prouve une peur du changement, ou du moins, l'appréhension de devoir changer ses bases sur lesquels on arrive à se maintenir dans une eurythmie spirituel.

Finalement, c'est Andrea qui va le faire décoller de nouveau. Alors qu'elle lui adressait ce baiser, une décharge extatique transperça de part en part chaque atome de son enveloppe, pour perforer ses barrières, et porter un assaut direct et foudroyant sur ses pensées. Le temps, pour lui, s'est arrêté. Il souffre. Ca ne dure qu'une poignée de centièmes de secondes, et pourtant, jamais il n'a pu ressentir telle douleur psychologique. Un choc, parfaitement. Sa tête eut put exploser ; il se serait vidé de son sang ; l'on lui aurait brisé les membres supérieurs et inférieurs simultanément qu'il n'aurait pas pu éprouver telle géhenne tant la violence de l'impact avait été puissant.

Et puis, c'était fini. Ca n'avait même pas commencé vraiment que c'était déjà terminé. Son esprit est miné par ses folies - ses, car elles sont plusieurs -, elles le bombardent et l'empêche de penser clairement. Son inaltérable force d'esprit balaie soudain tout les égarements, tout ceux accumulés depuis son entrée dans cette chambre, et sur le vil champ de bataille témoin d'une guerre impitoyable où le dénouement failli être critique, ne se dressait plus qu'un seul combattant, nu de toute arme et de tout artifice guerrier. Et sa seule envie, c'était de se saisir d'un sabre, et de retourner illico sur un nouveau théâtre d'une boucherie sanglante et incertaine. Law voulait de nouveau faire subir à son esprit la déflagration de la démence de ce qu'il peut enfin appeler l'amour - ou du moins un semblant.

Eut-elle amorcé son merci que Law se jetait sur elle. Affamé, violent comme le plus cinglant des fauves, il se penchait sur elle et précipitait la rencontre de leurs lèvres de nouveau. Mais une fois le baiser scellé de nouveau, il se faisait force de tendresse. Ses deux mains se levaient pour la saisit au cou, les pouces sur sa mâchoire. Le contact était divin, sensuel, passionné, mais il restait tout de même délicat, comme un amant, comme s'il la chérissait et n'osait l'abîmer. Il ne resta dans cet état que quelques secondes, avant de tout rompre. Il ouvre les yeux avec difficulté. Il a peur du regard d'Andrea, de sa réaction post-surprise. Allait-elle le repousser ? Le frapper ? Il aurait accepté sans révolte. Peut-être pensait-il qu'il méritait bien une bonne mandale..

Lui, en tout cas, ne sait pas quoi dire ni quoi faire. Il ne voyait toujours pas Andrea comme un objet sexuel, chose étrange quand on connaît sa nature : jamais rassasié de son envie charnelle, la simple évocation d'une paire de hanches, le simple regard appuyé était prétexte chez lui à l'excitation et au désir sauvage. Il veut, il prend. De force si il le faut. Et ses mains toujours autour d'elle, qu'il pensait un peu trop propriétaire, il les détachait bien vite pour les ramener contre lui. Et il voit aussitôt ce geste comme une erreur : Il aurait dû les laisser. Ca y est, son pouvoir de décision n'est plus, sa capacité à réfléchir s'est fait la malle avec sa volonté. Qu'est ce qu'il lui reste ?
Le fait de pouvoir la contempler, comme une admiration, et aussi comme un appel à l'aide. Rien d'autre.
La parole a dû se tirer avec, parce qu'il a beau vouloir dire quelque chose, rien ne sort.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le jeudi 09 décembre 2010, 11:17:41
A vrai dire, Andrea ne s’attendait pas à bon accueil. Dans sa tête, c’était plutôt un énervement vif qui l’attendait. Au moins cela aurait témoigné de la récupération de Law, de son état mental de retour à la normale. Enfin, sa normalité à lui. C’était prévisible, c’était habituel et Andy pensait réellement que c’était la seule réponse qu’elle allait pouvoir obtenir. Et pourtant, c’est en toute connaissance de cause qu’elle avait amorcé avec volonté ce simple pas en avant, cette simple recherche de compréhension. La jeune femme aurait aussi bien pu s’arrêter là, et connaitre la frustration. La frustration implique une envie, un désir. La frustration est un état mental d'insatisfaction caractérisé par un déséquilibre entre un désir ou une attente et sa réalisation du fait qu'il n'est pas (encore) réalisé. Dans certains cas positifs, cette frustration s'accroit jusqu'à un niveau durant lequel la personne ne la supporte plus et tente rapidement de trouver une solution aux problèmes qui causent cette frustration. Dans certains cas négatifs, cependant, l'individu peut percevoir la source de sa frustration au-dessus de ses moyens, et ainsi la frustration grandit, causant éventuellement des comportements problématiques. Dans le cas présent, Andrea avait quelques idées de solutions au problème qui se posait. Mais elle n’était pas seule dans leur réalisation et il était inconcevable de s’aventurer plus avant tant que Law ne lui dirait pas de continuer. Ou de tout arrêter.

Sans se douter une seule seconde de tout ce que cette situation enclenche dans l’esprit du maître des lieux, Andy se contente de le fixer, cherchant une approbation, cherchant une piste de réponse. Elle ne voyait pas la souffrance, trop occupée qu’elle était à tenter de faire taire son esprit. Celui-ci la bombardait d’ordres paradoxaux. Fuir très loin, se jeter à son coup. Préserver l’équilibre vide de sens qu’elle avait jusque-là adopté avec fidélité ou plonger du haut de la falaise en priant pour trouver un matelas accueillant en dernier rempart contre le sol. Parce que si Andrea n’avait pas envie de se priver de la multitude de signaux annonciateurs d’une émotion, la jeune femme ne voulait pas non plus trop risquer. Etrangement, elle était prête à jouer sa vie et bien d’autres choses. Mais mettre sur le tapis et miser des sentiments qui venaient tout juste de vouloir renaitre, c’était quelque chose qu’elle ne supporterait pas de perdre. Law n’avait pas intérêt à marcher là-dessus, c’était la seule chose qu’elle tremblait de réveiller, peur consécutive à l’importance de cet enjeu.

Mais ce dernier n’avait apparemment pas volonté de détruire quoi que ce fut pour l’instant. Son dernier mot se perdit presque sur d’autres lèvres, celles-là même qui venaient à sa rencontre avec une précipitation incontrôlée. Désordonnée union qui ne savait comment naître entre deux êtres diamétralement opposés et pourtant si proches, parfois, dans leurs raisonnement. Il semblait non pas se précipiter pour lui arracher quelque chose comme la plupart des personnes ayant amorcé ce geste sur elle. Non, en fait il l’abreuvait plutôt. Pas non plus le feu d’artifice et les petits anges qui jouent du trombone, non. Quelque chose de bien plus vrai. Un battement de cœur qui s’accélère, des paupières qui se ferment par automatisme simplement pour apprécier la tendresse parsemée d’impatience et de spontanéité qu’il lui offrait. Apparemment, Law non plus n’avait pu éviter cela. C’était une simple logique qui ne s’expliquait pas, tout comme le visage d’Andrea qui se faisait doucement cueillir par des mains bien plus légères qu’auparavant. Un contact à la fois rude et prévenant, qui l’entourait simplement et efficacement et permettait à la jeune fille de s’abandonner quelques infimes instants. Un carcan protecteur, presque possessif et pourtant synonyme de tant de liberté. Law était tout simplement quelqu’un d’autre tout en restant lui-même, et c’était juste une nouvelle porte qui s’ouvrait sur lui. Dont la clé avait été habilement cachée, si bien qu’Andy ne sut pas à quel moment exactement elle s’en était emparée.

Bien évidemment, tout début a une fin et celle-ci arriva bien vite. Profitant encore un instant du rêve qu’elle pensait voir s’évanouir si elle le brisait, Andrea lutta contre la rupture, si délicate et pourtant tellement brutale en tentant de conserver le souvenir de quelque chose contre elle. Durant ce contact inattendu et merveilleusement irréel, la jeune femme n’avait pas bougé. De peur de ramener Law trop rapidement à quelque chose dont il n’avait pas une totale conscience. Et quand à son tour, elle rouvrit les yeux, ce fut pour voir l’exacte réplique de ce qu’il se passait dans son esprit. Perdu, le trentenaire était manifestement prit du même doute qu’elle. Merveilleux, comme parfois l’être humain peut se perdre en considérations et douter de l’inébranlable vérité que leur corps a déjà découverte. Hésitants comme des enfants ou tout simplement comme deux êtres ne sachant pas réellement ce que l’autre pense de tout cela, Andrea et Law se contentaient de dévisager leurs traits pour y voir une promesse, même muette. Et après la fin du baiser, ce fut le contact tout entier qui se rompit. Un simple retrait, et il manquait un monde sur le visage d’Andy. Il la regarde, elle le regarde.

Il ne sait pas quoi faire. Est-ce qu’elle le sait ? Pas plus. Mais son esprit à elle semble moins perdu. Ou alors s’est-elle d’avantage préparée à cette éventualité. Même si en définitive elle n’aurait jamais pu imaginer ça. Ça, c’est un déferlement incompréhensible de diverses manifestations se répercutant avec force dans le moindre recoin de son corps. Des tempes qui pulsent, des poignets qui tremblent légèrement, une gorge qui se serre par l’angoisse et l’émotion, des jambes qui peinent à porter un corps trop lourd, une goutte de sueur qui roule le long de l’échine. Autant de preuves impossibles à enregistrer d’un trop plein de mots qui ne peuvent plus rien dire.

Alors ils sont perdus tous les deux, et c’est sans doute de là que nait la magie. Nul ne saurait dire combien de temps dure cet instant. Nul ne saurait dire ce qui va se passer par la suite. Même Andrea ne le sait pas, et pourtant ce sont bien ses bras qui viennent se glisser contre la taille de Law. Ce sont ses yeux qui dévorent le regard d’un homme bien plus âgé qu’elle et qui semble à cet instant redécouvrir les premiers émois adolescents. Ce sont ses jambes qui se rapprochent, de manière à ce qu’elle puisse frôler de son corps le sien. Sa concentration qui se fixe sur la bouche qu’elle rêve de saisir à nouveau, comme pour se prouver à elle-même qu’elle ne rêve pas. Le reste ne compte pas. Il ne sait sans doute pas ce qu’il déclenche ainsi, même en la regardant très simplement. La mémoire de son baiser demeure, tout comme celle de la passion imprévue et impulsive. Et ce sont également ses lèvres à elle qui s’entrouvrent. Et articulent difficilement, d’une voix un peu plus rauque qu’à l’ordinaire et au risque de briser l’instant. Même si parler lui coutait, même si elle aurait préféré autre chose.

- Et maintenant ?

Elle ne savait pas. Enfin, tout ce qu’elle savait c’était qu’elle voulait recommencer. Mais aussi lui laisser la possibilité de fuir. Parce que Law est ainsi fait et qu’Andrea sait bien que dans une telle situation il peut tout aussi bien réitérer leur courte union que la laisser là et fuir très loin. Retourner dans son monde. Car à cet instant, aucun des deux n’est en terrain connu. Andy veut simplement que cela ne s’arrête pas. Toujours découvrir, toujours ressentir. Ce n’est le cas que depuis qu’il est venu la chercher au fond d’une ruelle, et le point culminant pourrait demeurer là. C’est sans doute sa dernière décision importante, parce qu’il peut encore prétexter un acte inconsidéré même si Andrea sait bien qu’il était trop plein de sincérité pour être crédible. Mais il peut le faire, il peut se défiler. S’ils recommencent, Law n’aura plus aucune échappatoire. Et Andy ne veut pas le contenir et le priver. Elle se retient de ne pas s’approcher plus, restant à une limite physique qui revient à de la frustration mal placée. Il lui suffirait d’avancer et de recommencer. Elle en meurt d’envie. Elle qui a connu plusieurs expériences infructueuses, elle qui ne ressent rien en plein ébat vient de connaitre plus de choses d’un simple baiser que dans des dizaines de parties de jambes en l’air. Et c'est un petit miracle en soi. Et c'est déjà une dépendance.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le jeudi 09 décembre 2010, 13:54:32
"Et maintenant ?"... Qu'est ce que c'était que cette question ? Absurde ! Elle relève de l'ordre de l'iréel. Demander à un aveugle de quelle couleur se sont parées les feuilles en cette saison, voilà ce qu'elle venait de faire. Oui, il aurait pu savoir si il s'était préparé à une telle eventualité, ou quand bien même, si il avait eu une expérience du genre avant. Mais pas du tout. Law n'a jamais aimé et ne pensait pas aimer. Law n'en a jamais ressenti le besoin, et c'est maintenant que le fruit est accessible qu'il comprend pourquoi les hommes veulent tant mordre dedans. Est-ce une faiblesse ? C'est ce qu'il aurait prétexté pour s'éloigner si il avait eu les idées en place. Peu d'humains ont pu vivre ce qu'il vit maintenant. Car cette pomme n'a jamais été aussi belle, aussi prometteuse de tant de bonheur.

Au fond, ils ne sont pas si différents. Après une négation de sentiments, de ressentis, tant l'un que l'autre, le barrage a cédé et plus aucune digue ne peut contenir le flot monstrueux de ce qui tiraillent à tout les deux leur coeur. Fut-il naïf de croire que tout était en son pouvoir, alors que devant cet inattendu formidable, il ne pouvait même pas raisonner correctement, avec tout le discernement et la logique qu'Andy attend de lui. Là, tout lui échappait. Et il se haïssait quand la situation glisse entre ses doigts. Il aurait voulu que tout soit plus clair, mais rien ne consentait à l'être. Alors, parmi le trouble de son esprit, jouissant de l'étreinte divine de cette petite autour de ses hanches, il balbutiera ce qu'il arrivait à penser.


Je ne sais pas.. Je ne sais pas. Peut-être qu'on ne se connaît pas depuis assez longtemps.. Et puis.. Je ne suis pas spécialement ce dont tu aurais besoin...

La prime raison à toujours devoir se tenir loin de lui, pensait-il, c'est que ses méthodes carnassières et propices au renoncement des attaches et des liens l'obligeait à sacrifier ce qui devait l'être. Ainsi, il avait désormais pour grande peur de faire souffrir Andrea par sa conduite désinvolte envers les sentiments. Paradoxe : c'est ce qu'il était en train de faire.

Ecoute, Andrea.. Je ne sais rien de tout ça. Je n'ai pas été formaté pour.

Et pourquoi pas se tirer une balle dans la tête, pendant qu'on y est ? Le suicide aurait été une solution sans doute plus profitable à Law que ce qu'il était en train d'effectuer : La lâcher, ou tenter de faire en sorte qu'elle le lâche, pour abandonner la paix, et retrouver sa situation dangereuse, en équilibre sur le fil d'une lame, comme il l'a toujours vécu. En sa présence, il vivait la quiétude de l'esprit malgré les secousses que subissait ses pensées : Jamais il ne fut aussi apaisé qu'en cet instant, au moins depuis sa naissance.

Et j'aimerais tellement.

Du renoncement dans sa voix, de la peine, la fatalité. Le couperet qui tombe, sèchement, sans signal avant-coureur. Oui, malgré tout ce qu'il pourrait avancer pour dissuader la jeune fille de trop s'attacher à lui, il reconnaît qu'il n'attend que ça : Qu'elle se serre contre lui, qu'ils s'embrassent, et qu'ils restent comme ça des heures durant, jusqu'à ce que, peut-être, ses instincts exterminateurs ne viennent matraquer son bonheur, et lui demander de retourner à sa nature annihilatrice, où il prônerait de nouveau la destruction pour l'amélioration, et la satisfaction dans la souffrance. Mais il la veut ; il n'a jamais rien voulu de plus qu'elle. Et comme un second aveu, et pour éviter de supporter plus longtemps le regard de quelqu'un qu'il était en train de décevoir, il la prend contre lui, entoure ses épaules de ses propres bras, et la serre, comme pour qu'elle devienne lui, qu'ils fusionnent dans cet instant, au summum du comble du paroxysme de son bien-être.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le jeudi 09 décembre 2010, 15:37:37
Les pensées d’un vrai drogué en plein bad trip. C’était à peu près ça, ce sentiment qui vous serre le cœur et vous fait faire un peu n’importe quoi. La tendresse, simple overdose. L’espoir, une nouvelle drogue. Le baiser, une goutte d’acide dans une veine qui n’attend que ça. Parce que, comme le toxicomane, le sentimental vit quelque chose qu’il est seul à partager. Éventuellement, avec un collègue l’accompagnant, mais pas toujours. Parce que la première clope un peu modifiée, c’est une explosion de sensations qui se répercutent jusque dans vos muscles, jusque dans vos os. Le corps vit chaque bouffée, en quémande encore plus et tire sur la corde jusqu’à ce que celle-ci se déchire et laisse tout tomber. Jusqu’à l’overdose de bien être qui vous rend totalement apathique, dans un état incertain entre la vie et la mort. Parce que la première piqure, c’est l’excitation de l’interdit et la joie de sentir un feu se déverser dans des veines à la fois accueillantes et ennemies. Le toxico est quelqu’un qui aime répéter ses erreurs, se perde en terrain connu ou pas, essayer toujours plus de chose et laisser son corps le mener jusqu’au point de non-retour, celui qui brisera le lien qui le rattache à la vie.

Et l’émotion, c’est une drogue. Source de dépendance, un jeu qui se perd à deux. Il n’y a ni triche ni dérivation, et les effets sont ceux des drogues, mais sur l’esprit plus que sur le corps. Le cœur s’y allie avec plaisir et s’amuse à vous faire découvrir de nouvelles sensations grisantes et prometteuses qui peuvent tout faire retomber d’un coup. L’amour, c’est dangereux. Le degré en dessous également. Il n’y a pas d’aggravation du moment que l’on tombe dans ce cercle infernal qui vous emporte dans une tornade écrasante de force et d’autorité. On ne vous laisse plus le choix d’être vous ou de ne pas l’être, on ne vous permet pas de protester ou de lutter. Le sentiment s’impose et la seule solution est de le suivre et de s’y plier. Il vous brûle de l’intérieur, ne se calme pas tant que son but n’aura pas été assouvi. Le seul moyen de le fuir est de l’accepter totalement ou de briser tous les autres avec violence. Andrea avait connu la seconde méthode et elle était en train de se diriger vers la première sans toutefois la soupçonner. C’était naturellement, ses épaules alourdie du poids de ses ressentis, que la jeune femme trouvait là-bas un réconfort, un moyen de se soulager un instant. Il fallait pourtant accepter beaucoup d’autres choses pour y parvenir. Comme le fait que Law et Andrea, ce n’était pas logique. Encore.

D’un point de vue extérieur, la situation en fera d’ailleurs rire plus d’un. Mais qu’ils se demandent alors comment réagir dans un tel spectacle, si c’était eux ? Les sentiments sautent à la gorge, tels des prédateurs assoiffés, ne vous laissant d’autre choix que de les suivre. Et même le plus résistant des hommes n’est qu’une proie facile quand c’est le lieu, le moment, la personne. Il ne s'empêche pourtant pas de vous laisser, une fois qu’on s’y plie, désespérément seul. Il s’impose, fait sa place et la garde mais ne vous accompagne pas dans sa compréhension ou dans une quelconque manière de l’apprivoiser. Aussi les deux jeunes gens dans cette pièce, pourtant peu propice à de telles démonstrations de tendresse purement exprimée, se trouvaient sans réussir à voir plus loin. Comme si jusqu’alors leurs chemins étaient magnifiquement tracés en parallèle, les obstacles délimités et les bifurcations indiquées et que le simple fait de les avoir accolés l’un à l’autre perturbait trop le cours du destin, qui rendait sa plume et les laissait se débrouiller. Une épreuve de plus, comme s’il n’était déjà pas assez difficile d’accepter de se trouver vulnérable, sensible à l’autre et sous l’emprise de mots et de gestes qui étaient tous interprétés et compris d’une manière bien différente. Alors oui, Law ne savait pas. Bien sûr qu’il ne savait pas. Cependant, Andrea tentait de se montrer plus sûre et aguerrie sans pour autant l’être réellement. D’une voix plus calme que les hésitations de son hôte, elle lui répondit.

- Ne cherche pas d’excuses. Surtout que ce dont j’ai besoin c’est précisément de ça, maintenant. Toi.

Parce qu’il la faisait se sentir vivante, parce que jamais personne ne lui avait donné cette angoisse de ne pas dire ou faire ce qu’il fallait, parce qu’elle était d’habitude si sûre d’elle. Andy ne voulait plus se forger un masque dur et inatteignable tout en jouant la fille facile à atteindre. Elle préférait encore se sentir fragile mais se savoir sur le fil de l’émotion, dans le registre de la vie plutôt que celui du faux-semblant. En tous les cas, si Law avait tenté et essayait encore de la faire fuir loin de lui avec ses hésitations, c’est bien qu’il se voilait la face. D’autant plus alors qu’il semblait renoncer à se battre avant même d’avoir commencé, comme pour l’enjoindre à ne pas se jeter dans un monde trop inconnu. Comme s’il n’osait pas retourner vers celui qu’il était sans que ce soit elle qui l’y repousse avec véhémence. Mais Andrea ne comptait pas le lâcher, et elle raffermit sa prise sur lui alors qu’il la regardait d’un air presque peiné et désolé. Se coulant dans l’étreinte qu’il amorçait de ses bras, pour l’enlacer aussi fort qu’il était possible, la jeune femme resta tout d’abord muette. Elle ne voulait pas parler à la légère et surtout, sa voix était bloquée par la chaleur du torse contre lequel sa tête reposait. Jamais personne ne démontrait en sa présence autant de tendresse et de prévenance. Même celui qu’Andrea croyait être l’homme qui l’aimait le plus au monde.

Et c’est dans des moments comme celui-ci qu’on se rend compte que le mot aimer revêt bien des sens mais qu’il ne s’applique en aucun cas dans le cadre de la relation qu’Andy entretient avec son frère. Venant glisser son visage à la naissance du cou de Law, la jeune femme hésitait encore à parler. Mais tant qu’il ne la lâchait pas, elle pouvait bien tout oser.

- Moi non plus, tu sais. Je n’ai pas l’habitude de sentir autant de choses se mettre en place et se créer en moi. Il suffit peut être d’apprendre ?

Et elle avait parlé. Elle avait posé des mots sur ce que sa raison ne pouvait réfréner. Raison, mais où se cachait-elle ? D’où guettait-elle le faux-pas, l’impardonnable, depuis quelles hauteurs ? Était-il envisageable de deviner une quelconque logique dans ses errements, était-il sain de jurer logique l’enchainement des pages du livre de leur vie ? Autant de questions qui ne trouvaient pas leurs réponses mais qui amenèrent quelque chose d’autre.

- La vraie et seule question, c’est de savoir si tu préfères t’en retourner là-bas et que je m’en aille. Ou si tu es prêt à me laisser pénétrer là-dedans.

Aux derniers mots, sa main vint de nouveau se figer sur la poitrine de Law, dessinant quelques cercles incertains à la surface avant de venir y poser un baiser, les lèvres de son interlocuteur n’étant pour le moment pas accessibles. Mais cet obstacle n’en était pas un, et Andrea se dégagea doucement et à regrets, juste assez pour pouvoir de nouveau le regarder lui, suivre ses réflexions à la surface de ses prunelles, y chercher un peu d’espoir et de certitude qu’il ne regretterait pas. Puis elle vint chercher de nouveau ses lèvres, montant ses poignets autour de son cou, le tout dans une précaution extrême pour ne pas le brusquer, malgré l’insistance qu’elle véhiculait dans ce baiser. Comme pour réitérer la magie, qui arriva bien et irradiait le corps de la jeune femme d’une douce chaleur. Elle avait trouvé, enfin, la plus belle satisfaction qui soit.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le dimanche 12 décembre 2010, 22:28:47
Elle peut lui arracher tout les baisers qu'elle veut. Il ne fait que répliquer à cette offre, à la communion de leurs coeurs par la collision de leurs lèvres, sachant se faire tigre quand elle demande de la passion dans le geste, chat quand le mouvement doit se faire plus délicat, amoureux. Alors, finissant par rompre ce simple rituel de couple, assimilé d'habitude pour Law à l'acte sexuel pur, et aujourd'hui différé dans la définition par cette situation singulière, suscitant dans sa source de pensées une masse de supplices propre à désordonner ses raisonnements, il assène, avec un regard fuyant vers le sol, sur le côté, un pesant silence de plusieurs secondes, en guise en réponse.
Long. Enfin, long.. Tout est relatif. Disons que dans ces conditions peu propices à l'attente, à une perception claire du temps et de l'espace, à tant d'hésitation, tant d'ignorances, la moindre seconde passée arrive à se déguiser en une éternité.
Il faut pourtant tout pour arriver à réfléchir correctement. Mais impossible de s'y retrouver, dans tout ce fatras mental que cette petite a su créer en lui.


.. Reste ici.

Voilà, oui. Il ne prononcera que ces deux mots-là pour l'instant : Reste ici. Ce n'est pourtant pas le style de Law de devoir s'attacher, bien au contraire. Mais il a décidé de faire l'essai. Voilà. De se risquer à une période, plus ou moins courte, pendant laquelle tout deux pourraient voir si ils savent s'y prendre, et si la jeune fille pense arriver à se frayer une place dans le chaos de Terra, et pourquoi pas, si les deux aimants s'attirent plus qu'ils ne se repoussent, statuer sur une position définitive, qui scellerait à jamais leur destin dans des voies différentes de ce qu'ils ont toujours pu imaginer.
Faisant preuve de tout le calme qui s'impose dans ce genre de contexte, l'homme d'affaire respire. Il se détachera un peu du corps de celle qu'il a, pour ainsi dire, élu, sans toutefois la lâcher de ses bras. Et avec le sérieux dont il se sait détenteur et maître dans l'exécution, il parlera un peu plus.


Reste ici, rien qu'un peu. Et si cette vie te plaît, alors jamais plus on ne se quittera. Mais tu devras te plier à quelques exigences. Tout le temps que tu seras ici, demain ou dans 10 ans, jamais tu ne devras sortir si tu n'es pas accompagnée. À partir du moment où tu m'es proche, ta vie est en danger. Et quand je dis en danger, je ne plaisante pas.

D'ailleurs, il n'avait pas l'air de plaisanter du tout. Oublié l'insouçiant qui n'hésite pas à hurler et frapper des mastodontes de sécurité, avec un semblant de chorégraphie de combat comme divertissement pour la foule. D'ailleurs, sa première "condition" aurait déjà rebuté nombre de demoiselles désireuses de devoir être en couple avec lui. Ce n'est pas fini.

Ensuite, tu devras accepter tout ce que je fais. Peut-être déciderais-je un jour de changer. Mais.. Tu sais, j'suis un pourri. Je vis de la misère, de la souffrance des autres. Je n'ai pas de sens moral dans les affaires et je ne laisserais pas tomber de si tôt. Alors, tu ne devras jamais rien en redire.

Qu'on ne s'y trompe pas : Il ne lui demande pas de devenir une bonne à tout faire, soumise qui n'aura pas le droit de faire des reproches. Il lui ordonne juste de séparer avec attention le travail et le privé. Ce qu'il sera dans ses commerces, jamais il ne le sera avec elle. Jamais. Il pourra lui jurer sur sa vie.

Et pour finir, tu devras te débarasser de tout tes maux. Tout ce qui peux te miner. Tout ce qui te traînes vers le bas. Tu devras accepter que je te prennes la main et te tire de ton trou, pour te débarasser de tout ce qui te fait pleurer ou te met en colère. Tu devras accepter que je ne te laisserais jamais abattue, jamais souffrante. Je tenterais tout pour que tu puisses marcher à mes côtés et que personne ne puisse plus te faire sentir mal.

Et là, c'en était presque une menaçe. Law accepterais Andrea telle qu'elle est, bien entendu. Mais il voudra d'abord qu'elle puisse lui dire si quoique ce soit altère à sa santé, mentale ou physique, pour qu'il puisse s'en débarasser illico. Et là, pour le coup, il pense à cette dette. Ce qu'ils ont évoqués dès le début de leur rencontre, et dont Law ne cesse de chercher à découvrir la véritable teneur. Puisse-t-il la balayer de la vie de son Amour, et définitivement.

Je sais que ce n'est pas facile.. Mais.. Si tu es d'accord avec tout ça.. Considère Nexus comme ton nouveau chez-toi.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le lundi 13 décembre 2010, 15:39:16
Amusant, alors qu’Andrea pensait avoir gardé un semblant de logique et de capacité de concentration dans cette situation, de voir qu’il n’en était rien. Aveuglée, brutalement enivrée d’une émotion sur laquelle la jeune femme ne parvenait pas à mettre un mot assez réaliste sans que celui-ci ne lui fasse peur, Andy était la moins perspicace. Ridiculement perdue dans un monde de contes de fée, elle profitait simplement du moment actuel. Là, maintenant, avec lui. Cela paraissait suffisant. Et c’est paradoxalement quand elle grandissait enfin sentimentalement parlant qu’elle se retrouvait comme une petite fille. Incapable de voir plus loin que le bout de ses lèvres, sans se soucier du lendemain et en savourant simplement l’espoir de promesse qu’elle n’osait mettre en mots. Telle une enfant qui découvre enfin la vie, après avoir poussé timidement une porte jusque là interdite. Est-ce que Law avait l’habitude ? Il n’en avait pas l’air. Et pourtant, après la stupéfaction première quant à une situation quelque peu inhabituelle, c’est lui qui régissait rapidement. L’expérience, sans doute, de rebondir en toute situation et ce même si l’on touchait un point sensible.

Andrea, elle, était encore sous le choc d’une découverte pareille. Alors les mythes qui l’entouraient dans son quotidien morose qui n’avait de coloré et joyeux que l’apparence n’étaient pas irréels. Alors ce sentiment existait. Pour combien de temps ? Etait-ce une émotion que l’on laisse filer rapidement, si bien qu’on ne peut la rattraper qu’en essayant avec quelqu’un d’autre ? La jeune femme coulait sous le poids d’une découverte merveilleuse qu’elle craignait de voir s’éteindre. Et si c’était plutôt ce qu’on appelait la passion qu’autre chose ? Pourtant Andrea n’y croyait pas, ne voulait pas l’envisager. Quand son regard se posait sur Law, elle y voyait bien plus de choses qu’une impulsion passagère, qui n’aurait de toute façon pas pu réveiller en elle ce qui était enfoui depuis bien longtemps. Lorsque celui-ci détourna une fois de plus les yeux avant de lui demander de rester, chassant l’autre proposition qu’Andrea avait osé émettre, la jeune femme ne put s’empêcher de soupirer de soulagement. A vrai dire, peu confiante encore qu’elle était en elle-même et à l’encontre de cette nouveauté toute fraiche et fragile, elle avait envisagé presque sérieusement son retour chez elle. Mais s’entendre dire que quelqu’un voulait la voir demeurer auprès de lui était chose nouvelle depuis Seiji. Chose bien plus agréable, d’ailleurs.

Si jusque-là l’atmosphère avait été rêveuse, un peu enveloppante et presque lointaine suite à l’expérience surprenante d’un objet magique à présent bien à l’abri dans la chemise d’Andrea, qui l’y avait oublié, celle-ci se fit plus réelle, pragmatique. Sérieuse. Mais pas pour autant oppressante ou anxiogène, loin d’être source d’inquiétude pour le duo étrange qui prenait vie dans cette pièce et dont l’un des acteurs participa à son instauration en reprenant la parole d’un ton plus assuré. Andrea l’écouta calmement lui expliquer ce qui allait se passer à présent. Pas une seule fois elle ne le coupa, et se contenta de scruter un visage plus sûr et fermé, qui lui offrait autant de promesses que de conditions.

La première, ne pas sortir seule. Andy n’y voyait pas d’inconvénient. Parce qu’avant, son corps était aussi libre que son esprit enfermé dans une cage dorée. Et que là, le contraire se profilait et elle préférait largement cette alternative. S’il fallait se plier à cette contrainte qui n’en était presque pas une, ce n’était pas un problème. D’autant plus que la jeune femme n’avait pour l’instant pas grand-chose qui la rattachait ici, si ce n’était Law. D’ailleurs, cela éveilla une autre question. Celle de savoir ce qu’elle ferait de ses journées à Nexus. Accompagnée toujours l’obligeait à ne plus penser à une quelconque activité productive. Et si elle était auparavant habituée à ne strictement rien faire de son temps, cela allait devenir compliqué maintenant qu’Andrea s’était éveillée un peu au monde l’entourant. Son cerveau n’était plus plongé dans un brouillard atone et épais qui l’empêchait de concevoir, de prévoir, et maintenant qu’elle s’en souciait la concrétisation serait peut-être difficile. Toutefois, Andy ne répliqua pas et ne fit qu’hocher discrètement la tête pour l’encourager à continuer.

Lorsqu’il le fit, ce fut sans doute un peu plus dur. L’accepter lui, avec ses paradoxes, son caractère et ses réactions c’était avec plaisir. Andrea se passionnait déjà pour la douceur qu’elle lisait parfois dans le regard pourtant aiguisé et impitoyable qu’elle devinait chez Law et dont elle avait eu un aperçu auparavant. Accepter le reste, son monde ... La jeune femme était arrivée jusqu’ici dans le but de le découvrir, d’y plonger une nuit ou deux. Mais serait-elle en capacité d’y vivre, de s’y immerger sans s’interposer, sans réagir, sans tenter de s’opposer ? Pourrait-elle lui faire confiance et le laisser évoluer dans son univers à lui tout en restant loin de ce qu’elle pouvait deviner sous ces mots ? Un instant de réflexion fut nécessaire à Andy pour parvenir à la conclusion que c’était possible. Elle savait qu’il y avait ceux qui se trainent et souffrent dans la boue, et les autres. Elle savait que c’était dans le cycle de la vie, d’autant plus apparemment sur Nexus. Et elle se sentait prête à y dire oui. Quand cela deviendrait trop dur, elle fermerait les yeux, mais Andrea tenait à ne pas laisser de zones d’ombres, à assumer en toute connaissance de cause son choix de rester, avec les conséquences que cela impliquait.

Dernière condition, enfin. Qui la fit fondre, et lui arracha un sourire attendri. C’était adorable de sa part de penser et de dire cela, de lui montrer qu’il prêtait attention, qu’il se souciait d’elle et de son bien être. Qu’elle était importante. C’était tellement rare dans l’esprit de la jeune fille que les mots de Law la remplirent, alors que sa voix à lui était sans appel, d’une douce chaleur. Andy savait que même de manière radicale, elle n’aurait plus besoin de retomber dans l’état qu’elle avait connu ces dernières années. Elle avait trouvé quelqu’un qui était prêt à endosser ça à sa place et l’en débarrasser, quelqu’un qui sans même rien savoir, lui promettait d’accepter et de résoudre ses angoisses, ses ennuis. Difficile de se dire qu’une telle personne peut être celle qu’on n’attendait pas, et que c’est au final une évidence triviale. A la fois ferme et tendre, Law aurait presque fait battre une seconde fois le cœur d’Andy, rassurée par ses conditions et sa proposition finale. Elle pouvait rester, vraiment. Continuer ici, recommencer quelque chose. Loin de tout, près de lui. Aussi prit-elle enfin la parole pour lui répondre d’un ton un peu fébrile et pourtant inébranlable.

- Ça ne me semble pas être très compliqué à accepter. Me protéger et te rassurer par la même occasion n’est pas une contrainte, je pense. Te prendre comme tu es non plus. Si je suis ici, dans tes bras, ce n’est pas simplement parce que je suis simple d’esprit, mais aussi parce que tu fais ce que tu veux.

Elle marqua une petite pause. Les mots se bousculaient sous son crâne et il était devenu difficile de les ordonner, de leur donner un sens qui percute et qui soit celui dont elle voulait donner l’expression. Tentant d’être claire et de ne pas se perdre dans ses explications, encore un peu chamboulée à l’idée d’avoir le droit de demeurer dans des bras si protecteurs et confiants, Andrea reprit.

- La seule chose que je te demanderai en échange c’est de faire attention à toi. Tu as quelqu’un pour qui rentrer, et tu n’as pas intérêt à y faillir. Le reste, je ne m’en soucierai pas. Il serait stupide d’essayer de te changer alors que c’est comme ça que tu as réussi à faire fondre quelque chose chez moi. De plus, il est hors de question que je sois une contrainte. D’ailleurs, si cela en arrivait là j’attends que tu me le dises clairement. Ce sont mes deux conditions à moi.

Et même si cela lui faisait un peu peur de ne pas savoir, de simplement imaginer, de ne pas vouloir le faire vraiment, c’était quelque chose qu’elle cédait sans hésiter. Il lui suffisait de le savoir lui, de ne pas se sentir de trop et de ne pas susciter de pitié protectrice pour être satisfaite. Puis Andrea conclut, enfin, avec sans doute le point le plus difficile.

- Pour le dernier point, je te promets au moins d’essayer. De te parler. De me laisser enrober, d’essayer d’être aussi heureuse que maintenant. De te raconter pourquoi j’ai atterri ici et de cette manière, si tu le veux.

Regard chargé de sens qui s’ouvrait tout à coup sur des mots encore vierges du moindre sens, puisqu’Andy ne les avait jamais prononcés. Tant de caps franchis ce soir, était-elle vraiment assez déterminée pour ne pas fléchir et ouvrir une des portes les mieux gardées de son cœur ? Affaire à suivre.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 14 décembre 2010, 10:37:37
Et une nouvelle fois, il avait envie de sauter au plafond tant la joie l'envahissait. Elle acceptait. La seule véritable condition qu'elle posa, celle concernant sa propre vie, il n'eut aucun mal à s'y faire. Quoique, cela était tout de même nouveau. Qu'on fasse preuve d'attention à lui pour ce qu'il est en tant qu'homme. Habituellement, ce sont des employés qui craignent pour leur salaire qui s'inquiètent pour sa santé. En dehors de cela, il y a le classique "Tu aimes ce que je te fais ?" et "j'espère que ce contrat vous sera aussi profitable pour vous qu'il ne l'est pour nous". Et c'est tout. Alors là aussi, c'est quelque chose de nouveau. Sans doute devra-t-il s'y faire. Oui, c'est un coup à prendre, avec le temps, avec la pratique.
Il ne compte pas pour autant remettre ses petites bagarres urbaines de côté. Mais si il pouvait éviter de se laisser dans quelques opérations militaires au futur, il tentera de déléguer son rôle à autrui. Pas Isaac. Isaac n'est pas un combattant, loin de là. Law a déjà les esprits plus clairs : il pense à l'avenir, pense à l'organisation, pense à ce qu'il devra faire désormais et ne plus faire. Rien n'apparaît comme un fardeau, ni comme un possible regret futur. Il ne voit pas Andrea comme une charge, mais plutôt comme l'aboutissement d'une longue route avec énormément d'obstacles, et des récompenses assimilée plus souvent à des petites friandises qu'à un trophée ou un gros lot. Là, en l'occurence, il a réussi à soulever la plus belle des coupes. Mais ce n'était pas une compétition, juste le cheminement classique d'une vie. Un guerre, comme il aime à le faire savoir. Pour une fois, il a arraché la victoire à son opposant. Qui ? Lui-même.


D'accord.. D'accord. Je te promet que je serais attentif à moi.


Mine de rien il prend soin de sa personne le Law. En effet ça ne transparaît pas. Mais il a l'air bien plus jeune que ce qu'il a vraiment.. C'est peut-être pour ça que la flagrante jeunesse d'Andrea ne le gêne pas. Parce qu'il se sent jeune, parce qu'il fait jeune. Et parce qu'il pense que l'âge n'a pas d'incidence sur l'homme. Rien que les épreuves qu'une personne a dû traverser. Cela n'a aucun rapport avec le nombre d'années d'existence.
Il la soulève. Euphorique. L'embrasse vivement, avant de la reposer au sol. Comme fou.


Tu verras.. Tu ne regretteras rien. Jamais. Tu auras tout ce que tu veux ici. Et si tu ne veux rien, tu finiras par vouloir. Nexus ressemble peut-être à ton monde, mais crois-moi, tant de choses sont différentes.. Viens !

Parce qu'on ne va pas rester dans une salle des coffres toute la journée. Il l'attrape par la main et l'emmène vers le couloir, fermant à peine la porte derrière lui. Une fois dans le couloir, il.. hurle.

-Isaac ! ISAAAAAC !!

C'est une sorte de larbin qui se ramène, le genre un peu fier, avec un port bien plus altier que Law, malgré une condition fort basse par rapport à celui qui l'interpellait. Il se penchait vers Andrea, et lui demandait si elle aimait le thé. Devant son affirmative surprise, il regardait ensuite son subordonné.

-Où est Isaac ?
-"Sire Isaac s'est absenté."
-Absenté ? Où ?
-"Il n'a rien dit. Il a emmené Sibrand, et Stilleto, et.."
-Ha, oui, oui, oui oui oui c'est bon j'me souviens, c'est moi qui l'ait envoyé.


Comment avoir l'air con devant un employé.


-Tu vas m'apporter un thé.
-"Lequel ?"
-Comment ça lequel ? Un thé quoi. Un thé au thé. Avec du thé d'dans. Dans mon bureau, dans 5 minutes pas plus. En dehors de ça, mes quartiers seront barricadés. Par une seule personne ne rentre. Pas même la Reine, pas même Sparshong. Si l'établissement brûle, peu m'importe, je ne veux rien savoir. Celui qui tapera à ma porte sera égorgé. Clair ?
-"Très clair.. Mais.. J'amène le thé quand même du coup ?"
-Mais bien sûr. J'parle pas assez bien ?


Et Law s'éloignait, laissant un incrédule de plus sur son chemin qui commençait à se demande si, en apportant le breuvage demandé, il ne risque pas de se faire battre à mort ou défenestré par son patron. Epineuse question. Balayant ses doutes, il filait vers le quartier des cuisines pour faire la préparation qui risque d'être hasardeuse.
Le propriétaire gromellait, maugréant envers ses employés qu'il estimait parfois vraiment à la limite de l'incompétence. En même temps, avec un leader comme Mr Raine, il faut avoir l'esprit bien accroché.. Ou au contraire, complètement détaché, pour pouvoir regarder tout ce qu'il fait d'un oeil complètement neutre, et laisser glisser sur soi toute les folies d'un supérieur bien barré.
Ce dernier, d'ailleurs, passait une porte gardée par un molosse à 4 bras. Oui, ce fameux Magnus, l'immortel et imbattable, rebut d'expériences ou produit d'une magie foireuse, peu de gens savent vraiment pourquoi cet homme torse nu au teint hâlé, aux nombreuses peintures de guerre et aux muscles ayant de quoi faire pisser dans son froc Mister T avait terminé avec une physionomie si particulière. L'ignorant, comme à son habitude, Law faisait rentrer Andrea, et fermait la porte lentement derrière elle.

Son espace de travail personnel. Il en avait plusieurs, mais celui-ci était le plus privé. Sur le mur de gauche, des traces de contours formés par une fine poussière illustrait ce qui était apparemment autrefois la place de tableaux. Sur cet espace vide de toute décoration, quelques minuscules projections de sang, éparses, étaient visibles pour l'oeil avisé.
En face de l'entrée, un bureau donc, large, en bois solide, avec un tas de dossiers rangés, consciensieusement classés, ordonnés avec discipline, avec des tas de couleurs. On se demande si c'est Law qui a fait ça.. ou bien, quelqu'un de bien plus méthodique que lui, habitué à la paperasse ? Oui, bien plus plausible. Derrière ce bureau, faisant dos au siège unique de Law, une très large fenêtre qui donnait sur Nexus. La vue n'était pas exceptionnelle le jour, mais la nuit, les quelques lumières qui brillaient dans les différentes rues, le peu de mouvement, la lune qui luisait majestueusement à l'apec de sa trajectoire céleste, c'était plutôt agréable.
Quant au mur de droite, une porte à demie-ouverte, d'où l'on peut apercevoir un lit, entouré par des tas de bougies. Ce même lit est propre, dressé, fait. Et là encore, on se doute que ce n'est pas Law qui a amoureusement plié les draps, s'est fait un joli bordage, et tapé les oreillers pour les rendre plus moelleux.

Dans l'allégresse, le polyglotte monte d'une large enjambée sur son propre bureau, esquivant du pied les dossiers que son Administrateur a disposé pour lui. Il tend la main pour demander à Andrea de faire de même, et l'aidera à grimper. De là, il montre la fenêtre, et plus généralement, l'étendue de la Cité-Etat qui s'étendait derrière les carreaux.


Tout ça, c'est à toi. Tu es en la Reine comme j'en suis un Roi.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mardi 14 décembre 2010, 18:57:18
On imagine assez mal comment cela fait quand on se retrouve derrière les barreaux. L’oppression de l’autorité, la promiscuité des autres, les règles très strictes qui vous bardent d’injonctions et de limites. Aucune échappatoire, l’obligation de vivre collé à des étrangers sans pouvoir s’en détacher. Comme si on vous plongeait dans une fosse glaciale où il faudrait vous frayer un passage vers les meilleures places, celles où suffisamment de chaleur humaine irradie pour vous protéger, laissant les autres crever. Sauf que là-bas, ce n’est pas forcément l’humanité que l’on cherche. C’est le pouvoir, celui de corrompre, celui de plaire, celui de menacer. Pour tirer son épingle du jeu et avoir ne serait-ce que l’illusion de dominer un monde en modèle réduit, on ferait parfois n’importe quoi. Et puis il y a ceux qui subissent sans rien dire les assauts de leurs congénères, ceux qui se font arnaquer sans pitié, ceux qui sont incapable de dire non ou de chercher à prendre, à leur tour, une parcelle de pouvoir. Ce lieu est un endroit dans lequel il faut abandonner encore plus d’humanité que lorsqu’on y est entré. Car ce n’est que chose pour faire plaisir aux gardiens, inutile pour s’imposer ou se préserver. Mettre sa vie entre parenthèse, oublier quelques mois ou années qui l’on est et peut-être passer de brebis malchanceuse au loup le plus féroce. Ou passer de la brute sanguinaire à l’impitoyable terreur de cet huis-clos dévastateur.

On y trouve de tout, et pourtant chacun d’eux a un point commun qu’ils ne s’avouent pas et dont il n’est pas possible de parler sans en subir les représailles violentes des autres pauvres hères. On ne parle pas de liberté. On ne la pense pas, on ne met aucun mot dessus. Parce que c’est leur seul point faible, de savoir que leur monde dominé -certes par eux- n’est que factice. Que cette société où ils ont de la force et de l’autorité est soumise à toutes les autres, qu’elle est en marge de tout. Plus bas que terre, ils sont ramenés à l’état de faits divers ou de titres de journaux. Dehors, ils n’ont plus rien. Alors il faut jouir de cette impression de vivre, de ce mirage confortable, sans le briser par un simple terme trop douloureux. Ce serait comme leur rappeler les liens imaginaires qui les attachent à ces murs infranchissables, les assommer de l’horrible vérité que tout ce qu’ils construisent tant bien que mal pour ne pas se perdre ne représente rien. Que ceux qu’ils haïssent et descendent constamment sont les seuls êtres humains qui leur parleront. Que leur commerce est plus surveillé et ridicule que celui de leurs enfants, dehors, en cour de récréation. Ils n’ont aucune liberté, et seuls les barreaux à leurs fenêtres le leur rappellent tous les soirs. Triste vérité.

Et il y a plusieurs formes d’aliénation, d’enfermement. Andrea avait pris pour un temps indéterminé, mais sa peine semblait se limiter in facto à deux ans. Un peu plus de dix-huit mille heures, sans doute, à se sentir constamment limitée, réduite à une simple envie, à un simple ordre muet. Et bien que la jeune femme ait pu aller où bon lui semblait, quelque chose enfermait en elle la seule volonté d’être libre. Ou comment se lier les mains avant d’avaler la clé. Sans savoir qu’il y avait un double quelque part, et que quelqu’un l’avait en sa possession. Un homme un peu étrange, pas toujours équilibré, aux impulsions sidérantes de spontanéité. Un sourire qui avait l’air de celui qui vient de découvrir son existence, sans jamais avoir pu auparavant naitre sur un visage. Ou bien un élan qui la fit décoller du sol, de la réalité, du monde. Comme s’il était absolument évident que cette situation aurait dû être depuis toujours, Andy reçu avec plaisir la énième marque d’affection de Law, se laissant valser dans les airs avec un ravissement non contenu. Elle ne se lassait pas de se faire entrainer toujours un peu plus, que ce soit dans ses promesses de ne pas se reprocher de l’avoir choisi, lui et tout le reste en cadeau bonus, ou dans ses brusques mises en mouvement. Quand il la prenait par le poignet pour la presser de fuir ailleurs, sans prendre le temps de regarder en arrière. Alors qu’Andrea examinait toujours le chemin sur lequel elle s’aventurait, voilà que la jeune fille laissait à Law le soin de la guider.

Entièrement à lui.

Ou presque, en cet instant où un tiers débarqua de nulle part pour prendre note des ordres du maître des lieux. Après que ce dernier se soit enquis de quelques précisions sur les goûts d’Andy, il tenta tant bien que mal d’arriver à ce qu’il voulait : du thé. Manifestement, ce n’était pas une mince affaire pour Law d’organiser ses pensées en cet instant, tant il semblait à la fois fébrile et impatient, allant tantôt trop vite tantôt trop lentement pour son pauvre subordonné qui semblait craindre un retour de bâton des plus tonitruant s’il manquait à son devoir de le satisfaire. D’ailleurs, Andrea ne put s’empêcher de se mordre les lèvres pour étouffer un léger rire qui naissait dans sa gorge, tout en lançant un regard désolé vers le pauvre exécutant qui ne savait plus bien sur quel pied danser. Sans doute un de ceux qui ne devaient pas être habitués à Law et ses particularités. Oh, la jeune femme ne se targuait pas de tout avoir deviné, loin de là. Et elle le craignait plutôt, avide qu’elle était de toujours en découvrir plus sur celui pour qui son cœur avait recommencé à battre. Mais cette inconstance pressée, cette désinvolture hâtive et presque colérique ne lui était pas étrangère. Aussi dur et sérieux qu’il pouvait être, Law se montrait parfois absorbé par tant d’autres choses que les basses questions existentielles semblaient lui paraitre lointaines.

Heureusement pour Andy, son visage n’affichait pas tout ce que son esprit avançait. Parce qu’elle doutait que Law appréciât l’idée de le trouver à la fois touchant et drôle, dans ses réactions évidentes et imposées à lui comme naturelles. Tout ce qu’elle ne connaissait pas, toute la facilité dont elle n’avait aucune idée, bref la complétude parfaite avec son rationnel, ses questions, sa réserve. Qu’elle tentait de laisser tomber devant lui, essayant tant bien que mal de paraître elle, Andrea, sans le mur de protection et de retrait qu’elle avait érigé devant elle. Pierre par pierre, il tomberait. Aussi sûrement que pas à pas, ils avançaient de nouveau. La jeune femme glissa ses doigts entre ceux de Law alors qu’ils passaient devant la surveillance paisible mais efficace d’un garde des plus étranges, sur lequel le regard d’Andy n’eut pas le temps de s’attarder pour satisfaire une curiosité et ce qu’elle croyait être une aberration, voire un effet d’optique. Franchissant une autre porte, la jeune femme soupira d’aise en jetant un coup d’œil circulaire. Pas de coffre étrange, pas d’autre objet mystique devant lequel elle serait désemparée. Juste une pièce classique, calme. Il devint alors évident qu’en effet, personne ne pourrait les déranger ici. Que c’était juste eux, au milieu des quatre murs qui les entouraient. Plus, en fait, mais Andrea ne remarqua pas tout de suite la pièce adjacente sur laquelle deux portes se découvraient, laissant paraitre un endroit propice à bien d’autres choses que le travail. Le repos, par exemple. Non, ce qu’elle put admirer tout d’abord fut pourtant la dernière chose qui faisait de ce bureau un bureau. Andy ne regarda ni les meubles ni la paperasse entassée, pas plus qu’elle ne s’appesantit sur le décor de la pièce. La seule vision des lucioles prenant vie au milieu du néant suffisait à rendre l’endroit des plus attrayants.

Des lumières tremblotantes, de toutes tailles et de toutes intensités vacillaient au travers d’une large fenêtre laissant la nuit les englober, eux aussi, dans son tableau. Image complétée par ce qu’Andrea ne pouvait pas prévoir, trop peu habituée à tant de franchise et d’honnêteté dans les gestes, si peu familière avec les décisions branlantes et impulsives. Un Law qui, dans la joie éclatante que la simple présence de l’autre leur apportait ce soir, jaillit en avant et se dressa fièrement sur son objet de travail pour dominer la pièce et la ville d’un regard conquérant qu’il l’invita bien vite à venir partager. S’exécutant avec plaisir, Andrea saisit la main tendue pour se hisser jusqu’à lui et enlacer sa taille de derrière, posant sa tête sur le côté de son omoplate afin de pouvoir encore admirer Nexus de nuit. Ainsi, elle se blottissait dans son dos et se laissa introniser en silence, tout d’abord. Elle passait du rang de larve dans la boue de la ville à Reine attitrée en quelques heures à peine, et réalisait doucement le changement de condition. Elle, posséder tout cela ? C’était trop, et pourtant à ses côtés cela devenait possible. Et si pour Andrea mettre la main mise, même indirectement, sur une ville n’était pas dans ses priorités, elle ne pouvait nier une certaine sensation de pouvoir incontrôlable et irrépressible. Comme les prisonniers à la tête de leur petit monde, la liberté en plus. Parcourant encore le paysage d’un œil admiratif et comme fasciné, Andy lui répondit finalement.

- Je pourrai presque les attraper. C’est drôle, c’est la première fois depuis longtemps que je me fascine pour quelque chose.

Puis elle se tourna vers lui et, cherchant tant bien que mal son regard malgré sa position qui n’était pas destinée à cela, corrigea tout en lui souriant avec simplicité.

- Deuxième.

Et ce fut là-dessus qu’un bruit se fit entendre à la porte. Soit les tourtereaux voyaient le temps filer plus vite, soit les employés de Law étaient particulièrement efficaces sous la peur des remontrances. La jeune femme quitta Law, défaisant son étreinte et sautant à bas du bureau pour se diriger vers la porte. A vrai dire, elle ne voulait même pas attendre de laisser le maître des lieux faire entrer le thé avant de lui dire de repartir. Il y avait plus rapide pour se trouver enfin tranquille, dans un environnement déjà plus logique qu’une salle étrange meublée de coffres tout aussi inappropriés. Ouvrant la porte, elle adressa un petit sourire à l’homme de tout à l’heure, le remercia sans attendre et le débarrassa de son plateau, histoire de lui faire comprendre qu’ils n’avaient plus besoin de lui. Finalement, elle s’y faisait, à se considérer d’ores et déjà comme intégrée dans le décor, tout naturellement. Puis, revenant sur ses pas, elle leva les yeux vers Law et lui proposa, avec nonchalance :

- Du thé ?

Ou comment juste le plaisir d'être ensemble et de partager.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 14 décembre 2010, 22:49:45
Les caïds de prison sont rôdés. Ce n'est pas qu'une simple occasion qu'ils saisissent : C'est tout un travail de préparation, de psychologie, c'est minutieux et calculé. On ne devient pas maître d'un lieu en distribuant deux trois pains et en faisant de l'esbrouffe. Là, Andrea n'avait qu'à tendre la main pour tenir entre sa volonté un pouvoir sans nul égal dans sa vie précédente. Mais attention avec le jeu du pouvoir. Ce qui fait que les gros bras arrivent à s'en sortir avec leurs manipulations et leurs démonstrations de force, c'est qu'ils savent s'y prendre. Nouer des alliances, savoir se faire des ennemis. Contrôler des troupes, ce n'est pas comme une simple partie d'échec : Il faut savoir connaître chacun de ses subordonnées pour que toutes les parties puissent se dérouler comme prévu. Un bon général sait les noms de tout ses hommes. Andrea aura à apprendre ce genre d'attentions, et quand elle y sera rôdé, la science du commandement n'aura plus aucun secret pour elle, tout comme Law a su gravir la hiérarchie en se faisant, à chaque échelon, à ces nouvelles règles obscures, ces arcanes que même certains hauts-placés ne connaissent pas, car ils n'en voient pas l'utilité. Ces mêmes hommes finissent immanquablement par se faire détrôner par un adversaire plus intelligent, ou même trahir par leurs propres hommes qu'ils n'auront pas su déplacer efficacement sur un champ de bataille.

Après le compliment, Law se sentira plutôt flatté. Même si ce n'était pas un secret qu'elle s'était intéressée à lui, la surprise vient du fait qu'il est "la première chose". Peut-être pas la prime dans sa vie, mais au moins depuis longtemps. Il compte bien lui faire découvrir tout un tas de choses. Jusqu'à ce qu'elle soit rassasiée de trop d'intérêt.
Pas le temps de lui répondre, qu'ils sont perturbés par une intrusion. N'avait-il pas formellement demandé à ce qu'on lui fiche la paix ? Alors, aussitôt, elle se prend à ce "jeu du commandement". Elle n'en est pas encore une experte, mais cela ne saurait tarder. Tout bient d'abord de l'intéressement qu'elle y met... Et apparemment, elle ressent une sorte d'excitation un peu nouvelle à devoir se trouver au-dessus de quelqu'un. Law y ressent une nouvelle fierté, déjà un peu exprimée quelques minutes auparavant, dans une autre situation.
Il descendait du bureau, retrouvant le sol.


Avec plaisir. À ras bord pour moi.

Classique plateau qu'elle portait, avec une théière fumante et deux tasses. Il s'écartait d'un pas grâcieux pour bloquer le chemin qu'elle avait sans doute entrepris vers son plan de travail : Non, il ne voulait pas qu'elle aille ici.


Le luxe.. C'est de pouvoir se nourrir allongé. Viens.

Sans plus la toucher, il allait pousser la porte de ses appartements plus privés. Traversant toute la pièce sobre sans attarder son attention sur la décoration, il laissait tomber son manteau au sol sur le chemin, négligemment, et s'affalait sur ses draps. La tête du lit étant contre un mur, les oreillers font légion, pour permettre une position assise tranquille.

C'est une vie de château. C'est ma liberté à moi. Je suis libre de faire ce que je veux parce que ce que je DOIS faire, d'autres s'en chargent pour moi.

Tandis qu'elle s'installe, lui se redressera un peu, la nuque abandonnée sur le dossier improvisé.

Tu devras tout retenir. Isaac pourra te donner des cours si tu le souhaites. Il faudra que tu te montres polie, mais ferme. Jamais rien lâcher, comme un chien. Tu devras punir sauvagement, mais récompenser généreusement. Doser parfaitement entre le respect et la crainte. Quand tu auras réussi ce tour de force, tu t'apercevras bien vite que tout Nexus pourrait t'appartenir. Il faut du temps.

Il se tourne alors vers elle. Fronçant les sourcils, inquiet.


Andrea... Qu'attends-tu de ta vie ici ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 15 décembre 2010, 20:00:27
Dans les faits, Andrea était une jeune femme assez calme et plutôt pacifiste. De celles qui sont prêtes à soutenir les bonnes causes parce que ça fait bien dans un profil, sans jamais réellement s’impliquer dans quoi que ce soit. Une charge émotionnelle, elle ? Ah. Comme si c’était possible. Mais lors des discussions, quand on lui demandait son avis, elle sortait de ces phrases toutes faites qui calment les esprits et permettent de se faire oublier. Comme les autres, sans réfléchir ni aller plus loin dans ce qu’elle ne soutenait pas -même en façade seulement. C'est-à-dire qu’Andy n’avait jamais pensé qu’il y a toujours un noir dans le blanc et inversement. Que les idées toutes faites de ces crétins de camarades de classe sur la lutte contre le système ou l’injustice n’avaient rien de fondé. Les idiots ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, le crâne bourré d’idées leur venant tout droit dans le bec par leurs chers parents. Voilà comment la bêtise et l’incapacité à réfléchir nait chez une génération qui mettra bien du temps pour éventuellement commencer une réflexion personnelle. Affligeante situation et pourtant pleine d’une vérité criante dont elle était également la cible. Ouvrir les yeux et commencer à réfléchir par soi-même est toujours effrayant, dévalorisant au début lorsque l’on se rend compte que rien d’intéressant ne nait sur nos lèvres. Puis au fur et à mesure, personne ne peut plus déceler la méthode même la plus au point de plagiat de grandes idées. Pour la simple et excellente raison que seul son esprit est responsable de cette genèse fulgurante, parfois brillante, d’autres fois décalée. Peu importe, le simple fait d’avoir utilisé ses ressources personnelles vaut tous les applaudissements du monde.

Si on lui avait dit, donc, ce que Law faisait ici avant ce soir et dans un autre contexte ... Andrea aurait fait la moue, désapprouvant fortement une telle situation. Sans doute en rajoutant un sermon ou deux sur les répercussions d’une telle domination, sur la souffrance endurée et sur les conséquences désastreuses sur des dizaines d’individus. Voire centaines. Et sa diatribe moralisatrice serait tombée à plat puisque dans le cas présent, celui qui dirigeait avait parfaitement connaissance de tout cela. Et s’en fichait, pire, s’en délectait. Allez essayer d’expliquer au loup que la chair de brebis, c’est mauvais pour son cholestérol. Et que la pauvre bête victime ... elle a mal. En même temps, certains vous répondront qu’avec le ventre ouvert et les intestins pendants, c’était quelque chose de plutôt inévitable. Le lui expliquer alors qu’il agit en toute connaissance de cause est une des choses des plus stupides. Il vaut mieux accepter la notion de chaine alimentaire et le laisser égorger ses moutons en paix. Histoire que ce ne soit pas vous qui y passiez. Mieux valait encore le laisser gérer sa faim en toute tranquillité sans surtout essayer quelque chose qui vous inclurait dans le menu de la journée. Ce serait quand même bête de se faire voir pour une langue bien pendue qui raconte ce qu’on entend partout, sans se préoccuper du revers de la médaille.

Alors oui, Andrea avait bien changé. En apprenant à connaitre le loup, on découvre aussi qu’il a un cœur et que tout n’est pas aussi simple. Lui en vouloir ? Difficile. Si ce n’était lui, quelqu’un d’autre le ferait. Si ce n’était lui, il jouerait le rôle du dominé. Battre ou se faire battre, il suffit d’avoir suffisamment de force morale et de résignation pour choisir le meilleur côté du bâton. Sans s’orienter en espérant une réduction de peine ou une quelconque pitié. Etre sans aucun regret, c’était le seul moyen sans doute de ne pas devenir fou. L’être un peu, l’unique manière de ne pas sombrer complètement. On n’acquiert tout pouvoir sur les autres qu’en renonçant à tout pouvoir sur soi-même [Francis Bacon], et la jeune femme était persuadée que ce n’était pas parole en l’air. Car il y avait cette faiblesse imperceptible et très certainement non avouée, cachée et protégée le plus soigneusement du monde. Cela s’était bien vu lorsque les yeux de Law s’étaient posés sur l’objet magique précédemment cité, touché puis oublié. Il y avait quelque chose, sans quoi le maitre des lieux ne pouvait prétendre à la douceur qu’il dégageait en la présence d’Andrea. Sa douce folie l’envahissait, le rendant aussi changeant que sans pitié, mais avec une humanité encore perceptible au regard attentif d’une femme qui n’a pour but que d’en découvrir plus. Et ça, il allait avoir du mal à s’en détacher. D’autant plus que c’était uniquement ce détail, cette dimension qui le rendait capable de l’avoir amenée ici, elle. Elle qui n’avait rien d’exceptionnel ni de magistral, elle qui n’avait peut-être rien à faire là. Mais qu’est ce qu’on se fout de la logique !

Et alors qu’Andrea se dirigeait tout naturellement vers le meuble duquel Law venait de sauter à bas, celui-ci lui indiqua une toute autre voie. Ce fut alors seulement là qu’elle remarqua la chambre, pas plus surprise que cela d’en trouver une ici. Après tout, il fallait bien que les possibilités soient optimales, sans qu’il ait besoin d’arpenter constamment son royaume de long en large. Se nourrir allongé, hein ? Pourquoi pas après tout, bien que franchir cette porte battante provoqua un frisson qui se glissa dans le dos d’Andy. Manque d’habitude, sans doute. Ou vision qui rappelle trop de souvenirs pas encore vraiment attachés à Nexus. La jeune femme remarqua du coin de l’œil que son hôte se mettait à l’aise, tandis qu’elle-même se concentrait pour ne pas renverser le plateau qu’elle tenait fébrilement dans les mains. La théière pesait dangereusement lourd par rapport aux deux tasses, et bien que celle-ci soit placée au centre des paumes d’Andrea, elle ne sentait que précaire l’équilibre qu’elle maintenait tant bien que mal. Parvenant tout de même sans encombre sur le lit, elle y posa le plateau et s’assit après seulement, avec précaution. Pas bien pratique, m’enfin si c’était ça le luxe, elle n’allait pas refuser. S’installant en croisant les jambes, histoire de tenir une position à peu près assise, la jeune femme se saisit du breuvage et le versa dans les récipients prévus à son attention. L’un à ras le bord, comme demandé, l’autre laissant un certain espace. Pour un usage qu’elle ne tarda pas à mettre en œuvre. Reposant son attention sur le plateau, elle aperçut un petit coffret, qu’elle ouvrit pour y découvrir l’objet de son désir. Du sucre. Parce que le thé sans sucre, c’était comme un repas sans sel, une fête sans invités, un cocktail sans alcool, une vie sans amour.

Une fois la poudre blanche -l’inoffensive- ajoutée au breuvage, Andy le remua tout en attendant que cela refroidisse. En imaginant bien d’autres journées comme ça, à simplement être avec lui. Lui qui expliquait que son palace n’était pas que d’apparence et que son quotidien s’y prêtait aussi. Enfin, quand il ne trainait pas dans une rue, le soir. Puis il retourna sur ce qui l’attendrait. Tout apprendre. Le quotidien de Law, l’assimiler. Le faire sien, le décortiquer et s’y plonger pour y vivre. En serait-elle capable ? D’un coup, le doute se faisait. Elle qui avait grandi loin de tout ça, qui n’avait pas le parcours le plus méritant. Ce qu’elle avait fait ? S’imposer dans le cœur du prédateur de Nexus. Alors certes, ce n’était sans doute pas chose facile. Mais Andy ne l’avait fait qu’en restant elle-même, ni plus ni moins. Alors devoir d’un coup faire un pas en avant et entrer enfin dans le monde qu’elle brûlait de découvrir ... Oui, mais ça faisait peur. Ce n’est pas que la jeune femme s’en estime incapable ou peu intéressée, elle était prête à beaucoup pour y parvenir. Mais la flamme qui habitait Law n’était pas la sienne, elle n’avait aucun moteur à cela, aucune progression ni aucune connaissance de la chose. Pouvait-elle réellement s’imposer ainsi et piétiner de son passage maladroit et innocent, qui deviendrait sûrement professionnel et assuré, des gens qu’elle ne connaissait pas ? La motivation de rester ici serait-elle suffisante pour endosser ce rôle ? Autant d’interrogations qui se perdaient dans les méandres de son esprit. Autant de doutes qu’elle tentait de calmer en observant le visage confiant de Law.

Parce qu’elle était d’accord, parce que pénétrer au cœur de cette mécanique bien huilée réveillait en elle une peur excitante qui germait peu à peu, faisant sa place avec discrétion. Elle acquiesça donc de la nuque, pour montrer son assentiment éclairé. Elle apprendrait. Vite. Bien. Laisser les sentiments et la morale de côté n’était après tout pas un problème pour elle, dont les habitudes piétinaient les valeurs des bonnes gentes de la Terre. Il lui faudrait devenir comme lui ? Elle signait. D’office, sans réfléchir. Pas pour tenir la ville dans le creux de sa main, non. Pas pour la jouissance de la domination et du pouvoir, non plus. Simplement pour la satisfaction de faire quelque chose, de montrer à elle-même et à Law qu’Andrea n’était pas qu’une gosse trainant dans une artère sombre d’un monde inconnu. Que la résumer, la réduire n’était pas envisageable. Et puis, elle voulait également lui faire part de toutes les dimensions qu’elle abritait à présent que la brèche dans ses émotions s’était faite. Les capacités qu’elle avait, celles qu’elles obtiendraient. Mais à sa question, ses certitudes retombèrent quelque peu. Il semblait soucieux, comme si sa réponse avait une soudaine importance s’imposant à lui.

- Autre chose que ma vie là-bas. Je veux retrouver dans ton univers ce que j’ai perdu dans le mien. Que tu m’apprennes ce que toi seul peut me faire découvrir, ouvrir les yeux. Arrêter de me complaire dans un monde factice où tout n’est qu’illusions et mirages cachant une vérité que personne n’avoue. Voir la vie telle qu’elle est.

Elle se tut un instant, portant enfin sa tasse à ses lèvres. Convenablement sucré, et très bon de surcroît. Le fameux thé au thé commandé par Law. Cela lui permit de se donner une certaine constance après sa répartie où la passion et l’intérêt pointaient. Et s’il pensait que c’était trop, qu’il ne pouvait répondre aux attentes qu’elle avait l’audace d’étaler ? Eh bien tant pis. Elle rajouta tout de même, hésitante et inquiète à son tour :

- Ça te semble possible ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 15 décembre 2010, 21:18:14
La grande différence entre un accident et une préméditation, c'est l'occasion. La préméditation n'est pas le résultat d'un hasard, c'est le fruit d'une longue réflexion sur pourquoi, comment, quand. Quand on prévoit de faire quelque chose de bien précis, et d'important, on organise notre temps en fonction de ce qui doit arriver. Tel jour, à telle heure, je vais devoir rencontrer telle personne à tel endroit. Il faut que je partes plus tôt pour y être. Je vais devoir amener ceci, cela. Le plan est dressé, minuté. Tout doit se passer comme prévu. Ainsi, on pourra ensuite organiser sur d'autres plages horaires d'autres actions à prévoir. S'échapper. Après un évènement dont l'intérêt est considérable, on a tendance à vouloir se détendre. Surtout si tout s'est déroulé comme selon les prévisions. Tandis que l'accident, lui, subi la règle de l'occasion. C'est arrivé, par hasard. L'arithmétique de l'anticipation composée lors de l'élaboration d'une tactique a été faite par le destin. On se trouvait effectivement à tel endroit, à telle heure, avec telle personne, tout comme si l'on y avait mûrement pensé avant. Sauf qu'on a pensé à rien. Une puissance supérieure s'est chargée de le faire pour nous. Attentionnée. Ou intentionnée. Peu importe : le fin mot de l'histoire est que, positif ou négatif, l'accumulation des coïncidence a fait que cette vicissitude n'était rien de plus qu'un produit de la fatalité.

Accident et Préméditation sont-ils pour autant toujours sur deux routes parallèles, parcourant le monde entier sans jamais que leurs voies ne se croisent ? Faux. Il est des moments où les deux itinéraires finissent par se croiser. L'intervalle méticuleusement respecté est rompu, et alors, il y a collision. Choc mutuel ? Jamais ! Tandis que l'anticipation est lente, la chance file à toute allure, vive, insaisissable. La divergence de rythme temporel explique alors qu'il n'y a jamais une rencontre spontanée à dommages égaux. Comme une locomotive lancée dans son allure malgré la flagrante apparition d'un véhicule sur la voie, c'est systématiquement le hasard qui percute de plein fouet la prévision. Elle chamboule alors son itinéraire. Tandis que, grisée par son impressionnante célérité, et dédaigneuse de tout dommage collatéral, Fortuna continue sa route, filant de vies en vies, insaisissable, jusqu'à heurter de nouveau une innocente préméditation.

La préméditation de Law, c'est plus ou moins sa vie. Sa vie qu'il contrôle et qu'il mène comme un infaillible chef de bataille peut faire traverser le monde à son armée en décimant quiconque voudrait se dresser sur son chemin. Il est implacable. Grandiose.
Mais là, il vient de se prendre une claque sévère de la part d'un produit de la Chance. Voilà, collision. C'est tout simplement une révélation qu'il vient d'avoir. L'illumination, telle qu'il vient de l'avoir, ce n'est jamais prévu. C'est donc bien un produit d'une série de coïncidences. Orchestré, sans le vouloir, par Andrea.
Et voilà, la trajectoire change du tout au tout.

Peu sûr de lui, il se saisit de sa tasse, et ses deux mains se referment dessus, se redressant pour adopter une position semblable à la jeune fille, lorgnant un bref instant sur les chocolats reposant à côté du coffret qu'elle venait d'ouvrir, semblable à une boîte de Pandore au vu du soudain chamboulement de son esprit déclenché un peu après son ouverture.


Tu as raison. Je dérive.

Raison ? Mais raison sur quoi ? Il va s'expliquer. C'est ça qui est pesant, avec lui, parfois : Après avoir dit quelque chose, il attend toujours que la ou les phrases fassent leur petit effet. Le temps que ça germe dans l'esprit de l'autre, que ça grandisse, et qu'il puisse, quand il reprend la parole, démontrer que l'arbre qui a commencé à fleurir dans les pensées de celui qui l'écoute aurait dû donner des poires, plutôt que des pommes.
Observant Andrea, critique, il s'explique enfin.


Ce qu'il s'est passé avec les deux gros bourgeois. Je leur ai léché le cul. Et ça c'est pas bien. Je me ramollis ces temps-ci. C'est pour ça que j'me sens moins dans mes affaires. Je m'affaiblis en fait ! Ecoute, je vais me reprendre. Je vais durcir un peu la poigne, resserrer les rangs. Je dois redevenir plus impitoyable. Merci toi.

Et en guise de petit présent pour signifier sa reconnaissance, il lui offre un vif baiser sur le front, avant d'aussitôt tremper ses lèvres dans le thé bien chaud, et surtout, nature.

Oui c'est possible, Andrea. Je ne suis pas un homme d'apparence. Je vis pour ce que je suis. Je révèle les autres sous ce qu'ils sont. Et je vais te le montrer. Dès demain j'envoie chier le vieux et sa radasse. Et je lui dis que si sa fille ne vient plus ici, ce n'est pas parce qu'elle s'est prise une branlée au poker, c'est juste parce qu'elle m'a fait du charme et qu'elle a fini par me demander de s'allonger sur elle. Hm. Opportuniste. Elle pensait que je lui rembourserais ses pertes. Vicieuse petite vénale.

Il a de nouveau la niak. Il ne l'avait pas perdue, simplement, elle s'était effritée. Il est le roc qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être. Sa mâchoire est encore puissante, et ses doigts aussi. Il va mordre pour ne plus jamais lâcher, déchirer de ses crocs et de ses griffes, jusqu'à ce que le destin agonise, lui supplie une grâce inespérée, et ainsi, que Law devienne totalement maître de son futur.

T'es la meilleure. Bouge pas.

Poussant sur le côté le plateau pour se frayer un chemin glissé jusqu'au sol, il retire bottes et laines au pieds pour se retrouver pieds nus, et fera filer sa chemise au sol. Ainsi donc, il ne lui reste qu'un simple haut léger en plus du pantalon serré et de sa ceinture. Les bougies qui donnent chaud, sûrement. Déposant la tasse sur le plancher, il file ensuite vers son bureau mitoyen. Par la porte, Andrea pourra le voir s'agiter, se saisissant d'un papier à l'intérieur d'un dossier en cuir, qu'il referme pour s'en servir comme support. Une plume, à l'ancienne, il tente d'écrire debout à côté de son plan de travail. Il peste, comme à son habitude. Quelques secondes de grattage, et son texte terminé, il souffle sur son message, le plie, et laisse le tout sur le reste du foutoir bien ordonné, ayant marqué le prénom d'Isaac par-dessus, pour signifier que c'était à son intention.
De retour dans l'annexe de repos, il reprend son thé au vol.


Je ne sais pas comment il fait. Il arrive à écrire des tartines de trente pieds de long, toujours debout, avec sa petite écriture toute parfaite. Il m'énerve ! J'arrive pas à aligner trois mots droit dans cette position. Pfeuh. Bon. Excuse-moi.


Il se frotter le visage, et s'approche du lit, posant rien qu'un genou dessus en prenant soin de préserver l'équilibre du plateau.

Andrea. Ici, tu trouveras peut-être que c'est un meilleur monde que sur terre. Mais sache qu'il est bien plus dangereux. Ici, c'est impitoyable. Tout n'est pas toujours clair non plus. Il faudra te faire à des choses similaires, mais différentes. Mais je serais là pour te montrer. Il faudra que tu t'habitues à la souffrance de la nouveauté. C'est long avant de s'habituer. D'accord ?


Un sourire. Bienveillant. Et il prenait une nouvelle gorgée de son thé.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le jeudi 16 décembre 2010, 13:49:48
D’autant diront que l’éducation, ça se prend au berceau. Si l’on veut façonner la personnalité, l’avenir et même le destin de quelqu’un il faut s’y prendre très tôt. D’ores et déjà, les premiers mots appris refléteront un peu l’évolution que ce bambin criard et rougeaud aura. Si c’est « papa » ou « maman », bam, un complexe d’Œdipe sur le coin de la figure. Si c’est « manger », je vous laisse imaginer la priorité dans la vie. Les études, même si vous ne vous en doutiez pas. Parce que la bouffe, c’est la compensation du travail et le moteur de la réflexion. Si c’est « jouer », il faudra parier sur un homme restant très infantile, avec toujours cette idée de se gausser des autres tout en se pliant devant ses supérieures. Quelqu’un qui rentre dans le moule, quelqu’un qui se conforme à la hiérarchie et aux règles durement apprises dans son enfance. Et si c’est « tété », là encore je vous laisserai imaginer ... sans pièges. Y’a-t-il un moyen d’influencer ce premier son, de le maitriser pour en faire le premier d’une longue suite de réussites ou de déception ? Sans doute. Par la frustration, par l’envie et le désir d’une chose. Ce qui sort de la bouche d’un enfant est souvent l’expression la plus brute, la plus simple d’un besoin inconditionnel. Alors la meilleure façon de le lui faire dire, c’est de l’en priver avec délice et, disons-le, une certaine dose de perversion. Mais n’est-ce déjà pas au départ un comportement déviant que de vouloir manipuler un poupon du premier âge et en faire avec plaisir ce que l’on n’a pas réussi à être ?

Plus grand, c’est déjà plus facile. Parce que les enfants boivent les paroles des adultes savants, il n’y a qu’à voir comment certains arrivent à leur faire faire ce qu’ils veulent. Nombres de drames naissent de là, de l’envie de s’approprier l’enfant au lieu de le laisser partir. L’orienter à sa manière, parfois l’obliger à certains actes qu’un innocent ne devrait même pas connaitre. Le détruire, peu à peu, prendre possession de son âme et de sa pureté d’enfant. Le souiller. C’est parfois avec les meilleurs intentions du monde que l’on influence un esprit en incapacité de réfléchir, de s’ouvrir suffisamment sur le monde pour découvrir, émettre un avis propre, faire murir une idée. Parce que ces gosses s’amusent de peu et changent tout le temps de centre d’intérêt, parce qu’un gamin est fait pour l’instabilité, le risque, l’apprentissage par l’expérience et l’inconstance. Personne n’a le droit ni -normalement- le pouvoir humain de leur voler tout cela en les construisant dans un but égoïste. Comme ces mères qui enfantent pour combler un trou dans leur existence et pas seulement pour créer la vie, simplement, et accepter qu’elle se développe différemment de ce que l’on prévoit. Seule l’amoralité peut conduire à une telle déviance de l’enfance. Seule la haine de ce qui est différent peut amener au désir de contrôle d’une autre vie que la sienne. Seul le complexe d’infériorité profond peut aboutir à la volonté de faire sien, l’autre. En mieux.

Mais pour forger quelqu’un, il y a pléthores de facteurs extérieurs que l’on ne peut contrôler. L’influence des autres, de l’éducation extérieure. Les amis, les ennemis, les amours. Les sentiments de l’enfant le construisent bien plus que les idées qu’on peut lui mettre dans la tête, et seule l’interaction entre lui et l’extérieur pourra servir de base à ce qu’il va devenir et rester. Parce que les règles de la petite enfance, l’admiration d’un jeune âge, tout cela s’oublie et s’efface avec le temps pour ne plus rester que vagues souvenirs remplis de nostalgie. Ce qui laisse vraiment son empreinte, c’est soi-même. Les expériences que l’on fait, la force que l’on se découvre pour résister aux épreuves et aux déceptions. Celles-ci, tout comme les trahisons que nous réserve la vie, sont autant de conditions pour apprendre et évoluer. Il n’y a sans doute rien de mieux que les larmes douloureuses et le cœur serré pour barricader ses faiblesses et en faire des forces. Les déceptions rendent les bonnes surprises encore plus belles, les pleurs font d’un sourire ce qu’il y a de plus agréable à ressentir. Alors qu’un esprit heureux et comblé s’effondrera à la première difficulté une fois venu le terrible âge adulte, qui ne fait plus aucun cadeau sous prétexte de l’âge ou de la pitié que l’on accorde volontiers aux jeunes un peu capricieux. Bienvenue dans le monde réel, en somme. Celui qui révèle beaucoup de choses, celui qui en détruit d’autres.

Eh bien, pour se pencher deux minutes sur le cas d’Andrea, il se trouve que celle-ci avait eu une enfance heureuse, malgré son départ au Japon. Et que donc le premier véritable choc fit très mal. Si mal qu’elle n’en pleura pas. Si mal qu’elle préféra tout laisser passer et se laisser aller à d’autres réflexions bien plus superficielles, bien plus vides de sens. Mais ça, on le sait déjà. Que Seiji la prend pour une poupée depuis l’âge de dix ans, qu’il se fait un plaisir d’avoir la main mise sur elle sachant très bien que son environnement ne lui apportait rien de suffisamment fort pour combattre son emprise. Mais la roue tourne, et Andy ouvrait peu à peu les yeux sur sa condition, depuis qu’elle était aux côtés de Law, en somme. La jeune femme pensant l’affection comme un conte de fée se limitant au domaine de l’irréel et du mythe, elle ne faisait pas cas de son absence de sentiments envers son demi-frère. La normalité ? Ce qu’elle connaissait. Parce que l’on se base toujours sur soi pour comprendre les autres, et se remettre en question est difficile sans le déclic, sans le grain de sable qui vient rouiller la mécanique parfaite, et pourtant sans existence légitime. Et c’est seulement en imposant à son cœur la tendresse qu’Andrea apercevait vaguement la rancœur qu’elle devait porter à Seiji. La haine, les reproches qu’elles devraient lui incomber à l’avenir.

Pendant ce temps, ledit grain de sable la rejoignit en position assise et lui donna raison. Sous quel prétexte, dans quel but ? Seul le temps pouvait combler les illogismes de Law, et si même cela ne suffisait pas alors aucun artifice n’éclairerait sa lanterne. Aussi Andy se contenta-t-elle d’attendre la suite, pourtant contente d’avoir eu raison sur un obscur point dont elle n’avait pas connaissance. Mais la suite y remédia vite, et les mots se déversèrent avec ardeur, comme si le fleuve s’était tari trop longtemps avant de pouvoir à nouveau reprendre son cours tumultueux. Il se contenta en fait de la remercier pour une prise de conscience qu’elle n’estimait pas de son fait, pourtant heureuse de lui avoir rendu ce service inconscient. Lui s’affaiblir ? Andrea avait hâte de le voir au sommet de sa forme. Juste pour observer de son moindre rang le roi se délecter de ses sujets. Et pas sur un pied d’égalité comme il l’avait dit. Certes, Andy tenterait de se hisser vers lui pour ne pas être à la traîne et devenir d’office un regret découlant d’un simple mauvais choix. La faute à pas de chance, ou à l’aveuglement d’un instant ? Dans ce cas, la jeune femme priait pour qu’il n’ouvrit pas trop rapidement les yeux. Lui, impitoyable ? Andrea savait qu’elle ne devait pas en avoir peur, et ce n’était d’ailleurs pas le cas. Rien ne venant de lui ne semblait pouvoir dans son imagination la réduire à fermer les yeux, à craindre de les rouvrir sur une scène déplaisante.

Rien. Et pourtant, après une démonstration aussi spontanée qu’un effleurement de son front, ce fut autant de surenchérissement brut de décoffrage, qui aurait pu changer son opinion. Nues, sans aucune fioriture, les phrases s’enchainèrent dans les oreilles de la jeune femme qui, si elle avait été totalement banale et prévisible, se serait renfermée. Après tout, il venait tout de même de parler d’un être humain en des mots pour le moins peu attentionnés, sous entendant clairement quelques détails dont une femme amoureuse se serait bien passé. Et Andrea, dans tout ça ? Elle afficha un sourire. Pas des plus grands, certes. Mais pas par dégoût ou répréhension, non. Plutôt parce que la jeune femme n’était pas encore habituée à ces mots, à ces sons lancés dans la plus grande vivacité, sans y penser plus que cela. Ils venaient, se couchaient entre eux et prenaient un sens terre à terre et évident pour Andy. Surtout que cela ne faisait que renforcer ses convictions encore un peu trop ancrées, comme quoi le sexe n’a qu’une valeur très limitée. Que rien ne passe, que rien ne perdure. Ce n’est que poussière, et sans doute que cette idée-là lui permit de passer avec une extrême facilité outre les paroles de Law. Si apprendre ce genre de choses la dérangeait ? Pas le moins du monde. Aussi répondit-elle avec autant de détachement qu’il l’avait fait lui-même :

- Je trouve déjà plus logique de les envoyer voir ailleurs, en leur crachant la vérité à la figure en prime, plutôt que de faire des pieds et des mains de politesse devant eux.

Mais ses propres mots ne trouvèrent pas d’écho, tant Law ne tenait plus en place d’une révélation qu’il avait apparemment compris quelques instants plus tôt. Laquelle, exactement, bien malin celui qui pourrait le dire. Toujours est-il que cela lui donna comme une décharge électrique, le faisant descendre de son siège moelleux pour se mettre à l’aise et s’éloigner. Andrea le regardait du coin de l’œil s’affairer dans son bureau tandis qu’elle reprenait une gorgée de thé, venant également casser un morceau de chocolat pour le porter à ses lèvres avec gourmandise. Pêché mignon, il en faut bien un. Puis, reposant sa tasse à son tour bien que ce ne fut pas par terre, Andy étala ses jambes pour les détendre un peu de cette crispation croisée, avant de finalement les ramener contre sa poitrine, entourant ses genoux de ses bras. Elle se balançait d’avant en arrière sans lâcher Law du regard, alors qu’à lui seul il jouait un théâtre d’émotions et d’expressions passant sur ses traits aiguisés. Il était facile d’y lire sa fébrilité, son impatience, ses manies, son agacement, ses impulsions. Qui le ramenèrent finalement dans la seconde pièce de cette partie de l’établissement, le font commenter tout haut ce qu’il se passe à la seconde dans son esprit. Andy ne pouvait qu’admirer cette capacité à parler aussi librement, livrant les mots à qui voulaient bien les entendre. Elle, tellement incapable de faire de même, buvait les cadeaux inconscients qui découlaient des lèvres qui lui manquaient déjà.

Comme encore prêt à repartir, la tension demeurant dans chacun de ses muscles, Law ne reprit pas sa position initiale, si bien qu’Andy devait légèrement lever la tête pour rencontrer son regard, et ainsi répondre à ce qui suivit.

- Est-ce que j’ai l’air d’une petite chose fragile ? Si oui, ne te fie pas aux apparences, Law. Est-ce que parce que tu viens de t’attacher, tu es plus faible ? J’en doute, il en va de même pour moi. Et même si j’ai des milliers de choses à savoir avant de pouvoir vivre ici sans t’alourdir, je compte bien y arriver. Juste parce qu’il est hors de question que je croise les bras en te regardant faire.

Sourire bienveillant, de son côté aussi. Elle demeurait là, les genoux prisonniers de ses mains, fragile d’apparence. Et pourtant les mots qu’elle avait laissés s’échapper sans plus y réfléchir étaient assurés, prometteurs. Bien plus durs que son apparence, bien plus affirmés que son attitude. Qu’on ne s’y trompe pas.

- D’accord, donc. Je patienterai en acceptant de t’être inutile jusqu’à ce que je trouve ma place.

Et, alors qu’il reprenait du thé, elle reprit la dépouille du morceau de chocolat qu’elle avait mutilé pour lui permettre de rejoindre son autre moitié. Quoi de plus normal qu’une discussion sérieuse autour d’une collation qui n’avait rien à faire à une heure pareille, sur un lit. Mais encore une fois, quelle logique peut enfermer deux êtres aussi atypiques que Law et Andrea ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le jeudi 16 décembre 2010, 19:22:22
Être humble, ça ne veut pas dire se considérer comme égal à ce que l'on est. C'est tout simplement se réduire. On cherche à rendre inférieur son rôle véritable, ses responsabilités, ses qualités, alors que dans notre conscience, l'on veut juste se mettre au niveau qui nous est propre. L'humain n'a jamais de demi-mesure. Jamais d'estimation exacte de lui. Il faut toujours qu'il glisse, quelque part, un trop ou un pas assez. À propos de lui, évidemment, mais aussi à propos des autres. Alors, qui est habilité à juger la personnalité et le caractère de quelqu'un ? Lui-même, ou ceux qui l'entourent, ou le connaissent ? Personne. Personne ne peut prétendre juger à sa juste valeur la profondeur de qui que ce soit. Entre ce qu'il paraît, ce qu'il est consciemment, inconsciemment, ce qu'il a été, ce qu'il cherche à devenir, et ce qu'il sera effectivement, qui pourrait prétendre estimer quelqu'un au prix dont il a la réelle valeur ?

Mais peu importe. Peu importe, car tout ce qui compte au fond, c'est la somme à laquelle se vend réellement une personne et non à laquelle elle cherche à se monnayer. Quel intérêt que quelqu'un soit modeste, pourvu qu'il soit quelqu'un d'efficace, d'exagérément plus compétent que ce qu'il veut bien admettre ? En revanche, le contraire est assez gênant : Du simple type qui en rajoute un peu, jusqu'au vantard, présomptueux fanfaron bravache et prétentieux qui se pare de qualités qu'il n'a pas, tout ce petit monde devient vite énormément gênant.

Andrea est le premier cas.
Law le deuxième.

Car lui pense pouvoir offrir le monde à n'importe qui pourvu qu'il puisse le payer. Il aligne quantités de garanties qu'il respecte plus ou moins, à sa convenance. Le secret, c'est que ça finisse par lui devenir profitable. Rien ne se perd, rien ne se crée : Tout se transforme en quelque chose qui, un jour, servira les précieux intérêts d'un certain Law sans scrupule à briser un ami si celui-ci commence seulement à manifester le moindre signe d'agressivité, d'adversité. Oubliant les anciennes alliances, brisant de sa hache vengeresse les pactes scellés par son sang pur, et celui de son camarade, quitte à infliger les inévitables dommages collatéraux. Car la confiance, c'est sacré. Et qui trahit Law s'expose à la plus grave des sanctions. Non, ce n'est la mort. La mort n'est que l'aboutissement de toute la punition.

Quant à elle, elle pense être "inutile". Ne se rend-elle pas compte de ce qu'elle a déjà fait pour lui ? Briser un peu son irréductible blindage pour s'y faufiler, et lui montrer que ne devenir rien d'autre qu'une forteresse imprenable n'est pas forcément la solution. Oui, elle a profité d'une faiblesse, dont le seul aboutissement -pour l'instant- a été l'acceptation de ce qu'il s'était refusé à accepter depuis longtemps. Un attachement qui ne conduise pas à une manipulation, une destruction.


Tu n'es pas inutile.


Appuyant l'affirmation, il lève un sourcil. Comme si il se demandait pourquoi elle pensait ce genre de chose.

Tu es tout sauf inutile, et tu ne m'alourdis pas. Chaque personne possède quelque chose qui pourrait intéresser quelqu'un d'autre. Mais peu de gens s'en rendent compte. Même les milliers de cloportes qui vivent péniblement, et galèrent dans la rue, qui ne connaissent pas mon nom ni même mon existence. Ils ne savent pas à quel point ils peuvent m'être utile.. Ils ne se rendent pas compte. Alors non, tu m'es utile, et toi plus qu'un autre. Ce n'est pas parce que tu ne sais pas porter une arme ou que tu n'es pas une génie des chiffres que tu ne me sers à rien.


Après des bruits de pas d'une troupe peu grâcieuse et assez lourdement équipée, de l'autre coté d'un mur pourtant bien isolé, une main toque à la porte. Quatre coups dans un rythme bien particulier que Law reconnaît tout de suite.


-Pas maintenant !!
-"C'est important."
-J'ai demandé à ce qu'on ne me dérange sous aucun prétexte, T'as pas eu le message ?
-"Si. Et je suis là quand même."


Là, ça sentait le brûlé. Finissant son thé d'une traite, il pose de nouveau à terre sa tasse et s'éloigne pour ouvrir la porte.

-Important comment ?
-"Assez important pour que je vienne vous déranger alors que vous avez demandé à être tranquille et que je sais pertinemment que vous êtes dans votre chambre avec une jeune fille."


Après un bref regard vers Andrea, il se penchait vers Isaac pour lui demander de murmurer ce qu'il a à lui dire. Tout au long de ses confessions, Law ne réagira pas le moins du monde. Ce qui est peut-être pire que si il avait grimacé ou sourit.
Il ferme la porte, mais pas complètement. Revenant un peu contrit, plongeant sa main sous l'un des nombreux oreillers. Il en sort une dague, qu'il plante au mur.


Fais gaffe, j'ai plus ou moins de quoi te défendre dans cette chambre. Prend garde de ne pas te blesser. L'orbe rouge incrusté dans le mur règle la température selon ta volonté, et si tu t'ennuies, tu peux descendre dans le casino. Je.. Hm.. enfin, je m'absente souvent.. Je pense que c'est ce qui t'embêtera le plus. Je hais les imprévus. Enfin, non, j'aime les imprévus car ils mouvementent une vie. Mais je déteste quand ils doivent déranger mes instants de bonheur. Je ne peux pas te promettre que je ne serais pas long. D'ailleurs, je pense justement devoir être dehors longtemps. M'enfin. Fais ce que tu veux, tu es chez toi. À mon retour, tu feras tes premières armes.

Surprise, il l'embrasse. Il prendra tout son temps pour savourer un peu ce baiser qu'il sait malheureusement être le dernier avant plusieurs heures. Son front s'appuie alors sur celui d'Andrea, puis il s'éloigne.

Et tu as le droit de martyriser le personnel, ils sont là pour ça.

Disparition, en emportant son manteau.


***


Un lendemain. Où il fait froid dehors, où le soleil poind faiblement, mais où la vie semble un peu plus belle. Andrea ayant fini par s'endormir, elle sera réveillée par une main sur son épaule. Devant elle, le visage d'un Law accroupi un peu ébouriffé, torse et pieds nus, avec un large sourire.


Au risque de faire cliché.. T'es trop mignonne quand tu dors.

Nous sommes le matin. Et après cette difficile nuit, Law semble dans une forme olympique.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le vendredi 17 décembre 2010, 14:48:02
Pas inutile, oui. Ou si peu. Evidemment, Andrea savait bien que Law ne se risquerait pas à lui dire quelque chose qu’il ne pensait pas pour le simple plaisir de charmer ou de rassurer. Il y avait toujours une certaine sincérité dans ses paroles, et même dans son hypocrisie affichée il y avait un détail relevant de ses véritables impressions. Et là, rien. Puisqu’il le pensait. Alors comme ça, elle lui apporterait quelque chose de précieux qu’elle seule pourrait lui offrir ? C’était sans doute trop espérer de sa part que d’accepter cette constatation. Dans une telle situation, on aurait pu croire que le poids de la responsabilité de compter pour quelqu’un était trop lourd et qu’elle se défilait comme elle pouvait ... Erreur. Certes, cela l’effrayait un peu de ne pas satisfaire ses attentes, mais c’était plus la peur de paraitre meilleure qu’elle n’est. Le souci de remettre de la vérité et de l’ordre dans la vision d’un autre que soi. Savoir s’estimer n’est pas facile, et se laisser jauger par d’autres encore moins. Est-ce que la subjectivité vient d’avantage de l’extérieur et du regard lointain, ou bien de soi-même et de la préoccupation toute narcissique que l’on se prête ? Avoir un rôle n’était pas dans les habitudes d’Andy, qui connaissait la liberté ultime, qui était tout autant une entrave terrible, de ne rien devoir à personne, de ne décevoir aucune attente pour la simple et bonne raison que la jeune femme n’en créait aucune. L’utilité qu’elle avait en tant que personne était une chose inconnue, et elle cherchait encore en quoi elle servait Law.

Ceci-dit, elle aurait pu quelques instants renverser la situation et se demander ce que lui, spécialement, lui apportait. Parce que la liberté, les sensations, la peur auraient pu naître dans bien d’autres circonstances. Mais à un moment de la soirée, la balance avait basculée et Andrea savait que cela n’aurait pas été le cas avec le premier passant venu. Il y avait le contexte, certes, mais également la personnalité de l’homme qui s’était dressé en face d’elle. Les détails qu’elle remarquait sur lui, ses manies, les variations de son humeur qui se lisait sur ses traits. Un tas de petites choses passant presque inaperçues et prenant pourtant un sens tout particulier. Etait-ce la même chose dans l’autre sens ? Andy peinait à s’imaginer particulière, intéressante, avec son visage un peu fermé et rarement sympathique, son allure curieuse mais sans prises d’initiatives. Certainement. La jeune femme porta une main à son visage, comme pour essayer de percevoir à travers sa peau froide ce qu’il y avait de si intéressant pour l’avoir, lui, interpellé. Les deux jeunes gens, l’un comme l’autre, n’étaient ainsi pas du genre à passionner au premier abord, l’un effrayant ou déstabilisant par ses comportements instables, l’autre ennuyant dès le premier coup d’œil, avec son regard vide et terne. Et les voilà à discuter tous les deux, le premier rassurant sa belle avec ses mots à lui, avec la simplicité qui le caractérisait dans ces moments-là. Et ce fut seulement là qu’Andrea prit conscience du caractère stupide de sa remarque. Qu’attendait-elle ? C’était ridicule d’avancer une telle chose en présence Law.

On l’aura compris, Andy n’est pas femme à se mettre en avant. Elle reconnait bien volontiers ses qualités, admets sans rechigner les capacités qu’elle a et ne reprend que peu de gens lorsqu’on lui adresse un compliment. En temps normal, c’est tout le temps ainsi que cela se passe. Mais quand on commence à s’attacher à quelqu’un, l’image qu’on lui donne devient importante. On cherche à faire attention, on veut plaire, sans décevoir. Andy, si elle restait on ne peut plus elle-même, encore bien loin d’expositions si lointaines du sentiment de tendresse, agissait inconsciemment en ce sens, et sa dernière remarque l’appuyait. C’était un bête mécanisme non désiré qui l’avait poussée à se rassurer par un intermédiaire inutile, puisqu’elle savait très bien la réponse qui allait suivre. Et de toute façon, même si c’était quelque chose de complexe qui aveuglait la perception de Law -ce à quoi elle aurait pu répondre affirmativement dans la salle des coffres, mais plus maintenant-, Andy ne le laisserait jamais se rendre compte de son rôle assez limité. Elle ferait tout pour qu’il n’ait jamais à se poser la question du pourquoi l’avoir emmenée ici. Utile ? Elle le deviendrait, s’il le fallait vraiment. Ce n’était qu’une étape de plus.

Si elle hocha la tête comme pour admettre l’incontournable logique des paroles de Law, la jeune femme n’eut pas le temps d’y répondre que quelques coups sourds se firent entendre à la porte. Manifestement, l’ordre de ne pas être dérangé avait été détourné. Un instant, Andrea se demandait ce qui allait pouvoir arriver à l’imprudent qui n’aurait pas été averti de l’injonction sans appel du maître des lieux ... Mais c’était quelqu’un de bien averti qui pressa Law de venir s’enquérir de ce qu’il se passait. Manifestement, ce n’était pas pour une banale histoire de bagarre ou de fraude. Assez important pour que l’homme au regard redevenu acéré et alerte se déplace, expédiant la boisson qui pourtant se prenait avec une patience infinie, et doive laisser Andy à se demander ce qu’il se tramait. Sans entendre ce qui se disait, Andrea fit mine d’ignorer le coup d’œil que les interlocuteurs à la porte lui lancèrent, concentrée qu’elle était sur les ondulations du thé dans sa tasse. Passionnantes propagations de forces physiques inexplicables. Véritable spectacle de cercles et d’amplitude qui se mêlaient une à une dans la porcelaine fragile du contenant. Puis, attendant que la conversation se termine, Andrea reposa l’objet de son attention feinte et leva un regard interrogateur vers Law qui revenait, semblant soucieux. Ce dernier ne lui répondit pas avant de dégager une lame, tranchante juste ce qu’il faut, de sous les draps et, de la planter avec dextérité dans un pan de mur, posa à nouveau son attention sur elle.

Tandis qu’il parlait, Andrea suivit des yeux ce qu’il lui exposait au fur et à mesure. La dague, au mur, pour se défendre. Ça, elle avait bien compris. Se défendre de quoi, de qui, elle n’en savait que trop rien. Mais s’il fallait le faire, ce ne serait sans doute pas un problème. Du moins le pensait-elle, grâce au trou que laissait dans son cœur des sentiments, même les plus humains comme la pitié ou l’hésitation. Le thermostat façon améliorée, ça aussi elle comprenait sans trop de problème. Le casino ... aussi. Ce qui la retint le plus fut toutefois la suite, quand Law lui exposa avec la plus grande honnêteté possible que son absence était inévitable et pouvait être longue. Eh bien, elle attendrait. Recueillant son baiser avec un plaisir tout particulier, celui de la dernière fois, la jeune femme le regarda se préparer à partir avant de lancer, simplement.

- Je me vengerai bien en pourrissant ton ... absence de décoration. Mais je serais sage, ne t’en fais pas pour moi. Le bonheur sera encore là au retour, il suffit que tu reviennes le trouver.

Et c’est là-dessus qu’il se quittèrent, lui enfilant sa veste et lançant une dernière recommandation qui appuyait son statut de reine en ces lieux, elle savourant encore le goût de ses lèvres qui s’éloignaient, ainsi que le contact de son visage contre le sien. Une saveur âcre habitait à cet instant le palais d’Andrea, la triste constatation qu’il lui fallait se résoudre à le voir partir. Cela avait beau être la première fois, ça ne serait très certainement pas la dernière et elle s’y habiterait tant bien que mal. Après tout, bientôt elle aurait sans doute trop de choses à faire et trop de savoirs dans la tête pour n’avoir ne serait-ce que le temps de se morfondre, mais ce soir il laissait un grand vide. Enfin, elle pouvait néanmoins faire un retour sur ce qu’il venait de se passer. Mais avant cela, elle récupéra le plateau, encore posé sur les draps confortables pour se lever et aller le poser sur ce qui semblait être un chevet, à quelques pas du lit. N’ayant aucune envie d’aller se perdre dans les couloirs pour trouver quelqu’un à qui demander de le renvoyer en cuisine, elle préférait pour l’instant le laisser là. Se resservant la moitié d’une tasse, la précédente ayant été d’ores et déjà vidée, Andy la porta à ses lèvres et en profita encore un peu avant de la faire rejoindre le reste du service.

Se retournant vers le matelas qui semblait lui tendre les bras, elle s’y laissa tomber avec un grand soupir, expulsant la tension des dernières heures, l’impression de rêver et de devoir profiter de tout. Andrea resta ainsi de longues minutes, respirant à plein poumons les effluves qui se dégageaient de l’édredon. Puis, sans prévenir, elle se retourna sous le dos et blottit son cou contre un oreiller tout en fixant le plafond avec insistance. Recroquevillant ses genoux contre elle, la jeune femme se repassait les grands moments de la soirée. Peinant à imaginer que tout cela s’était réellement passé, Andrea souriait en se souvenant de leur rencontre atypique, de la montée d’adrénaline qui l’avait amenée à ne pas fuir, dans ce bar. Avec le recul, la jeune femme se rendait bien compte que cela avait été folie de ne pas déguerpir et de porter un semblant de secours maladroit à quelqu’un qu’elle ne connaissait pas. Elle avait trouvé le goût du risque, qui s’était pourtant rapidement effacé devant quelque chose de bien plus doux, tout en agissant avec autant de force sur son cœur. Son regard s’était posé différemment sur Law, et depuis le coup de la vision qu’il avait eu, un déclic s’était fait. Quoi, pourquoi, comment ? On s’en fiche. Tout ce qui comptait c’était cet actuel serrement quelque part dans la poitrine, une petite voix qui lui disait qu’il lui manquait après avoir tant été là pour elle ce soir. Prévenant, tendre, et à la fois lui-même, il avait réveillé chez Andrea quelque chose de profondément caché. Et elle avait sans doute fait de même, au moins un peu, de son côté.

Elle songeait à présent à ce qu’il lui restait comme temps jusqu’à son retour. Elle n’en savait strictement rien, lui non plus apparemment. Et l’heure était déjà fortement avancée, aussi Andy hésitait. Descendre au casino comme il le lui avait suggéré ? La jeune femme n’avait pas encore suffisamment de marques ici pour se permettre de s’y aventurer seule, tard, à l’aveuglette. De plus, le silence était encore son meilleur allié alors qu’elle se plongeait dans des images déjà passées et piétinées sans cesse par de nouveaux clichés. Au fur et à mesure que le temps passait, Andrea s’enfonçait dans le matelas et ses pensées se faisaient plus floues. Elle confondait déjà rêve et réalité, si bien que tout ce qui l’entourait n’apparaissait plus que comme un doux mirage dont elle devrait se séparer au réveil. Persuadée de sombrer dans son lit, la jeune femme oublia simplement que Law lui avait parlé de se défendre. Elle qui aurait voulu l’attendre, le veiller et en profiter pour admirer sans cesse la vue splendide de Nexus de nuit, s’effondrait. Le sommeil était impitoyable, et il la capturait sans pitié aucune, rendant ses paupières trop lourdes et le décor trop lointain. Puis, alors que plus rien ne la retenait à la réalité, Andy céda à l’envie d’abandonner la partie et Morphée l’accueillit en son sein avec une célérité qu’elle ne connaissait plus, à cause de ses insomnies, depuis bien longtemps. Voilà qu’il lui fallait un autre monde pour se guérir de troubles importants du sommeil ...


***

Quelques heures plus tard, le matin. Les rayons du soleil percent à travers la porte communiquant entre le bureau et la chambre, celle-ci étant restée ouverte. Ils réchauffaient doucement la joue d’une jeune fille endormie qui protesta dans son sommeil et se retourna par automatisme, pour tenter vainement de fuir le réveil qui pointait, la nuit étant passée depuis longtemps. Ce fut pourtant une autre chaleur qui la tira complètement de l’inconscience, celle d’une paume se posant sur son bras, doucement. Ouvrant difficilement les yeux, Andrea dut se frotter les paupières d’une main négligente pour accommoder sa vision, un peu aveuglée par le sommeil et la clarté qui baignait la pièce. Puis, découvrant un visage connu, la jeune femme cligna les paupières à plusieurs reprises, afin d’être sûre de ne pas rêver encore. Elle était là, les yeux un peu hagards encore, les cheveux emmêlés par la nuit et l’air un peu perdu qu’ont ceux qui se réveillent à peine, admirant une copie presque exacte de son allure ébouriffée, le sourire en plus. Alors Andrea lui répondit, d’autant plus lorsqu’il lui lança un compliment de bon matin. Que cette journée était belle, lui permettant de s’assurer que tout ce qu’il s’était passé n’était pas qu’illusion. Ce n’était pas Seiji mais Law. Andy ne s’embarrassa même pas de la tenue débraillée de celui qui lui faisait face, se redressa et le tira par le bras afin de l’attirer contre elle et de le faire basculer sur le lit. Si bien que, lui presque allongé et elle relevée au moyen d’un de ses coudes, elle le regardait avec amusement. Ravie de le retrouver, elle nota cependant qu’il n’avait pas l’air fatigué le moins du monde, bien au contraire.

- Comment ça se fait que tu sois en pleine forme, alors que tu n’as manifestement pas dormi sur quelque chose d’aussi confortable que moi ?

Andy marqua une pause, le détailla de haut en bas et corrigea, notamment au vu de la matinée qui pointait, détail qu’elle venait juste de remarquer.

- Voire pas dormi du tout ?

Puis les questions fusèrent, impatiente qu’elle était d’entendre sa voix autant qu’elle l’était de savoir s’il allait bien. Sa main, pendant ce temps, passa dans ses cheveux à lui pour les éparpiller encore plus. Simplement heureuse, elle passait du coq à l’âne sans aucune réflexion ni retenue. Spontanéité, quand tu nous tiens ...

- Tu vas bien ? Quelle heure est-il, j’ai dormi longtemps ? Je n’aurai pas du ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le vendredi 17 décembre 2010, 16:58:32
Le mystère. Tant de questions qui se posaient, les unes après les autres, à son propos. Law aimait qu'on s'intéresse à lui dans la seule optique de pouvoir confesser ce qu'il veut de sa vie. Il a un contrôle total sur les informations qui filtrent quant à son histoire, sa personnalité, ses secrets.. Mais pour Andrea, il n'a pas besoin de faire le tri entre ce qu'il peut dire, ou doit garder entièrement pour lui. Disons qu'il joue cash, quitte à l'être trop. La jeune femme devra composer désormais avec un homme des plus honnêtes, qui préférera souffrir l'enfer plutôt que de devoir, une seule fois, proférer un mensonge pour se sauver. Il n'est pas dit qu'il tentera d'éviter qu'elle sache deux trois petites choses, du moins pour l'instant. En dehors de cela, il le jure sur sa propre vie, jamais il ne lui fera ce qu'il fait à tout les autres vivants sur ce plan.

Il se laisse entraîner, presque enfantin, contemplant sa belle à peine remise de son entrée dans le monde de Terra et encore peu réveillée, alors que lui, comme elle a si bien pu lui faire remarquer, n'avait pas dormi.


Tu a dormi autant qu'il te fallait. J'aurais bien voulu te laisser un peu plus dans tes songes mais je me suis rendu compte d'une grosse boulette que j'ai faite hier. Je ne t'ai pas nourrie.

Excellent timing, puisque derrière se pointait un esclave, avec un collier en cuir et un anneau accroché, mais celui-ci ne semblait pas faible, ne montrait signe d'aucune maltraitance. Il n'avait pas l'air particulièrement triste non plus. Un peu effeminé, et ses vêtements étaient d'une élégante simplicité. Il portait avec lui un très large plateau en métal forgé, qui semblait plutôt lourd pour ses petits bras. Surtout quand on voit le contenu dudit plateau.
Deux assiettes de viandes en petit morceaux, découpés assez vulgairement. Un grand saladier de divers fruits, dont Andrea n'en connaissait que la moitié. Du pain, du beurre, de la confiture dans des pots à l'aspect bien artisanal.  Deux tasses, dont l'une respirait un breuvage sombre, dont l'odeur rappelait immédiatement le café, tandis que l'autre était rempli de ce qui était manifestement, sans aucune erreur possible, un chocolat chaud très fumant. Divers couverts qui devaient tous avoir leur utilité. Dans un équilibre parfait - la surface des deux boissons ne souffrit d'aucune tangeance, c'est pour dire -, l'esclave posait un genou à terre et présentait l'imposante préparation devant Law. Celui-ci reposait ses deux pieds à terre, marchant jusqu'à l'imper qu'il avait accroché au coin de la porte (Quelle idée u_u) et fouillait dans les poches intérieures. Il en sortit une pièce d'argent, et le tendra à l'adolescent quand il aura les mains libres.


Pose-ça sur le lit. Et... Tiens. Tu fais chauffer l'eau. Deux serviettes prêtes. Et après tu vas te prendre un petit déjeuner dehors si tu le souhaites. File.

Avec une étonnante bienveillance pour ce serviteur à qui il n'avait normalement aucun compte à rendre, celui-ci acceptait sans réagir plus que ça, sinon un remerciement de la tête, apparemment c'était une habitude. Et donc, le plateau sur les draps, à côté d'Andrea, il s'éloignait.

Tu veux la vérité sur ma forme ? Y a aucun secret. Bon, écoute bien.

Il s'accroupit sur le sol, les fesses sur les genoux, plongeant sa main dans la viande pour se servir d'un petit morceau.


Je ne dors qu'une nuit sur deux, et quelques heures seulement. Donc, là, c'est tombé sur la nuit où je ne dormais pas. C'est une habitude que j'ai pris. C'est mieux pour les.. comment dire.. les petites affaires nocturnes et discrètes. Bon, je t'avoue que parfois j'accuse un peu le coup, auquel cas je me prends un repos en plus. Pour tenir le coup, j'ai rien d'exceptionnel. Alimentation saine, régulière. Jamais trop, mais jamais trop peu. Par exemple, ça. Ça c'est mon petit-déjeuner habituel. Bon, je ne mange pas tout tout. Mais je mange un peu de chaque, j'essaye de me caler histoire de pouvoir fonctionner sans problème malgré mon sommeil manquant. Ensuite, du sport. Souvent. C'est pas en végétant dans un lit que j'arriverais à surpasser les Dieux. Il faut que mon corps puisse suivre mon rythme. Et l'esprit, évidemment. Toujours focalisé sur quelque chose. Toujours en action. Se concentrer sur quelque chose. Si ma tête et mes jambes sont habituées à tenir le coup, j'ai un coup d'avance sur les autres. Parce que pendant que tout le monde dort, moi j'économise du temps. J'ai l'impression que ma vie passe moins vite. Je profites plus. Et je peux faire plus de choses. Plus que n'importe qui avec un rythme normal. Mais ce n'est pas une critique, hm ? Et je ne vais pas t'obliger à faire comme moi. Vas-y, mange à ta faim.

Visiblement le café était pour lui. Quant au chocolat..

Oh, j'ai demandé ça, mais si tu préfères un thé ou quoi que ce soit, tu n'hésites pas. Il est fait avec des épices, du miel, et deux ou trois chocolats différents. Et du lait évidemment. J'espère qu'il te plaira, c'est comme ça que je le bois habituellement. Enfin. Bon, après douche, parce que prendre soin de soi c'est important. Si tu veux tu y iras après moi. Ou.. En même temps, si tu ne te sens pas gênée.

Lui, pas du tout, en tout cas. Se mettre nu devant tout le monde ne lui pose aucun problème, habituellement.

Bon, et ensuite on fera un tour dans Nexus si tu te sens en forme. Tu t'achèteras des habits un peu plus locaux si tu en as envie, et j'essaierais de t'apprendre deux ou trois choses. La société, la religion. Par exemple, je crois en un panthéon de Dieux, mais je n'en vénère qu'un seul. Celui de la Juste Violence. Il me pardonne quand je me laisse aller à la guerre et aux combats ainsi qu'à la souffrance des autres car il sait que mon coeur n'est pas qu'un amas de cendres. Je lui adresse une prière avant chaque bataille que j'aurais à livrer, même la plus minime. Et de temps en temps, je sacrifie un traître selon ses rites.

Law religieux. Elle est drôle celle-ci. Il mange calmement, mordant parfois dans cette poire qu'il a extraite du lot, buvant son café pour, il l'espère, recharger un peu ses batteries. Encore une fois, il ne ressent aucune honte à se livrer comme il le fait.

Je ne te demande pas de croire en lui, et je respecterais toutes tes croyances. Sache tout de même que les Dieux d'ici ne sont pas les mêmes que chez toi. Ici.. Les Dieux s'adressent vraiment à nous. Ils nous écoutent, et parfois nous répondent. On dit que certains ont pu les rencontrer. Je n'ai vu le mien qu'en songe. Pendant un sacrifice. Si tu veux penser que c'était qu'une hallucination onirique, fais-le, ça ne me dérange pas.


Une brève pause. Il a beaucoup parlé. Il souhaite qu'elle parle un peu d'elle, maintenant. Alors il la regarde, attentif.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le jeudi 23 décembre 2010, 15:28:08
Café, thé, chocolat. Trois incontournables, auxquels on pourrait rajouter quelque sirop ou autre mixture moins essentielle, moins évidente. Ce sont généralement ces trois mots là que l’on entend le plus souvent lorsqu’on se rend chez quelqu’un qui ne connait pas vos goûts. Parce que le café, c’est un classique. Apprécié de beaucoup, ceux qui ne l’aiment pas ne peuvent toutefois bien souvent pas le supporter. Le goût âpre et amer peut primer sur la force tonique et ensorcelante de ce mélange noir, plein de profondeur et d’essences. Il peut se faire rafraichissant, léger et désaltérant, clair comme de l’eau de roche et au goût très pur. On peut également le rendre doux, à l’acidité à peine prononcée sans la moindre marque d’amertume, où la satisfaction et le soulagement de la boisson priment. Mais qu’on ne s’y trompe pas, il est parfois fort, agressif, plein d’une passion que peu se targuent de supporter. Un apport trop important en goût fera naitre une certaine aversion de la pourtant si bonne odeur d’une tasse fumante de café. Les ridules à la surface, la mousse mordorée qui s’efface peu à peu devant l’océan sombre, relevé parfois d’un nuage blanchâtre en ternissant la perfection de sa robe. Le goût passe avant tout par les yeux. Bref, il se décline à l’infini, avec autant de provenances que de destinations, avec tant de variations que bien malin celui qui pourra affirmer connaitre cette boisson et son goût si lunatique, au gré des saisons, des préparations et du lieu d’extraction. Véritable boisson de société, le café s’impose comme l’incontournable, l’inégalable. On le prépare, de fait, sans réellement penser que certains palais ne s’y retrouvent pas. On le croise sur toutes les tables, sur toutes les lèvres, et pourtant Andrea, si elle est passionnée par son fumet grisant, ne peut supporter la boisson.

Le thé, boisson mondaine. Plus raffiné, plus recherché, son arôme est préservé dans certains cercles privés, dans des communautés tournées vers les plaisirs d’une culture passée, vers le respect des traditions. C’est du moins l’image qu’on lui donne, à tort parfois. C’est avant tout le parfum idéal, ni trop fort ni trop pauvre, pour alimenter une pause, une discussion comme celle que Law et Andrea avaient eu la veille au soir. Convivial et à la fois discret au palais, le thé sait se faire oublier tout comme il parvient à se faire apprécier à sa juste valeur, tout en mettant les buveurs au centre des attentions. Pas facile, pourtant, de lui faire trouver sa place en termes de caractère et de passion, cette boisson étant d’avantage celle d’une ambiance posée, tranquille, à l’univers propice au calme. On l’associe alors toujours au temps, qu’il faut prendre, qu’il faut céder pour en profiter comme il convient. C’est alors avant tout une mission rafraichissante dont il est doté, accompagnant certains plats à merveille et se mariant pertinemment, encore une fois, aux moments de la journée qui n’acceptent pas une autre boisson. On peut y lire à travers, le rendre aussi opaque et fort que son conjoint l’admet. Lui aussi souffre de tant de déclinaisons, essentiellement basées sur le dosage, qu’il est difficile d’en parler au singulier et d’en admettre une seule sorte. Toujours est-il qu’il permet aux corps de se délasser, aux langues de se délier ; c’est la boisson de la rencontre, du temps que l’on sacrifie à connaitre, des minutes que l’on prend pour soi et pour l’autre, dans un échange mutuel et équitable d’appréciations.

Le chocolat, ah le chocolat ! Aphrodisiaque incontournable, c’est avant tout la boisson de l’enfance, les saveurs des souvenirs, le goût de la nostalgie. Savant mélanges de différents ingrédients, il peut s’accompagner et se créer de tout, le rendant aussi amer que possible ou au contraire étouffant de sucre. On le décline en trois couleurs, toutes souffrant d’une base différente de mélanges et de mariages, tous plus réussis les uns que les autres. C’est l’invité principal de la fête, et en boisson il s’impose comme l’ami chaleureux qui vous prend de l’intérieur, vous impose sa douceur et le brûlant de son parfum pour vous envelopper d’un écrin réconfortant. C’est ce liquide épais qui coule dans la gorge, délaissant toute notion du bon pour la supplanter. Clair, foncé, doucereux ou relevé, il n’y a rien de plus efficace pour calmer un enfant ou faire vivre à quelqu’un des moments qu’il a inévitablement passé. En y faisant flotter des icebergs colorés souvent remplis de sucre, en le buvant, fasciné par un écran captivant toute l’attention avec ses rires et ses mouvements remplis du dynamisme de l’enfance. Ou tout simplement en le savourant quand il sort du feu, le plus vite possible quitte à se brûler, simplement pour ne pas laisser fuir la moindre délicieuse odeur qui flotte dans l’air d’une cuisine. Andrea, c’était surtout ça. Les souvenirs de Finlande avec sa mère, dans leur petit appartement transpirant le froid en hiver. Tous les jours, cette douceur ramenait en son cœur de petite fille un peu d’espoir et de réconfort. Moment partagé uniquement entre elles, la gamine devenue grande gardait une affection toute particulière pour cette boisson onirique que peu s’avouaient boire une fois devenus adultes.

Café, thé, chocolat. Trois incontournables, qui naissaient souvent de la bouche d’un presque inconnu, au réveil d’Andrea. Combien de fois elle s’était entendue proposer ces trois mots, alors dépourvus de saveurs et de promesses, quand elle s’éveillait tant bien que mal dans un environnement inconnu ? Cela résumait bien ses nuits passées dehors, quand elle acceptait de s’offrir aux envies d’un autre en échange d’un peu de gentillesse et surtout d’un toit où tenter de s’endormir. Comme elle ne réitérait que rarement les expériences, pour le plus grand soulagement de ses hôtes d’un soir, souvent dépassés par l’affection inutiles de précédentes donzelles, Andrea s’entendait toujours proposer la même chose. Simple phrase qui la rappelait à la réalité de l’inconnu, celui se trouvant alors en face d’elle, la cafetière à la main, ne sachant strictement rien d’elle. Ce simple détail l’agaçait, la rendait folle de remontrances à son égard d’avoir encore plongé dans un univers de charité et de simple plaisir pour l’autre. Alors, souvent, sa réponse restait évasive et elle repartait sans rien avoir bu. Hors de question qu’elle se délecte de quelque chose cher à son cœur dans un environnement pesant et embêté, en compagnie d’un homme qui n’attendait qu’une chose : qu’elle lui dise qu’il n’y aurait pas de lendemain. Et la jeune fille le lui promettait. Il était beau, le prince sur son cheval blanc, si attentionné dans un seul but. Ce qui n’était apparemment pas le cas de Law.

Presque inquiétant, d’ailleurs. Lui, respectueux et prévenant ? Cela ne semblait plus si impossible, pourtant Andrea en venait à douter légèrement sur la nature de ses envies à lui. Il aurait pu avoir l’occasion. Il le pouvait encore, et pourtant ce ne fut absolument pas le cas ici. L’homme d’une trentaine d’années se contentait de s’inquiéter pour elle et son appétit, qui d’ailleurs commençait à se réveiller au fur et à mesure que sa conscience émergeait. Toujours un peu lente le matin, bien que cette fois-ci ce fut d’avoir si bien dormi, Andrea ne remarqua pas immédiatement le statut de l’homme qui entrait dans la pièce. Ce ne fut le cas que lorsqu’il s’agenouilla, présentant aux deux personnes encore installées sur le lit un plateau lourdement chargée. Il y avait de tout, et plus encore. Andy laissait ses yeux découvrir des formes qu’elle reconnaissait sans mal, et d’autres qui lui étaient parfaitement inconnues. De tout, pour tous les goûts, même ce qu’il y aurait pu être saugrenu pour un petit déjeuner, à savoir de la viande. C’est là qu’elle remarqua le collier, mais alors qu’Andy s’apprêtait à grimacer de surprise, Law la quitta et récompensa son serviteur, qui du reste ne semblait pas peureux ou surpris, ni même angoissé d’être là. Normal, donc. Voilà qui rentrait bien dans les notions qu’Andrea se faisait des valeurs. Servir, sans toutefois faire souffrir pour le simple plaisir. Après tout, un royaume qui tient debout commence avant tout par la satisfaction des plus basses classes, tandis que le pouvoir absolu et tyrannique ne fait que rendre l’ensemble plus instable.

- Tout ça ...

Andrea ouvrait des yeux ronds sur le gigantesque paysage gustatif qui s’offrait à ses yeux, et duquel elle ne savait pas bien quoi extraire. Lorsque Law commença à manger tout en prenant la parole, toutefois, Andy suivit son exemple. Elle se saisit du pain et d’une confiture violette qui avait l’air d’êtres aux fruits rouges, valeur sûre. Croquant avec appétit, la jeune femme écoutait Law tout en tentant de ne pas afficher sa surprise avec trop de véhémence. Effectivement, il n’y avait pas grand secret là-dedans. Une vie saine lui permettait de rester ainsi, de narguer le sommeil et de l’éviter sans peine tout en y cédant le lendemain. Logique. Pourtant, Andrea s’imaginait mal suivre un tel rythme avec autant d’efficacité sans s’effondrer. Et d’ailleurs, il était évident qu’elle ne le ferait pas. Ceci-dit, le repas lui plaisait largement. Après un regard curieux vers les fruits qu’elle ne connaissait pas, Andy en saisit un aux couleurs criardes et à la peau lisse et ferme pour croquer dedans, découvrant alors un doux mélange de sucré et d’acide, qui laissa sur ses lèvres un léger picotement pas vraiment désagréable. Intéressante, comme découverte. Grignotant bout par bout le reste du fruit, elle reporta son attention sur une des deux tasses que son interlocuteur désigna comme étant pour elle, remplie de simples mots qui la firent frémir. Du chocolat. Sans lui demander. Il avait tout bon, bien évidemment, et la jeune femme y plongea avec plaisir ses lèvres, savourant le goût extrêmement riche qu’elle découvrait dans un simple récipient.

Là encore, elle le laissa parler de lui. De ce qu’il lui montrerait, de ce que lui avait découvert, dans la religion, notamment. Et, bien qu’Andy n’ait encore en tête que la référence de son dieu à elle, vaguement celle des anciennes divinités japonaises qu’elle connaissait mal, elle avait du mal à imaginer un tel concept dans la vie de Law. Oui, ici ce n’était pas la même chose. Bien sûr qu’il pouvait se dérober à ses aprioris à elle qui n’étaient pas les bienvenus, briser une image pour en reconstruire une autre. Mais cela restait inattendu et presque surprenant, d’imaginer cet homme qui se détachait de tout relié à une croyance qui prendrait une place tout de même importante ... Puis il se tut, enfin. Andy s’amusait de le voir ainsi tout déballer d’une traite, ne lui laissant pas même le temps de répondre avant qu’il n’estime avoir terminé. Et il la fixait seulement maintenant, tandis qu’elle buvait une gorgée de plus, assise au bord du lit, les pieds croisés l’un devant l’autre, son visage respirant la satisfaction. Alors seulement elle prit la parole, gardant sa tasse entre ses mains, se réchauffant ainsi le corps tout entier.

- En ce qui concerne le sommeil, je suis d’avantage habituée aux insomnies forcées, ça doit être pour ça que je me montre si surprise devant quelqu’un qui a besoin de si peu. Se tourner des heures dans un lit sans pouvoir arrêter de penser, ne serait-ce qu’un instant, c’est épuisant. Je dors très peu, mais je consacre beaucoup de temps à essayer de croire que je peux le faire. Ceci-dit, cette nuit je me suis effondrée comme une masse. Peut-être la très étonnante sensation de sécurité qu’il y a à être ici, finalement.

Et c’était vrai, aussi étonnant que cela puisse paraitre. Se sentir protégée par des murs ou des hommes n’était rien, puisqu’Andy ne craignait pas grand-chose chez elle, sur Terre. Mais il lui fallait fuir ses peurs, ses angoisses, qui ne se réveillaient que dans ses cauchemars. Elle crut bon également d’ajouter quelques mots sur sa conception à elle de la religion.

- Sinon ... Je ne crois en pas grand-chose, à peine en l’être humain et depuis peu seulement. Comme tu as sans doute pu le remarquer je suis peu optimiste, et imaginer que l’on peut compter sur quelque chose en quoi il faudrait placer sa confiance, ça ne m’a jamais convaincu. Que ce soit pour les dieux ou pour les hommes.

Mais cela pouvait changer, et était d’ailleurs en passe de se faire. La jeune femme ne releva pas l’idée d’aller à Nexus, mais elle avait hoché la tête lorsqu’il l’avait évoqué, donnant d’ores et déjà son consentement. Puis, ce fut la gourmandise qui la rattrapa et elle but une nouvelle gorgée avant de s’aventurer en précisions.

- Et ... Je trouve tout cela délicieux. Parfaitement choisi, pour la boisson. Pour ce qui est de mes autres habitudes ou quelque détail que tu trouverais important, je te laisserai me demander.

Après tout, c’était un peu nouveau de se sentir intéressante et Andrea n’avait pas spécialement envie de parler à tort et à travers, préférant de loin répondre aux interrogations qu’on lui adressait. Et c’est seulement après, laissant le silence s’installer quelques instants, qu’elle se leva, reposa à terre sa tasse et fit allusion à la suite des évènements. En effet, une bonne douche n’allait pas être de refus. Loin de là. Seulement ...

- Vas-y d’abord.

D’ordinaire, ça ne la dérangeait pas. Mais ici, maintenant, Andy s’était sentie obligée de préciser cela. Parce que la désinvolture de Law semblait cacher son inquiétude de tout à l’heure, parce qu’elle ne voulait pas banaliser tout et n’importe quoi comme elle le faisait d’ordinaire. Donner un sens aux choses devenait important, depuis quelques heures. Aussi le regarda-t-elle acquiescer et se diriger vers la porte. Elle le suivit des yeux, et avant de refermer la porte sur lui, elle le vit tourner un peu plus loin dans le couloir, à peine à quelques mètres de là. Puis, claquant doucement le battant, la jeune fille se laissa glisser le long du bois dur et s’assit par terre, un peu soufflée de son attitude. Que lui prenait-il, à hésiter, à se comporter comme une gamine ? Ce n’était pas vraiment son genre, d’autant plus qu’Andy était venue ici guidée par l’envie d’essayer, de vivre les choses pour en ressentir les conséquences. Et ici, un challenge intéressant se présentait qu’elle déclinait aussitôt, par simple peur ? Hors de questions qu’une simple petite appréhension lui impose des remords et une image d’elle-même que la jeune femme n’aimait pas. Aussi se releva-t-elle promptement, saisissant avec détermination la poignée. Il était temps d’essayer quelque chose de nouveau. De totalement inédit.

Avançant dans le couloir, Andrea ouvrit sans bruit la porte de la salle de bain, la refermant derrière elle avec autant de discrétion, du moins l’espérait-elle. Law y était déjà depuis de longues minutes, aussi le bruit de l’eau couvrit-il son entrée maladroite. Andy inspira avec force et, prestement avant de changer d’avis, se débarrassa de son pantalon et de sa chemise, se trouvant ainsi largement dévêtue mais encore protégée de deux bandes de tissu noir, assez simples au demeurant. Seuls quelques passages plus fins étaient accompagnés d’un liseré nacré, le reste étant simple, fonctionnel, efficace. Andrea ferma les yeux comme pour faire fuir les pensées qui virevoltaient sous son crâne et, les rouvrant, se dirigea d’un pas décidé sous le jet d’eau qui l’attendait. Il allait peut être se trouver surpris de son inconstance, mais c’était important pour la jeune femme que de sentir ainsi son cœur pulser sous l’ampleur que prenait une simple petite chose, pourtant assez bénigne, ici et maintenant. Et même si ça n’était rien pour lui, Andrea faisait un grand pas en avant en cet instant. Et même si elle semblait ridicule ainsi à moitié habillée, ce n’était pas si grave. Peu importait qu’il la suive. En rentrant sous la douche, Andy ne put toutefois masquer totalement sa gêne, en parlant dans un moment qui n’était sans doute pas propice à cela.

- Finalement ...
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le jeudi 23 décembre 2010, 19:28:26
Bien.

Café englouti, pomme terminée. Après un nouveau morceau de viande emporté par ses doigts jusque ses dents voraces, puis un autre fruit dont Andrea ne connaît ni la provenance ni la qualité, à l'image de ce qu'elle venait de faire découvrir à ses papilles, il lève ses fesses et, hop ! disparaît à une vitesse impressionnante par là même où il était apparu.


Malgré tout ce qu'il peut affirmer, la vie de Law est difficile. Moralement. Entendre chaque jour les nouvelles et instructions dispensées par son fidèle second, devoir recevoir ses clients souvent trop exigeants, et ses fournisseurs trop intraitables, ordonner, discipliner, sanctionner, bénir.. Il y a largement de quoi défaillir une dizaine de fois chaque jour, surtout au rythme intenable qu'il s'impose. C'est d'ailleurs pour cela qu'il soumet son corps au supplice, et son esprit à la géhenne : il faut absolument que jamais ils ne les déçoivent, restent sans faille, invincible jusqu'à la dernière seconde pour mener son armée, car le général se tient debout sur la proue de son navire, il survit, et coule avec son esquif, fut-elle réduite en lambeaux et que toute l'armée déserte. "Le pays attend que chaque homme fasse son devoir" : l'apophtegme est d'autant plus valable qu'il fut prononcé par un puissant leader d'armée, et qu'en ce sens, de tout les serviteurs à devoir honorer par leur courage et leur dévotion la cause qu'ils défendent, c'est avant tout le meneur de tout les fantassins.
Mais en quittant ses quelques minutes de loisir ou de repos, c'est tout le poids de son Empire qui vient s'abattre sur sa personne, faisant ployer ses genoux jusqu'à ce qu'ils traînent par terre, et peser, encore, encore, et quand enfin sa face vient s'écraser au sol, et que son visage se recouvre d'un voile de la poussière de marbre noir, résultat de la combustion des dizaines de corps -ou des centaines ?- dont Law avait, directement ou indirectement, la responsabilité de la mort, et dont les cadavres avaient été immolés sur l'autel de sa cruauté, une grimace atroçe déchire ses traits habituellement harmonieux, résultat de la douleur de cette pression éléphantesque, creusant de profonds sillons dans le masque de la réalité qu'il affichait. Alors ce même empire prenait ses aises, il s'étendait, se délectait du confort qu'offrait son propre géniteur, si peu malléable et pourtant tellement changeant, si peu pratique à manipuler et pourtant tellement polyvalent. Et quand il parvient à lever la tête, pour se retourner vers un miroir subtilisé quand le Colosse dont il est le père et l'équilibre avait le dos tourné, il ne voyait qu'un vide affreux. Rien. Sa face n'était que l'entièreté d'un néant que sa fonction matérialise, pour le dépersonnifier. Law était avant tout Tyler Raine, celui qui dirige. Mais qu'en était-il du Law qui a un jour rêvé d'aimer ? Rêvé de s'amuser ? Evidemment, le Polyglotte s'amuse tellement quand il distribue des punitions, quand il administre, mais ce ne sont pas des loisirs d'homme commun. Peut-être aimeraient-ils, oui, faire ce que Law fait. Et si Law trouve une distraction dans tout cela, c'est parce qu'il s'est, au fil du temps et des apprentissages, habitué à ce genre de choses. Il a acquit l'amour du commandement, et en est devenu un véritable artiste.

D'accord, vu comme ça, on dirait qu'il tire sur l'ambulance. Il est le cerveau d'un vaste complexe, capable d'engloutir des milliers de gens, résultat de pléthores d'affaires, de manipulations, d'évènements, calculés ou hasardeux, et cette gigantesque forêt éparse s'est muée en un seul arbre, et Law, qui en est le tronc, doit s'assurer constamment que les branches savent se tenir, qu'elles donnent de beaux fruits, et que les racines nourrissent correctement l'ensemble, sans jamais déborder violemment sur la plaine alentour. Tout se fait en douceur. Et il trouve le moyen de se plaindre..

Les japonais pensent, à raison, que l'eau est l'un des éléments le plus puissants de la création, si ce n'est le plus puissant. Et dans toutes les cultures d'ailleurs, il revêt une symbolique de monstre, dévorant, balayant, mais aussi de Dieu salvateur, qui apporte ses bienfaits et purifie les corps et les âmes. Law est merveilleusement admiratif de ce genre de pensée. D'ailleurs, c'est quand enfin, il s'est mis complètement nu, que ses pieds se posent sur les galets figés, et que l'eau chaude coule sur son visage et sa peau qu'il se sent débarassé des impuretés et salissures qu'il a accumulé dans ses journées et nuits de parvenu. Il s'accorde même la fantaisie de manger un fruit sous l'eau.

Un bruit, lui a-t-il semblé. Il sort de sous le jet dans son ample cabine, penche sa tête sur le côté.. et la voit apparaître là, juste devant lui, et s'avancer. Encore habillée. D'ailleurs, ça le surprend, et il la regardera, dans ses sous-vêtements, en souriant vaguement. Il  la place à l'endroit précis où il se tenait quelques secondes plus tôt. Et pour une fois, ce sera lui l'esclave. Sans qu'elle ait le moindre mot à dire, il s'était saisi d'un cube blanc, qu'on devine être un savon, avec lequel il la frottera lentement, partout, posant un genou à terre comme un chevalier devant son seigneur pour s'appliquer sur ses jambes, avec délicatesse.


Tu ne dois pas te forcer. Si tu n'en avais pas l'envie, je ne t'en aurais pas voulu.

Même si la relation classique avec Law était plutôt composé dans cet ordre précis : Baise, Douche, Baston, Abandon. Là, ce fut totalement le contraire. Il l'a sortie de sa perdition. Puis ils se sont mutuellement agressés. Enfin, la douche. Bon, quant à la 4ème étape, laissons-la tomber pour l'instant. De toute façon, il n'en a toujours pas envie. Quoique.. Hm, la situation ne l'aide pas.

Parfois j'ai un esclave qui fait ça. Mais comme ce sont plus souvent des garçons qui sont dévolus à cette tâche, et que tu es une fille, je ne voulais pas être inconvenant vis-à-vis de toi. Tu as déjà une idée de comment tu vas dépenser l'argent gagné au casino hier ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le vendredi 24 décembre 2010, 13:22:07
En deux ans, on a le temps et l’occasion d’apprendre une foultitude de choses. Comment se comporter avec les gens, comment modeler ses expressions, que dire en quelle situation ... Se programmer des réactions automatiques, adaptables et ajustables aux détails particuliers de chaque instant. Quelques mois après l’anniversaire de ses dix-sept ans, Andrea avait passé quelques mois dans le flou le plus total. On s’était inquiété, bien sûr. Parce qu’il y a des comportements qu’on juge anormaux, parce qu’une jeune fille fraiche et ouverte qui tout d’un coup fuit toute personne susceptible de lui adresser la parole, ça interroge. On a mis ce retrait et l’agressivité constante née dans son regard sur le compte de la crise d’adolescence. Il est évident que quand une jeune personne ne se comporte pas comme on en a l’habitude, c’est la faute à son âge. Une rébellion, un mal être, des propos durs et injustes ? L’adolescence. Facile. Combien ont pu entendre cette excuse, murmurée par les adultes avec un froncement de sourcils désapprobateur ? Certes, la plupart du temps on peut effectivement rejeter la faute sur les hormones et le phénomène de groupe qui pousse les gens à rejeter les autres, ceux qui ne font pas partie de leur cercle. Seulement, seulement, il n’y a pas que le contexte qui fait parfois dire des choses brûlantes de vérité ou de révolte. Parfois, il y a aussi une graine d’intelligence qui s’est développée sagement, attendant son heure. Sans être pour autant écoutée. Mais par principe, ce qui sort de leur bouche n’est qu’idées reçues, postulats repris ici et ailleurs, belles phrases empruntées à d’autres. Par habitude, ils répètent sans intégrer, sans vivre leurs dires. Alors comment considérer ces ados qui clament leurs envies, leurs pensées sans que personne ne les prenne réellement au sérieux ? Ce sont les oubliés de la société, qu’elle soit restreinte à leur famille ou étendue à une nation. C’est seulement à leur majorité que l’on commencerait à les identifier comme des êtres doués de raison ... Parce qu’ils obtiennent du pouvoir. Simplicité dans la démarche.

Et donc oui, Andy avait subi sa crise avec un peu de retard. Vous savez, cette attitude prostrée, cette envie constante de dormir et de s’isoler dans sa chambre. Ce désir d’être seule, de ne plus bouger, cette incapacité à entreprendre des actions, des mouvements. Apragmatisme. Cette fuite de la réalité, de la conversation. L’esquive de toute nécessité de communiquer, de s’exprimer et d’ouvrir la bouche pour induire un avis, l’enfermement d’une voix qui n’aurait rien d’autre à dire que sa peine. Alogie. Et puis cette perte évidente d’énergie, ce découragement devant tout, cette paresse caractérisée par l’incapacité physique d’entreprendre quoi que ce fut. Apathie. Autant de symptômes inquiétants mais révélateurs d’un passage à vide dans l’existence. Tant qu’ils se résorbent, c’est que tout va bien ? Pas forcément. Parce que continuer à détruire quelqu’un déjà à terre peut soit l’achever soit le rendre résistant aux coups. Andrea, c’est la deuxième configuration. Après des semaines de repli et d’oubli, ses efforts piétinés par un bourreau sans aucun regret ni pitié, la jeune femme avait baissé les bras. Elle se souvient encore de l’instant où elle a abandonné, faisant le plaisir de tout le monde, la croyant alors en meilleur état. Evidemment, son esprit ne souffrait plus puisqu’il s’était désolidarisé de son enveloppe corporelle. Deux en un, chacun vivant de son côté. Ses pensées et ses émotions furent barricadées en quelques secondes dans un coin de sa tête, et elle retrouva instantanément l’ombre d’un sourire qu’elle avait autrefois ressenti. C’était un soir, au moment du repas. On lui avait demandé si tout se passait bien à l’école, on envisageait de lui proposer un quelconque soutien. Elle avait tout d’un coup changé d’attitude, déculpabilisant ses parents, rendant Seiji intéressé et prêt à la briser une fois encore.

Sauf qu’il n’y parvint plus, et dut se contenter de s’amuser avec une poupée docile qui ne bronchait ni ne disait mot. Avec lui, elle restait de marbre, toujours. Fixant le plafond d’un œil assuré, un sourire triomphant aux lèvres. Il n’avait plus d’emprise sur elle, et c’était délicieusement jouissif. Certes, pour parvenir au résultat qui avait été elle il y a de cela quelques heures, Andy avait mis des semaines. Le temps de comprendre quand il fallait sourire, faire la moue, éclater de joie. Pleurer. Ce dernier point avait été épineux, puisqu’elle ne l’avait même pas fait lorsqu’on l’avait réduite à un simple objet ou passe-temps. Elle avait dû se forcer tout particulièrement là-dessus, et ce que la jeune fille maitrisait le mieux était encore les démonstrations de plaisir et de contentement. Andy avait appris à simuler n’importe quel sentiment, efficacement et rapidement. Si bien qu’on l’avait laissée tranquille aussitôt, avec ces histoires de soutien ou de passage adolescent brutal. Personne n’avait vu que, sous son sourire radieux, le vide demeurait. Il n’y avait aucune joie dans ses rires, aucune tristesse dans ses faciès défaitistes, pas un soupçon de compassion dans ses paroles réconfortantes, aucun plaisir dans ses simulations. Andrea s’était employée à vivre pour les autres plutôt que pour elle, leur offrant ce qu’ils attendaient et ainsi les dissuadant d’aller chercher plus loin. Il était si aisé de jouer un rôle, d’endosser la peau de quelqu’un qu’elle n’était plus. Seul peut-être Seiji se doutait qu’il l’avait atteint plus que de raison, de sorte à ce qu’elle perde une partie de la sienne. Mais si cela pouvait la rendre inaccessible, ce n’était pas grave. La jeune femme n’était pas heureuse, soit. Mais au moins, elle ne souffrait plus. Valait-il mieux ressentir un poids brûlant et étouffant tout au long de ses journées ou s’éloigner de tout et anesthésier ses sens ?

Face à la douleur, il y a ceux qui supportent tant bien que mal jusqu’à n’en plus pouvoir et ceux qui mordent dedans, déchirent la peau et les tissus pour souffrir une bonne fois pour toute et enfin annihiler cette souffrance  irradiant dans toutes les directions, cet insupportable élancement sourd qui pulsait dans les veines. Il n’y a pas de solution miracle, pas de remède simple et efficace, pas de conseil qui résoudrait tout. Il y a simplement l’adaptation. Les capacités d’une personne à affronter la vérité de la douleur, ou bien la lâcheté qu’elle a en l’évitant et la repoussant de toutes ses forces. Cependant, qui peut juger si ce n’est la victime ? Andrea se savait dans la voie de la facilité, celle qui ne lui faisait rien perdre ... mais rien gagner non plus. Pas même le mérite d’avoir affronté, de s’être débattue. Simplement la constatation de son abandon, de sa résignation. Cela lui apportait une force bien étrange, celle de ne jamais plus se faire atteindre, celle de savoir tout contrer d’un seul geste, d’une parole. Et maintenant Andrea était vulnérable. Quand on vous rend le cœur que vous aviez consciencieusement caché, on ne sait plus bien comment le protéger ni comment le garder des agressions extérieures. Tout d’un coup, projetée en pleine lumière, la jeune fille devait faire avec. Faire avec ce qui lui passait par la tête, agir sur une impulsion, ne pas exactement savoir où tout cela allait la mener. Composer face à son cœur qui se réveillait et lui soufflait que tout ce qu’elle avait établi comme défenses pendant deux ans, ce n’était rien. Rien de bien.

Et maintenant, elle hésitait un peu. Cette situation ne lui était pas familière, dans la mesure où Law n’était pas n’importe qui. Déjà, comprendre en quoi et pour quelle raison elle était restée habillée était un défi de taille. Eut-ce été quelqu’un d’autre qu’elle aurait réagi différemment ? Certainement. Son corps n’était pas un tabou, il avait été maintes et maintes fois touché, aimé, étreint. Et pourtant, devant lui, elle le retenait. Andrea ne voulait pas s’exposer entièrement, sentiment d’hésitation qui la poussait en avant tout en lui intimant de ne pas dévoiler l’entièreté de son être. Le corps devenait quelque chose, prenait une signification depuis qu’il avait renoué un lien fragile avec l’esprit qui le dirigeait. Et il n’était pas évident alors de l’offrir aux yeux de quelqu’un, comme si c’était la première fois qu’un regard l’effleurait. Tendue, Andrea ne savait plus bien où se mettre, si bien qu’elle se laissa volontiers guider par Law, qui réagit avec une extrême prévenance à cette intrusion on ne peut plus étrange de sa part. Ainsi, elle se vit installée sous l’eau qui commençait déjà à ruisseler sur ses épaules, et traitée avec beaucoup d’égards. Tant qu’elle mit quelques instants pour s’en rendre compte. Law était là, devant elle, installé comme un soupirant devant sa dame, et avec douceur et tendresse, il entreprit de faire ce qu’elle-même aurait pu faire, bien que cela eut été moins agréable.

La dernière fois qu’on avait pris soin d’elle comme ça, sans arrière-pensée évidente, sans idée dérivée, sans compensation ... Non, elle ne s’en souvenait plus. Andrea abandonna donc volontiers ses jambes à cet exercice, qui lui faisait peu à peu prendre conscience d’elle-même et de cette enveloppe qu’elle découvrait comme une enfant. La chaleur de l’eau, le contact des mains de Law, la sensation de plénitude lui montaient à la tête et Andy sentait ses joues se colorer de rouge devant l’inhabituelle situation, tentant de ne pas se montrer trop déstabilisée en lui répondant le plus naturellement du monde.

- Je crois que je ne sais plus ce qu’est se forcer, depuis hier soir. C’était une habitude, c’en est devenu un concept lointain. D’ailleurs, si j’avais dû le faire, je pense que je serais directement arrivée dans une autre tenue.

Et elle le regardait faire, tandis que ses dents mordillaient l’intérieur d’une joue, d’impatience et d’hésitation. Après qu’il eut repris la parole, Andy se décida enfin et vint poser un très léger baiser sur le crâne de ce qui semblait être, pour ce court moment, son serviteur attitré. Son contact était une addiction, et cette simple démonstration lui suffisait à se rassurer, à se conforter dans son idée et surtout, à lui exprimer par un simple geste tout ce qui ne franchissait pas la barrière consciente de ses lèvres.

- Acheter le strict minimum en matière de vêtements plus ... adaptés. Et le reste, si reste il y a ... Le garder en cas de besoin, je pense. Ou le miser de nouveau, si j’y prends goût, qui sait.

La dernière phrase fut lâchée avec une légèreté toute particulière, comme si cela lui était venu à l’instant. A vrai dire, elle n’y avait pas pensé une seule seconde. Loin de songer au profit ou même aux gains qu’elle avait pu faire, Andy avait eu bien d’autres choses en tête. Mais il fallait redescendre sur terre, et se contenter de la réalité plus que du rêve. Moins onirique, mais plus tangible et surtout durable. D’autant plus que les deux se rejoignaient en la personne de Law. Avant tout, maintenant, elle avait envie de découvrir son monde. De profiter des couleurs qu’elle n’avait pas vu de nuit, des rues de Nexus et de l’agitation qui régnait dans toutes les villes de la terre, que ce soit dans son monde ou dans un autre. Mais surtout, elle avait envie de parler d’elle s’il le lui demandait, Andrea voulait apprendre à se confier, à laisser sortir des choses qui la caractérisait, qui faisaient d’elle ce qu’elle était, en définitive. Au-delà des différents masques qui se superposaient devant son image, au-devant des idées préconçues qui pouvaient courir à son contact. D’ailleurs, cette simple pensée lui inspira une remarque qu’elle voulait totalement spontanée, et appréciative. Un compliment bien déguisé, en quelque sorte.

- Je crois que tu es le premier à ne me faire que cela dans un endroit pareil. Tu arrives à rejeter tous les aprioris qu’on peut se faire à ton sujet avec une simplicité débordante ...
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le lundi 27 décembre 2010, 12:54:46
Law n'a jamais été intéressé par l'art. Il trouve de la beauté dans l'architecture, la grande architecture. Il trouve plaisant les grands tableaux, les toiles qui représentent avec beaucoup de fidélité une réalité parfois banale, mais qui, sous forme de peinture ou de sculpture, représente soudain quelque chose de fort exceptionnel. Mais jamais il n'a étudié, ou n'étudiera, l'art sous sa forme scientifique. Car Law est un terre-à-terre, cruellement attaché au concret. L'économie n'a rien d'abstrait ! Ce n'est après tout qu'une succession de données effectives, de calculs précis. Évidemment, il y a des fluctuations, des variations imprévues qui minent parfois les équations prédéfinis, à base de gains, de pertes. Mais cela n'a rien d'un hasard : Tout est prévisible dans la finance, pourvu qu'on puisse réunir toutes les informations dont les spécialistes de cette obscur savoir, régulateur du bon vivre de leurs décideurs, ont besoin pour appliquer leurs méthodes.

Tout ce qui est "sûr" découle de fondements solides, compréhensibles à tout un chacun, accessible après quelques études plus ou moins profondes.

Bon, exception faite du commandement, qui, même après le potassement des centaines d'ouvrages, se révèle être dans les tripes. On est bon ou on ne l'est pas. Le talent peut venir, mais cela n'a rien de mathématiques. C'est savoir anticiper, s'adapter, étudier ce qui doit l'être ou oublier ce qui le mérite.

Mais l'art, le vrai. Celui des artistes, donc. Ceux qui déploient un trésor d'imagination pour pondre des représentations magistrales de scènes, de personnages. Le don d'artiste se travaille évidemment, mais il est aussi et surtout inné. Et c'est là que notre très cher polyglotte échoue lamentablement. Il n'a pas la notion des lignes, des tracés, des proportions. Il peut affirmer qu'il trouve "beau" quelque chose, mais il ne saura dire pourquoi. Voilà, c'est joli, c'est bien fait, c'est tout. Ce qui distingue une croûte d'un David ? "Bah... Euh.. La croûte c'est pas beau !" Rien d'autre.

Mais il vient de se découvrir une passion pour l'art. Soudainement. L'anatomie plus précisément. Oui, sa manière de caresser les muscles d'Andrea, de vouloir saisir chaque détail de chaque cellule de son derme, d'imprimer sur l'extrémité de ses doigts l'empreinte du corps de la jeune fille, ça a quelque chose d'académique. Ca y est, il lui voue un culte, comme une statue d'une déesse latine qu'il vénèrerait depuis sa plus tendre enfance, et dont il rêve de pouvoir en effleurer sa représentation. Voeu exaucé.


Tout en l'écoutant parler, il parcoure chaque parcelle de son être, jusqu'à tomber nez-à-nez (si je puis dire) avec la culotte qu'elle porte encore. Maudite. Pas parce qu'elle cache quelque chose que Law serait en droit de trouver "intéressant", mais parce qu'elle l'empêche de continuer l'étude minutieuse à laquelle il se livrait. Fut-ce un gant ou un corset qu'il eut intérieurement pesté tout autant ! Alors il se retrouve cruellement confronté à la réalité : Il doit, pour l'instant, se résigner à oublier momentanément une partie de son corps. Perdu dans ses contemplations, il doit avoir oublié qu'il lui reste un autre bout de tissu, plus haut. De quoi le frustrer pour les milles années à venir. Fronçant les sourcils devant cette obstacle, il tente de se faire à l'idée qu'il y a, quelque part, un Dieu qui lui refuse apparemment un bonheur total. Une petite tâche sur le tableau, et Law déteste ça.
Les jambes propres comme elles ne l'ont jamais été, le jeune homme ralentit ses mouvements et, considérablement inconscient, paumé dans l'admiration d'une merveille, il plante ses dents dans le haut du tissu, au niveau de l'élastique, et le tire en arrière de quelques centimètres. Comme subissant le fouet du tortionnaire qu'est l'aterrissage brutal à la réalité, il relève alors les yeux vers elle, maintenant qu'elle venait juste de finir de parler. Il se sent bête, et il y a de quoi. Il relâche la pression de ses dents, fermant épisodiquement les yeux pour les protéger des gouttes qui y tombent, puis se redresse, l'air habituel, sûr de lui, neutre, détaché.
Il n'a qu'une demie-seconde pour prononcer une parole. Ne pas la laisser réfléchir ou se faire de fausses idées : Il faut qu'il éclate l'oeuf avant même que l'on puisse affirmer qu'un poussin allait y naître.

Parce que tu pensais que j'allais te faire quelque chose ? Enfin, si tu en as envie, je veux bien.. Je ne veux pas dire que je n'en ai pas envie, mais que je n'y vois pas forcément une obligation.

Encore une fois pas de mensonge. Il fait preuve de self-control, il ne laisse pas se déchaîner ses bas instincts. Et il n'a même pas à se forcer : Aussi étrange que ça puisse paraître, même à lui-même, c'est un état dont il se pare tout naturellement. Sans devoir recourir à la moindre exigence de sa part.
Il la contourne, passe derrière elle. Le savon passe désormais sur ses bras, son dos. Il la masse avec ses mains, reprenant lentement le chemin du lyrisme visuel, de la bête adoration d'un corps qu'il eut voulu connaître plus tôt. Quant à son âme.. Elle, il aurait préféré qu'elle l'accompagne il y a bien longtemps. Pour avoir été autre. Plus heureux, peut-être. Moins Tyler, c'est sûr.

Un bruit se fait entendre. L'esclave de tout à l'heure qui, sans un mot ni même un regard, dépose deux serviettes fumantes, presque bouillantes, sur le rebord d'un lavabo en métal, et repars le plus discrètement possible.


Surtout, ne te forces plus jamais à rien. Et si tu trouves l'envie de faire quelque chose, de vouloir quelque chose, de dire quelque chose, alors n'hésite pas un seul instant. D'accord ? Tu es une décideuse maintenant. Tu n'as plus à te soumettre.


Sur ces mots, ses mains entourent le ventre d'Andrea, non pour la câliner mais pour atteindre et frotter délicatement son ventre et ses flancs, sa tête se penchant pour embrasser ses épaules couvertes de ses cheveux trempés.

Tu peux parler et agir librement ici. Surtout parler. Pour agir, il faudra que tu apprennes à maîtriser les choses.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le lundi 27 décembre 2010, 16:06:38
Dire Adieu à un monde. Entrer dans un nouvel univers qui n’accepte ni souvenirs, ni infidélités. Un espace auquel il faut se dévouer seulement au présent, mettre de côté le reste et accepter de tomber soit de l’un, soit de l’autre. Fléchir, choisir, ou laisser le temps décider pour soi. Andrea avait décidé de plonger dans les eaux troubles de Nexus, pour échapper à la clarté mensongère de sa petite vie bien rangée et orchestrée. Elle disait Adieu à un quotidien, des habitudes, des certitudes et des valeurs. Ici, il faudrait s’en créer de nouvelles. Dépasser les limites physiques, les différences matérielles et se servir d’une expérience -bien maigre- durement acquise pour apprendre un monde, une vie inconnus. L’adieu n’est que vérité devant Dieu, de ces incontournables faits qu’on ne peut réfuter une fois le mot franchi. Lorsqu’il faut s’en défaire, le chemin passé ne disparait pourtant pas en quelques instants, reste là, ancré dans une mémoire faite de sons et de couleurs qu’il n’est pas si facile de faire déguerpir. La magie de l’esprit humain, se souvenir. Mais dire Adieu, c’est donner un point final à cette route tracée, à ce qui est fait et que l’on préfère maintenant effacer. D’un son, tout réduire en poussière. D’une parole, remettre les compteurs à zéro. Mais il y a toujours quelqu’un pour se souvenir, pour faire ressurgir des méandres sombres de l’Oubli des scènes difficiles, de celles que l’on croyait définitivement anéanties. Si ce que l’on efface ressort toujours quand on s’y attend le moins, tout le reste est lettre à écrire. C’est cela vers quoi il faut avancer, ce qu’il faut prendre en compte et épouser pour arriver à se hisser hors d’une fange faite de mauvais souvenirs. Les remplacer par de meilleurs.

L’adieu est une infinie diligence, où les chevaux ont dû souffrir. Un voyage compliqué, lent et tortueux. Qui commence en général par la prise de conscience de ce que l’on va perdre. Puis l’expérimentation de la démarche, des mots à trouver, des décisions à prendre. Le pour, le contre, évaluer les risques et les dommages collatéraux non prévisibles. Comme un cœur qui se brise, comme ceux qu’on ne pourra plus revoir en ne tournant le dos qu’à un seul. Comme un environnement qui disparait. Se retrouver alors tout à coup au point d’arrivée, au bout de la route. Renaitre, trouver de nouveaux repères, des marques neuves dans un pays inconnu. Comme Andrea, faire l’expérience d’un autre monde qui rappelle tant le sien qu’on n’en est que plus déstabilisé. Et ceux qui portent ce voyage s’épuisent, ceux qui le vivent n’y arrivent entiers que rarement. Entreprendre une telle démarche peut en toucher plus d’un, et toujours une partie de soi y laisse quelque chose en échange. Les reflets de l’absence de quelqu’un peuvent parfois marquer l’ombre du plaisir d’un autre, tandis qu’il faut fermer les yeux sur le reste, et se contenter de ce que l’on gagne. Même en admettant que le change soit largement avantageux, demeurent le pincement au cœur et la gorge qui se serre, de piétiner plus que la source du mal et la raison de l’abandon.

L’adieu, c’est deux corps qui se séparent sur la rivière du temps qui passe. Seul le temps peut en imposer ainsi les règles, lui seul permet de réaliser vraiment que l’un a quitté l’autre. Car si Andrea savait avoir prononcé ce mot fatidique, irréversible envers un passé qu’elle connaissait alors mauvais, elle seule en prenait conscience. Il n’était pas rare de ne pas la voir revenir plusieurs jours de suite chez elle, aussi Seiji et son père ne s’inquiéteraient-il pas, le premier attendant sans aucun doute patiemment le retour de sa poupée de chair. Combien de temps faudrait-il à ces deux hommes pour admettre qu’elle ne revenait pas, qu’elle disparaissait de leur quotidien ? Mais surtout, la jeune femme pouvait-elle accepter ce mot, alors que personne ne savait pour qui elle partait, et qu’elle-même ignorait qui ils embrassaient de leurs inquiétudes, de leurs regrets. Peut-être pouvait-elle concilier les deux, accepter d’oublier et de repartir, un pied dans chaque monde. Il suffisait d’un peu d’organisation, un peu de volonté pour que tout change, sans devenir complètement autre. Est-ce que Andy avait peur de tout laisser derrière elle ? Oui. Car on ne mesure pas la force de la manipulation et du pouvoir sur la victime, on ne comprend pas toujours l’attachement aux certitudes, aux règles. La possibilité de savoir où aller, de comment s’y rendre était apaisante. Ne pas craindre pour autre chose qu’à l’ordinaire, accepter le meilleur et refuser l’angoisse et les contraintes. Mélanger deux fluides qui n’avaient aucun compatibilité et qui, de fait, ne pouvaient se retrouver unis.

Non. Ce n’était pas possible de vouloir tant de choses, de désirer le changement tout en demeurant dans la sécurité du passé. L’adieu, c’est le sanglot long des horloges et les trompettes de Waterloo. L’échec cuisant, la consécration d’une erreur qui ne peut se résoudre que par l’abandon d’un des deux partis. Que l’autre soit d’accord ou pas, qu’importe. Il y a victoire, injuste, de celui qui n’ose pas mettre fin à quelque chose de douloureux. Le véritable courage et d’accepter de plier l’échine et de clore une insupportable situation, de dire soi-même à tous ceux qui s’interrogent que l’amour et une part d’espoir est tombée à l’eau. Qu’il n’y a plus lieu de croire ou d’attendre une issue favorable. D’admettre qu’Andrea doive se retirer de son confortable quotidien malsain et pathogène. C’est ouvrir les yeux sur un bateau ivre de tristesse, qui a rongé ses passagers principaux. D’admettre qu’ils sont en détresse, et de constater que ne rien faire reviendrait à laisser se noyer deux êtres qui se débattent, avec plus ou moins de force. Car ce n’est pas le dominé le plus faible, puisque le pouvoir facilement acquis a de ses airs de résignation et de faiblesse criante, montrant que le seul espoir et d’écraser pour survivre, en comptant sur l’abdication de l’autre. Défaite, victoire, l’Adieu c’est l’Armistice parfois forcée qui remet les accords en position de départ et abandonne les hostilités, pour repartir chacun d’un côté.

Mais l’adieu transpirait surtout dans la peur d’Andrea, dans sa volonté d’être ici autant que dans celle de retourner là-bas. Son esprit et son cœur se dissociaient encore, créant divers conflits d’intérêt, la plupart de ses envies de repli n’étant dues qu’à l’angoisse de ne pas se faire une place ici, de ne pas connaitre, de mal apprendre. Comme le chaton qui devrait choisir entre le chien enragé derrière lui et l’inconnu effrayant que peut être une bassine d’eau, qui a l’air terrifiante pour lui comme ça, mais qui en fait le sauve d’un plus grand mal. Et qui va l’accueillir les bras ouvert, dans les meilleures conditions possibles. Car Andrea avait vraiment eu de la chance en tombant ici, et si cela n’avait pas été le cas, sans doute se serait-elle trouvée dans une toute autre position. Sans retrouver la maitrise de ses émotions pour autant, elle n’aurait fait que ce qu’elle savait le mieux exécuter. Jouer son rôle, accepter en silence.

Déjà comblée de sa simple présence aux côtés de Law, sans doute la jeune femme aurait-elle pu rougir si elle savait l’admiration qu’il était en train d’avoir pour elle. Loin de se douter des mots que ses yeux lui renvoyaient, Andrea ignorait tout de l’émerveillement que son corps, si sale et tellement repoussant à son avis, suscitait chez lui. De ses mains, de ses pensées, il nettoyait bien plus que la peau mal réveillée, se débarrassant également des caresses qui y avaient été apposées auparavant, des gestes sans amour qui y étaient constamment associés.

Elle ne remarqua pas non plus spécialement la frustration que ses propres vêtements lui procurèrent, simplement une hésitation et un visage qui se fige, qu’elle mit sur le compte de la déception première. Mais c’était stupide de penser cela, puisqu’elle était à présent suffisamment confiante pour le savoir plus avant que cette simple considération. Elle le regarda tout de même s’en prendre à cet obstacle qui apparemment endossait plus de frustration qu’elle ne l’eut pensé. S’obligeant à ne pas penser immédiatement à ce qu’elle ne voulait admettre, Andrea observa avec curiosité le maitre des lieux s’attaquer à un morceau de tissu désobligeant, usant de sa bouche pour abolir ce qui le maintenait en place. Et c’est ainsi qu’il croisa les prunelles de la jeune femme, à la fois teintées de surprise et d’amusement de le voir aussi spontanément pris dans une démarche dont elle ne percevait que le détail visible. S’il eut l’air mal à l’aise l’espace d’un très court instant, cela disparut bien vite et Andy retrouva le Law nonchalant, au regard assuré et non un peu perdu dans un océan qu’elle devinait en être la créatrice, sans bien savoir comment. Et cette étrange tentative s’écourta bien vite, puisqu’il prit la parole afin d’effacer toute tentative de la part de la jeune femme de croire autre chose. S’expliquant, son diligent et dévoué serviteur entreprit de continuer sa tâche, évitant de s’attarder sur ce qui l’avait un instant déstabilisé. Andrea aurait pu l’aider et faire un geste, un seul. Mais ce n’était pas adéquat, après ses paroles. Elle ne voulait pas se perdre dans un mauvais sens, s’effacer dans une direction qui n’avait rien de pertinent. Se tromper de voie n’était pas dans ses directives, et Andy se refusait à ignorer l’attitude de Law, qui n’était en rien dirigée vers ce dont elle avait l’expérience.

Qu’était-il au final, pour elle ? Cette interrogation jaillit alors qu’elle cherchait un terme pour le qualifier. Amant, non. Compagnon, pas forcément. Sauveur non plus, même si dans les faits cette réalité demeurait Andrea refusait de les voir eux deux sur quelque chose d’autre qu’un pied d’égalité. Et elle se rendait compte qu’il ne lui restait aucun mot à mettre sur son visage. Il était Law, elle était Andrea. Ils étaient eux, mais « eux » était irremplaçable par quelque mot que ce fut. Et ne pas pouvoir en poser un était difficile, dérangeant, presque regrettable. Mais le regret d’Andy de ne pouvoir en parler comme elle le souhaitait fut stoppé net par l’arrivée des deux serviettes demandées, qui même de loin donnaient envie de s’y blottir. Il était pourtant hors de question pour la jeune femme de se soustraire à l’action délicieuse des mains de Law tant que celui-ci ne l’abandonnerait pas de lui-même. Ses mots comme ses doigts parcouraient ses épaules, galvanisant sa volonté d’une force qu’elle ne connaissait pas. Celle de commander, de décider, de vouloir. De formuler des dires, des demandes, des ordres. Frissonnant au moins autant sous les délicates attentions de Law aux alentours de sa nuque que sous le poids que ses déclarations faisaient peser sur elle, Andrea n’aurait à présent voulu être ailleurs pour rien au monde. Néanmoins, vint enfin le moment de reprendre la première de ses interventions et d’y répondre avec franchise et aplomb.

- J’en ai trop l’habitude pour me rendre compte que ce n’est pas une fatalité. Et l’envie, je ne sais plus bien ce que c’est. Je veux que tu continues toujours à me toucher comme tu le fais. Je veux constamment sentir ta main sur moi, j’ai besoin que tu me regardes comme tu es en train de le faire. Sentir que je suis là, et pas ailleurs, pas quelqu’un d’autre. Law, Andrea. Juste ici.

A ces mots elle posa sa main sur les siennes, suivant avec lui le mouvement qu’il imposait à ses poignets. Il était si facile de parler sans subir le possible jugement d’un regard qu’elle voulait encore appréciateur, et pas rempli d’une pitié qu’elle n’accepterait pas. Si simple de confier au mur ses pensées, tellement aisé de tenter de s’ouvrir vers lui sans le fixer, et ce bien que ses lèvres contre sa peau avaient quelque peu l’action de la déconcentrer. Des petites décharges couraient sous son épiderme à chaque contact, électrisant la partie de son corps qui se réchauffait à ce simple toucher. Puis, elle reprit.

- C’est ça, l’envie ? Ou c’est simplement sa découverte ? Je n’en ai absolument aucune idée, tu l’auras remarqué. Je n’y ai pas eu accès depuis un peu trop longtemps.

Nouvelle pause, qui dura un peu plus longtemps et dans laquelle Andrea glissa un soupir.

- Et je veux aussi que tu en viennes à trouver cela indispensable. Comme moi je pense pouvoir le découvrir avec toi. Sinon, ça n’a aucun sens, sinon ça n’aura aucun sens. Comme jusqu’à présent.

Elle se trouvait naïve, tout à coup, et sans doute trop sérieuse sur le sujet. Le sacraliser ? Normalement, non. Ce n’était rien. Et pourtant, la simple idée de cette concrétisation avec Law faisait naître chez elle une sorte de sirène d’alarme, qui la suppliait de bien y réfléchir. Comme si son cœur savait avant sa tête que ce n’était finalement pas si « rien » que ça, parfois. En l’alarmant, quelque chose lui demandait soit de ne pas y mettre trop, soit d’être sûre de ne rien perdre. Et si elle y mettait trop, si finalement Andrea ne pouvait pas envisager cela autrement ? Si son corps était plus fort et se souvenait que le plaisir n’était rien qu’un ensemble de manifestations feintes ou provoquées par la simple mécanique des choses ? Si son espoir perdait, la jeune fille allait vivre un mauvais moment. Pire, une déception énorme. Il lui fallait attendre, sans doute s’assurer que le mythe n’était pas infondé, le toucher du doigt sans trop s’y impliquer, et attendre l’agréable surprise. Ne pas se laisser aller à la simple expérience d’une erreur qui briserait tout ce qui s’était construit depuis la veille.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le lundi 27 décembre 2010, 22:18:32
Tu es trop mignonne. L'envie, c'est de vouloir. Si tu veux quelque chose, considères que tu en as envie. Le désir est un peu supérieur. Le désir, c'est la volonté plus poussée. Sonde-toi. Demande-toi à toi-même.

Son ventre savonné, ses bras de même. Il n'y a que ses seins et son bassin qui ont échappés au traitement, sans doute à son grand dam. Mais pour une fois dans sa vie, il ne fera pas cas de cette omission et même, il ressent un profond respect, quelque chose d'admiratif en plus, pour cette fille qui est arrivée, comme une fleur, pas complètement déshabillée, couvrant encore sa pudeur, là où lui était habituée aux nanas se retrouvant totalement nues avant même qu'il n'apprenne leur âge, voire même parfois leur nom. D'ailleurs, pour elle, c'était plus ou moins la même chose : Se mettre à nu, se donner, ça ne valait rien pour elle. Alors le fait que cette fois-là particulièrement elle cachait un peu de son corps donnait à ce geste tout son sens, et donc son caractère exceptionnel se retrouvait hautement estimé. Law avait pris conscience que ce n'était pas forcément simple pour elle, pas à cause d'elle, mais à cause de lui, d'eux. Et ses mots sont tellement expressifs et touchants qu'il ne peut que fondre, bien plus vite que ne peut le faire le savon. Savon qui retrouve sa place originelle loin du jet d'eau.


Je peux éteindre l'eau ?

L'eau, Law. Punaise quel "humouriste" je suis !.. pardon.

La jeune fille ne répond pas. Peut-être est-elle dans ses questionnements. Eteindre ou pas ? Le Polyglotte tranche aussitôt, sans même lui laisser le temps de parvenir aux conclusions de ses tortueux cheminements psychiques de conséquences à sa réponse. Oui, non.. Et bien : Non dans l'immédiat, mais Oui un peu après.


Compris, je la laisse encore quelques secondes.


Et il revient s'immerger sous la pluie artificielle, serrant contre l'une de ses paumes une main d'Andrea, l'autre passant sur son corps, attentif, pour s'assurer qu'il ne reste rien de la matière purificatrice avec laquelle il venait de lui prodiguer ses soins.

Je disais.. Demande-toi si mon contact t'inspire quelque chose. Une envie ?.. Peut-être un baiser. Ou plus. C'est naturellement que ça doit venir. Laisse-toi aller. Libère ton esprit. Fais-le galoper et s'interroger sur ce que tu veux obtenir, sur ce qui serait bon pour toi.

Il tire ensuite son bras en arrière pour le caler dans son propre dos, la forçant à se rapprocher de lui. Il n'a pas réellement à faire plier sa volonté : Il est sûr qu'elle ne refusera en rien ce contact. Et il la prend dans ses bras, la tête faisant bouclier pour la couvrir du liquide qui s'écoule sur eux. Où qu'elle ira, il la protègera, comme si sa vie en dépendait, même si il doit recevoir les injures d'une pluie de feu, même si il doit se parvenir et rompre un serment, même si il doit se lancer à corps perdu du haut d'une falaise immensément haute, risquant de se briser les os dans moults souffrances sur d'hypothétiques récifs, il n'hésitera pas à le faire, dans la seule optique qu'il ne lui arrive rien. Aussi bien qu'il fait de lui-même une couverture contre le jet de douche pourtant fort large, il n'hésitera plus à se sacrifier pour elle. Aussi bien qu'il sait qu'elle va le faire redevenir un peu plus Law, il s'écorchera chaque muscle pour qu'elle redevienne un peu plus Andrea. Qu'ils retrouvent ce qu'ils ont chacun perdus, et abandonnent les poids qu'ils traînent.
Le contact dure de longues secondes, pendant lesquelles, interdits tout les deux, on entend rien d'autre que l'eau qui bat une mesure discordante et irrégulière au sol. Jusqu'à ce qu'il ouvre ses yeux, qu'il eut fermés par mécanisme. Son regard, vide, lancé vers un mur à côté, est plein de fatalité. Il doit s'estimer heureux d'avoir Andrea contre lui : Elle ne peut pas voir ses yeux qui ressemblent à ceux qui contemplaient sa vision de Neige, quelques heures plus tôt.


J'ai peur.

Et avec cette parole, il rompt l'étreinte, et la laisse au milieu de cette douche pour aller tirer une chaîne en métal cuivré pendante qui, une fois baissée d'une vingtaine de centimètres, stoppera totalement l'écoulement de l'eau. Plus rien, sinon quelques épisodiques goutelettes, rebelles qui veulent rejoindre leurs camarades tombées au champ d'honneur, dont les cadavres ont traversées les quelques perforations au sol, et dont l'âme glissera jusqu'au fond des canalisations souterraines.
Les égoûts. Paradis des bribes d'eau qui se sont vaillamment battues lors d'un héroïque assaut contre la saleté.

Law va ensuite se saisir d'une des serviettes, encore chaudes, d'une blancheur immaculée, et la déplie. Celle-ci est large et haute, et quand il la tient dans ses deux bras, elle traîne presque au sol. Il passe derrière Andrea et lui pose le tissu sur l'épaule, dégageant ses cheveux qu'il libère de l'emprise tempérée et met au dehors pour qu'ils puissent s'égouter tranquillement. La voilà revêtue d'une véritable capeline, et peut-être devra-t-elle s'habituer à en porter désormais, si c'est à son goût.
Puis, il va chercher ce qui est censé être la sienne, de serviette, et l'étend elle aussi. Mais il ne la passe pas autour de lui : Il l'utilisera pour sécher avec prudence la chevelure trempée de sa belle, celle-là même qu'il tripotait précédemment.


Je ne sais pas vraiment de quoi j'ai peur. Peut-être de ne pas être à la hauteur. Ou que tu ne trouves pas ça assez bien. C'est la première fois que je ressent ça, tu sais. Peut-être que ça me deviendra indispensable. Mais si toi tu n'aimes pas ça, l'échec serait le plus cuisant de ma vie. Et pourtant, j'en ai subies des défaites, et dans tout les domaines. Mais là vraiment ce serait.. Hmf.. Je pense que je me considérait comme... Impropre à pouvoir te toucher. Enfin, je ne sais pas si je suis très clair.

Les cheveux débarassés d'un peu de leur humidité, il réitèrera le processus avec beaucoup moins de soin sur lui-même, et le séchage sommaire vite expédié, il plie la serviette en deux et la passe autour de son bassin.

Je suis tout de même conscient que.. l'acte.. une fois lancés, ça devient naturel. Mais je veux que tu deviennes accroc à ça, autant que moi je pourrais le devenir.

Un faible sourire, un brin forcé, s'affiche sur son visage, alors que, face à elle, il la contemple. Il ressent tellement de désolation vis-à-vis de cette situation nouvelle.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mardi 28 décembre 2010, 12:47:59
Pour commencer par une bien étrange réflexion, on peut parfois être légitimement amenés à se demander, qu’est-ce que le sexe ? Pour certains, tout. Pour d’autres, rien. Et le juste milieu ? Il se fait tout petit, chacun essayant de partir à la recherche d’une sensation, d’une émotion qui caractériserait cet acte purement physique et pourtant étonnamment proche des émotions. Bien plus que ne l’est un serrement de mains, dans la rue, quand on retrouve quelqu’un que l’on n’a pas vu depuis longtemps. Bien plus que le simple fait de recouvrir une tranche de pain de confiture. Une affaire de culture ? Certainement, mais pas seulement. Le sexe, c’est avant tout un moyen de reproduction. Certains laissent ce pouvoir immense libre de toute entrave, mais dans une société où il n’est plus possible de faire totalement confiance, où les gens volètent de ci de là et dans laquelle une grande famille est un fardeau plus qu’un véritable bonheur, c’est une illusion profondément ancrée dans la bêtise humaine. D’autres le brident, tentent de dominer un pouvoir bien supérieur au leur. Faire plier les lois de la Nature ne réussit pas à l’Homme, cela a été maintes et maintes fois montré. Alors quoi, dans une culture qui sacralise un acte pourtant commun dans l’esprit de certaines autres, il est bien difficile de l’intégrer et de lui faire une place, entre les obligations et les limites imposées par le temps. Mais ce pouvoir premier n’est pas unique, et l’acte en lui-même peut se parer de milles déclinaisons, de complications ou de détournements qui prennent toujours plus d’importance que la tartine de pain et sa confiture.

Mon premier, c’est désir. Celui qui brûle, celui qui consume l’envie pour faire place à une impulsion violente, passionnelle et dévorante. Qui ne peut espérer être assouvie que par sa consécration. Du serrement de cœur au corps qui se manifeste bruyamment, à grands coups de regards langoureux et d’approches plu ou moins subtiles, le désir est imminent. Il prend à la gorge, vous empêche toute réflexion, vous soumet à lui. Résister parait alors bien futile, quand on prend conscience de la force que le désir dégage à lui seul. De quoi rendre fou si on tente le contre-courant, parce qu’aller dans le sens inverse des envies les plus inconscientes mais également les plus virulentes, c’est annihiler toute la logique de son être. S’y soumettre, ou le ravaler en vain et le voir s’exprimer dans toutes les manifestations moins évidentes de sa personne ... Mon deuxième, du plaisir. C’est évidement la principale raison qu’évoque la majorité des gens. Evidente, peut-être trop, c’est la réponse idéale à la définition du sexe, c’est le pourquoi tout le monde le fait, la valeur intrinsèque et inaltérable. Ceux qui ne rentrent malheureusement pas dans cette case inévitable le disent rarement, ceux qui ne comprennent pas pourquoi ce partage a tant de valeur. Pourtant, ça n’a pas tant d’incidence que cela, pourtant cela fait surtout plaisir à l’autre. Sensation d’être un peu à part, de ne pas être normale. Se questionner, se culpabiliser, savoir que quelque chose là-dedans ne fonctionne pas. Pour diverses raisons, on se fiche desquelles, ces pantins de chair ne vivent pas cet instant, n’en retirent rien si ce n’est un questionnement un peu flou. Cette déferlante de plaisir, ils ne la connaissent pas. Cette envie de toujours découvrir, d’aller plus loin, de voir partout ailleurs si c’est identique. Désirer, se fondre dans la jouissance du corps, être à l’écoute d’une enveloppe qui n’est pas en adéquation avec ses émotions, c’est l’inconnu. Se sentir à part, complètement rejeté de la plus simple et la plus évidente des choses, vu de l’extérieur. Ce qui unit les êtres, ce qui les rassemblent, ce qui les rend un, même pendant un court instant, même si ce n’est que pour un soir. Le plaisir, qui se fait surtout remarquer par son absence.

Mon troisième, c’est souffrir. C’est une technique impayable qui, même lorsque tout plaisir est absent, permet de briser, de déchirer un cœur, une âme. C’est la soumission, la fin de quelque chose. C’est le souvenir honteux d’un moment, d’un soir, qu’on regrettera toute sa vie. Cette ruelle qu'il ne fallait pas emprunter, cet homme qu’il ne valait mieux pas rencontrer. Pas de meilleur moyen, sans doute, de dominer quelqu’un en peu d’effort. Un peu de force, et il n’est même pas besoin de tortures ou de violence physique, piétiner un sacre habité par une image positive et plaisante suffit. La culpabilité, les remords, la souffrance s’invitent sans attendre et rongent, font partir cet esprit torturé en miettes, n’en laissant que de vagues bribes comme ultime réminiscence. Il suffirait de ne pas accorder à la chose l’importance qu’on lui porte, il suffirait de fermer les yeux et de ressentir cette soumission comme une simple claque. Rien de plus difficile, pourtant, que de modifier sa perception d’une chose, d’en rendre l’impact moindre et de rejeter toute retombée qui aurait une force inouïe. Et mon tout fait des souvenirs. Parce que le corps se souvient, parce que le cœur est meurtri bien plus qu’on ne le pense, parce que les images et les bruits reviennent sans cesse. Le choc sourd et régulier d’une canalisation qui fuit, déversant des larmes sur le sol, les faisant éclater en un infime bruissement que seul l’esprit totalement ouvert à son environnement pourra déceler. Le crissement des roues des voitures qui passent à l’extérieur, les paroles indistinctes de quelqu’un dans les étages. Mais aussi la couleur des rideaux qui encadrent les vitres sombres et mal nettoyées, la table si peu éloignée qui devait soutenir un gâteau d’anniversaire. Les bougies qui ne sont pas là, les rires d’amis qui ne sont jamais venus. Et surtout, ne pas écouter les mots de la seule chose importance de la pièce.

Ne pas déchiffrer les sons faits de mots, les phrases qui brisent, le ton victorieux et fier de sa proie, les murmures éhontés qui glissent jusqu’à une oreille sans parvenir au cerveau de celle qui prie pour que tout cela s’arrête. Puis finalement, l’indifférence. Revoir la scène encore et encore, la vivre souvent même. Ne rien faire pour la fuir, pour l’éviter. Se convaincre qu’on le mérite, justifier l’acte du traitre en reprenant ses propres mots, les intégrer et les faire siens, comme pour éviter de se disloquer dans l’espace et l’infini désespoir qui vous guette. Devenir distante, se barricader derrière un mur et laisser son corps faire semblant d’apprécier ce que son esprit refuse. Se détacher de tout, et voir la scène de l’extérieur, plaindre la victime sans avouer que l’on aurait envie de se secouer pour se réveiller. Ouvrir les yeux sur l’horreur est trop difficile, encore vaut-il mieux tout refuser en bloc et se perdre dans le même temps. Faire mine d’apprécier, se convaincre de jouer la simulation. Et pourtant il faut vivre, ou plutôt survivre. Être heureux, malheureux, mais vivre pour toujours là où les vieilles fleurs se fanent, là où les autres baissent les bras. Se raccrocher aux couleurs d’un futur qui peut se construire à deux, en pensant aux souffrances infinies qui naissent chaque jour, se dire qu’on n’est pas le plus malheureux. Quand dans la confiance tout s’effondre, il reste toujours la misère du monde, qui n’est rien devant un adieu. Et puis l’espoir, celui de l’union de deux êtres. La signification ultime, celle dont toute jeune fille rêve dans son adolescence. On peut la trouver d’emblée, la perdre immédiatement. N’en garder qu’un lointain souvenir ou la retrouver par la suite, quand on ne l’attend plus. La pressentir, y croire, la deviner sans vouloir la précipiter. En dessiner des contours incertains, se dire que peut-être, il y a quelque chose derrière tout cela. Que peut-être, la lumière au bout du tunnel n’est pas qu’une invention pour rassurer les plus démunis devant la défaite. L’espoir, celui d’Andrea. Que le désir peut amener le plaisir, sans passer par la case souffrance. Que la fatalité n’est pas destruction, mais au contraire renaissance.

C’est plus ou moins là-dedans que la jeune fille s’était enfermée quand Law lui demanda quelque chose qu’elle n’entendit même pas, trop occupée à se faire du souci pour essayer de devancer la déception ou au contraire la satisfaction que sa rencontre avec lui pouvait faire éclore. Elle n’émergea de ses considérations que lorsqu’il revint sur ses propres questions. Son contact, une envie ? Définitivement, oui. Sa main posée simplement là, contre la sienne, éveillait déjà ses sens. Un baiser, bien sûr. Plus, sans doute. Elle imaginait son corps se découvrir et se blottir contre le sien avec la plus grande réalité possible, fermant les yeux pour chercher en elle ce que cette image lui évoquait. Un sourire, quelques frissons le long du dos et également une vague de tendresse et d’assurance qui la traversait de part en part. Ce qui était bon pour elle ? Lui. Son assurance, sa simplicité, sa spontanéité. Mais aussi ses baisers, sa prévenance, ses délicates attentions dont elle ne revenait toujours pas. Son cœur, qu’elle sentit soudain battre contre elle alors qu’il l’attirait à lui. Son corps, qui se collait au sien tandis qu’elle acceptait avec plaisir ce rapprochement délicieux. De plus, Andrea peut encore lever son regard clair vers lui, puisqu’il protège son visage de l’eau gambergeant sur leurs peaux, ce qu’elle fait sans hésitation. Pour tenter de capturer, encore et encore, les courbes acérées qui font d’un simple corps un visage qu’elle n’est pas prête de vouloir oublier.

Pas un mot ne s’écoule, et seul le liquide brûlant le fait. Andy ne bouge pas d’un muscle, blottie qu’elle est dans un écrin irradiant la chaleur et la douceur. Elle a rarement été aussi bien, et se refuse à briser l’appréciation qu’elle a de cet instant en des paroles inutiles. Elle lui dirait plus tard, plus tard. Et ce fut une riche idée, puisque cela permit sans doute à l’esprit de Law de l’amener vers la suite des événements, alors que son visage échappe au regard d’Andrea, alors qu’il se perd seul dans un monde qu’elle ne peut plus atteindre. La jeune femme sent ses bras se resserrer instinctivement autour du corps qui la tient à l’écart de l’agressivité de l’eau qui tombe en cascade, dans un bruit qu’elle n’entend pas vraiment. Elle sait que tout d’un coup, le sol se fait instable, friable. Se rend compte que leurs pensées sont mises à nues avec autant d’efficacité que leurs corps le sont. Dans la moiteur de la pièce, un froid se crée. Pas forcément de ceux qui vous prennent au sang, étreignant un corps qui se tétanise. Plutôt celui qui s’insinue, se répand dans les veines et distille son mal, ouvrant tout obstacle devant lui et permettant aux mots de franchir tout seul le barrage de la pensée. Andy reçoit en silence la confession de Law, voudrait ajouter quelque chose mais se retient, préférant le laisser libre de développer ou non ce qui vient de lui passer par la tête.

Alors qu’il se détourne et arrête le flux incessant de la douche, Andrea laisse son regard errer dans la pièce, sans vouloir toujours revenir à lui pour l’inciter à continuer, sans l’oppresser. Un miroir qui ne reflète plus grand-chose à travers la buée qui le recouvre, pas de fenêtre. Une salle aux dimensions respectables sans être excessives, permettant cette sensation de confinement, de proximité qui y est donnée lorsque l’on s’y trouve à deux. La jeune femme s’éloigne du sol trempé et glissant pour atterrir directement dans le duveteux accueil qui l’attend, alors que Law l’emmitoufle comme une véritable princesse, s’occupant d’elle tel qu’un propriétaire d’une poupée fragile ou un amoureux prévenant pourrait le faire. Une fois Andy presque sèche, elle frictionne le tissu autour de ses membres pour terminer le travail tandis que son compagnon s’occupe de lui plus sommairement. Une fois débarrassée de toute humidité, elle conserve encore un peu la chaleur qui l’entoure et, devant l’expression de Law, ouvre les lèvres presque à regret de ne pouvoir le rassurer entièrement.

- Je ne vais pas te dire que tout se passera bien. Je ne vais pas te dire que je vais aimer ça, ni que je comblerai tes attentes. Parce que je ne peux rien te promettre, juste découvrir. Réapprendre.

Marquant un silence, la jeune femme hésite, cherche ses mots. Affichant une moue qui se mue en grimace quand elle prend conscience de la précipitation qui jaillit de sa bouche.

- Ce que je peux dire, c’est donc que j’ai envie. Parce que quand tu es là, contre moi, j’ai des papillons dans le ventre qui me poussent en avant. Les pensées qui partent dans tous les sens, mais qui finissent toujours par arriver vers toi. Je te veux, j’ai donc envie de toi ? Oui, alors, je crois bien que c’est ça.

Andy s’avance, lui caresse la joue avec une expression qu’elle veut rassurante. Remonte, effleure ses cheveux d’une main aimante, et se prend à utiliser des mots qu’elle n’aurait pu s’entendre dire dans aucun de ses rêves les plus fous. Ce genre de déclaration qu’on aurait pu lui dire si quelqu’un avait eu suffisamment d’intérêt pour elle à l’époque, mais qu’elle aurait reçue d’un vague sourire pas vraiment convaincu.

- Je suis morte de peur depuis que je t’ai rencontré. Parce que tu fais bouger certaines choses, parce que tu en éveille d’autres sans même t’en rendre compte. Tu arrives, comme ça, tu tires de sa prison une Andrea qui n’avait pas vu le jour depuis longtemps. Tu l’aveugles, tu la protèges, tu la secoues et tu la remplis d’émotions. Tu la rends faible, et à la fois tu la pares d’une force incroyable qu’elle ne connaissait pas. Laisse-moi faire pareil. Ayons peur ensemble, je m’en fiche que l’avancée se fasse à tâtons, je me fiche même de savoir si tu vas tout ressusciter sur ton passage.

A savoir qu’elle ne doutait pas qu’il puisse y arriver, non. Mais il fallait lui enlever ce poids des épaules, qu’il ne se sente pas trop investi de quelque chose d’aussi difficile. Elle refusait qu’il se complique la vie, qu’il hésite et se mette dans cet état en pensant à elle. Andrea voulait d’avantage voir un sourire que de la peine sur ses traits. Puis, sûre de ne pas briser d’espoir puisque, elle le sait, lui-même a cette envie retenue, elle reprend :

- Mais on a le temps, et je refuse d’alimenter immédiatement cette peur qu’on partage. Pas aujourd’hui, peut-être demain ou encore après ... Quand la retenue aura perdu devant le désir.

Et, pour éviter de demeurer comme cela devant lui et de donner trop de sérieux à une scène qu’elle ne veut pas oppressante ou anxiogène, Andrea se déplace de quelques pas, toujours enfouie sous un tissu blanc confortable, ramasse son pantalon et l’enfile sur ses jambes, quand bien même le tissu serait quelque peu mouillé, son ultime vêtement étant encore humide. Boutonnant agilement le jean, elle se baisse à nouveau et ramasse sa chemise. Puis, enlevant la serviette et la pliant avec application sur le lavabo, la jeune femme passe ses mains derrière son dos et détache prudemment sou soutien-gorge, le laisse glisser le long de ses bras puis de ses poignets avant d’enfiler prestement son vêtement. Comme ça, elle n’aurait pas la désagréable sensation du tissu mouillé contre son corps propre. Certes, elle vient de s’exposer furtivement. Mais pas dans une volonté d’aller plus loin. Juste pour lui montrer que la confiance et l’assurance arrivent, qu’elle est prête à avancer tranquillement jusqu’à lui. Finissant de fermer son maigre habit, Andy relève le visage et fixe Law, les joues rougies par la chaleur qui règne encore dans la pièce. S’il veut, il y trouvera une porte de sortie pour éviter une discussion qui pourrait, à terme, le lasser. Et cette prévenance attentive surprend Andrea, peu habituée à autant d’égards pour une seule personne, dans un registre qu’elle ne connait absolument pas. C’est fou comment, en quelques heures, cet homme a pris de l’importance dans sa vie. Comment il résume la vie qu’elle a décidé d’emprunter à présent. C’est devenu son point d’ancrage, sa référence, son protecteur et son guide. Beaucoup trop. Pas assez.

C’est ça, l’amour ?

Andrea frissonne. Le mot à ne pas penser, à ne pas prononcer. Il a bien trop d’impact, il empêche tout retour en arrière, il peut faire trop mal. Non, ce n’est pas ça. N’est-ce pas ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 28 décembre 2010, 22:00:27
La retenue.. Que savait-il de la retenue ?
Cela faisait bien longtemps que Law - Tyler - avait abandonné cette notion. Tyler, c'est le patron exhubérant, exagérément gai, atroçement dépravé. Tyler, c'est ce type qui entre dans une taverne, une maison de jeu, ou tout autre endroit où les gens viennent se fourvoyer, juste dans l'optique de défier le propriétaire des murs. Tyler, c'est ce fou, ce dégénéré mental qui ajuste le col de son ample manteau de cuir avant de distribuer des pains au tout-venant, alignant un à un les molosses et les brutes, armées ou non, avec une rigueur qui fait pâlir les jeunes filles, et leur fait manifester quelque sentiment d'admiration. Tyler, c'est ce pervers, l'homme qui emmène une femme sur un toît pour dominer Nexus, et lui montrer que taire ses hurlements, c'est mal. Il fait tout pour qu'elle crie son plaisir, que toute la Ville-État l'entende, à tel point que la maréchaussée doit s'en venir pour les déloger. Mais Law n'arrête qu'une fois qu'il estime la demoiselle rassasiée, quitte à fuir pour reprendre ailleurs. Le risque, s'afficher, tout ça, il adorait. Mais Tyler, c'est aussi ce monstre de travail qui veut pouvoir, à tout moment, contrôler son Empire. Les nouvelles vont de plus en plus vite grâce au réseau qu'il s'applique à déployer, toujours plus grand, toujours plus tentaculaires, s'insinuant dans toutes les couches de la population, au point que chaque quartier, chaque rue, chaque maison est parasitée par son emprise diabolique. Il sait souvent, il voit parfois, mais tout le temps, il agit. Mais le monde n'attend pas ! Le temps ne prend de pause pour personne, même le surhumain Law. Alors, quand quelque chose doit être réglé en urgence, il doit pouvoir donner des ordres. Même si il faut le réveiller en pleine nuit pour cela. Même si il torture un soldat tombé entre ses mains lors d'un assaut en terre ennemie. Même si il est en train de sauter, avec tout le manque de dignité et d'honneur, l'une de ses prostituées allongées sur son bureau, qui n'hésite pas à déchaîner son plaisir sans vergogne.

Tyler, c'est cet homme, et rien de plus, qui se rend compte qu'il est nu devant une jeune femme qu'il désire, et dont il ne souhaite que le bonheur. C'est ce fort devant tout le monde, mais ce faible devant elle, qui sait lui faire remettre en question ses acquis qu'il eut pu affirmer être millénaires. Si elle ordonnait, il saurait renoncer à tout. Mais ce n'est pas ce qu'elle veut, bien au contraire. Elle veut devenir un peu Law, pour qu'ils règnent à deux. Non, je ne regrette rien. Et jamais je ne regretterais quoique ce soit. Le regret, c'est pour les faibles. Il faut savoir se départir des erreurs du passé et ne pas avoir à s'en excuser, juste les réparer et ne jamais plus les commettre.

Qu'elle était belle. Encore plus le buste nu. Quelle vision de paradis s'offre-t-il là.. Brusquement rompue par son habillage prompt. Alors de nouveau, il atterrit, et toutes les paroles qu'elle a prononcées auparavant s'assimilent lentement. Oui, il est rassuré. Non, mieux : Elle vient de le rassurer. La version est plus juste. Plus valorisatrice. Elle est un doux fléau, une délicate souffrance, et s'efforce aussitôt, sans se rendre compte de quoi que ce soit, de changer cet état de fait. Alors oui il avait peur, mais les paroles qu'elle lui avait assénées changeaient tout. La peur, Law dira aussi que c'est pour les faibles. Mais n'est-il pas infiniment faible devant elle ? Devant cette.. magnifique.. resplendissante.. bouleversante...

Andrea..

Law vient sans doute de rencontrer Dieu une nouvelle fois. C'est contre sa volonté, encore. Mais ça ne lui déplaît pas. S'approchant, il lui prend un baiser, un peu court comme à son habitude, mais désormais, elle verra que la vie est plus longue, plus profitable, elle pourra comprendre que l'instant qui passe n'est qu'un instant parmi des millions d'autres. C'est l'avenir qui vient, et le bout du tunnel est loin. L'embrassade furtive, c'est la promesse de plus, un peu plus tard. Oui, il accepte d'attendre. Il accepte tout ce qu'elle veut. Le sexe veut dire trop de choses avec elle, qu'il n'a pas envie d'en savoir le quart de la moitié du commencement d'une tout de suite. Tout viendra, le submergera, quitte à s'en étouffer, à mourir de trop d'Elle.

Viens. On sort.

En guise d'acceptation, de tout ce qu'elle a dit, et même de ce qu'elle n'a pas dit. Il a toujours sur le coeur, comme un poids, la dette qu'elle doit à quelqu'un. Et même ici à Nexus, il sait qu'elle n'est pas réglée pour autant. Il lui en parlera, mais plus tard. Il veut savoir ce qu'est ce mal, pour l'éradiquer.


Remontant le couloir, l'homme file jusque son bureau et sa chambre. Là, il laisse tomber sa serviette et se mettra en quête d'habits convenables. C'est cul nu, donc, qu'il choisir un vêtement singulier : De l'extérieur, on dirait une jupe longue qui descend jusqu'aux pieds. Mais à l'intérieur, il y a deux jambes, comme dans un pantalon. Après un simple caleçon noir - pas très local visiblement -, il enfile ce qui lui couvre entièrement les jambes. Et, surprenant, ça lui donne la grande classe. Surtout torse nu, d'ailleurs. Il s'en rend compte, et se retourne un instant vers Andrea, s'admirant un peu. C'est d'ici, ça ? Peut-être n'apprécie-t-elle pas. En tout cas, lui adore. Peu de liberté de mouvement en apparence, mais si il veut, par un système de liens, il peut fendre complètement de la partie considérée habituellement comme "féminine" pour se retrouver avec tout ce qu'il y a de plus masculin, un futal noir qui pourra lui permettre de courir et se battre à l'aise, sans la moindre gêne. Par-dessus cela, un haut près du corps, qu'il surmonte d'une veste plus ample, fermée par trois sangles. Il se saisit aussi de deux plaques de métal courbée, chacune s'emboîtant comme un puzzle, nul doute qu'auparavant ces deux parties ne formaient qu'un seul et même objet. Et le manteau, trônant au porte-manteau de sa chambre. Le voilà fin prêt. Température baissée, pour pas qu'il ne fasse trop chaud le soir à venir, et il ferme la porte, s'engageant de nouveau dans le couloir.


Je vais m'en acheter un nouveau et tu en profiteras pour te prendre quelque chose. Ensuite on filera à un tailleur que j'apprécie. Et puis on marchera un peu, juste histoire de se balader. Si il n'y a pas trop de monde, je passerais à un temple. Mais je ne veux pas t'imposer cela. Enfin, nous verrons sur le moment.

Saluant ses quelques employés en cette matinée qui s'annonçait merveilleuse, il traversait bien vite le casino très vide, où l'on trouvait tout de même quelques joueurs courageux toujours pas couchés, pour finalement se retrouver dehors. Le froid n'était pas mordant en ce jour : Doux, il avait laissé l'agressivité de côté.

Tu ne demandes plus. Tu exiges. Pas besoin de jouer la grosse bourge un peu radasse, reste simple. Mais ici, le client est vraiment roi. Surtout vu ta position nouvelle. Si l'un d'eux t'es désagréable, tu lui colles une mandale. Mais en général, ils sont assez serviables. Et ceux chez qui je t'emmène sont habitués à moi, alors tu n'auras vraiment aucun problème. Pour tes vêtements, dépense sans compter. Je ne veux pas que tu aies l'impression de te faire entretenir.. Il est normal que je t'aide à accéder aux choses essentielles. T'habiller, te nourrir. Oh, et tu voudrais un esclave ? Je sais que chez toi c'est très mal vu.. Mais dis-toi qu'un esclave sera toujours mieux chez moi qu'ailleurs. Je leur rend service, en quelques sortes ! Et puis, après, retour au travail. Et là tu auras de quoi apprendre. Tiens, c'est là.


Débouchant sur une grande place carrée remplie d'étals divers, Andrea aurait pu se croire revenue des centaines d'années en arrière. Nexus l'agonisante d'hier soir était aujourd'hui des plus vivantes. Les gens se bousculaient dans les allées, les marchands hurlaient. Des parfums inconnus montaient aux narines. Un gamin jouait avec son petit animal de compagnie, un petit chien tout bleu avec des attributs très reptiliens : Queue, yeux, oreilles. Law l'esquive, tenant désormais son Andrea par l'épaule. Il fallait qu'elle suive la cadence, qu'elle ne se perde pas. Et un accident était si vite arrivé. Esquivant les badauds, Law prenait le chemin de l'une des maisons-boutiques qui formaient le contour de la place. La vitrine était large, en plein air, et respirait le fer forgé. Un armurier, donc. L'un des vendeurs, derrière ses étalages d'armes et d'armure, apercevant Law qui s'était arrêté devant un large panel de casques, s'avançait vers lui.

-"Sire Raine ! Quelque chose vous serait agréable aujourd'hui ?"
-C'est cassé, dit-il en sortant les deux morceaux d'armure d'une large poche.
-"Oh.. J'espère que vous ne vous êtes pas blessés pour autant !"
-Non, juste le choc.
-"Le Maître est désolé de ça.. Le prix du neuf sera un peu baissé pour le désagrément. La demoiselle veut quelque chose ?"
-Oui. Une arme.
-"Une belle dague du Maître ?"
-Oui. Enfin, pas forcément belle. Solide, légère. C'est juste "au cas où". Elle n'a jamais touché d'arme de ce genre alors, aidez-là à s'aiguiller.
-"Mais parfaitement. Suivez-moi."


Et le sympathique quarantenaire leur demande de faire le tour des étalages, pour pouvoir entrer dans la boutique. Il n'y avait personne ici, rien qu'eux. C'était un véritable foutoir : Dans un espace assez réduit, des centaines d'armes étaient plus ou moins rangées par catégories, beaucoup d'armures qu'on devinaient solides. Le commerçant emmène Andrea visiter le rayon des lames courtes, voire très courtes pour certaines.

-"Tenez, n'hésitez pas, essayez. Prenez-en une fine.. Celle-ci par exemple, ou celle-ci si vous préfèrez. Elle n'a pas de garde, elle est plus pratique, mais attention à ne pas faire glisser sa main. Sinon, celle-ci est un modèle assez classique. Ce sont des armes de premiers choix, vous ne trouverez que de la qualité ici. Prenez celle-là, pesez-la. Dites-moi si elle est trop lourde.

Pendant ce temps-là, un peu plus loin, Law s'appuie sur une hallebarde, contemplant l'employé faire son travail consciencieux de vente appuyée. Il espère qu'elle ne se sent pas trop opressée.

-Choisis bien, tu devras la garder sur toi en cas de nécessité. Tu ne t'en serviras peut-être jamais, mais je préfère te savoir avec ça à portée de main.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 29 décembre 2010, 13:26:48
Mentir, c’est avoir l’intention de tromper. Que ce soit pour le bien de l’autre, pour sa propre satisfaction, pour faire de la peine ou pour éviter d’en faire. On peut être habité des meilleures intentions lorsque les mots surgissent, faux, déformant une vérité qui est pourtant toujours bonne à dire. Toujours ? L’humanité a besoin de vérité, mais elle a plus grand besoin encore du mensonge qui la flatte, la console, lui donne des espérances infinies. Sans le mensonge, elle périrait de désespoir et d’ennui. L’être humain est-il sensiblement pareil à la société qui le porte ? L’omission ou la claire intention de tromper sont-elles des choses aussi primaires et importantes qu’on peut le croire ? Chacun vit baigné de mensonges, tout le monde y puise une source de réconfort, de plaisir, une certaine forme de jouissance, même. Car la flatterie et le ton mielleux qui vous couvre des meilleurs compliments vont toujours de pairs, et s’installent avec une facilité déconcertante dans les habitudes d’un homme. Pour la cible comme pour l’instigateur, cela devient un prérequis à toute relation, à tout contact. On ne peut plus imaginer la rencontre sans enjoliver un peu son image, sans en rajouter sur ses qualités tout en évitant de parler de ce qui pourrait décevoir l’autre. La socialisation n’est qu’un grand échiquier géant où chaque pièce doit se déplacer dans la direction qui l’arrange le plus, sans que ses adversaires en soient conscients. Avoir un coup d’avance, devancer les réactions de l’autre, contrer ses projets, deviner le bluff. La vie, c’est comme un grand jeu de stratégie. A qui mentir, quoi dire, comment bien se faire voir, tenter de percer la carapace de l’autre et apercevoir les faiblesses qu’il cache par trop de fioritures. Mentir, oui. Mais sans trop en faire.

La seule règle du mensonge est de le tenir jusqu’au bout, de ne jamais céder sous la pitié ou les remords, ne jamais regarder en arrière et y préférer une vérité qui fera d’autant plus mal qu’elle a été cachée. Souvent, c’est une couverture. Pour soi ou pour l’autre, peu importe tant que cela protège, enrobe, soulage. Le mensonge est une arme délicate qu’il faut apprendre à manier avec subtilité. A tout moment, elle peut être réduite en poussière par un seul mot de l’adversaire alors que le reste du temps, elle est inaltérable par l’habileté du bretteur. Se révéler trop, ne pas en dire assez. Les deux extrêmes conduisent au même cuisant échec, qui vous met hors-jeu et vous retire votre droit de participer. Identifié, les autres savent. Ils savent ce que vous vouliez cacher, et que vous avez tenté de le faire. Se remettre dans la course ne sert plus à rien, une fois éventée, la stratégie ne peut se redresser et laisse pantois et démuni un général abandonné de ses troupes. Mais l’illusion peut tenir. Elle peut avoir été élaborée avec tant de soin que rien ne peut la fendiller, ni même l’approcher. C’est le cas de ces mensonges que, finalement, personne ne veut élucider. Ceux qui arrangent tout le monde, qui permettent de ne pas réfléchir, de ne pas se poser de question. Qu’il soit de grande ampleur ou concernant une unique personne, ce type de mensonge facilite la vie des gens qui l’entourent, arrange le cadre dans lequel ils vivent. Comme par exemple le mensonge d’Andrea Leevi. Le plus énorme qu’elle ait jamais eu à faire, le seul qui soit facilement identifiable, mais également l’unique qui ne le fut jamais vraiment. Parce qu’il arrangeait, parce qu’il plaisait. La voir se mentir à elle-même avait tant d’efficacité que cela pouvait convaincre tout le monde. Surtout que personne ne s’intéressait de savoir si son attitude était réelle, tant qu’elle le paraissait avec une superbe ressemblance.

Mais Andrea avait décidé de ne plus mentir. Parce qu’au fond, si cela faisait plaisir à plus d’un, elle était la seule à ne rien en retirer. La jeune femme, à force d’avoir eu à ses côtés pendant quelques heures déjà quelqu’un qui pensait à elle, en venait enfin à se questionner sur ses intérêts, au lieu de toujours voir ceux des autres. C’est comme cela qu’elle était parvenue à expliquer à Law ce qu’elle lui avait confié. C’est comme cela qu’elle réussirait sans doute à lui dire bien d’autres choses. Jouer un rôle sur un plateau géant n’était plus dans ses cordes, et maintenant qu’elle avait trempé ses lèvres dans la délicieuse réalité des sentiments véritables, Andy ne pouvait s’en passer et refuser la coupe qu’on lui proposait. Dorénavant, c’est du bord du jeu qu’elle contemplerait les autres se rouler dans leurs mensonges et dans leur bien être factice. C’est comme si la jeune femme avait épuisé ses réserves et qu’elle ne pouvait plus manipuler des sentiments qu’elle n’avait pas. Maintenant qu’elle les avait retrouvés, il lui devenait impossible de les tordre à sa guise. Bien sûr, elle pourrait se résoudre à plonger ses mains dans les mensonges essentiels, ceux de tous les jours, ceux que toute personne haut placée doit savoir faire. Mais rien de plus. A Law, c’était hors de question. Rien que l’idée la répugnait, tant elle ne pouvait que confier la vérité aux deux yeux sincères et admirateurs qui se posaient toujours sur elle. Imaginer reprendre son rôle si profondément ancré en elle dans ses bras était chose difficile à accepter, et Andy se promit de tout faire pour ne jamais lui mentir par commodité ou gentillesse. Ce qu’elle aimerait, elle le lui dirait. Le reste aussi, et tant pis si cela devait le blesser ou non. L’homme a besoin du mensonge pour se survivre, pour être flatté et soutenu. Mais Law n’avait pas besoin de cela, et Andrea était certaine que ne pas lui dire quelque chose serait bien plus douloureux, pour eux deux, que la simple réalité des faits.

Lorsqu’il prononça son prénom, la jeune femme s’attendait un peu à ce qui allait suivre. Il n’y avait nul besoin d’en rajouter sur ce qu’elle avait dit, nulle nécessité de revenir sur quelque chose qu’apparemment ils partageaient. En tout cas, son intervention avait sans doute été nécessaire, puisqu’à présent Andrea sentait son compagnon légèrement, imperceptiblement plus détendu. Certes, elle n’avait pas fait face à la gelée de ses pupilles lorsqu’il avait annoncé la couleur du sentiment qui l’étreignait. Mais il n’y a pas que le regard qui soit le miroir de l’âme, comme on dit. Andy était habituée à ne rien partager avec son corps, mais les comportements des autres l’avaient toujours fascinée. La tension dans les épaules, les muscles qui se crispent, la mâchoire qui se serre ou la peau du visage qui se tend, autant de signes devenus évident pour la jeune femme, qui les avait auparavant classés dans des cases très fermées de son esprit, afin de ranger tout aussi facilement les individus qu’elle rencontrait. A présent, il était évident que tout devenait plus flou, moins carré et facile à identifier. Les séparations se muaient en de larges portes, mélangeant les certitudes et les très académiques conclusions de la jeune femme. Pas besoin de tout cela, néanmoins, pour deviner ce qu’allait faire Law quand il se rapprocha d’elle, venant cueillir de ses lèvres un très rapide contact, qui ne s’attarda pas mais qui permit de clôturer une discussion, dont l’épilogue était d’un commun accord partagé.

Quand il s’éloigna, elle le suivit et s’attarda quelque peu sur les murs nus des pièces communicantes qu’ils avaient quittés auparavant. Restée dans le bureau, elle progressait plus lentement que lui, qui s’affairait. Après tout, elle était prête. Et si son regard erra vers sa silhouette rassurante et imposante, ce ne fut que pour apprécier la vision qu’il lui offrait. Sous la douche, elle n’y avait pas fait attention alors que c’était sans nul doute l’endroit le plus approprié pour cela, trop concentrée qu’elle était sur ce qu’elle sentait poindre dans son ventre, irradiant dans tout son corps comme une décharge sourde et lente qui se propage, accompagnée d’un délicieux sentiment d’abandon. C’est seulement maintenant qu’elle se rendait compte de la puissance des muscles qui courraient sous sa peau parsemée de cicatrices plus ou moins récentes. L’épiderme roulait, contenant des heures et des heures de travail assidu, renfermant la force et l’agilité qui le caractérisait. Andrea jaugeait avec un air appréciateur le spectacle de cet homme destiné à l’affrontement et au perfectionnement. Un corps formé pour un poste, pour un homme entièrement dédié à sa vie et son quotidien mouvementé. Une musculature adaptée qui n’avait rien de la brute épaisse, une ligne formidablement tenue, et les témoignages du déroulement journalier de ses nuits ne faisaient que perfectionner une image à la fois dangereuse et tendre. Andrea ne pouvait s’empêcher de le voir de ces deux points de vue totalement paradoxaux, admirative qu’elle était de se retrouver face à lui, aussi assuré et offert mais également certaine de ne jamais rien avoir à craindre de ce même corps, qui semblait hurler la protection que Law lui promettait de diverses manières depuis la veille au soir.

Elle se sentait bien misérable dans ses habits de terrienne, et se trouvait étrangement impatiente de mettre un pied dehors dans cette ville inconnue, qu’elle n’hésitait pas à imaginer périlleuse et redoutable, pour se trouver des vêtements plus convenables. Histoire d’honorer la silhouette débordante de charisme qui se trouvait à présent devant elle, lui lançant un coup d’œil auquel elle dut se résigner à répondre d’un sourire. Ce n’était sans doute pas le moment de lui expliquer à quel point elle le trouvait digne d’une admiration non retenue. Et pourtant, il y avait de quoi, surtout dans le superbe juste milieu entre la simplicité du nu et la bien regrettable obligation d’être un minimum habillé pour s’en aller promener. Andy aurait bien profité un peu plus longtemps de ce qui lui était offert, mais elle dut se résoudre à oublier l’image d’un Law à demi-nu l’observant avec attention. Parce qu’ils avaient, sinon mieux, autre chose à faire. Alors qu’il finissait de s’habiller, Andrea le précéda dans le couloir et l’attendit quelques instants, puis ils se mirent en route d’une même impulsion tandis que Law lui exposait le déroulement de leur journée. Emplettes, puis découverte de la ville, cela lui convenait très bien. Se contentant de hocher la tête, n’étant pas quelqu’un qui parlait beaucoup pour ne rien dire ou simplement acquiescer, Andy n’avait pas d’autres envies, aussi se contenta-t-elle d’accepter sans rechigner ce programme. Lorsqu’ils croisèrent des gens, employés comme clients, le premier réflexe de la jeune femme fut de baisser la tête et de ne pas fixer son regard sur eux. Mais elle se reprit dans l’instant, fière d’être là bien qu’elle n’eut sans doute aucun réel mérite à l’être. Andrea devait à présent oublier son humilité et la timidité première, qui la poussaient à s’effacer dans un endroit inconnu. Nexus ne lui était pas encore familier mais ce n’était pas en courbant l’échine que cela allait changer. Hors de question de se cacher, de se plier au regard des autres. L’inverse lui semblait plus prometteur.

D’ailleurs, les paroles de Law lorsqu’ils pointèrent le nez dehors renforcèrent seulement les pensées qu’elle s’appliquait à intégrer depuis que la jeune femme réalisait que sa nouvelle vie était ici. Exiger, punir s’il y avait lieu. Se considérer à présent sortie de la fange des misérables détritus rampants et s’extraire de cette vision réduite et réductrice du monde. S’improviser forte, juste mais dure et exigeante. Et, bien qu’elle conserve tout de même la vague impression de se faire entretenir, telle une princesse dans sa tour, Andrea ne dit rien. Pour l’instant, elle était là, pataude dans un monde inconnu, mais le temps viendrait où Nexus ne serait plus ni une énigme ni une épreuve, où cet espace serait également le sien et où l’impression d’être simplement là disparaitrait. Elle serait plus que bêtement présente, et cet univers deviendrait familier. Elle allait tout faire en ce sens, et l’apparente frêle et fragile Andrea ne manquait pas de détermination. D’autant plus que l’adrénaline et le goût de la nouveauté pouvaient lui faire faire bien des choses insoupçonnées pour ce corps tout en longueur que n’importe qui aurait cru pouvoir briser d’une simple torsion. L’image du coup de pied fracassant une tempe lui revint en mémoire, arrachant un sourire lointain à Andy. Oui, c’était quelque chose qui pourrait lui plaire, certainement. Avant qu’ils n’arrivent, cependant, elle eut juste le temps de rebondir brièvement sur cette histoire d’esclave.

- Pas d’esclave pour l’instant. Il va me falloir un peu plus de temps pour m’habituer à ça qu’au reste, question de culture.

Bercée par la température agréable de cette matinée, Andrea ne put, une fois sûre de ne pas se perdre puisque guidée par l’épaule de Law contre la sienne, son bras enserrant son omoplate, s’empêcher d’admirer la ville. Si les beautés de sa planète n’avaient jamais paru aux yeux d’Andy comme de réelles petites merveilles, il lui suffisait d’être dans un endroit inconnu pour en retrouver le goût. Kyoto n’avait jamais été à son goût, trop de monde, trop de tout. Les rues lui semblaient transparentes depuis le temps, et plus aucun détail n’attirait son attention dans les chemins redondants empruntés chaque jour. Rien ne meublait son quotidien, et que ce soit sous la pluie, le soleil ou la neige, sa petite ville était semblable, toujours, à ce qu’elle en connaissait. Tel un fantôme dans sa cité, Andrea n’avait jamais pu saisir la beauté de son Japon adoptif,  préférant les longues étendues désertes de sa lointaine Finlande, non loin du lac Inari. Et en fait ... Elle ne s’attendait à vrai dire pas à cela. Nexus lui avait laissé le souvenir d’une ville un peu à l’image du Law qu’elle y avait rencontré. Une beauté cruelle, impitoyable, dangereuse. Mais à la lumière du soleil, c’était la couleur qui primait, et le bruit des rires échangés. Un marché géant couvrait les dalles des rues finalement plus grandes que dans ses souvenirs. Plus rien n’avait l’air inquiétant, et il régnait une atmosphère à la fois paisible et d’un dynamisme électrique.

Tout se précipitait pour arriver jusqu’aux yeux, oreilles, narines et autres sens d’Andrea. Elle n’avait jamais vu une activité aussi intense dans un si faible espace, bien que la place sur laquelle ils avaient échoués soit grande. Law ne lui laissa pas le loisir de s’arrêter pour admirer tel ou tel détail, mais Andy s’abreuvait de tout ce qu’elle pouvait voir, que ce soit des objets ou des aliments en vente qu’elle ne connaissait pas forcément, ou des vendeurs et commerçants aux sourires joviaux et à la voix qui portait exceptionnellement loin. Ouvrant grand les paupières pour tenter de ne rien perdre de ce spectacle inhabituel, Andrea tendit un bras et effleura, du bout des doigts seulement, le bois des bien maigres étalages supportant difficilement les produits proposés. Jetant un coup d’œil à gauche, elle apercevait une mère de famille négocier un prix de groupe pour ce qui semblait être une importante quantité de viande. A droite, un homme d’un certain âge jetait un œil appréciateur et envieux sur quelques bijoux, sans aucun doute pour une femme qu’il eut aimé conquérir. Au milieu de tout ce remue-ménage, Andrea ne put s’empêcher de glisser une main dans celle de Law, furtivement. Juste un instant, pour lui communiquer son plaisir à être là, maintenant. Elle le laissa cependant alors qu’ils arrivaient apparemment à destination, ne voulant pas l’incommoder par une attitude dont il ne voudrait pas. Examinant la devanture du magasin devant lequel ils s’arrêtèrent, Andrea nota toutes les sortes d’objets pointus, tranchants, perçants et autres actions pas des plus agréables pour celui qui serait visé.

Un armurier, donc. Andy, légèrement moins dans son monde que dans un magasin de vêtements, se tint un peu en retrait, pourtant c’est bien rapidement qu’on la mit à contribution. Le vendeur se pliait avec élégance aux demandes de Law, aussi se fit-il un plaisir de les accompagner dans un intérieur vide de tout badaud, avant de lui proposer obligeamment de le suivre. Ce qu’elle fit, lançant un regard mi-amusé mi-angoissé à Law, n’étant pas bien sûre que la laisser choisir, même avec l’aide du vendeur, soit une excellente idée. Pourtant, tout commençait bien par quelque chose et son incursion dans Nexus avait pour passage obligé sa mise en garde et son acquisition immédiate d’un moyen de défense. La jeune femme ne prêta pas attention à tout ce qui courait sur les murs, préférant éviter d’imaginer de si grandes armes dans les mains du premier venu dans cette ville légèrement plus dangereuse que la sienne. Se dirigeant directement vers l’endroit indiqué par le vendeur, Andy se concentra sur les lames de toutes les tailles, aux manches plus ou moins colorés et ornés. Il lui en fallait donc une ... Soit. Elles défilèrent dans ses mains, et la jeune femme tentait de sentir laquelle serait la plus appropriée. Elle en mit certaines de côté, instinctivement. Trop lourde pour elle, puis trop longue. Absorbée par son choix, elle ne remarqua pas que Law les observait, pas plus qu’elle ne répondit immédiatement à celui qui la guidait dans son choix.

Finalement, après quelques mouvements de tête négatifs, Andrea s’arrêta sur une lame assez courte, facile à ranger et d’une légèreté toute particulière. Son manche était d’une simplicité évidente, uniquement bardé de stries qui maintenaient sa main en place. La préhension était bonne, le mouvement se faisait ample alors qu’elle fit danser l’arme un instant au bout de son poignet. Oui, celle-ci paraissait bien. Adéquate. Le vendeur lui glissa que le choix était pertinent pour une jeune femme, et qu’elle ne serait pas déçue. Lui lançant un sourire, Andy confirma son choix.

- Elle semble parfaite. Je la prends.

A vrai dire, elle l’aimait déjà. Rapide, discrète, la lame semblait suffisamment tranchante et longue pour atteindre sans trop de problème un organe vital rapidement. Enfin, il lui faudrait encore apprendre à s’en servir. A partir du moment où elle indiqua son choix, le vendeur revint vers Law, sans doute pour régler les détails de sa commande à lui. Et puis, il n’était pas bête, il avait bien compris qui payait. La jeune femme ne prêta pas plus d’attention que cela à ce qu’il se passa à côté d’elle, trop occupée à faire jouer la dague dans ses mains, à en observer la taille et la simplicité de décoration. Efficace. Cela lui convenait très bien, comme adjectif, et espérait un jour pouvoir s’accoler le même. Il ne restait plus qu’à régler les derniers détails, qu’Andrea ne suivit que d’une oreille distraite. Ce ne fut que lorsque Law vint la tirer de son observation qu’elle remit un pied dans le monde réel. Se saisissant du fourreau sanglé que lui tendait le vendeur, Andrea remarqua qu’il était réglable. Pour la cheville ou pour l’avant-bras, donc. Sans doute. Elle décida dans un premier temps de choisir la première solution, et enserra la lame qu’elle n’avait pas lâchée dans son écrin de cuir pour se baisser et le nouer sur sa jambe. Pour l’instant, ça irait très bien.

Law devait déjà avoir réglé l’armurier, puisqu’ils partirent tout de suite après, pour se rendre quelques rues plus loin. Andy restait concentrée sur l’effet que faisait le petit fourreau sur sa cheville. Pas de gêne à la marche, pas de frottement désagréable et une tenue parfaite, pas de doute c’était du bon matériel. Elle n’eut pas le temps de remercier Law, ce qu’elle ferait de toute façon plus tard, qu’ils arrivaient d’ores et déjà en vue de la suite de leurs courses. Le fameux tailleur. Et sa vitrine remplie de vêtements apparemment classiques ici mais qui donneraient un style assez particulier sur Terre. Là encore, ils furent accueillis par le vendeur, qui portait sur son bras un bracelet surmonté d’une boule rigide rouge dans lesquelles des aiguilles et autres moyens de retouches étaient plantées. Apparemment, cet homme était également le tailleur de la boutique. Enfin, homme. Si Andrea n’avait pas vu l’étrange être gardant les appartements de Law, sans doute eut-elle un mouvement de recul inconscient. Elle parvint toutefois à demeurer stoïque et immobile devant l’homme-tigre qui les recevait avec un grand sourire sympathique, qui contrastait assez fortement avec les mouvements de ses mains, qui lui donnaient l’air embarrassé ou tout simplement réservé. Il les invita à entrer, les laissant précéder le mouvement, avant de prendre leur suite ... et de trébucher sur la petite marche à l’entrée du magasin, se rattrapant tant bien que mal à un mannequin en cours de construction qui eut la bonne idée de se trouver à cet endroit.

Là, Andrea ne se priva pas pour admirer les différents modèles exposés, du plus simple au plus complexe, du plus sobre au plus bariolé. Une avalanche de couleurs, de contrastes parfois inattendus se présentaient à elle sans la moindre logique, se déversaient avec force. Il y régnait une atmosphère calme, feutrée qu’Andy aima immédiatement. Elle allait pouvoir obtenir une de ces créations, des vêtements qu’elle n’avait jamais portés. Déjà, elle pensait à un long pantalon large ou à un short plus court, collant à ses longues jambes pour lui permettre de bouger plus facilement. De la couleur, ou du sombre. Tout dépendait surtout de l’usage qu’elle allait en faire. Des étoiles plein les yeux, Andy ne savait même pas par quoi commencer et se contenta d’un sourire prometteur qu’elle afficha avec plaisir sur son visage. Se retournant vers Law, elle ne put réprimer une réaction certes un peu naïve mais témoin de son émerveillement et de sa satisfaction à être ici. Avec lui.

- C’est splendide. Je n’arriverai jamais à choisir.

Elle ne se rendit même pas compte que le compliment, lancé très spontanément, fit rougir les joues de l’homme tigre qui les observait jusque-là en silence. Ce n’était que pure vérité, de toute manière. Adieu, mensonge.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 29 décembre 2010, 19:40:19
Il ne saura dire si le choix d'Andrea était judicieux. Et d'ailleurs, il était mal placé pour juger. Chaque arme est unique, et il y a forcément une lame adaptée pour un bras. Quelque soit le propriétaire du membre, son sexe, son origine, sa corpulence, comme dirait un commun slogan de pub, "il y a forcément un matériel de mort qui vous correspond". En l'occurence, la jeune femme venait de trouver le sien, qu'elle semblait jauger avec amusement, avant de finalement porter son choix entièrement dessus. Ce n'est peut-être pas le genre de Law, mais tant qu'il lui va à elle, alors c'est parfait. D'ailleurs, il vient seulement de remarquer le style de la hallebarde qui contrebalance son poids, soutient ses appuis. Il se redresse, la détaillant. De bonne facture. Le manche n'est pas à sa convenance malgré tout. Trop long, trop droit. Par contre, le bouquet de métal en son sommet, divers tranchants formant successivement hache, pointe large et pointe fine, ouvragées, gravées d'élégants motifs et harmonieusement percées d'ouverture en leur intérieur, il la trouve d'une beauté rare. De quoi faire pâlir tout bretteur un peu friand des armes d'hast, tel que lui, même s'il préfère en général les lames de taille ou d'estoc. Un point de divergence s'ouvre alors en sa conscience : La prendre, ne pas la prendre ? Il ne s'en servira sûrement pas.. Ce serait donc pour la décoration.. Et qu'est ce qu'elle est jolie !

.. Mais pas autant qu'Andrea, sur qui il reporte bien vite son attention tandis que le vendeur s'approche. Malgré qu'il lui parle, notamment du prix total, incluant la nouvelle pièce d'armure qu'il a requis plus tôt, Law n'a véritablement d'yeux que pour elle. Elle n'était qu'un gosse devant son cadeau de Noël. Si ce n'est que la gosse approche ses 20 ans, et que le cadeau en question est un objet de guerre. Mais peu importe. Ce qui compte c'est qu'il lui plaise, et qu'elle apprenne à s'en servir le plus activement du monde, jusqu'à pouvoir réellement se défendre avec. Quand enfin, le fer deviendra intégralement le prolongement de sa chair, il la saura plus en sécurité. Pas totalement.. Mais c'est déjà un début. De toute manière, il gardera toujours un oeil sur elle. Personne ne pourra plus la toucher impunément. Personne ne pourra lui faire de mal. Il s'en fait un serment. Et si quiconque l'assaille, elle devra se venger elle-même. Sparshong récompensera cette action, il la bénira, la protègera quand elle éviscèrera l'impudent qui a osé avoir l'idée de s'attaquer à elle. Que ce soit un pauvre junkie dans la rue, ou un nanti ennemi de Law.
Le silence, et un penchement de tête du vendeur, le fait revenir de sa douce torpeur.


Pardon.. Combien vous avez dit ?




Sortis de la boutique, il ne la saisit pas cette fois-ci. Une volonté soudaine de ne pas se montrer possessif. Si elle souffre de ce manque de contact, il ne l'empêchera pas de se rapprocher. Lui a envie de lui laisser un peu d'air pour respirer, il a envie qu'elle se sente comme l'aigle qu'elle deviendra, puissante mais surtout libre, totalement.
Il la regardait jauger l'impression qu'elle se donnait avec sa nouvelle acquisition, admirant l'effet du matériel sanglé avec toujours cette innocence quelque peu enfantine dans le regard. Là encore, il a envie de lui dire qu'elle est vraiment trop mignonne ainsi. Ce n'est pas tant la dague qui fait cet effet-là que sa façon de regarder, de bouger avec ce qui devenait une nouvelle partie d'elle-même. Puis, la boutique momentanément gérée par le tigre anthropomorphe que Law connaissait fort bien. La bête perte d'équilibre fit sourire ce dernier, et il se corrigea bien vite devant un regard un peu gêné de l'animal humanoïde. Celui-ci demanda rapidement à Law si tout allait bien, et, répondant positivement, le polyglotte lui indiqua d'un signe de tête de s'occuper d'elle plutôt que de lui, ce que le commerçant fit avec discrétion, ne disant plus un mot en la surveillant. Tandis qu'elle avançait la difficulté grandissante à porter son choix - plus que pour les armes, c'est bien une fille ! -, Law répondit, désinvolte, comme si rien n'avait d'importance, pas même le prix ou son avis personnel, car ce qui compte, encore une fois, c'est qu'elle en veuille, point barre.


Prend tout ce que tu veux. Quitte à vider la boutique, Ja' ne s'en plaindra pas.

Le désigné sourit bêtement, avant de saluer poliment un client qui entrait et passait derrière Law pour s'engager dans les rayonnages. Le Boss, quant à lui, n'apporta pas la moindre attention au type. Un cafard de plus. Si il faut tous leur dire bonjour, sa langue finira par être trop sèche pour pouvoir ordonner. Alors, fatalement, il est condamné à tous les ignorer. De toute manière, la seule qui mérite sa sollicitude.
Une nouvelle fois, Law ne prendra rien. D'ailleurs, Andrea n'aura rien à porter en sortant : Sûrement à sa surprise, Jalil mit tout ses choix dans divers sacs, qu'il promit, avec toute sa prévenance et son envie de satisfaire, de livrer dès qu'il aurait quelques minutes de libre.



De nouveau rendus dans la rue, le côté protecteur de Law reprit le dessus. En effet, sortant des rues marchandes pour s'engouffrer dans des allées bien plus petites, moins éclairées, pas mal famées pour autant mais tout de même oppressantes, il préfère savoir qu'il a un bras autour d'elle au cas où il y aura le moindre problème. Une petite arcade de style antique, assez mal placées pour l'endroit, semble attirer l'attention du Seigneur des Bas-Fonds qui s'arrête d'ailleurs devant, jaugeant les quelques pékins qui s'animent vaguement à l'intérieur de l'alcôve dans laquelle il s'apprête à entrer.


Je ne t'oblige pas à venir prier. C'est un petit temple. Il est un peu considéré comme secret. Il est uniquement dédié à Sparshong. Je viens le remercier pour ma bataille d'hier. C'est moi et mes hommes qui nous sommes battus mais je ne peux négliger la protection d'un Dieu, après tout mes ennemis le font aussi. Et depuis le temps que je sacrifie des gorges en son nom, il ne m'a jamais déçu. Reste ici ou entre, comme tu veux.

Un baiser offert sur son front, et il entre dans le lieu de culte faiblement illuminé de quelques lueurs de bougies. Au mur, une immense gravure, face à la seule issue, confronte les entrants au Dieu Vengeur : Le reptilien Sparshong, au physique semblant humain emmitouflé dans une épaisse toge et aux traits calmes, mais menaçants, bien plus serpents qu'hommes. Si tant est qu'une représentation de lui - magistralement dessinée - puisse dégager la même impression que le vrai, alors Sparshong fait peur. Son regard soutenu et vide démontre parfaitement son manque de pitié. Il ne semble pas pour autant adepte de la violence.. et pourtant. C'est avec des lames que ses fidèles viennent prier, avec des blessures, et du sang. La chapelle est tout à fait ronde, et aux extrémités du disque formé par le sol, plusieurs têtes d'ophidiens en pierre noire semble jaillir du sol, la gueule grande ouverte.
Law retire son manteau et, comme les deux autres fidèles présents, pose ses genoux devant l'une de ces reptiles sculptures. Quelque peu fabrile, il sort de son manteau une petite fiole de sang, dont il fait sauter le bouchon et vers le contenu entre les crocs de l'animal figé, le tout coulant jusque.. jusqu'où ? Seul l'architecte du lieu le sait. Ca n'a pas d'importance : le buste droit, les mains désormais vides, et la tête baissée, Law récite sa litanie, à voix mi-basse. Il faudrait être près de lui pour l'entendre. Il raconte la force qu'il lui donne, celle de se venger de ses ennemis, de trancher la haine et l'injustice. Il lui parle comme à un ami bienveillant, le remerciant d'avoir sauvé son bras malgré cette protection de bras qui sauta sous le coup de masse d'un opposant. Il fini enfin en disant qu'il voulait qu'à jamais, il veille sur Andrea comme il veille avec sagesse sur lui, que ses Léviathans écrasent et anéantissent ceux qui voudraient s'opposer à son destin. Il termine par quelques secondes de silence, dans lesquelles il attend un parole du Dieu, puis se relève en se frottant très peu pieusement les genoux. Séance terminée. On retourne au marché, en silence.




Marché rejoint quelques secondes plus tard où, cette fois-ci, Andrea pourra se balader librement entre les étals, accélèrer ou ralentir le pas, s'arrêter où elle veut, et pourquoi pas acheter ? Si c'est son choix. Enfin, toujours est-il que Law parle. Et pas de religion. Ni de pouvoir.. Enfin, pas tellement.


J'ai longtemps pensé que certains m'étaient supérieurs. C'était la vérité, à l'époque. Ils avaient le dessus sur moi pour deux raisons. D'abord, parce qu'ils s'en donnaient les moyens. Et ensuite, parce que même si je me mettais à joure l'insoumis, tacitement, j'acceptais cette situation. Alors, oui, ils m'étaient supérieurs. Vint le jour où j'ai décidé de changer totalement cette situation. J'ai compris que je ne devais pas répéter bêtement qu'un jour, je serais leur maître. Je devais agir ! Alors j'ai agis. J'ai tout fait, tout. J'ai travaillé plus longtemps, plus dur. J'ai obtenu des faveurs, j'ai souffert plus qu'eux. Et un jour, je les ai surpassés. Pas que moralement, mais aussi socialement, physiquement. Réellement quoi. Ce n'était plus simplement dans ma tête, c'était pour de vrai. Du jour au lendemain, et grâce à ma volonté de toujours vouloir repousser mes propres limites, ces caïds étaient devenus de simples hommes de main. Ils n'ont évidemment pas supporté cette situation.

Et là, il marque une pause. Pour une fois, il ne cherche pas à donner d'effet, il réfléchis juste à ses mots.

Ils ont tous essayés de m'assassiner lâchement, d'un commun accord. Mais ils m'ont raté. Quand je les ai retrouvés, un par un, il y a eu plusieurs réactions. Quelques uns ont tenté de se dérober, de disparaître. La grande majorité a essayé de s'opposer à moi. Alors qu'est ce que j'ai fait ? Je les ai tués. Si j'en avais le temps et le pouvoir, je les faisait souffrir avant de les achever, beaucoup. J'ai tué les fuyards pour leur apprendre que s'échapper lâchement n'est pas une solution. J'ai tué ceux qui , malgré mes menaçes, se rebellaient encore, mais ça, tu comprendras pourquoi je l'ai fait. Si je les avais laissés en vie, ils auraient cherchés leur revanche tôt ou tard. Un seul, un seul d'entre eux s'est platement excusé en me voyant venir. Il s'est mit à terre, il rampait et il pleurait en disant qu'il regrettait et que maintenant il me sera fidèle. Je l'ai tué aussi. Si il avait voulu se faire pardonner, il n'aurait pas attendu que la mort soit si proche de lui. Si quelqu'un veut le pardon, il doit le chercher dès la faute commise. Il doit se rendre compte qu'il a fait le mal et faire quelque chose de concret pour mériter l'indulgence. Ce n'est pas en répétant "je suis désolé" qu'on obtient l'absolution. Ces trois cas de figure, tu les rencontreras toute ta vie. Les revanchards, les lâches, et les faux repentis. Parfois même, certains cumulent. Tu devras faire table rase d'eux. T'éloigner ne sert à rien tant qu'ils hantent ton esprit. C'est toi qui doit porter l'estocade. Je viens de le dire : Fuir ne sert à rien. Maintenant tu es forte. Tu n'as plus à fuir. Tu dois attaquer.

Là, il s'arrête enfin pour de bon, portant ses yeux sur un large panel de fruits élégamment présenté dans diverses couleurs. Malgré la température hivernale, certaines de ses denrées poussent encore très bien, et il en repète deux ou trois dans un état parfait. Hm.. Il a faim, soudain. Mais il ne s'attarde pas sur ce genre de basse considération : il veut entendre Andrea d'abord. Ses réactions.. Ses aveux ? ...
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le jeudi 30 décembre 2010, 13:10:19
En fait, ce n’était pas une finalité pour Andrea que de s’intéresser aux vêtements dans la boutique du dénommé Jalil. Ce n’était pas son côté « fille » qui ressortait, ni une ancienne habitude à se pâmer devant les couleurs et les formes d’une boutique aussi chatoyante et attractive que celle-ci. Non, car Andrea était arrivée au Japon durant sa scolarité, ce qui lui avait valu la découverte de l’uniforme. Ce tissu informe qui en rend plus d’une complexée par ce qui n’a pas lieu d’être. Cette absence de singularité, dans un océan d’écoliers ou de lycéens tristement identiques. Une mare de jupes ou de pantalons bleus et blancs était devenue son quotidien, et à la maison la jeune fille le gardait souvent jusqu’à l’heure de se mettre au lit. Le week end, une seule tenue revenait régulièrement sur son corps, simplement pour avoir le temps de laver complètement son trousseau d’uniformes. Cette culture n’était pas la sienne, et Andy ne s’était jamais réellement faite à cet habit qu’elle portait pourtant souvent, et plutôt bien. Ayant eu la chance d’avoir un physique assez agréable, la jeune fille n’avait jamais souffert d’une jupe trop courte, des chaussettes montantes qui moulaient des jambes parfois un peu trop potelées, quand le corps change. Cette idée d’uniformiser une classe de la société l’avait tout d’abord beaucoup intriguée, puis finalement Andy s’était lassée. Ce costume, à peine un déguisement, était pour elle plus une prison de tissu qu’autre chose. On ne lui laissait pas exprimer ses envies, ses impulsions. A l’école, pas de fantaisie. Elle en amenait déjà suffisamment avec ses cheveux, blonds d’origine, sa grande taille et ses yeux immenses. Elle était et resterait l’étrangère au sein d’un pays toujours amical, mais suffisamment fermé pour vous réserver un accueil des plus singuliers.

N’ayant que peu d’amies, sans doute du fait de plusieurs facteurs se rejoignant, Andrea n’allait jamais faire les boutiques avec des filles de son âge. Plus d’une fois, elle avait enviée ce groupe d’adolescentes hystériques devant des vitrines bariolées, à l’idée de faire des essayages et de devoir prendre des choix au moins aussi draconiens que celui de choisir telle ou telle paire de chaussure. Pas de connivence pour choisir une robe d’anniversaire, pas de chuchotements à propos de tel ou tel garçon, pas d’entraide pour raccourcir une jupe toujours trop longue lorsque les années lycées s’installaient ... Bien sûr, Andrea en avait souffert. Et, bien qu’on lui ait souvent servi de multiples excuses pour ne pas trop l’approcher, Andy savait bien. Elle était trop différente et attirait d’avantage les garçons que leurs congénères féminines, ce qui avait bien évidemment le don de les énerver. Son visage d’ange lui attirait autant de compliments, pas toujours très distingués, que d’insultes ou de rumeurs. Pire, l’indifférence qu’elle avait appris à endosser face à ces réactions puériles et blessantes n’avait fait qu’exagérer la chose, ses détracteurs s’étant attendus à un peu plus de faiblesse de sa part. Alors l’amitié, le partage de goûts et les après-midis entiers passés à choisir des vêtements, Andrea ne connaissait pas. Son monde, c’était l’uniforme strict et pesant de sa scolarité.

Pourquoi alors porter ce déguisement de lycéenne était resté une habitude, même après la fin de ses études ? Parce que la jeune femme n’avait pas envie de choisir seule, de s’habiller simplement pour le plaisir de le faire. Si personne ne la regardait et appréciait, alors ça n’avait plus d’importance. De plus, Seiji aimait bien à la voir encore comme une adolescente qu’elle n’était plus, et appréciait particulièrement la tenue qu’elle ne quittait que rarement. Elle était ridicule ? Oui, parfaitement. Mais on ne lui avait pas laissé la chance de ne pas l’être. Tendre la main à quelqu’un qui représente tout ce que l’on veut fuir et tout ce qui dérange n’est évidemment pas facile, et il serait bien sot d’en tenir rigueur à des enfants, en groupe qui plus est. Il aurait peut-être fallu que le père d’Andy fasse un effort et l’accompagne au moins une fois dans un magasin pour son anniversaire, au lieu de la couvrir d’argent de poche dont elle ne pouvait pas faire grand-chose, seule. Alors non, à la différence de bien d’autres femmes de son âge, Andrea n’y connaissait rien en vêtements. Seul son bon goût pourrait la guider dans ses choix, et éventuellement une ou deux approbations de Law, qu’il ne semblait pourtant pas être prêt à donner au vu de sa désinvolture totale. La jeune femme sentait bien qu’elle avait carte blanche ... et elle allait en profiter un peu. La première chose qu’elle fit fut d’extirper de la poche de son pantalon actuel une pince à cheveux légèrement abîmée par le temps. Relevant sa crinière indisciplinée et à présent totalement sèche, elle la replia et vint l’attacher derrière son crâne afin de la laisser flotter, avec moins de liberté tout de même. Simplement pour se mettre à l’aise et découvrir avec facilité le monde de couleurs qui l’entourait.

Après des essayages accompagnés de grands sourires de sa part à elle comme de celle du vendeur, appréciateur, Andy avait fixé son choix. De nombreux allers retours avaient été nécessaires entre la cabine et les rayonnages, et la jeune femme occultait totalement le monde extérieur, même celui qui l’attendait, la regardant de loin. Elle fut merveilleusement guidée et assistée dans ses choix par l’homme-tigre qui l’avait, au début, un peu impressionnée. Il se trouvait être en réalité une personne très agréable à côtoyer, discret et maladroit mais extrêmement judicieux dans ses remarques. Orientée par des goûts qu’elle n’avait pas vraiment dans ce domaine, Andrea réussit tout de même à se trouver satisfaite des tenues qu’elle avait dégagées. La première était d’avantage pour les couleurs et les formes, pour le simple plaisir de se trouver jolie. Ses longues jambes se trouvaient alors recouvertes d’un tissu rouge et orangé, formant de larges pans bouffants retenus à la cheville par un petit nœud qu’elle pouvait défaire afin de laisser flotter les pans de l’habit. Là-dessus, elle avait choisi un haut à manches longues d’un rouge plus foncé, tirant sur le grenat. Les formes étaient un peu asymétriques, et là-dedans Andrea se trouvait si pleine de vie qu’elle se reconnaissait à peine. Bien loin du simple jean et de la chemise qu’elle arborait quelques instants plus tôt, la jeune femme venait de transformer complètement son image. Encore un peu déstabilisée par ce qu’elle voyait dans le miroir, Andy hésita longuement avant de se décider là-dessus, mais décida finalement de prendre le tout, cela lui redonnant un aspect vivant qui lui manquait cruellement.

Puis son choix se porta sur une tenue bien plus pratique. Un t-shirt gris sombre, aux manches assez courtes, simple et avec un col rond qui encadrait ses épaules. Avec, un short marron vint orner ses cuisses. Avec les bottes noires légèrement montantes mais sans talon qu’elle avait remise après leur douche, seul habit venant de chez elle qu’elle portait encore, la jeune femme avait l’air prête à courir un sprint ou se fondre dans n’importe quel endroit. Parfaitement adapté à une vie qu’elle devinait exempte de sécurité totale, cet ensemble retint tout de suite son attention et fut immédiatement adopté. La suite ne fut pas aussi simple, étant donné qu’Andrea trouvait tout sublime mais ne s’imaginait pas porter d’aussi belles et voyantes tenues. Elle plutôt discrète et n’aimant pas se faire remarquer physiquement trouvait déjà que le pantalon aux couleurs chaudes était une exception ... Aussi reprit-elle des habitudes plus simples. Un pantalon noir, sans grandes fioritures si ce n’était quelques poches bien utiles, lui donnant une aisance de mouvement satisfaisante tout en épousant d’assez près sa peau. Avec, elle hésita longuement et décida donc de prendre deux hauts, l’un aux manches longues et d’une couleur bleutée qui rappelait ses yeux, sur lequel elle s’était permise un léger décolleté. Sur l’autre, c’était un vert très doux qui primait, avec une longueur intermédiaire et adaptable selon la saison. Satisfaite, Andrea garda cette dernière tenue, avec le contraste bleu et noir qu’elle aimait beaucoup, avant de se décider pour une veste assez chaude, noire doublée de rouge à l’intérieur et pourtant assez mince et légère à porter. Il ne faisait pas si froid que cela, mais sans une couche supplémentaire il était assez inconscient de sortir dehors sans plus de formalités. Une fois parée, Andrea ne décollait pas son regard de la silhouette que lui renvoyait le miroir. Elle s’y trouvait presque jolie, chose d’une extrême rareté chez la jeune fille. Sans doute l’effervescence de pouvoir se permettre de tels achats, ou la sensation d’être si bien entourée dans un domaine qu’elle ne connaissait absolument pas auparavant. Un de plus.

Si Andrea se sentit mal à l’aise d’être la seule à dépenser un argent qui n’était pas le sien ? Normalement, oui. Mais là, trop heureuse qu’elle fût, cette idée ne l’effleurait même pas. Et alors qu’elle s’apprêtait à récupérer les sacs bien chargés, qui contenaient également ses anciens vêtements, l’homme-tigre lui expliqua qu’il n’allait pas lui donner cette peine et que tout serait disponible à domicile. Le rêve de toute jeune femme ... Encore plus pour Andrea qui n’avait en temps normal aucune attirance envers ce genre d’activités. Ce fut donc les bras complètements libres qu’elle ressortit de la boutique, toute pimpante et un grand sourire naïf sur le visage. Il y avait trop de découvertes, trop de nouvelles choses pour la faire s’en départir pour l’instant. D’autant plus que, alors qu’un peu plus tôt il l’avait laissée libre de tout mouvement, Law la prenait de nouveau contre lui, pour l’emmener à présent bien loin de la place principale. Andrea se doutait un peu qu’ils se dirigeaient vers le temple dont Law lui avait parlé, et c’est avec une curiosité mêlée d’un peu d’appréhension conséquente à l’aspect religieux que prenait la balade qu’elle le suivit, s’autorisant pourtant quelque chose qui lui paraissait proprement indispensable. Se serrant un peu plus contre son bras, elle lui souffla avec une satisfaction enfantine :

- Merci pour tout. C’est ... je n’en ai pas l’habitude, et j’avais bien besoin de nouveaux vêtements.

Il sembla balayer le sérieux de ses remerciements d’un silence, ce qu’elle apprécia, avant de confirmer son impression première. Le bâtiment devant eux était manifestement le lieu de culte où il comptait se rendre, et avec toute la prévenance dont il est utile de faire cas dans ces moments, il la laissa décider d’entrer ou non. Et accompagna cela d’un baiser posé à la naissance de ses cheveux. Andrea le laissa entrer devant, et hésitait encore. L’histoire du Dieu auquel il faut faire des sacrifices, ce n’était pas trop son truc. Déjà que l’idée de Dieu en elle-même est assez difficile à accepter pour une jeune femme qui n’en a vu aucune manifestation dans la pourriture qu’est l’homme, mais alors admettre qu’il y en a plusieurs et qu’ils sont réellement présents dans ce monde étrange ... Toutefois, elle entrera. D’un pas hésitant et bien après Law, mais elle entrera. Franchissant avec un respect teinté de prévenance l’alcôve qui invite les fidèles à découvrir plus avant le temple, Andrea se dirigea bien vite contre un mur juste à côté de l’entrée. Hors de question de s’aventurer plus loin, encore moins de participer à un culte dont elle ne sait pas grand-chose. Mais cela l’intéresse, puisque Law est concerné. C’est donc en tentant de conserver l’esprit ouvert qu’Andy laisse voguer son regard sur le bâtiment arrondi, le cercle étant le symbole de la divinité, quelle qu’elle soit, suppose la jeune femme. Ce lieu froid et vide lui donnera tout de même un frisson non retenu, devant le carrelage qui non seulement avait l’air glacial mais qui dégageait également et réellement une impression de froid venu d’ailleurs. Peu rassurée, Andy se colla un peu plus contre le mur, comme si elle voulait s’y fondre. Un peu comme les statues qui en sortaient.

Ou pas exactement, mais quelque chose du genre. La jeune femme ne grimaça pas devant les têtes peu rassurantes des reptiles -elle ne se serait pas aventurée à parler de lézard géant-. Enfin, presque pas. Seule sa gorge se noua brièvement, l’obligeant à déglutir un peu plus fort que prévu. Heureusement, tout le monde sauf elle était concentré sagement sur leur rite et leur prière. Dont Law. Un peu plus loin, l’homme qu’elle apprenait à connaitre était sérieux, le visage fermé en un mutisme et une concentration propre au culte que l’on peut vouer à une quelconque divinité. Elle arriva alors qu’il versait quelque chose dans la gueule menaçante d’une des statues fixées au mur. Andrea réalisa alors deux choses. La première, elle ne voulait pas savoir ce qu’était ce quelque chose. La seconde, crisper ses mains contre le mur froid n’allait pas la détendre, loin de là. En fait, la jeune femme s’était presque attendue à voir le serpent, ou quoi que ce fut, déglutir. C’était étonnant comme les artistes de ce monde revenaient aux valeurs fondamentales du réalisme, alors que sur Terre on y préférait de loin l’art moderne. Pas si mauvais, finalement, ce qu’elle avait quitté. On n’avait pas idée de rendre des grosses bêtes aussi dangereusement réelles. Regrettant presque d’être entrée, Andrea hésitait à faire un pas sur le côté et se retourner pour patienter dehors. Mais, alors que ses jambes commençaient à se dire que c’était effectivement une bonne idée, celui qu’elle attendait se redressa et se dirigea vers elle.

Sans dire un mot, respectueuse du moment sans doute important qu’avait dû être pour Law cette prière, la jeune femme attendit de retrouver le marché pour reprendre un rythme cardiaque stable. Pas forcément impressionnable, l’aspect religieux et extrêmement sérieux des regards reptiliens l’avait quelque peu ébranlée. Pas assez, cependant, pour qu’elle ne retrouve pas l’émerveillement premier une fois les pieds de nouveau en contact avec les dalles de la place, lesquelles étaient jonchées, comme dans tous les marchés, de feuilles de salade, d’un ou deux fruits qui étaient tombés d’un étal ... Bref, la vie. Bien loin de quelque chose qu’elle ne pouvait qu’observer sans comprendre, peu sûre d’en ressortir totalement assurée. Alors qu’il parlait, Andy buvait ses paroles tout en ne pouvant s’empêcher d’ouvrir des yeux attentifs, se retournant parfois sur une babiole dont elle ne devinait pas l’utilité, sur une friandise qui semblait délicieuse ... Mais ne perdait pas un mot de ce que Law racontait. Ce par quoi il était passé pour arriver en haut de son empire, le nettoyage qu’il se devait d’opérer sans aucune pitié s’il voulait conserver son pouvoir et sa vie, les choix qui n’en étaient pas forcément ... Son cœur à elle se serrait, consciente que ce n’était pas si évident de se hisser sur un trône instable, friable. D’autant plus qu’il lui confiait tout avec une facilité déconcertante, cherchant parfois la manière de s’exprimer, mais toujours avec assurance et simplicité. Ce qu’elle admira, et apprécia à une valeur dont il n’avait sans doute pas idée. Lorsqu’il eut fini, elle ne répondit pas en de grands discours. Ils étaient inutiles, d’autant plus que la seule chose qu’elle pensait vraiment se résumait en peu de mots.

- Je suis rassurée de n’avoir pas à compter outre mesure sur la chance pour te voir revenir. Je préfère largement te faire confiance, c’est beaucoup plus sûr. Et j’ai toute confiance, tu es encore plus fort que je ne pensais. Y’a-t-il quelque chose qui t’atteindra, un jour ? Une faille dans cette armure inébranlable ...

C’était plus des questions de rhétorique, et la jeune femme n’attendait pas de véritable réponse. Pourtant, c’était clair que la moindre faiblesse serait exploitée contre lui, et elle en priait presque pour qu’il n’y ait rien qui l’atteigne jamais. Andrea ne pouvait s’empêcher d’être inquiète. Quand on vient d’un monde sécuritaire et où la mort est quelque chose de grave et réellement traqué et puni, on ne peut s’habituer à la violence partout, à l’empire sombre et sinueux qui s’infiltre dans une ville qui ne le soupçonne pas toujours. Etre plongée au cœur de ce monde d’affrontements et de danger n’était pas si facile que cela à accepter, quand on avait quelqu’un à qui se raccrocher, quelqu’un à attendre. Puis, quand le silence s’installa, il se fit pesant sur le cœur de la jeune femme. Lui se confiait si facilement à elle qu’Andy se sentait mal à l’aise, avec ses secrets et ses doutes. Et tout d’un coup, le marché n’eut plus aucune importance. Le prenant sans rien dire par la main, elle l’entraina légèrement à l’écart. Au lieu du centre de la place, ils occupaient à présent un bord, là où les oreilles indiscrètes ne pouvaient pas réellement les écouter sans rien en laisser paraitre. Et dans une grande inspiration, Andrea décida qu’il était venu le moment de faire sortir un peu d’elle, à travers ses lèvres incertaines. Même si cela pouvait faire très mal, il n’y avait plus aucune hésitation à avoir. Même si l’endroit n’était pas le plus adéquat, le moment l’était. Et puis, il était évident que Law attendait quelque chose d’elle. Même s’il ne la forcerait jamais, elle le savait. La seule solution était donc de s’obliger elle-même à commencer à rebondir, doucement d’abord. Puis plus franchement.

- Je crois que, si je suis ta logique, j’ai quelqu’un à étriper. Le problème c’est que chez moi ce n’est pas quelque chose que l’on fait aussi facilement ...

Ça, c’était l’introduction. Une simple phrase qui l’obligeait à continuer. Car si elle s’arrêtait, il demanderait des précisions. C’était un peu son travail à elle de le devancer et de prendre un peu sur elle pour continuer. Même si chaque mot lui arrachait la bouche, même si les mots semblaient poison sur ses lèvres au fur et à mesure qu’ils les franchissaient avec difficulté.

- Je t’avais parlé d’une dette. Un poids, qui me pèse chaque jour depuis deux ans. Qui s’est allégé hier soir. C’est une histoire de famille ... Mais je crois qu’il va falloir que je commence par le début du commencement.

Cela paraissait même plutôt logique, pour qu’il comprenne. Et puis, comme ça elle pourrait toujours s’arrêter en route ... Non, Andrea ne voulait pas accepter de limiter ce moment si plein d’importance, tout à coup. Se confier à quelqu’un qu’elle connaissait si peu ... Et pourtant, Law comptait plus pour elle en deux jours à peine que tous ceux qu’elle avait rencontrés auparavant dans sa petite vie tranquille.

- Tu as remarqué que ma langue d’origine est le finlandais. J’y ai vécu plusieurs années avec mes parents, mais je suis arrivée au Japon avec mon père à mes dix ans, au divorce de mes parents. Et mon demi-frère. Seiji, né d’une précédente union, m’attendait là-bas.

Son ton était lourd, son visage se fermait. Mettre des mots sur quelque chose qui la faisait autant souffrir lui était difficile. Même après deux ans, surtout après deux ans. Elle s’était habituée à ne pas ressentir, et les émotions qui affluaient depuis la veille rendaient le mélange difficile. Car les souvenirs, au lieu de glisser sur elle comme des gouttes d’eau sur une pierre, lui entaillaient à présent le cœur. Comme autant d’aiguilles acérées chauffées au fer rouge, Andrea ne put s’empêcher de refermer ses bras autour de ses épaules. Comme pour se protéger, et ne rien laisser filtrer. Puis elle se reprit. Il était impératif de s’ouvrir maintenant, alors qu’on le lui proposait. Sinon elle ne le ferait jamais. Sinon la douleur reviendrait, recommencerait, et l’empêcherait totalement de faire revenir la part d’Andrea qui existait encore au fond de ses yeux fantomatiques. Un cercle vicieux qui la détruisait avant de lui faire espérer, et de la reconstruire.

- C’était ... ma deuxième moitié. Quelqu’un de formidable, qui prenait soin de moi, remplaçant l’affection que mon père distillait dans les bras d’une nouvelle venue. Des années merveilleuses, malgré la barrière difficile de la langue et des coutumes. Il ... me protégeait.

Son regard se ternit un peu, le dernier mot s’étrangla dans sa gorge. Un voile passa, et Andrea, sans le savoir, était dans sa douloureuse et lointaine souffrance belle à en pleurer. Son visage se figeait dans une expression très lointaine, celle qu’elle avait eue ce jour-là. Comme si son esprit débloquait le temps qu’elle avait essayé d’arrêter, pour revenir deux ans auparavant. Mais ce n’était pas vraiment le moment de relever la tragique beauté que cela lui conférait, aussi n’est-il pas utile de s’attarder sur la finesse cruelle de ses lèvres, tordues en une grimace qu’elle voulait camoufler tant bien que mal.

- Et j’ai eu dix-sept ans. Le jour de mon anniversaire, Seiji a ... changé. C’était pitoyable. Je crois que je n’aurais peut-être pas dû le laisser croire, pas l’encourager ... Je ne sais pas bien ce que j’ai fait, mais tout a basculé.

Andrea se sentait misérable, à ne pas mettre les bons mots, à ne pas expliquer, prévenir à quel point elle avait été actrice de cet instant oh combien regretté.

- Imagine deux minutes une personne de confiance, une salle vide dans laquelle aucun invité ni gâteau d’anniversaire ne t’attend. Un homme, une femme.

La voix se perdit de nouveau. Andrea fit un énorme effort pour prendre sur elle, ne pas craquer. Son visage se ferma un peu plus, sa mâchoire se serrant sous la douleur et la persévérance. Ne pas se rendre ridicule, essayer de ne pas paraitre pitoyable et de tomber dans le drame.

- Il a brisé quelque chose, qui m’a permis pendant deux ans de supporter qu’il recommence. Si je découvre tant de choses avec toi, c’est que depuis lors j’avais tout enfermé quelque part. Pas de larmes, pas de cris. Une façon pour moi de lui payer ce que je lui devais pour son amour, pour ses soins, pour sa protection. Tu comprendras que je n’ai pas vraiment l’habitude de la tendresse et de la retenue. D’autant plus que pour oublier et tout faire passer, il m’a suffi d’ouvrir les jambes. Encore, et encore. Me donner au premier qui passait pour me permettre de ne pas rentrer chez moi, un soir de plus. Essayer de se perdre ailleurs. Ce n’était rien que de donner cette ... chose.

Elle désigna son propre corps d’une moue dégoûtée et distante. A présent, son esprit se replongeait dans son fonctionnement. Les mécanismes de défense qu’elle avait façonnés pour se protéger. Qui normalement doivent rester inconscients, mais qui à présent lui apparaissaient clairement, déchirant sa logique, réunifiant deux entités qui ne se côtoyaient plus. Une frontière se brisait et un nouveau monde renaissait à l’intérieur d’une frêle jeune femme, qui tenait à peine sur ses jambes.

On peut trouver la culpabilité d’Andy ridicule, puisqu’il était évident qu’elle n’y était pour rien. De même, on peut s’étonner de son envie de trouver des excuses à Seiji, de le justifier, d’expliquer qu’elle avait sa part de responsabilité et que c’était plus un crime à deux auteurs qu’à un seul. Mais quand on est réduit à moins qu’un être humain, à moins qu’un animal ou qu’une poupée de chair, que reste-t-il à part la sensation d’exister, au moins pour une personne ? Alors que tout le monde s’éloignerait de celle dont on connaitrait le passé tourmenté, au moins le bourreau prend-il soin de sa victime. Il la chérit, l’entretient, la détruit puis la reconstruit pour s’en amuser encore. C’est la seule silhouette à accepter entièrement la réalité. Andrea était persuadée que personne ne pourrait prendre ce qu’elle était vraiment, tout savoir sur sa bien pitoyable existence, et la chérir tout de même. Au moins, Seiji savait. Il l’accompagnait, lui susurrait ce qu’elle voulait entendre. Il avait toujours été là pour elle, contre une bien maigre rétribution. D’ailleurs, Andy n’arrivait plus, après deux ans de traitement éhonté et manipulateur, à voir l’horrible et cruelle réalité de sa condition. Soupirant en retenant des larmes qui n’avaient pas lieu d’être, Andrea jeta un regard sur le marché qui les narguait de loin. Ses paroles passaient pour celle d’une martyre, c’était ridicule de se faire plaindre de cette manière. La jeune femme avait l’impression de faire passer Seiji pour le méchant et l’unique responsable de l’histoire, alors même qu’elle ne se rendait pas vraiment compte que c’était le cas.

- Mais ... ça va. Je suis toujours là, et puis je t’ai maintenant.

Et elle jeta vers lui un regard teinté d’humidité, alors que ses lèvres s’étiraient dans un maigre sourire, un peu tremblotant. Elle ne savait plus bien si elle avait besoin de son visage à lui pour arriver à fondre en larmes ou pour parvenir à y résister. En tous les cas, c’était devenu un indispensable. A peu près autant que celui de retourner chez elle si elle trouvait une once de pitié dans le regard de Law. Il suffisait d’un instant et elle ferait demi-tour. Seiji devait l’attendre, encore une fois. Et il était si lointain mais si proche qu’y retourner ne serait pas grand-chose. De plus en plus, l’idée germait alors qu’un silence s’installait, palpable, rempli d’une tension que la jeune femme faisait naître de ses muscles tremblotants.

On aurait dit un chaton abandonné sous la pluie, le poil triste et le regard suppliant.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mardi 04 janvier 2011, 00:00:11
L'histoire avait de quoi déstabiliser. Et pour cause. La raison au malaise, à cette gêne, à ce qui la rendait différente des autres garces humaines, c'était un profond traumatisme, ancré depuis des mois et des mois en elle, et chaque exécution d'un outrage supplémentaire sur cette petite par ce cinglant immoral qu'était son frère ne faisait sans doute que la conforter dans sa position, celle d'une morte, un cadavre emmitouflé dans les épais rembourrages d'un cercueil qu'elle a apprit à apprécier, et où certains, inconsciemment coupable, complice du crime de ce Seiji, jetaient des mottes de terre pour remplir un peu plus son trou. Mais loin de lui, loin de son monde, elle était sorti de sa léthargie morbide. Elle venait d'ouvrir les yeux, et de briser le couvercle du sarcophage. Malgré ce qu'elle eut pu croire, elle n'était pas embaumée, et tout ses organes étaient encore bien présents. Oui, elle vit, ou du moins, elle le peut. Elle était encore dans la phase où, se mettant à 4 pattes, l'astucieux enterré tente de faire pression avec son dos pour soulever toute la masse du tombeau et tenter de s'en extirper. Law, lui, ne fait que l'encourager. Il ne doit pas l'aider, surtout pas. Si l'animal sorti de l'oeuf n'affronte pas les étapes naturelles de son développement, les plus élémentaires obstacles et les terribles dangers, alors une fois grand, il sera trop faible pour survivre efficacement. Mais pousser avec ses muscles pour faire de son corps un ascenseur qui soulève des centaines de kilogrammes d'un sol d'argile, ce n'est pas le plus éprouvant, malgré les apparences. Bientôt, elle devra manger toute cette boue infecte, elle devra y nager, s'y faufiler, exécuter des efforts démesurés pour conduire son corps à l'air libre. Quand enfin, elle respira, elle sera sale, épuisée, moralement atteinte. Mais neuve. Et grandie. Puissante. Tout le monde l'aura cru morte, mais elle venaient de prouver à tout un univers qu'elle était plus forte que la mort, plus forte même que la terrassante volonté commune.

Law ne se projetait pas en ce bourreau. Ca n'avait rien à voir. Évidemment.. Il fallait bien qu'il se trouve différent. Il détruit pour reconstruire. Ses viols, ses tortures, ses meurtres sont amplement mérités, toujours. Il ne laisse jamais une fille souillée de sa luxure dans une rue, à demie-évanouie, pleurant toutes les larmes de son corps. Il la garde toujours près de lui, pour qu'elle puisse apprendre à son tour à devenir plus forte que ça, et voir en ce Law quelqu'un de meilleur qu'un vulgaire agresseur. Oui, il se dédouane. Il se fait pardonner, en quelques sortes. Comment pourrais-t-on arriver à faire preuve d'indulgence envers lui ? Il pense réussir.. Il espère.. Non, il réussit. Pour preuve qu'aucune encore n'a tenté de le tuer. Il sait qu'elle ne fomente rien. Il détecte les moindres signes avant-coureur d'une trahison. Il les surveilles toutes et tous et connaît leur fidélité. Il les a sauvé, les a fait devenir plus grand. Ils sont tous plus au moins sortis d'une poubelle ou d'un caniveau et sont plus ou moins heureux désormais, avec un travail plus ou moins stable et un avenir plus ou moins sûr. Tout ça grâce à un bienfaiteur (ahem), j'ai nommé Law.

Son visage s'était fermé. Ses traits s'étaient crispés. Là encore il tente de réprimer les instincts primals, qui lui hurlent de dévaster le pâté de maison, se munir de toutes ses escortes et d'aller incendier tout le Japon jusqu'à débusquer ce sale rat de Seiji et lui faire manger les pires souffrances de l'Enfer, de sorte que même le purgatoire devienne un lieu de plaisance une fois qu'il y sera condamné.


C'est un poids que tu garderas à jamais sur toi. Même ici, dans un autre monde, loin, protégé par tout ton environnement nouveau et surtout par moi, il restera quelqu'un qui t'as cassé, Andrea. Je ne vois qu'une solution.

Non, en vérité, il en voit quatre. Enumérons-les une par une.
   
   1 - L'approche gentille.
      Car Law sait être gentil si il le désire. Ca ne consiste en rien de plus qu'aller le voir et lui demander de s'excuser, en faisant mentalement pression sur lui quitte à l'écraser. Finalement, le japonais lèchera les bottes d'Andrea car face à Law, on finit toujours par se soumettre. Inconvénient de cette situation : Trop léger. Bien trop.

   2 - L'approche moins gentille.
      Car Law aime être "moins gentil". Il lui fait peur, lui met une mandale. Il renverse toute la maisonnée, menace, rend impotent par sa force. Il lui fait comprendre qu'il a péché et qu'il doit désormais se repentir. Ca manque de légèreté, de finitions, mais en général c'est plutôt efficace sur les esprits faibles, ceux qui ne sont pas assez habitués à la violence et à la peur. D'autant plus que le bourreau se croit en position hiérarchique haute. Il domine ? Lui montrer qu'il doit courber l'échine saura le mettre vite fait sur de bons rails.

   3 - La torture.
      Physique. Mentale. Le faire souffrir avec cruauté pour lui détruire totalement l'esprit. La meilleure des tactiques. Pas besoin de descriptif. Law laissera voguer son imagination sur les flots du sadisme.

   4 - La mort.
      Qu'il n'exécutera pas, tout simplement parce que le châtiment est trop gentil. Et si le monde, après la mort, était plus beau que sur terre ? Il est hors de question de l'assassiner ! Non, cette solution est dores et déjà rayée de la liste.



Le coeur de l'Impitoyable balance, rien qu'un dixième de secondes. On n'aura même pas capté la moindre pointe d'hésitation qu'il avait déjà choisi. Mais le vote est à bulletin secret, alors Andrea ne saura pas ce qu'il a choisi. Mais vous, lecteurs et lectrices, vous voulez savoir, n'est-ce pas ? Allez, je spoil. Ceux qui ne veulent pas savoir sautent la fin de ce paragraphe !
Il a tranché : Il est à cheval entre le 2 et le 3. Il compte lui faire goûter quelques menus délices masochistes, tout en lui montrant son pouvoir, pour le faire se repentir totalement.
Une autre question est lancée : Celle de l'implication d'Andrea. Elle ne doit surtout pas rester aveugle. Plus jamais elle n'aura les yeux bandés ! Alors.. Doit-elle être simplement spectatrice, ou actrice ? Si elle doit agir dans le processus de décomposition de l'âme de celui qui l'a maltraitée tout ce temps, l'expérience sera assez traumatisante pour qu'elle puisse surmonter à jamais le choc des épreuves passées. C'est tout à fait ce qu'il veut. Mais le voir et l'entendre s'excuser, demander pardon, manger la poussière comme un animal pitoyable, n'est-ce pas suffisant pour qu'Andrea comprenne et transcende pour toujours ce qui l'a un jour rendu si peu humaine ? Avec si peu de sentiments, d'envies ? Peut-être pas.
Law avisera sur le moment.

Équipé comme il est, il sort d'une poche intérieure un petit carnet et un crayon en bois à mine très fine. Il prend une page au hasard, et le remet entre les mains d'Andrea.


Je veux que tu écrives là-dessus ton adresse. Celle où je pourrais voir ton frère. Je veux pouvoir le trouver. Mais, ne t'inquiètes pas, je ne lui ferais rien sans que tu ne sois au courant, et tu pourras toujours m'interdire de faire quelque action. Mais j'ai besoin de savoir. D'accord ?

Et avant qu'elle ne note quoique ce soit, il la prend contre son buste, le regard se perdant dans une étendue animée qu'il ne regarde même pas. Comme si sa vue venait de s'éteindre, que ses prunelles mourraient dans une affection soudaine et déchirante.

Oui, tu m'as. Je suis désolé pour toi Andrea. Tu retrouveras ce que tu as perdu, et tu découvriras des tas de nouvelles choses. Considère que tout est déjà terminé. Pour toujours. Tu n'auras plus à devoir vivre sous la contrainte, et tu n'auras plus à pleurer. Je t'en fais le serment. Et tu pourras toujours te confier à moi si tu en ressens le besoin. N'hésites jamais.

"Considère que", ça veut dire que ça ne l'est pas, mais que ça le sera sous peu. Et là, en l'occurence, le Law sait qu'il va lui faire oublier tout ce qui lui mine l'esprit, comme il se l'était promis au début.
Amis lecteurs/lectrices, pensez-vous que celui-ci réussira ? Evidemment ! Il n'a jamais raté aucune de ses entreprises. Celle-là est sans doute la plus ardue, car il n'osera pas la blesser. Peut-être le faudra-t-il ? Il devra à tout prix éviter. Elle a déjà trop souffert - même si elle s'est détachée de la souffrance.

Et c'est dans cette position où Andrea ne peut le regarder qu'il lance, inconsidérément :


Je t'aime. Beaucoup. Enfin je.. Bref, viens.


Et hop, l'air de rien, il la défait de son emprise et l'entraîne par les épaules sur les étalages qu'ils venaient de quitter. Gêné sans doute. Mais il ne doit pas le montrer. D'ailleurs, il ne rougit pas. Pas du tout.


Du côté de Law, cette entrevue, amis, manque cruellement de sentiments. Andrea a tout déballé et lui reste assez peu démonstratif. Au final, il devient un peu plus lui en sa présence, ce qui est une excellente nouvelle.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mardi 04 janvier 2011, 15:42:54
L’opinion générale commune tente de nous faire croire que nous vivons dans un monde de haine et de cupidité. Mais ce n’est pas tout à fait exact. Il me semble, à moi, que l’amour est partout. Souvent, il n’est pas exprimé clairement ni signifié avec une pancarte mais, définitivement, il est là. Les pères et leurs fils, les mères et leurs filles, les maris et leurs femmes, compagnon, copine, vieil ami qu’on n’aurait pas vu depuis des lustres ... L’amour actuel coule de tous les pores de notre bonne vieille planète. Et même des autres. Qu’on nous parle de violence, de cruauté et de tortures, l’amour en vient toujours à bout. On a vu des miracles se produire par la simple force de la foi en un seul être, par l’adoration que l’on porte à quelqu’un de Grand. On a vu des résistances se créer par la seule énergie de l’amour, alors que l’on ne vienne pas nous parler de chose plus forte encore. Les plus beaux actes sont faits d’amour, qu’ils soient pour un ami cher ou la femme de sa vie. Les plus beaux sentiments en sont directement inspirés, et il n’y a pas de plus douce musique que celle de l’extase émotionnelle procurée à la simple mention de son nom. Tant de délicates manifestations aussi criantes que naturellement discrètes, merveilleusement orfévrées par son créateur. On dit souvent qu’il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour.

Mais l’Amour, qu’est-ce que c’est ? Un mot à la grande majuscule imposante qui se veut forcé de toutes les idées qu’on lui porte, de toute l’attention qu’on lui offre. Ce n’est rien de plus qu’un sentiment, qu’une émotion. Parfois fugace, il ne commence ni ne finit comme on peut parfois le croire. Il est là, partout, évident. Tapi en chaque cœur il sommeille en attendant son heure, impatient de s’exposer au grand jour et au regard des curieux qui ne connaissent pas encore ce frisson, l’étendue de cette chaleur qui prend au cœur et ne lâche plus rien. C’est les beaux yeux de ce garçon qui passe, les longues jambes colorées de la voisine. C’est la tiédeur d’un rayon de soleil au sortir de l’hiver, mais aussi la simple beauté d’une nuit enneigée et silencieuse. L’amour c’est un secret dévoilé à tous, qui partagé se grandit et se rengorge d’une puissance proportionnelle à sa vivacité. L’amour originel explose en milliers de fragment et se loge dans l’esprit de chacun, germant tranquillement comme une fleur que l’on arrose de ses expériences, de ses hésitations et de ses découvertes. Un trésor qui se partage. La graine fleurit, s’ouvre avec magnificence et ce n’est qu’une fois installée qu’on la remarque, le jardinier étant alors bien incapable de la déloger. Les racines sont devenues trop profondes, et sectionner la partie visible n’aura pour conséquence que celle de faire souffrir le cœur responsable de toute cette floraison. Un amour nouveau est d’autant plus robuste qu’il est teinté d’espoir et de naïveté, et l’en arracher devient impossible. C’est sans doute la plus grande force de l’univers, qui ne cède ni ne recule devant rien. C’est à peine s’il sait se cacher pour se préserver. Comme une promesse de fragilité.

L’Amour, c’est une promesse. C’est la clé des secrets d’une âme qui s’offre totalement à l’autre, c’est l’offrande ultime qu’on ne peut vraiment refuser. La consécration finale, ou celle qui va ouvrir une porte et faire réellement débuter la vie. Car la vie et l’Amour sont la même chose, l’un sans l’autre ne peut exister et au premier cri de l’enfant qui nait, il y a cette tendresse caractéristique, ce besoin irrépressible de s’attacher à sa mère, d’y trouver réconfort et sureté. Tout homme en a besoin, chaque femme l’attire à elle. Vérité universelle, cet état de fait est sans doute le seul auquel il faut croire partout et en toute circonstance, puisqu’il n’abandonne jamais, même dans la trahison ou la haine. C’est l’émotion qui gouverne les passions, les impulsions et les conflits. La raison de tout, sans que l’on puisse trouver une raison à l’Amour. Car il est sa propre explication, son propre support. La raison de l’Amour, c’est qu’on aime. Jamais personne ne pourra le faire disparaitre, il existera toujours dans les cœurs de tous, même du plus impitoyable être vivant sur cette terre, ou une autre. Contrairement à ce que l’on croit, ce n’est pas toujours une faille et il peut incarner une force, une puissance incontournable qui justifie la cruauté et les crimes de sa seule existence. C’est donc en toute neutralité qu’il s’impose, n’étant qu’un outil que chacun a à sa disposition. Ce n’est pas l’Amour qui est bon est mauvais, mais l’usage qu’on en fait. Il peut se faire bataille, il peut se rendre guerrier ou au contraire réconciliations et bonheur.

L’amour, c’est le bonheur. Parfois. Mais aime-t-on vraiment si l’on ne connait pas le bonheur ? Sans doute Andrea eut-elle aimé avoir cette réponse, puisque son esprit devait très certainement se pencher sur cette question logique. Mais Andrea était bien lointaine de cette préoccupation, isolée dans un monde qu’elle voulait sien et dans lequel personne ne pouvait faire un pas. Le vide dans ses yeux reflétait celui de son cœur, asséché et privé de tout oxygène. Elle dépérissait sans en laisse beaucoup paraitre, mourant à petit feu dans la trop grande violence des souvenirs alors que son âme était à nue, que ses défenses étaient à terre. Il ne lui restait plus aucune protection si ce n’était Law, que ses yeux ne voyait plus. Même lui s’effaçait peu à peu devant la puissance dévastatrice de sa perdition. Sans doute pourra-t-on dire que, temporairement, la jeune femme perdit le contact avec son esprit. Sa raison venait de rendre le drapeau blanc et laissait place à la folie de ses pensées demeurant secrètes, la poupée qu’elle était à présent demeurait inerte tandis que sous son crâne, la bataille commençait. Ses ressentis, leur expression extérieure, tout ne serait que supposition puisque l’on ne lit rien d’autre sur son visage que le profond désespoir dans lequel elle est plongée. Aussi, pour un instant, me permettrais-je de rendre mon rôle de narratrice pour vous laisser entrer dans la tumultueuse rivière qu’est la pensée d’Andrea Leevi.


Tu as tué Andrea.

J’ai mal dans la poitrine. Je ne savais pas que le corps pouvait aussi comprendre ma tête. Je ne pensais pas que la souffrance physique pouvait relever d’une douleur purement psychologique. Je m’en fiche. Je n’ai pas vraiment mal, en fait. C’est comme si on prenait mon corps, en l’écartelant d’une violence inouïe et sans prévenir puis que l’on avait pansé mes blessures. Chacun de mes muscles me fait mal, d’un élancement sourd et insupportable, la seule possibilité de le faire comprendre serait de hurler. Mais ça ne suffirait pas. On me broie le cœur, si bien que j’ai déjà l’impression qu’il m’a été arraché avant d’être livré en pâture à ceux qui aimerait s’en repaître. Comment pourrais-je expliquer en mots ce que seuls mes yeux croient voir ? Ce désert au ciel sombre, fait de sel crissant sous mes pieds. Le sel des larmes de ceux qui sont passés ici, de ceux qui ont abandonné tout espoir d’en voir un jour le bout. Le désespoir à l’état le plus pur, dans son expression la plus évidente. La peur, la souffrance, l’errance. Le sol sous mes pieds est instable, je tombe sans cesse dans cet océan qui me donne soif, me dessèche et arrache ma peau petit à petit. Les cristaux déchirent ma chair, entament mon épiderme rendu fragile par l’acidité de l’air. Je me noie dans cette eau solide et venimeuse, dans ce monde hostile et brutal. Les souvenirs qui hantent ce lieu que je ne connais pas m’assaillent, mon esprit se tord et je ne vois plus rien qu’une sombre obscurité qui me tend les bras.

Je suis fatiguée de croire qu’il y a un moyen de s’échapper, je suis lasse de serrer les dents pour contenir le mal qui me ronge depuis deux ans sans que j’en prenne conscience. Car il a continué, ce démon vengeur que j’ai voulu arrêter de voir. Maintenant qu’il se tient devant moi, avec son sourire satisfait et un bout de moi dans sa main dégoulinante de mon propre sang, je sais qu’il ne m’a jamais quittée. Je suis trop précieuse, et je comprends alors seulement pourquoi chaque jour je me trouvais plus indifférente, pourquoi la mort et le risque ne m’importaient pas. C’était sous son impulsion, vil démon qui a presque fini son repas et rêve d’un autre hôte, souhaitant alors s’extraire de mon corps en miettes. Mais avant cela, la consécration, l’aboutissement de tant de semaines de douleur sourde ignorée. Réunir mon corps et mon esprit ont rendu les deux vulnérables alors qu’auparavant, livrer l’un permettait la survie de l’autre. Les retrouvailles se font en grandes pompes, et seules mes idées se déchirent, naissent et galopent sous mon crâne alors qu’à l’ordinaire, c’est cette enveloppe à présent immobile qui s’activait, me laissant en paix. Il fait noir, maintenant que j’ai ouvert les yeux sur la réalité de ma pauvre survie, de cet état que je croyais sûr et protecteur. Il fait noir sous mon crâne, c’est peut-être l’heure de fermer les yeux et de se laisser aller au cauchemar.

Viens te coucher, ne me laisse pas dormir seule. Je ne pourrais pas cacher totalement le vide que tu as laissé, je n’ai jamais voulu que ce soit si froid. Je préférais l’indifférence et l’instabilité. Maintenant, il ne me reste que mes yeux pour pleurer et une image de toi qui s’éloigne, le seul qui ait jamais accepté que je sois moi. Tu m’as privé de tout mais tu m’as offert une vie exempte de souffrance, tu m’as protégée pendant sept longues années alors que ce n’était pas à toi de le faire. Je me souviens de la brosse que tu passais dans mes cheveux le soir en racontant une quelconque histoire qui couvrait les bruits provenant de la chambre de papa et de sa nouvelle amie. J’étais encore jeune, et ta voix me passionnait tant que je n’en ai pris conscience que bien plus tard. Te rappelles-tu de mon conte favori ? Raiponce aux longs cheveux qui, enfermée par celle qu’elle croit être sa mère, ne retrouve le bonheur d’une famille unie et aimante qu’après avoir découvert son prince charmant ? Tu étais ce prince, même plus tard quand tu as commencé à grandir. Même après, après mon anniversaire. Tu venais toujours me trouver le soir pour apaiser mes insomnies et attendre que je m’endorme. Quand tu revenais au beau milieu de la nuit, j’attendais que tu t’attardes à mon chevet pour me souhaiter de beaux rêves. Même si après, tu me réveillais et faisais ton affaire avant de t’en aller. Ce n’était rien, tu n’avais juste pas assez bu pour me dire que tu m’aimais. Parce que tu m’aimais.

Je ne peux m’en tenir qu’à toi, tu es mon port d’ancrage, ma référence, ma sécurité. Celui dont les prunelles ont toujours brillé sur mon image, le seul qui ait pris le temps de s’intéresser à la petite Andrea. Sans toi, dans ce monde, je ne serai rien de plus qu’une étrangère pas à sa place, une paria qui ne parle pas la langue et qui en oublie des coutumes obscures et compliquées. Tu étais un père, un frère, un meilleur ami et un amant. Tu étais peut-être trop, mais c’était indispensable pour moi que tu ne t’éloignes pas. Et je ne t’ai pas repoussé, jamais. Je t’ai laissé me posséder encore et encore, avec la force et la passion que je te connaissais. Tu m’étreignais si fort que je voulais croire à un amour pas comme les autres mais ayant le mérite d’exister. D’une certaine façon, tu m’aimais. D’une certaine façon, je t’aimais. Enfin, je crois. Je le croyais.

Je me demande ce qui ne va pas chez moi. Tout à coup, je ne me souviens plus de tes paroles gentilles, celles que j’étais persuadée d’entendre toujours quand ça n’allait pas. Je ne revois plus la tendresse que je croyais te savoir utiliser. Où sont passés mes bons souvenirs de toi ? Est-ce le temps ou les hommes qui n’ont plus le temps de passer le temps, qui m’ont dérobés ces chères images emplies de souvenirs, de mon enfance à maintenant ? Il y avait dans le temps des fleurs qui poussaient dans le jardin que nous n’avions pas, mais le temps a passé et seules restent les pensées. Et dans ma main, comme dans la tienne, il ne reste rien.

Je ne vois plus rien, n’entend plus rien. Je me souviens à peine où je suis, avec qui. Ce que j’ai dit, ce que j’ai fait. Et aucun son ne me parvient plus, me laissant seule dans le terrible et effrayant espace noir et vide qu’est mon cœur.

Andrea te tuera.



Elle tente de fuir, se débat contre elle-même et, inconsciemment, désire revenir en arrière, ravaler ses paroles et demeurer transparente, sans consistance, si c’est le prix pour apaiser ça. Tout plutôt que d’avoir mal ? Préférer se cacher sous terre en attendant, en vain, que quelque chose passe et lui reprenne ses souvenirs ? Andrea sait bien qu’il est trop tard pour s’en retourner. Maintenant que les mots sont formulés, elle ne peut plus se convaincre que son imagination et que sa culpabilité lui jouent des tours. Il devient alors impossible de s’échapper, son cœur plaqué aux épingles dans sa poitrine, sans aucune défense ni artifice. Mis à nu, sous le joug des mots qui ont franchis la barrière de sa conscience. Andy a mal, mais c’est le coût à accepter pour avancer. Et, elle se l’est promise, elle avancera. Reprenant alors peu à peu la maîtrise de son esprit, la jeune femme entame doucement un processus d’acceptation. C’est un poids, il lui faudra le supporter toute sa vie maintenant qu’il est révélé et qu’il a fait preuve de son existence. Et rien ne pourra la sauver de cela, pas même son attitude passée. Car la présence, et même le souvenir de Law éveillent trop de choses chez elle pour qu’elle s’en retourne et accepte sans sourciller de recommencer le long travail d’oubli, de construction de barricades autour de ses sentiments.

Heureusement, le cerveau humain est une machine absolument admirable qui peut enregistrer des détails sans que l’on en ait conscience. Ou d’autres choses, comme des paroles qui n’auraient pas remontées jusqu’aux oreilles d’Andrea si sa mémoire n’avait pas agi d’instinct en enregistrant ce que Law lui répondait. A vrai dire, la jeune femme était encore dans une apathie profonde, presque léthargique, et sentir son corps flotter pour se dissoudre ne l’aurait pas étonné outre mesure. Ce fut, dans un imperceptible mouvement, le frottement du cuir et la lame buttant contre sa jambe qui la ramena progressivement à l’instant présent, dans un monde qui n’attendait plus qu’elle. Le vacarme assourdissant, pourtant présent bien avant, la prit par surprise et Andrea dut attendre quelques instants avant de se faire de nouveau à l’activité qui, autour des deux jeunes gens, n’avait pas cédé. Le contact inhabituel fut sans doute le détail qui lui permit donc de se secouer légèrement, frissonnant presque sous les agressions sensorielles qui lui parvenaient avec une netteté assez relative. Andrea fut donc ramenée -au moins un peu- à elle par sa toute nouvelle acquisition, simplement et juste au bon moment pour pouvoir entendre un ... Je t’aime.

Ah non, ça n’était pas une expression qui faisait partie de son quotidien, ni même de son vocabulaire. Personne ne lui avait jamais dit avec une sincérité et une spontanéité aussi évidente. En un instant, la mémoire de la jeune femme joua et lui permit de prendre conscience des paroles qui avaient été prononcées juste avant. Lui expliquant également pourquoi elle avait un carnet dans les mains, avec un crayon. Pourquoi elle se retrouvait tout à coup contre lui, sans rien en voir, juste en respirant la chaude odeur qui se dégageait de son corps rassurant. Pourquoi, aussi, cela ne dura qu’un instant, mais elle sentit ses joues se colorer d’une carnation totalement inconnue. Ce mot, cette émotion qu’il procure, la douleur dans la poitrine qui ne faisait plus mal mais répandait un doux baume apaisant, alors que son cœur s’emballait de surprise. Malgré sa maladresse à lui. Non, grâce à elle. Quelque chose qui valait bien plus de longs discours, que de grandes déclarations. Une hésitation, un petit rien, une gêne totalement inexistante qui renforçait l’aspect anodin et pourtant terriblement sérieux de la scène.

Alors un petit miracle se produisit. Après tout cela, d’un geste nonchalant de la main et en se laissant entrainer doucement vers le marché auquel ils avaient tournés le dos, Andrea sourit. Oh, un petit étirement timide de lèvres, rien de plus. Manifestation discrète de quelque chose qui devrait attendre, prendre du sens plus tard, plus loin. Aussi brièvement qu’il l’avait dite, Andy rangea vite la phrase légère et peu assurée dans un recoin de sa mémoire. Maintenant, celle dernière ne lui jouerait plus de tours. Ce n’était plus une ennemie, étant donné que la jeune femme n’y conservait plus uniquement un dégoût d’elle-même et des images qui la faisaient frissonner. Il y avait tous les bons moments passés avec Law, qu’elle gardait, en les chérissant avec plaisir. Il n’exprimait aucune pitié, mais une promesse d’accompagnement sans support assisté, sans dépendance d’elle à lui. Une nonchalance qu’Andrea, en cet instant, loua de toute son âme. Puis, sans relever ce qui lui semblait pourtant le plus important, elle remit doucement ses muscles en mouvement, avançant à son tour tout en griffonnant rapidement et avant de changer d’avis un chiffre, une rue, une ville. Le tendant à Law, dont elle ne croisa pas le regard afin de ne pas trébucher bêtement sur un obstacle dans son chemin, la jeune femme adopta une voix qui ne tremblait presque pas, encore un peu ébranlée mais si peu par le moment assez étrange qu’elle venait de vivre.

- Je t’interdis de le toucher avant que je ne puisse le faire.

Sans vraiment le savoir, cet épisode faisait d’Andrea une jeune femme grandie de sa fragilité extraite douloureusement de son corps. Elle était encore là, mais s’en défaire ne serait de toute façon pas possible. Autant continuer avec, l’accepter et mieux la comprendre. Pour l’instant, Andy était loin du compte. Mais sous cette simple phrase se cachait l’ombre de celle qui, un jour, incarnerait la nouvelle Andrea.

Et, dans un sourire qui restait un peu forcé et discret, la jeune femme saisit fermement d’une main celle de Law, et de l’autre elle repoussa une mèche de ses longs cheveux qui folâtraient dans le petit vent de cette matinée bien lourde de conséquences. Puis, en lorgnant sur un pain chaud qui semblait sortir de la boutique boulangère située juste derrière l’étal mobile qu’elle fixait, la jeune femme lança un regard furtif vers Law. Elle ne comptait pas s’appesantir sur un sujet qui, s’il n’était pas clos, ne méritait pas que l’on s’y attarde.

- Tout ça m’a donné faim. Et puis, tu sais, je t’aime aussi beaucoup.

Sans l’espace, le laps de pause entre deux mots, ceux-ci n’avaient plus rien à voir avec les précédents. Mais il comprendrait qu’attendre était le meilleur moyen de se voir l’obtenir. Parce que pour l’instant, il fallait que l’édifice à terre cicatrise et reconstruise ses fondations pour ensuite resplendir de nouveau. Parce que le dire était encore impossible alors qu’Andrea en comprenait tout juste le sens. D’abord, elle serait heureuse. Elle connaitrait le bonheur, pour ensuite saisir ce qu’était l’Amour, et apprendre à le dire, à le décliner. Le sentiment était là, peu importait que les mots suivent ou pas.

Et la pression de sa main à la sienne, rassurante et pleine de certitude, en était sans doute la meilleure expression. 
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le samedi 08 janvier 2011, 14:14:21
Aimer, c'est s'attacher à une personne sans pouvoir s'en détacher. C'est ne voir qu'elle, l'accepter avec ses défauts. Alors qu'il pourrait y avoir mieux, ailleurs, quelque chose qui nous conviendrait plus. Mais ce "mieux", on ne l'aime pas, on préfère rester cloué avec la personne adorée. L'amour, c'est aussi la contrainte. C'est devoir changer son esprit et ses habitudes, modifier ses plans, contrecarrer son avenir pour s'adapter à ce couple - ou cet espoir de couple -. C'est devenir autre, c'est devoir se faire moins violent, plus possessif, moins soi, c'est se muer en l'idéal qu'a l'autre alors qu'il est censé nous aimer comme un idéal. C'est être un fantasme, le fantôme de ce qu'on eut aimé être qui prend la forme de ce qu'elle veut qu'on soit.
Alors oui, l'amour est une plaie avant toute autre chose. Parce qu'être amoureux, et souffrir de cette attirance exceptionnelle, ça ne dérange pas. C'est aussi renier ses libertés une à une, alors que l'humain en demande toujours une.

Aussi, Law étant conscient de ce déplorable état de fait, lui-même y tirant profit financier, comment peut-il accepter d'aimer ?
Tout simplement car l'Amour est une guerre, le Sexe en est une bataille parmi d'autre.


Tous ici nous savons que Law est d'abord un guerrier avant quoique ce soit d'autre. Law est le sage martial, priant Athéna la réfléchie avant Arès le belliqueux. Celle-là lui est systématiquement supérieure : La brute se soumet toujours à la tactique. Les Grecs avaient tout compris avant les stratèges modernes : pour écraser une armée intelligente, il ne faux jamais avoir recours à une puissance uniquement basée sur la force brute (ou alors celle-ci doit VRAIMENT être forte, et brute).
Mais être stratège n'est pas donné à tout le monde. Aussi, dans le jeu de l'Amour, Law doit pouvoir sortir son épingle du jeu, se démarquer par son habitude des relations sociales, son sens aigü des prévisions, sa capacité à anticiper les décisions de l'autre.. Bien sûr qu'il va gagner. Après tout, il n'a jamais réellement perdu. Ses seules défaites ont été de menues échecs, qu'il a prit soin de rattraper vite fait par une sévère rouste à celui qui avait osé lui infliger un revers.

... Si. Si. Il a subi une défaite. Une énorme qu'il a dû faire payer au centuple. Ce jour où il a changé du tout au tout. Ce jour..



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Flashback ! http://www.youtube.com/watch?v=CAHGxMq1IUI


La rue est déserte à cette heure. Etrange. D'habitude, les bas-fonds sont encore pleins de vie. Le soir est tombé il y a peu et pourtant.. Un évènement grave a dû arriver. Serait-ce en rapport avec l'incendie s'étant déclaré il y a peu, selon un ivrogne croisé en sortant de ce troquet ? Peut-être.. D'ailleurs, je remonte la piste de ces flammes. La lumière qu'il produit dans la nuit est comme un phare, et je ne suis qu'une bête luciole. Mais au fil de mes pas, je trouve ce chemin étrangement familier. Enfin, non, rien d'étrange. C'est plus ou moins le trajet que je fais plusieurs fois par semaine en sortant de chez mon employeur - et depuis peu, de chez moi - pour me rendre dans les quartiers plus bourgeois, afin d'y trouver acheteurs ou vendeurs. Le commerce d'esclave rapporte. Et maintenant que c'est mon établissement à moi, les profits n'en seront que plus conséquents.

Que.. c'était.. mon établissement.

Arrivé devant l'incendie, je constate qu'il m'appartient. Oui, ce bâtiment tombant en ruine, d'où le feu dévorant, infernal, torrentiel s'élève, c'est mon travail, ma maison. C'est ma vie. Surtout, c'est mon héritage. C'est là qu'est mort mon père spirituel il y a quelques jours. C'est là que je me voyais un avenir riche et radieux. C'est là que tout se finit. J'écarte lentement la foule pour me rapprocher. Je suis obnubilé. Ce phare est tellement prenant.. et c'est pourtant tellement effrayant. Je retiens mes larmes. Le traumatisme est violent. Que milles cavaliers me piétinent.. je n'en reviens toujours pas. Qui a pu faire ça ? Qui ? Qui m'en voudrait ? Je ne suis qu'un marchand.. Pourquoi m'en voudraient-ils ? Ai-je offensé quelqu'un en capturant l'un de ses proches ?
Je suis démuni. De tout. Je ne sais pas vraiment combien de temps s'est déroulé. Je suis toujours à fixer l'incendie. Personne ne bouge. Personne ne bouge pour les bas-fonds, de toute façon, même ceux qui y habitent. Le feu ne semble pas encore progresser dans les habitations alentours.. Ca ne saurait tarder. Je n'arrive pas à hurler, malgré mon envie. J'aimerais qu'on y amène de l'eau, qu'on fasse quelque chose. J'aimerais invoquer la pluie. Non. J'aimerais revenir quelques heures en arrière et empêcher le fils de chien qui a mit le feu à mon établissement de commettre son crime. Et si je ne le peux, je voudrais périr dans les flammes.

Alors, là, j'ai perdu toute notion. Temps. Espace. Ca fut tellement dur de pouvoir mettre des mots sur ce qu'il s'est passé.


Il avait fendu la foule et je n'avais rien vu. Il s'est précipité vers moi, et quand je me tournais vers lui, impuissant, je sentais sur ma joue toute la puissance qu'il a mit dans son bras pour me frapper avec sa barre en métal. Il me toisait, moi à terre, recroquevillé comme un chien. Mes larmes coulaient enfin, se mêlant au sang jaillissant des sillons creusés sur mon visage. Il était animé d'un sourire malsain. Je le reconnus. Et lui parlait, me traînant faiblement pour m'éloigner sans aucune conviction.

-Ubel.. Tu as toujours été un traître.. Moi et les autres, on te le fera payer.. Tu vas souffrir..
-Les autres ? Ils sont tous avec moi. Tu es tout seul, Law. Tout seul. Tout aurait dû NOUS revenir. Tu as été le dernier arrivé. Tu n'es encore qu'un gosse ! Et tu penses nous avoir ? Quelle honte.

Ainsi donc ils m'avaient tous abandonnés. Je souffrais le martyr mentalement. Il s'occupait de mon physique en m'assénant des coups de barre, et personne autour ne bougeait.

Sauf Elle.

Un Ange dans les bas-fonds, l'eussiez-vous cru ? Elle s'était jetée, toute faible qu'elle était, sur le monstre qui voulait me battre à mort. Elle tentait de l'arrêter. Il lui avait asséner une violente gifle, avant de l'empoigner par le cou dans le but de l'étrangler. La punir.
Je me suis senti un courage inouï, et me relevant d'un bond, mon coude heurta son visage avec force. J'avais la rage du désespoir, et lorsqu'il s'écrasait à terre, malgré mes blessures, mon corps brisé, ma psyché en lambeaux, j'étais quand même en position de domination. Alors je l'ai frappé, encore et encore, seulement quelques secondes, mais c'étaient des soulagements sans égals. Je l'ai ensuite traîné, usant de mes dernières réserves d'énergie, jusqu'à m'approcher dangereusement de l'incendie qui avait consumé mes sens auparavant. La sueur m'envahissait déjà, je n'étais qu'à quelques centimètres des flammes, j'allais m'évanouir.. Et je l'ai laissé là, à l'entrée même de son méfait, là où une porte s'était écroulée. Ma botte est venue lui assomer l'esprit, et ainsi dans les vappes, je pouvais le laisser à son sort. Je m'éloignais difficilement.. Avant de tomber moi-même, dans la rue, sur le sol.

Une semaine de repos, auprès de celle qui m'avait sauvé, et tiré de là. Elle était bienveillante, et j'éprouvais un grand respect pour elle. Ce fut ma première véritable expérience de passion. Loin des quelques baises passagères et vaguement amusantes d'auparavant, j'ai connu avec elle une puissance charnelle incomparable. Je crois que je me suis tout simplement évanoui à la fin.

À mon réveil elle n'était plus là. J'ai pris sur moi de me lever, de la chercher. La petite demeure était vide. Personne dans le voisinage ne la connaissait, personne ne l'avait jamais vue. Et moi, plus jamais je ne vit son visage.

Et j'ai retrouvé mes sens, et mes souvenirs, enfin.


Je ne suis pas triste. Je ne suis pas malheureux. Je n'étais pas amoureux d'elle.. On ne tombe pas amoureux des déesses, elles nous sont trop supérieures. Elle m'a sauvé. Elle m'a rendu un service. Depuis je la vénère, autant que Sparshong. Mais cette déesse n'a pas de temple. Elle est irrationnelle, au-dessus même des autres Dieux. Chercher à l'identifier serait folie.


*************************


Il se saisit du papier, le regarde d'un air distrait, avant de serrer le poing. L'instant d'après, la note d'Andrea s'était évanouie. Elle n'était plus ici, mais ailleurs, et seul Law saura où. Le choc de ses propres mots passés, Andrea lui en infligera un nouveau. Plus difficile. Il aurait dû s'y attendre, mais pour le coup, il a laissé sa faiblesse l'envahir un peu. Il ne réitérera plus.
Mais ce n'est pas pour autant qu'il n'a pas saisit ses mots. Au contraire.. D'ailleurs, c'est la première fois qu'on lui dit. Il sent son esprit se brouiller un instant. D'ailleurs, il s'était arrêté de marcher. Il faut se trouver un bouclier. Manger ! Oui ! C'est de ça qu'elle parlait juste avant.


Il est l'heure. On va manger.

La main fermement tenue l'emmène plus loin. Ses repères se refont lentement.. trouver un restaurant. Cherche, Law, cherche.
Ca y est.


Tu aimes les escaliers j'espère.

Une maisonnée semblant habitable est son objectif. Il y a de quoi se questionner : les fenêtres ne laissent apparaître aucune cuisine, aucune salle à manger. Y a-t-il une subtilité dans ce monde ? S'invite-t-on chez l'habitant pour se nourrir ?.. Non. Un escalier de pierre longe le mur, entoure le bâtiment. Il grimpe les deux séries de marche et ainsi arrivé au deuxième étage, c'est un spectacle insoupçonné qui attend la jeune femme. Au sommet, sur le toit aplani, des tables et chaises sont disposées, et certains y mangent. Deux soldats en uniforme et armure légère ; un couple de jeunes tourtereaux qui s'embrassent ; trois types accompagnés d'une esclave silencieuse et calme tandis que eux sont très exhubérants.
Pas peur du vide (pas comme moi =D), Law prendra une table au bord, de quoi pouvoir apercevoir le marché et les rues. Paaaarfait. La vue d'un Roi sur ses sujets. Quoi, la grosse tête ?.. Pas du tout.

Même pas de contemplation du contrebas, juste celle du visage d'Andrea.. Interrompu par l'arrivée d'un type en toge bleu foncée, qui s'incline bien bas avant de quérir la commande.


Elle choisit.

Sourire narquois.. Ce n'est rien qu'une petite épreuve.

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Law est néanmoins certains d'une chose : Andrea est une envoyée de cette entité salvatrice. C'est elle qui me l'a offerte pour qu'elle veille sur moi et me sauve une nouvelle fois.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le samedi 08 janvier 2011, 19:10:13
Il a beau y avoir des malheurs et des déceptions que l’on ne souhaite à personne de connaitre, certains sont plus ou moins faciles à amortir quand on en possède le bagage affectif et l’expérience nécessaire. Donner une claque à un enfant avec la même intensité que l’on emploierait face à un adulte pour ne serait-ce que lui faire ressentir une faible douleur est, par exemple, une hérésie. L’enfant est par définition un être sans aucune protection, sans muraille pour se protéger. Le mythe du gosse qui sauve le monde doit rester un conte pour émerveiller les enfants du même âge, on ne peut pas imaginer que la responsabilité pèse sur de si fragiles épaules. Pas plus qu’on ne peut trop en demander à un si jeune être, dont la seule mission et l’unique rôle doivent être la découverte du monde, de ses couleurs et de ses joies. Les peines sont autant d’inévitables dommages, mais certaines sont superflues pour en retirer quelque chose.

Il y a cet exemple assez pertinent d’un trajet effacé, d’un destin malmené par de simples mauvaises décisions, par trop de choix nocifs, trop tôt. La petite fille qu’on voit à la télévision, l’enfant prodige qui danse, joue, pleure et sourit à volonté. Celle qui a ce don de la comédie, transportant les spectateurs qui l’observent d’un simple rire cristallin. Deux grands yeux qui se remplissent d’un liquide translucides, et les mouchoirs se font légion dans la salle. C’est la manipulation du jeu, du rôle, de la fiction et de l’illusion. La petite fille s’expose, présente son don tout particulier, on la qualifie d’enfant prodige, de future brillante actrice, de promesse évidente du cinéma et d’un monde rempli de paillettes. Mais est-ce que quelqu’un a pensé aux amis qu’elle ne se faisait pas alors qu’elle manquait l’école ? Songé que parfois le rire d’un camarade sonne beaucoup plus juste pour elle qu’une façade qu’elle se crée ? La petite fille resplendit, se couvre de gloire et d’admiration, mais dans l’ombre de la scène on la fuit, on l’ignore, on la jalouse. Car les enfants sont francs, ne mentent pas pour faire plaisir mais uniquement pour se défendre. Ils ne prennent pas la peine de faire semblant et leurs mots sont durs, blessants, aussi coupants que des lames de rasoir. Et le visage lisse de la petite fille masque une représentation d’elle tailladée à force de méchanceté, de cruelles attentions. Si le rire est automatique, perd de sa force et de son impact, les larmes et la solitude rendent plausible à l’extrême le rôle parfaitement adapté à son visage las et ses yeux sombres, vides de toute connaissance du monde mais brillants d’une certaine maturité inquiétante, d’une connaissance déstabilisante de la déception et la résignation.

Puis, l’espoir. Celui de rencontrer un jour une autre perle montante, celui de croire que l’amitié est possible dans un univers de compétition et de bataille. Les projecteurs se partagent-ils, pour éclairer de façon égale deux petits corps évoluant avec aisance et grâce sur scène ? Les gouttes de sueur incertaines roulent sur deux fronts appliqués, dont les regards se perdent dans la dimension de l’effort et de l’excellence. Il suffirait que l’une des deux ne défaille ne serait-ce qu’une fois, et ce serait la fin. Et bien sûr, tout arrive. La réplique se voit écrasée, mais reprend le dessus et piétine avec force celle qui a osé croire à une amitié uniquement motivée par la cupidité et la concurrence. La petite fille s’effondre, laissant la place à celle, triomphante, qu’elle a cru voir comme une ressource dans un monde effrayant, un monde complots et de calculs. Un de plus. Trahison, douloureuse et sanglante. Échec, celui de ne pas réussir à se relever. Ramper à terre et supplier, tenter de hurler sans qu’aucun son ne sorte. Comme Tantale qui avait cru pouvoir voler l’ambroisie des Dieux pour la porter aux mortels, la pauvre naïve pensait avoir droit à un délice qui lui avait été enlevé en contrepartie d’un succès qu’elle n’avait pas désiré ... Refusant d’ouvrir les yeux, comme son homologue grec avait nié son crime, tous deux se retrouvaient condamnés à une éternité de supplice, doublée d’une angoisse terrible. Ici on ne parle pas du cours du fleuve qui fuit les lèvres assoiffées du pauvre hère, ni du vent qui chasse les fruits de ses dents avides d’y croquer, et encore moins du rocher en équilibre menaçant de s’écrouler à chaque instant, non. Mais il lui faudra apprendre à contempler toujours ce qui ne lui appartiendra jamais, à trembler devant les autres et leurs habitudes, leur cruauté, leurs codes qu’elle n’a pas pu apprendre.

Souffrance, de grandir loin des autres et de la norme, de ne pas savoir ce qui est bien ou mal, bon ou mauvais. Devoir expérimenter, essayer et attendre les félicitations ou les remontrances. Se mettre en danger presque volontairement pour savoir qui peut lui venir en aide, s’offrir aux crocs acérés qui la surveillent et se font un plaisir de lui apprendre une réalité inconnue, aveuglée qu’elle a été par les caméras qui lui ont toujours fait face. Un, deux, trois, entrechat, délié et on recommence. Mais peu à peu, elle grandit. Ne peut empêcher son corps d’aller de l’avant, tandis que son esprit reste bloqué, il y a longtemps, dans ce temps béni où la douleur était moins forte. Maintenant qu’elle a été surpassée, il ne lui reste même plus le plaisir d’être la seule, l’unique, le centre de tous les compliments et autres admirations. Juste son miroir pour lui rappeler qu’elle n’est plus rien, mais que son existence est déjà de trop.

Puis, l’espoir. Encore. Celui d’avoir trouvé un endroit adapté, aussi calme qu’il est dangereux. Viennent ici les gens à fleur de peau, ceux un peu imprévisibles, ceux qui cachent beaucoup trop de choses. C’est un condensé inconnu, fascinant de figures et de comportements si similaires et pourtant si différents de ses habitudes. La petite fille, qui a grandi, voit enfin la promesse de jours meilleurs, le bonheur qui pointe son nez après beaucoup d’efforts et d’erreurs. Elle pose un regard nouveau sur le monde, ouvre grand les paupières et admire un peu curieusement la réalité qui l’entoure, qui n’est pas la sienne. Tant de choses à découvrir après s’être lassée d’un quotidien où on regrettait son succès passé. Ici elle n’est plus rien, mais elle a le droit de vivre. Comme les autres, elle peut se frayer un chemin dans l’incertitude, écarter les obstacles et se calquer sur leur vie. Rien de plus facile pour celle qui souffrait trop de sa déchéance, associée à une non-reconnaissance d’elle. Il suffit d’être une parfaite anonyme, d’oublier la scène et ses brillants reflets aguichants, et de se fondre dans une masse grouillante et pourtant, à ses yeux, délicieusement plaisante. Cette petite fille vous fait penser à quelqu’un ? C’est totalement fortuit. Un destin comme il en nait des tas, une tranche de vie qui n’a rien d’exceptionnel. Loin de moi l’idée de vouloir faire des parallèles maladroits, de vous ennuyer ou de me permettre des raccourcis qui n’auraient rien à faire là. L’intérêt est plutôt de changer totalement de point de vue, de regarder l’existence de quelqu’un par un autre bout du monde, et de poser un regard lavé de toute habitude. Redécouvrir, comprendre par l’exemple et s’imprégner par la force de la translation.

Solitude, espoir, trahison, échec, souffrance, espoir à nouveau. Bonheur, à venir. Celui, par exemple, de se noyer de nouveau sur l’image de Law. Andy avait eu quelque mal à se replonger dans la réalité qui l’entourait, mais maintenant c’était chose faire et elle ne comptait plus lâcher la faible assurance qui habitait son être, après tant de bousculade. D’autant plus qu’elle sentait que Law avait été un peu secoué, lui aussi. Peut-être à cause de ses mots à elle, qui n’étaient pas ceux auxquels on se serait attendu à entendre dans une telle situation. Tout observateur extérieur aurait en effet pu mettre sa main à couper que la déclaration, le point décisif, allait venir d’elle. Faible sentimentale, sans doute était-ce logique que le guerrier, stratégique et pas prêt à s’engager dans l’inconnu sans être persuadé de vaincre quelle que soit l’attaque ne fasse que recevoir, et répondre. Il était étrange de voir cette toute jeune femme à peine sortie de l’enfance accueillir avec émotion ce qu’elle aurait dû émettre en premier lieu. Stéréotype, préjugé, appelons-ça comme on le souhaite, il n’empêche que toute pensée allant dans ce sens en serait un, se fiant à l’apparence fragile et ... féminine, d’Andrea. Qui était au demeurant bien plus imperméable qu’on ne le pensait de l’extérieur. Fière, au moins, de ce qu’elle pouvait à présent percevoir comme une qualité, afin de ne plus se laisser atteindre -tout était question de dosage-, la jeune femme aurait pourtant préféré lui offrir une réponse plus satisfaisante.

Même si elle le savait, cela ne tarderait pas. Il lui fallait simplement un peu de temps pour se sentir totalement en accord avec elle-même et lui offrir ces mots, n’ayant jamais franchis ses lèvres, quand il serait bon de le faire. Quand son cœur le lui hurlerait, laissant exploser l’impulsion du moment qui viendrait tôt ou tard, lorsqu’elle serait devenue incapable de se retenir. Pour l’instant, c’était par de muettes paroles qu’Andrea s’exprimait, heureuse de sentir une paume contre la sienne, la voix de Law coulant jusqu’à ses oreilles, et leur excursion du moment reprenant. Comme s’il ne s’était rien passé, alors que la jeune femme savait très bien que pour eux deux, c’était beaucoup. Et ce n’était pas minimiser l’impact que de passer à autre chose, bien au contraire. Parler était proprement inutile une fois que tout était dit, et Andy appréciait bien plus le silence, puis l’agitation, que toute autre réaction. Aussi fut-ce avec plaisir qu’elle laissa ses jambes retrouver assez de force pour se mettre en mouvement, s’empressant de suivre le rythme imposé par Law. A la vue de ce qui semblait, en toute logique, être le lieu de leur repas, Andy tiqua. La bâtisse devant elle ne laissait rien présager, mais c’est en se souvenant de la remarque précédente de son compagnon qu’elle aperçut soudain les marches qui se détachaient peu dans le décor, enserrant les murs d’une étreinte presque amoureuse. Dans leur ascension, Andrea accéléra et doubla rapidement celui qui l’avait guidée partout jusqu’ici, prenant quelques marches d’avance en les gravissant presque en courant, heureuse de la simple accélération à laquelle son organisme était soumis et dont elle découvrait les sensations. Arrivée triomphante en première, elle n’eut que quelques secondes à attendre pour qu’il la rejoigne, et pendant ce temps elle examina l’endroit choisi par ses soins.

Une terrasse qui occupait toute la superficie du bâtiment se déroulait sous ses pieds, un léger rebord les entourant tous afin d’éviter de glisser malencontreusement sa chaise sur le sol de pierre et finir, tout aussi malencontreusement, quelques mètres plus bas. Largement plus bas, d’ailleurs. C'était un espace plutôt chaleureux, malgré la présence de ce qui semble être des militaires ou autres représentants de l’ordre de la ville, où les amis ne se gênent pas pour rire franchement, où les sourires fleurissent souvent et où il fait bon vivre. Tout simplement parce que, dans l’air agréable, surtout pour la saison, un petit vent soufflait, venant effleurer avec délicatesse le visage admiratif d’Andrea. Encore une fois, il avait eu du goût pour lui faire ouvrir de grands yeux émerveillés, cette fois-ci devant le panorama qui s’étalait sans complexe quelques étages en contrebas. Le marché vu d’en haut, coupé du bruit qui tentait pourtant de s’infiltrer dans l’air et de se mêler aux conversations qui occupaient l’endroit, était un spectacle sinon plus au moins aussi intéressant que lorsqu’on s’y trouvait. On aurait dit une place grouillante d’activité, qui ne s’arrêtait jamais et continuait inlassablement, alors qu’eux même se tenaient à présent loin de toute cette agitation. Andy put d’avantage apprécier la vue lorsque Law l’entraina vers le rebord, au-dessus duquel elle ne craignait pas un instant de jeter de longs coups d’œil, partagé qu’elle était entre le panorama et les yeux qui la fixaient.

Cruel dilemme que de devoir choisir entre deux sources de son admiration et de son contentement. Ce fut finalement Law qui gagna, et elle lui accorda de nouveau toute son attention.

- Nexus est superbe, de jour. Je n’ai jamais vu autant d’agitation sur aussi peu de place. J'ai hâte d'en savoir plus sur son revers, que je n'ai fait qu'entrapercevoir hier.

Andrea salivait d’avance, devant les plats qui jonchaient les tables avoisinantes. Encore beaucoup de mets qu’elle ne connaissait pas, reconnaissant vaguement quelques associations qui lui semblaient ressembler à ce qu’elle côtoyait auparavant. Alors, quand quelqu’un s’approcha d’eux, la jeune femme réfléchissait déjà. Aussi ne fut-elle pas prise au dépourvu par l’affirmation de Law. Du moins presque pas, étant donné que cela la mettait dans une position tout de même inconnue, et surtout imprévue. Mais s’étonner de lui n’était plus quelque chose qu’Andy faisait sans cesse, se préparant toujours à tout pour ne plus hausser les sourcils dès qu’il prenait la parole. Il était fini le court laps de temps où Nexus n’était pas chez elle, à présent elle composait avec les éléments que Law lui distillait, et la perche qu’il lui lançait n’avait rien d’empoisonné, au contraire. Il fallait simplement voir si elle saurait se débrouiller ... D’un air qu’elle voulait assuré, sans fuir le regard de celui qui attendait docilement, Andrea fit mine de réfléchir et commanda, sans questionnement ni recherche d’approbation. Après tout, il lui avait laissé la main.

- Pour moi, ce sera un plat de poisson parfumé aux herbes, et des légumes en accompagnement. Pour lui ...

Réflexion d’une poignée de secondes, détaillant rapidement le visage moqueur de Law qui l’observait avec attention, un sourire aux lèvres. Il ne perdait pas une miette de ses réactions, cherchant sans doute la faille qu'elle se fit un plaisir de ne pas afficher.

- Ce sera un sauté de viande rouge, et du riz complet si possible. Avec une corbeille de pain, et une carafe d’eau, simplement.

Oui, simplement. Andrea n’avait pas cherché la difficulté, loin de là. Mais c’est parfois dans la plus simple évidence des aliments qu’on les savoure d’autant plus. Et puis elle n’aimait pas les plats en sauce, les assiettes trop remplies, les associations maladroites ... La commande reflétait ce que la jeune femme aimait à cuisiner les longues journées qu’elle passait seule chez elle, et donc sa réflexion n’avait pas porté bien loin, d’autant plus que si jamais Law n’était pas satisfait, il ne s’en cacherait sans doute pas et rectifierait sa commande. Il était hors de question que la jeune femme commence à verser dans la tention, l’incertitude de ne pas faire le bon choix, de se laisser guider constamment. Elle était toute autre, maintenant, et une fois la commande faite, elle remercia d’un sourire celui qui était venu les voir avant de repasser à Law.

- Je me demandais ... Ce qu'il y a de plus important à savoir pour moi, ici. Par quoi commencer ? Je me sens tellement étrangère que je serai incapable de le dire ...

En d’autres termes, qu’est ce qui allait lui tomber sur le coin du crâne une fois qu’ils seraient rentrés ? Andrea était à présent avide de combler le trou dans sa poitrine, et d’oublier qu’il y a quelques instants elle se sentait prête à fondre en larmes et à se liquéfier par terre.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le mercredi 12 janvier 2011, 23:04:37
Pour le coup, la belle avait eu beaucoup de goût. En tout cas, un certain discernement efficace quant aux choix qu'aurait pu faire de lui-même le polyglotte.

L'on admet habituellement que la force est affaire d'homme, la précision étant en revanche le glaive de ces dames. Au sexe fort (oui, fort !) la pointe, l'estoc. À leur opposé viril le tranchant, ou l'imposante masse dans certains cas. Pourtant, la symbolique même du caractère phallique de ces bêtes sauvages n'attribut-elle pas à ces mâles-nommés un certain penchant pour le coup puissant, direct, droit, celui qui pénètre en profondeur, qui se plante et s'abîme dans le gouffre des chairs ? Ils s'infiltrent, échouent au fond de l'invocatrice du péché de luxure sans avoir jamais à s'égarer dans d'ardus gestes d'escrime : rien n'est plus simple que le terrassement, méthodique mais sensuel, singulier mais commun, atroçe mais divin, des dernières barrières résistantes de la chair par une lame piquant vers son but comme le rayon de soleil s'abattant après sa course céleste et directe sur la terre. Tout cela est donc l'histoire d'un coup précis, et jamais d'une force démesurée.

Ainsi, Law sera phallique plutôt que stéréotypique, car ce sera à lui d'apporter la finition après les coups de burin quelque peu grossiers assénée par sa jolie partenaire, en arrêtant la toge avant même qu'elle ne puisse avoir l'idée de s'éloigner.


Tout ce que vous avez de meilleur, première qualité. Légumes variées, et frais comme jamais. Cuisson impeccable. Et vous m'obtiendrez le nom de l'esclave là-bas.

Avec un sourire qui en dit long - non, en fait, qui ne dit rien, Law fixe de nouveau Andrea et tout ce qu'elle porte sur elle. À ses yeux, c'est une magnificence naturelle, un avenir, le changement, l'accompagnement, la difficulté, la nouveauté.. Tant de concepts dont il est le seul à voir les contours sur ceux de cette jeune perdue de Nexus.

Livrons-nous à un petit exercice. Hm.. Voyons. Ferme les yeux.

Cette phrase prête souvent à sourire. L'on se remet à l'inconnu, voilant l'un de ses sens pour tenter de rendre les autres plus aiguisés, plus attentifs. Il y a un peu d'appréhension, et le goût de la surprise. Evidemment, Law attendra qu'Andrea s'attèle à la condition imposée. Puis il parle.

Dis-moi, Andrea.. Réfléchis. Qui est le plus dangereux sur ce toit ? Après moi, évidemment. Qui est le plus propice à être sujet à ta méfiance ? Les soldats peut-être. Ce sont les premiers à qui on penserait, d'instinct. Ils sont armés, et les combats sont leurs gagne-pain. On pourrait se dire qu'il faut faire attention à eux.. Éviter de leur tourner le dos. Et puis on se ravise. Les hommes plus loin, ils sont trois, donc plus nombreux. L'un d'eux est d'ailleurs ostensiblement bien équipé pour une bagarre, ce n'est pas un couteau à beurre qu'il a posé à côté de son assiette, mais un poignard affûté. Tu l'avais vu, j'espère. En plus, ils ont une esclave. Son propriétaire doit donc avoir des moyens. Bon, imagine. Tu es quelqu'un avec un niveau de vie plus que correct. Et ce midi tu décides, par pour loisir, de venir manger sur un restaurant un peu original, avec deux de tes amis, tout en traînant ton objet avec toi. Tu lui accordes même un repas dans ce restaurant. Tu es sur une grande place commerciale, donc, à priori, assez sûre. Et malgré tout ses facteurs, tu emportes avec toi une arme, par ailleurs pas toute neuve, et tu la poses à tes côtés de sorte que tu puisses la saisir même si tu devais être pris au dépourvu. Soit tu cherches à te défendre car une quelconque menace est sur toi, soit tu joue la frime auprès de tes compagnons. Allons un peu plus loin.

La Toge se ramenant avec la carafe d'eau demandée, Law la videra d'un peu de son liquide pour en remplir les deux verres, tout en corrigeant Andrea si jamais celle-ci en venait à ouvrir ses yeux, sait-on jamais.


Continuons l'analyse somme toute assez paranoïaque. On a donc affaire à un possesseur d'esclave, et ce dernier n'a pas l'air très bien dans ses bottes. On peut légititement avancer que l'esclave en question n'est pas la plus heureuse de Nexus, right ? So, ce type a peut-être un équilibre mental assez fragile au niveau de ses droits et ses devoirs. Il doit se considérer supérieur aux autres humains, tout comme je le fais, mais nos raisons sont sensiblement différentes. Enfin bref. Extrapolons en disant que ce genre de personne là, il doit avoir pour projet de te coller une beigne si jamais tu oses regarder le contenu de son assiette, après t'avoir fait quelques menaçes. Bon. Et maintenant, tu te dis que tu as oublié le couple. Qui se méfierait de deux tourtereaux innocents qui se lèchent les gencives ? Et pourtant. Et pourtant.

Il fait une pause, avec un regard appuyé et pas du tout gêné sur les deux personnes qu'il désigne dans son discours.

Ne suis-je pas un esclavagiste moi aussi ? Et je suis avec toi. Si l'envie m'en prenait, et que je tombais sur une fille seule dans une ruelle, qu'est ce qui m'empêcherait de l'assomer pour la ramener jusque chez moi, où j'en ferais une servante docile ? Ta présence peut-être ? Ohoh. Comme si j'allais préserver tes petits yeux innocents de l'horreur de cette ville. Une horreur quasi quotidienne, et plus encore dans les bas-fonds, là où tout les deux nous passeront une moitié de notre vie, voire plus. Et puis, quoi de plus dangereux qu'un garçonnet amoureux qui sentirait sa demoiselle en danger ? Qui sait ce dont il serait capable si c'était pour la sauver. Il te livrerait, te tuerait si cela devrait le préserver. En somme, il y aurait de quoi avoir quelques réserves à les approcher eux aussi. Evidemment, si ça se trouve, on a affaire à deux soldats gentils et serviables, à trois amis sympathiques et débonnaires avec une esclave un peu réservée, et à un couple fou amoureux loin de toute pensée négative tant ils sont enfermés dans leur bulle de passion. C'est possible aussi ! Tout ces facteurs additionnés, tu peux reconsidérer la question du départ. À savoir : Qui est le plus dangereux de ce toit, après moi. Tu peux ouvrir les yeux.


Elle aura eu tout le temps de laisser son imaginaire jouer les représentations de ce qu'il racontait, projetant contre le voile de ses paupières le film qu'il lui livrait. Il prenait son verre d'eau et s'humectait l'intérieur de la gorge avec, digérant l'air consommé lors de son laïus. L'orateur a les cordes souples, toujours. Il doit pouvoir murmurer et hurler, pour convaincre, pour tenir ceux qui l'écoutent.
Désormais, Andrea peut observer d'un oeil différent ce qu'elle a aperçu précédemment. Remarque-t-elle de nouveaux détails ? Envisage-t-elle de nouvelles possibilités ? A-t-elle des objections ? Des commentaires ? Des suggestions ?


Le plus triste dans tout cela, c'est que ses paroles sont finalement pleines de fatalité, et on croirait bien que Nexus, c'est avoir peur sans cesse, de tout, tout le temps. Pas la frousse, non, mais se méfier, se questionner, surveiller. Se retourner derrière soi. Se demander si son meilleur ami, son voisin, son employé ne serait pas un traître audacieux, un criminel sans pitié, ou toute autre genre de fréquentation que l'on se refuserait de côtoyer. "Ribambelle de margoulins" comme diraient nos mamies, ou, comme l'énonce plus clairement et modernement le célèbre guide du savoir-survivre-en-toutes-circonstances que je n'ai désormais plus à présenter, j'ai nommé, le Manuel des Castors Juniors : "Une sacré bande de salopards."
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le lundi 17 janvier 2011, 23:19:39
Manifestement, la jeune femme avait réussi son coup dans la commande passée furtivement, précise tout en restant vague. Car Law ne changea pas d’un poil son choix, et Andrea se doutait bien que ce n’était pas simplement pour lui faire plaisir. Quelque chose lui déplairait, et il le ferait certainement savoir dans la seconde. Contente d’avoir répondu aux attentes de celui qui s’employait à la tester comme on jauge une proie appétissante du regard, Andy ne se démonta pas et affronta son sourire, dont la signification restait très lointaine. Ce n’était pas la première fois que l’image du carnassier impitoyable s’imposait à elle alors qu’elle fixait le visage tiré de Law. Plus tôt, Andy avait ressenti la désagréable impression d’être un morceau de chair qu’on hésite à dévorer ou à jeter, de peur qu’elle soit avariée. Plus tard, ça avait été le rôle de reine éphémère, les bons côtés de la vie de princesse et les avantages qu’il y avait à avoir réussi à toucher le cœur d’un homme en particulier. Et d’avoir été touchée en retour. Maintenant, le tour était venu de mériter ses ambitions et ses espoirs quant à la vie sur Nexus. Simplement de montrer qu’un cerveau était fait pour s’en servir et que la jeune femme pouvait suivre, ne serait-ce qu’un peu, le rythme imposé par Law. Au moins avait-elle le mérite d’essayer ...

Aussi Andrea ferma-t-elle docilement les yeux quand on le lui demanda. Sans conscience des promesses qui se posaient sur ses épaules dans le regard de son compagnon. Elle n’hésita pas longtemps, confiante qu’elle était dans la personne qui lui faisait face. Trop, peut-être, et sans doute pouvait-on le lui reprocher. Mais Andy ne comptait pas contester chacun de ses gestes, et savait bien que si tout moment restait propice au jugement porté sur elle, elle devait accepter de se plier au jeu de la confiance. D’autant plus qu’elle n’escomptait pas faire de sa vie un perpétuel test dans lequel il lui faudrait faire attention au moindre de ses faits et gestes. Andy était venue chercher ici une certaine forme de liberté, elle en avait trouvé une dose inespérée et une proposition de toujours s’y délecter. Autant la comprendre, l’assimiler et la mettre en pratique. Ce fut donc sans peur ni crainte qu’Andrea se plia à la demande de Law, curieuse qu’elle était de ce qui allait suivre. Ce qui ne la surprit même pas. Mais avant d’y réfléchir, la jeune femme laissa son esprit remplacer l’organe défaillant, et au bout de quelques secondes désagréables et peu accommodantes, la découverte commença.

A travers le tissu bleu qui habillait ses bras, elle sentait les rayons du soleil percer sa peau et venir la réchauffer, chassant toute tristesse résiduelle, toute sidération qui serait demeurée malencontreusement dans son esprit. Andrea garda avec diligence ses paupières closes, voilant son regard azur au reste du monde, cachant celui-ci à sa propre vision. Dorénavant, les bruits lui parvenaient avec bien plus de force, tout comme les odeurs qui s’échappaient des plats voisins. Et en un instant, elle put deviner la scène. Peu sûre encore de son évaluation des distances, elle reconstruisait pourtant un monde à partir de rien, si ce n’est ses souvenirs de la situation. Là, une table, dont une des chaises l’entourant était mal rabattue. Ici, à ses pieds, le tapotement et le froissement d’ailes d’un oiseau qui devait arriver à peine, pensant trouver quelque pitance. Puis, déçu sans doute de l’échec cuisant auquel il avait été confronté, le petit être repartit vers d’autres destinations, plus prolifiques sans doute. La pierre du muret qui les entourait tous autant qu’ils étaient demeurait silencieuse, mais par-dessus on pouvait entendre sans mal le bruissement des discussions matinales qui foisonnaient à quelques mètres en contrebas. Andrea parvenait à entendre, à présent que son être se privait d’un sens fondamental, certains de ces cris plus distinctement. Une histoire de poisson frais, de légumes du jour et de quelque chose à propos d’un met auquel la jeune femme n’avait pas encore eu le plaisir d’être confronté. Là-bas, encore, le raclement d’un siège, une porte qui claque quelque part en direction des cuisines. Un éternuement qui venait de la table des trois amis.

Un peu plus loin, un rire gras s’envolait dans l’air, un des soldats, au timbre de voix et au ton assuré de la conversation, s’amusait manifestement et le faisait savoir. Andy les revoyait comme si rien ne voilait son regard. Son esprit avait pris l’habitude de tout mémoriser, puis de ranger dans des cases, et la jeune femme parvenait sans aucun mal à se représenter de nouveau la scène. Les pas qui s’éloignaient puis revenaient étaient sans doute dus au serveur que Law avait finalement libéré. Un pas ferme, assuré, qui se déplaçait avec agilité entre les tables qui, toutes, lui tendaient les bras. Comme des enfants attendant une permission, une proposition, les clients de la terrasse paraissaient bien anodins dans ce décor sympathique et propice à la détente. D’ailleurs, si son interlocuteur ne l’avait pas invitée à la prudence, sans doute Andy se serait-elle laissée porter par le charme du panorama et de l’ambiance chaleureuse. Et sur cette réflexion, Andrea ne put s’empêcher de se demander si tout cela était également programmé. C’était tout à fait dans le genre de Law de l’amener à perdre concentration, et à se laisser voguer avec insouciance sur les ailes d’un monde dont on ne voit rien tant que l’on n’est pas brutalement retombé. Ou alors, elle aussi virait à la paranoïa. Sauf que dans la vie, et à fortiori dans un monde dont on ne sait rien, aucune chose n’est liée au hasard, aucun détail ne peut se vanter d’arriver par simple coïncidence, et la présence d’Andrea sur ce toit n’en était sûrement pas une. Voilà à quoi Andrea pensait tandis que Law la forçait à réfléchir, à se souvenir. Encore, plus loin.

Alors la jeune femme vit ce dont il parlait. Les soldats se redressant brusquement, chassant toute brillance d’alcool dans leurs yeux pour saisir une arme et la lancer dans sa direction. Tandis qu’un autre se ruait sur elle pour la maitriser en deux secondes seulement. Elle n’aurait aucune chance. Mais il y avait quelque chose qui n’allait pas, malgré la réalité de ce qu’elle supposait et le froncement de sourcils qu’elle émit, presque surprise par la pertinence de son imagination. Mais l’image se brouilla, laissant place à trois hommes qui se disputent, l’un saisissant une arme subtilement posée aux yeux de tous et donc parfaitement cachée, plantant sa lame dans le ventre d’un autre. Une broutille, une bagarre, un drame. Un jeune homme un peu instable qu’on ne pensait pas dangereux, qu’on ne savait pas capable de ça si le reflet de son arme ne nous avait pas interpellés. Un danger évident, guidé par la spontanéité, sans retenue morale ou instinctive de survie, sans retrait prudent, sans retenue. Prêt à répondre de son acte à quiconque oserait respirer de travers, mais là encore quelque chose différait. Puis, alors que Law avançait de plus en plus dans son discours, le regard perdu et comme possédé du jeune garçon s’effaça bien vite, en même temps que les yeux apeurés et malheureux de son esclave. Place à la vision un peu trop rapprochée de deux bouches qui se retrouvent avec une vivacité qui relève du cannibalisme. En effet, qui pourrait croire que ce jeune couple peut se révéler bien plus prometteur qu’au premier regard ?

Andrea, peut-être, qui ne sous-estimait pas le moins du monde cette force temporaire mais remplie d’une bêtise sans nom, bien que celle-ci s’accompagne souvent d’un grand courage, que l’amour conférait parfois. Si elle ne l’avait jamais compris, elle ne comptait pas le mésestimer. Le critiquer, oui. Se faire avoir par des pensées cyniques et distantes, non. Oui, Andy imaginait très bien l’amoureux qui, n’ayant plus rien à perdre puisque sa vie se voyait rattachée à celle de sa belle, tentait le tout pour le tout. Comme de puiser dans ces dernières ressources inespérées que l’on apprécierait d’avoir toujours à disposition pour se défaire de la situation dans laquelle ils seraient plongés. Rien de plus simple que de se lancer à corps et à cœur perdu dans un ultime affrontement qui, s’il doit finir, se terminera mal. L’amour rend fou, l’amour donne des ailes, mais pas forcément de celles avec qui on voudrait s’élancer du haut d’une falaise. Derrière les plumes blanches peut se cacher un habile dispositif qui vous laisse vous écraser au sol dans un fracas de tous les diables, simplement parce que l’homme se croit plus fort que les règles divines, tout comme l’amoureux se croit plus digne de gagner que son agresseur. Alors oui, c’était plausible et sans doute déjà vu. Mais ... Un détail ne collait pas.

Un instant, Andy crut sentir une main effleurer sa joue et ses yeux manquèrent de peu de se rouvrir brusquement. Mais son cœur se calma instantanément, tandis que son esprit comprenait que ce n’était que la caresse d’un vent capricieux et rempli de facéties. Le souffle léger jouait dans ses cheveux, folâtrant dans une nuque à demie découverte. Un sourire naquit sur son visage. A présent, les images de ces trois situations se superposaient dans son esprit et elle rouvrit les yeux calmement, sûre du cheminement de son esprit. Plantant deux océans pétillants dans les yeux de Law, Andy ne put s’empêcher de redécouvrir avec plaisir son environnement sous la caresse du soleil qui, pendant tout ce temps, avait réchauffé ses joues encore un peu froides de ses précédentes déclarations, qui lui avaient valu un bon moment de frayeur et d’absence. Un silence plana quelques instants avant que la jeune femme ne se décide à prendre la parole d’un ton qu’elle voulait fièrement assuré.

- La personne la plus dangereuse après toi, c’est moi.

Evidemment, dit comme ça, ce n’était pas diablement plausible. Sans attendre que l’homme lui faisant face ne lui demande des précisions, Andrea renchérit avec une dose de malice, quelque peu noyée dans un océan d’incertitude, disparaissant progressivement et laissant la place à de la confiance. Après tout, il n’y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse. Juste un cheminement, juste une perception des choses et donc de la vie. A elle de voir si elle continuait à se voir transparente et inutile ou si son expérience un peu particulière l’avantageait fortement.

- Parce que jusqu’à peu je n’avais rien à perdre et que je me souviens de cette sensation où la seule chose qui compte, c’est de survivre. La survie pure et dure, celle qui ne s’embarrasse ni de passion ni de peur. La volonté de continuer, d’avancer, sans réfléchir au comment ni au pourquoi.

C’était peut-être ça, l’essence de la réponse. Au lieu de chercher qui avait les meilleures capacités sur ce toit pour venir à bout d’un ennemi, au lieu de penser à la force de frappe ou la rapidité d’action, il valait sans doute mieux faire le chemin inverse. De la victoire, comment remonter au visage de celui qui avait eu, au départ, la meilleure probabilité de la remporter ? Quelqu’un qui ne serait pas entraîné par une impulsion, quelqu’un qui aurait le contrôle de ses émotions tout en écrasant ses limites et ses peurs. Une personne assez folle pour pouvoir détacher le nécessaire du futile, le corps de l’esprit, les sentiments de la survie.

- Parce que les soldats sont des soldats, et que leur statut leur impose des limites autant que cela leur offre des pouvoirs insoupçonnés d’autorité et de domination, et que leurs méthodes sont codées, apprises. Parce que les trois amis sont justement trois, et qu’à plusieurs ils sont forcés de veiller sur eux et sur les autres, sinon ils ne seraient rien pour personne. Leur nombre fait leur faiblesse, indéniablement. L’esclave aussi, si tant est qu’elle aura coûté cher et que ce n’est qu’un produit de luxe à afficher avec fierté mais sans possibilité de renouveler l’exploit. Les amoureux, parce que la passion et l’amour sont des forces autant qu’ils sont des failles. Parce qu’en quelques mots on peut les détruire, parce que l’un peut obliger l’autre à faire certaines choses dès lors qu’on sait le menacer. Et puis parce que la colère brouille les sens.

Dit comme ça, cela se tenait. Son raisonnement était peut-être un peu simpliste, mais Andrea était convaincue que tous les scénarios joués par son imagination avaient quelque chose qui clochait. C’était ça. Si elle-même avait eu à les affronter, sans doute aurait-elle échoué dans l’état actuel des choses. Ou peut-être pas, qui sait. Mais dans tous les cas, la douleur ne lui aurait pas fait mal, elle aurait été capable de sacrifier un bras pour arracher la vie. Savoir faire des concessions, se rattacher au seul essentiel qui compte. Pouvoir se soustraire au regard des émotions et aux impulsions de peur et de ressentiment. Quitter pour un moment sa conscience et ne plus penser qu’avec son corps. Ne plus faire qu’un avec ce bras qui s’allonge, saisit une lame nouvellement achetée, frappe. Et réfléchit après.

- Je n’ai beau avoir aucune expérience, ici je suis la plus dangereuse. Parce que je n’ai pas à me soucier de toi, parce que je ne vis que pour vivre, parce que rien ne m’empêche d’agir avec cette capacité d’analyse, de recul et d’individualité qu’ils n’ont pas. Parce que je n’ai ni appréhension ni envie de faire du mal.

En effet, rien ne rattachait Andrea à l’inquiétude qu’elle pouvait avoir à perdre. Law n’avait pas besoin qu’on s’inquiète pour lui dans une si futile situation, aussi ne devait-elle penser qu’à elle-même. Pas à ses obligations en tant que soldat ni à ses amis ou aux répercussions de son acte, ni même à un amoureux qui serait pris à parti et la pousserait à faire un acte regrettable et désespéré. Juste elle, les muscles qui la faisaient se mouvoir. De plus, dans sa réflexion, seules deux personnes avaient échappées à l’imaginaire d’Andrea, la jeune femme n’ayant pas réussi à les mettre en œuvre. Et la réponse était forcément là. C’était elle. Ou ...

- Et ce, bien que je ne sache encore rien sur notre serveur ...

A ces mots, elle jeta un coup d’œil en direction des pas qui allaient et venaient toujours entre les surfaces de bois. La scène n’avait pas bougée d’un pouce, et chacun continuait sa petite vie, tranquillement. Un groupe riait toujours avec autant de bon vivre, un verre de vin à la main. L’autre paradait fièrement sur une discussion qui manifestement le mettait en valeur, le troisième continuant son œuvre avec application. Et pourtant, pourtant plus rien n’était pareil. Il avait été très simple à Andrea de porter un regard réfléchi sur ces gens, d’autant plus que Law l’aiguillait tout en la perdant dans des suppositions sans doute exagérées. Elle qui avait l’habitude de porter un jugement en peu de temps, sans doute du fait de son absence d’écho personnel et émotionnel, Andy n’avait pas trouvé l’imagination difficile. Plus dure était pourtant la partie où il avait fallu réfléchir sur une elle-même, comme si la jeune femme cherchait ce qu’elle pouvait bien faire dans ce décor qui lui convenait si peu.

Au final, était-ce victoire ou réussite ? Bonne ou mauvaise réponse ? Car si Andrea avait réussi à se plier à l’exercice, cela n’était qu’à cause du propre vide qui l’étreignait encore et constamment, n’attendant qu’à se remplir. Il lui suffirait d’y insuffler la continuité de cet esprit de réflexion et d’analyse, cette volonté de voir le monde comme il pouvait être. Faire la part entre le vrai et le faux, détecter ces signes muets qu’on ne remarque qu’avec l’œil aiguisé de l’expérience. Andrea attendait la réaction de Law, tout en perdant son sourire et adoptant de nouveau un air sérieux et concentré. C’est là qu’elle se saisit de son verre et le fit tourner lentement entre ses doigts, avant de boire d’un trait le liquide proposé à ses yeux assoiffés. Elle espérait simplement ne pas l’avoir déçu, même si pour rien au monde son raisonnement ne lui semblait erroné ou défectueux. C’était une volonté d’être en adéquation avec, pas de penser pour faire plaisir à quelqu’un.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le lundi 24 janvier 2011, 20:15:01
Le serveur a perdu une jambe il y a quelques années. La nouvelle qu'il s'est faite greffer le rend inefficace au moindre combat.

Voilà qui apportait une conclusion, somme toute banale, à l'ensemble. En effet, pas de bonne ou de mauvaise réponse. Rien ne comptait plus que la logique. Andrea en avait fait preuve, ainsi, l'on peut dire que l'épreuve était passée avec brio. Elle était ce que j'ai mentionné plus tôt, cet inconnu, ce grain de sable qui fait s'écrouler la machinerie infernale, l'imprévu foudroyant et implacable qui dérègle tout plan minutieusement composée, comme une partition de maître, où les notes se succèdent avec harmonie, comme un dessin d'architecte où lignes et courbes se conjuguent dans l'optique d'ériger une bâtisse solide, comme la recette d'un chef de cuisine, un réputé exécuteur de plats de gourmets, des hors-d'oeuvres jusqu'au dessert, celui qui fait chanter les papilles des plus endurcis, celui qui fait découvrir le goût à un habitué de la malbouffe, la vraie, la grosse, la grasse. Andrea s'en fiche, elle apparaît, et, insoucieusement, avec cette innocence d'enfant, et cette inconscience d'adolescente, tout en étant on-ne-peut-plus femme, rajoute des temps et des notes au hasard dans la symphonie, applique des tracés et des mesures au hasard sur le croquis millimétré de la future construction, et met trop de sel, ou trop de sucre, dans le plat fumant destiné à ravir les bouches. Andrea fait tant de choses encore, sur lesquelles ont ne saurait s'étendre trop longtemps. Et pourquoi fait-elle ça ? Parce que. Ca n'a pas de réponse. Elle est, elle est là. Ca suffit. Sa présence et son être la définissent comme la briseuse des prédictions de vieilles cléromanciennes aux dés et os et autres objets futiles. Nexus ne l'avait pas vue venir : Tant mieux. Nexus doit désormais faire avec.


Bien.. Excellent.

Voilà ce qui résume sa pensée. Ne t'en fais pas, jeune fille, il va s'expliquer. D'abord, le temps de la réflexion.


Aucune personne n'est plus dangereuse que quand elle n'a rien à perdre. Du moins si elle s'en rend compte. Les gens ont des tas de pensées futiles qui polluent leur esprit. "J'aurais dû faire ça." "Je n'aurais pas dû le faire." "La prochaine fois, je ferais ça." "Et si je faisais ça maintenant ?" "Je dois faire attention à ci, à ça" "Non, je devrais y réfléchir...". Face à une mort potentielle, par exemple, face à un combat, l'esprit doit être canalisé dans un but simple et clair : Je dois vaincre. Je n'ai pas d'autres solutions. Je dois éliminer toute autre possibilité. Je tiens à ma vie. Car il faut tenir à sa vie Andrea, et d'abord à la sienne. Et puis tu es sûrement plus forte d'esprit qu'eux, comme tu le dis, la balance pèse clairement en ta faveur. Un combat ne se mène pas avec des considérations de petites filles. Et, en effet, tu n'as pas à t'embarasser de moi. Tu dois te focaliser sur ta propre survie, la mienne passe après.

Même si lui n'est pas bien certain de tenir ce principe pour acquis. Il est sûr de pouvoir protéger deux vies sans embarras : La sienne et celle de sa petite Andy. Il aurait voulu rajouter quelque chose, mais le serveur l'en empêche : Débarquant avec deux assiette bien distinctes, où il manque la moitié des choses. Il a sa viande, elle a ses légumes. Pour le poiscaille et les céréales, il faut apparemment encore attendre un peu. Law se saisit du couteau. Quelle magnifique sensation que celle de tenir une lame entre ses mains - même si celle-ci ne sert que pour l'action basique, élémentaire et quotidienne que de manger. Au passage, le serveur se penche vers Law, lui murmure quelques lettres, et s'évade de là chercher le reste de la pitance qui doit être bientôt prête.

L'esclave s'appelle Eirene. Elle m'a été volée. Je suis donc en droit de la reprendre.

N'était-il pas venu ici au hasard ? Apparemment pas. Quelles sont les chances de tomber sur l'un de ses biens qu'on nous a subtilisé, avec le voleur en prime, dans un espace public ? À vrai dire, les probabilités sont si minces que l'équation nous mène a un résultat clair : Oui, il l'a fait exprès. Et non, il ne compte pas rien faire.

Mais elle, elle ne m'a pas vu. Et le voleur ne doit pas bien connaître mon visage pour ne pas m'avoir reconnu, ou bien ce n'est pas lui. J'ai peu d'information dessus. Dans tout les cas, il va payer. Je veux savoir si c'est lui qui a commit ce vol, et si oui.. Il va payer cher. Sinon, je retrouverais le coupable. Dans tout les cas, les trois ici vont souffrir. Je vais me focaliser sur celui qui tient la possède donc.

Il fait une pause, embouche un morceau de sa pièce de viande cuite, et fait signe, avec un couvert, qu'il va parler encore. Le tout avalé, il reprend.

Trois hommes assit à une table, avec une esclave. L'un armé, les autres le sont potentiellement. J'ai l'effet de surprise. Qu'est ce que tu ferais à ma place, en sachant que tu disposes d'une personne à tes côtés capable d'inconscience pour toi ? Et qui plus est.. dangereuse ?


Le repas a donc débuté, par le plat de résistance. Ca ne semble pas l'outrer plus que ça. Les assiettes des trois cibles sont bientôt finies, et ils vont donc partir sous peu. Faut-il aller dans la précipitation ? Ou les laisser filer ? Faut-il les attaquer de front ? Y aller sournoisement ? Et il faut prendre en compte le terrain. L'altitude, une chute serait si facile.. Et éventuellement fatale. Même si la hauteur n'est pas faramineuse, un choc du crâne contre le sol pourrait contraindre la victime à écourter son espérance de vie, de beaucoup. Peu importe comment ce ou ces types s'y sont pris pour défier Law de cette façon : Ils ont sans doute fait là une erreur. Grossière. Idiote. Et gênante pour leur futur.

Et question subsidiaire. Qu'est ce que je fais de l'esclave après ? Récompense ? Soudoiement ? Excuses ? Punitions ? Indifférence ? Mise à mort ?
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Andrea Leevi le mercredi 02 février 2011, 18:25:28
Il n’y a pas de hasard, tout est inéluctable.

En soi, pourtant, toute chose parait fruit du hasard, d’un coup de chance ou de malchance, d’un chemin prit les yeux bandés, comme on pourrait en prendre bien d’autre. A la naissance même de l’homme, c’est le hasard qui décide en fonction de quoi le nouveau-né sera celui qu’il est. Pourquoi ces cheveux blonds, pourquoi ces longues jambes et ces formes un peu trop discrètes ? Tout est affaire de génétique, et pourtant nombreux seront ceux à dire qu’un autre moment, qu’un autre lieu peut-être, auraient pu conditionner les choses différemment. Si Andrea était là, ce n’était à priori qu’une succession d’événement dont l’ordre d’enchainement était soumis aux imprévus du destin. Un homme, une femme, un désir qui nait et une volonté d’enfanter, rien de plus. Qui aurait pu savoir que le beau bébé aurait évolué de cette façon, qui pouvait prévoir la suite des événements en ce qui la concernait ? Personne, pas même les Parques qu’on associe pourtant à la destinée humaine sans la moindre hésitation. Une route est déterminée par des choix, puisqu’à chaque décision la personne qui la prend efface en un rien de temps toutes les autres possibilités, faisant mourir dans l’œuf un millier de propositions qui auraient peut-être mieux convenues, peut-être moins. Une simple pensée peut d’ores et déjà être un choix, si on la laisse murir, grandir, si on la laisse nous envelopper tout entier pour décider de la suite de notre cheminement personnel.

Et le plus drôle, c’est de savoir que les choix ne sont pas libres. Qu’ils sont eux  aussi prédéfinis en fonction de beaucoup de choses, qu’un individu verra forcément son panel de futurs réduits par sa façon de penser, par son éducation, par l’environnement qui l’a conditionné à penser ainsi, à agir de telle façon. Au final, tout se rapporte à la naissance qui trace déjà un futur évident où la part n’est pas faite au hasard ou aux suppositions bancales. Il serait bien trop incertain de laisser le monde tourner avec des « peut-être » constants, des hésitations et des possibilités infinies à chaque seconde, aussi tout est-il savamment déterminé, mené par les règles de logique et de prédisposition. On ne peut laisser chaque être humain abandonné aux possibilités que son esprit façonnerait à chaque seconde. Le fait est que la liberté de choisir n’est qu’une illusion, et que tout suit un cours logique en fonction des choix orientés de chacun. Et quiconque souhaite vérifier cette affirmation ne le pourra jamais, à moins de montrer que remonter le cours du temps est chose possible et qu’à ce moment-là, il agirait différemment de ce qui était prévu pour lui. Impossible, donc, et c’est là que toute cette théorie prend tout son sens, car elle ne peut être ni affirmée ni infirmée, un peu comme la croyance que l’on aurait en un Dieu, l’existence de vie en dehors de notre galaxie, les vérités indéfectibles dans certaines sciences qui se veulent d’une exactitude fondée sur les suppositions et les hypothèses. On pourra dire ce que l’on veut, le hasard est tout autant un indispensable à notre survie morale et au bon développement de toute personne qui croit en la liberté et en la possibilité d’un autre déroulement qu’il est nuisible à notre bonne compréhension des choses et de la logique de tout ce qui survient autour de nous.

Au final, la notion de hasard est uniquement liée à l’incapacité à appréhender complètement certains phénomènes dans leur complexité naturelle, et donc à les prévoir infailliblement. C’est la réponse apportée lorsque l’on ne saisit pas la logique du monde, lorsque quelqu’un ne sait pas pourquoi telle ou telle chose survient, alors que ce n’est que l’assemblage de deux faits qui se rencontrent dans un même temps et un même espace, formant ce qu’on appelle communément le hasard. Mais ces deux événements se sont retrouvés non par coïncidence mais par nécessité. Il fallait qu’ils se rejoignent pour créer cette conséquence, qui en entrainera une autre, puis une autre, dessinant alors un superbe éventail de causalités qui s’allient pour former un être, et ce qu’il doit être. Le rôle qu’il aura à jouer dans la grande mascarade humaine, ce qui va le déterminer et le définir. Par exemple, si Andrea a vécu l’humiliation pendant deux ans, avec un profond traumatisme, c’était dans le but de renaitre dans cette ville inconnue et inquiétante, de rencontrer un homme qui lui apprendrait qu’il n’y a pas que la passivité comme aptitude de vie, que l’on peut devenir acteur de son existence. Dans aucun autre contexte la jeune femme n’aurait pu découvrir cette vérité pourtant à présent indispensable et essentielle. C’était ce qui la faisait être elle et l’avait amenée à cet état de fait, à cette position de nouvelle venue à Nexus, cette Andrea revisitée en mieux, cette jeune femme qui n’avait plus grand-chose à voir avec la précédente.

Le hasard, ni rien de ce qui vient du hasard ne peut être la cause des choses qui sont nécessairement et toujours, ou des choses qui arrivent dans la plupart des cas. En d’autres mots, le hasard ne peut provenir que du hasard, qui est lui-même une invention humaine pour se rassurer et combler ses inquiétudes, son imagination, ses questions. Réponse miracle, sorte de Joker bien pratique à sortir en toute circonstance, c’est le laissez-passer immédiat que l’on sort pour se diriger vers une pseudo explication tout en s’éloignant de la trop inaccessible vérité. Et en venant ici au moment où elle en avait le plus besoin, sous la houlette du hasard qui l’avait amenée sans s’en rendre compte à franchir une faille étrange la faisant passer dans une réalité parallèle et autre que la sienne, Andrea comprenait. Maintenant elle le savait, arrêtait de s’en remettre aux coïncidences ou aux hésitations. Elle devait venir à Nexus, elle devait rencontrer Law. Sinon, Andy aurait fini par se détruire toute seule et sous peu, son corps étant trop fatigué pour soutenir toute la souffrance morale qu’elle refusait d’admettre, trop épuisé pour supporter les mensonges qu’elle se faisait à elle-même et la dose de tristesse et de rage qu’elle contenait tant bien que mal derrière la barrière de ses émotions. Les souvenirs de l’esprit sont une chose, tout comme leurs ressentis, mais il existe indubitablement une mémoire corporelle, qui encaisse les émotions que l’esprit rejette, puisque rien ne se perd totalement. Et Andrea était ... non, avait été proche de la rupture. Mais c’était alors normal qu’elle soit à présent là, assise sur une chaine en plein Nexus, sur une terrasse à la vue imprenable. Il n’y a pas de hasard, tout est inéluctable.

Et donc être ici, maintenant, ne relevait sans doute pas non plus de la coïncidence. Andrea commençait seulement à percevoir toute l’étendue de l’esprit de Law, qui se déployait bien au-delà de ce qu’elle pouvait en voir, bien plus loin de ce que son imagination appréhendait. Trop de temps passé à oublier le monde et voilà que la jeune femme était devenue incapable de le comprendre avec quelques longueurs d’avance. Alors qu’il parle, elle se sent satisfaite d’avoir comblé ses attentes en termes de réponse. Elle ne l’a pas fait pour cela, mais savoir qu’elle ne le déçoit pas lui permet tout de même de soupirer intérieurement de soulagement, assurée de n’être pas totalement à une place qui ne lui conviendrait en aucun point. Il lui expliquait l’importance d’être maître de son esprit et de ses pensées, de pouvoir contrôler les futilités et utiliser seulement le primordial sentiment de n’avoir rien à gagner, rien à perdre. Oui, tenir à la vie, en somme. Affronter la mort simplement pour la survie, n’avoir de cesse que de continuer à exister, que de garder cette présence sur terre que l’on chérit parfois tant. Gagner, c’était continuer comme avant, la tête sur les épaules. C’était remporter le droit de vivre, tout simplement. Rien de plus, rien de moins. Sauf que ... sauf que.

- Tenir à la vie, oui. La vie pour la vie, pour le simple plaisir de sentir l’air qui s’engouffre, ressort, entendre ma poitrine se soulever à chaque seconde. Mais tu te trompes sur un point. J’ai beau savoir que je n’ai pas à me retourner pour vérifier que tout va bien, dans l’absolu, tu passes avant. Parce que c’est cette condition essentielle qui fait que je tiens autant  à la vie. C’est d’avoir quelqu’un pour y croire. Sans toutefois m’avilir ou donner une notion de dépendance à mon existence. Tu as créé le désir d’avancer, mais ce besoin reste secondaire par rapport à l’importance de ta présence.

Ouais, ce n’était pas forcément très intelligent de sa part, et cela gâchait un peu son « je n’ai rien à perdre » puisque, justement, elle pouvait le perdre lui. Mais avoir peur pour Law était ridicule, et elle le savait pertinemment aussi cela lui permettait-il de s’en détacher. Elle se promit de ne jamais avoir de peur pitoyable, d’anxiété inutile ou de préoccupations stupides alors que son esprit avait bien assez à penser. Mais, et cela lui rappelait vaguement le premier coup qu’elle ait jamais porté à quelqu’un, la veille au soir dans ce bar où son pied avait fait la rencontre d’une tempe impressionnante, ce n'est pas si simple. Là où elle avait fait mal, où elle avait cherché la douleur. C’était pour Law qu’elle avait fait ça, sur une impulsion. Et cela la minait de se rendre compte que, même avant de le savoir, elle s’était jetée dans cette existence. Il n’y a pas de hasard, hein ...

- Alors tu as intérêt à ne jamais me donner une raison de regarder en arrière.

Ajouta-t-elle d’un ton grave tandis que leurs assiettes arrivaient, à moitié remplies seulement. Et, alors que le serveur apparemment hors course niveau combat semblait confier quelque chose à son client, Andrea se saisit de ses couverts et commença à picorer avec appétit le contenu de son assiette. Tandis qu’il reprend, lui expliquant une situation qui ne fait que confirmer ce qu’elle pensait auparavant. Tout était prévu, calculé, minuté. Andrea se demanda si elle était la seule inconnue, la seule variable dans le monde bien réglé et si prévisible de son interlocuteur. Et même, est-ce qu’elle pouvait se définir comme variable ? Etait-elle vraiment sûre qu’il ne la perçait pas à jour en un regard, de ses yeux aiguisés et vifs ? D’un coup, la jeune femme laissa s’insinuer ce doute en elle et se promit, plus tard, de tenter de le réfuter de manière claire et incontournable. Il explique, encore, ce qu’ils font là, qui sont les gens précédemment cités ou du moins quel rôle ils prennent face à lui, et continue son petit jeu. Lui poser des questions, savoir ce qu’elle ferait, connaitre son avis et son point de vue sur les choses. Si Andrea se sentait indéniablement plus sûre d’elle au fil du temps, elle demeurait bien ignorante face à lui, sans aucune notion de stratégie, de combat ou de logique dans un monde qu’elle ne connaissait que depuis quelques heures. Comment aurait-elle pu savoir, comment pouvait-elle se faire une idée précise et juste de la situation ? Sans nul doute, les mots qui sortiraient de ses lèvres ne seraient que bêtise et maladresse. Et Andrea s’en voulait déjà pour cela, bien que pour l’instant rien n’ait pu franchir la barrière de sa pensée.

Mais à bien y réfléchir, n’était-ce pas cela son atout ? Celui de ne rien savoir, d’être une grande ignorante devant l’éternel et de n’avoir qu’à livrer le fruit d’une réflexion qui ne prenait appui sur aucun préjugé, sur aucune certitude ? Sans doute. Car c’est également une force de porter un regard détaché de toute connaissance sur le monde afin de pouvoir le comprendre plus simplement, sans avoir au préalable à se détacher de tout ce que l’on sait. Elle se sentait alors là, virevoltant d’ignorance et de savoir mêlés, pleine de ce pouvoir qu’un œil neuf et détaché peut amener, mais consciente dans le même temps de son extrême faiblesse, de ses failles et la part d’ombre qui planait encore dans son dos, menaçant de l’engloutir à chaque minute. Il ne restait plus qu’à réfléchir, à penser. Un court moment lui suffit, pendant lequel il se passa pourtant beaucoup de chose sous son crâne. Elle voyait les trois hommes, l’esclave, elle et Law. Prendre en compte le reste, également. Les militaires, qui pouvaient s’interposer. Le décor, qui facilitait la fuite, et le marché en contrebas qui aidait quelqu’un voulant se dissimuler dans une foule. Les risques, enfin. Celui de malencontreusement échouer quelques mètres plus bas, celui d’avoir à faire à des hommes réactifs et entrainés plutôt qu’aux adolescents maladroits qu’ils pouvaient tout aussi bien être. Trop d’informations, trop de détails qui se perdaient. Et pourtant, quelque part, une petite lumière brillait dans l’esprit d’Andrea. Peu claire, pourtant, elle signifiait clairement ne pas être la meilleure. Mais à ce stade, ce fut le seul raisonnement que la jeune femme pouvait élaborer. Alors autant se jeter à l’eau, et c’est ce qu’Andy fit en se penchant légèrement en avant pour expliquer ce qu’elle voyait devant les yeux, grâce à son imagination.

- Ce n’est très certainement pas ce que tu ferais toi, mais de mon point de vue ... Il pourrait être intéressant de majorer l’effet de surprise, principal atout dans la situation au vu de la défaveur du nombre, du moins si l’on ne prend pas en compte qu’ils n’ont sans doute aucune chance contre toi. Quelle que soit la situation.

Oui, ne sachant rien des adversaires la jeune femme ne pouvait compter que sur la surprise pour établir un semblant de stratégie. Mais comment venir semer l’interrogation, la curiosité de ces hommes pour qu’ils acceptent de baisser leur garde ? En repensant aux propos de Law, elle se souvint qu’elle devait se mettre à sa place. Elle. Et là se trouvait sans doute la solution qu’elle cherchait, dans son raisonnement. Il fallait attirer l’attention sans attirer la méfiance. Dans ce but, rien de mieux que ...

- Et pour ça, je pense que je me servirai d’une variable qui, souvent, est une marque de faiblesse. Le cœur des hommes sait être faible quand on peut l’atteindre ou le stimuler. Il suffirait peut-être qu’une femme y aille en toute innocence. Si l’on y réfléchit, elle détourne l’attention autant qu’elle peut cacher une silhouette qui s’avance à un ou deux de ces trois hommes. D’autant plus si elle joue le registre de la séduction.

C’était la méthode douce, certes. Celle qui créerait le moins de remous, la plus discrète aussi, sans doute. Une situation créée de toute pièce qui permettrait au moins de ne pas y aller de front, alors qu’on ne savait rien sur les adversaires, leur force de frappe et leur volonté de rester en vie qui, souvent, majorait la précédente qualité.
 
- Si on imagine que cette femme, qui immobilise le regard de deux des hommes qui seraient susceptible de voir venir l’attaque, peut également prendre part à l’assaut une fois lancé ... C’est sans doute la meilleure façon d’accentuer la surprise et l’imprévu. De se donner un avantage. Mais il y a le contexte qui ne facilite pas la chose. Mais là encore, la femme peut très bien convaincre ces trois hommes de la suivre un peu plus loin, étant donné que leur repas est sur le point de se terminer.

Ça se tenait, c’était quelque chose d’assez logique pour quelqu’un qui n’a aucune autre expérience du combat et de l’affrontement qu’un coup de pied balancé au milieu d’un bar. Encore une fois, c’était le fruit de son expérience et de son caractère qui se confrontait violemment à la réalité d’un monde inconnu qu’elle devait appréhender en des questions purement théoriques ... du moins pour l’instant. Reprenant enfin la parole pour finir sur la dernière question de Law, Andrea se garda de privilégier toute forme de punition. Le concept d’esclavage était encore quelque chose qui lui échappait, bien qu’elle apprécie le fait que ceux de Law n’aient pas parus malheureux ou maltraités.

- Et l’esclave, si je me base sur les maigres connaissances que j’en ai, n’est plus douée de raison et ne devrai pas souffrir d’un acte qui n’est pas de son fait. Tu la récupères, selon moi, sans particulièrement lui faire de mal ni de bien.

Sur ce, Andrea se tut enfin et resta attentive aux réactions de son compagnon. S’il voulait agir et récupérer son bien, il allait falloir s’activer ... Aussi profita-t-elle du peut-être peu de temps qui lui restait pour boire une autre gorgée d’eau, tandis qu’en parlant elle avait fait consciencieusement baisser le contenu de son assiette. Et si la femme pouvait être elle ? Oui. D'autant que jouer une comédie était un de ses plus grands points forts. Deux ans d'expérience et d'entraînement assidu, chaque jour et surtout sans aucune pause dans un rôle d'actrice qui lui avait collé à la peau.
Titre: Re : L'errance de trop. [PV Law]
Posté par: Law le samedi 05 mars 2011, 11:07:26
"Feel so good, I feel so fine,
Love that little Lady always on my mind."


Le serveur s'était ramené, exécutant des tours de souplesse dorsale, avec des tas d'inclinaisons différentes, à tel point que personne n'aurait jamais pu se douter qu'il existait tant de manière de saluer avec une telle soumission. Oui, car les occupants de la table d'à-côté commencent à s'en aller. Law trouve d'ailleurs ça fâcheux. Si il pouvait protester, il se plaindrait sûrement de ne pas pouvoir finir son assiette..
Il en revenait à l'exposé d'Andrea. Bien, très bien même, mais une petite chose avait retenu son attention. Stimuler le coeur d'un homme ?... Le COEUR ? Pourvu que ce soit une manière poétique de parler, parce que si elle pense que c'est vraiment le coeur de l'homme qu'on monopolise lorsqu'on cherche à le manipuler, elle serait bien plus naïve que ce que le polyglotte tablait sur elle.


Tu vas rire, mais j'ai besoin de toi.

Ca y est, il commençait à accélérer un peu le rythme de sa nutrition. Il ne comptait pas finir tout de suite, non, il s'accorderait un temps de réconfort après la bataille pour clore le repas dignement, sans précipitation. Il tenait juste à "emmagasiner" le plus possible, on ne sait jamais, quelque fois que le combat tourne mal et qu'il doive s'exiler sur une île déserte où il n'aurait pas à manger, il aura été bien content de s'être gavé avant de partir.

Simple supposition.

Il vidait son eau d'un trait. Les lèvres étaient essuyées avant, et après avoir porté le verre à celles-ci, à l'aide du tissu aux motifs élégants et à la griffe du restaurant suspendu entre ciel et terre. Il avisait ensuite ses cibles, qui discutaient avec le tenancier. Le sujet de la discussion était gai, sans doute, puisqu'ils lançait leurs tirades respectives avec de forts éclats de rire. Tout allait s'accélèrer. Ils se préparaient à partir, et Law cherchait, le plus discrètement possible, à discerner une arme dissimulée parmi les frusques de chacun.

C'est alors que l'esclave, osant lever les yeux, croisa le regard de son ancien maître.

Celui-ci se demandait si elle allait donner l'alerte. Après tout, on ne peut faire confiance aux esclaves trop soumises. Pourvu qu'elle ait encore un peu de fidèlité envers Law, ce qui reviendrait à dire qu'elle est mal éduquée. Oui, pourvu qu'elle ait encore quelques problèmes de discipline. Suffisament pour qu'elle se dise que son propriétaire actuel méritait moins que le précédent.
L'échange dura quelques secondes. Law ne cilla même pas. Il lui offrit l'un de ses fins sourires. Et puis, portant son index à ses lèvres, il lui fit le signe universel du silence. Il était impératif qu'elle se taise. L'objet vivant, peut-être un peu secoué, baissa lentement son visage vers le sol, masquant ses traits pour que nul ne puisse discerner dessus la moindre émotion. Elle fit mieux que de juste se taire : Elle exécuta un bref pas en arrière, puis un deuxième. Elle venait tout simplement de mettre de la distance entre elle-même et celui qui était plus proche de la mort qu'il ne doit s'en douter.
Celui-ci, l'armé, discute toujours avec l'un de ses acolytes et le serveur, tandis que le dernier rajuste son mantel, souriant à ce qu'il entend à côté malgré le fait qu'il soit détaché de la conversation des trois hommes. Il scrutait ensuite les alentours avec une innocence enfantine. Law revint aussitôt sur Andrea.

Tu es fascinante, tu sais.

Ca n'avait pas spécialement de rapport avec le moment, c'était une constatation générale. D'ailleurs, il lui prenait un rapide baiser.

Fais attention à ta vie. La tienne. Je te promet de préserver la mienne en retour. Mais tu dois te protéger. Regarde toujours derrière toi sans jamais négliger l'avant.

La recommandation vaudrait pour l'éternité. Garder ses yeux sur le compteur, tout en s'assurant qu'aucun flic ne nous suit.
Law jette un oeil sur le reste de son repas, puis sur les hauteurs, la rue en contrebas. Si il devait arriver quelque chose à Andrea, il ne se le pardonnerait pas. Mais c'était hautement improbable : D'une part parce qu'elle ne jouera pas les inconscientes, car elle n'est pas idiote ; D'autre part parce qu'il saura la protéger quoiqu'il puisse se passer sur ce fichu toit.
Il en revenait à ses cibles. Et parlait avec le détachement le plus détaché du monde. Uhuh..


Tente de neutraliser au moins l'armé. C'est de lui que je m'occupe en premier. Et en dernier, puisque c'est lui que je veux faire parler. J'essaye de ne pas trop amocher les deux autres. Il s'agira juste de s'arranger pour que les trois soient par terre avant qu'ils n'aient eu le temps de se dire qu'on les attaquait. Et si il y a le moindre problème : Tu utilises ton arme, ou la première chose qui te passe par la main. Dans le doute, vise les parties sensibles, comme.. comme les yeux par exemple.

Il appuyait ses conseils par un large sourire, amusé de ses propres propos. De l'auto-satisfaction, voilà qui était efficace. Il n'y a pas de mal à se trouver drôle !

Et puis, penses que Sparshong est sur toi. Il appuie les vengeances et la juste violence, et là, on est pile dans son domaine.


Postulat simple : Un croyant n'a pas peur d'aller au combat si il pense que Dieu est de son côté. C'est là chose effrayante quand on est confronté à un fanatique : Il ne reculera pas, car il pense qu'un être suprême le pousse en avant. C'est au moins une raison suffisante pour Law d'avoir la foi. Les hommes sont faibles car ils sont seuls. Ils ont arrêtés de croire. Ils veulent la liberté, et cela les conduit à être traître, couard. Plus de valeurs, plus de courage. Ils repoussent sans cesse les limites de la bêtise car ils ont cessé d'être pieu.
Je nuance : Pas tous, heureusement.
Oui, tous n'ont pas besoin d'une divinité pour arriver à faire des choses.

Si Law fait partie des gens qui n'ont besoin de rien, pourquoi a-t-il la foi ?
Parce que c'est comme ça et pas autrement.

Et aucune loi n'interdit de se donner un petit bonus, quoi. Crotte.


À toi de jouer.