Le Grand Jeu

Plan de Terra => Territoire de Tekhos => Tekhos Metropolis => Discussion démarrée par: Selene le dimanche 21 mars 2010, 14:50:32

Titre: Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le dimanche 21 mars 2010, 14:50:32
Tekhos... C'est grand. Bien moins que l'égo de Selene, cela va de soi, mais il y a quelque chose d'oppressant dans cette ville qui défit les lois de la gravité. Ici, il faut toujours lever les yeux car la vie suit son cours à la verticale. Les gens vivent les uns sur les autres au lieu de vivre les uns à côté des autres. Les agglomérations s'élèvent mais ne s'étendent pas. Même la philosophie de ces gens est verticale ; ils ont une très haute considération d'eux-mêmes en s'autoproclamant police de terra mais ne souhaite en aucun cas étendre leur territoire. Cette façon de penser est amusante.

Ce qui fascinait le plus Selene dans cette ville était l'intelligence artificielle des robots. Sur terre, l'I.A. était à un stade très primitif. Il ne s'agissait que d'un catalogue de réactions que les machines devaient reproduire lorsqu'ils étaient face à une situation donnée. Ce système ne permettait aucune initiative et aucune improvisation. Mais ici, les robots pouvaient suivre et entretenir une conversation. C'est ce phénomène que Selene expérimentait en ce moment même.

Bonjour. Comment vous appelez-vous? Demanda Selene avec une déférence et un sourire qui n'était absolument pas nécessaire.

Droïde de maintenance BH version 4.2, répondit le robot ménagé d'une voix électronique. Vous êtes sur le chemin de votre ami le droïde de maintenance. Veuillez-vous écarter, s'il vous plait.

Selene aimait bien parler aux robots du service public. Ils étaient programmés pour être polis et avaient peu de sujets de conversation. Et puis, il suffisait de les bloquer pour qu'ils commencent à parler. L'immortelle avait jeté son dévolu sur son nouveau camarade de jeu : Le bien nommé droïde de maintenance BH version 4.2 qui contrairement à la version 4.1 pouvait éconduire plus facilement les gens qui entravent leur mission.

Enchantée, continua-t-elle d'un air ravi. Vous êtes très impressionnant.

Merci, fit le droïde. Vous êtes sur le chemin de votre ami le droïde de maintenance. Veuillez-vous écarter, s'il vous plait.

Selene lui décocha un nouveau sourire amical et s'écarta du robot qui s'éloigna d'elle en aspirant tous les détritus sur son chemin. L'immortelle aurait adorée travailler dans la construction de droïde mais bien que son bagage scientifique soit excellent sur terre, il ne valait rien à Tekhos. D'ailleurs, aucunes de ses connaissances n'avait de la valeur. Seul son pouvoir lui permettra d'avoir une place dans la métropole, car high-tech ou pas, Tekhos n'avait toujours pas inventée les immortelles et elle sera parfaitement à sa place dans l'armée.

Le robot avait disparu de son champ de vision et Selene le soupçonnait de vouloir l'éviter. Elle entra donc dans ce qui ressemblait à un bar et, en esquivant les regards surpris et moqueur, elle s'assit à une place dans un coin. En effet, une femme habillée à la mode de Nexus qui parle à un robot ménagé n'inspire pas le respect. Ses yeux améthystes glissèrent sur les gens qui occupaient les tables, analysant, scrutant et identifiant chacune des personnes qui discutaillaient dans un bourdonnement incompréhensible. Puis elle finit par fermer les yeux et s'immergea dans les conversations, retenant quelques bribes par-ci par-là, les décryptant puis les relâchant dans le brouhaha ambiant. Elle ne mettrait pas longtemps avant de s'habituer à Tekhos. Il fallait simplement qu'elle continue à étudier cette environnement.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le dimanche 21 mars 2010, 15:21:40
Comme cela avait déjà été démontré lors de sa petite excursion à l'Auberge de Nexus, l'un des principaux passe-temps de Louis était de trainer dans les bars les plus populaires et les plus fréquentés afin d'en apprendre chaque jour un peu plus sur cette humanité qui l'entourait en permanence. Ce jour là, c'était Tekhos qui était sur sa liste. Nous ne reviendrons pas sur les possibilités qui lui auraient fait passer de Nexus à Tekhos en à peine quelques heures. Ce serait déplacé. Autant laisser une libre interprétation au lecteur. Huhu. Quoi qu'il en soit, ce fut de jour qu'il décida de poursuivre ses observations. Cela faisait désormais un moment qu'il n'avait pas vraiment eu d'affaires de gros calibres à gérer, et en dépit de sa grande popularité dans les domaines spécifiques, le blondinet aimait également prendre le temps de connaitre la plèbe.

Ce fut d'ailleurs un spécimen fort intéressant qui se pointa dans le bar alors qu'il était en train d'observer une partie de poker, sachant dès le départ qui allait gagner et qui allait exploser de colère. Une jeune fille qui provoqua l'hilarité générale. Paradoxalement, elle n'était pas idiote. Non. Si son visage exprimait une éternelle candeur et son apparente ignorance des machines une naïveté ravissante, elle n'avait pas ce côté bovin, ce regard neutre, qu'ont les idiots. Outre leur couleur inhabituelle, ses yeux brillaient d'une lueur vive et parfaitement pétillante. Le signe des esprits intéressants. Louis tourna la page du livre qu'il avait entre les mains, sirota un peu de son cocktail du bout de sa paille, tout en suivant le parcours de l'étrange inconnue.

C'est la troisième étape de son apparition qui l'intrigua le plus. Car d'une façon ou d'une autre, il se reconnut en elle. Se poser, se taire, observer. Fermer les yeux pour donner leurs pleins pouvoirs à nos oreilles, ne rater aucune conversation, ne laisser s'échapper aucun bruit, tout percevoir, tout contrôler, et pourtant ne rien faire. Cette attitude, Louis la connaissait. Si la jeune fille était juste fatiguée ou en état de transe, son corps aurait adopté une courbe plus avachie ou plus démente. Mais cette posture à mi chemin entre la nonchalance et le self control total, n'étaient due qu'à de la concentration. Le sourire du gentleman s'élargit. Il savait qu'elle l'entendrait. Aussi, il se permit de murmurer, à un volume qui fut bien vite absorbé par le tumulte de l'endroit, mais que Selene parviendrait à distinguer au fond de ce brouhaha général; des mots qui lui étaient directement destinés:


"Une sublime lueur que vous avez dans le regard, très chère. Puis-je me joindre à vous?..."

Si la jeune femme cherchait la source du son, elle tomberait nez à nez avec un visage pâle encadré de cheveux blonds, à l'autre bout de la salle, un oeil bleu et un oeil rouge braqués sur elle, le tout ornant un sourire ambigu mais parfaitement aimable. Louis ne bougea pas et décida d'attendre la suite des événements.

De son côté, le perdant de la partie de poker commencait à taper du poing sur la table.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le dimanche 21 mars 2010, 18:13:01
Selene était concentrée sur trois soldats accoudés au bar. Leurs conversations n'avaient aucun intérêt mais ce n'était pas le contenu qui intéressait l'immortelle, mais bien le contenant. Il s'agissait de femmes qui parlaient sur un ton décontracté. Rien à voir avec le genre de conversations qu'entretiennent les soldats en tant de guerre. La jeune fille ne connaissait rien de Tekhos et ces bribes de conversations lui permettaient d'en savoir un peu plus sur l'endroit où elle comptait passer quelques années. Elle était toujours en quête de savoir et lorsque Tekhos n'aura plus rien à lui apprendre, elle pourra partir. Mais dans l'immédiat, il fallait survivre. Trouver de quoi subsister. Lorsque toute les conditions nécessaires seront réuni, elle pourra commencer à engranger des connaissances. Selene n'était pas pressée, elle avait toute l'éternité devant elle.

L'immortelle capta un murmure. Le genre de paroles qui sont d'abord comprises par le subconscient et qui nous font réagir instantanément. La dame ouvrit les yeux et fit glisser ses mires violines sur l'homme qui la regardait. Elle le fixa pendant quelques instants pour être sûr qu'il ne la regardait pas, à ce moment là, par pur hasard. Au premier abord, il semblait sympathique mais elle se fichait comme d'une guigne de la première impression. L'instinct est basé sur des sentiments et des pulsions, ce qui le rend indigne de confiance. Au fur et à mesure, l'immortelle avait appris à ne plus l'écouter. Mais ça ne voulait pas dire qu'elle allait refuser la requête de l'homme aux yeux vairons.

Dans un premier temps, elle lui sourit timidement. Les sourires endorment la confiance et ils facilitent les rapports sociaux. De plus, ils ne coutent absolument rien. Puis dans un deuxième temps, elle simula quelques tics qui expriment la gêne ; se mordre imperceptiblement la lèvre inférieur, croiser les bras et avoir un regard fuyant. Ce genre d'expressions fallacieuses étaient la routine pour Selene. Si bien qu'elle parvenait même à se tromper elle-même. Enfin, la troisième étape consista à pousser légèrement la chaise qui lui faisait face pour inviter son mystérieux admirateur.

Le bonhomme n'avait pas l'air menaçant mais Selene agissait toujours de cette façon. Amis, ennemis ou bien comme dans le cas présent, parfait inconnu. Ce n'était rien de plus qu'un système de défense bien rodé et en aucun cas une agression. C'est sa curiosité qui avait poussée la jeune fille à en savoir plus sur cet homme. Or, elle connaissait bien le vieil adage qui incite à ce prémunir de ce vilain défaut.

Je suis nouvelle ici, expliqua-t-elle à l'homme, lorsqu'il fut à portée de voix. Votre intérêt pour moi vient surement de là et non de ma... lueur.

Elle le regarda toujours avec une timidité feinte. Une expression qui allait très bientôt disparaître.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le dimanche 21 mars 2010, 19:29:52
La jeune femme mentait bien. Admirablement bien même. Durant ses longues années d'étude de micro expressions, Louis n'avait que rarement vu des individus capable de feindre l'ennui avec talent. Peut-être s'il eut été plus près d'elle, certains tics de visage imperceptibles lui auraient crevé les yeux, mais à cette distance, l'inconnue jouait merveilleusement son rôle de "jeune première". Il ne la lacha pas un seul instant du regard, jusqu'au moment où elle poussa subtilement le siège en face d'elle. Involontairement sans doute son regard croisa de nouveau celui du blond. Il comprit le message subconscient, ferma son livre et se leva pour rejoindre la belle. Mais avant même qu'il n'ait pu se présenter, elle prit les devants et expliqua une potentielle raison de cette fascination qui l'avait pris. Le problème était qu'elle se trompait. Non qu'elle était sotte ou naïve, comme nous l'avons dis précédemment. Disons juste qu'il lui manquait des éléments.

"Vous auriez été une habituée, ou je vous aurais croisé sur votre planète d'origine que cela n'aurait rien changé. Ce n'est pas votre néophysme qui m'intrigue."

Il s'assit et la regarda avec un sourire. Très bien. Elle voulait passer pour une ignorante, il jouerait le jeu. Inutile de lui faire comprendre qu'elle avait en face d'elle quelqu'un qui avait passé la majeure partie de sa vie à étudier les sourcils ou les zygomas pour savoir qui mentait, et ce mieux que n'importe quel détecteur de mensonge. Aussi, il ne reviendrait pas sur le sujet. Ce genre de micro expressions étaient quasi-inévitable. Même lui ne saurait pas se mentir. La meilleure chose à faire était donc de lancer la conversation sur quelque chose où il pourrait se permettre d'être franc.

"Je ne sais pas ce que vous cherchez ou ce qui vous intéresse, mais il y a assez peu de chance que vous le trouviez ici. Je suis un... "observateur" également. Mes précédentes heures en ce lieu n'ont rien donné de palpitant."

Observateur était un euphémisme pour "voyeur". Mais ca, les deux individus le savaient pertinemment. Tout comme il était implicite que Louis ne se positionnait pas en supérieur. Il était arrivé le premier, c'était donc logique que le scanner de la jeune femme lui fut plus simple à repérer que le sien. Il lui tendit une main amicale et lui dit, dans le droit des yeux, avec un sourire impossible à interpréter:

"Louis Cyphre. Et à qui ai-je l'honneur?"
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le dimanche 21 mars 2010, 23:03:02
Selene était passé experte dans l'art de transmettre de fausses émotions. Mais face à un autre expert, cet art était dévoilé et perdait toute son efficacité. Même si elle parvenait à simuler des expressions, ce n'était que de la simulation et donc par définition, elles étaient imparfaites. Mais ça Selene n'y prêtait pas attention. Par négligence, plus que par ignorance. Les conséquences n'étaient jamais préjudiciable dans son monde. Un avantage pour l'homme assit en face d'elle.
Cet homme était donc un « observateur » au même titre qu'elle, selon ses dires. Elle espérait tout de même, dans son intérêt, qu'il était plus doué qu'elle. Ce n'était pas vraiment son domaine. Au lieu d'observer des réactions, l'immortelle préférait les provoquer elle-même, par la manipulation. Il n'y a rien de plus glorifiant que de manipuler un être aussi complexe et imprévisible que l'homme. Percer les mystères du comportement humain et prévoir ses réactions. Sa faculté d'apprentissage rend l'art de la manipulation encore plus difficile car on peut tromper une fois mille personnes mais on ne peut tromper mille fois une personne.

Selene lui rendit son sourire et lui serra la main. La paume orientée vers le bas. Une signification qu'un « observateur » ne pouvait ignorer : La domination. Un geste inconscient chez la jeune fille, mais très révélateur de son caractère.

Je m'appelle Selene, répondit-elle avec un sourire avenant.

Elle fronça légèrement les sourcils et se tapota le coin de la bouche d'un air songeur.

Mais dites-moi Monsieur Cyphre, si vous ne savez pas ce que je cherche, ni ce qui m'intéresse comment pouvez-vous savoir ce que je pourrais trouver? - La jeune fille le gratifia d'un petit sourire mystérieux-. D'ailleurs peut-être que je l'ai déjà trouvé et que le reste n'est que facultatif ; tout comme notre rencontre.

Un droïde serveur choisit ce moment pour arriver à leur table. Il s'enquit de leur commande avec une voix synthétique douce et accueillante. Selene observa la machine et demanda une bière brune avec cette même politesse inutile. Lorsque le serveur se retira, Selene laissa échapper un « fascinant » puis reporta son attention sur son invité.

Pour être franche, fit-elle en lachant la bride à sa réserve. Je viens de Nexus et je voudrais vivre ici... Pour un temps. Comme vous vous en êtes peut-être douté, cet endroit me fascine.

Ce qui n'était pas tout à fait vrai. Reste à savoir si les non-dits pouvaient être considérés comme des mensonges. Selene voulait s'approprier tout le savoir qui résidait ici. Bien sûr, elle cherchait quelque chose de spécifique sinon il lui faudrait plus d'une éternité pour arriver au bout de sa quête. Ce qu'elle cherchait appartient au domaine des sciences. Bien que, la compréhension du monde était passionnante, elle cherchait surtout à ce connaître elle-même et notamment le mystérieux pouvoir qui la gardait en vie, envers et contre tout. Pour l'immortelle, c'était un but comme un autre ou bien un rêve, peu importe son nom. Sa principale fonction était de la faire aller de l'avant et plus elle échouait plus cette motivation était efficace. L'étude de soi est la discipline la plus ardu et la plus salutaire qui soi.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le dimanche 21 mars 2010, 23:41:35
L'attitude de la poignée de main n'échappa bien évidemment pas à l'attention de Louis. Plus que par observation pure, c'était principalement parce qu'il était lui-même inconsciemment de ceux qui serrent la main de cette manière. Néanmoins, à la seconde où il sentit la paume de Selene prendre un peu le dessus sur la sienne, il se laissa faire et ne forca rien. Son geste resta ferme mais ne réclamait aucune autorité. Il n'avait pas besoin de ca. Lorsque le robot serveur arriva, il demanda juste un verre de vin blanc. Le meilleur qu'ils avaient à disposition. A son départ, le blondinet continua d'écouter les propos de la jeune femme sans un mot. Elle tentait d'ébranler ses précédentes remarques avec une étonnante justesse, mais lui écoutait ce petit speech avec un indétronable sourire et un regard focalisé sur la teinte améthyste des yeux de son homologue. Si il avait pu lire dans ses pensées, sans doute aurait-il été surpris de se rendre compte combien elle lui ressemblait. Il la laissa finir et demanda, de but en blanc, et faisant fi de toutes les règles de courtoisie qui dictaient d'ordinaire sa conduite:

"Quel âge avez-vous Selene?"

Il se pencha en avant, posa un coude sur la table et saisit son menton entre ses doigts. Il regarda le robot serveur puis revint à la jeune femme avant qu'elle n'ait pu lui répondre:

"Vous avez l'air fort jeune. Paradoxalement votre regard ne reflette en rien la jeunesse de vos traits. Je ne parle pas de maturité ou d'expérience. Mais une surprise, chez les gens dont la vie commence à peine, s'exprime même chez les plus stoïques par une lueur d'impatience. Une dilatation de l'iris. Un soubresaut de la rétine. Une lueur passagère mais indubitablement présente qui, si le corps ne sautille pas du plaisir de la nouveauté, exprime cette surprise à sa place."

Il lacha son menton et croisa les bras.

"Votre regard n'exprime aucune impatience quand vous parlez de cet endroit. Juste une curiosité mure et profondément réfléchie que jamais la jeunesse ne possède. Cela ne peut vouloir dire qu'une chose: vous avez bien plus que vous ne paraissez."

Quel était le rapport avec ce que dont Selene avait parlé jusque là? Il y venait.

"C'est donc ce qui me fait croire que vous n'avez toujours pas trouvé ce que vous cherchez. Malgré toutes ces années. Tous ces siècles, peut-être? Et que si vous êtes à Tekhos, lieu où les étrangers sont parmi les plus malvenus, c'est que ce que vous cherchez et ce qui vous fascine est plus dur à trouver qu'un simple bar ou qu'une simple rencontre fortuite."

Il se recula et s'adossa à son siège.

"Je me trompe?"

Conclut-il, toujours souriant.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le lundi 22 mars 2010, 18:47:34
Un regard incrédule où se peignait une réelle surprise d'être ainsi auscultée. C'est ce qui était fixé sur l'homme assit à sa table. Louis l'étudiait comme on étudie n'importe quel phénomène compréhensible et mesurable. Il y avait de quoi se vexer. L'égo supporte mal d'être considéré comme un objet d'étude manipulé, voir méprisé. Selene appréciait le mystère. Surtout celui qui l'entoure, or elle devait bien admettre qu'elle était aussi transparente que du verre pour l'observateur. C'était une sensation étrange même si pour une raison qui lui échappait ; ce n'était pas si désagréable. Plus besoin de faux-semblants ou de circonvolutions propres au langage des bonimenteurs puisque ces procédés seraient éventés.

Elle pinça les lèvres puis lui offrit un de ses plus beaux sourires. Même si le catalogue de sourires de l'immortelle ne comportait presque aucun article qui soit authentique, il fallait admettre que celui-ci était un de ses plus éblouissants. Il exprimait parfaitement le ravissement qui l'habitait. C'était agréable d'être face à un homme aussi doué. Plus doué qu'elle.

Cette pseudo-supériorité que Selene admettait de la part du gentleman, qui avait eut l'honorable décence d'empoigner son propre menton plutôt que le sien, ne l'empêcha nullement de lui rendre son sourire avec une pointe de sarcasme en complément.

Vous allez bien vite dans vos raisonnements. Avec la précipitation, il se peut que vous ayez oublié de prendre en compte quelques éléments. Néanmoins, il se trouve que vous ne vous êtes pas trompé.

Ça ne gênait absolument pas l'immortelle de l'avouer. Elle avait passée l'âge des duels d'égo. Selene prit son verre et le leva avant de prendre une gorgée de bière dont l'arôme puissant lui envahit le palais.

Pourtant j'ai l'impression que vous parvenez à me cerner si facilement parce que vous savez reconnaître vos pairs. Je ne sous-entend pas que vous avez une passion pour les mécaniques mais nous ne sommes pas si différents.-Elle posa le verre et se pencha sur la table avec des airs de conspirateur. Elle ajouta dans un murmure: - A la différence que moi je ne tire aucuns plaisirs de « l'observation ».
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le mardi 23 mars 2010, 20:55:28
Bien sur qu'il allait vite dans ses raisonnements. Ou plus précisément, il allait vite dans ses explications. Lorsqu'il avait exprimé ses hypothèses, il n'avait pas la moindre idée de comment Selene réagirait. Il avait donc décidé d'aller à l'essentiel. Mais si l'affaire avait été sérieuse, il aurait su poser les bonnes questions pour affiner sa recherche. Par chance, non seulement ce ne fut pas le cas, mais en plus il avait touché juste du premier coup. Une pointe de fierté lui titilla les orteils. Par la suite l'analyse de la jeune femme, bien que beaucoup moins poussée que la sienne, était très bien vue, et dénotait un sens de l'observation qu'elle se refusait à apprécier. Dommage. Une fois sa dernière phrase prononcée, Louis se pencha également en avant, posa sa tête sur sa main qu'il accouda à la table de nouveau, et répondit, tout sourire:

"Allons, allons, très chère. Pour les gens comme nous, la vie est trop longue pour qu'on commence à en bouder les petits plaisirs, non? Et puis cette observation que vous semblez na pas courtiser peut se montrer d'une grande utilité, et amener des événements des plus délicieux!"

Il brandit son verre à l'attention de la jeune femme:

"Aurais-je l'occasion de vous parler comme je vous parle, sinon?"

Hop, sourire colgate. Hop, dernière rasade de vin.
Par ailleurs, le choix de ses propos avait été parfaitement maitrisé. Il avait employé le terme de "gens comme nous". Et au vu de la suite de sa phrase, Selene n'aurait pas le moindre problème à comprendre que, s'il ne s'agissait peut-être pas d'un immortel, qu'au moins il avait beaucoup plus que l'âge qu'il faisait. Les nombreux sourires dont il l'assaillait ne dévoilant aucune canine plus pointue, et son teint étant pâle mais mate, ne dévoilaient aucun des traits des morts vivants conventionnels. Louis posa finalement son verre et revint à la jeune femme, plus sérieux, mais la bouche toujours figée dans ce rictus appréciateur dont il n'avait pas l'air de savoir se défaire:

"J'aimerais me permettre une question qui peut-être sera indiscrète. Si vous n'avez pas envie de répondre, arrêtez moi de suite. Mais à quoi devez-vous votre... hmm... "Grand Age", Dame Selene?"

Car les caractéristiques qui permettaient de ne certainement pas classer Louis comme un mort vivant étaient également valable pour la petite brune. Et si le sens de l'observation du gentleman aurait pu avoir raison de ce secret après quelques questions plus ou moins bien choisies, il préféra jouer la carte de la franchise de nouveau. Son principal but, voir quelle image la jeune femme semblait avoir de lui, après quelques minces premières minutes de discussion...
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le mercredi 24 mars 2010, 16:43:07
Malheureusement, Selene ne se privait pas du soi-disant plaisir de l'observation, tout simplement parce que cette activité n'était que utile pour elle. Elle se fichait de la vie des autres et ne s'enorgueillissait pas de percer les mystères du curriculum vitae d'un parfait inconnu. La seule personne qui a de l'intérêt est elle-même. Tout ce qui ne la concerne pas est destiné à être méprisé ou au mieux, ignoré. Louis n'avait le droit à ni l'un ni l'autre. Même s'il fait parti des autres et donc, est potentiellement sans intérêt, il interagit en ce moment avec l'immortelle, ce qui l'élève au statut de "remarquable".

Cependant, Selene avait notée que, pour Louis, ne pas tirer de plaisir à observer était inconcevable. Un petit indice sur sa personnalité qui lui arracha un sourire. Mais ce n'était pas l'élément le plus intéressant. Il fallait être idiot pour ne pas relever le « nous », ce qui impliquait que Louis confirmait ses dires. Un immortel? Si c'était le cas, ça changeait entièrement la donne. Selene était constamment à la recherche de personne comme elle. Mais sur Terra les soi-disant immortels n'étaient que des charlatans dont l'immortalité était soumise à conditions ; comme les vampires. Ce genre de personnes n'était pas des immortels mais plutôt des « durs à cuire ». Ne confondons pas les torchons et les serviettes. Quoiqu'il en soit la seule façon de savoir si son interlocuteur était fait du même bois qu'elle, était d'essayer de le tuer. Mais l'immortelle avait été initiée aux rudiments de la politesse, ce qui la tenait éloignée de ce genre de procédés.
Sur terre, Selene cachait son pouvoir et tuait quiconque aurait le moindre doute sur son humanité. Mais sur terra, tout le monde était anormal et cette particularité passait inaperçue. La politique était donc bien différente.

J'aimerais vous répondre mais la problématique que vous venez de formuler est le but de toute une vie, et d'après vous elle serait relativement longue, lui répondit-elle finalement. Le peu de choses que je sais est empirique

Avec un sourire désolé, elle prit une nouvelle gorgée de bière. Cependant, la jovialité revint très rapidement à l'assaut de son visage.

Serait-il déplacé de vous renvoyer votre question, même si je n'ai pas pu y répondre?
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le samedi 27 mars 2010, 22:50:03
Ooops, un blanc. Louis sembla réfléchir. Son sourire laissa un instant la place à une moue concentrée tandis que son regard se perdit dans le vague en ouvrant de grands yeux. Il cligna une ou deux fois des paupières avant de revenir à Selene et de lui répondre d'un simple mais sincère:

"J'me souviens plus ._."

Si c'eut été possible pour un tempérament comme celui de la jeune femme, l'image clé suivante aurait été elle au sol, le pied ballant en l'air avec une large goute sur l'arrière du crâne. Comment pouvait-on oublier l'origine de sa malédiction? Ou du moins, de ce qu'elle ne semblait pas considérer comme une bénédiction? Louis trucida un énième légume et reprit, avec un sourire plus satisfait qu'autre chose:

"Je pense être né comme ca, par conséquent j'ai pas vraiment de problème avec le fait de ne pas vieillir. J'ai appris à vivre avec. Après tout, certains naissent daltoniens voire aveugles et deviennent de grands artistes tout de même. Alors pourquoi un immortel ne pourrait-il pas jouir de la vie?  ;)"

L'exemple était douteux car, justement, un handicap à l'échelle de toute une vie était difficilement comparable à "ne pas avoir de vie" à proprement parler. Il était d'ailleurs assez peu probable qu'au vu de cette immortalité, Louis Cyphre n'ait jamais été tué par le passé. Ce qui semblait signaler qu'il bénéficiait également d'une invulnérabilité relative. C'était pratique au fond. Le dandy posa ses couvert et essuya ses lèvres qui n'étaient même pas sales, avant de reprendre:

"Cela dit très chère, vous ne m'avez pas répondu. Quel âge avez vous? N'essayez pas de me le demander, j'ai arrêté de compter en 1127."

Il attendit la réponse de la jeune femme en remplissant de nouveau son verre ainsi que le sien, et en en buvant une première gorgée. La saveur lui chatouilla le gosier et le fit lacher une petite grimace d'appréciation.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le dimanche 28 mars 2010, 12:54:59
Selene haussa un sourcil en entendant les explications pour le moins expéditives. Bien sûr qu'elle ne le croyait pas. C'était inconcevable pour elle que l'on fasse si peu cas de ce qui pourrit sa vie depuis des siècles. Il ne savait plus? Disons plutôt qu'il ne sait pas. Ce qui serait un peu plus crédible. Mais c'était surtout le fait que cette question ne le tourmente pas qui choquait l'immortelle. Elle qui n'avait cessée d'apprendre et d'amasser des connaissances. Elle qui a avancée dans l'histoire absorbant toutes les sciences des hommes et donnant des explications aux phénomènes qu'elle ne comprenait pas. Pourtant le mystère qui la narguait le plus était en elle. Rien ne l'expliquait. C'était impossible. Aucuns concepts ou modèles physique ne pouvaient expliquer ce qu'était Selene. La seule chose qui aspire à l'immortalité est la vie mais sa méthode est la reproduction et non la longévité. Selene était donc une aberration de la nature.

Selene remercia Louis d'un léger signe de tête lorsqu'il eut fini de remplir sa coupe. Il lui semblait qu'un étau lui serrait le cœur. La jeune fille baissa les yeux sur son verre et caressa machinalement le matériau amorphe. Elle semblait mal à l'aise mais d'imperceptibles spasmes de sa mâchoire laissaient deviner une certaine impatience. Le plaisir de la nouveauté. En effet, c'était la première fois qu'elle rencontrait ce qui pourrait se rapprocher le plus d'elle. Un sujet d'étude fascinant.

Comme vous vous en doutez, j'ai cessé de compter moi aussi, expliqua-t-elle en levant les yeux sur lui. Mais d'après des estimations que je dois à l'histoire. La réponse serait 2500.

Le regard de Selene s'intensifia. Elle savait qu'elle n'avait pas l'air d'avoir cette âge astronomique. On avait plutôt tendance à imaginer des êtres aussi vieux comme des puits de sagesse. De vieux sages avec une longue barbe blanche, calme et inébranlable comme un chêne séculaire, parlant par énigmes et sans émotions. Selene n'avait rien à voir avec cette caricature. Elle était impulsive, folle et parfois inconsciente. L'esprit humain n'est pas fait pour vivre aussi longtemps. Si le temps laissait son corps indemne, son esprit, lui recevait des dommages irréparables. Ce n'était plus que des lambeaux de consciences flottant misérablement sur un océan de traumatismes et d'émotions conflictuelles. Et parfois ces lambeaux coulaient.

Je ne sais pas à quoi ressemble votre vie, aussi j'éviterai d'essayer de le deviner. Mais je me demande si vous n'avez jamais cherché à découvrir ce que vous êtes. Et ne me dites pas que c'est l'œuvre d'un quelconque dieu capricieux. Lorsque je suis née mon peuple croyait que la foudre était la vengeance du ciel sur la terre. De part son arrogance naturelle l'homme à tendance à expliquer tout ce qu'il n'est pas capable de comprendre par des théories invérifiables. Il en est de même pour ce que je suis. Il y a une explication et je la trouverai. Tout comme il y a une explication à terra ; ce monde  remplie d'énormités toutes plus extravagantes les unes que les autres.

Selene avait lentement et sans s'en rendre compte, haussée le ton. La colère brulait derrière chacune de ses paroles mais elle n'était pas dirigée vers Louis. Elle détestait les superstitions et ceux qui se satisfaisaient de résultats non prouvés. Quand à terra, cet univers chamboulait ces perceptions, sans pour autant les anéantir. En 2500 ans, il en fallait plus pour faire changer d'avis l'immortelle. La girouette était rouillée par les siècle et ne changerait plus de direction. Elle avait d'ailleurs plusieurs théories pour expliquer ce monde farfelu.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le dimanche 28 mars 2010, 14:50:24
Louis haussa un sourcil interrogateur. Il regarda Selene et l'écouta, haussant progressivement le ton, sous les yeux impassible mais incompris de son homologue. Il la laissa finir et réfléchit, se remémorant la conversation. Il comprit sa méprise. Etrangement, il avait très mal choisit ses mots. Le blond lui répondit, d'un ton neutre mais de toute la sincérité dont il bénéficiait:

"Oh, je me suis mal exprimé très chère. Je sais pourquoi je suis immortel. Ce que j'ai oublié, c'est pourquoi moi. Je me souviens ne pas avoir été le seul sur la liste, mais il faut croire que le temps a effacé les raisons de ce choix."

Il but une nouvelle gorgée de sa boisson en prenant le temps de réfléchir à ce que Selene lui disait. Son regard se leva. Cette fois, le rictus qui déformait ses zygomas avait prit une teinte des plus hilares, comme s'il se retenait de toute ses forces de lui éclater de rire au nez. Ses yeux brillaient d'une lueur nouvelle, comme si ce sujet était sa passion ou sa raison de vivre. Impossible de dire pourquoi vu la banalité des propos qu'il tenait. Mais une chose était sûre, cette discussion allait dans son sens:

"Héhéhé, de l'arrogance dites-vous? Ne pensez-vous pas qu'il s'agisse d'avantage de peur et d'ignorance? Et si je vous disais que c'était l'oeuvre de quelque Dieu que ce soit? Ne me croiriez-vous donc pas? Même si je vous disais..."

Il se pencha de nouveau en avant plus près que jamais, colla presque ses lèvres contre l'oreille de la jeune femme et lui murmura:

"...que j'ai arrêté de compter bien longtemps après avoir eu le double de votre age, Jeune fille?..."

Le paradoxe de cette appellation avec les approximatifs 2500 ans de Selene devrait suffir à la convaincre de la véracité de ses propos. Et de toutes façons, qu'elle le croie ou non, il disait la vérité. Louis avait cependant conscience qu'elle ne serait pas forcément assez crédule pour le croire. Après tout, c'était apparemment exceptionnel qu'elle rencontre un autre immortel, alors si en plus celui-ci prétendait être au moins trois fois plus vieux qu'elle, difficile serait à prévoir sa réaction. Louis Cyphre se rassit. Il ne revint pas sur la dernière partie des questions de la jeune femme. Il avait des réponses mais préférait éviter d'avoir à mentir. Aussi il espérait que cette petite déclaration divertisse suffisamment l'esprit de la Belle pour l'éloigner des questionnements au sujet de Terra.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le lundi 29 mars 2010, 17:52:26
Selene pianotait sur la table. Le blondinet l'agaçait ; c'était un menteur et un hâbleur. Elle était peut-être idiote mais elle n'était pas naïve. Son histoire ne tenait pas debout et il y avait vraisemblablement peu de chance qu'il soit plus âgé qu'elle et surement pas à ce point. Non pas qu'elle voulait à tout prix être la doyen de l'humanité mais les probabilités, qu'un être soit aussi vieux que Louis le prétend, restaient très faible. Mais elle n'allait pas le contredire. Ça ne mènerait nulle part. Aussi elle acquiesça sans un mot devant ses affirmations.

Cette information vrai ou fausse n'était d'ailleurs pas capitale. Ce qui l'avait le plus intrigué est le fait qu'il l'ai reprit sur un thème qui n'avait pour objectif que d'amener la conversation sur terra. D'ailleurs il semblait bien plus intéressé par ça. Il avait sans doute raison car terra n'était pas non plus un sujet des plus intéressant.

Sans cesser de pianoter, elle mit un coude sur la table et appuya sa tête sur son bras. Elle lui jeta son habituel regard impassible qu'elle affectionnait tant lorsqu'elle ne voulait pas être décrypter. Un réflex car elle était consciente que cette tactique ne fonctionnait pas sur Louis.

Ça dépend de quel dieu vous parlez, fit-elle en ignorant sa déclaration à propos de son âge. Si vous faites référence à la cause première qui n'est elle-même causée par rien alors je suis d'accord avec vous. Cependant, ça ne nous avance pas beaucoup, n'est-ce pas?

Lorsqu'elle repensait aux propos de Louis, l'immortelle avait l'impression que le supposé grand âge de Louis faisait foi quand à la véracité de ces propos. De plus, le «jeune fille» résonnait presque comme une insulte à ses oreilles. Il fallait vite corriger ça.

Quand à votre âge avancé j'espère que vous ne le brandissez pas comme un atout qui prouverait la véracité de ce que vous avancez. Plus on est vieux, plus on a le temps de se tromper et de s'enfoncer dans notre erreur. Après tout, les plus grands sages sont morts et non immortels.

Tout en prenant une gorgée du breuvage servit pas Louis, elle regarda distraitement la table de poker où une bagarre s'était déclenchée. La violence l'excitait et c'était heureux qu'elle discute calmement avec Louis. Ses meilleurs moments de lucidité était lorsqu'elle débattait et pendant ces instants privilégiés, sa folie la laissait en paix, car toute son attention était fixée sur l'intellect et non pas sur ses émotions. Cet état durera tant que Louis lui fera la conversation.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le lundi 29 mars 2010, 19:33:44
Louis eut un rire amusé. Il sentait qu'il avait mal choisit ses propos, et décida d'ignorer le jeu de désinvolture de sa compagne. Il reprit:

"Allons allons, Dame Selene, ne vous vexez pas pour si peu, ce n'était pas mon intention. A dire vrai j'eus espéré que savoir que je suis votre ainé vous aurait fait plaisir autant que le fait de savoir que nous étions semblables. Navré que la formulation de mes propos ait été mal venue. Mais encore une fois vous faites preuve d'une grande sagesse..." il retint le 'pour votre jeune âge' qui lui montait aux lèvres "...mais je pense que comme les nuances que vous émettez à mon discours, il y a des nuances à émettre au votre."

Mais ce n'était pas son rôle. Que pourrait-il lui dire? Des arguments qui ne la convaincraient pas en dépit de leur véracité? Comme "regardez les dieux, ils sont immortels mais certains ne sont-ils pas sages?" Elle ne croyait apparemment en aucun Dieu. A tort d'ailleurs. Le monde de Terra en était la preuve. Par conséquent le blond rangea définitivement au placard les explications sur ce monde. Si le sujet revenait, il se contenterait de l'exquise ignorance. Sauveuse de bien des maux. Il but de nouveau en reprenant.


"Néanmoins je ne vous ai pas menti. Je suis bien plus âgé que vous. Et j'ai vécu des époques où l'humanité n'en n'était qu'aux balbutiements de son organisation.  Et savez-vous pourquoi je n'ai pas le temps de m'enfoncer dans mes erreurs?"

Il avala et répondit:

"Parce que passé un certain stade, si le fond de l'homme reste le même, l'humanité en général, elle, change. Par conséquent, ce que j'apprends je n'ai d'autre choix que de l'éditer au fil des siècles et de mes voyages. Voyez nos amis Grecs de l'ancien temps, que vous avez du connaitre à peu près autant que moi, au moins de réputation. Des gens qui estimaient que le sport, l'intellect et l'art allaient de paire! Et dont les vices révélaient d'avantage d'orgies et d'homosexualité, qu'en plus personne ne blâmait. Et pourtant ils ont toujours été parmi les plus sages philosophes! Prenons les Mayas..." Il eut un doute. Flemme de faire le calcul de l'âge de son homologue. "Je ne sais pas si vous avez connus, mais en dépit d'une sauvagerie et d'une inhumanité sans nom, qui allait jusqu'à déformer le crâne de leurs enfants pour les faire passer pour des Dieux, ils étaient des scientifiques d'un niveau cent fois supérieurs à ceux d'aujourd'hui. Personne ne saura vous dire par quel miracle les murs qu'ils ont bâtis tiennent tant leur conception semble surréaliste aux hommes de nos jours. Je ne peux pas faire d'erreurs si je pars du principe qu'il n'y a pas de Vérité, n'est-ce pas? A moins que je ne me trompe sur ce concept, mais ca se mord la queue."

Personne, sauf un individu ayant cotoyé les dits mayas, bien sûr.

"Epoques, lieux, siècles. Oui, tous les plus grands Sages sont morts. Mais les plus grands sages morts n'étaient, par définition, pas immortels. Alors comment savoir si un immortel ne peut pas être un Sage également? Vous en êtes la preuve vivante, Selene. Vous avez gardé un caractère profondément humain, et pourtant vous n'abordez plus les choses avec la même candeur qu'autre fois, même les choses dont vous ne comprenez pas le fonctionnement. Un non-sage connait la stupeur, l'effroi, la surprise. En êtes-vous capable seulement? Soyez honnête, et dites-moi si ces sentiments ne sont pas remplacés par la lassitude, l'attente et l'intrigue. Cela ne fait-il pas de vous un Sage?"

Louis parlait en connaisseur. De son point de vue, c'était ainsi qu'il vivait les choses. Il porta le verre à ses lèvres avant de conclure:

"Alors, certes. Il faudrait commencer par définir ce qu'est la Sagesse, et ajouter le coefficient "chacun son avis". Après tout la Vérité dépend du vécu de chacun, et je pense que l'immortalité ne peut qu'accentuer cette division des points de vue tant le vécu en question à de chances de différer. Mais là n'est pas le sujet..."

Et il but. Il avait beaucoup parlé, il espérait ne pas avoir étouffé la jeune femme de son monologue. Cela faisait très longtemps qu'il n'avait pas eu de discussion aussi intéressante et, quelque part, aussi intellectuelle. Au fond de lui, il priait pour que l'inconnue soit aussi réceptive à cette conversation que lui enclin à la lancer et à amener des questions.

Une jeune femme fascinante!
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le jeudi 01 avril 2010, 18:15:19
Selene n'était pas sûre de savoir où voulait en venir le dandy. Elle ne le croyait toujours pas au sujet de son âge mais il n'y pouvait rien car s'était une décision qu'elle avait prise. La décision de ne pas croire à une chose aussi absurde. De toute façon, l'homme ne pouvait lui donner aucunes preuves donc ça ne servait à rien de tergiverser sur ce problème car ça ne changeait pas son point de vue sur lui.

Si Louis pensait qu'elle ne ressentait pas la peur ou la surprise, il se trompait lourdement. Selene avait tout le temps peur. Peur de souffrir, peur de s'ennuyer, peur de vivre pour toujours. Parfois certaines choses arrivaient même à la surprendre. Des choses qui lui étaient forcement déjà arrivées mais qu'elle avait oubliée.

Même après toutes ces années je peux ressentir tout l'éventail de sentiments humain. Et j'espère que vous aussi, sinon je ne vous considère pas comme humain. La surprise, l'effroi et la stupeur n'ont pas été remplacé par la lassitude, l'attente et l'intrigue. Ils ont été étouffés par eux. D'ailleurs, je suis intimement convaincu que je peux vous faire ressentir au moins l'un d'eux.

Ses yeux améthystes de mirent à briller d'une lueur malveillante et menaçante. Elle le gratifia d'un sourire sinistre qui s'évanouit pour faire place à un petit rire. Elle secoua la tête et le fixa de nouveau. La lueur avait disparue.

Je plaisante, précisa-t-elle.

Son regard dériva une nouvelle fois sur la table de poker. Le gérant du bar avait fini par arrêter les bagarreurs et la partie avait reprit dans le calme.

Mais revenons à nos affaires. Je ne me considère absolument pas comme un sage. Je ne connais pas la définition de ce mot mais pour moi un sage est capable de s'affranchir de ses sentiments et trouver la vérité grâce à un raisonnement et non une intuition ; ou alors de confirmer l'intuition par le raisonnement. Ça nécessite d'être intelligent. Or l'immortalité n'apporte que la connaissance et on confond souvent les deux.

Selene savait de quoi elle parlait car elle était elle-même idiote. La jeune fille avait toujours eu du mal à assimiler un concept ou à apprendre quelque chose et il lui fallait des siècles pour exceller dans un domaine alors qu'un génie pouvait y arriver en trois fois moins de temps. Heureusement, l'immortelle ne se rappelait plus de ce qu'elle était au début de sa vie car elle devait sans doute avoir l'air d'une gourde ingénue. Maintenant, c'était différent car même si le cerveau de Selene avait toujours des capacités restreintes, il était maintenant gavé de savoir et d'automatismes qui la rendaient tout simplement brillante. Même son esprit logique s'appuyait sur des expériences et des connaissances.

Nous sommes différents Louis. J'ai l'impression que vous avez été un observateur du monde. Moi je l'ai subit et j'ai trainé toutes les cicatrices que j'ai récolté. Vous l'avez dit notre vécu est différent.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le mardi 06 avril 2010, 20:47:04
Louis était déçu. Au lieu de tomber sur une immortelle que le temps aurait rendu aussi solide qu'une montagne et aussi tranchante qu'une lame de rasoir, il était tombé sur une immortelle percutante, intelligente, mais qui connaissait l'oubli. Cela changeait totalement la donne. Louis se remémorrait chaque seconde de son interminable vie à la perfection. Il aurait pu remplir une bibliothèque du récit de son existence en étant parfaitement objectif sur celle-ci. Quelle poisse. En soi cela n'enlevait rien au côté passionnant ou fascinant de cette rencontre, bien au contraire. Mais il déplorait que les rares immortels qu'il avait eu la chance de croiser eurent tous cette faiblesse de la mémoire. Louis soupira, navré. Son infatigable sourire sembla... se fatiguer. Il conservait ce rictus sur le faciès, mais exprimait désormais de l'habitude lasse.

"Différents, oui. Malheureusement."

Son verre était vide avant qu'il n'ait pu s'en rendre compte. Sa carafe également. Il interpela un serveur pour avoir droit à un thé à la menthe. Il attendit voir que Selene commande quelque chose et laissa le travailleur repartir avant de demander, un peu plus intéressé, et le regard brillant d'une lueur nouvelle:

"En ce cas dites-moi, si ce n'est pas indiscret bien sûr, à quand remontent vos plus anciens souvenirs, dame Selene? Je ne doute pas que l'oubli ait eu une prise sur vous..." A cette phrase, s'il s'était vu, il aurait décelé une micro expression. Son "ait" avait arboré la grimace du mépris pendant moins d'un vingtième de seconde. "... mais par conséquent c'est savoir à quel type de sélection votre mémoire s'est adonnée. Certains des quelques immortels que j'ai rencontré se souvenaient parfaitement de leur enfance. D'autres avaient oubliés jusqu'à leur nom. Vous m'avez l'air assez lucide pour savoir d'où vous venez, mais assez perdue pour vouloir des réponses quant à ce "où". Votre cas, je l'avoue, m'intéresse."

Et les quelques immortels rencontrés se présentaient à lui en moyenne une fois tous les cinq ou six-cent ans, donc il était pas question de lacher la belle brune comme ca.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le vendredi 09 avril 2010, 22:56:09
Louis semblait déçu mais ça ne chagrinait absolument pas l'immortelle. Au contraire, ça l'intriguait. Il parlait de souvenirs, les siens étaient-ils intacts? Une pointe de jalousie s'insinua dans son esprit. L'immortalité était une chose mais lorsqu'on y est adapté c'est encore mieux. Selene avait une mémoire humaine lambda, c'est à dire colossale mais face à l'éternité ce mot prenait beaucoup moins d'ampleur. Comme tout le monde, Selene oublie. Avec le temps les souvenirs s'effacent, ou pire, se mêlent à d'autres souvenirs pour former des pensées erronés.

Le serveur arriva et s'enquit de leur commande. Elle ne lui prêta aucune attention et commanda machinalement la même chose que son compagnon. Louis n'était pas de la même race qu'elle. Et de ce fait, cela le rendait moins intéressant, pour son propre bien. Lorsque Selene trouvait un immortel, elle cherchait immédiatement à lui soutirer des informations qui pourraient l'éclairer sur sa propre condition. Visiblement, celui-là ne pouvait rien pour elle. L'intérêt qu'elle avait pour lui était donc moins pressant et nécessaire. En d'autres termes, il était facultatif.

Selene battit lentement des cils et fixa le dandy alors qu'une lueur d'intérêt semblait être revenu dans ses yeux. Sa curiosité à propos des souvenirs de l'immortelle confirmait l'hypothèse que la mémoire de Louis était intacte.

Mes souvenirs les plus anciens ne sont plus que des impressions, répondit-elle. Je suis parvenu à me rappeler mon enfance en faisant des recherches sur mon passé. J'ai une mémoire humaine monsieur Cyphre, j'ai tendance à me rappeler de ce que j'aimerais oublier et à oublier ce qu'il serait bon de se rappeler.

Un léger voile passa devant les yeux de Selene et son sourire se terni. C'était anodin mais détectable pour un fin observateur comme Louis. Les souvenirs dont l'immortelle se rappelait le mieux étaient les plus marquants et donc les moins agréables. Notamment, les époques où elle avait été esclave ou bien pourchassée. En effet, il ne fait pas bon vivre au temps de la sainte inquisition lorsqu'on a des yeux violets ou bien d'être une barbare sur les terres de l'empire romain. De plus, si son pouvoir lui permettait de survivre, il ne lui retirait pas la douleur. Selene avait connue des souffrances inimaginables, subies par aucuns êtres sur terre, car si la mort vient libérer un supplicié, elle a toujours boudée Selene. C'est en partie de là que vient son aliénation.
Cependant, son expression figée se leva aussi vite qu'elle était apparue pour faire place à un magnifique sourire.

Assez parler de moi Louis, fit-elle en lui lançant un regard malicieux. J'aimerais en savoir un peu plus sur vous.

Elle se redressa sur son siège avec des gestes lents et sensuels. Sans cesser de le fixer, elle rejeta légèrement ses épaules en arrière et lui décocha un sourire qui frise l'insolence.

Est-ce que je vous plais Louis? Demanda-t-elle sans autre forme de procès. Vous êtes lassé. Mais êtes vous également lassé des femmes?

Selene masquait son envie d'éclater de rire en conservant un sourire qui lui arrivait jusqu'aux oreilles. Non pas qu'elle se moquait de Louis, mais la situation était on ne peut plus burlesque de son point de vue. Et ça n'enlevait rien à la pertinence de sa question. En effet, l'immortelle avait une trop haute considération d'elle-même pour envisager une autre raison que la lassitude de la gente féminine pour expliquer le faite qu'un homme ne la désir pas.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le mardi 13 avril 2010, 19:30:50
Le changement radical de sujet entamé par Selene ravit le blondinet au plus haut point. Il pouvait  reposer son esprit analytique un instant, le temps de lui laisser emmagasiner les informations qu'il avait reçu, les erreurs qu'il avait fait et de dessiner son cerveau caligraphique dessiner un portrait mental de la belle. La remarque de cette dernière, outre l'intrigue qu'elle suscita chez Louis, parvint à lui décocher un rire sincère. Il aimait la franchise et l'honnêteté. Deux notions qu'il pratiquait autant qu'il les évitait sans le moindre problème. Il croisa les bras de nouveau et après avoir laisser son sourire se détendre en un rictus amusé, plongea son regard sur le faciès de la belle. Il finit par répondre:

"Je n'ai pas perdu mon gout des femmes. Je les aime, les admire et chéri comme aucune autre espèce de ce monde. De là à parler de désir, je dirais que cela dépend des cas. En un mot..." Il eut une moue de réflexion "...je dirais que vous me plaisez. Votre visage, vos traits, votre corps et votre aura, tout dégage une sensualité et une beauté qui ne devrait laisser aucun homme indifférent. Et de par les chemins tortueux de mon esprit, je trouve que la candeur qui masque votre vice des plus attirantes. Toutefois..."

Il brandit son petit doigt.

"...vous permettez?"

Il avanca son bras de celle de la jeune femme et lui effleura le dos de la main de Selene du bout de son auriculaire. Il resta ainsi quelques secondes avant d'aborder un sourire navré, secouer la tête négativement, et rétorquer d'un air désolé en repliant son bras:

"Toutefois je crains de ne pouvoir vous désirer. Rien de personnel. Disons que je peine à ressentir du désir pour une température corporelle supérieure à 15°"

Il ricana en portant le thé à ses lèvres.

"Cela doit faire partie des démences du temps."
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le mercredi 14 avril 2010, 14:26:59
Selene resta interdite devant ces déclarations. Elle ouvrit la bouche, sur le point d'exprimer son incompréhension mais aucun son ne sortit. Se ravisant, elle semblait réfléchir. Puis le déclic se produit et son sourire s'étala sur sa figure alors qu'elle commençait enfin à comprendre. Cet homme était complètement cinglé. Bien que ce mot soit très relatif on pouvait quand même le lui attribuer. Selene était contente de voir que les démences du temps n'avaient pas touchées qu'elle. Mais quand même, quel genre de vécu pouvait nous pousser à apprécier les …

Alors? D'où vient ce penchant? Ronronna Selene en caressant le bord de sa tasse chaude. La satisfaction de posséder pleinement votre partenaire ou bien l'assurance de ne pas être jugé par lui?

Selene s'agitait. Elle fixait son interlocuteur comme un chat observe une souris avant de lui sauter dessus. Elle adorait comprendre les vices des autres car elle avait déjà fait le tour des siens. Et il se trouve qu'ici, on parlait d'un phénomène qu'elle ne comprenait pas. Bien loin d'en être dégoutée, elle était plutôt fasciner par ce qu'elle allait apprendre. En tout cas, jusqu'à ce qu'elle se fasse renvoyer dans les cordes.

Non, je sais, s'exclama-t-elle. C'est une fascination pour la mort qui vous a épargnée pendant toutes ces années?

L'immortelle ne se rendait même pas compte à quel point elle était indiscrète mais c'est ce qui la rend si… pure.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le dimanche 18 avril 2010, 09:50:26
Louis fut assez amusé de la réaction de Selene. D'ordinaire, c'était plutôt du dégout qui lui revenait en plein visage lorsque les gens comprenaient ou découvraient ce penchant de sa personne. Oui, il était fou. Complètement barré devrait-on même dire. Et Selene n'avait eu que l'aspect "visuel" de la chose, l'aspect extérieur et visible. Elle n'avait aucune idée de la folie qui dormait plus profondément et qui en aurait inquiété plus d'un de façon plus drastique. Lorsqu'elle lui posa la question, Louis s'apprêtait à répondre qu'elle n'était pas loin du vrai, mais elle le coupa avec une troisième proposition qui le fit rire aux éclats en claquant des mains.

"Bingo! Hahaha! Vous m'avez coupé l'herbe sous le pied. En vérité je dois admettre que c'est un peu de tout ca."Il but une rasade de thé:" L'assurance de ne pas être jugé n'est pas mon objectif principal. Je suis suffisamment égoïste pour tenir compte de mon propre plaisir avant celui de mon partenaire le plus souvent. Je fais de mon mieux mais je ne m'inquiète pas d'être mal jugé."

Il marqua un temps. Les deux autres raisons étaient bien plus juste mais il en manquait une.

"Une fascination de la mort... Oui, indéniablement. Raison aussi pour laquelle je n'ai toujours eu d'aventures qu'avec les mortelles jusqu'à présent. Et le plus souvent, une fois mortes, huuhuhu. Cette étreinte glaciale, cette inertie face à l'un des vices les plus excquis que le monde peut nous offrir, cette absence de son là où le chaos auditif devrait régner... En un mot, le paradoxe provoqué par une situation qui, en temps normal, se déroule à l'extrême opposé; et tout ca uniquement grâce au délirium de la faucheuse. Il y a quelque chose de divin là dedans."

Louis parlait avec une véritable ivresse dans le regard.

"Posséder pleinement l'autre est une raison qui n'est que peu intervenue, mais lorsque ce fut le cas mes nuits furent alors les plus parfaites. En général, cela se produisait lorsque je parvenais à tomber amoureux. Ce fut assez rare, mais je me remémore parfaitement chacune de mes partenaires de ce genre."

Cléopatre avait de loin été l'une des plus douées, c'était indéniable.

"Je pense qu'une dernière raison serait bien évidemment..." son regard se fit plus mesquin, et ses yeux prirent un reflet multicolore inexplicable "...la possibilité alors offerte de faire jaillir chaque étincelle de folie en moi sans avoir à me cacher, sans avoir à me justifier de mes choix. Sans doute est-ce la raison pour laquelle, des rares fois où j'ai eu aventures avec des jeunes filles vivantes, mais qui simulaient cette mort, je n'ai jamais pu ressentir un plaisir similaire aux autres."

Il finit son thé d'une traite avant d'achever, avec un sourire en coin pas dissimulé pour un sou:

"A votre tour, Selene. Maintenant que vous savez la vérité, que pensez-vous de cet individu abjecte que vous avez sous les yeux?"
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Selene le lundi 19 avril 2010, 00:04:27
Ah ! Le jugement maintenant, fit l’immortelle avec un demi-sourire.

Si la question était simple, la réponse n’était pas aisée. Selene évitait de juger les gens qu’elle croisait. Une question d’objectivité. Mais là, on le lui demandait, elle fera donc un effort.
L’immortelle ne répondit pas tout de suite, se contentant de fixer Louis, observant, jaugeant, comme on estime la valeur d’une œuvre d’art. Un coup d’œil expert et le prix tombait.

Si la cause de cette déviance était la peur du jugement, j’aurais dit que vous êtes un faible. Ce qui n’est pas une tare en soit – Elle prit une gorgée de thé et fronça les sourcils avant de le fixer de nouveau – Si en fait, c’en est une. Mais vous n’êtes pas concerné par cette sentence il me semble, ce qui rend l’affaire plus… complexe.

Elle se mordit la lèvre inférieure, indécise. Selene cherchait la réponse qui soit la plus honnête possible, et elle prenait ce rôle au sérieux. Cet homme était fou, mais ce constat évident n’aidait pas à trancher. Selene se demandait comment il se qualifierait lui-même. Pensait-il vraiment qu’il est abject ou avait-il dit cela parce que c’est le reflet de l’opinion publique ? Les mires violacées passèrent sur ses yeux vairons, sa bouche qui s’étirait en un rictus satisfait. L’homme qui se tenait en face d’elle n’avait pas honte ; il était même… fier ?

Je pense que c’est un gâchis ! Pour moi bien entendu. J’envie… vos mortes, souffla l’immortelle d’une voix exagérément sulfureuse.

Elle fut secouée par un petit rire et attendit quelques secondes, qu’il s’évanouisse pour poursuivre d’un ton plus sérieux.

Votre déviance est plus un vice qu’une démence. Le vice peut être maitrisé, pour un temps. Alors que la démence surgit de nulle part et est incontrôlable. Ce qui fait de vous un homme tout à fait équilibré, en apparence. Et pour moi, seul les apparences comptent.

Difficile de juger sans référence. Ici, Selene s’était choisie elle-même pour comparer deux immortels. L’un dont les vices sont universellement considérés comme contre nature et punissable, l’autre dont la folie la rend sensible, imprévisible, et donc, faible.
Titre: Re : Technologie quand tu nous tiens
Posté par: Louis Cyphre le samedi 24 avril 2010, 08:50:54
Louis ne s'était pas attendu à ce que Selene soit dégoutée à vrai dire. La jeune femme l'avait suffisamment surpris ce jour-là pour qu'il puisse s'attendre à tout. Paradoxalement il ne pensait pas qu'elle le désirerait encore pour autant après cette révélation. Il écouta sa justification avec intérêt et la reconsidéra. C'est vrai qu'elle était superbe. Elle avait eu l'audace de le lancer sur le sujet, il aurait l'insolence de lui répondre le plus franchement possible.

"Mais vous savez, chère amie, si vous êtes en mesure de faire retomber la température de votre corps et de ne pas réagir lors de ces moments, c'est avec un immense plaisir que je m'occuperais de vous."

Son sourire, loin de passer de la sincérité à la perversion, était resté le même qu'auparavant. Son offre était totalement sérieuse. Cela impliquait hélas que Selene n'ait pas vraiment son mot à dire si les choses se concrétisaient. Mais peu importait. Louis n'y croyait pas trop. Il ne connaissait pratiquement personne avec le pouvoir de changer sa température corporelle, même si au fond de lui il espérait que la Belle immortelle le surprenne une fois encore.

"C'est quand je vois des femmes comme vous, dont l'esprit est un régal similaire à l'enveloppe, que je regrette mes déviances. Je pourrais essayer, me forcer, simuler, mais vous sentiriez la différence entre avant et après le décès, si je puis dire."

Son rire se fit franc, comme s'il venait de confesser une faiblesse dont il se moquait lui-même. Ce qui était très justement le cas. Il espérait également que Selene ne prenne pas mal ses propos. Après tout ils avaient joué la carte de la sincérité depuis le début de la conversation. Une sincérité choisie avec assez de minutie pour la rendre manipulatrice, mais une sincérité réelle tout de même. Louis saisit le morceau de sucre qu'on lui avait servi avec sa boisson et l'engloutit d'une traite en lancant un regard en coin à la belle qu'il avait la chance de cotoyer. Il n'oublierait pas cette rencontre, vraiment.