« ...Et, en vérité, je vous le dis, c’est l’Infamie de cette femme qui pèse sur nous ! C’est le prix que nous payons pour avoir hébergé en notre sein une catin, une traînée qui se cramponne au pouvoir telle une harpie vociférante ! Oui, mes amis, et je vous le dis haut et fort, ce que nous subissons est un châtiment divin pour avoir trop longtemps toléré et nourri, en notre sein, la Vipère ! »
Il fut un temps où de tels propos auraient été sévèrement réprimés de la part de la Milice urbaine de Papua. Il fut un temps où nul n’aurait pu tolérer de tels agitateurs publics. Il fut un temps, enfin, où Papua était en paix, en prospérité économique, et où un Roi fort dirigeait le royaume, avec, pour le suivre, un Prince guerrier qui avait fait ses classes auprès des prestigieuses écoles militaires de l’Empire d’Ashnard. Une époque maintenant révolue depuis plusieurs mois.
Papua était en pleine guerre, une guerre civile qui faisait ravage dans les campagnes papuannes, et qui remontait vers Papua, vers la capitale. Papua faisait l’objet d’une insurrection civile massive, lancée par des vagues de brigands et par une organisation terroriste criminelle, l’Affiliation. Dirigée par John Farson, un ancien criminel tekhan qui avait sévi dans les Badlands, où il avait cherché à saboter les fûts de pétrole, Farson s’était maintenant rabattue sur Papua, et avait envoyé ses hommes à l’assaut. Des villages avaient été massacrés, d’autres asservis. L’Affiliation avait formé des camps dans les déserts, pris des forteresses, et marqué quelques coups fatals. Ils avaient tué le Prince héritier de Papua, le grand-frère de Rhian, Herebos, et avaient capturé Rhian, tout en libérant sur Papua un monstre cauchemardesque, le Warlock. Cet ancien conquérant avait été le premier ennemi de Papua, un mage-guerrier qui était revenu à la vie, et qui menait la guerre civile, avec pour cible le Palais de Papua.
Des tensions sociales traversaient le royaume, et on pouvait les ressentir dans la capitale. Les agitateurs publics étaient de plus en plus nombreux, beaucoup étant payés par des vassaux de la Couronne, des nobles provinciaux qui, sous couvert de compassion, conspiraient avec l’Affiliation, afin de gagner de plus grosses parts quand le Warlock aurait renversé la famille royale. Ces mêmes gens avaient empoisonné le Roi de Papua, Tomeyrus, qui était mourant, et avaient fait accuser sa femme, Khaora, d’être responsable de cet empoisonnement. Personne n’avait encore emprisonné Khaora, mais la Reine ne pouvait plus sortir de son Palais. Dans Papua, les nobles et les traîtres encourageaient à la mutinerie, arguant que le Warlock n’était pas la menace.
Cette agitation, Rhian l’avait pressenti lors de sa capture, et elle la voyait, maintenant qu’elle était revenue à Papua. Capturée par des démons*, puis libérée par un duché ashnardien**, Rhian était revenue chez elle. Elle avait été violée, torturée, humiliée... Mais pas brisée. Rhian était revenue avec une détermination encore plus forte, et avec la volonté de changer les choses. Tomeyrus était alité toute la journée, et Khaora n’avait plus aucune autorité. L’armée faisait le deuil d’Herebos, et Rhian avait donné ses premiers ordres. Plusieurs des membres du Conseil royal avaient été jetés au cachot, des gens dont Rhian savait qu’ils étaient des traîtres. Elle avait multiplié les patrouilles, et les agitateurs publics étaient envoyés en prison. Avec l’arrivée de réfugiés et de migrants fuyant la guerre, fuyant leurs villes en feu, l’insécurité avait explosé, et Rhian avait imposé son autorité.
« Multipliez les procès ! Arrachez les langues de ces vipères qui conspuent sur ma mère et sur la Couronne ! »
Une punition cruelle, mais nécessaire. Sur la place publique, les crieurs publics, en larme, s’étaient vus torturer. Des bourreaux avaient fourré dans leurs bouches des pinces en fer, arrachant leur langue. Rhian ne pouvait pas se permettre d’être une femme douce. Elle n’était pas l’héritière légitime du trône, et devait rappeler à l’armée son autorité. Elle l’avait donc rappelé. Les violeurs avaient vu leurs yeux être fondus au fer rouge, quand ils n’étaient pas tout simplement castrés. La Princesse avait reçu l’aide de l’Empire, et, parmi les gardes de la Milice urbaine, les soldats ashnardiens patrouillaient.
« L’Affiliation continue à s’avancer...
- Que fait notre armée ?
- Elle combat à Ojman. La ville a été prise, et l’armée mène le siège... »
Les conseils de guerre de Rhian étaient divisés en deux thèmes : la paix à Papua, et la guerre dans le reste du royaume. Sur de grandes cartes, l’avancement des troupes de l’Affiliation était restituée de la manière la plus fidèle possible, ainsi que, en contrepartie, les positionnements de l’armée. L’Affiliation avait réussi à prendre plusieurs grandes villes provinciales, coupant ainsi plusieurs routes d’approvisionnement. La priorité était donc de reprendre ces villes, de les tenir, et, à partir de là, de reprendre le contrôle des campagnes. La priorité était de protéger les oasis, car ils étaient les seuls endroits d’approvisionnement du royaume. Tout ce que l’Affiliation cherchait à faire était de ravager Papua, et, pour cela, leurs hommes incendiaient les fermes et pillaient les greniers.
Pour l’heure, Rhian veillait scrupuleusement à protéger l’intégrité de la ville. Et, pour cela, si elle voulait instaurer l’ordre, elle tenait aussi à prouver à sa population qu’elle n’était pas un tyran. Régulièrement, Rhian sortait donc du Palais, ce qui était d’autant plus rafraîchissant pour elle qu’elle n’avait pas à sortir discrètement. Elle sortait en compagnie de ses trois tigres, Baja, Naja, et Tigra, qu’elle avait été très heureuse de revoir. Autant dire que la voir sortir dans les rues, avec les gardes en retrait, et les tigres qui avançaient autour d’elle, était souvent très impressionnant.
Elle se tenait ainsi dans une grande place, et les Papuans la saluaient, tandis que quelques enfants se cachaient derrière les robes et les dorures de leurs mères devant les tigres. Le regard de Rhian croisa celui d’un enfant, et elle lui sourit.
« Tu veux caresser Baja ? Il est très gentil, tu sais... Et il adore les câlins... »
Autant dire que les courageux ne se bousculaient pas au portillon pour caresser les belles bêtes !
* : Cf. RP « Slave (http://hentai.forum-rpg.net/index.php?topic=14787.0) » ;
** : Cf. RP « Of Monsters And Women (http://hentai.forum-rpg.net/index.php?topic=15711.0) ».
Le Palais royal de Papua (http://fc09.deviantart.net/fs71/f/2010/170/a/d/Palace_by_NURO_art.jpg) était une grande et impressionnante structure, séparée de la ville par un grand pont en pierre. Depuis les tours et les murs du Palais, on pouvait apercevoir plusieurs cours d’eau, avec des ruines ancestrales à proximité. D’après les vieilles légendes et les anciens manuels historiques, ces ruines étaient l’ancienne capitale de Papua, qui avait été submergée lors d’une violente crue il y a des siècles. Une crue qui s’était accompagnée d’une vaste tempête, et qui avait englouti la ville, créant un lac qui, depuis lors, était là. Cette ville abandonnée était un endroit assez apprécié des locaux et des touristes, car elle offrait un contraste assez saisissant avec la capitale, ainsi qu’une superbe vue sur le massif Palais.
Après sa visite au sein de la ville, Rhian rentra, ses tigres continuant à la suivre de près, se frottant parfois contre ses jambes. Le contrôle que Rhian avait sur cette portée était assez exceptionnelle. Elle était la seule à pouvoir contrôler les tigres avec tant d’aisance. Lors de sa disparition, les trois avaient été enfermées dans des cages, et avaient attaqué plusieurs servantes ayant tenté de se montrer trop proches d’eux. Ils s’étaient assagis quand Rhian était revenue, et, maintenant, Rhian dormait toujours avec eux... Il fallait le voir pour le croire, mais, parfois, les tigres dormaient même sur son lit, la tête de Rhian posée sur le ventre d’un d’entre eux. Pour beaucoup, ce lien était magique, et se justifiait par les gènes démoniaques de Rhian, un héritage de sa mère, Khaora.
« Les gens ont peur, Rhian... Garde-toi de te montrer trop brutale avec eux. »
De tous les conseillers incompétents ou corrompus qui assistaient Rhian lors de ses séances, elle faisait surtout confiance à ceux de sa mère, Khaora (http://img110.xooimage.com/files/3/3/9/khaora-47ae5ef.jpg). Tous les soirs, Rhian marchait avec elle dans les couloirs et les jardins du Palais, pendant une bonne heure. Khaora faisait digne figure, mais l’état de santé de Tomeyrus l’affectait profondément. Elle ne pouvait pas se permettre de le pleurer, car Papua était en guerre civile, et la Reine savait très bien que les accusations infondées des adversaires politiques des Thoris n’avaient que pour but de fragiliser la Couronne, et d’amplifier la guerre qui faisait ravage.
« Je sais, Mère..., soupira Rhian. C’est juste que... Je dois leur rappeler que la Couronne est détentrice de l’autorité, et est la seule à pouvoir sauver le royaume du Warlock et de ses horribles monstres.
- Tu détestes tes vassaux, et tu as raison. Combien de fois Tomeyrus m’a-t-il dit qu’il voudrait tous les tuer ? Ils ne pensent qu’à leurs propres domaines, sont incapables de songer au bonheur du royaume, et ne veulent y songer qu’à condition d’y siéger... Et, maintenant que ce sieur Galahad t’a secouru...
- Ils ont perdu tous leurs espoirs... »
Khaora lui sourit lentement. La Reine était curieuse. Ce Galahad était l’un des rares hommes à avoir fait bonne impression à Rhian. Les Pentaghast étaient une puissante famille ashnardienne, dirigeant un vaste duché, et Galahad avait traqué les Orcs ayant capturé Rhian, et l’avait sauvé. Il l’avait ramené jusqu’ici, et, quand Rhian avait parlé de Galahad, le dédain dont elle avait fait preuve n’avait pas échappé à Khaora, qui avait compris que Rhian avait enfin trouvé l’homme à qui offrir sa main. Tomeyrus serait fier d’elle, quand il irait mieux... Le Roi continuait à dormir et à végéter, dans sa chambre.
« Tu as le soutien de l’armée, Rhian... Mais il nous faut aussi conserver la noblesse. Les marchands continueront à te soutenir tant que les voies maritimes sont encore ouvertes, et c’est pour ça que l’Empire a envoyé une flotte pour les protéger des raids de pirates.
- Maintenant que les routes terrestres sont moins sûres, la mer est la solution la plus fiable pour rejoindre Papua. »
Royaume marchand par excellence, Papua avait toujours été tournée vers l’extérieur, vendant des tonnes de fer, de pierre, et autres gisements de matière première, en échange de nourriture. C’était un grand royaume, très culturel, et très cosmopolite. Le soutien de la bourgeoisie était encore plus important que celui de la noblesse locale, et les marchands préféraient la stabilité politique. Les Thoris dirigeaient Papua depuis la fondation, et ils avaient donc été contents de voir que les Ashnardiens avaient ramené Rhian, et qu’elle pouvait continuer à diriger le royaume. Ainsi, il n’y aurait pas de guerre civile, et le trésor royal continuerait à être là.
On avait beau dire tout ce qu’on voulait sur les pratiques sexuelles de la Reine Khaora, elle était une femme avisée en politique. Khaora venait d’une grande famille ashnardienne, et, contrairement aux Nexusiens, elle n’avait pas appris la broderie. La politique, la guerre, l’art et la manière de diriger un royaume... Voilà ce qu’on lui avait enseigné. Dans un conflit, quand le mâle partait diriger les troupes, la femme restait pour gérer les affaires publiques et le domaine. En somme, dans une répartition ashnardienne type, l’homme se chargeait de la gestion de l’armée, et la femme de la gestion des affaires civiles. C’était ainsi la Reine qu’on trouvait lors des audiences de justice. Cette différence s’expliquait par le fait que, comprenant beaucoup de démons, Ashnard n’était pas aussi sexiste que pouvait l’être d’autres royaumes, comme Nexus.
« Nous allons avoir besoin d’or pour financer la réparation des villes... L’Empire acceptera de nous faire crédit, mais la noblesse protestera.
- Et, si j’augmente les impôts indirects, ce sont les guildes marchandes qui s’enflammeront...
- Pourtant, c’est le meilleur choix à faire. Si les voies maritimes sont sûres, les marchands pardonneront une hausse des impôts. Et puis, les guildes ont toujours plus d’argent. »
Rhian acquiesça. Il y avait plusieurs moyens d’obtenir de l’argent. Elle pouvait demander un prêt auprès du Conseil Impérial, et, comme Rhian était une province impériale en état de guerre, le Conseil Impérial avait l’obligation de consentir un prêt à des taux d’intérêts réduits... Mais, même réduits, il y avait des intérêts. Or, en vertu des lois papuannes, le remboursement de la dette royale se faisait à partir des impôts seigneuriaux, une taxe que chaque seigneur devait verser annuellement. Autrement dit, si Rhian empruntait auprès du Conseil Impérial, elle devrait augmenter le montant de cette taxe, ce qui ferait rager les nobles.
L’autre solution était d’augmenter les taxes foraines, c’est-à-dire la somme que chaque marchand devait payer pour poser sa caravane. Or, selon l’emplacement, la taxe était plus ou moins forte. Concrètement, la liberté de commerce était réduite par le fait qu’un commerçant devait nécessairement rejoindre une corporation commerciale, afin de garantir la qualité des produits auprès des clients, ainsi que la stabilité dans les prix. Ces guildes avaient une grande influence à Papua, et, en temps de guerre, c’était souvent eux qui devaient payer... Ce qu’ils acceptaient de faire, si l’argent était effectivement utilisé pour garantir leur sécurité et la protection de leurs marchandises.
La politique était un art complexe. Rhian y avait été partiellement formée, et, sans sa mère, elle serait perdue. Perdue entre les chartes commerciales de toutes les guildes, les accords entre les familles de nobles, les décisions de justice à respecter, la loi papuanne à appliquer... Et la guerre à diriger. Sa mère avait les reins et les épaules solides, et continuait régulièrement à la conseiller... Et à la réconforter. Car, comme si tout ça ne suffisait pas, Rhian avait été traumatisée par son rapt de plusieurs mois.
Comme si elle sentait le trouble de sa fille, Khaora se pencha vers elle, et déposa un baiser sur la commissure de ses lèvres.
« Allez, viens... »
Après chaque promenade, les deux femmes avaient un rituel.
Entre la promenade et le dîner, elles se rendaient au harem du Palais.
Le lendemain, le soleil naissait à nouveau sur Papua. Dans l’auberge où Neith s’était posée, si cette dernière tendait l’oreille, elle pourrait surprendre plusieurs conversations intéressantes entre les marchands :
« Oui, Khalifa a été retrouvée morte cette nuit par la Garde... Tuée par son petit ami, visiblement. Une crise de jalousie.
- Encore une servante...
- Et pas n’importe qui! Celle qui s’occupait de coiffer la Princesse et l’aidait à s’habiller ! On disait même que Khalifa nourrissait les trois putains de monstres de cette femme !
- S’habiller ? Tu veux dire... Ces bijoux ?
- L’armature de la Princesse... Le trésor le plus précieux de Papua. Il y a des collectionneurs nexusiens qui seraient prêts à acheter cette panoplie pour plusieurs millions de pièces d’or.
- Si seulement j’étais une fille... »
Les deux négociants rigolèrent doucement entre eux.
« Et au fait, pour Jasmine ? demanda soudain l’un des deux.
- Le harem continue à recruter des femmes, oui... Je crois que ça aide la Reine à se détendre...
- Et sûrement sa fille aussi.
- Ouais, ouais, tu vas encore regretter de pas être une nana, hein ? Remarque, je te comprends, vu la petite touffe que t’as entre les cuisses... »
Et nouveaux éclats de rire.