Le Grand Jeu

Bac à sable => One Shot => Discussion démarrée par: Mascotte le samedi 21 juin 2014, 17:42:38

Titre: Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 21 juin 2014, 17:42:38
"La dernière chance du fils indigne" était titré l’article du Times. Sous ces mots imprimés en lettres capitales, il y avait une photos, certainement prises à partir d’une vidéo de surveillance. Une rue citadine vue de nuit et avec un angle plongeant. La lumière blafarde d’un lampadaire se réfléchissait sur le bitume humide. Dans ce paysage assez glauque se trouvait un hideux personnage. Un être mi homme, mi rat. La tête relevée, il laissait voir son visage de rongeur. Centré sur l’image, il s’agissait presque d’un portrait. Pelage brun et luisant, regard sanglant et dément, incisives jaunâtres et proéminentes, rictus mauvais aux babines, museau et oreilles pointues, longues vibrisses anarchiques... ce ne pouvait être que la figure d’un monstre. Un blouson de cuir noir couvrait le haut de son corps. Le bas sortait du cadre mais le cliché laissait deviner un peu de la fourrure de ses jambes bestiales. La créature devait s’acoutrer avec une indécente légèreté. Sa posture courbée participait à le déshumaniser, le rapprochant toujours d’avantage de l’animal. Derrière lui, sa fine queue glabre et blafarde de rat, sorte de ver cadavérique. Ultime détail, sa main griffue, tout aussi blanches. Elle émergeait de l’ombre du blouson et tenait un long poignard.

A côté de la photographie, l’article débutait. "Le tristement célèbre Ernest Lenoir est assurément le symbole typique du drame mutant. Fils du richissime Philipe Lenoir, homme d’affaire suisse de renom, et d’Ashley Willard, actrice de cinéma américaine, il était promis à un brillant avenir. De surcroit, il manifesta très tôt des facultés intellectuelles tout à fait remarquables. Son début de scolarité fut exceptionnelle. Une belle histoire que le gène X bouleversa. Avec le début de l’adolescence, la mutation d’Ernest se réveilla. Il devint l’enfant-rat, plus connu sous le pseudonyme de Vermine. Des mois durant, il vécut tel un sauvageon dans les égouts de notre ville. Sa famille se déchira. Divorce médiatisé, déclarations sulfureuses... La fameuse Institution Charles Xavier finit par retrouver le fugueur et le prit en charge. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais Ernest, certainement traumatisé par ce qui lui était arrivé, s’enfuit de l’Institut afin de gagner les rangs de la Confrérie, cette organisation terroriste pro mutante. Vermine ne tarda pas à devenir un criminel digne de ce nom. Sa déchéance fut telle que son pauvre père, accablé, mit fin à ses jours. Nouveau choc médiatique, nouvelle goutte d’huile sur le feu des tensions entre hommes et porteur du gène X. On finit par ne plus entendre parler de Vermine. Il sembla se volatiliser, nous laissant croire à son décès. Il n’en n’est rien. L’un de nos journalistes d’investigation à depuis peu retrouvé sa trace. C’était à l’Institut qu’il fallait chercher. En effet, Ernest y aurait été ramené par un X-Men. Là, il aurait eu le choix entre être livré aux autorités ou accepter un sévère programme de réinsertion. C’est en tout cas ce que Charles Xavier a déclaré lors de la dernière conférence de presse. Nombreux estiment que c’était à la justice d’en décider, que les X-Men ne cessent d’outrepasser leurs prérogatives. Certains vont même jusqu’à qualifier l’Institution de refuge à malfrats et..."

La montre émit un petit bip sonore. Quatorze heures... Dieu que le temps passait vite ! Il fallait se préparer. Ernest sauta directement à la fin de l’article pour en lire les dernières lignes. "...Quoi qu’il en soit, espérons que le professeur Xavier a raison et que le jeune Lenoir se montrera digne de cette dernière chance. Il a fort à faire pour mériter une place ailleurs qu’en prison ou en asile psychiatrique." En prison ou en asile psychiatrique... des mots très durs. Mais le jeune mutant les savait justes. Cela n’empêchait pas les journalistes du New-York Times d’ignorer une bonne partie de l’histoire. Pas un mot sur l’Altérium, la molécule aux extraordinaires propriétés que son organisme produisait. Pas un mot sur le savant fou qui l’avait kidnappé pour exploité cet Altérium. Quinze jours en enfer... plus d’un aurait perdu la tête. Pas un mot sur sa petite amie féline qu’il avait connu, ici-même, lors de son premier séjour. Une relation enflammée brutalement interrompue. Cruel chagrin d’amour... Certes, il avait fait pas mal de conneries, mais il avait tout de même quelques excuses. Sa situation n’était pas facile à vivre et personne ne pouvait l’imaginer, tout du moins pas de simples humains à l’existence si routinière. Il plia le journal et l’abandonna sur le bureau. Ensuite, il bailla, s’étira et quitta sa chaise. Après le repas, il avait toujours un petit coup de barre. Par la fenêtre de sa chambre, s’il se perchait sur le lit ou un autre meuble, il pouvait voir le parc de l’Institut. Un décor si verdoyant, si lumineux, qui contrastait avec les horreurs qu’il avait connues. Pour l’instant, il était au sol. Avec sa petite taille, à peine plus d’un mètre, il pouvait surtout admirer le ciel d’un bleu limpide et le soleil estival. Il avait effectivement de la chance d’être là, il en était conscient. Voilà maintenant plusieurs mois que, jour après jour, il ne ménageait pas ses efforts pour remonter la pante. Le psychologue l’avait beaucoup aidé. Il devait justement le voir pour sa consultation de la semaine. D’un pas décidé, il gagna sa salle de bain. Il se donna quelques coups de brosse et se lava les dents afin d’être tout à fait présentable. Devant son miroir, il constata avec plaisir qu’il n’avait plus grand-chose à voir avec le monstre de la photo. Il avait bien sûr toujours une figure de rongeur, mais propre et assagie. Une chemise blanche, bien ajustée et un pantalon beige avait remplacé le blouson de voyou. Il avait un petit air de rat de bibliothèque. Ce n’était pas une apparence mensongère, il lisait énormément. Il avait aussi repris ses études là où il les avait arrêté des années plus tôt. Satisfait, il s’approcha de son porte-manteau et enfila son veston assorti au pantalon. Ensuite, à regret, il se chaussa. A cause de sa période sauvageon, il avait tellement l’habitude de marcher pieds nus qu’il avait quelques difficultés à supporter les chaussures, des chaussures un peu spéciales car adaptées à sa morphologie atypique.

Une fois prêt, l’hybride sortit de sa chambre. Dans le couloir, il croisa plusieurs autres élèves de l’Institut. Ici, il ne faisait pas peur. Ici, il était comme tout le monde, un individu particulier dans un environnement où être particulier était la norme. Ça lui faisait beaucoup de bien ces sourires qu’on lui adressait et les discussions anodines auxquelles il participait. Il dormait mieux, faisait moins de cauchemar. Il domptait progressivement les caprices de son caractère tourmenté. Les règles, parfois, l’énervaient. Il y en avait tellement. Pas d’alcool, pas de sexe, pas de violence. Mais le jeu en valait la chandelle. Ça faisait longtemps qu’il ne s’était pas senti aussi tranquille. Arrivé à l’escalier, il sauta sur la rampe et, en équilibre, glissa dessus jusqu’en bas. D’une cabriole, le voilà dans le hall du manoir. C’était chouette comme cadre ! Ça lui rappelait presque sa maison en suisse. Un enseignant l’ayant aperçu, le sermonna pour la forme, et lui annonça que sa voiture l’attendait. Le psychologue n’officiait pas à l’Institut. Le mutant se rendait donc à la consultation en taxi. Pas n’importe lequel, un habilité aux transports sécurisés. Sitôt sur le perron, il repéra la voiture blanche banalisée aux vitres tintées. Le chauffeur lui ouvrit la portière arrière tout en le saluant avec une distante politesse. Tout le monde n’était pas aimable. Installé confortablement, la ceinture bouclé, voilà Ernest en route. Bercé par le ronron du moteur sportif, il regarda le paysage défiler. Il connaissait par cœur le trajet, ou plutôt les différents trajets car le taxi en changeait aléatoirement chaque semaine. Aux yeux de la Confrérie, Ernest était un traitre, ça imposait quelques précautions. Il ne chercha pas à discuter. C’était inutile. Il préféra se laisser aller, errant dans ses réflexions du moment. Comment allait être la séance d’aujourd’hui ? Il ne tarda pas à somnoler, puis sombra totalement. Au moins, ainsi, il serait arrivé plus vite...

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 28 juin 2014, 01:42:24
Tobias Miller était un crack… il en était persuadé. En réalité, sa vie professionnelle n'avait pas toujours été passionnante. Mais s'il était un génie, alors il était un génie méconnu : pas particulièrement décrédibilisé par ses semblables, plutôt ignoré, noyé dans la masse des praticiens. Les amphithéâtres remplis, les conférences internationalement suivies, ce n'était pas vraiment de son niveau. Il devait se contenter d'enseigner à des élèves moroses, souvent plus intéressés par les tarifs préférentiels aux restaurants universitaire que par sa matière, à l'université. En somme, Tobias Miller était un psychologue comme les autres… à une connaissance près.

Lors d'un congrès il avait en effet rencontré le professeur Xavier ; les deux hommes avaient eu le loisir de discuter, et même de sympathiser. Tobias avait eu l'occasion de parler à l'illustre directeur de ses méthodes, de ce qu'il croyait vrai, et avait profité des connaissances inestimables d'un individu capable de lire comme dans un livre ouvert les esprits de ses semblables.

C'était sans doute cette amitié cordiale, construite par plusieurs travaux communs, qui avait poussé Xavier à le choisir pour un cas très singulier. Un cas si singulier qu'il était presque devenu le centre de sa vie professionnelle. Un plan de carrière qui le ferait aussitôt accéder aux médias, s'il triomphait… ou risquait de l'enterrer pour un moment, s'il échouait.

Assis sur une chaise en plastique rouge, pourtant confortable, devant l’ordinateur de son bureau, le psychologue regarda l'heure. Quatorze heures passées, la prochaine séance avec ce patient si spécial serait la première de l'après-midi. Il regarda les journaux en ligne, vu qu'on parlait de lui – indirectement, puisqu'il était question de son patient. On ne citait pas son nom, mais la nouvelle le mit tout-de-même de bonne humeur.

Le moteur d'une voiture qui s'arrêtait dans le parking réservé à son cabinet se fit entendre. Le cabinet était une petite bâtisse blanche, dans un style moderne, avec un toit plat, très légèrement incliné pour faire ruisseler la pluie. On y pénétrait par une porte vitrée, dont le mécanisme d'ouverture était relié à une sonnette. Juste avant celle-ci, il y avait deux plaquettes en fer gravée des noms de Tobias Miller, et de William Schur. William Schur était un autre psychologue, ami d'enfance de Tobias : il était parti en vacances la veille, et son remplaçant arrivait le lendemain.

Il n'y avait que quatre pièces, une minuscule salle d'attente, deux salles de consultation, et des commodités. Il n'y avait pas de secrétaire, mais un panneau explicatif et interactif qui répondait aux questions les plus courantes, et faisait patienter jusqu'à la venue du praticien. Le tout s'inscrivait dans un environnement assez technologique.

Ernest Lenoir n'aurait pas à attendre. À peine était-il descendu de sa voiture que Tobias l'attendait à la porte, qu'il lui ouvrit même. C'était un homme d'une trentaine d'années, un pull et un pantalon en tweed. Il avait des cheveux bouclés mi-longs, bruns, et des lunettes rondes qui lui donnaient un peu l'air intellectuel de gauche. Pour ne rien arranger, il mesurait environ un mètre quatre-vingt, et était maigre. Son visage était néanmoins assez léger, les traits peu marqués, et plutôt avenant.

Le psychologue l’accueillit avec un sourire.

« Bonjour monsieur Lenoir. Vous avez fait bonne route ? Vous connaissez le chemin, maintenant.  »

Il lui tins la porte et le laissa passer avant lui. La deuxième porte était celle de son cabinet. La salle était blanche, des peintures abstraites, des tâches assez éparses aux tons pastels dans de petits cadres, ornaient les murs. Le bureau était en bois clair : Tobias vint s’asseoir derrière. À la disposition du patient, il y avait un siège, et surtout, un divan rouge, rembourré.

« Vous pouvez prendre place dès que vous vous serez mis à l'aise » fit le psychologue en esquissant un geste vers le séant.

Il commença à taper quelque-chose sur un document texte, sans doute l'intitulé de la séance. Puis il reporta son attention sur son patient. Ce n'était pas la personne la plus plaisante qu'il ait eu à contempler. Son aspect était assez éloigné d'un humain, il était même assez difficile d'imaginer que cela puisse l'être. Pourtant, Tobias voyait dans les traits de rongeur le reflet de sa propre gloire à venir, et cela suffisait en fin de compte pour beaucoup l'embellir à ses yeux.

« Vous êtes bien installé ? Pour commencer cette séance, je vous propose de faire un bilan de ce qui a été accompli jusqu'ici. Comment décririez-vous votre état avant d'arriver ici ? Et à présent, quels progrès ont été faits, d'après vous ? »

Il fallait veiller pour le praticien à avoir un retour correct. Le simple fait de savoir comment le patient se situait par rapport à lui-même était un bon indicateur de son état psychologique. Ernest Lenoir avait un esprit atypique mais incroyablement performant, et le faire travailler à sa propre guérison était certainement l'une des meilleures idées qui soit.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 28 juin 2014, 11:27:20
Ce fut le chauffeur qui, en annonçant la fin imminente du trajet, réveilla Ernest. Celui-ci émergea assez rapidement. Il reconnu immédiatement le bâtiment blanc qui, depuis le temps, était devenu familier. Combien de séances déjà ? Un paquet ! Les premières avaient été difficiles. Accepter de collaborer avec un psy, c’était admettre qu’il était malade, admettre qu’il avait besoin de soin. Il avait un certain don pour nier l’évidence. Et franchement, s’il n’y avait pas eu cette épée de Damoclès qu’était la prison, il aurait laissé tomber. A présent, il ne regrettait pas ce salvateur travail sur lui-même. Se confier, c’était aussi se décharger. Le conducteur, avec sa rigidité coutumière, ouvrit la portière. Il allait attendre dans son véhicule que la séance se termine. Il emportait de quoi s’occuper, de la lecture essentiellement, parfois des papiers à remplir. L’hybride était également à peu près certain qu’il écoutait de la musique, il en avait perçu quelques notes avant que l’homme, allez savoir pourquoi, ne l’éteigne systématiquement lors de son retour.

« Bonjour Monsieur Miller. Très bonne. »

Une salutation qui variait peu. Le jeune Lenoir était aimable et poli. Effectivement, il connaissait le chemin. Chaque geste était presque devenu un rituel. Sa démarche, lorsqu’il y prenait garde, comme maintenant, était quasiment ordinaire. Un brin vouté, il allait comme un bipède digne de ce nom. C’était lorsqu’il se laissait aller qu’il se penchait d’avantage en avant. Une posture nettement plus bestiale qui rappelait son statut de quasi quadrupède. Et s’il voulait courir au maximum de sa vitesse, c’était uniquement à quatre pattes. Une fois dans la salle de consultation, il retira son veston et le déposa soigneusement sur le dossier du siège. D’un rapide geste, il chassa un pli sur sa chemise. Enfin, il prit place dans le divan. Il était si petit que ses pieds étaient très loin de toucher le sol. Joignant les mains sur ses genoux, il attendit en silence que Tobias l’interroge. Il ne parlait jamais de sa propre initiative. Mais au moins, désormais, il répondait sans problème aux questions, se pliait sans protester aux instructions.

Cela lui faisait toujours bizarre de se dire que le psychologue savait tout de lui. Tout, même le plus embarrassant, le plus intime... ou le plus horrible. Aucun secret, c’était la règle du jeu. Il accrocha son regard sur les lunettes rondes de Miller, qu’il aimait bien. Il se demandait quel air il aurait si on lui adaptait des lunettes à son visage. Un pas de plus vers l’intello, certainement. Mais ce n’était pas le sujet.

« Alors... avant... j’étais excessivement impulsif et violent. Le moindre mot, la moindre expression pouvait me rendre furieux. Je ne me contrôlais pas du tout. Dès que j’avais une envie, je devais l’assouvir. On m’avait fait mal alors je voulais faire mal. On m’avait fait peur, alors je voulais faire peur. C’était un moyen de me prouver que j’étais encore quelqu’un. Je voulais être un super méchant, comme dans les histoires, les histoires que j’écrivais sur moi. Un super méchant parce que je n’avais pas réussi à être un héros. Mes nuits étaient affreuses. Des cauchemars tout le temps. Enfin bref, j’étais fou. J’étais dans mon petit monde et seul moi comptait. »

Sa voix nasillarde, plutôt haut perchée, n’était pas agréable à entendre. Sa mutation ayant détraqué sa puberté, il avait à peine mué. Cependant, dans son timbre, il y avait tout de même un côté indéniablement masculin. Plus qu’une voix de garçon, c’était une voix de créature.

« Maintenant, je ressens encore des pulsions et des envies négatives, mais j’arrive à les réprimer. Je garde le contrôle et si je me sens trop stressé, trop énervé, je m’isole et je me calme. J’arrive à faire attention aux autres, à me dire que je suis pas seul au monde. Mes nuits se passent mieux. Ce n’est pas encore totalement le paradis, mais mes peurs s’éloignent. Je me sens plus tranquille. J’arrive à oublier ce qui m’est arrivé et parfois, je me comporte vraiment normalement, même quand il y a beaucoup de gens avec moi. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 05 juillet 2014, 21:22:43
Le psychologue avait retiré ses lunettes ; avec un petit chiffon blanc, il en astiquait distraitement les verres. Néanmoins, son regard resta attentif pendant toute l'analyse personnelle d'Ernest. Il fixait un point légèrement au-dessus de lui, sans le regarder directement dans les yeux, il manifestait quand même son intérêt.

Lorsque l'adolescent eut terminé, il laissa pendant quelques secondes flotter un silence presque total… qu'il rompit finalement en tapotant encore un peu sur son clavier. Il sembla jeter un coup d’œil à l'heure, en bas à droite de son écran. Il paraissait chercher ses mots, mais dans le cadre d'une telle consultation, cette absence de réaction immédiate n'était pas particulièrement suspecte.

« Je pense que vous avez bien travaillé, Ernest. Le succès de cette thérapie tient beaucoup à votre volonté sincère de vous intégrer. Je vois même un signe particulièrement fort, me concernant : si vous étiez un patient sans antécédents, je n'aurais aucune difficulté à ne plus trouver un suivi aussi régulier indispensable, et vous aurais proposé d'espacer les séances. »

Mais Ernest Lenoir n'était certainement pas un patient sans antécédent. Miller ne l'ajouterait pas, évidemment, pour ne pas l’accabler, car de toute façon, la chose était claire. Sa présence à intervalle régulier dans ce cabinet était une obligation officieuse, à défaut d'être officielle. Aussi grands seraient les progrès faits, le mutant n'était pas près d'être dispensé de visites hebdomadaires.

« À vous entendre, votre rétablissement psychique est avancé, et vous êtes même entré en possession d'une stabilité que vous envieraient beaucoup de gens, même parmi ceux qui n'ont jamais mis les pieds dans un cabinet. Pourtant, on ne vous fera jamais une totale confiance sur la seule base de votre bonne foi, hélas. Je crains même que ma parole ne soit pas un gage suffisant de votre santé. Mais je peux vous proposer de quoi s'assurer que ces améliorations s'inscriront dans le temps. J'ai travaillé ces dernières semaines avec le professeur Henry McCoy... »

Tobias Miller se leva sobrement. Il regarda de nouveau l'heure sur son moniteur. Ses doigts ouvrirent un des tiroirs de son bureau.

« Vous n'êtes pas sans savoir que la plupart des médicaments, qu'il s'agisse des neuroleptiques ou des thymorégulateurs, sont inefficaces sur vous. Cela rend votre traitement difficile. Toutefois, nous sommes, – ou plutôt, le professeur McCoy, avec ma bénédiction est – parvenu à développer un stabilisateur d'humeur qui devrait se montrer efficace, même au travers de l'altérium. Ce traitement est léger, mais il va beaucoup vous faciliter la vie, Ernest. À lutter sans aide, votre esprit pourrait se fatiguer, et vous avez gagné le droit à un peu de repos. »

Sa main fouilla dans le tiroir. Elle délogea plusieurs papiers griffonnés, plusieurs boîtes en carton vides. En fait, ce qu'il cherchait était vraisemblablement tout au fond.

« Je vous propose de l'essayer dès à présent, afin d'évaluer ses effets précis, qui devraient être rapides. Vous allez rester allongé, et vous me décrirez comment vous vous sentez. Seulement il me faut votre consentement. »

Il trouva finalement un petit flacon. Le flacon était neutre, en verre sombre, et contenait une solution incolore et sans odeur. Le psychologue ne sortit en revanche pas sa boîte, de toute évidence sans rapport avec le produit lui-même, sur laquelle était inscrit « Fertil&Co ».
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 05 juillet 2014, 22:28:01
Les premières paroles du psychologue firent naître en Ernest une satisfaction certaine. Elle se manifesta par l’esquisse d’un sourire. Un sourire de rat, c’était particulier, il fallait y être habitué pour bien l’interpréter. L’hybride savait avoir accompli de gros progrès, il le constatait chaque jour, mais c’était toujours plaisant d’avoir une confirmation de la part du spécialiste. Plaisant et rassurant. Les paroles de Monsieur Miller conditionnait une partie non négligeable de son existence. A chaque séance son bilan et ses exercices. Mais entre chacune d’elles, il y avait eu beaucoup de travail demandé, de conseils à respecter, de réflexions à se faire. A l’Institution, le mutant mettait en pratique sa thérapie. Il estimait que cette dernière lui avait demandé facilement dix fois plus d’efforts et de temps que sa reprise scolaire. D’où cette satisfaction. Il était belle et bien en train de la remonter cette satanée pente !

En revanche, la suite du discours lui rappela qu’avant d’être Ernest Lenoir, aux yeux des autres, il était Vermine. Vermine le monstre. Vermine l’ex Confrériste. Vermine le fou dangereux. Vermine le fils indigne. Avec ses origines sociales et toutes la médiatisation qu’il y avait eu autour de lui, il était monté sur le podium des personnalités les plus détestées des Etats-Unis. On le voulait en prison ou sur la chaise électrique. Brièvement, il revit l’article du New-York Times qu’il avait lu juste avant son départ. Son furtif sourire disparut. Avant, certainement, il aurait vomi sa haine de la société, tout en sombrant dans la violence. Maintenant, il se contenta de baisser les yeux sur ses mains dont les doigts s’entrelaçaient avec un zeste de nervosité.

L’annonce du produit le surpris un peu. Normalement, c’était surtout au début d’un traitement qu’on avait recours à des médicaments. Mais il n’était pas normal. Avec le pouvoir immunitaire de l’Altérium et sa situation atypique, quoi de plus logique que de recourir à des méthodes particulières ? Et puis, c’était Monsieur Miller qui le préconisait.

« Je suis d’accord », répondit simplement Ernest, avec aplomb, en relevant le regard vers le psychologue.

Déjà qu’il avait pratiquement retrouvé un comportement normal, il allait peut-être devenir le rat le plus calme de la planète ! Il fallait au moins ça pour affronter l’opinion public américaine.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 21 juillet 2014, 05:34:40
Miller se leva et fit quelques pas pour aller chercher une pipette, contenue dans une boîte en plastique transparent, elle-même posée sur une table dans un coin de la pièce. Il ouvrit le flacon et préleva environ un centilitre de liquide, qu'il versa dans un petit verre, puis il compléta par de l'eau plate. Le tout... ressemblait peu ou prou à de l'eau plate.

Enfin, le psychologue tendit le breuvage à son patient. Rien dans son apparence anodine ne laissait présager le goût du médicament : très amer, il laissait une sensation durable de picotement et de brûlure derrière la langue. Qu'il s'agisse en fin de compte d'une substance puissante faisait peu de doute.

« C'est désagréable, je suppose ? Désolé, c'était difficile de juger de ça sur des – animaux – de laboratoire » fit-il, évitant d'utiliser le mot rat.

Dans les premières secondes, il ne devait rien avoir de particulier, seulement des picotements, une gêne dans la gorge et dans la bouche. Miller proposa un second verre d'eau.

« Rincez-vous la bouche. Ce devrait être moins pénible les prochaines fois. »

Le praticien ne s'éloigna pas davantage, et resta à guetter attentivement les réactions de son patient. Il savait qu'Ernest était parfaitement capable de comprendre le fonctionnement d'un médicament, peut-être même mieux que lui. Une explication du professeur McCoy aurait sans doute été plus claire, mais il s'y aventura tout-de-même.

« Ce que je viens de vous administrer va progressivement inhiber la production d'alterium dans toutes les cellules de votre corps, à commencer par les glandes, qu'elles soient endocrines ou exocrines. C'est sans doute pour cela que vous êtes un peu gêné par votre bouche et gorge : c'est vos glandes salivaires et votre thyroïde qui sont déjà affectées. La sensation devrait s'étendre à toutes les zones fortement concernées. »

Il s'approcha pour venir légèrement appuyer du doigt le positionnement approximatif des glandes à mesure qu'il les énumérait : « thymus » – milieu de la poitrine – « glandes surrénales » – milieu de l'abdomen – « épiphyse et hypophyse » – le crâne – « prostate, et cetera » – il ne fit rien – « et bien sûr, l'ensemble des glandes sudoripares, dispersées sous l'épiderme. »

Il disait certainement vrai, car, à peu près dans l'ordre et au moment où il les annonçait, un engourdissement, tantôt proche des picotements, tantôt de l'ordre de la brûlure ou de la démangeaison devait se faire sentir. L'effet différait pour chaque partie du corps.

« Tout ça ne devrait en aucun cas affecter votre conscience, et ne sera que très temporaire... quelques dizaines de minutes, peut-être ? La molécule ne met pas longtemps à retrouver ses droits. En revanche, vos muscles devraient être à leur tour progressivement considérablement affaiblis. Vous devez déjà vous sentir faible et... Hein ? Pourquoi ? »

Miller se frotta les yeux, nerveux.

« Je ne sais pas exactement pour quelle raison ce médicament doit produire cet effet. Je ne comprends pas. C'est supposé être un stabilisateur d'humeur. Ça n'a pas de sens. »

Le visage du psychologue commença à blanchir, comme s'il s'apprêtait à faire un malaise. Il fut prit de plusieurs tics nerveux, fermant fort ses paupières et aplatissant les mains sur sa mâchoire. Mais sa peau blanchit bien plus qu'elle ne l'aurait dû. À mesure qu'il appuyait sur son visage, celui-ci se déformait également. Il ouvrit la bouche, les lèvres tendues, sans parvenir à produire le moindre son : ses cheveux, eux, s'éclaircissaient et paraissaient perdre en longueur.

Quelques secondes plus tard, ses petites convulsions cessèrent et il ouvrit de nouveau les yeux : ils étaient rouge sang. La figure n'avait plus rien à voir avec celle de Miller.

C'était le visage d'un albinos. Des rides marquées s'étaient creusées sur la face, témoignaient d'un certain âge, vingt ou trente ans de plus, peut-être que le médecin ; c'était difficile à dire. La chevelure était éparse et d'un blond délavé. Il avait prit quelques centimètres, était plus maigres et ses épaules étaient plus lâches. Les lunettes noires ne tenaient même plus sur le nez court et épaté, très peu caucasien.

L'individu les enleva avant qu'elles ne tombent. Il gratta ses joues creuses du plat de sa main blafarde et longue. Puis il planta ses iris carmins dans le regard d'Ernest. Enfin, il s'autorisa un demi-sourire, écartant ses lèvres minces et translucides.

« La personnalité de Tobias était plus facile à maintenir que je ne l'aurais pensé. Mais lorsque l'incohérence est trop flagrante... » sa voix était rauque. Il regarda sa montre. « Ah, nous sommes un peu en avance. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 21 juillet 2014, 11:58:03
Effectivement, le médicament n’était pas très agréable. Après avoir accepté le second verre d’eau, Ernest s’était allongé sur le divan, conformément aux instructions de Tobias. La tête reposant sur l’un des rebords rembourrés, il sentait brûlures, picotements et démangeaisons se répandre dans son corps. Cela ne suscita pas chez lui d’inquiétude particulière. Tout au plus constatait-il la puissance du produit. N’étant pas douillet, et ayant de surcroit l’habitude de réactions physiologiques curieuses à cause de l’Altérium, il jugeait forcément la situation normale. Comment en aurait-il pu être autrement ? N’était-il pas avec son psychologue, une personne de confiance ?

Quand ce dernier montra des signes de confusion la situation évolua du tout au tout. Jamais Monsieur Miller n’était confus ordinairement. Au contraire, il semblait toujours tout comprendre, tout pouvoir expliquer avec calme et maîtrise. Circonspect, le jeune mutant se redressa sur un coude. Il se sentait déjà plus lourd, plus gauche. En son fort intérieur, il relevait lui-aussi l’incohérence. Les effets du produit divergeaient de ce qui avait été annoncé, de ce qu’il avait accepté de prendre. Ses craintes naissantes se retrouvèrent vite confirmées par l’évolution physique du psychologue. Ce n’était pas Tobias. Une vive appréhension s’empara de lui alors qu’il croisait le sanglant regard de l’albinos. Après la stupéfaction, sa figure bestiale exprima aussitôt de l’hostilité. L’agressivité avait toujours été son bouclier.

Que faire ? Il avait déjà perdu de précieuses secondes. Et le temps jouait contre lui. Heureusement, son esprit demeurait vif. Attaquer ? Inutile. Si l’Altérium avait été inhibé, ses morsures ne pouvait plus transmettre la molécule mutagène et, dans son état de faiblesse croissante, il serait facile à neutraliser. Fuir ? Il devait être encore capable de se mouvoir. Assez rapidement ? Il n’avait pas besoin d’aller loin. Il devait juste sortir de la clinique. Dès lors, son chauffeur qui attendait sur le parking pourrait le voir, l’aider ou, à défaut, donner l’alerte.

Avertir l’Institut, c’était une absolue priorité.

L’hybride ne chercha pas à discuter. Peu lui importait les motivations de l’inconnu, elles étaient forcément mauvaises. Sans prévenir, il se propulsa hors du divan. La réception sur le sol fut un peu laborieuse, mais déjà il s’élançait vers la porte du cabinet. D’abord à quatre pattes, il se redressa pour atteindre la poignée, ouvrir... L’adrénaline contrebalançait pour l’instant le produit. Mais il percevait malgré tout un inquiétant engourdissement. Quelques mètres... il n’avait que quelques mètres à faire !

Et en dernier recours, il lui restait sa montre. En réalité, c’était d’avantage un bracelet électronique prévu pour le localiser, une obligation du programme de réinsertion. Il ne pouvait pas l’enlever afin de l’empêcher de fuguer. Si le signal GPS était coupée, ou s’il indiquait une position suspecte, les X-Men devraient être informés de l’incident. Le jeune mutant, bien sûr, n’appréciait pas cette montre qui symbolisait ses fautes, mais pour une fois, il était heureux de la porter.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 22 juillet 2014, 21:38:06
L'albinos n'essaya pas d'empêcher Ernest de courir vers la porte, et se contenta de jeter un nouveau coup d’œil à sa montre. L'enfant-rat ne rencontra pas de difficulté particulière à parvenir jusqu'à la porte, ni-même à ouvrir cette dernière. Derrière se trouvait la même salle d'attente, dont la porte vitrée aurait dû laisser passer la vive lumière du jour.

Mais cette lumière était en grande partie masquée par la masse d'un individu colossal, projetant sur le parquet une ombre plus impressionnante encore. C'était un homme à l'obésité morbide et qui devait faire plus de deux mètres trente ; son corps rond était serré dans une grossière salopette en jean bleu qui laissait dépasser de gros bourrelets de chair. Sa peau était luisante de graisse… mais plus que cela, elle était véritablement élastique. Tout son être n'était qu'une masse flasque et huileuse, presque liquide, qui n'offrait aucune prise.

Il paraissait étrange qu'un tel individu ait pu entrer sans alerter personne. En réalité, il paraissait même étrange qu'il ait pu passer la porte du cabinet. Bloquant presque totalement le passage, il croisait les bras, son visage laid fixant Ernest.

« As-tu déjà croisé Glucide ? » interrogea l'albinos, qui s'approchait à pas lents, presque fébrile. « Il a été absent ces dernières années. Maladie, c'est ça ?
– Ouais, c'était un accident…  professionnel... une mauvaise rencontre… avec un… Béhémoth… »

L'obèse prenait toute la place, mais un autre individu habillé de cuir noir apparut de derrière la montagne de graisse. Il était en comparaison banal – et minuscule – mais devait tout-de-même mesurer un bon mètre soixante-dix. La peau pâle, il arborait une figure aux traits sombres, néanmoins assez séduisante, avec un regard vif.

« Nous avons de l'avance, mais ce n'est pas la peine de tarder. Glucide, pourrais-tu déshabiller Ernest ? N'essaie pas de lui enlever sa montre maintenant, ça ne sert à rien. »

Tentant d’exécuter les ordres, le colosse tenta de se saisir du petit mutant. Bien qu'inamovible et presque impossible à blesser, il était plutôt maladroit, et l'objectif demandait un peu trop de doigté pour lui.

« Ah… Vein, aide-moi… »

L'autre compère était d'une agilité plus standard.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 22 juillet 2014, 23:54:39
En franchissant la porte du cabinet, Ernest crut avoir une chance de s’en sortir. Une pensée plus qu’éphémère... Déjà la voilà balayée par la vision du flasque obèse, une personne si massive que son ombre engloutissait la salle d’attente. Le petit hybride, coupé net dans son élan, s’immobilisa, la gueule à demi ouverte. Il avait eu dans l’idée de crier, d’appeler son chauffeur, dès qu’il serait sortie. Mais ce n’était plus d’actualité. Quelque chose lui disait qu’il n’y avait plus personne à appeler. Ses yeux étaient rivés sur l’obstacle infranchissable. On put y lire son affolement naissant.

La voix de l’Albinos lui fit tourner la tête, ce qui ne l’empêcha pas de remarquer l’arriver d’un type en cuir noir. Ils étaient trois ! Trois, juste pour lui ! Et lui, en plus, il avait bu cette saloperie de produit ! Inutile de nier l’évidence, le piège s’était déjà refermé. Cependant, ce n’était pas parce qu’il le savait, qu’il allait l’accepter. L’ordre donné le fit sortir de son mutisme. Paniqué, sa voix était encore plus aiguë que d’accoutumé.

« Attendez ! Attendez ! Vous êtes de la Confrérie, c’est ça ? »

Il se jeta de côté pour éviter la main boudinée de Glucide. Son équilibre précaire l’envoya pratiquement au sol. D’une main, il se réceptionna. Apercevant l’entrée des cabinets, il s’y dirigea. C’était affreux comme chaque geste lui coûtait.

« Si vous voulez l’Altérium, suffit d’une prise de sang ou d’un prélèvement de salive ! Ça sert à rien de me foutre à poil ! A rien ! »

Le jeune mutant n’était pas du genre pudique. Il avait vécu des mois dans les égouts de la ville en se contentant la plupart du temps de sa seule fourrure comme habit. Mais en présence de scientifiques, c’était très différent. Cela le ramenait à ses heurs les plus sombres de son existence, celles où il n’avait été plus qu’un animal de laboratoire. Or, l’albinos lui avait déjà administré un médicament et donné des explications médicales précises. Avait-il juste subtilisé le savoir de Matias Miller ? Ou... non, non, Ernest refusait d’y penser. Arrivé à la porte des cabinets, il en actionna la poignée, mais dût se dégager pour esquiver à nouveau le tas de graisse. Voie des WC bloquée. Sortie de la clinique libérée... L’enfant-rat essaya de l’atteindre mais, trop lent, trop engourdi, le type en noir venu aider son malhabile collègue l’attrapa sans difficulté. Trop faible, impossible de se dégager. Ce ne fut pas faute de se débattre, de chercher à mordre et à griffer. Encore un peu et il était soulevé par l’obèse.

« Je suis pas un traître ! J’vous jure ! C’est un X-Men qui m’a ramené de force à l’Institut ! » braillait-il alors qu’il se faisait dépouiller de ses affaires.

Tous ses efforts pour lutter ralentissaient à peine la manœuvre. Chaussure, chemise, pantalon, caleçon... bientôt, il ne resta que la montre. Si l’on faisait exception de quelques proportions humanoïde et du fait qu’il possédait des mains, ce n’était qu’un gros rongeur. A la Confrérie, on l’avait connu plus maigre avec une fourrure plus terne. Il paraissait même avoir un peu bronzé. Là où sa peau était visible, le blafard cadavérique s’était mué en une pâleur plus commune. Cessant de gesticuler, il fixa l’albinos.

« J’ai pas eu le choix ! Si je collaborais pas, c’était la prison ou peut-être même la chaise électrique ! Je suis pas un traître ! J’en suis pas un ! J’vous jure ! »

En cet instant, il aurait à peu près dit n’importe quoi pour qu’on le laisse tranquille.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 23 juillet 2014, 03:20:39
En voyant Ernest esquiver les premières tentative du colosse, l'albinos sembla un instant légèrement nerveux, comme s'il craignait que l'incompétence de ses brutes ne lui joue un tour pendable. Mais finalement, avec l'aide de son compagnon, l'obèse parvint après bien des efforts à affirmer sa prise sur Ernest.

« Bien deviné… le rat… maintenant arrête… de bouger… »

Il le ceinturait dans ses bras gigantesques et mous ; la pellicule de graisse qui recouvrait sa peau nue était légèrement adhésive et surtout très désagréable. Pendant ce temps, Vein retirait les vêtements un à un.

« Tant pis, pauvre Ernest. Altérium ou pas, tu nous seras bien plus utile autrement, maintenant. Si tu es encore des nôtres, alors tu devrais être heureux de faire des sacrifices pour la cause. »

Parallèlement, l'albinos se déshabillait lui aussi. Le petit pull, le pantalon en tweed bien découpé et les autres affaires de Tobias Miller furent rangés dans un coin. Si le visage du mutant rendait difficile l'estimation de son âge, son corps, lui, était celui d'un vieillard malingre. Les membres étaient extrêmement maigres, et on voyait nettement ses côtes ressortir. L'impression de vieillesse et de fébrilité était renforcée par sa peau livide, et une pilosité intégralement blanche.

« Nous allons procéder par étapes. »

Il s'approcha, et plaqua ses deux mains décharnées sur les épaules de l'hybride. Elles étaient froides. Puis il planta son regard dans les yeux de ce dernier… et ce regard, à nouveau, changea… pour quelque-chose de plus bestial. Son nez s'allongea, devint un museau, et il perdit plusieurs dizaines de centimètres et se couvrit de poils. Une queue glabre poussa en bas de son dos dont la courbure avait légèrement évolué.

La copie conforme du rat sembla étourdie un instant. Elle se reprit.

« Tu vas trouver cela amusant, peut-être : dans quelques minutes, une partie de moi sera persuadée d'être toi. C'est parce que cette partie de moi sera toi, d'une certaine façon. »

La voix nasillarde d'Ernest était reproduite à la perfection, même si l'intonation était un peu différente.

« Je vais m'habiller à côté. Passez à l'étape suivante. Et n'en mettez pas partout. Je ne veux rien voir quand je reviens. »

Il prit les affaires d'Ernest et s'enferma dans la pièce sans un mot de plus pour celui dont il venait de voler l'apparence.

« Ah… l'étape suivante… je le tiens… vas-y Vein…
Il y a un truc pour la douleur ?
– Je sais… pas trop… on n'a pas d'autres… moyens de toute… façon… tu t'en… soucis vraiment… ? »

Pour toute réponse, Vein sourit, révélant une mâchoire presque vampirique, aux canines immenses. Il agita les doigts de sa main droite, et ceux ci se fondirent en une masse brumeuse sombre. La forme se modela progressivement, pour former une longue griffe noire, à l'aspect solide.

L'obèse entra trois gros doigts qui ne craignaient rien – il n'y avait pas besoin de plus – dans la gueule de l'hybride pour l'empêcher d'émettre de son trop strident. Insensible à d'éventuelles protestations, qui devaient l'amuser, l'homme en noir attrapa la main d'Ernest qui portait la montre.

Son appendice d'ombres s’abattit avec beaucoup de précision en amont du bracelet de métal. Il se révéla particulièrement tranchant, pénétrant la chair ; sans même rencontrer de difficulté lorsqu'il fendit l'os. La montre – et la main – tombèrent sur le sol dans une gerbe de sang.

***
*

La suite de la scène devait être plus floue. Glucide qui attrapait déjà un gros chiffon blanc dans une des poches de sa salopette. Vein qui s'esclaffait, puis qui attrapait nonchalamment Ernest par son bras encore valide.

Et tous deux qui étaient entourés de la même brume noire : pour le passager, il n'y avait rien à voir, seulement l'obscurité, et pas grand-chose à entendre, seulement des sons confus et aigus (on pouvait deviner parfois des klaxons, et plus tard, la sirène d'un bateau). Il y faisait froid, et la notion de temps n'existait pas vraiment. Tout autour, les ombres rendaient le moindre mouvement lourd et, en définitive, inutile.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 23 juillet 2014, 10:02:25
Ce... ce n’était pas pour l’Altérium ? Utile autrement ? Comment ça ? Ernest, muet de stupéfaction, ne tarda pas à avoir un indice. Oubliant totalement le gluant contact de Glucide, il assista à la métamorphose du vieil albinos en sa copie conforme. Les Confréristes ne voulaient pas la molécule mutagène. Non, ils voulaient sa place. Un moyen de pénétrer l’Institut ? Probable. En tout cas, il comprenait pourquoi on l’avait dévêtu. Pas du tout pour ce qu’il imaginait à la base. Lorsque le faux Vermine déserta son champ de vision, emportant ses affaires, une nouvelle question s’imposa à son esprit. C’était quoi la prochaine étape ?

Là encore, il comprit. La montre. Elle était indispensable pour leur plan. Et Vein allait la lui retirer, visiblement sans beaucoup de précautions. Malgré lui, l’hybride glapit :

« Non, non ! »

Bientôt, l’obèse le bâillonna, à sa manière. Le jeune mutant mordit les doigts énormes de toutes ses forces, sans le moindre résultat. C’était comme de la gélatine trop élastique, trop résistante. Il rua des jambes pour repousser l’homme en noir. Pas d’avantage de succès. Le bras saisit, il ferma les yeux. Il s’attendait à ce que la griffe d’ombre tranche le bracelet et le charcute au passage. Mais non, ce n’était pas logique. La montre devait rester intacte. Alors, comment Vein allait-il procédé ? Une douleur fulgurante lui répondit. Rouvrant les yeux, il aperçut sa main tomber, beaucoup de sang aussi. Il ne réalisa pas vraiment. Il savait juste qu’il avait mal, mal, terriblement mal, tellement mal que ses pensées devinrent confuses.

Sombrant dans une demi inconscience tourmentée, il eut la vague impression de voyager. Une sensation de froid désagréable l’enveloppait. Face à lui, des ombres mouvantes, étranges, incohérentes. Au milieu d’elles, ses idées voguaient, décousues. Où était le véritable Matias Miller ? Mort ? Et son chauffeur ? Peut-être qu’il aurait dû hurler à gorge déployée dans la salle d’attente. Peut-être que cela aurait donné l’alerte. Il avait quand même braillé alors qu’il se débâtait... Etait-ce assez ? Une peur affreuse l’étreignit, celle que les X-Men perde sa trace, celle que personne ne vienne à son secours. Comme lors des quinze jours... Il crut entendre le rire du savant fou. Le rire de sa mère aussi, elle qui l’avait rejeté, elle qu’il exécrait..., elle qui le traitait de sale rat manchot. Pourquoi manchot ?

Non... il nageait en plein délire. Ce n’était qu’un cauchemar, un de plus. Il allait sous peu se réveiller dans sa chambre, à l’Institut. Haletant et en sueur, il se sentirait idiot d’être à nouveau victime de son imagination morbide. Et il serait malgré tout terriblement rassuré de voir, à travers la fenêtre, le parc verdoyant, paysage auquel il s’était attaché. Il ne pouvait qu’en être ainsi... Il en serait ainsi...
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 25 juillet 2014, 08:35:54
Deux silhouettes descendaient des escaliers ; un rondouillard, court sur pattes, assez vieux, et une femme beaucoup plus jeune, étrangement élancée. À deux, ils portaient un petit corps.

« Je n'aime pas tellement le petit temps qui se prépare là, ça tourne à l'orage, il me semble bien ? Mademoiselle a-t-elle des sens spéciaux pour sentir cela aussi ?
– Ta gueule. Fais juste attention à où tu marches. NON, crétin de mâle, tu vas pas encore me faire le coup ; fais atten... B…BORDEL ! »

L'homme âgé venait de rater une marche. Il tenta de s'agripper au fardeau qui était également retenu par son binôme. Mais mystérieusement, alors qu'il le tenait solidement une seconde encore avant, sa prise glissa, et il affala, dévalant une demi-dizaine de marches. Heureusement, sa coéquipière sembla heureusement assez forte pour maintenir sans problème le corps par ses propres moyens.

« M.E.R.D.E. La prochaine fois, je le porte seule. Trois prisonniers à descendre, trois fois tu te casses la gueule. C'est presque miraculeux, putain. Rappelle moi pourquoi ils te gardent ?
– Allons demoiselle, fit le vieil homme en rajustant son chapeau et ses lunettes, c'est parce que j'ai capacité à créer des obstacles inattendus. Mais en contrepartie, Dieu nous impose des…
– Ta gueule Poissard, ta gueule ! Je déteste ta putain de gueule. Je déteste ton putain de Dieu. Je déteste ce putain de job. Surtout, SURTOUT, je déteste cette putain d'île. »

***
*

« Ah, enfin, tu te réveilles. »

Les mots auraient pu potentiellement être effrayants… mais ni le ton, amical, ni la voix, jeune et féminine, ne l'étaient. Le prisonnier était allongé, le dos calé contre un matelas assez dur, sans être absolument inconfortable. En ouvrant les yeux, il pouvait voir ce qui semblait être un matelas identique, juste au-dessus de lui, et en tournant un peu la tête, le visage d'une adolescente.

« La requine t'a juste posé par terre, mais je t'ai mis ici. C'était ma place avant, mais je n'avais pas la force de te porter jusqu'en haut. »

Elle avait un nez très pointu, en trompette, des narines très longues, et des pommettes hautes, plus rouges que sa peau pâle et de grands yeux bleus. On pouvait distinguer deux grains de beautés, discrets, près de son oreille droite, derrière laquelle est relevée sa chevelure blond-roux, qui sinon tombait jusqu'à sa poitrine. Elle était ravissante, mais son visage avait quelque-chose de fatigué.

Elle portait un tee-shirt bleu clair, qui lui laissait les bras nus, et un pantalon dans le même tissu, qui faisait pyjama… ou tenue de détenu.

« Ils auraient pu te donner quelque-chose pour t'habiller… Ils ont dû oublier. On leur demandera, si tu veux, quand ils passeront. »

En effet, Ernest, lui, ne portait rien. La température n'était en ce sens pas un problème, car il faisait particulièrement chaud, peut-être trente degrés.

« Est-ce que ça va ? »

Le prisonnier avait été correctement soigné. Sa main manquante avait été remplacée par un bandage blanc propre. Le moignon était sur la voie de la cicatrisation. La jeune fille fixa un instant le membre mutilé, puis détourna le regard.

La cellule faisait environ huit mètres carrés, sans fenêtre. La seule ouverture était une porte de métal, avec une fente grillagée de dix centimètres de hauteur à un mètre cinquante du sol, qui devait s'ouvrir de l'extérieur. Sur les murs nus, une peinture blanche commençait à s'écailler sous l'effet de l'humidité. Il y avait un lit superposé (Ernest était sur le plus bas), et dans un coin, des toilettes à la turc et un minuscule évier. C'était tout.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 25 juillet 2014, 10:38:14
Alors qu’Ernest revenait à lui, il prit tout d’abord conscience de la température. La sensation de froid n’était plus qu’un souvenir. Les ombres aussi. Il n’y avait plus que l’obscurité de ses paupières closes, la chaleur humide et un picotement au bras gauche, celui où il portait la montre. Il était allongé, sur un matelas, pas sur un sol d’acier. Suite à chaque cauchemar un peu trop intense, il avait peur de se découvrir en cage en ouvrant les yeux. Après avoir un peu remué, il osa regarder. Un lit superposé ? Ça y ressemblait. Mais depuis quand y en avait-il un dans sa chambre ? Une voix lui fit tourner la tête, non sans le faire sursauter par la même occasion. Chamboulé par le mauvais songe, il était fébrile, nerveux. Une jeune femme lui tenait compagnie, plutôt jolie. Finissant de s’accoutumer à la luminosité, il la détailla d’un air passablement perdu. Lorsque ce qu’elle lui disait prit un sens dans son esprit embrumé, il comprit pourquoi tant d’étrangetés l’environnaient. La dure logique s’imposa. Impossible de la nier plus longtemps.

Cette chambre n’était pas la sienne.
Le cauchemar n’en était pas un.

Ça lui fila un sacré choc. Une inquiétude certaine marqua ses traits bestiaux alors qu’il se redressait sur son séant. Son regard passa au-delà de la demoiselle, considérant maintenant la pièce. Il n’était peut-être pas en cage, mais en cellule. Sa réaction brusque lui donna un vertige. Il l’ignora. Il réexamina la femme, s’intéressant cette fois à sa tenue plutôt bizarre. Puis ses yeux glissèrent sur lui-même, constatant sa nudité mais surtout... surtout... l’absence de sa main gauche. Le bandage accrocha toute son attention. Son vertige devint presque un malaise.

« Ho merde... » murmura-t-il, catastrophé.

Il se laissa lourdement retomber sur le matelas. Il soupira et ajouta :

« C’est pas vrai... C’est pas vrai... les salops... »

Il referma les yeux et crispa les mâchoires, écrasé par le poids de cette réalité. Il finit quand même par se rappeler qu’il n’était pas seul. Pas seul... Dans aucun de ses rêves déments, il ne s’était retrouvé dans une situation comme celle-ci. On ne semblait pas vouloir faire de lui un rat de labo. Mais alors, c’était quoi le programme ?

« J’imagine que ça pourrait aller mieux », répondit-il enfin, un rien sarcastique.

Ernest n’était pas spécialement aimable de nature. Il avait fait beaucoup d’efforts pour s’améliorer, sauf que là, il n’était plus à l’Institut. Non, il était dans la merde. Il se força toutefois à redevenir aimable, parce que ce serait stupide de se mettre à dos sa collègue de prison. Il la fixa et desserra les dents.

« Pas sûr qu’ils aient oublié. Ils doivent se dire que j’en ai pas besoin. Mais oui, on peut toujours demander. Même s’ils me filent un truc trop grand, m’en fiche, ce sera toujours mieux que rien. Heu... tu m’expliques un peu où on est, là ? J’ai l’impression d’avoir loupé un chapitre. »

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 25 juillet 2014, 17:45:16
La jeune fille parut davantage préoccupée par la détresse du prisonnier que par son peu de politesse. Elle était assise au bout du lit, qui prévu pour des adultes sans doute, était loin d'être occupé dans toute sa longueur par Ernest.

« Alors tu es vraiment nouveau ? On est quelque-part en sous-sol. Ici, juste ici, c'est une sorte de prison. C'est l'endroit le plus agréable. Il y en a d'autres qui le sont moins. Je ne sais pas ce qu'il y a à l'extérieur. Je crois que c'est une jungle, ou alors une île. Peut-être les deux en même temps. »

Elle montra le plafond, qui, nus comme les murs, révélait de grandes traces d'humidité sous sa peinture. L'eau devait s'infiltrer quelque part.

« Tu ne perds pas grand-chose, pour les vêtements. Ils sont en recyclé. »

Pour illustrer son propos, elle se leva et tira sur sa propre tenue au niveau de l'épaule. Le tissu bleu ne tarda pas à se déchirer sur un bon centimètre, sans qu'elle paraisse aucunement forcer.

« C'est pour éviter qu'on se pende, je pense. Les draps sont pareil. »

Debout, l'adolescente n'apparaissait pas comme très grande, un mètre cinquante-cinq. Elle avait de légères courbes, agréables à l’œil et toujours délicates, mais elle était surtout très maigre.

Il y avait un détail plus macabre, sans doute : l'état de ses bras, laissés à découvert. Du dessus de ses mains à ses épaules, ils étaient parsemés de petites plaies, comme autant de piqûres. L'épiderme clair de ses avants-bras laissait apparaître ses veines bleus… dont d’innombrables blessures suivaient le sillage. Un toxicomane n'aurait pas eu pire. Cependant, toutes ces atteintes paraissaient déjà être anciennes d'au moins quelques semaines, et aucune n'était vraiment récente.

« Ce qu'ils font ici… ce n'est pas vraiment clair. Je ne sais pas vraiment s'ils cherchent quelque-chose, ou si c'est juste un prétexte pour… En tout cas moi, ça n'a rien donné, je crois. Mais on ne peut jamais vraiment savoir. »

Elle pinça les lèvres et regarda le sol. Puis elle braqua son regard dans celui d'Ernest.

« Tu as un prénom ? Comment tu es arrivé ici ? Tu as fait quelque-chose qui a déplu à la Confrérie ? Je t'ai déjà vu dans un journal, non ? » interrogea-t-elle successivement. « Lenoir, c'est pas ça ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 25 juillet 2014, 18:51:39
Une prison en sous-sol sur une île, ou une jungle... une île tropicale peut-être... Ernest se rappela la sirène du bateau entendu lors de sa semi inconscience. Génial. Voilà un voyage dont il se serait bien passé. Il se trouvait peut-être à des milliers de kilomètres de New York et un faux lui l’avait remplacé à l’Institut. Tant que l’albinos métamorph ne serait pas démasqué, les X-Men ne seraient même pas qu’il y avait eu un problème. Combien de temps la supercherie pouvait-elle durer ? Le jeune mutant n’en avait aucune idée. L’albinos semblait être en mesure de s’auto-persuadé qu’il était celui dont il avait adopté l’apparence. Cela devait, dans une certaine mesure, le protéger des télépathes, tout en lui permettant d’être parfaitement crédible dans son rôle. Bref, ce n’était pas un bon présage. La cavalerie risquait fort de se faire attendre.

« C’est ça. Ernest Lenoir. Ou Vermine. Ou le rat », répondit l’hybride, avec un peu de retard.

Il peina à détacher ses yeux des traces courants sur les bras de l’adolescente. L’hypothèse cobaye revenait au galop. Toujours allongé, il reprit :

« C’est possible que la Confrérie ait une petite dent contre moi. En tout cas, je me suis fait kidnapper chez mon psychologue. Ils n’y vont pas de main morte... »

Il observa son moignon et eut un rire désabusé.

« C’est drôle... j’ai l’impression d’encore la sentir... Je crois que c’est le phénomène du membre fantôme. »

Il reporta son regard sur la demoiselle, essayant de rester sur son visage, de ne surtout pas regarder ses bras.

« Et toi, t’es qui ? Comment t’es arrivé là ? J’imagine que tu es mutante, parler à un gros rongeur ne te pose visiblement aucun problème. Et si tu pouvais m’expliquer ce qui m’attend, je t’en serai très reconnaissant. Je n’aime pas trop les surprises, surtout les mauvaises en fait. »

Il commençait à avoir envie de pisser. Il ignorait s’il était en mesure de marcher tout seul. Normalement, il ne devrait pas trop y avoir de souci, du moment qu’il y allait en douceur. Pour l’instant, il se contenta de s’assoir au bord du lit. Il appuya sa tête contre son poing, son coude sur un genoux. Son bras estropié, l’espace d’une fraction de seconde, il ne sut pas quoi en faire. Impossible de s’appuyer dessus, comme l’habitude le lui dictait. Il le laissa finalement reposer sur une cuisse.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 25 juillet 2014, 21:14:30
« Je m'appelle Eve. Je suis… enfin, j'étais, la fille du patron d'un groupe industriel. La Confrérie m'a kidnappée pour faire chanter mon père. J'avais douze ans. Au début ça allait… mais ils se sont rendu compte que mon père n'en avait  – elle soupira – rien à faire. Alors ils ont plus eu de scrupule à… m'abîmer. Puis ils n'ont plus su quoi faire de moi. »

Sa voix était lasse, plus ennuyée que réellement malheureuse, et son visage n'était particulièrement sombre. Elle semblait avoir digéré l'histoire depuis un moment. L'adolescente continua son récit avec beaucoup de détachement.

« C'est alors qu'ils ont découvert que j'étais mutante. J'ai guéri de toutes les choses qu'ils m'ont faites. J'ai même guéri les autres. Je leur ai dit deux-trois trucs débiles, comme que je préférai mourir plutôt que de travailler pour eux. Et puis, voilà… Ils m'ont surtout fait des prélèvements. »

Elle indiqua d'un rapide regard ses bras. Enfin, elle tira également légèrement sur son col : la base de son cou semblait avoir été aussi densément percée que ses membres supérieurs.

« Ils cherchaient une substance, celle à l'origine de mes pouvoirs je suppose. Au début ils pensaient que c'était dans mes organes, puis dans mon sang. Ils ont fait des tests, plein de tests. Ils ont compris qu'elle était surtout secrétée sur ma peau lorsqu'ils me faisaient de petites entailles. Alors ils s'en sont pas privés. »

Avec un air navré, elle lâcha son col et se détourna. Elle fit quelques pas, mais ils étaient tremblants. Elle était mal assurée sur ses jambes, et ses muscles peinaient manifestement un peu à la porter.

« Je suis désolée. Je crois qu'il y a encore six mois, j'aurais été capable de faire quelque-chose pour ta main. Mais je n'arrive même plus à faire quelque-chose sur moi. Ils ont intensifié les prélèvements, car ils n'arrivaient pas à… à guérir ils y arrivaient, mais… enfin, je ne sais pas vraiment ce qu'ils cherchaient. Mais je… je n'ai plus aucun pouvoir, maintenant. Enfin, ils ont soudainement tout arrêté il y a quelques jours, comme si je ne les intéressais plus. Peut-être qu'ils ont trouvé un autre sujet d'expérience. »

Eve eut un sourire passager.

« Je suis contente d'être avec quelqu'un comme toi, Ernest. Tu n'es pas aussi effrayant que tu le penses. Je crois même que tu es plutôt gentil. Je suis soulagée, en fait, c'est la première fois en trois ans que j'ai un compagnon de cellule, et j'avais peur qu'ils me mettent avec un malade. Surtout un qui essaie de, enfin, tu vois. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 25 juillet 2014, 22:12:26
Un nouveau sujet d’expérience... Les mots raisonnèrent dans la tête d’Ernest avec une funeste intensité. Etait-ce lui le nouveau ? La logique allait dans ce sens, il était porteur de l’Altérium. La molécule avait un énorme potentiel, il était bien placé pour le savoir. Il avait parfois l’impression de vivre à l’ombre de son propre pouvoir. Mais peut-être qu’il se trompait. Il s’était déjà trompé dans le cabinet de Miller. Et puis, même si sa supposition s’avérait juste, il devait être de taille à affronter quelques piqûres. Les expériences, les analyses, tout cela prenait du temps. Et les X-Men finiraient par débarquer et par le sauver. Une fois de plus...

« Gentil... » reprit l’hybride.

C’était amusant. Pauvre Eve, elle n’avait pas dû bien lire les journaux. Ou alors, elle était tellement contente d’avoir un collègue de cellule qu’elle faisait abstraction de tout le reste. Il fut à deux doigts de lui avouer qu’il avait un casier chargé, que parmi ses crimes on trouvait le viol, qu’il était potentiellement le genre de malade qui pouvait lui faire peur, qu’il avait même été un Confrériste. Il se ravisa. D’une part, il espérait avoir changé. D’autre part, que gagnerait-il à l’effrayer ? Il était également contant de ne pas être seul. C’était sans doute grâce à sa présence qu’il parvenait un peu à positiver. Elle avait besoin de soutien, il avait besoin de soutien. Il fallait se serrer les coudes, pas jouer les monstres. Les monstres, il les verrait bien assez tôt.

« Je suis parfois un peu difficile à vivre, m’a-t-on dit. En tout cas, merci pour ton accueil, Eve. Ça rend les choses... moins abruptes. Et navré pour ton histoire... Trois ans, j’ose même pas imaginer. »

Désormais, il s’efforçait de paraître sympathique. Comme à l’Institut. Il se leva, vacilla. Pour conserver son équilibre, il dût trouver appui sur le mur avec sa main valide. Ses jambes tremblaient. Le vertige revint.

« La vache... »

Il préféra se rassoir.

« S’ils te laisse tranquille, peut-être que ton pouvoir finira par revenir. Essaie de le solliciter, un peu de temps en temps. On sait jamais... Je serais pas contre une nouvelle main. J’aimais bien l’ancienne, elle me manque déjà. »

Il adressa à l’adolescente un petit sourire, puis ajouta, embarrassé :

« Heu, tu m’aides à aller jusqu’au toilette ? J’aimerais pas me casser la gueule en faisant pipi. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 26 juillet 2014, 07:04:10
D'abord surprise par la requête d'Ernest, la jeune fille hésitait entre l'amusement et la gêne. Elle opta finalement pour une réserve très digne.

« Ah… oui… d'accord, pas de problème. »

Elle revint prudemment vers le garçon-rat et l'attrapa assez naturellement par le bras. Elle faisait de son mieux pour le soutenir, même s'il était probable qu'elle n'aurait pas la force de le maintenir debout si les jambes du mutant venaient à complètement le lâcher. Une fois arrivée devant le trou – ce n'était pas grand-chose d'autre qu'un trou à même le sol – elle le laissa prendre appui contre le mur, en angle.

« Ça va aller ? » demanda-t-elle, en s'assurant que le prisonnier pouvait se maintenir sans son aide.

Elle ne s'éloigna pas beaucoup cependant, peut-être un peu moins que la politesse ne l'aurait exigé. Cela se légitimait parfaitement par le fait que les jambes d'Ernest ne paraissaient pas très fiables. Toutefois, elle s'était imperceptiblement décalée, et son regard bleu effectuaient de petites descentes absolument injustifiées vers une zone anatomique précise, toujours suivies de rapides remontées.

Ce voyeurisme insouciant et discret fut interrompu par un cri de douleur aigu. Il était d'autant plus perceptible et glaçant qu'il paraissait provenir de la pièce juste au-dessus de la cellule. L'appel de détresse se répéta une nouvelle fois, plus strident. Un choc sourd lui répondit, faisant légèrement vibrer le plafond. Enfin, le silence revint.

Il se passa plusieurs secondes avant qu'Eve ne prononce le moindre mot.

« Ils… Non…  C'est qu'ils n'utilisent jamais la pièce juste au-dessus… d'habitude… Ce n'est pas une pièce du labo… Elle… J'espère qu'ils ne lui ont pas fait de mal… Elle était là depuis au moins aussi longtemps que moi… J'espère qu'elle… »

Eve déglutit lourdement, puis serra les lèvres jusqu'à les faire pâlir. Son visage avait perdu de ses couleurs, mais ses yeux avait rougi. Une petite larme perla jusqu'à sa joue. Elle l'écrasa rageusement du poing. La légère fatigue de ses traits avait laissé place à un épuisement.

« Tu as terminé ? » interrogea-t-elle d'une voix un peu rauque.

Malgré son état, elle reprit le bras d'Ernest avec autant de délicatesse qu'au départ. Elle ne put s'empêcher de souffler, sur un ton bas et froidement colérique :

« C'est ce nouveau docteur. Je suis sûre que c'est le responsable. Je ne l'ai vu qu'une fois. Mais il est pire que les autres. Il a dit qu'il s’appelait Richard. Richard Carnal, ou Carsal, je sais plus. Évite de le provoquer, surtout. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 26 juillet 2014, 10:24:03
Ernest, occupé à viser le trou, et surtout à rester debout, ne prit pas garde aux furtifs coups d’œil d’Eve. Mais bien sûr, impossible d’ignorer les bruits stridents venant juste de l’étage supérieur. Il leva la tête, fixa le plafond. Voilà qui promet, songea-t-il. Dans le pesant silence qui suivit, il termina d’uriner. L’ambiance paraissait plus glauque qu’auparavant, et les propos de l’adolescente était de nature inquiétante. Venaient-ils d’entendre une mise à mort ?

« Ouais ouais, c’est bon », s’empressa de répondre l’hybride.

D’un rapide geste, il essuya une goutte rebelle contre le pelage de l’intérieur de sa cuisse, puis entreprit le court trajet de retour vers le lit. Ses jambes tremblaient moins. Elles assumaient plus facilement son poids. Et il était soulagé d’avoir une vessie vide. Une fois assis, il réagit aux dernières paroles d’Eve.

« Richard... C’est noté. Je me tiendrai à carreau. »

En combinant les différentes choses qu’il avait appris, pas mal de changements étaient en train de se produire. Nouveau sujet, nouveau docteur, nouvelle pièce utilisée... Là-haut, il y avait un labo. Il avait intérêt de se préparer à y faire face où il allait paniquer. La simple perspective de revisiter ce genre d’environnement le fit frissonner. Même le labo de l’Institut lui donnait des sueurs froides. Alors celui-là... Il voulait des habits. C’était tout con, mais il en voulait. Pour ne pas avoir l’impression de revivre le passé... Un peu plus tôt, il parvenait à positiver. Là, il peinait à masquer son angoisse. Et le silence lui était insupportable.

« Heu... faudrait trouver un truc à quoi jouer. Pour se changer les idées. Papier caillou ciseau peut-être ? Le premier à dix milles points gagne ! » proposa-t-il, non sans une bonne dose d’humour.

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 27 juillet 2014, 06:17:28
« Elle s'appelait Ming, c'était une fille bien » ajouta simplement Eve.

Elle n'eut pas immédiatement le temps de réfléchir à un jeu, car on frappa deux coups secs à la porte. Aussitôt, la jeune fille se leva et se dirigea vers cette dernière. La grille s'ouvrit, pour laisser passer un plateau en carton, qu'elle saisit avant qu'il ne tombe. Avant que l'ouverture ne se referme, elle s'essaya à glisser quelques mots :

« Merci. Est-ce qu'Ernest pourrait avoir une tenue ? Il est arrivé sans rien. »

On ne lui répondit pas, et la grille fut close de nouveau. Eve lança un regard désolé vers l'autre prisonnier, et entreprit de ramener le plateau à la couchette. Il contenait deux écuelles en plastique jetable. Leur contenu était un peu plus singulier : étaient disposés sur le côté, tranchés, un légume ressemblant de loin à un poivron vert, mais à la chair beaucoup plus épaisse et légèrement grumeleuse. Il y avait également une petite pyramide de gros filaments brun-rouge. Le tout était cru.

« Je n'avais jamais mangé de ces légumes avant d'arriver ici. Je pense qu'ils sont exotiques…  J'espère que tu vas aimer, parce qu'en fait, ils sont souvent au menu. »

Il y avait également deux petites serviettes en papier, mais pas de couverts. Tout se mangeait bien avec les doigts. Le poivron avait un vague goût de châtaigne, alors que les filaments rappelaient le choux, en légèrement plus amer. L'intrigante nourriture était d'une qualité gustative acceptable. Eve attrapa son bol et commença par porter un filament à sa bouche.

« Si tu as soif, il y a l'évier. J'irai te chercher de l'eau si tu veux. »

Soudain, la porte s'ouvrit en grand. Une tunique et un pantalon, semblables à ceux que portait l'adolescente, furent jeter sur Ernest. La responsable de ce don était une mutante, grande et musculeuse. Sa peau était bleue et luisante, et surtout, son visage n'avait rien d'humain : sa mâchoire était disproportionnée et projetée en avant, à la manière d'un requin. Ses attributs féminins étaient très marqués, presque exagérés, et mis en valeur dans une improbable tenue de latex. Un long fusil noir au canon rectangulaire était à son flanc.

Elle s'adressa à l'hybride sur un ton à la fois amusé et agressif. Ses dents étaient toutes gigantesques et pointues, et son sourire terrifiant.

« Autre chose que je peux faire pour toi mon rat ? Non ? »

Elle n'attendit pas de réponse pour s'éloigner et entreprendre de refermer la porte. Au moment où celle-ci était presque fermée, cependant, elle s'arrêta pour intercaler une phrase supplémentaire.

« Ton baptême de labo, c'est dans six heures. Rien d'autre d'ici là. Alors repose-toi bien, mon rat. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le dimanche 27 juillet 2014, 11:16:51
Ernest ne fut pas spécialement surpris par la nourriture. Certes, il n’aurait pu prévoir ce à quoi elle allait ressembler, mais quand il l’eut constaté, il conclut vite que c’était conforme à cet endroit. Ce qui le surprit, en revanche, ce fut qu’on accède à la demande d’Eve. Pris au dépourvu par les habits que la massive mutante lui jetait, il n’eut le temps que d’écarter son écuelle avant qu’ils n’atterrissent sur lui, puis tombe au sol. S’il avait eu sa seconde main, il aurait pu les attraper au vol.

« Merci », marmonna-t-il alors qu’il se préparait à les ramasser, tout en fixant la femme-requin.

Il avait d’autres répliques en tête, mais mieux valait qu’il les garde pour lui. Il ne fallait pas la ramener, surtout pas. La mention de son baptême de labo le fit se figer. Six heures... Sur le coup, il aurait presque préféré tout de suite, qu’il sache sans broger au préalable à quoi il allait avoir droit. La seconde d’après, il aurait préféré six jours, six mois, six ans... jamais en fait. La porte claqua. Il était de nouveau seul, avec l’adolescente.

« Ce sera pas mon baptême, avoua-t-il en se remettant à bouger.

Tant bien que mal, il entreprit d’enfiler le pantalon.

« J’y ai déjà eu droit. J’imagine que ça m’a un peu vacciné. »

Traumatisé plutôt. Cependant, il essayait de se convaincre du contraire. Toutes les séances chez le psy devaient bien avoir porté leurs fruits, non ? Après avoir fini de s’habiller, il troua d’un coup de griffe son pantalon afin de laisser passer sa queue. Ensuite, il s’observa. Pas terrible, mais c’était mieux qu’avant, selon lui. Et puis, il ressemblait à Eve maintenant. Il se rassit et récupéra son bol.

« Si je peux, j’essaierai d’avoir des nouvelles de Ming », promit-il.

Comment manger et tenir l’écuelle à la fois avec une seule main ? Désireux de ne pas passer pour un sauvage, il calla le bol entre ses genoux et utilisa sa main pour porter les aliments à sa gueule.

« Pas trop mauvais. »

Les efforts qu’il fournissait le fatiguaient vite, toutefois son état de faiblesse allait décroissant. Avec ce repas et un peu de repos, il n’aurait plus besoin d’être aidé par la demoiselle. En attendant, il ne se sentait pas de taille à aller jusqu’à l’évier. Il allait demander pour boire.

« Sinon, ouais, faudrait qu’on se trouve des jeux, pour passer le temps. Et c’est déjà un jeu que de chercher. »

Il se força à sourire.

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 27 juillet 2014, 21:37:42
« C'est gentil… mais ne te met pas en danger pour ça » fit avec une réelle reconnaissance l'adolescente.

Que sa demande d'habits pour Ernest ne reste finalement pas vaine sembla redonner un peu de couleurs au visage d'Eve. Elle répondit naturellement au sourire d'Ernest par un autre sourire. Elle s'apprêtait à dire quelque-chose, mais son regard dévia aussitôt sur la main de l'autre prisonnier, et elle étouffa la syllabe qui avait traversée ses lèvres en un toussotement.

Elle attendit ainsi d'avoir terminé de manger avant de proposer :

« Je jouais à un jeu avec mon frère. Il ne fallait rien d'autre que quelques cailloux. On devrait pouvoir se débrouiller. »

Elle se leva et attrapa son propre drap. Elle en déchira un morceau carré d'une vingtaine de centimètres de côté ; puis elle déchira encore ce morceau en six morceaux, de taille très grossièrement égale, qu'elle chiffonna rapidement. Elle revint s’asseoir et en donna trois au mutant, gardant les trois autres pour elle.

« C'est simple : on met une main dans son dos, et dans cette main, on met entre trois et aucun cailloux. On laisse les autres derrière. Puis on pari chacun sur combien il y a de cailloux au total dans les mains, dont la notre. Puis on révèle nos mains. Celui qui tombe sur le nombre exact, enfin, s'il y en a un, jette un caillou. Puis on refait une manche. Le premier à ne plus avoir aucun caillou gagne. »

C'était essentiellement un jeu de bluff et d'estimation. À seulement deux, c'était aussi en grande partie un jeu de chance (alors qu'à partir de trois, les mathématiques étaient plus déterminantes). L'une des subtilités du jeu, qui le rendait assez serré, était que moins le joueur avait de cailloux (et donc, plus il se rapprochait de la victoire), moins il avait d'influence sur la partie, et plus ses estimations étaient en conséquence difficiles. Le suspense était donc souvent présent jusqu'au dernier moment.

« Ça te dit, on essaie ? »

Eve, ravie de faire quelque-chose de nouveau, pouvait jouer à ce jeu sans trop se lasser pendant plusieurs heures. Elle ne se ferait également pas prier pour aller chercher de l'eau à Ernest, en utilisant pour ça son écuelle vide. On ne reviendrait en revanche pas reprendre leurs plateaux avant l'heure fatidique.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le dimanche 27 juillet 2014, 22:30:08
« Ok, on essaie ! », répondit Ernest avec un réel enthousiasme.

Dès qu’il eut vidé son bol, il se jeta à corps perdu dans le jeu. C’était bien sûr une façon d’oublier ce qui l’attendait. Il savait très bien bluffer. La chance, elle, fut capricieuse. Il gagna... il perdit... il s’amusait et c’était le principal. Le regain de moral d’Eve était, de plus, un réel réconfort pour lui. C’était plus facile à deux de traverser les épreuves. Il s’en rendait compte dès à présent.

Plus de deux heures passèrent avant que l’hybride, fatigué, ne décide de se reposer. Il s’allongea, tomba dans le silence, mais ne ferma pas les yeux et ne chercha pas à dormir. Pour occuper son esprit, il s’exerçait au calcul mental. Il se noyait dans les chiffres à défaut d’avoir de l’alcool à portée de la main. Que d’artifices pour ne pas sombrer dans l’inquiétude. Combien de temps s’était-il écoulé à présent ? Il ne savait plus. Etait-ce la nuit, le jour ? Il finit par se lever. Il parvint à marcher seul et à aller boire par ses propres moyens. Il avait reprit du poil de la bête...

...sauf que l’échéance se rapprochait. Il devint de plus en plus ardue d’en faire abstraction. Il essaya bien de se remettre à jouer, le cœur n’y était plus et l’adolescente ne put que s’en rendre compte. Le jeune mutant était devenu attentif au moindre bruit. Peut-être qu’on allait le chercher d’une minute à l’autre. Peut-être qu’il avait encore trois heures à attendre. Voilà qu’il s’allongeait de nouveau. Puis se relevait peu après. Il faisait les cents pas. Nerveux, il tripot ta sa queue...

C’était affreux, et il n’y était pas encore...
Juste quelques piqûres, voilà tout ce qui l’attendaient. Pas de quoi en faire un fromage, si ?
Et s’il tombait sur ce Richard ? Il n’aimait pas ce nom. Il ignorait pourquoi, mais il le détestait même.
Tout ça, c’était ddans sa tête. Juste son imagination. Juste ça...
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 28 juillet 2014, 03:37:34
Eve voyait bien qu'Ernest commençait à sérieusement angoisser, et elle fit de son mieux pour le rassurer :

« Tu sais, la première fois, moi, ils ne m'ont pas fait grand-chose. Ils te pèsent, ils te posent des questions… Ah, et ils te tatouent ça, aussi. »

Elle se retourna et releva le bas de sa tunique. Dans la partie basse du dos, au niveau des lombaires, était centrée une petite inscription. Il y avait différents symboles verticaux, qui ressemblaient à un code-barre, et en-dessous, une suite de numéros. Celui de la jeune fille était 000002.

« Tu vois, rien de terrible. »

Les heures passèrent. Sans repère temporel, il était difficile de les mesurer, mais finalement, la porte s'ouvrit de nouveau. La même gardienne bleue à la mâchoire monstrueuse et à la silhouette étrange fit son apparition.

« C'est l'heure mon rat. Fais pas d'histoire, et je te touche même pas. »

Elle avait toujours son fusil, si le prisonnier venait à tenter de s'enfuir. C'était une arme non-létale, mais déguisé en arme de guerre, il n'y avait pas vraiment de moyen de le savoir a priori. Si elle devait porter Ernest pour une raison ou pour une autre, elle le ferait avec une force surhumaine, et se montrerait prudente vis-à-vis d'une éventuelle morsure.

De toute façon, Ernest ne devait pas tarder à réaliser qu'il n'y avait pas d'échappatoire. Le couloir sur lequel ouvrait la porte ressemblait à un couloir de prison classique. Il était long, la peinture était la même – et dans le même état – que dans la cellule, et il y avait au moins une vingtaine de geôles semblables, quoique rien n'indiquait si elles étaient remplies ou non.

Tout au bout du couloir, il y avait une table en bois, et deux chaises. L'une d'entre-elles étaient occupée par un petit homme assez âgé, avec un chapeau melon et des lunettes rondes. Devant lui, sur la table, plusieurs jeux de cartes à jouer étaient étalés. Il les regardait fixement et semblait absorbé par cette seule tâche. Il ne jeta qu'un regard furtif au prisonnier. Il y avait également un livre de poche posé ouvert.

À l'autre bout du couloir, il y avait une porte en métal, et un bouton. C'était un ascenseur : la gardienne l'appela en appuyant dessus. La porte coulissa sur le côté. À l'intérieur, il y avait huit boutons en métal disposés en colonnes quatre à quatre. Aucun ne portait d'inscription. En haut de la cabine apparaissait une trappe de sécurité close. Un autre bouton, probablement en relation avec un interphone, était placé sur le côté.

« J'aimerais pas être à ta place, mon rat » articula avec une certaine jubilation la femme, en appuyant sur le troisième bouton à gauche. « De ce que j'ai entendu, le nouveau docteur est beaucoup moins cool que celui d'avant. C'est pas peu dire, putain ! »

Elle éclata d'un rire fort et assez grossier. L'ascenseur, lui, commença à descendre ; la chose était perceptible même si rien n'affichait sa position sur le tableau de commande.

« Mais tu ne le rencontreras pas aujourd'hui, si je dis pas de connerie. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 28 juillet 2014, 09:45:19
Pesage, questions et tatouage au programme ? Il devrait survivre. Il arriva même à s’en convaincre. Dès lors, il manifesta moins de stress. Cette première visite serait pratiquement banale. Sauf s’il tombait sur le nouveau docteur. Il chassa cette idée et, ne serait-ce que pour montrer à Eve qu’il n’était pas un trouillard, il se fit un devoir de demeurer calme jusqu’à l’échéance.

Il sursauta tout de même lorsqu’on vint le chercher. Voilà cette impressionnante femme-requin. D’une seule claque, elle devait pouvoir l’envoyer au tapis. Et elle était en plus armé. Résister n’était vraiment pas une bonne option. Alors il se leva, adressa un dernier regard à l’adolescente, façon de lui dire "à tout à l’heure", puis sortit dans le couloir sans faire d’histoire. Stratégie actuelle : la docilité totale. Qu’il donne l’impression d’être parfaitement sage et résigné à son sort. Pour autant, il ne perdait pas cette occasion d’observer tout ce qui pouvait l’être. Les autres cellules, le gros bonhomme avec ses cartes et son livre, - de quel livre s’agissait-il, d’ailleurs ? - l’ascenseur...

Une fois dans ce dernier, les paroles de sa gardienne le firent frissonner, avant de le rassurer. Ainsi, il n’aurait pas droit au fameux Richard. Parfait ! Il osa demander, avec beaucoup de politesse :

« Savez-vous comment va Ming ? Eve aimerait avoir de ses nouvelles. »

La tête relevée pour s’adresser à cette personne bien plus grande que lui, la posture quasi droite témoignant d’un peu de timidité, il voulait paraitre le plus inoffensif possible. Il ne pensait pas pouvoir s’évader, pas par ses propres moyens, mais autant ne négliger aucun détail. Ne surtout pas être pris en grippe par les gardiens. Chercher au contraire à sympathiser avec eux afin d’obtenir des faveurs, d’améliorer sa situation... et pourquoi pas celle d’Eve. L’hybride était et resterait un calculateur. Il pouvait aller loin, très loin pour mener à bien ses plans. Pour le moment, il manquait d’infos pour en échafauder un digne de ce nom. Il fallait y remédier.

Il se demandait aussi ce que ses geôliers savaient de lui. C’étaient des Confréristes, il en avait été un. Sous le pseudonyme de Vermine, il avait la réputation d’être un intello dépravé. Peut-être que cela allait avoir de l’influence... ou pas. L’avenir allait le dire.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 28 juillet 2014, 18:26:10
« 000009 ? Elle était là depuis beaucoup trop longtemps. C'est pas le gîte et le couvert indéfiniment ici, faut pas croire. En fait, ils l'ont… – la gardienne fronça les sourcils – …hey, putain, je suis pas sûre d'avoir le droit de te dire ça. Enfin, tu vois, ça nous fait une personne de moi à surveiller. Mais bon, Poissard et moi, on s'en fiche. On risque jamais rien, dans ce job. On surveille des microbes dans ton genre ; ou pas beaucoup plus gros. Mais à l'étage en-dessous, là, ils ont vraiment des malades. Des types ils seraient pas dans un champ de contrition, ils te feraient exploser tout le complexe rien qu'en pensant à une étincelle. C'est un peu flippant d'avoir ça sous les pieds, putain, non ? »

Elle s’esclaffa encore. La requine avait l'air d'avoir très envie de parler, et prenait visiblement un certain plaisir à parler de son travail avec un prisonnier. Peut-être était-ce parce qu'elle était si effrayante d'apparence que les détenus, en règle générale, n'osaient pas lui adresser le moindre mot, surtout sur le ton de la conversation. Elle aurait volontiers continué, mais les portes de l'ascenseur s'ouvrirent.

« Allez mon rat, c'est tout droit. »

La qualité de la pièce, qui ressemblait à un hall d'entrée, n'avait rien à voir avec celle des cellules. Les murs étaient recouvert d'une peinture gris-métallique impeccable, sans la moindre trace d'humidité, qui donnait à l'endroit un côté beaucoup plus moderne. Devant eux, il y avait un pupitre, où un petit homme d'une cinquantaine d'années, le cheveux blond et court, la face assez ridée, semblait se charger de l’accueil.

« Ah, voilà le fameux Ernest Lenoir ! La passion numéro un du docteur Carval, et donc de tout le labo. Ohoh. J'avoue ne pas comprendre pourquoi. Mais c'est en salle JANUS, deuxième porte, couloir gauche » indiqua-t-il, visiblement enthousiaste.

Il n'y avait pas beaucoup de chemin à faire : le hall d'entrée se divisait en deux couloirs parallèles. Il y avait une odeur d’hôpital. Au milieu du couloir gauche, ils aperçurent une femme en blouse qui poussait un chariot métallique sur lequel était disposé une dizaine de petites seringues identiques. Sur la première porte était indiquée « PORTUNUS », et sur la seconde « JANUS ».

La gardienne ouvrit cette dernière et invita Ernest à entrer. C'était une pièce à peine grande comme une chambre. Il n'y avait aucune source de lumière visible, seulement un miroir sur le côté gauche, et un fauteuil en métal fixé au sol, au milieu de la pièce. Il était dans un matériau brut, un peu trop dur pour être vraiment agréable.

« Tu t'assois, et tu attends » ordonna la requine.

Elle attendit que le prisonnier s’exécute, puis elle sortir en fermant la porte. La pièce serait alors plongée dans le noir pendant plusieurs secondes. Jusqu'à ce qu'une paire de diodes bleues apparaissent en hauteur, en face du fauteuil.

« Bonjour Ernest Lenoir, je suis JANUS, une intelligence artificielle destinée à vous faire passer une série de tests. Je suis capable d’interagir dynamiquement avec mon patient. »

La voix était synthétique, mais l'intonation précise. En revanche, le nom du prisonnier avait été prononcé d'une manière phonétique, plus approximative. Seul élément distinguable dans l'obscurité, les diodes s'allumaient alternativement, au rythme de la parole.

Des arceaux de métal jaillirent sur les côtés du fauteuil, enserrant les bras d'Ernest juste sous les épaules, et réduisant considérablement sa liberté de mouvement. Puis il y eut un bruit de moteur électrique, et le dossier du fauteuil s'ajusta à sa taille, faisant en sorte que son dos soit bien calé contre le dossier, quitte à raidir un peu le patient.

« Ce fauteuil est équipé d'un détecteur de mensonges. Nous allons le calibrer en vous proposant des affirmations. Indiquez-nous honnêtement par oui, ou non, si celles-ci sont justes. »

Le mutant put sentir un demi-cercle d'acier se refermer autour de son cou. Il était garni d'une multitude de petites pointes, qui appuyaient légèrement sur toute la surface de sa gorge.

« – Vous vous appelez Ernest Lenoir.
– Vous êtes le fils de Philippe Lenoir et d'Ashley Willard.
– Vous avez quinze ans.
– Vous êtes un mutant.
– Vous avez eu une relation amoureuse avec une femme disposant d'attributs félins.
– Vous êtes un traître à la Confrérie.
– Sur une échelle de zéro à dix, où zéro vaut pour « absolument faux » et dix pour « absolument vrai » : vous avec une haute estime de vous-même.
– Sur cette même échelle : vous trouvez la personne qui vous a conduite ici sympathique.
– Sur cette même échelle : vous trouvez l'homme de l’accueil sympathique.
– Sur cette même échelle : vous trouvez le concepteur de ce test sympathique.
– Sur cette même échelle : vous me trouvez sympathique.
Retour à des questions binaires.
– Votre organisme produit une puissante molécule mutagène nommée « Arachnéum ».
– Vous connaissez le docteur Richard Carval. »

Les questions s'enchaînaient sans pause. Dès qu'Ernest avait terminé de répondre à l'une d'entre-elles, une autre suivait sans commentaire ou signe particulier émis par Janus.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 28 juillet 2014, 21:31:52
Ernest rangeait soigneusement toutes les informations obtenues, ainsi que ses déductions, dans un coin de son esprit. Tout pouvait lui être utile. Utile à quoi, ça c’était une autre question. Ainsi, Ming était morte, ou c’était tout comme. Ce ne serait pas une véritable révélation pour Eve, elle s’en doutait. Ils étaient incarcérés à l’étage des captifs inoffensifs. Il y avait un autre étage, celui des captifs dangereux. En somme, l’installation était de grande taille. La requine, elle, était du genre bavarde. Elle devait s’ennuyer ferme dans son travail et elle ne semblait pas spécialement méchante. Bien sûr, c’était relatif, mais il devait y avoir bien pire qu’elle. Du moment qu’on ne lui tapait pas sur les nerfs, elle ne ferait rien de désagréable, estima l’hybride. Peut-être pouvait-il sympathiser avec elle. Il faudrait essayer.

Hélas, le trajet en ascenseur se termina. Voilà le labo, semblait-il. L’enfant-rat en eut la chair de poule. Il se contrôla, avança. Le type qui semblait faire l’accueil eut un curieux commentaire. La passion numéro un du docteur Carval, et donc de tout le labo... Rien que cela. Voilà une notoriété dont il se serait bien passé. Un sentiment de malaise s’empara de lui. Richard... Carval... Richard Carval... Il secoua la tête, réprima cette impression, non sans difficulté. Il devait être un prisonnier model, ou il allait s’attirer plus d’ennuis qu’il n’en avait déjà. Ce n’était pas le moment de perdre les pédales.

« Tiens, je suis une star ! » plaisanta-t-il, à l’intention de sa gardienne, une fois de nouveau en marche.

Le voilà dans la salle Janus. Son aspect l’étonna un peu. Cependant, une fois de plus, il obtempéra et alla s’assoir. Maintenant, il était dans le noir. Il fixa les diodes bleues. Il avait à présent à faire avec une intelligence artificielle, la dénommée Janus justement. Le réglage du fauteuil et les entraves qui se mettaient en place ne l’inquiétèrent pas spécialement. Il s’y attendait plus ou moins. Ce n’était pas très agréable, mais il pensait déjà à autre chose. Un détecteur de mensonge ? Etait-il fiable ? Le mutant devait le savoir. Etre forcé à toujours dire la vérité pouvait être problématique, surtout si par la suite il avait droit à de nouvelles séances. Il avait des facultés intellectuelles d’exception, lui permettant de réfléchir très vite, et il savait mentir. Peut-être pouvait-il tromper la machine. Avant même que la première question n’arrive, il se résolu à tester. Au mieux, il réussirait et ce serait un bon point pour lui. Au pire, il allait avoir droit à une petite correction, façon Janus. Décharge électrique ? Il n’était pas douillet. Et on n’allait pas le trucider pour un petit mensonge. Le risque était calculé.

« Vous vous appelez Ernest Lenoir.
- Oui. »
- Vous êtes le fils de Philippe Lenoir et d'Ashley Willard.
- Oui.
– Vous avez quinze ans.
- Oui.
– Vous êtes un mutant.
- Oui.
– Vous avez eu une relation amoureuse avec une femme disposant d'attributs félins.
- Oui. »

Jusque là, impossible de mentir. Normal, c’était la phase de calibrage. Les réponses étaient connues, ou évidentes. L’appareil mesurait l’état dans lequel il se trouvait lorsqu’il disait vrai. Le tout était de conserver cet état en mentant.

« Vous êtes un traître à la Confrérie.
- Non. »

Mensonge, il le savait. Il aurait dû ne pas collaborer et aller en prison lorsqu’il avait été prix par les X-Men. Toutefois, il niait l’évidence avec un stupéfiant sang froid. Dire oui, ce serait reconnaître qu’il avait bien sa place ici, en tant que cobaye. Il ne voulait pas.

« Sur une échelle de zéro à dix, où zéro vaut pour « absolument faux » et dix pour « absolument vrai » : vous avez une haute estime de vous-même.
- Heu... six ? »

C’était quoi cette question ? Pour le forcer à réfléchir ? Il avait à peu près répondu au pif. Il se savait surdoué mais nul en tant que mutant. Il ne devait pas être trop loin de la vérité.

« Sur cette même échelle : vous trouvez la personne qui vous a conduite ici sympathique.
- Cinq. »

Traduction : peut-être. La seule chose sûre, c’était qu’il ne la détestait pas. Il n’avait rien contre elle.

« Sur cette même échelle : vous trouvez l'homme de l’accueil sympathique.
- Six. »

Il aurait plutôt dit quatre s’il avait été honnête. La première impression avait été mauvaise, mais c’était peut-être dû à son commentaire.

« Sur cette même échelle : vous trouvez le concepteur de ce test sympathique.
- Cinq. »

Il ne le connaissait pas, il ne pouvait pas se prononcer. Mais ce devait être quelqu’un d’intelligent. Certaines questions semblaient moins pertinentes que d’autres. Etait-ce des pièges ? Etait-il tombé dedans ?

« Sur cette même échelle : vous me trouvez sympathique.
- Dix. »

Juste pour le fun. Ernest était connu pour son côté sarcastique, surtout à la Confrérie. En un sens, il était vrai avec lui-même en répondant ainsi. S’il avait été honnête, il aurait répondu cinq. Une IA n’était pas sympathique ou non, c’était une machine.

« Retour à des questions binaires. Votre organisme produit une puissante molécule mutagène nommée « Arachnéum ».
- Non. »
– Vous connaissez le docteur Richard Carval. »

Ce fut la première fois qu’il ne répondit pas du tac au tac. Un trouble manifeste passa sur son visage. Il était, semblait-il, la passion numéro un de cette personne. Et il avait l’impression de connaitre ce nom. Il le détestait. C’était viscéral.

« Non. »

Il mentait. Il en avait la cruelle conviction. Mais il voulait croire à ce mensonge. Il refusait de se souvenir...

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 29 juillet 2014, 06:46:39
« Je suis flatté. Malheureusement, 70 % des sujets ayant donné une note supérieure à zéro révisent cette évaluation à la baisse après le déroulement complet des tests. Ce comportement est uniquement imputable au stress de l'examen » commenta l'intelligence artificielle après la dernière question de la série.

« Veillez à présent inventer de toute pièce un récit imaginaire : vous vous retrouvez dans une jungle préhistorique. Soudain, vous entendez derrière vous le pas lourd d'un dinosaure T. rex. Le Tyrannosaurus rex est un redoutable prédateur, vous êtes sa proie. Vous pouvez introduire dans ce récit les éléments que vous souhaitez. »

Janus interromprait automatiquement l'histoire si celle-ci durait plus de deux minutes en s'éteignant.  Il en ferait de même si Ernest déclarait qu'il avait terminé. Puis ses diodes se remettraient à clignoter de plus belle.

« Le détecteur de mensonge est maintenant correctement calibré. Le vrai questionnaire va pouvoir débuter dans des conditions optimales. Voici les règles auxquelles vous serez soumis : répondez honnêtement aux questions que l'on vous pose et évaluez les propositions. Si l'on vous demande d'utiliser une échelle, il s'agit d'évaluer la proposition sur une échelle de zéro à dix, zéro valant pour « absolument faux » et dix pour « absolument vrai ». »

Des cerceaux métalliques jaillirent au niveau des poignets du prisonnier, les fixant sur les reposoirs. N'ayant toutefois plus de main gauche, Ernest pouvait sans mal délivrer un de ses bras.

« Vous êtes catégorisé « sujet humanoïde, droitier, tangible et sensible à la douleur, dont la pleine intégrité physique n'est pas indispensable à l'exploitation » La procédure est donc la suivante : ».

De minuscules scies circulaires apparurent au bout des accoudoirs. L'une d'entre-elle pivota et se plaça contre le petit doigt du mutant, à l'endroit qui le séparait de la paume, légèrement orientée vers le haut. L'autre scie, celle du membre mutilé, resta en place, à trente bons centimètres du moignon.

« Si le détecteur de mensonges détecte que vous mentez, une lame de scie avancera dans la chair de votre main gauche jusqu'à ce qu'un doigt soit sélectionné. Pour des raisons logistiques, les doigts seront sectionnés dans cet ordre : auriculaire, annulaire, majeur, index, pouce. Si tous les doigts de la main gauche sont sectionnés de cette manière, les doigts de la main droite seront sectionnés dans le même ordre.

Correction situationnelle : vous ne disposez pas de main gauche. Les étapes relatives à la main gauche seront donc ignorées, et la main droite sera la seule concernée.

Chaque mensonge entraîne la section d'un doigt. Ne vous inquiétez pas : ce détecteur est capable de déterminer correctement si vous êtes honnêtement indécis dans près de 8 cas sur 10. Il est néanmoins conseillé de s'exprimer clairement et avec confiance. Vous disposez de vingt secondes pour répondre à chaque question, passé ce délais, la sanction pour un mensonge sera appliquée. La section de dix doigts entraîne une intervention du personnel habilité et la fin de la procédure en cours.

Correction situationnelle : ce nombre est réduit à cinq.

La procédure est-elle claire ? Cette question ne fait pas partie de la procédure. »

Janus attendit une réponse, puis :

« La procédure commence maintenant.
Partie 1 : peurs. Les affirmations suivantes doivent être notées sur une échelle.
Vous avez peur du noir.
Vous avez peur de l'eau ou de la noyade.
Vous avez peur du feu.
Vous êtes sujet au vertige.
Vous avez peur des araignées ou des insectes.
Vous avez peur des reptiles ou des dinosaures.
Vous avez peur des rats ou des petits animaux à fourrure.
Vous avez peur de la foule.
Vous avez peur du regard des autres.
Vous avez peur de l'humiliation.
Vous avez peur des piqûres ou du sang.
Vous avez peur des laboratoires et de ce qu'on y trouve, des médecins ou des scientifiques.
Vous avez peur de la saleté, de l'urine ou des excréments.
Vous avez peur des espaces réduits et clos ou de l'étouffement.
Vous avez peur pour les personnes de votre entourage.
Vous avez peur de la douleur.
Vous avez peur de votre abêtissement.
Vous avez peur des agressions à caractère sexuel.
Vous avez peur de ce qui touche à la mort ou des cadavres.
[...]

Question ouverte : quel est votre principal sujet d'angoisse ?
Fin de la première partie. »

Janus marqua une brève pause, indifférent à ce qui pouvait se passer.

« Partie 2 : centres d'intérêt. Les affirmations suivantes doivent êtres notées sur une échelle.
Vous aimez manger.
Vous aimez dormir.
Vous aimez la lecture.
Vous aimez les films, le théâtre ou la télévision.
Vous aimez les jeux vidéos.
Vous aimez pratiquer une activité physique.
Vous aimez vous livrer à des pratiques sexuelles.
Vous avez des pratiques ou des préférences sexuelles peu communes.
Vous aimez voyager ou la sensation de liberté.
Vous aimez boire de l'alcool.
Vous aimez fumer du tabac ou se consommer sous une autre forme.
Vous aimez consommer d'autres drogues que celles précédemment citées.
Vous aimez vous retrouver avec d'autres individus.
Vous aimez prendre la parole en public.
Vous aimez dominer autrui ou faire valoir votre avis.
Vous aimez faire souffrir autrui, porter atteinte à sa dignité ou à son intégrité physique.
[…]

Question ouverte : quel est votre principal objet de désir ?
Fin de la deuxième partie. »

Encore une pause et une reprise. Mais cette fois, la zone qui faisait face à Ernest s'illumina jusqu'à devenir légèrement éblouissante. C'était un grand écran.

« Partie 3 : rapport aux autres et préjugés.
Il vous sera présenté plusieurs personnages sur l'écran. Une question posée vaut pour le personnage à l'écran au même moment. »

Un portait d'un homme d'environ quarante ans, le regard clair et le crâne dégarni s'afficha sur l'écran. Son nez était assez gros, mais il n'avait pas de trait vraiment notable.

« Les affirmations suivantes doivent êtres notées sur une échelle.
Vous feriez facilement confiance à cet individu.
Cet individu vous paraît sympathique.
Cet individu est pour vous sexuellement attirant. »

Un autre portrait succéda. C'était celui d'un homme blond d'une vingtaine d'année, assez athlétique et au visage sympathique. Tous les modèles étaient photographiés de plein pied, entièrement nus sur un fond gris. À chaque fois, les mêmes questions étaient posées sur l'individu. À l'homme blond succéda un adolescent d'une quinzaine d'années, juvénile mais avec un peu d'acné sur le visage. Puis ce fut un enfant d'environ huit ans, le visage rond et expressif. Puis un nourrisson. Puis il y eu un basculement : ce fut un vieillard à l'air sage, une barbe grise assez longue, qui fut présenté.

Le même type d'individus furent proposés, mais appartenant à des ethnies différentes. Il y avait des hommes à la peau noire, puis des asiatiques. Certaines photos étaient d'une assez mauvaise qualité, et ne partageaient pas les standards des autres photos (fond différent ou habits présents).

Enfin, le test passa aux femmes. Dans le même ordre, différents âges et type de femmes s'affichèrent sur l'écran. L'adolescente européenne photographiée était Eve : l'air un peu plus jeune, mais aussi moins fatiguée. Son corps nu était légèrement plus rond mais ses formes moins développées.

« Questions ouvertes : quels sont les traits qui vous inspirent confiance ?
Quels sont les traits qui vous inspirent de la sympathie ?
Quels sont les traits qui créent chez-vous du désir sexuel ?
Fin de la troisième partie. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 29 juillet 2014, 10:55:20
« Je mords le T. Rex. et le contamine à l’Altérium. Il se transforme en lapin et je lui tords le cou. Fin. »

Il aurait fait plus long, plus original s’il n’avait pas été chamboulé par la question sur le docteur Carval. Il peinait vraiment à s’en remettre. Les souvenirs étaient là, prêt à resurgir. C’était comme s’ils étaient derrière une porte et poussaient pour l’ouvrir. Lui pesait de tout son poids sur cette porte afin qu’elle reste close. C’était dur, si dur... Paradoxalement, l’apparition des scies circulaires l’aidèrent à retrouver un peu de calme, lui permettant de reprendre conscience du moment présent. Ainsi, chaque mensonge allait lui coûter un doigt. Il n’était pas douillet mais là, c’était beaucoup. Il était déjà manchot, c’était déjà peu pratique, il l’avait expérimenté. Alors s’il ne pouvait même plus se servir correctement de sa main droite, son quotidien allait devenir un calvaire. Quel dommage qu’Eve ait perdu l’usage de son pouvoir guérisseur... Peut-être qu’elle allait le retrouver, peut-être pas. Impossible de compter dessus. L’hybride, désormais nerveux, doutait être encore en mesure de mentir correctement et il n’avait pas pu évalué l’efficacité de la machine. Certaines technologies étaient très performantes. Il tombait certainement dans le piège de la procédure, mais il se résigna à être honnête. A jouer le malin, il allait le regretter. Il n’était qu’un rat et s’ils voulaient lui extorquer des secrets, ils avaient dix mille façons d’y arriver.

« Oui, c’est clair. »

Les véritables questions arrivèrent.

« Partie 1 : peurs. Les affirmations suivantes doivent être notées sur une échelle. Vous avez peur du noir.
- Zéro.
- Vous avez peur de l'eau ou de la noyade.
- Deux.
- Vous avez peur du feu.
- Zéro.
- Vous êtes sujet au vertige.
- Zéro.
- Vous avez peur des araignées ou des insectes.
- Zéro.
- Vous avez peur des reptiles ou des dinosaures.
- Zéro.
- Vous avez peur des rats ou des petits animaux à fourrure.
- Zéro.
- Vous avez peur de la foule.
- Trois.
- Vous avez peur du regard des autres.
- Cinq.
- Vous avez peur de l'humiliation.
- Sept.
- Vous avez peur des piqûres ou du sang.
- Deux.
- Vous avez peur des laboratoires et de ce qu'on y trouve, des médecins ou des scientifiques.
- Dix.
- Vous avez peur de la saleté, de l'urine ou des excréments.
- Zéro.
- Vous avez peur des espaces réduits et clos ou de l'étouffement.
- Deux.
- Vous avez peur pour les personnes de votre entourage.
- Zéro.
- Vous avez peur de la douleur.
- Quatre.
- Vous avez peur de votre abêtissement.
- Six.
- Vous avez peur des agressions à caractère sexuel.
- Zéro.
- Vous avez peur de ce qui touche à la mort ou des cadavres.
- Zéro.
- Question ouverte : quel est votre principal sujet d'angoisse ?
- Etre un cobaye. »

Ce qu’il était redevenue... ou presque. Il avait dit vrai sur cette dernière question, mais sans être précis. Ce qui le terrorisait vraiment, c’était d’être considéré comme un cobaye animal. Se retrouver nu dans une cage était un élément récurant dans ses cauchemars. Là, il était un cobaye humain. Une situation qui ne le mettait pas à l’aise, bien sûr, mais qui ne lui ôtait pas tous ses moyens. Pour l’instant, il n’avait perdu aucun doigt. Un bon point.

« Partie 2 : centres d'intérêt. Les affirmations suivantes doivent êtres notées sur une échelle. Vous aimez manger.
- Cinq.
- Vous aimez dormir.
- Cinq.
- Vous aimez la lecture.
- Dix.
- Vous aimez les films, le théâtre ou la télévision.
- Sept.
- Vous aimez les jeux vidéos.
- Six.
- Vous aimez pratiquer une activité physique.
- Dix.
- Vous aimez vous livrer à des pratiques sexuelles.
- Huit.
- Vous avez des pratiques ou des préférences sexuelles peu communes.
- Huit.
- Vous aimez voyager ou la sensation de liberté.
- Dix.
- Vous aimez boire de l'alcool.
- Dix.
- Vous aimez fumer du tabac ou se consommer sous une autre forme.
- Deux.
- Vous aimez consommer d'autres drogues que celles précédemment citées.
- Sept.
- Vous aimez vous retrouver avec d'autres individus.
- Cinq.
- Vous aimez prendre la parole en public.
- Sept.
- Vous aimez dominer autrui ou faire valoir votre avis.
- Dix.
- Vous aimez faire souffrir autrui, porter atteinte à sa dignité ou à son intégrité physique.
- Huit.
- Question ouverte : quel est votre principal objet de désir ?
- Le pouvoir, la puissance, la gloire. »

Mon dieu, il fallait espérer que les X-Men ne mettraient pas la main sur cet interrogatoire. Ernest Lenoir restait un petit connard dans le fond. Pas absolument méchant, mais assez égoïste de nature. Il rêvait d’être un héros ou un super méchant, qu’enfin on le craigne, qu’enfin on l’admire. Cela n’empêchait pas qu’il puisse s’attacher à des gens de manière sincère. Encore cinq doigts sur les cinq. Il s’en sortait bien.

La partie trois permit de dégager les constatations suivantes. Ernest n’était pas du tout raciste. Il avait un peu plus tendance à accorder sa confiance aux jeunes qu’aux vieux, mais ce n’était pas très flagrant. Il se méfiait un peu de tout le monde, sauf des bébés bien sûr. Sa perception de la sympathie dépendait essentiellement du visage. Peu importait l’âge ou le sexe, c’était l’expression qui comptait, notamment celles des yeux. Au niveau sexuel, sa préférence allait clairement vers les femmes adultes de toute origine. Il n’était pas insensible aux adolescentes, mais c’était sans commune mesure. Tout ce qui était trop jeune, trop vieux ou masculin ne l’attirait pas du tout.

Eve était apparue sur les photos. Ce n’était pas un hasard, estima le mutant. Voulait-il créer une amitié entre eux pour ensuite l’exploiter ? En avaient-ils vraiment besoin. Peut-être que l’hybride était trop suspicieux. En tout cas, il avait gardé tous ses doigts et c’était déjà bien.

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 29 juillet 2014, 15:57:33
« Fin de la batterie principale de tests.
Questions complémentaires à caractère particulier :
– Vous avez noté la proposition « Vous avez des pratiques ou des préférences sexuelles peu communes » à huit sur une échelle de dix. Précisez en quoi et de quelle façon cette affirmation correspond à votre personnalité. »

Une image d'Ernest lui-même apparut ensuite sur l'écran. Elle avait été prise dans une rue New-yorkaise dans le cours de l'année, sans doute par une personne marchant à côté de lui. Ce n'était pas une photo connue de l'intéressé. Les questions posées à son sujet furent exactement les mêmes que pour les autres photos présentées précédemment. L'écran s'éteignit ensuite définitivement.

« Merci. Vous avez une personnalité très intéressante.
Notez la proposition suivante sur une échelle : vous me trouvez sympathique. »

La question avait un caractère piège ; sous couvert du caractère léger de l'interrogation et du commentaire qui l'avait précédé, il était tentant d'y répondre par une boutade. Or le détecteur de mensonges était toujours actif, et avait une très mauvaise perception de ce qui relevait de la plaisanterie. Au contraire, il la sanctionnait systématiquement.

« Fin des tests psychologiques. Félicitations. Les tests physiques seront effectués lors d'une séance ultérieure par un personnel humain. »

Les scies se rétractèrent et les poignets, le cou et les épaules d'Ernest furent libérés. En revanche, des arceaux le saisirent au niveau des cuisses et de la poitrine.

« La procédure est presque terminée. L'étape finale consiste dans le marquage du patient par un système d'encre sous-cutané « tatouage ». Néanmoins, il m'a été indiqué que votre anatomie particulière rendait cette méthode peu efficace, car peu visible. La procédure alternative n'est pas implémentée dans mes données d’interaction. Elle va vous être décrite pas un enregistrement vocal. »

À ce moment, le prisonnier put constater qu'une lumière apparut brièvement de derrière lui, avant de disparaître. Une voix enregistrée retentit dans la pièce. C'était celle du docteur Carval. Elle ne prononça que quelques mots.

« Marquage du sujet à l'azote. »

L'enregistrement se termina par un clic caractéristique. Le dossier d'Ernest, toujours avec un bruit de moteur électrique, se télescopa vers le bas. Si le prisonnier jetait un œil dans le miroir sur l'un des côtés, il pouvait voir derrière lui une silhouette dont les traits n'étaient pas possibles à distinguer dans l'obscurité.

Il sentit bientôt une pression en bas du dos, une forme de métal creuse. Il y eut un chuintement et une fine pellicule d'azote liquide fut projeté sur le patron. La méthode était parfois utilisée pour marquer durablement et de façon précise les chevaux. À presque -200°C, la morsure du froid était plus insupportable encore que celle du fer rouge (les animaux, eux, étaient toujours mis sous sédatif). Le processus détruisait la racine des poils et blanchissait complètement la peau.

On enleva le patron, le dossier du siège remonta et la personne sortie.

« Fin de la procédure. Merci de votre collaboration exemplaire. Vous allez être raccompagné en cellule. »

Les diodes s'éteignirent, toutes les attaches qui le maintenaient au fauteuil se levèrent, et bientôt, la porte s'ouvrit. La gardienne-requin l'attendait à la sortie. Dans l'ascenseur, elle appuierait sur le deuxième bouton à droite. Puis il serait de nouveau enfermé dans sa geôle où Eve l'attendrait.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 29 juillet 2014, 17:41:27
« Fin de la batterie principale de tests. Questions complémentaires à caractère particulier : Vous avez noté la proposition "Vous avez des pratiques ou des préférences sexuelles peu communes" à huit sur une échelle de dix. Précisez en quoi et de quelle façon cette affirmation correspond à votre personnalité. »

Le concepteur de ce test devait être un peu pervers sur les bords. A moins qu’il y ait une vraie raison à cette interrogation. Quoi qu’il en soit, Ernest répondit toujours avec franchise.

« Ben... vu la tête que j’ai, c’est pas forcément facile d’avoir un partenaire. Alors je suis un pro des plaisirs solitaires. Je pratique l’auto-fellation et l’auto-sodomie. »

Voilà, c’était dit. Tout comme il l’avait dit à Jonas Miller. L’auto-fellation, ce n’était qu’une question de souplesse. L’auto-sodomie, c’était avec sa queue. Lorsqu’il avait été Confrériste, il s’adonnait aussi au viol... mais c’était fini, il avait changé...

Quand l’hybride se vit en photo et qu’il dût répondre aux trois questions, comme pour les autres clichés, il fut troublé. Là, ça n’avait pas de sens. Quoi que si, ce devait être une façon détourné qu’il donne son avis sur lui-même. Une fois de plus, il joua le jeu.

« Vous feriez facilement confiance à cet individu.
- Zéro. »

Faire confiance à un menteur manipulateur instable émotionnellement n’était pas très indiqué.

« Cet individu vous paraît sympathique.
- Trois. »

S’il appliquait à lui-même ses critères de sympathies, il ne méritait pas plus.

« Cet individu est pour vous sexuellement attirant.
- Hum... sept. »

Soit moins qu’une femme adulte, mais plus qu’une adolescente. Il n’avait jamais eu honte de son corps et il se trouvait même beau... voir excitant. Notable exception puisqu’il n’était pas attiré par les hommes, mais logique avec les explications données un peu plus tôt. Il était son partenaire le plus courant.

« Merci. Vous avez une personnalité très intéressante.
Notez la proposition suivante sur une échelle : vous me trouvez sympathique.
- Cinq. »

L’envie de plaisanter était passée. La successions d’interrogations intrigantes l’avait de plus poussé à se méfier. Malgré la fréquence très rapide de ses réponses, il avait toujours le temps de réfléchir. Il voulait garder tous ses doigts et il voulait passer pour un prisonnier qui collaborait. Des objectifs visiblement remplis.

Arriva l’étape du tatouage. Lorsque le jeune mutant entendit la voix de Carval, ce fut comme un coup de massue. Une terreur telle qu’il en resta tétanisée. Le marquage à l’azote lui fit pousser un faible gémissement et il s’affalla, inconscient... à la Mercie de ses souvenirs...

Il réentendit l’alarme stridente. Il revit la salle obscure s’illuminer de rouge par intermittence. Il revit son ombre se découper sur le mur d’en face alors qu’il se jetait sur les parois de verre de sa cage. Quelqu’un criait :

« Docteur Carval ! Docteur Carval, le cobaye est devenue fou ! »

Les bras mécaniques se déployèrent avec leur bourdonnement caractéristique. Ils l’attrapèrent, le maîtrisèrent, alors que Richard pénétrait dans la pièce, comme un ouragan. Il le fixait alors qu’il donnait ses instructions, agissait avec son efficacité coutumière. Cette nuit là... il avait faillit mourir à cause de sa crise. Dix fois trop d’Altérium dans le sang. Une conséquence des expériences... les expériences de Richard...

Quand Ernest revint à lui, il distingua un matelas. Le lit superposé... Il était allongé sur celui du bas. Il était de retour dans la cellule. Quand il tourna la tête, il aperçut Eve. La scène avait un petit côté de déjà vu. N’était-ce pas la seconde fois qu’il la vivait ? Il passa une main fébrile sur son visage et constata qu’il était en larmes. Il renifla puis déclara à mi-voix :

« Richard Carval... je le connais. J’ai passé quinze jours entre ces mains. Il était à la solde d’un autre savant fou... Ça m’a fait un choc... de m’en souvenir... »

Choc qui n’était pas tout à fait passé. Il fut pris de nouveaux sanglots qu’il ne parvint pas à réprimer.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 30 juillet 2014, 04:34:26
« Alors, combien ? Combien ?
– Zéro.
– Pas un doigt, sérieux ? Sérieux, ça fait des mois que c'est pas arrivé !
– Mais moi je triche pas quand je fais Janus. Je respecte la procédure. Pas comme certains.
– Ça va, espèce de jaloux. Allez, tu nous dois bien un verre.
– L'azote, c'était impressionnant, on devrait faire ça plus souvent.
– À part qu'il est tombé dans les pommes.
– Ahah, bon, et les résultats, ça donne quoi ?
– Euh, regarde. Il est assez flippant.
– Ah il m'a mis six. C'est pas mal, six.
– Tu parles, y'avait pas de détecteur sur cette question. C'est juste un lèche-cul.
– Oh le jaloux.
– Niveau peurs, c'est presque le néant, à part l'humiliation et les labo. Tiens, c'est marrant, on est si effrayants ?
– S'il a déjà croisé Carval, ça se comprend, je trouve.
– Hep, parle pas trop fort.
– Niveau désirs, c'est plus fourni.
– C'est un drogué et un violent. Un vrai taré.
– Oh merde ! L'auto-fellation et l'auto-sodomie ? Naaah. Alors là, t'as bien fait de poser la question.
– T'es sûr que c'était pas de la provoc' ? Il a quinze ans le gosse.
– C'est un taré je te dis. Y'a pas d'âge pour être taré.
– Moi je suis pas assez souple pour… Hmhh…
– Bon, sinon il est hétérosexuel sans nuance. À part lui-même, bon.
– Il a l'air d'aimer les personnes plus âgées que lui.
– C'est pas très arrangeant, ça. Qu'est-ce qu'on peut y faire ?
– … mhhhm…
– Pas grand-chose. Il est déjà avec le seul prisonnier compatible.
– Compatible vaut pour zoophile ?
– Voilà.
– …hmmm, non, décidément, j'y arriverai pas.
– C'est parce que t'en as une trop petite.
– Genre t'y arrives, toi ?
– Tsschtt, le voilà.
– Bien, messieurs : ces résultats ? À défaut d'avoir pu les faire moi-même, j'espère qu'ils sont correctement réalisés. »

***
*

« C'était ça l'expérience des tests dont tu parlais ? »

Eve s'activa aussitôt qu'elle entendit qu'Ernest sanglotait. Elle grimaçait, ne sachant trop quoi faire. Son envie de l'aider était manifeste, mais elle hésitait entre le laisser se calmer seul et le supporter activement.

« Merde, Ernest… » murmura l'adolescente, affichant une expression particulièrement anxieuse.

Elle déchira encore un morceau propre de sa couverture et le proposa au mutant pour qu'il essuie son visage trempé de larmes, après s'être demandée s'il était en état de le faire seul.

« Ça va aller ? Si tu veux en parler, tu peux, tu sais » dit-elle doucement. Puis plus doucement encore : « Tu… tu as eu des nouvelles de Ming ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 30 juillet 2014, 09:29:51
« Ça va aller... ça va aller... c’est nerveux... », articula-t-il entre ses sanglots.

Il accepta le morceau de tissu, mais comprit vite qu’il ne servait à rien d’essuyer ses larmes puisqu’il continuait de pleurer. C’était convulsif, il n’y pouvait rien. Et il s’en voulait de se montrer ainsi... fragile. Il avait l’impression physique que sa peine lui rongeait les tripes. Angoisse trop forte, impression d’étouffer. Alors, sans trop y réfléchir pour une fois, il se mit à raconter. Peut-être espérait-il justifier sa réaction, pour qu’elle comprenne, qu’elle ne le juge pas faible.

« Il y a environs deux ans... j’ai été kidnappé, parce que j’ai en moi... une molécule mutagène à fort potentiel... l’Altérium. Un savant fou... m’avait repéré... Il avait un grand complexe... beaucoup de subalternes. L’un d’eux... c’était Carval. Et c’est lui... qui s’est occupé de moi... J’ai été traité comme un animal... j’suis resté à poil dans un cube de verre... et les expériences... ho mon dieu les expériences... J’ai failli crever plusieurs fois... Des fois... non, je peux pas, je peux pas parler de ça... ça me fait encore mal... Deux semaines ça a durée... Quinze jours... les X-Men m’ont sauvé après. Et après... j’ai plus vraiment été le même... La nuit, ça me hante toujours. »

Il renifla. Il se sentait un peu mieux. Cela faisait du bien de se confier, il ne pouvait le nier. Ses sanglots s’étaient raréfiés.

« Quand je pense que toi... ça fait plusieurs années... Quinze jours, en comparaison, c’est rien du tout. Mais... mais Richard n’y est pas allé de main morte avec moi. »

Il s’assit et commença à éponger sa figure. Il soupira, puis ajouta :

« Pour Ming, je suis navré. D’après ce que m’a dit la requine, elle est morte. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 31 juillet 2014, 10:38:06
« Je crois que je comprends. Carval… j'espère que quelqu'un lui réglera son compte. Peut-être que tu avais l'occasion de te venger, ça irait mieux ? Ici, ça allait pas si mal avant qu'il arrive… »

Eve n'avait pas l'air de trouver Ernest faible ou ridicule. Au pire, peut-être en avait-elle un peu pitié, mais elle était surtout soucieuse. Elle ne commenta pas la question de l'altérium, même si la révélation parut discrètement lui faire comprendre quelque-chose. En revanche un élément dans le discours d'Ernest piqua particulièrement son intérêt :

« Tu as été avec les X-men ? Tu penses qu'ils vont venir nous libérer cette fois aussi ? Je sais que ce sont des mutants puissants… mais ils font beaucoup de dégâts. Ils ont tué le maire de New York, non ? Enfin, en essayant de le sauver… »

Elle avait un peu de retard sur les actualités, mais la chose était sans doute compréhensible.

Son regard s'assombrit brièvement lorsque son compagnon de cellule évoqua le sort de Ming. Elle n'espérait déjà plus vraiment.

« C'est peut-être mieux comme ça. Au moins ils ne peuvent plus rien lui faire. »

Elle n'était pas décidée à se laisser envahir par le chagrin. Un seul mutant en larmes, c'était assez pour une si petite pièce. La détresse d'Ernest l'obligeait d'une certaine manière à se montrer forte. Son ton avait donc juste été froid et résigné, on ne pouvait même pas y sentir de colère.

On frappa à la grille et le plateau-repas arriva : l'adolescente se leva pour aller le chercher. Cette fois, il y avait deux bols remplis d'une purée mauve. Le goût ressemblait fortement aux légumes en filaments, un choux un peu amer, et il était possible de légitimement soupçonner qu'il s'agissait simplement de la même plante préparée différemment. Difficile à manger avec les doigts, toutefois, deux petites cuillères en plastique jetable blanc leur étaient fournies.

« Après le repas, ils passent nous chercher pour la douche. Tu vas voir, c'est assez agréable, ils nous laissent seuls. C'est le seul moment où on peut parler aux autres. On pourra voir s'il y a des nouveaux, et peut-être essayer de savoir pourquoi il y a tous ces changements. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 31 juillet 2014, 12:35:22
Ernest, maintenant, ne pleurait plus. Le choc était passé, Eve n’y était pas étrangère. Avec un peu de recul, il estimait que la façon dont s’étaient déroulés les événements n’était pas si mauvaise que ça. Désormais il savait pour Richard Carval. Il pouvait se préparer à l’inévitable face à face. Ce ne serait pas facile, mais il allait s’y employer. Le scientifique ne lui inspirait pas que de la terreur. Il le haïssait plus encore que sa mère. Et si un jour il pouvait lui faire payer, il ne s’en priverait surtout pas. Ha, ça non ! L’homme méritait une mort lente et douloureuse. En attendant, s’il pouvait se présenter à lui la tête haute, lui montrer son hostilité et non sa peur, ce serait déjà très bien.

« Lorsque j’ai été kidnappé pour être conduit ici, j’étais élève à l’Institut », commença-t-il à expliquer, une fois son bol sur les genoux.

Elève en programme de réinsertion... mais inutile de le préciser. L’hybride observa sa purée mauve, s’empara de sa cuillère avec son unique main valide, et poursuivit :

« Hélas, un métamorph a pris ma place. S’il est démasqué, c’est possible que les X-Men viennent nous sauver. Mais ils devront d’abord nous trouver, ça va pas être de la tarte. On dit tout un tas de trucs pas bien sur eux. C’est parce qu’ils font justice hors du cadre légal. Et puis, certains ne sont pas irréprochables. C’est comme partout. Faut pas les idéaliser. N’empêche, ils n’y a qu’eux qui puisse nous sortir de là. Croisons les doigts. »

Il commença à manger. Ainsi, après, ce serait la douche. L’occasion de découvrir les autres captifs inoffensifs. Jamais les dangereux ne seraient laissés seuls. Le jeune mutant était curieux de voir comment allait se passer ce moment... et comment il pourrait en tirer profit.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 26 août 2014, 08:14:18
Le récit d'Ernest fit briller une lueur d'espoir dans le regard de la jeune fille. Contre toutes les évidences, contre son expérience de plusieurs années sans aucun signe de l'extérieur, contre la nouvelle funeste qu'il venait de lui apporter, elle avait envie d'y croire. La présence du mutant, élément nouveau dans sa vie, lui avait donné un regain d'espérance.

« Si j'avais été à l'institut peut-être que ni toi ni moi ne serions ici » spécula Eve. « Peut-être tout serait différent. On se serait rencontrés avant, et on serait devenus assez forts pour se défendre. Peut-être même qu'on aurait un dortoir ensemble, avec une fenêtre qui donne sur l'extérieur ! Des vrais draps et de la vraie nourriture. »

Tout ça avait pour elle un parfum de lointain.

« Tu avais des amis à l'Institut ? Des gens sur qui compter ? Ce devait être un endroit génial. Ici aussi, il y a pas mal de mutants, mine de rien... mais c'est pas vraiment pareil. »

Le ton était devenu purement amical, un peu coupé de temps en temps alors qu'elle mangeait elle aussi. Quelques bouchées plus tard, elle commença à chuchoter :

« Si tu veux, on pourrait tenter de s'évader. On risque pas grand-chose après tout, pas vrai ? S'ils nous gardent ici, c'est qu'ils nous veulent en vie. Sinon, ils nous auraient déjà, enfin, tu vois. En plus, le fusil de la gardienne il tire des décharges électriques. Je crois pas qu'elle ait de pouvoir spécial, à part ses dents. Par contre le vieux… il doit avoir le pouvoir d'agir sur la chance ou quelque-chose comme ça. Il est toujours en train de faire des jeux de hasard. »

L'idée paraissait beaucoup l'exciter. Seule, elle n'y avait jamais songé, mais à deux, tout lui semblait possible.

« J'ai repéré les boutons de l'ascenseur sur lesquels ils ne faut pas appuyer. Tout ceux de la colonne gauche ils mènent à des labos. Sauf celui tout en bas, celui-là, je sais pas. Le plus bas à droite il va aux douches. On a de bonnes chances avec les autres, non ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 26 août 2014, 14:54:05
« L’Institut, ouais, c’est pas mal. C’est en gros une école pour mutants. Donc forcément, c’est assez réglementé. On peut y recevoir tous les cours classiques : maths, anglais, histoire, géographies, etc. ainsi que des enseignements propres à notre condition. C’est aussi un lieu de vie avec un super parc, une bibliothèque, un réfectoire et tout ce qu’il faut pour bien se sentir. En fait, il n’y a à peu près que les sous-sols qui sont interdits aux élèves. C’est là-bas qu’il y a les trucs spéciaux X-Men. »

Ernest s’était mis à décrire l’endroit assez spontanément. Cela lui servait aussi à quelque peu éluder la question d’Eve, n’ayant pas spécialement envie de lui avouer qu’il faisait légèrement peur aux autres et qu’il y avait de bonnes raisons pour cela. Ses propres mots lui firent prendre conscience qu’il s’était plus attaché à l’Institution qu’il n’en avait eu conscience. Qu’est-ce qu’il ne donnerait pas pour y retourner, là, maintenant ! Les problèmes avec le règlement intérieur ? Des broutilles ! Là-bas il avait un avenir, pas ici. Là-bas il était un élève, ici, un cobaye. Tout en mangeant, il reprit :

« J’avais un ou deux amis... enfin, j’ai toujours un ou deux amis. Pas des masses. Je ne suis pas la personne la plus populaire. Si j’ai l’occasion, je te les présenterai. »

Lorsque la jeune femme parla d’évasion, il enregistra soigneusement toutes les infos avant de répondre sur le ton de la confidence :

« Je suis d’accord, mais faut pas se précipiter. Si on échoue, ils nous le feront payer et ils nous surveilleront plus étroitement par la suite. On est à l’étage des captifs inoffensifs. Tant qu’ils nous penses ainsi, on pourra plus facilement rassembler les informations nécessaires et peut-être se trouver des alliés. On ne doit tenter quelque chose que si on a un plan solide ou si une opportunité particulièrement intéressante se présente. »

Il avait déjà quelques vagues pistes. Il pouvait essayer d’amadouer la requine. Il savait aussi qu’à l’étage d’en dessous, des prisonniers bien plus dangereux étaient enfermés. Si jamais il parvenait d’une façon ou d’une autre à compromettre la sécurité du complexe, la situation pouvait échapper aux Confréristes. Pour l’instant, pas le choix, il fallait être docile. Il fallait aussi espérer que Richard Carval ne lui mènerait pas la vie trop dure. La seule évocation du scientifique lui donna la chair de poule. Il se ressaisit et  vida son écuelle.

« Tu sais si les cellules sont filmées ? Ou s’il y a des micros ? »

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 27 août 2014, 06:48:35
« Si on sort, je pourrais reprendre des cours là-bas. Enfin, j'aurais beaucoup de retard, mais bon… je me débrouillais à l'école, avant » conclut Eve avec assez de bonne humeur.

La question d'Ernest modifia brièvement l'expression de son visage. Pendant quelques secondes, elle pâlit. Elle avait toujours été seule, et ne s'était jamais vraiment préoccupée de savoir si elle était surveillée ou non. Dans un lieu fermé et sans personne à qui parler, ça n'avait pas d'importance. Si elle avait baissé le ton au moment d'évoquer une fuite, ça n'avait pas été un réflexe tout-à-fait conscient.

Toutefois, la jeune fille se reprit vite, et fit comme si elle y avait pensé dès le départ. Elle termina à son tour de manger et haussa les épaules en écartant ses couverts.

« J'ai jamais rien remarqué… S'ils ont envie de nous espionner, ils en ont les moyens, pas vrai ? Mais j'ai déjà entendu parler les autres de ça, dans les douches. Et ils n'ont pas disparu tout-de-suite, donc… par contre, je ne crois pas qu'ils se soient évadés non-plus. De toute façon, je ne sais pas trop comment on pourrait faire pour se parler sans qu'ils nous entendent, s'ils nous écoutent… »

Eve se pencha vers Ernest, et approcha ses lèvres de l'oreille animale, sa joue frôlant dans son déplacement la fourrure du mutant.

« Si on parle vraiment très bas, tu crois que ça peut marcher ? » murmura-t-elle, directement dans le pavillon de son compagnon de cellule.

Elle se recula et pouffa, affichant un sourire joueur. Elle allait ajouter quelque-chose lorsque la porte s'ouvrit. C'était le vieil homme au chapeau melon, canne à la main.

« Alors, vous avez fini, les jeunes ? Par la grâce de Dieu, c'est l'heure du déluge. C'est tous les deux jours, le déluge, ici. Je le dis pour le nouveau, pas pour toi ma puce. Bon, c'est votre tour, allons. »

Le chemin serait le même, jusque dans l'ascenseur, la requine n'étant, elle, pas dans le couloir. Quatre autres portes étaient d'ailleurs ouvertes (et leur cellule vide de présence), deux autres encore fermées.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 27 août 2014, 14:19:41
Ernest n’eut bien sûr pas le temps de répondre à Eve. Il ne s’était pas non plus reculé lorsqu’elle lui avait murmuré à l’oreille. Il devrait réfléchir à une façon de discuter sans attirer l’attention de leur geôliers, c'était important. Quand on ouvrit la porte, il s’assura de sa main qu’il n’y avait plus trace de ses larmes. Il s’était à présent remis du choc. Dans ses yeux rouges se lisait un calme de façade.

« Bon, en route pour le déluge alors », déclara-t-il en déposant son plateau sur le lit et en se levant.

Il suivit le vieil homme dans le couloir avant de lui montrer son moignon bandé.

« Heu, j’ai pas l’impression que ce soit judicieux de mouiller ça. Je pourrais avoir un sac plastique et un peu de scotche, histoire de l’envelopper ? Une petite ficelle, ça peut aussi faire l’affaire. »

Il était très polie et sa demande ne cachait aucune manigance particulière. Il avait juste l’intention de mettre son bras mutilé dans le sac et d’en refermer l’ouverture avec le scotche ou la ficelle. Ainsi, le moignon était à l’abri de l’eau. L’hybride rat profita évidemment du trajet pour compter les portes ouvertes et fermées. Il y avait une douche tous les deux jours et l’homme avait évoqué un tour. Vermine en déduisait que les gens se douchaient à tour de rôle.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 28 août 2014, 09:36:21
« Ma foi, faudra que je vois ça » bougonna le vieil homme. « Si Peggy est d'accord. »

Il les mena vers l'ascenseur, et appuya sur le quatrième bouton de la rangée gauche. Les portes se refermèrent, la cage monta, puis les portes s'ouvrirent de nouveau. En sortant de l'ascenseur, ils croisèrent la requine.

« Il voudrait un sac en plastique.
– Pourquoi mon rat ? Pour vomir ?
– Pour pas que son moignon prenne l'eau.
– Dans la réserve, il doit y avoir ça.
– Tu m'attends pour faire sortir Carlos ?
– Ouais, mais putain dépêche toi. Je sais pas pourquoi ils nous l'ont filé, j'ai à peine le matos pour le maîtriser.
– Pas d’inquiétude mademoiselle, tant que je suis là, il ne vous arrivera rien.
– Ta gueule Poissard, et grouille. »

Il y avait un couloir carrelé, le carrelage bleu terne et les joints noirs d'une persistante mais fine couche de crasse, essentiellement de la moisissure. Les murs étaient parés de la même manière, en un peu moins sales. Le plafond, lui, était en béton gris, parsemé de tubes au néons emprisonnés dans du plastique qui donnaient une lumière blanche assez vive. L'humidité était perceptible plus encore qu'ailleurs dans le complexe, et surtout l'on entendait l'eau couler un peu plus loin.

Le couloir était assez large. Non-loin de la sortie de l'ascenseur, il y avait une première porte en bois, dont la peinture n'avait pas du tout supporté l'humidité, mais néanmoins close. En face, une seconde porte semblable, que le surveillant ouvrit (elle n'était pas verrouillée), alluma un interrupteur, et s'engouffra dans la pièce qui paraissait petite. Quelques secondes plus tard, le fracas de plusieurs objets tombants sur le sol retentit.

« Ah, merci mon Dieu » gémit le gardien en frottant son crâne presque chauve, ressortant et refermant la porte. « Tiens, ça devrait faire l'affaire. »

Il jeta un grand sac poubelle vert à Ernest. Celui-ci était beaucoup trop grand (il aurait pu y entrer totalement, peut-être) mais il disposait d'une ficelle en plastique intégrée qui se serrait pour le refermer.

« C'est par là. Amusez-vous bien » fit la requine.

Elle pointa du doigt le bout du couloir avant de partir. Celui-ci tournait, et après une ouverture qui menait à des toilettes – même type, à la turque – que dans les cellules, aboutissait sur une salle presque spacieuse d'une vingtaine de mètres carrés. Le sol était toujours carrelé, couvert d'une pellicule d'eau, les joins beaucoup plus atteint par les champignons noirs encore. Tout autour, sur les murs, des pommeaux de douches incrustés dans les murs étaient reliés chacun à un unique bouton pressoir. Le centre de la pièce, lui, n'était pas aspergeable, mais le relief était tel que toute l'eau coulait jusqu'à une bouche d'évacuation de quelques centimètres, dans laquelle était bloquée des pelotes de cheveux.

Sur le sol, avant que le sol ne devienne réellement humide, des habits semblables à ceux des deux compagnons, mais de différentes tailles, reposaient par terre.

« Eh, salut Eve !
– Salut, Matt'. »

Un adolescent s'était précipité vers la jeune femme, encore trempé. Il devait être un peu plus âgé qu'elle, peut-être de deux ou trois ans. Il était nu, très blanc, et parfaitement imberbe. Sa chevelure blonde mi-longue lui donnait un air un peu précieux, mais son visage était plutôt sympathique et agréable. Ses yeux verts jetèrent un regard curieux à l'hybride.

« T'as un nouveau pote ?
– Il s'appelle Ernest. Ernest, Matt'.
– Salut, Ernest. »

Il lui tendit la main ; mais si le mutant acceptait la poignée de main, il se déroberait au dernier moment, avec un sourire goguenard et puéril mais pas vraiment méchant.

« Au moins, on se demande pas si t'es mutant, toi. »

Derrière lui, il y avait plusieurs autres personnes. Leur tournant le dos, une jeune femme au corps sculptural, longue chevelure noire, brune de peau – métis ou latine – se lavait apparemment seule. Non-loin, également de dos, un homme pas très âgé, mais assez velu, et complètement courbé et bossu, faisait de même.

Un groupe de deux jeunes hommes discutaient (c'est de ce groupe qu'était venu Matt), leurs paroles couvertes par le bruit de l'eau, l'un possédant un tatouage représentant un tigre ailé au niveau de l’omoplate.

Une autre jeune femme était assise, la tête entre les jambes, dans un coin : sa peau semblait avoir subi à peu près le même traitement que celle d'Eve, mais ses cheveux étaient rasés. Un trentenaire avec une barbe noire qui le vieillissait semblait un peu absent sous sa douche. Il était petit mais massif, et avait également de nombreux tatouages, dont six étoiles sur la poitrine.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 28 août 2014, 11:32:23
« Salut Matt’ » dit Ernest, aimable, après avoir embrassé du regard les douches.

Il lâcha le sac poubelle, tendit la main et se fit avoir par l’esquive du jeune homme. Loin de se vexer, il eut un petit rire amusé. Apparemment, ce Matt’ n’avait pas perdu son espièglerie malgré sa condition de captif. Eve l’avait dit, avant Carval, les autres docteurs étaient plus cool.

« Non, effectivement, avec moi, on ne se demande pas. »

L’hybride rat hésita à récupérer le sac, mais préféra se déshabiller avant. Ensuite, il entreprit d’envelopper son moignon. Avec une seule main, pas facile. Il se débrouilla quand même. Il parvint à serrer la ficelle avec les dents.

« Bon, j’ai l’air ridicule mais pas le choix, ce truc est dix fois trop grands. »

Ridicule ? Indéniablement puisque le sac, noué à son avant-bras, le prolongeait de façon disproportionnée jusqu’à traîner sur le carrelage. Tant pis. Il jeta de nouveau un coup d’œil au lieu, s’attardant sur chaque personnes présentes. Le dénommé Carlos était-il là ?

« Matt’, Eve, puis-je vous demander une rapide présentation de nos compagnons d’infortune ? »

Il comptait, quant à lui, passer pour le gentil petit gars. Mais pour cela, il fallait que personne ne connaisse de trop son affreuse image médiatique. Un gentil petit gars qui risquait la perpétuité, ça ne collait pas trop.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 28 août 2014, 20:39:01
Le jeune homme regarda l'hybride avec une moue amusée :

« Rien est gratuit, ici, ni les infos, ni les fournitures.
– T'es con, Matt'. »

Eve paraissait ne pas follement apprécier son interlocuteur, ou alors était-elle froide avec lui par habitude. Elle ne s'était d'ailleurs pas déshabillée.

« Les deux garçons là-bas, c'est Loïc, avec le tigre, et le japonais, on l'appelle Mercure. La jolie fille bronzée c'est Karen. Le type avec des tatouages partout, c'est Andrej, il est ukrainien, il parle pas beaucoup. Je crois qu'il faut pas l'embêter. La fille rasée, Crazy'…
– Elle était plus ''Crazy'', avant. Mais elle a pas supporté son passage au labo aussi bien que toi.
– Elle était… presque  sympa.
– Oh ouais, et pas que. C'était ma meilleure cliente. »

En les détaillant mieux, Ernest pouvait se rendre compte qu'ils en connaissaient déjà la plupart : leur photo avait été utilisée, parmi d'autres, pour les tests psychologiques menés par Janus.

Pendant qu'ils parlaient, le bossu s'était approché dans le dos de la métis, assez furtivement pour que celle-ci n'entendent pas les clapotis de ses pas. Il la guetta quelques secondes, puis posa une main avide sur ses fesses. La jeune femme se retourna aussitôt.

« Sale malade ! » jura-t-elle avec un accent sud-américain.

Elle leva le bras et l'eau qui sortait de son pommeau de douche se détourna de sa trajectoire, formant un jet étroit et puissant qui vient frapper violemment le visage de son agresseur. Celui-ci émit une plainte désarticulée et chuta sur les fesses. Il se retourna et s'éloigna, toujours à quatre pattes, l'air un peu paniqué, en grognant quelque-chose d'incompréhensible. Eve avait l'air perplexe, Matt, lui, souriait, en remarquant :

« Lui je l'ai jamais vu avant.
– Moi non plus. Ça a l'air d'être…
– Un type marrant.
– Un débile. »

Eve haussa les épaules. C'était peut-être simplement un malade mental, il y en avait déjà eu quelques uns et ils ne faisaient jamais long feu ; elle espérait qu'il ne se montre pas trop agressif.

« On est tous mutants, sauf peut-être Andrej et le nouveau.
– Je pense qu'ils le sont aussi. Ils ont viré tous les non-mutants ces dernières semaines. D'ailleurs, t'as pas vu Ming ?
– Ils l'ont tuée.
– Sérieux ? Merde, elle m'en devait encore une. Bon, si elle est morte, je peux m’asseoir dessus, je parie. »

La nouvelle fut la première chose qui sembla mettre Matt de mauvaise humeur ; il grimaça. Enfin, il désigna le sac que portait Ernest.

« T'as déconné tant que ça au test de mensonge ? »

Il ne manquait aucun doigt à Matt. En revanche, presque tous les autres prisonniers, à l'exception du bossu, étaient amputés d'un ou deux doigts (il en manquait même trois à l'ukrainien), et tous avaient un petit tatouage dans le bas du dos.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 28 août 2014, 22:50:41
Même si Ernest ne le montra pas particulièrement, il ne perdit pas une miette de ce que lui dit Matt’. Il ne perdit pas une miette du comportement et des réactions de chacun. Il devait tout savoir, tout connaître, tout comprendre. La solution, si solution il y avait, serait certainement l’association d’un grand nombre de détails. Même sans viser l’évasion, ce qui était tout de même très ambitieux, se faire apprécier de ses condisciples allait faciliter son quotidien. Lorsque Matt’ le questionna, il lui répondit avec malice :

« Moi, déconner, jamais ! J’ai pas perdu un seul doigt au test. »

Il exhiba sa main valide.

« Par contre, j’ai perdu une main quand on m’a kidnappé. Et je dois l’avouer, c’est pas super pratique. »

Il ajusta son sac plastique. Il allait avoir besoin d’aide pour atteindre le bouton de la douche. Eve allait s’en charger, il en était persuadé. Pour l’instant, il questionna encore le jeune homme.

« Dis-moi, Matt’, qu’est-ce que tu vends et comment on paye ? »

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 29 août 2014, 08:07:21
La question parut ravir le jeune homme blond, qui n'attendait visiblement que qu'on lui la pose.

« Ce que je vends ? Tout ce qui est raisonnable. Tu veux une PSP ? Du chocolat ? Des cigarettes ? De l'alcool ? OK, je peux t'avoir ça dans la minute. Tant que ça tient dans ma main et que ça se vend en boutique. Faut pas que tu puisses te tuer avec non-plus. Je veux pas d'emmerdes. Genre Crazy elle me prenait du sex-toy et du poppers. »

Eve ne disait rien, toutefois, le discours de Matt ne la mettait visiblement pas à l'aise.

« J'ai de la coke aussi. C'est Crazy qui en voulait de ça aussi. Super bonne cliente. J'ai eu du mal à en trouver, j'ai dû négocier avec Karen, elle m'a filé l'appart de son frère, et j'en ai eu un petit paquet. Mais elle est plus en état de payer. Il m'en reste pas mal, du coup, super promo sur la coke.
– Ça va Matt', on a besoin de rien.
– Eh, mais parle pour toi. Frigide. Laisse-moi expliquer à mon nouveau pote.
– Bon, j'y vais. Reste si tu veux, Ernest. »

L'adolescente se détourna de la conversation, laissant Matt et Ernest seuls. Ce ne fut qu'arrivée en face du mur qu'elle se décida à se déshabiller, leur tournant également le dos. Nue, sa maigreur était réellement choquante, et les sévices infligés à son corps ne se limitaient pas à son cou et ses bras. Seul son visage paraissait en fait avoir été complètement épargné par les marques d'aiguilles.

« Elle est plutôt bonne, non ? J'crois que j'aime bien les filles maigres » commenta Matt sans cacher le fait qu'il la détaillait. « Mais super mauvaise cliente. Depuis que je suis là, quedal. Le marché est pas méga génial, en ce moment. Puis il marche que dans un sens. Je peux rien faire sortir. Du coup, à part Crazy qui était camée et les deux boys qui prennent des piles pour leur game-boy, c'est un peu la saturation. »

Il croisa les bras et reporta son attention sur son interlocuteur.

« Mes affaires elles marchent simplement. Y'a pas de monnaie d'échange physique, ici. À part ce que j'apporte, c'est que des tenues de merde et de la bouffe minable. Y'a que deux trucs qui m'intéressent en temps normal. Les emplacements de trucs vraiment cool, à l'extérieur – si je sais où c'est, je peux téléporter ça ici easy – et le cul. »

Matt s’esclaffa.

« Ouaais, je fournis ce que les gens veulent, et en échange, j'ai une sexualité épanouie. Je baise avec qui je veux. Tout le monde a besoin de moi. Enfin, presque. Même Karen, je me la suis tapée. Que la bouche, en fait, mais elle a de la valeur ajoutée, tu vois. Par contre, sans te vexer mec, mais ta gueule de rat, même en fermant les yeux, je crois pas que ça va le faire. Autant j'accorde des trucs aux garçons des fois, j'suis pas ultra-regardant tant que y'a de la bonne volonté, tu vois, mais là… Du coup, si tu veux un truc… faut que t'ai laissé des trucs marrant dehors, ou que tu mettes dans la tête d'Eve de payer pour vous deux. Franchement, la seconde option me ferait plaisir. T'es son compagnon de chambre, pour vrai ? Si t'achète un truc, elle en profitera aussi. Mais j'vais pas faire le difficile. J'suis ouvert à tout. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 29 août 2014, 09:25:46
« Tu es en train de me dire que si je t’indique une chose à l’extérieur, tu peux la téléporter ici ? »

Une lueur d’intérêt passa dans les prunelles sanglantes du jeune mutant. Cette seule opportunité élargissait sensiblement l’éventail de ses possibilités. Avec sa mémoire hors norme, il se souvenait encore parfaitement de quelques planques où il avait dissimulé des armes. Pas de quoi faire sauter le complexe bien sûr, mais assez pour se défendre contre quelques gardiens, assez aussi pour envoyer Carval en enfer.

« Intéressant, très intéressant. Restons bon amis, Matt’. Je verrais ce que je peux faire avec Eve. »

Il lui adressa l’un de ses sourires espiègles de rongeur. Pour les non habitués, cela faisait un peu peur.

« Mais pour l’heure, je n’ai besoin de rien. A plus ! »

Si, il avait besoin d’une centaines de bouteilles de Vodka, au moins. Mais ce n’était pas le moment de contracter des dettes qu’il n’était pas sûr de pouvoir rembourser.  Sur ce, il alla rejoindre la jeune femme. Il aurait deux trois petits trucs à lui expliquer, une fois de retour dans la chambre, comme le fait que pour espérer s’évader, il fallait être prêt à quelques sacrifices. Il détailla son corps, constata les nombreuses marques qui le couvraient. Pauvre fille... Il réalisa qu’il commençait à avoir des scrupules à manipuler les gens. Il en avait envie, il en avait besoin, il sentait confusément que sa propre survie en dépendait, mais avec Eve, il voulait jouer franc jeu. Avec les autres, c’était une autre histoire.

« Ne t’en fais pas, je me renseignais juste, lui souffla-t-il. Tu veux bien m’aider ? Je suis trop petit pour atteindre le bouton. »

Il comptait se doucher rapidement pour ensuite avoir le temps de rassembler de nouvelles infos.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 29 août 2014, 19:45:34
Matt hocha la tête et regarda Ernest s'éloigner. Puis il rejoint le groupe de garçons qu'il avait quitté, et ils commencèrent à discuter vivement entre-eux.

Lorsque le mutant alla se positionner près d'Eve, celle-ci se retourna et lui adressa un demi-sourire un peu triste. Ses cheveux à présent trempés tombaient sur sa poitrine. Elle avait l'air cependant contente que son compagnon de cellule revienne.

« Attention, c'est pas très chaud aujourd'hui » prévint-elle, avant d'appuyer sur le bouton. « Ça dépend des jours. Si t'aime pas, tu peux demander à Karen de la changer. Elle est spéciale mais gentille. »

L'eau était tiède. Sa température légèrement inférieure à celle d'une douche traditionnelle rebutait un peu la peau d'abord, mais l'accoutumance y était facile, et le jet devenait rapidement relativement agréable.

« Matt' il est pas vraiment méchant, mais c'est un pervers. Il t'a proposé de la drogue, pas vrai ? Ou une console ? Gratuits ? Il veut te faire devenir accroc et te pousser à acheter tout le temps. Tu devrais pas céder, tu seras à sa botte après. Enfin, tout le monde est un peu son obligé, mais bon… Après, ça dépend si… ça te gêne… ou pas… »

Ses joues blanches rosirent un peu. Un clapotis derrière elle la poussa toutefois à se retourner. Le bossu, en s'approchant, n'avait pas été aussi discret que la dernière fois. L'homme la fixait de ses deux petits yeux noirs. Il ne devait pas faire beaucoup moins d'un mètre soixante-dix, mais se tenait si courbé qu'il paraissait bien plus petit. Il avait un visage de travers, à l'avant sa face ronde paraissait n'avoir ni menton ni cou, et sa lèvre supérieure était au repos relevée sur un palais et des dents désagréablement arrangées. Ses oreilles étaient également étrangement déformées.

« Va-t'en, s'il-te-plaît » lui demanda sèchement Eve qui n'avait rien oublié de son geste déplacé.

Elle se recula de quelques pas, nerveuse, vers Ernest. De la gorge large du bossu émergeait comme un gargouillis indistinct. Il ne paraissait même pas avoir compris la protestation. Sa bouche s'étira en un sourire dérangeant alors qu'il continuait à avancer vers la jeune fille.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 29 août 2014, 20:21:41
« Ne t’en fais pas pour moi, Eve, je sais comment ça marche ce genre de chose. Matt’ est malin, il a sut se rendre indispensable. Il a trouvé sa place dans ce petit monde qu’est le notre. A moi de trouver la mienne. A nous, plutôt. Nous sommes compagnons de chambre, un élément important. »

Ernest en aurait dit d’avantage, mais le bossu l’interrompit. La jeune femme se recula vers lui et lui, il se plaça devant elle, sans brusquerie toutefois, sans être menaçant. Non, il était parfaitement calme. Il pointa l’index vers l’homme disgracieux et l’interrogea avec amabilité :

« Tu t’appelle comment ? Moi, c’est Ernest. »

Est-ce qu’il avait vraiment à faire à un débile ? Si oui, il allait vite s’en rendre compte. Mais il devait être sûr. Savoir, encore et toujours. Tout le monde pouvait être utile, même le dernier des mongoles. Ce gars était un mutant, il avait donc un pouvoir. Le quel ? Vermine voulait avant tout des amis, beaucoup d’amis, et le moins d’ennemis possibles. Conforter son quotidien était vital car si les X-Men tardaient à venir, ces moments seraient les seuls où il pourrait récupérer des séjours au labo.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 29 août 2014, 21:49:41
Aucune lueur dans le regard du bossu ne semblait indiquer qu'il avait entendu quelque-chose à la question qu'on lui posait. Toutefois, la présence de l'hybride devant lui parut le faire hésiter. Il fronça ses deux gros sourcils proéminents. Parallèlement, un écho télépathique retentit dans l'esprit d'Ernest.

« Cherche pas, il est presque aussi con qu'il en a l'air. Et puis surtout, il est sourd. Il n'a pas toujours été comme ça. Ne lui en veux pas, c'est pas sa faute, il n'a plus accès qu'à une toute petite partie de notre cerveau. Celle liée aux pulsions primaires, je pense. Je te fais pas de dessin, je devrais ? »

La voix n'avait pas de réelle sonorité, elle était immatérielle ; pourtant, ses intonations avaient intrinsèquement un caractère féminin. La figure difforme de l'homme courbé remuait, et quelques gargouillis remontèrent encore de sa gorge.

« Bon, et toutes les capacités motrices, aussi, évidemment. »

Après cet instant de pseudo-réflexion, le bossu s'agaça de la présence de cet obstacle qui l'empêchait d'accéder à son objectif. Les gargouillis gagnèrent en intensité et se transformèrent peu à peu en un grondement presque animal.

« Je m'appelle Margaret, enchantée. Je suis capable de lire tes pensées, et actuellement, j'utilise tes oreilles pour entendre.
– Fais gaffe Ernest. »

Sans technique particulière, l'homme tentait de contourner le jeune mutant pour approcher l'adolescente. Toutefois, si celui-ci lui barrait encore le chemin, il n'hésiterait pas à le pousser et à essayer de le jeter à terre. Il était brutal, ne retenait pas ses gestes, mais n'avait cependant aucune force particulière.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 29 août 2014, 22:40:00
Ça par exemple ! Ernest avait à faire à un individu dualisé. D’un côté, Margaret qui représentait 99% de l’esprit et rien du corps, et l’abruti qui avait le reste. Même pour un habitué du monde des mutants, c’était assez étrange. L’hybride rat fut troublé. Il le fut avant tout parce que Margaret était une télépathe. Il avait une certaine peur de ce genre de pouvoir car il ne pouvait pas s’en protéger. Lui qui estimait que sa plus grande force était son esprit, sa capacité à comprendre et manipuler, si on pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert, il se retrouvait en quelques sorte désarmé.

« Salut Margaret », bredouilla-t-il, à mi-voix.

Puis, prenant conscience que le bossu était en train de le contourner, il reprit, plus fort et à l’intention des autres.

« Heu, quelqu’un pourrait le faire se tenir tranquille ? J’ai pas tellement le gabarie requis pour ça. Le coup de l’eau, ça avait bien marché. »

Il sollicita du regard Karen. S’il intervenait lui-même, il devrait être violent et ce n’était pas judicieux.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 29 août 2014, 23:56:13
L'appel d'Ernest attira bien l'attention de Karen, mais pas seulement. Le garçon au tatouage de tigre ailé fut le premier à répondre, lançant à travers la salle un :

« 'tendez, je vais me le faire. »

Il avança d'un pas rapide et déterminé, et alors qu'il avançait, l'os de son avant bras grandit et ressortit de son poignet, sans pourtant paraître transpercer sa peau. L'extrémité de la protubérance, qui devait mesurer une trentaine de centimètre, était pointue.

« Je le sens pas très bien. »

D'un rapide et violent mouvement de bras, Loïc faucha le bossu sous les côtes, stoppant net sa progression et lui coupant le souffle. Le jeune homme ne s'arrêta cependant pas là, et alors que sa victime se recroquevillait sur elle-même en gémissant, il le frappa encore dans la direction opposée, matraquant son dos voûté. Le mutant fut projeté au sol, où l'attendirent plusieurs coups de talon qui ciblèrent principalement les zones molles de son corps.

« C'est bon, t'es calmé ? »

Le bossu tenta de se relever à quatre pattes pour s'enfuir, et reçu un nouveau coup qui l'étala encore. Il y avait un peu de sang sur le carrelage, mais celui-ci était rapidement emporté par l'eau qui ruisselait.

« C'est toujours un plaisir de t'aider gratuitement Eve. Et salut, Ernest Lenoir. Je te croyais toujours au trou. C'est dingue qu'ils t'aient fait sortir après tout ça. Mais t'aimes être en cage, finalement ? »

Le jeune homme laissa ramper le bossu gémissant plus loin et rétracta son arme. C'était un garçon assez commun, d'environ vingt ans, bien plus musclé que Matt. Il n'avait pas un air très gentil, mais son visage entouré de cheveux noirs était paradoxalement plutôt doux. Une barbe de quelques jours, pas encore très fournie, formait un duvet assez peu esthétique sur son menton.

Peut-être la voix et les détails de sa face rappelleraient-ils quelque-chose à Ernest ? Loïc avait brièvement fréquenté l'institut Xavier plusieurs années avant ; il avait bien grandi depuis. À l'époque, c'était un adolescent beaucoup plus chétif et très discret, et aussi presque féminin. À tous les points de vue, la testostérone avait bien fait son travail. Ils n'avaient jamais vraiment discuté ensemble, quelques entraînements communs, peut-être, mais il n'y avait pas grand-chose à se souvenir à son propos.

« Merci Loïc. Alors vous vous connaissez ? » fit-elle d'un ton égal.

Eve ne paraissait pas hostile au jeune homme ; ni à lui, ni au comportement qu'il venait d'avoir. Quant à ce qu'il venait de dire, elle ne s'en étonna pas, du moins pas sur le moment : elle avait eu peur, et elle était encore un peu absente. Elle regarda anxieusement le bossu s'éloigner.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 30 août 2014, 12:16:52
Ernest aurait voulu que le bossu ne soit pas traité ainsi. Il y avait des méthodes plus douces. Mais il n’esquissa pas un geste, pas un mot, pour le protéger. Au moins se félicitait-il de ne pas être l’auteur de cette violence.

Les derniers mots de Loïc le mirent mal à l’aise, ce qu’il cacha aussitôt. Oui, il se souvenait du jeune homme. Il n’oubliait rien, ou presque. Mais ce qui était surtout important, c’était que le jeune homme le connaissait. Il s’était plus ou moins attendu à devoir faire face à cette situation. Elle avait quelques avantages. Si les autres apprenaient qui il était, on devrait hésiter à l’embêter. Un ex Confrériste condamné à la perpétuité pour des viols, des agressions, et des meurtres parfois avec tortures, ce n’était pas exactement un profil de souffre-douleur. C’était peut-être même lui qui avait dans cette douche le casier le plus lourd. Mais Eve, elle, risquait de ne pas apprécier. Pire, quand elle allait réaliser, elle pourrait avoir peur de lui. Il devait absolument tout lui révéler, d’une manière douce, dès qu’ils seraient de retour dans leur chambre.

« Oui, il était à l’Institut, répondit-il à la jeune femme. Le monde est petit. Celui des mutants, encore plus. Bon, on termine de se laver ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 30 août 2014, 19:49:54
Loïc était un peu déçu et surtout surpris qu'Ernest ne trouve rien à lui dire ; il avait retardé sa rencontre avec lui, s'était retenu de venir lui parler immédiatement, pour lui faire une plus forte impression et engager une conversation avec assez d'éclat pour susciter de l'intérêt. Les sujets de discussion n'étaient pas si nombreux en ces lieux. Mais le mutant n'avait visiblement pas envie de s'entretenir. Le jeune homme haussa les épaules et retourna vers son groupe.

« On reparle du bon vieux temps quand tu veux. »

Eve avait enfin terminé de s'assurer que le bossu n'était pas en état de revenir. Elle reporta alors son attention sur Ernest, et eut un sourire soulagé et confiant.

« D'accord. Mais on a encore pas mal de temps, tu sais. On a pas beaucoup de sorties alors ils nous laissent en profiter assez longtemps. Enfin, on peut toujours demander à rentrer plus tôt, aussi. »

Elle appuya de nouveau sur le poussoir de la douche d'Ernest, pour que celle-ci ne s'arrête pas de couler, et vint se replacer sous la sienne. La toilette se faisait à l'eau claire ; il n'y avait aucun savon de disponible. Pour des êtres humains glabres, cela suffisait bien.

Une minute plus tard, un nouvel individu fit son apparition sur le pas de la porte. Celui-là n'était pas commun : noir de peau, c'était une véritable montagne de muscles de plus de deux mètres de haut. Déshabillé, sa musculature était frappante pour la puissance qu'elle inspirait. Il devait peser plus de cent-trente kilos, et la graisse ne devait pas y être pour beaucoup. Il portait une barbe épaisse sur tout le bas du visage, et contempla la pièce avec un regard sombre.

Une telle carrure ne s'oubliait pas vraiment. Ernest avait déjà vu cet individu. À plusieurs occasions, en fait. La première fois – les faits remontaient à plusieurs années – il lui avait volé un sandwich dans une rue new-yorkaise. Il avait alors mordu à l'altérium le colosse, ce qui l'avait transformé en une effroyable bête canine et recouverte de fourrure. La seconde fois, c'était dans le journal. L'homme était accusé d'avoir fait sauter une église, et avait revendiqué l'attentat au nom de la Confrérie. Au sein de la Confrérie, ça n'avait pas été une action prévue, et Ernest ne l'y avait d'ailleurs jamais vu. Peu après, le portrait de l'homme avait rejoint les primes offertes par le BAM pour la capture des criminels. Mais Carlos n'avait jamais été interpellé.

Son entrée parut faire un certain effet aux autres prisonniers, qui évitèrent soigneusement de s'attirer ses foudres. Même Andrej, qui n'avait pas réagit aux événement jusqu'ici, leva la tête et lui jeta un regard en biais. Seule Crazy resta absolument insensible à cette arrivée.

« Mieux vaut pas l'énerver, on dirait, celui-là » chuchota Eve.

Carlos sembla porter une attention soutenue à Ernest : ses yeux s'arrêtèrent plus longtemps sur lui que sur les autres. Mais peut-être était-ce simplement à cause de son apparence… Il choisit finalement la douche juste à côté de celle du mutant à fourrure. Mais peut-être était-ce là encore un hasard…
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 30 août 2014, 23:03:36
Ernest attarda son regard sur Loïc qu’il avait vraisemblablement déçu. Qu’il le veuille ou non, le jeune mutant ne pouvait pas ménager tout le monde. Discuter avec Loïc, c’était prendre le risque qu’Eve découvre brutalement qui était son compagnon de chambre. Réparer les pots cassés, ce n’était pas facile. Pour autant, l’hybride aurait sans doute dû dire quelque chose. Il s’en voulut.

L’apparition du colosse eut le mérite de le faire penser à autre chose. Alors, Carlos, c’était lui... Un lui qu’il connaissait. Un lui qui avait des raisons de ne pas l’apprécier. Un lui qui fit un peu paniquer intérieurement Ernest. La donne changeait et pas pour le mieux. La situation se compliquait encore. Carlos venait par là. Il s’installait à la douche d’à côté. Vermine le suivait des yeux, passif, indécis, angoissé. Puis, tout d’un coup, il réagit.

« Oui, en effet, répondit-il à Eve, tout aussi bas qu’elle. Heu, tu m’excuses, je... heu, je vais parler à Loïc. »

Sur ce, et sans même attendre la réaction de la jeune femme, il fila droit vers le groupe où se trouvait Loïc. Son sac poubelle trainait lamentablement derrière lui, rendant la scène loufoque, surtout qu’il était évident qu’il s’agissait en réalité d’une fuite.

« Loïc, justement, j’ai bien envie de causer ! Excuse-moi, je m’attendais tellement pas à te croiser là ! » affirma-t-il avec un aplomb stupéfiant.

Eve était bien gentille, mais elle pouvait pas le protéger. Le moment était donc venu de changer de compagnie.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 31 août 2014, 00:36:31
Les trois garçons restèrent sur place, mais n'étaient pas ravis qu'Ernest les rejoigne avec autant de précipitation. Ils n'étaient pas dupes de ce qui lui faisait peur. Eve, elle, le regarda partir sans vraiment comprendre.

« Euh, on est pas des gardes du corps non-plus » protesta Loïc.

Il savait mieux que les autres la réputation d'Ernest, et s'imaginait bien qu'avec ce dont il s'était rendu coupable, il n'était pas très facile à effrayer, et qu'il ne s'inquiéterait sans doute pas de cette façon sans une bonne raison. Matt, lui, était plus goguenard et moins préoccupé. Il se retenait cependant bien de regarder Carlos en face.

« Moi j'dis : tout s'achète. Même la tranquillité.
– C'est un ancien copain à toi ? Tu lui as fait des crasses ? »

La grosse main de Carlos appuya sur le bouton de sa douche, et l'eau commença à ruisseler de son crâne rasé. Mais une fois que cela fut fait, il se retourna, et ne quitta plus Ernest du regard. Il avait des yeux vert sombre. Il semblait bien apprécier l'effet qu'il faisait sur le petit mutant.

« Ben putain, il a l'air de t'en vouloir.
– Je sens le pouvoir super subtil. J'suis sûr, son truc, c'est de faire pousser des tulipes.
– Il a pas besoin de pouvoir pour enfoncer la tête de n'importe qui, franchement. Il mesure au moins deux mètres dix. »

Les interlocuteurs d'Ernest faisaient semblant de regarder ailleurs, et de discuter entre-eux. En réalité, ils étaient tous attentifs au moindre de ses mouvements… et prêts à déguerpir si la situation tournait au règlement de compte. Mais Carlos n'était pas pressé. S'appuyant sur le mur derrière lui, il écarta ses lèvres sombres, souriant de toutes ses dents, très blanches en contraste de sa peau, et étonnamment pointues. Faire peser une menace l'amusait beaucoup.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le dimanche 31 août 2014, 10:10:45
« Ho, j’ai potentiellement foutu sa vie en l’air. Potentiellement, j’insiste. J’ai un peu de mal à mesurer les conséquences de mes morsures », répondit Ernest, d’un ton dégagé, et à voix basse.

Il eut un petit rire filou.

« Loïc peut en témoigner, si je mords quelqu’un, c’est un peu comme si ce quelqu’un jouait à la loterie. Et il n’y a que des mauvais numéros. Des un peu mauvais, et d’autres très, très, très mauvais. »

Il fixa Matt » :

« Toi, tu n’imagines pas avec quelle facilité je peux en réalité te payer. J’ai des tas de planques dans les égouts de New-York où j’ai entassé des trucs... disons... sympa. Alors si t’es capable d’aller chercher si loin, considère-moi comme une mine d’or. Ce serait dommage que ta mine d’or se fasse briser le cou, hein ? »

Il laissait sous-entendre qu’il avait plus qu’en réalité. Matt’ ne se mouillerait pas sans l’appât du gain. Et il semblait être une pièce centrale sur l’échiquier de ce petit monde carcéral. Tout en parlant, le rat fit de son sac poubelle un boudin serré. Et il fit du boudin un nœud, réduisant ainsi le plastique à une boule au bout de son bras mutilé. La chose accomplie, il se sentit moins ridicule. Il se tourna, observa Carlos d’abord du coin de l’œil, puis directement. Ce n’était quand même pas dans son habitude de se débiner. La surprise y était pour beaucoup. Carlos lui-même devait être conscient que s’il s’en prenait à Vermine, il risquait une seconde morsure aux conséquences catastrophiques. Mais est-ce que cela allait l’arrêter ? Pas sûr. Et même si morsure il y avait, il aurait tout le temps de briser l’hybride avant que ne se manifeste les premiers effets de la contamination.

« Alors dis-moi Loïc, qu’est-ce que tu as fabriqué depuis la dernière fois où on s’est vu ? Je l’avoue, j’ai peine à te reconnaître. »

Ernest désirait entamer une conversation ordinaire et ainsi minimiser l’impact du colosse.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 01 septembre 2014, 07:18:23
L'argument parut convaincre Matt. Il tenait à sa sécurité avant tout, mais les paroles d'Ernest avaient éveillé sa curiosité. Il prit la chose avec légèreté. Le ton, l'attitude et les propositions de l'hybride commençaient à bien lui plaire. Peut-être se reconnaissait-il un peu dans la malice qu'il déployait.

« Ça va, sois pas aussi flippé. Loïc est un puissant mutant. Pas vrai Loïc ?
– Je peux le poinçonner d'ici, mais je vais avoir des emmerdes avec les gardiens si je le descends. »

Le jeune homme, sur lequel venait de retomber en quelque sorte toute la pression de l'éventuel combat, était assez tendu. L'autre garçon, de type japonais, qui était toujours silencieux, lui tapota l'épaule pour lui manifester sa compassion. Après un rire qui sonnait faux, Loïc répondit à Ernest.

« Que des trucs biens, la preuve, je suis ici. Mission secrète en antarctique, ça avait l'air sympa sur le papier. Je l'ai eu parce que j'étais en couple avec un gars… Wiccan, tu vois qui c'est ? Deux ans d'entraînement spécial, je sais même pas exactement pourquoi, d'ailleurs. Puis on a débarqué et tout-de-suite, ça a capoté. Les autres ont réussi à se barrer, mais pas moi. D'ailleurs, j'me demandais ce qu'ils avaient dit sur moi ? Rien je parie ? »

La réponse était en effet rien. Aucune communication n'avait été faite sur sa disparition : pas plus lors de son départ pour l'entraînement que lors de sa capture. Loïc ayant toujours été un garçon particulièrement discret et assez peu sociable, personne ne s'était réellement interrogé. Les rares qui avaient eu une pensée pour lui s'étaient dit qu'il avait abandonné les études ou qu'il était rentré chez-lui.

« Je suis ici depuis presque un an » conclut Loïc. « Je suppose que je suis un otage, ou quelque-chose comme ça. »

Carlos avait arrêté de regarder Ernest. À la place, il lorgnait maintenant sur Eve. Il avait bien vu que l'hybride était en pleine conversation avec elle lorsqu'il était arrivé. Il la regarda de bas en haut, puis avança vers elle. La jeune fille recula, mais il l'attrapa par le bras. Il devait avoir de la poigne, car l'adolescente grimaça. Il la tira brutalement vers lui.

« Ça, c'est moche. Mais bon, bah » marmonna Matt.

Sentant que la jeune fille allait crier, le colosse appuya sa grosse main sur sa bouche. Il plaqua l'arrière de son crâne sur son torse puissant. Puis il se tourna de nouveau vers Ernest, guettant sa réaction. Il avait toujours un grand sourire, qui dans le contexte devenait carrément lugubre.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 01 septembre 2014, 09:23:32
Matt’ avait mordu à l’hameçon, parfait. La conversation avec Loïc s’amorçait. Bien aussi.

« Wiccan ? Ouais, ça me dit quelque chose. De ta disparition, par contre, pas un mot. Je me demande également ce qu’ils disent des miennes. Si je compte bien, c’est la troisième. »

Il se mit à compter sur ses doigts.

« Mes quinze jours de folie chez le savant fou, un. Mon passage à la Confrérie, deux. Et maintenant ça, trois. Toi, tu es un otage, et moi, un traître. Parce que oui, j’ai quitté la Confrérie d’une manière un peu folklorique. Tu vois qui es Karma ? Ben elle m’a ramené à l’Institut dans le coffre d’un 4x4, tout ça parce que j’ai cherché à la buter. Du coup, soit j’étais direct renvoyé en prison, soit j’acceptais la réinsertion surveillée. »

Ce fut à cet instant que l’enfant-rat aperçut la manœuvre de Carlos. Immédiatement, il passa en revue les manières de réagir. Il pouvait crier, appeler les gardiens. Mais Eve allait peut-être morfler avant qu’ils n’interviennent. Il pouvait menacer le colosse, lui faire comprendre qu’il n’était pas en position de force. Après tout, Vermine venait d’appâter Matt’ et Loïc devrait l’aider. L’Altérium, de surcroit, demeurait une arme dissuasive, surtout pour quelqu’un qui y avait goûté. Mais Eve restait en otage et Carlos allait s’en servir à son avantage. L’hybride opta pour une troisième solution. Il lança un sourire narquois à la montagne de muscles et reprit la conversation comme si de rien n’était.

« J’ai choisi cette dernière. Et c’est pour ça que j’ai perdu une main. Quand ces enfoirés m’ont attrapé, je portais un bracelet électronique. Ils avaient besoin de me le retirer sans l’abimer. »

Il fixa la boule de plastique d’un air perplexe.

« Ça aurait plus de gueule si c’était un crochet », plaisanta-t-il.

En ignorant Carlos, il réduisait théoriquement à néant son action. Ernest, maître de lui-même, lui faisait croire qu’il se fichait totalement de cette jeune femme. Du coup, s’il lui faisait du mal, il aurait des problèmes avec les surveillants sans embêter le rongeur. Il allait peut-être mal le prendre. Il allait peut-être quand même s’en prendre à Eve, c’était le risque. Mais, il y avait plus de probabilité pour qu’il change de plan. La fille n’avait plus de valeur. Il n’avait plus de prise sur son ennemi. Ernest se tenait prêt à une agression directe.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 01 septembre 2014, 10:50:23
« T'aurais peut-être dû choisir la tôle, franchement. Au moins, on sait combien de temps ça dure. Ici, on sait jamais vraiment ce qui va nous arriver le lendemain » confia Loïc. « Ils gardent jamais quelqu'un par hasard. Si t'es encore ici, c'est qu'ils ont des projets pour toi. Sinon, ils se seraient déjà débarrassés. »

Loïc et son compagnon japonais regardaient alternativement le colosse et Ernest avec un air plus ou moins perplexe. Ils s'étaient au moins attendu à ce que l'hybride serre les dents, ne serait-ce que parce qu'il s'agissait d'une façon évidente une provocation qui lui était destinée. Matt, lui, fut moins surpris , et ne perdit pas le nord, ni le fil de la conversation.

« Ça doit pouvoir s'trouver, un crochet. Mais avec un bout rond, alors. »

Carlos plissa les yeux, sans perdre son sourire. Il avait sans doute compris qu'il n'aurait pas d'ascendant psychologique sur Ernest avec des méthodes aussi évidentes. Le grand mutant se baissa alors pour atteindre l'oreille d'Eve, puis lui glissa quelque-chose à l'oreille. Enfin, il la relâcha, la poussant dans la direction du groupe de garçons.

L'adolescente ne se fit pas prier pour retourner vers les quatre prisonniers, manquant de glisser sur le sol mouillé. Le regard paniqué et le souffle court, elle cherchait désespérément un peu de réconfort et d'assurance auprès d'Ernest. Si elle l'avait connu un peu mieux, ou qu'elle n'était pas nue, peut-être se serait-elle jetée dans ses bras. C'est assez énervée qu'elle fit cependant une déclaration :

« Euh, Ernest. Il a des trucs à te proposer. Je sais pas quoi. Il voudrait te parler en privé, maintenant. »

Une fois que le message fut délivré, le colosse se redressa et marcha tranquillement vers la sortie de la pièce. Il tourna à l'angle, entrant dans la salle dédiée aux toilettes et disparaissant du champ de vision des autres prisonniers.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 01 septembre 2014, 13:54:08
Des trucs à proposer ? Ernest, cette fois, ne put masquer sa surprise. Il ne s’était pas attendu à ce que Carlos procède ainsi. Etait-ce une tentative désespérée pour lui mettre la main dessus ? Avait-il vraiment quelque chose à proposer ? Vermine ignorait qu’elles étaient précisément ses intentions. Il connaissait en fin de compte très peu le colosse. Une brève rencontre, une morsure, ensuite une nouvelle par ci, par là... Tout en réfléchissant à ce qu’il allait faire, il prit la main d’Eve, rassurant :

« J’aurais des trucs à t’expliquer quand on sera à la chambre. Je ne pouvais pas savoir que j’allais retrouver ce gars. Ne t’approche plus de lui. Je ne veux pas qu’il te fasse du mal à cause de moi. »

Ensuite, il s’adressa à Matt’ :

« Ok, un crochet avec un bout rond. Et de quoi le fixer au poignet bien sûr. Trouve-moi ça et je te file... – Il lui fit signe de se baisser pour qu’il puisse lui chuchoter à l’oreille. - ...tout un tas de magasines pornos et des chouettes. Je suis certain que tu n’auras aucun mal à écouler ce genre de marchandises. Affaire conclue ? »

Dès qu’il obtint la réponse, il déclara au groupe :

« Bon, je vais aller voir Carlos. J’ai peut-être la force d’un merdeux, mais il est pas prêt de me choper. A tout hasard, si j’appelle, ou si je cogne, vous rappliquez. Ok, il est grand, il est impressionnant, mais s’il était si dangereux que ça, il ne serait pas avec nous. »

Si personne ne le retenait, il irait donc rejoindre la montagne de muscles avec toutes les précautions qui s’imposaient. Etant d’une vivacité remarquable, il n’était pas facile à prendre de vitesse.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 02 septembre 2014, 10:09:07
Matt fit semblant de réfléchir quelques secondes, mais sa décision était déjà prise. Il était curieux du type de pornographie qu'un être tel qu'Ernest avait pu accumuler. C'était davantage dans la sélection que dans l'objet lui-même que résidait l'intérêt. Peut-être même les garderait-il pour lui. Il répondit dans un sourire.

« Tope-là ; mec, tu sais y faire, c'est super. Je te dirais bien que j'espère qu'il va pas t'arracher l'autre bras, mais ça serait plutôt bon pour mes affaires, s'il le faisait, en fait, plaisanta-t-il.
– Fais attention à toi, Ernest » lui conseilla plus sérieusement Eve, dont les angoisses avaient néanmoins été en partie calmées par l'aplomb et l'attitude protectrice du mutant.

Les toilettes n'étaient qu'à quelques mètres de la salle des douches, mais un mur en angle coupait la vue entre les deux salles, et atténuait même les sons de l'eau coulant. L'endroit n'était pas extrêmement fréquentés, du reste, ne servant qu'à la dizaine de prisonniers, ce qui en faisait un lieu relativement discret. L'odeur n'était pas extrêmement agréable, mais elle n'avait rien non-plus d'insupportable, sentant plus le désinfectant que l'urine.

Quand Ernest rentra, Carlos l'attendait, les bras croisés et l'expression neutre. Le colosse parla lentement, articulant méticuleusement un mot après l'autre.

« Prince Crapule. Le brillant mais scélérat Crapule. L'enfant prodige. Je te connais, Ernest Lenoir. Mais je ne t'attendais pas ici. Jusqu'ici, je me demandais comment sortir de ce merdier. Maintenant, je sais que je n'aurais plus à réfléchir. C'est bien. Tu vas m'apporter deux choses. Je veux ta tête de génie du crime pour savoir comment on va se tirer. »

Carlos se mit à sourire. Mais son sourire n'avait rien du rictus agressif qu'il lui avait servi quelques minutes plus tôt. Il paraissait même sincère.

« Et je veux ta morsure en temps voulu pour me rendre plus fort. Je n'ai jamais été aussi fort que quand tu m'as mordu. Je deviens une bête. Avec ta bave dans mes veines, personne ne peut me résister. »

Le ton du colosse était à la fois impérieux et simple. Il était emprunt d'un orgueil mesuré, et probablement le mutant avait-il une parfaite conscience de son infériorité intellectuelle vis-à-vis d'Ernest, sans que cela n'affecte le fait qu'il se sente supérieur à lui d'une manière générale.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 02 septembre 2014, 14:05:05
Etait-il possible qu’Ernest se soit fourvoyé à ce point sur les intentions de Carlos ? Il se le demandait. Désireux de garder la face, cette fois, il dissimula sa prudence derrière son masque de petit sournois, un masque qui était très proche de sa véritable nature et qui donc ne pouvait que lui aller. Tout en conservant une confortable distance de sécurité, il s’adossa au mur carrelé, bras croisés lui-aussi. Sans doute aurait-il pu avoir un zeste de classe ainsi, s’il n’avait pas été à poil et qu’un sac poubelle en boule ne terminait pas son bras mutilé. Il laissa parler le colosse, attentif à ses mots, à son ton et à son attitude. Il cherchait à évaluer sa sincérité. Pour l’instant, il pouvait au moins lui accorder le bénéfice du doute.

« Et moi qui pensait que tu voulais juste me réduire en bouillie, commença-t-il, quand ce fut à lui de répondre. D’ordinaire, ceux que je mords m’en veulent à mort. »

Il ricana, puis retrouva son sérieux.

« Je ne vais pas te surprendre en t’avouant que moi-aussi, j’ai envie de me tirer. Tout le monde a envie de se tirer. Je pense aussi que tu as pigé que pour qu’on ai une chance d’y arriver, faut pas faire ça tout seul. Alors le premier truc que tu demandes, pas de souci. On est dans la même galère. On a les mêmes ennemis. Par contre, va falloir un peu de patience. Je viens d’arriver. Je connais presque rien du complexe. Un plan, ça s’improvise pas. Ça se murie. Le seul conseil que je peux pour l’instant te donner, c’est d’être cool avec les gardiens. J’ai entendu la femme-requin un peu avoir la trouille de toi. Si tu deviens trop dangereux, ils risquent de te transférer à un autre étage, là où les conditions de sécurité sont bien plus élevées. Bref, joue le jeu, tant que nécessaire. »

Il marqua une pause, profitant de celle-ci pour vérifier si Carlos avait perdu des doigts. Ensuite, il reprit.

« Pour mes morsures, oublie. L’effet est aléatoire. La dernière fois, tu as eu de la chance. Si je te remords, ce sera peut-être fatal ou ça te rendra plus faible. Et puis, niveau force physique, t’as pas l’air d’en manquer. Avec tes bras, je suppose que tu peux tordre le cou à plus d’un de nos gardiens. »

L’hybride rat avait été franc. Il avait tout à y gagner. Avoir Carlos dans son camp et le garder chez les captifs inoffensifs, prêt à agir. L’unique petite chose qu’il avait omis de signaler, c’était que dans ses plans, il y avait des pions et que parfois, il était utile de sacrifier des pions.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 04 septembre 2014, 08:40:21
Carlos était têtu.

« Si ta bave m'a rendu plus fort une fois, elle peut recommencer » grogna-t-il, sans trop y croire.

Toutefois, même lui ne pouvait ignorer que, sans doute, Ernest connaissait mieux son pouvoir que lui-même. Le colosse renifla, déçu de ne pas pouvoir compter sur la substance produite par le mutant rat. Il gardait son aplomb pour les apparences, n'aimant pas donner l'impression d'avoir tort.

« La requine est une tueuse, je sais reconnaître une tueuse. Et le vieillard a l'air sournois. Ne mise pas tout sur ma puissance » fit-il avec une prudence qui dépareillait étrangement avec son comportement général.

Il ne manquait à Carlos aucun doigt, et sa peau noire n'était d'ailleurs pas non-plus tatouée.

« Je n'aime pas être entre des murs, Crapule. Je suis un loup, être enfermé me rend agressif. Je ne vais pas rester tranquille longtemps. Fais travailler ta tête rapidement, sinon je risque de faire à ma manière. »

Il serra les poings, et se redressa.

« Je vais rentrer maintenant. Je sens que je vais casser la gueule à quelqu'un si je reste. Et j'ai pas envie de casser la gueule à quelqu'un d'utile pour toi. À très vite, Crapule. Réfléchis bien. »

Se détournant d'Ernest, Carlos s'éloigna d'un pas lourd, prenant la direction opposée à celle des douches, vers l'ascenseur. Les gardiens devaient attendre non-loin.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 04 septembre 2014, 10:33:06
Pas de doigt en moins ? Pas de tatouage ? Une griffe pensivement posée sur ses incisives proéminentes, Ernest fixait Carlos en train de s’éloigner. Leur échange c’était mieux passé qu’il ne l’avait escompté. Mais s’était-il adressé à un captif ou à un membre du personnel ? Dans le premier cas, le colosse n’avait pas encore passé son baptême de labo. Dans le second, le rat craignait une sanction. Il porta sa main à son dos et n’eut guère de mal à trouver la marque qu’on lui avait faite. Elle se trouvait quasiment à la base de sa queue. Il la tâta un instant, puis chassa ses doutes. Il profita qu’il était dans les toilettes pour faire ses besoins. Ensuite, il retourna vers les douches. Les autres avaient dû spéculer sur l’état dans lequel il serait. Il prit donc un soin particulier à se montrer en pleine forme et sûr de lui.

« Et oui, je suis encore entier !, fanfaronna-t-il. Enfin, aussi entier qu’avant, rectifia-t-il. Il est pas si méchant que ça, Carlos ! »

Il alla vers Eve, sollicita son aide pour l’eau et se rinça à nouveau et avec soin la main et le derrière. Il se demandait si Matt » avait déjà fait ses recherches. Peu probable. La transaction devrait sans doute avoir lieu lors de la douche suivante.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 05 septembre 2014, 04:42:47
Manifestement, presque tout le monde, Karen et l'ukrainien compris, était resté à attendre le retour d'Ernest, curieux de savoir s'il allait revenir ou non. Une fois constaté qu'il était revenu en bon état, seuls Eve et le groupe de garçons continuèrent à le suivre du regard : ils souriaient. La jeune fille eut un rire nerveux :

« On a eu peur ! Il te voulait quoi ?
– Mercure a parié que tu reviendrais pas en un seul morceau. Cool que t'ai rien, on va bien s'amuser » lança Loïc.

Le japonais fit la moue, mais n'ajouta rien. Eve actionna encore la douche d'Ernest ; elle en avait terminé avec sa toilette. Matt, lui, s'approcha du mutant alors qu'il était en plein nettoyage. Il entrouvrit la bouche pour parler, un bras dans le dos.

« J'ai pas trouvé de crochet, à part dans les déguisements de pirates pour gosses, c'est pas trop à la mode. Mais j'suis passé à l'hosto et puis… »

Il révéla ce qu'il tenait derrière lui. C'était une prothèse assez rudimentaire, sans revêtement ; elle était constituée de trois tiges de métal légèrement courbées, deux qui émergeaient parallèles et qui se rejoignaient à l'extrémité, et la dernière, en dessous, leur était opposée. Le tout ressemblait à une sorte de pince. Elle se fixait au poignet par un brassard blanc à l'allure simplement médicale, refermé par un scratch.

« …c'est un modèle enfant, j'pense. Ça paraît génial. Limite ça donne envie de perdre une main. En plus, c'est articulé, là, ça serre, mais je sais pas exactement comment ça marche. Ça te va mec ? »

L'adolescent lui tendit la prothèse. Elle était fine, et en conséquence ne pesait presque rien.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 05 septembre 2014, 09:07:27
« Il voulait un truc plutôt banal : se tirer. Et puisqu’il connait ma réputation, il s’est dit que, peut-être, j’aurai la solution miracle. »

Ernest avait répondu sans chercher à être discret. Il y avait un rien d’amusement, de légèreté dans son ton, comme s’il trouvait déjà ridicule l’idée d’évasion. Il nourrirait toujours des doutes sur le colosse tant qu’il ne serait pas comme eux tatoué. De plus, afficher trop clairement ses intentions, c’était s’exposer à d’amères désillusions. Si jamais on lui reprochait les propos tenus dans les toilettes, il pourrait prétendre avoir dit ce que la montagne de muscles voulait entendre, juste pour avoir la paix.

Matt’ s’approcha. Apparemment, l’hybride rat s’était trompé, le jeune homme avait déjà trouvé quelque chose. Quelque chose qu’il ne tarda pas à révéler. Le petit mutant détailla la prothèse.

« Pas mal », admit-il.

Il la saisit en prenant garde à ne pas la tremper, même si l’eau ne devrait pas la détériorer. Il la soupesa, vérifia l’articulation et la fixation.

« Pas mal du tout. Je suppose que les gardiens sont au courant de ton petit manège. Je n’ai donc pas besoin de la cacher, n’est-ce pas ? »

La cacher où d’ailleurs ? Tout ce qui entrait dans le complexe ne pouvait échapper longtemps à la vigilance du personnel. Quand Vermine eut obtenu la réponse, il chuchota à Matt’ :

« Ok, je la prends. Voilà où se trouvent les magasines... »

Il lui expliqua en détail la localisation de l’une de ses cachettes dans les égouts, pas la plus récente. Les magasines en question étaient déposés sur une étagère vermoulue et constituaient ce qu’il y avait de plus intéressant dans la planque. Le reste n’était que piles de bouteilles vides, tas de loques et couvertures moisies. Les magasines avaient certainement pris un coup de vieux à cause de l’humidité ambiante. Ils traitaient d’une pornographie très classique, illustrant sans équivoque l’attirance du mutant pour les femmes adultes.

Il y avait une petite chance pour que la planque ait été découverte entre temps, auquel cas elle risquait d’avoir changée. Toutefois, l’enfant-rat était toujours très précautionneux et méticuleux lorsqu’il s’installait. Pas facile de dénicher ses chez lui.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 06 septembre 2014, 04:55:57
Matt acquiesça avec un sourire :

« Ouais, ils s'en foutent, et même plus ; sans moi, dans des cellules sans rien, tout le monde deviendrait dingue ici. Ils ont pas envie que ça arrive, pour sûr.
– Avant ils faisaient passer des trucs aux prisonniers. Maintenant ils laissent Matt' s'occuper de ça, c'est moins risqué pour eux » compléta Eve.

Le jeune homme ne paraissait aucunement gêné de la situation. Il se voyait comme indispensable à tout le monde, et ça lui convenait parfaitement. Personne n'avait envie de se le mettre à dos. Communiquant avec Ernest à voix basse – plus pour l'imiter que par réel besoin de discrétion – il lui demanda de décrire le chemin à partir du lieu new-yorkais célèbre le plus proche de son repère. Une fois qu'il eut mémorisé les informations, il s'assit en tailleur à même le sol. Loïc et Mercure veillaient sur lui.

Il ferma les paupières, mais quelques instants plus tard, celles-ci se rouvrirent. Ses yeux étaient vides d'expression, son regard n'était pas fixe, bougeant plusieurs fois, mais ne regardait rien de cohérent autour de lui. Le reste de son corps s'affaissa, et le japonais lui attrapa simplement l'épaule pour éviter qu'il ne bascule en arrière. Enfin, au bout d'environ une minute, ce qui ressemblait à un nuage de poussière se forma dans la main du mutant, avant de se condenser et de se transformer en une liasse de papier. Matt, en la serrant entre ses doigts, le froissait légèrement. Il ne revint à lui qu'encore quelques instants plus tard.

Il sourit en grand, presque béat, ce qui contrastait avec son expression à l'habitude plus maligne. Le visage exalté, il regarda à peine ce qu'il venait de ramener. Pourtant, ses paroles n'eurent rien de spécial.

« Plutôt glauque ta planque, mec. T'as vraiment vécu là-dessous ? Tu dois être limite bien, ici, en fait. »

Le jeune homme tendit les magazines à Loïc, qui les saisit. Puis Matt se releva sans difficulté apparente.

« C'était moins nul que je le pensais, aujourd'hui, niveau business. Enfin, on va rentrer. Oublie pas du paiement potentiel dont on a parlé, Ernest. Je suis pas toujours aussi sympa aux affaires. »

Il lui fit un clin d’œil et s'éloigna. Loïc prit la parole :

« On va y aller aussi. »

Mercure hocha la tête, et s'apprêta à partir lui aussi. Les deux garçons étaient probablement dans la même chambre.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 06 septembre 2014, 09:15:38
« J’oublie pas, j’oublie pas ! A plus ! », répondit Ernest à Matt’, avec malice.

Il ne pouvait nier que niveau confort et hygiène, le complexe était très supérieur à ses planques souterraines. S’ils avaient croisés le Vermine qui y vivait, sans doute n’auraient-ils pas pu s’approcher à cause de l’odeur pestilentielle qu’il dégageait. Les dents jaunes, le pelage graisseux, sa saleté avait été repoussante en cette période.

Il salua aussi Loïc et Mercure, puis il s’écarta légèrement d’Eve avant de s’ébrouer. Il envisageait lui-aussi de quitter les douches, mais désirait être un minimum sec avant, chose qui prenait du temps le concernant. En attendant, il fit un bref bilan des derniers événements. Rencontres, affaires, constats... se passage sous l’eau avait été riche d’expérience. Demeurait l’interrogation envers Carlos...

Le petit mutant finit par retirer le sac poubelle de son moignon. Mis à part une ou deux gouttes qui s’étaient égarées sous le plastique, le bandage était sec. Il mit soigneusement en place la prothèse. La blessure était encore sensible, il grimaça, mais persista jusqu’à être satisfait du résultat. Elle lui donnait un drôle de look, jugeait-il.

« Tu me trouve comment ? » demanda-t-il à sa collègue de cellule.

Il prit la pause, bras croisés, museau fièrement relevé. Bien sûr, il ne se prenait pas au sérieux et retrouva vite une attitude ordinaire.

« Bon, on y va ? »

Il était juste humide désormais. Déjà il se dirigeait vers ses habits. Il n’allait pas avoir de mal à les reconnaitre, c’était les plus petits et il avait aménagé un trou dans le pantalon. Il gardait avec lui le sac poubelle en boule. Ce pouvait être toujours utile.


Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 06 septembre 2014, 22:21:36
Mercure et Loïc allèrent donc sur les pas de Matt, le garçon aux os extensibles rendant les magazines à ce dernier. Eve n'était pas fâchée de voir partir le seigneur local. Elle regarda Ernest avec gentillesse.

« Tu es très beau » se contenta-t-elle de dire.

Étrangement, et malgré l'humour mis par Ernest lui-même, le compliment semblait absolument sincère.

« Ils nous ramènent pas tous en même temps, attend un peu. Pas besoin de reprendre nos vieux habits, non-plus. On en a de nouveaux à chaque fois. Je t'avais dit que c'était du recyclé. Du jetable, même ! Viens, ils doivent être arrivés ! »

L'adolescente conduit Ernest à l'extérieur de la salle des douches, dépassant les toilettes et revenant vers le couloir. Au bout de celui-ci, la porte de l'ascenseur se referma sur Loïc et Mercure, accompagnés de la requine. Non-loin, comme Eve l'avait prédit, des barres soudées aux murs retenaient une demi-dizaine d'habits semblables aux précédents. Il y avait également des rectangles de la même étoffe, destinés à l'essuyage.

Eve attrapa l'un d'entre-eux et après l'avoir rapidement passé sur son corps, l'enroula autour de sa tête, pour maintenir et faire sécher ses cheveux. Puis elle enfila une tenue.

« Deux nouveaux aujourd'hui, ça fait beaucoup. Ils arrivent moins vite, d'habitude. C'est rarement plus d'un par un ou deux mois. Peut-être qu'ils accélèrent, en ce moment. On est tatoués dans l'ordre d'arrivée, je sais pas si t'as remarqué ? »

En effet, la jeune fille était marquée 000002, comme Ernest avait déjà pu le constater dans leur cellule. Matt était tatoué d'un 000014, Crazy d'un 000015, Mercure d'un 000021, Karen d'un 000024, Loïc d'un 000026, Andrej d'un 000032 et le bossu d'un 000034.

Bientôt le vieil homme reviendrait les chercher pour les accompagner dans leur cellule.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le dimanche 07 septembre 2014, 10:56:37
« Avec le Dr Carval dans le coin, ça ne m’étonne pas. C’est pas un adepte de la demi-mesure. Il mettra tout en œuvre pour mener à bien ses expériences et si la Confrérie lui laisse carte blanche, il ne va vraiment pas s’en priver. »

Ernest attrapa l’une des étoffes et s’essuya énergiquement avec. N’ayant qu’une seule main, il n’était pas aussi efficace que d’ordinaire, mais sa vivacité compensait. Il semblait vraiment s’être remis des récents événements. Ce n’était qu’en partie vraie. Le violent kidnapping, le baptême de labo, le choc provoqué par la voix enregistrée de Richard... Beaucoup d’épreuves en peu de temps. La nuit risquait d’être éprouvante. Car la nuit, les angoisses revenaient, les craintes ressurgissaient. Vermine appréhendait déjà ses cauchemars. Une fois sec, il se choisit une tenue, la plus petite qu’il put trouver, s’empara du pantalon et y fit un trou d’un coup de dent. Ensuite, il l’enfila, tout en faisant passer sa queue dans le trou.

« Je porte quel numéro ? » interrogea-t-il en se plaçant dos à Eve.

Si besoin était, il garderait le pantalon légèrement baissé pour ne rien cacher du tatouage. Une fois la réponse obtenue, il ajusta l’habit autant que possible et prit le haut sans manche.

« Heu, et... et c’est vrai que tu me trouves beau ? » hasarda-t-il.

Il eut un petit rire gêné.

« D’habitude, c’est pas tellement l’adjectif auquel j’ai droit. »

Sa réaction quelque peu timide était du bluff. C’était plus fort que l’enfant-rat, il ne pouvait s’empêcher de calculer. Eve lui était réellement sympathique, il ne désirait pas la tromper. Mais, il voulait vérifier un truc, quelque chose qui pourrait lui faciliter la vie. Il termina de se vêtir tout en observant la jeune femme.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 07 septembre 2014, 23:43:57
Sans se faire prier, la jeune fille regarda le bas du dos du mutant. Puis elle répondit, perplexe :

« C'est bizarre. Tu n'as que des zéros. C'est peut-être un raté ? Et en-dessous, pas de code-barre, des lettres : ARACHNEUM. C'est pas comme l'altérium dont tu m'as parlé, ça ? »

Elle fit la moue. La question qui suivit parut l'intéresser au moins autant, sinon plus. Stella sourit, mais ses joues plus roses trahissaient un peu de gêne réciproque. Elle tentait toutefois de paraître espiègle à ce sujet. Avec Ernest, ce n'était pas trop difficile. Elle avait de plus en plus l'impression de pouvoir tout lui confier.

« Si les autres t'apprécient pas comme ils devraient, c'est qu'ils sont idiots et qu'ils n'ont aucun goût. Mais n'en profite pas trop, dis ! »

L'adolescente s'arrêta quelques secondes, pensive, puis retourna l'interrogation :

« Et moi, comment tu me trouves ? Il n'y a pas de miroir, ici. Je ne sais plus quelle tête j'ai depuis mes douze ans. Je pense que je dois pas être très agréable à regarder, avec ma peau. »

Elle jeta un regard un peu triste à ses avant-bras dont l'état de l'épiderme torturé faisait en effet de la peine à voir.

« Mais je crois que je plais assez à Matt'. Il n'a pas arrêté de me faire des propositions dégoûtantes depuis qu'il est ici. En même temps, je n'ai pas tellement de concurrence, sûrement. Et j'ai de la chance qu'il n'ait jamais essayé d'obtenir ça par la force. »

Eve haussa les épaules. Elle le décrivait avec un dégoût légèrement perceptible, néanmoins, outre mesure, elle ne paraissait pas entretenir de grief particulier à l'encontre du jeune homme.

« D'ailleurs, ça aurait peut-être pu arriver deux fois aujourd'hui, si t'avais pas été là ! Merci… »

Elle hésita, mais se pencha finalement vers Ernest pour déposer un baiser sur le côté de son museau ; ce qui ressemblait le plus à une joue. Elle s'en fichait pas mal que ce soit Loïc, qui, dans les faits, l'ait physiquement défendue. Son soutien psychologique, ce qui avait compté le plus et qui l'avait donc marqué en conséquence, avait certainement été l'hybride. Surtout, c'était lui qu'elle avait envie de remercier.

L'adolescent tenait en place, mais ses joues avaient encore davantage rosie.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 08 septembre 2014, 09:45:58
La révélation d’Eve sur le tatouage plongea Ernest dans une nerveuse perplexité. Que des zéros ? ARACHNEUM ? Mais qu’est-ce que cela voulait dire ? Le simple fait qu’il soit marqué selon une logique différente n’était pas anodin, loin de là. Carval était aux commandes. L’hybride rat serait-il traité à part ? Il se remémora les paroles de l’homme faisant l’accueil au labo. Non, décidément, le petit mutant n’aimait pas cela. Ne pouvant plus se tordre les doigts, sa main valide chercha machinalement autre chose à tripoter. Elle trouva l’extrémité de sa queue. Les réponses suivantes de la jeune femme permirent à Vermine de mettre de côté ses interrogations, ainsi que sa nervosité. Il mima une gêne amusée lorsque vint le baisée, puis déclara gentiment :

« C’est sûr qu’on ne peut que remarquer les traces qui te couvrent. Mais perso, ça me dégoute pas. Et puis, ces traces, c’est pas toi, c’est ce qu’on t’as fait. Tu as un jolie visage et surtout, tu es très sympa et c’est ça qui compte le plus. »

Il réfléchit un peu avant d’ajouter :

« Tu n’as rien à craindre de Matt’, c’est pas un violent, c’est un rusé. De ce que j’ai pu constaté de lui, il n’impose pas, il négocie. »

L’arrivée du vieil homme avec sa canne et son chapeau fit taire l’enfant-rat. En compagnie d’Eve, il le suivit dans l’ascenseur, puis dans leur chambre. Ce fut là qu’il aborda le sujet sensible de son passé, étape devenue indispensable.

« Ecoute Eve, je suppose que tu as entendu des trucs un peu intriguant sur mon compte, dans les douches. Et puis, tu as pu constaté que des gens me connaissaient. Je veux que tu saches qui je suis, pour... et bien pour que tu saches, histoire d’être honnête. Laisse-moi aller jusqu’au bout de mon récit et après, tu pourras poser toutes les questions que tu veux. »

Il s’exprimait avec un rien d’anxiété. Il alla s’assoir sur le lit, fixa un instant sa prothèse, puis laissa errer ses yeux sur le mur.

« Je t’avais parlé des quinze jours que j’ai passé avec le Docteur Carval. J’étais alors à l’Institut Charles Xavier. Cette expérience m’a fait perdre la boule bien comme il faut. J’en voulais au X-Men d’avoir mis tant de temps à me trouver. Je les pensais responsables de mes malheurs. C’était ridicule, mais j’étais dans mon délire. Alors j’ai fugué. J’ai rejoins la Confrérie. Là-bas, j’ai porté le pseudonyme de Prince Crapule, ou Crapule tout court. Là-bas, je suis devenu une vraie ordure. J’ai fait des trucs dont je suis pas fier, des meurtres, des violes entre autres. Un vrai déséquilibré... J’ai fini par me faire attraper par les forces de l’ordre. J’ai été condamné à la prison à perpétuité. La Confrérie m’a aidé à m’évader. Je serais resté l’un des leurs si un X-Men ne m’avait pas ramené de force à l’Institut. J’ai eu le choix entre retourner en prison ou accepter un programme de réinsertion sous haute surveillance. J’ai opté pour le programme. »

Il tourna la tête vers la jeune femme.

« Je m’étais rendu compte que je fonçais droit dans le mur. Je voulais me racheter, me faire pardonner, tout recommencer. Et j’étais en train d’y arriver. J’ai suivi des séances chez le psy, j’ai fait de gros progrès. J’ai recollé les morceaux. J’étais en train de retrouver une vie normal, enfin normal pour un mutant à l’Institut. Ecole, amis... Et puis hop, kidnapping et je me retrouve ici. On me considère donc comme un traître à la Confrérie. Ça au moins, j’en suis fier. Je préfère être dans cette cellule plutôt que d’être le surveillant. Fin bref, voilà, tu sais tout. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 09 septembre 2014, 07:39:53
La jeune fille parut d'abord assez surprise du ton solennel que prenait soudain Ernest pour parler de son passé. Toutefois, elle s'assit à côté du mutant sur le rebord du lit et se montra sagement attentive pendant toute la durée de son explication. Affichant d'abord un léger sourire en coin, se voulant détendu, celui-ci disparut lors de l'évocation du viol et des meurtres, pour se transformer en une expression plus mitigée. Au moment où l'hybride portait son regard sur elle, Eve se mordillait la lèvre inférieure, et avait le regard un peu perdu dans le vide.

Puis progressivement, son visage se détendit légèrement de nouveau. L'adolescente paraissait hésiter sur le comportement qu'elle devait adopter. La gravité mise par Ernest dans ses propos avait déteint sur elle, l'empêchant de prendre la chose d'une manière seulement frivole. Elle ne souriait plus, mais sa voix, devenue plus basse, était douce et ne véhiculait pas d'animosité.

« Ça fait rien, Ernest. T'es très sympa, c'est ça qui compte le plus, pas vrai ? » fit-elle en se levant.

La réponse avait quelque-chose d'automatique. Évitant de croiser directement le regard de son compagnon de cellule, elle se hissa sur son propre lit, au-dessus. Elle s'y allongea et resta silencieuse pendant quelques secondes. Elle réfléchit puis parla lentement, regardant le plafond de la cellule.

« Je crois pas que je puisse t'en vouloir pour ce que t'as fait avant. Il n'y a qu'à voir les gens ici, ils sont pas tous plus clairs. En plus tu as essayé de te racheter, et c'était sûrement dur. Et si tu es ici, c'est un peu comme si t'étais en prison, même si c'est pas pour les bonnes raisons. Du coup, que t'ai été criminel, on s'en fiche.

C'est honnête de me dire tout ça pour me prévenir. Y'avait rien qui t'y obligeait. Peut-être Loïc me l'aurait dit, mais il avait pas l'air de te détester et de vouloir balancer sur toi. Même si je pense que Matt et Mercure sont déjà au courant. Du coup, je suis presque sûre que je peux te faire confiance, et ça c'est bien.

En plus, t'as été très sympa, ça c'est vrai. Tu pourrais m’agresser tout-de-suite que je saurais pas me défendre. Mais tu me parles et tu joues à la place. Ça veut dire que t'es équilibré, pas vrai ? Imagine si je m'étais retrouvée avec le monstre ou la grosse brute… Du coup, je pense que je peux être contente d'être avec toi.

Alors le bilan est pas si dramatique, pas vrai ? »

Sa voix changea un peu, ses mots devenaient plus fluides mais plus chargés en émotion.

« Mais je sais que le labo ça peut te changer. Est-ce que tu risques pas de devenir différent s'ils te font du mal ? Si tes mauvais souvenirs ressortent ? Tu peux me promettre que tu me feras rien, dis ? Qu'on restera amis même si ça va mal ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 09 septembre 2014, 08:29:10
« Ouais, on restera amis même si ça va mal, promis ! » affirma Ernest avec plus de légèreté.

Eve avait plutôt bien pris la chose et il s’en félicitait. Il n’avait plus à craindre de révélation embarrassante. Avoir parlé dès le premier jour avait sûrement été la meilleure solution. Il fallait évacuer les problèmes quand ils se présentaient, ne pas attendre qu’ils s’accumulent, qu’ils s’amplifient. Quant à sa promesse, il la voulait sérieuse. Toutefois, au fond de lui-même, il ignorait s’il pourrait tenir sa parole. Car il ignorait ce que le labo ferait de lui. Il ne pouvait se contrôler totalement, qu’il le veuille ou non. Il y avait tout le poids de l’inconscient. Cependant, ne serait-ce que pour sa propre santé mental, il avait intérêt à ne pas toucher à la jeune femme. Rien que sa présence, rien que ses mots doux le rassuraient, l’apaisaient. Il reprit :

« Par contre, ne t’étonne pas si j’ai des nuits agitées. Je risque d’avoir droit à une triple dose de cauchemars. Je serais toi, je me confectionnerais déjà de quoi me boucher les oreilles. »

Son ton flirtait déjà avec la plaisanterie. Il tenait à détendre l’atmosphère. Il s’allongea à son tour, sans se recouvrir du drap. Avec la chaleur et l’humidité, il n’en avait pas besoin, surtout qu’il avait déjà son pelage. Il retira la prothèse, ne voulant pas se faire mal avec lors de son sommeil. Son moignon le picotait toujours. S’il y prenait garde, une foule de sensations étranges émanaient de sa main coupée. Il essaya de les ignorer.

« Bon. C’est quand l’extinction des feux ? »

Il sentait que pour l’instant, s’il se laissait aller, il sombrerait vite. Il profitait encore de la fraicheur de la douche. A moins qu’Eve avait des choses à lui dire, il ne laisserait pas passer l’occasion. Il fallait juste croiser les doigts pour que les cauchemars ne soient pas trop horribles.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 12 janvier 2015, 04:31:40
« T'inquiète pas, au pire, je pourrais toujours me reposer pendant la journée. C'est pas vraiment comme si j'avais quelque-chose d'important à faire d'ici là, de toute façon » répondit la jeune fille avec optimisme.

À l'évidence, ce que pouvait faire l'hybride endormi l'inquiétait un peu moins que ce qu'il aurait pu faire éveillé. La confirmation d'Ernest et son retour dans un registre plus joyeux avaient paru suffire à apaiser les craintes d'Eve. Elle se cala sur sa couche et s'autorisa à fermer les yeux. Le ton qu'elle prit pour répondre à son compagnon de cellule était serein.

« Bientôt. Les lumières s'éteignent toutes seules. Essaie de prendre des forces pour demain Ernest. »

La prédiction se révéla exacte : une dizaine de minutes plus tard, les éclairages se coupèrent, plongeant la cellule dans un noir complet et dans un silence presque aussi total. La respiration d'Eve était légèrement sifflante, révélant l'état sans doute un peu précaire de ses voies aériennes. Elle avait arrêté de parler, moins parce qu'elle était fatiguée que parce qu'elle était consciente que l'hybride n'avait pas intérêt à veiller trop tard.

Fin de la première partie.

Lexique des personnages et éléments notables rencontrés, par ordre chronologique. En italique les informations a priori ignorées par le personnage principal.

Conducteur de taxi. Habitué du transport de personnalité sensible. Conduit une voiture blanches aux vitres teintées. D'une politesse distante. Malgré le peu d'informations révélées à son sujet, on peut  estimer que l'Institut le considère comme digne de confiance. Il accompagne Ernest à sa consultation chez le psychologue Tobias Miller.

Tobias Miller. Psychologue d'Ernest, ami du professeur Xavier. Environ 30 ans, mince, cheveux bruns bouclés, lunettes rondes, air d'intellectuel propre sur lui. L'identité de Tobias se révélera en fait avoir été usurpée par le Mutant Blanc, qui l'utilise pour piéger Ernest. Le sort du véritable Tobias est inconnu.

William Schur. Collègue et ami d'enfance de Tobias. Son nom est aperçu sur la plaque à l'entrée du cabinet qu'il partage avec ce dernier. Il est supposé parti en vacances la veille de l'enlèvement d'Ernest.

Fertil&Co. Plus grosse entreprise étasunienne de production d'engrais. Le poison donné à Ernest était contenu dans une boîte estampillée du nom de la compagnie.

Le Mutant Blanc. Confrériste. Changeforme capable de persuader une partie de sa psyché qu'il est réellement la personne dont il dérobe la personnalité. D'un aspect âgé, albinos, de type plutôt hawaïen, décharné, la voix rauque. Après avoir piégé Ernest en se faisant passer pour Tobias Miller, il lui volera à son tour son identité, ainsi que sa montre.

Glucide. Confrériste. Colosse de deux mètres trente, d'une obésité surnaturelle, élocution saccadée. Peau élastique et recouverte d'une pellicule de gras. Travaille en duo avec Vein. Glucide déclare ressortir d'une infirmité de plusieurs années, conséquentes de son affrontement avec le X-men Béhémoth. Il participe au kidnapping d'Ernest.

Béhémoth (Links). X-Men. Ancien catcheur. Le Béhémoth est une figure presque légendaire pour les élèves de l'institut Xavier. Cette réputation doit beaucoup à sa disparition progressive des couloirs de l'institut. On ne sait pas exactement ce que fait le Béhémoth depuis plusieurs années.

Vein. Confrériste. Assez petit, peau pâle, regard sombre, canines développées. Manipule une énergie sombre qui lui permet au moins de matérialiser une griffe tranchante. Il se servira de ce pouvoir pour trancher la main d'Ernest et lui ôter sa montre. Il possède également un pouvoir de dématérialisation, qui lui a permis de transporter rapidement son compère Glucide et le mutant kidnappé.

Poissard. Surveillant. Vieil homme court sur pattes, rondouillard. Porte un petit chapeau rond et des lunettes. Paraît fasciné par les jeux de cartes. Fait en permanence référence à Dieu ou à la providence. Travaille avec la Requine. Eve pense qu'il a un pouvoir concernant la chance.

Requine (Peggy). Surveillante. Femme grande, la trentaine, particulièrement musclée, la peau bleue et luisante, la mâchoire hypertrophiée et projetée en avant. Porte une tenue en latex et une grande carabine à la ceinture, identifiée par Eve comme tirant des décharges électriques. Travaille avec Poissard, qu'elle semble exécrer.

Eve. Détenue 000002. Jeune fille d'environ 15 ans. Nez très pointu en trompette, peau blanche, pommettes hautes et un peu rouges, grand yeux bleus, longue chevelure blond-roux. Deux grains de beauté discrets, proches de son oreille droite. Corps délicat mais amaigri et recouvert de multiples traces de coupures. L'une des détenues les plus anciennes, suite à des pressions des confréristes sur son père, patron d'un gros groupe industriel. Posséderait un pouvoir de guérison qui lui aurait été volé par les expériences menées sur elle. Attirances zoophiles. Amicale, c'est la compagne de cellule d'Ernest.

La cellule. Environ 8 mètres carrés. Peinture blanche des murs dévorée par l'humidité. Il y fait très chaud de jour comme de nuit (30°C). Une fente grillagée sur la porte, à environ un mètre cinquante du sol, par laquelle sont servis les repas. Évier, toilettes à la turc, lits superposés.

Le tissu recyclé. Matériau dans lequel sont fabriqués les draps et les habits des détenus. Très léger, bleu clair. Se déchire comme du papier, rendant les pendaisons difficiles.

Ming. Détenue 000009. Amie d'Eve, détenue assez ancienne. Elle disparaît le jour de l'arrivée d'Ernest, son cri est entendu depuis sa cellule, provenant d'une pièce rarement utilisée. La nouvelle attristera Eve. Son sort n'est pas connu des autres prisonniers. La Requine prétend qu'elle était là depuis trop longtemps, mais refuse d'en révéler plus.

Le jeu des trois cailloux. Activité principale d'Eve et d'Ernest pendant les périodes d'attente. Il se joue avec trois morceaux de tissu par personne, en général prélevé aux draps. Combine une part de chance, de bluff et de tactique.

Couloir et ascenseur. Une vingtaine de cellules dont toutes ne sont peut-être pas pleines. Dans l'ascenseur, huit bouton sur deux colonnes, une trappe de sécurité et un interphone. D'après la Requine, l'étage du dessous abriterait des détenus plus dangereux dans des champs de contrition.

Réceptionniste. Scientifique. Homme d'une cinquantaine d'années. Cheveux blonds et courts. Se charge de l’accueil derrière un pupitre.

JANUS. Intelligence artificielle se manifestant dans la salle éponyme par deux diodes bleues. Elle pose une série de questions à Ernest alors que celui-ci est prisonnier d'un fauteuil. Son détecteur de mensonges menace de sectionner des doigts en cas de mauvaise réponse. Finalement, elle marque à l'azote Ernest de son numéro : . Janus serait en fait piloté à tour de rôle par les différents scientifiques.

Richard Carval. Scientifique. Nouveau directeur. D'après la Requine, il est encore plus cruel que le précédent. D'après le réceptionniste, il porte un intérêt particulier à Ernest. Les autres scientifiques semblent le craindre. Le passé de Carval est trouble, mais les souvenirs terrifiants de deux semaines d'une ancienne détention lient Ernest à cet homme.

Les douches. Espace carrelé bleu terne comprenant quatre pièces, dont un placard contenant des sacs-poubelle, des toilettes et une salle de douche commune de 20 mètres carrés. Une légère moisissure noircit les joins.

Matt. Détenu 000014. Environ 17 ans. Visage agréable, cheveux blonds mi-longs, yeux verts, aucune pilosité, air un peu précieux mais sympathique et séduisant. Tempérament joueur et intelligent. Matt possède un pouvoir de téléportation qui lui donne beaucoup d'importance dans l'écosystème des détenus : il est capable d'amener de l'extérieur n'importe quel objet qu'il peut saisir avec une main. Se fait payer en localisations d'objets intéressants, ou en faveurs sexuelles. Ce commerce est toléré par les gardiens. Il fournira à Ernest sa prothèse, et lui avouera qu'un de ses objectifs est d'obtenir les charmes d'Eve. Eve, elle, pense qu'il s'agit d'un pervers, et l'évite.

Karen. Détenue 000024. Jeune femme latine, sud-américaine. Corps sculptural, longue chevelure noire. Karen a démontré des capacités d'hydrokinésie, dont elle se sert pour repousser le bossu. L'appartement de son frère contenait de la coke, information qu'elle a donnée à Loïc.

Loïc. Détenu 000026. Environ 20 ans, assez athlétique. Tatouage de tigre sur l'omoplate gauche. Visage doux, entouré de cheveux noirs, barbe clairsemée. Ancien élève de l'institut Xavier, il a reconnu Ernest sans paraître hostile à son égard. Déclare avoir été capturé au cours d'une mission. Capable de faire émerger des lames d'os de son corps, voire de les projeter. Il n'hésite pas en faire usage pour passer à tabac avec hargne le Bossu lorsque celui-ci s'en prend à Eve.

Mercure. Détenu 000021. Jeune homme de type japonais. Bon ami de Loïc, dont il partage la cellule.

Crazy. Détenue 000015. Jeune femme, cheveux rasés et peau parsemée d'entailles. Mutique depuis des expériences menées sur elle. Recroquevillée sous sa douche, Matt signale qu'elle était auparavant sa meilleure cliente.

Andrej. Détenu 000032. Mutant ukrainien. Trentenaire assez petit mais musclé, barbe noire, tatouages partout sur le corps, peu avenant. Présent dans la pièce de douche, Matt conseille à Ernest de ne pas trop le déranger.

Bossu et Margaret. Détenu 000034. Mutant courbé et difforme, sourd, à l'intelligence très limitée. Il semble posséder une seconde personnalité télépathe et beaucoup plus alerte, Margaret. Il tentera d'agresser successivement Karen et Eve avant d'être violemment rossé par Loïc.

Carlos. Détenu. Immense homme noir, montagne de muscles. Barbe épaisse et regard dur. À été mordu par Ernest dans le passé, ce qui l'a, au moins temporairement, transformé en bête enragée. Ancien confrériste, Carlos perpétré un attentat contre une église. Malgré les événements passés, il demande simplement de l'aider à Ernest pour s'évader.

Prothèse. Obtenue dans un hôpital par Matt, il s'agit d'un objet constitué de trois tiges métalliques. Légère, aspect médical, se referme grâce à un scratch. Permet de reproduire une pince rudimentaire.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 12 janvier 2015, 16:04:57
Partie 2

Le ronron de la ventilation... le froid de la cellule... la dureté du sol métallique... Ernest rouvrit les yeux, gémit, remua... Il était de retour dans le cube, cette cage de verre qui lui laissait à peine deux mètres carré d’espace vital. Par-delà la surface transparente et renforcé de sa prison apparaissait la salle du laboratoire baignée de pénombre. En haut d’un mur obscure, une veilleuse rouge comme un œil scrutateur. Ce devait encore être la nuit. L’hybride se redressa sur son séant. Il était nu. Cela faisait dès jours qu’il l’était. Ici, il n’était qu’un rat, qu’un cobaye... Il lorgna furtivement du côté du bras mécanique qui occupait un angle du cube. Il craignait de le voir s’animer, mais tout était calme, immobile. Vermine bailla à s’en décrocher la mâchoire. Il se gratta ensuite nerveusement l’oreille. Nombreux étaient ses tics. Il tremblait toujours, sursautait pour un rien. La peur lui nouait si souvent les tripes. Finalement, il se recoucha à même le métal. Ce fut cet instant que choisit la lumière pour inonder la pièce, crue, blafarde, accompagnée d’un bref mais strident signal. Ernest fut ébloui. Par réflexe, il se recroquevilla. Déjà il était arrosé par l’eau puant le désinfectant. Il frissonna, tâchant au mieux de s’abriter la tête. Une porte s’ouvrit, Carval entra, traversa la pièce, un dossier sous le bras. C’était une nouvelle journée qui commençait... Un nouveau cauchemar...

Maintenant il courait sur le tapis roulant. C’était l’heure d’entretien physique. Ayant été sage, il avait obtenu l’autorisation de se tenir debout, comme un homme. Sinon c’était à quatre pattes et avec une cadence d’enfer. Le son de ses griffes cliquetant sur la matière synthétique rythmait son effort. Curieusement, il n’entendait que cela. Il avait chaud, si chaud à présent. La fatigue alourdissaient ses membres. Tout d’un coup, des hurlements lui firent tourner la tête. Une personne se tordait de douleur à mesure que son corps enflait, boursoufflait. Il songea un instant s’excuser. Il savait que c’était à cause de lui. On l’avait forcé à la mordre pour lui inoculer l’Altérium. Carval, impassible, observait la scène, notant chaque détail sur un calepin. Le scientifique intima au rat de courir plus vite. Le corps du supplicier gonflait, gonflait et Ernest fatiguait, fatiguait... La chaleur était épouvantable. L’humidité aussi. Derrière l’hybride, à la base du tapis roulant, se trouvait un grillage électrifié qui se mit à crépiter comme pour rappeler sa présence, sa menace. Inéluctablement, le cobaye s’en rapprochait. Il suait à grosses gouttes, il n’en pouvait plus. Il voulait mais ne pouvait accélérer. Alors il toucha le grillage, prit une violante décharge. Le choc le fit bondir en avant, ce qui lui offrit un peu de répits. A côté de lui, les hurlements allaient croissant. Il réalisa, horrifié, que cette personne qui gonflait, c’était Eve. A cet instant précis, la jeune fille éclata avec un bruit écœurant. Ses entrailles retapissèrent les murs en rouge. Un morceau d’intestin s’enroula tel un serpent autour des chevilles d’Ernest qui tomba à la renverse. Il se vit alors précipité contre le grillage.  Il voulut se protéger d’une main mais il découvrit à la place une prothèse à l’usage si peu pratique. Une terrible décharge électrique se propagea à partir de son moignon, lui arrachant un cri tout aussi horrible.

Le noir, le silence...

Ernest, assit sur son lit, reprenait doucement ses esprits. Tout cela n’avait été qu’un mauvais songe. Il se le répétait à voix basse pour s’en convaincre. Peu à peu, il se calma. L’air était tiède, moite. L’hybride avait réellement chaud ce qui, à n’en point douter, avait influencé son cauchemar. Il aurait bien retiré les frusques dont il était vêtu, néanmoins il n’en fit rien. Pas ici, pas dans ce complexe scientifique... Avec appréhension, il palpa son moignon. Celui-ci le lançait, mais de moins en moins. Peut-être avait-il, lors de son sommeil agité, prit une position inconfortable. Il se laissa retomber sur le matelas. Il espérait ne pas avoir réveillé Eve. C’était étrange qu’il ait rêvé d’elle. Sans doute craignait-il de lui faire du mal. Il soupira et s’efforça de se rendormir.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 13 janvier 2015, 17:56:18
Les cauchemars d’Ernest réduisirent en effet les chances qu’avaient Eve de passer une bonne nuit. Toutefois, celle-ci se garda bien de tenter de le réveiller, et supporta le sommeil agité de son compagnon de cellule. Elle avait envisagé de descendre pour le calmer si ses mauvais rêves devenaient trop violents, mais ce ne fut finalement pas nécessaire. L’hybride garda une assez bonne maîtrise de ses terreurs nocturnes pour ne pas trop inquiéter la jeune fille.  De plus, le fait que le mutant se trouve sur la couche la plus basse réduisait les risques de mauvaise chute.

Huit heures précises après leur disparition, les lumières illuminèrent de nouveau la cellule, annonçant le retour d’un matin invérifiable. Au-dessus d’Ernest, Eve poussa un discret gémissement et fit légèrement remuer le lit superposé en s’étirant. Laissant passer quelques minutes durant lesquelles elle replongea par intermittence dans un semi-sommeil, elle finit par tenter à destination de l’occupant du dessous un :

« Pas trop mal dormi ? »

Encore quelques minutes, et elle descendit. Son visage était un peu fatigué, elle avait de légères cernes sous les yeux... mais elle avait toujours eu un air un peu maladif depuis le premier jour, ce qui rendait en définitive difficile l’estimation de la qualité de la nuit qu’elle venait de passer. La jeune fille sourit gentiment.

« Moi, ça a été. »

Elle se dirigea vers le robinet et but un peu d’eau. Au même moment, la porte s’ouvrit. La Requine, l’air mal réveillée, déposa par terre un plateau moins garni qu’à l’habitude. Elle annonça, la voix engourdie par le sommeil :

« Raton à jeun ce matin. ‘vous fait confiance. Reviens te chercher dans dix minutes. »

Eve ramassa le plateau, qui ne contenait en effet une unique portion – une tranche d’un fruit à la chair jaune et juteuse ressemblant à un ananas – pour une seule personne. Elle s’assit au pied du matelas d’Ernest. Elle rompit l’aliment en deux.

« On peut partager. Ils sauront rien de toute façon. »

Elle tendit une des deux demi-parts à son compagnon de cellule et avala l'autre en quelques bouchées. Le fruit avait en effet la même texture que l'ananas, mais était plus âcre. Comme les autres repas servis jusqu'ici, il n'était pas possible d'identifier les ingrédients, qui semblaient issus, si ce n'était d'un autre monde, au moins d'un autre continent.

« S'ils te veulent à jeun, c'est qu'ils vont te faire une prise de sang, je pense. C'est pas le plus désagréable. Peut-être ils te feront faire quelques autres tests physiques aussi. Tu vas t'en sortir ! »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 13 janvier 2015, 19:50:56
« Un peu agité, mais je m’attendais à pire... » répondit Ernest, d’une voix encore marquée par le sommeil.

Il s’étira, bailla et se redressa en position assise. Après avoir observé un instant le visage de la jeune femme, il détailla son lit dont le drap était encore plus désordonné que la veille. Un accros sur le matelas témoignait d’une griffure malencontreuse. C’était ce qui arrivait lorsqu’on avait des griffes et des cauchemars. L’hybride n’avait pas son pareil pour massacrer la literie. De ses mauvais songes, il ne lui restait que des lambeaux, des images vagues, des impressions qui déjà se fondaient dans des souvenirs plus réel et plus nets. Il n’y prêta pas d’attention, désireux de laisser à la nuit son lot d’angoisses. La journée, il se devait d’avoir la tête froide.

Il avait beaucoup changé depuis les quinze jours passés dans le cube de verre. Il n’était plus un gamin, il avait appris à se battre, à tuer même. Il savait se contrôler dans le feu de l’action. On le considérait comme inoffensif, sa présence à cet étage le prouvait. Il pouvait, il devait en tirer profit au moment opportun. La venue de la requine l’extirpa de ses réflexions. Reportant son attention sur Eve, il refusa la portion de son petit déjeuné qu’elle lui proposait.

« Non, ce n’est pas une bonne idée. Ils ont au contraire toutes les chances de le savoir. Manger, ça peut fausser les analyses. Et crois-moi, c’est le genre de trucs qui met en rogne Carval. Il ne supporte pas de perdre du temps. Il me sanctionnera. Il te sanctionnera. Je préfère rester à jeun. »

Il se leva pour aller pisser. Son objectif, pour l’instant, était de ne surtout pas dégrader sa situation. Les infractions étaient donc à éviter. Tout en soulageant sa vessie, il ajouta :

« Et puis, tu dois reprendre des forces. Tu as un pouvoir à récupérer. Si tu le récupère, tu pourras me rendre ma main. »

Il n’avait pas l’intention de prendre sa prothèse. Autant la laisser ici. Il n’avait non plus pas l’intention d’évoquer avec la jeune femme le petit arrangement conclu dans les douches et qui la concernait. Chaque chose en son temps... Dix minutes, cela allait passer vite. Tant mieux en un sens. Attendre un passage au labo, c’était tout sauf agréable.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 14 janvier 2015, 06:50:43
« T'as raison, le nouveau docteur est pire que les autres. Mieux vaut ne pas l'énerver » admit Eve en hochant la tête et en croquant dans la deuxième demi-part.

Elle ne savait visiblement pas trop quoi dire d'autre, et devait appréhender presque autant qu'Ernest les dix minutes qui suivirent. Une fois son repas terminé, elle repoussa le plateau sur le côté. Elle resta silencieuse un moment.

« Je suis pas sûre que je récupérerais mon pouvoir un jour. J'ai pas eu d'amélioration depuis au moins une semaine. Peut-être ils ont tout pris » fit-elle du bout des lèvres.

La porte s'ouvrit de nouveau, et la gardienne mis un pied dans la cellule. Elle n'avait pas l'air beaucoup plus éveillée que lors de sa première apparition. Elle bailla.

« On y va mon rat.
– Bon courage Ernest. »

La Requine était peut-être encore moins vigilante que d'habitude : elle ne touchait pas l'hybride et ne le surveillait que d'un en apparence distrait. Lorsqu'il fut sortit, elle referma la porte sur Eve et jeta un regard mauvais à l'autre gardien, qui somnolait sur sa chaise. Elle leva légèrement la voix.

« Au secours raton m'attaque !
– Grand Dieu » gémit le vieil homme en sursautant.

Le mouvement de surprise qui l'agita le fit basculer en arrière. Réajustant seulement sa position sur le sol, il ne chercha pas à se relever immédiatement, mais parut passablement énervé par le réveil soudain.

« Mademoiselle, on ne fait pas ce genre de frayeur à quelqu'un de mon âge.
– À l'hospice vieux con, c'est là que tu devrais faire tes siestes. »

Elle lui tourna le dos et fit signe à Ernest de la suivre. Elle appela l'ascenseur et appuya sur un bouton, le troisième sur la colonne de gauche, qu'Ernest put se souvenir correspondant à l'étage des laboratoires. Le visage du réceptionniste, le même que la dernière fois – un cinquantenaire blond – lui confirma qu'il s'agissait bien du même étage. Il leur annonça immédiatement :

« Portu… »

La Requine trébucha sur la pourtant infime rainure séparant la cage d'ascenseur et le sol, s'étalant de tout son long. Le scientifique pouffa, la gardienne pesta. Aussitôt elle se releva sans utiliser ses bras, en une contorsion assez impressionnante qui ne laissait aucun doute sur sa souplesse et sa puissance musculaire. Le bout de son museau, la protubérance qui faisait office de nez sur son visage déformé, saignait un peu.

« Ta gueule.
– Portunus. »

Le réceptionniste se garda d'en rajouter et la Requine mena Ernest dans le couloir de gauche. Les mêmes deux portes que lors du précédent passage : PORTUNUS, JANUS. Cette fois, ce fut la première. Peggy laissa l'hybride de l'autre côté et referma, ajoutant seulement un conseil simple.

« Sois sage. »

La pièce était un peu plus grande que celle de l'intelligence artificielle, plus meublée aussi. En réalité, la couche en hauteur recouverte de plastique et l'ordinateur dans le fond la faisaient ressembler assez à un cabinet médical classique. Elle était éclairée par deux rangées de néons blafards au plafond. Plusieurs rangées d'armoires blanches sur les côtés ne détonnaient pas vraiment.

Une femme en blouse, entre deux âges, une queue de cheval châtain tirée en arrière, était présente. Elle était d'un physique assez quelconque, qui allait cependant bien avec sa fonction de médecin, des lunettes rectangulaires aux montures noires sur le nez. Ernest pouvait se souvenir l'avoir vue aux commandes d'un chariot de seringues la veille. Elle portait des gants verts assez épais, mais pas d'autre protection. Elle se leva du bureau auquel elle était assise.

« Bonjour Ernest, je suis le docteur Qwelbel. On va s'assurer que tu es en bonne santé, d'accord ? Ça ne devrait pas être trop long. Enlève tes vêtements et allonge-toi sur le lit, s'il te plaît. »

Sa voix était raisonnablement douce et assez maternante. Elle n'avait pas l'air trop stressée.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 14 janvier 2015, 12:50:37
Face aux doutes d’Eve, Ernest se montra optimiste. Il était allé retourner s’assoir à côté d’elle et lui assura d’un ton docte :

« Une semaine ? C’est rien du tout. Ce genre de choses peut prendre beaucoup de temps. Je ne dis pas que ton pouvoir va forcément revenir. Néanmoins, si tu veux mettre toutes les chances de ton côté, pense à t’entraîner régulièrement. Tu n’as rien à perdre, tout à gagner. »

La jeune femme ne manquait ni de temps, ni de blessures pour s’exercer. Lorsque la gardienne vint chercher l’hybride, celui-ci obtempéra avec calme. Il rigola quand elle fit chuter son collègue à cause de sa blague. Dans l’ascenseur, il eut même quelques mots aimables pour elle. Il tenait à la mettre dans son sac. Ici, tout était affaire de relations, il l’avait tout de suite compris.

« Et bien, vous avez l’air d’avoir passé une nuit difficile. J’espère que ce n’est pas à cause de moi. Faut pas hésiter à me réveiller quand je suis en proie à des terreurs nocturnes. »

La chute de la requine manqua de le faire à nouveau rire. Il s’en abstint. Le voilà maintenant dans la salle Portunus. Celle-ci avait tout d’un cabinet de médecin classique, et la doctoresse qui s’y tenait n’avait rien d’extraordinaire. N’en demeurait pas moins que le petit mutant sentait son stress monter en flèche. Il n’aimait pas l’air de Qwelbel. Elle le prenait pour un môme. Qui avait-il derrière ce masque mielleux ? Rien de beau, sans quoi elle travaillerait ailleurs.

« Bonjour », marmonna simplement le rat, plus distant qu’il ne l’aurait souhaité.

Il était difficile de toujours se contrôler, surtout dans un environnement propre à nourrir tant de craintes et de méfiances. Ernest s’en voulu toutefois. Il se rattrapa en obéissant sur le champ. Avec une seule main, il galéra un peu à se défaire de son tee-shirt sans manche. Pour le pantalon, ce fut plus simple, il n’eut qu’à tirer dessus pour le faire glisser au sol. Tout en essayant de se convaincre qu’il n’allait subir qu’un basique examen médical, il grimpa sur la couche plastifiée et s’y allongea. Théoriquement, il disposait d’une santé de fer. Non seulement l’Altérium le protégeait des maladies et infections, mais il avait jusqu’à présent bénéficié d’une importante activité sportive comme en témoignait sa musculature visible sous le pelage.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 15 janvier 2015, 09:59:29
La doctoresse consulta brièvement son écran et s'avança tranquillement vers Ernest. Un petit morceau rond de plastique noir au niveau de son col ressemblait à un microphone. Arrivée près de l'hybride allongé, elle posa directement ses mains gantées sur ses épaules et se pencha.

« Alors Ernest, comment se passe ton séjour ici ? » l'interrogea-t-elle, alors qu'elle débutait l'examen. « Tu t'es fait des amis ? »

Elle laissa vagabonder ses doigts dans la fourrure grise, arpentant des épaules aux bras, puis revenant sur le torse et descendant. Elle auscultait en la frôlant la peau sous le pelage, s'arrêtant à la moindre cicatrice, et démêlant au passage les nœuds lorsqu'elle en trouvait.

« Des antécédents familiaux ? Des parents mutants ? »

Dans ses gestes, Qwelbel prenait son temps, et agissait avec la même douceur qu'un maître caressant un animal domestique. Seul le plastique de ses gants était un peu froide.

« Est-ce qu'il t'arrive de te brosser parfois ? Si tu veux, je dois pouvoir te donner de quoi. Tu ne te toilettes pas avec ta langue, non ? J'ai rencontré des hybrides qui faisaient ça. Attentions aux boules de poils, hein ?! Huhuhu. »

Lui faisant lever un bras, elle palpa l’aisselle, puis fit de même avec le second membre. Elle s'intéressa à l'intérieur de ses oreilles et reprit d'un ton plus passionné :

« La plupart des praticiens sont incapables de comprendre les mutants animaux dans ce qu'ils ont de particulier. Mais on m'a prévenu que tu n'étais pas un hybride comme les autres. Peut-être même pas un hybride du tout, si j'ai bien compris. J'ai insisté pour pouvoir t'examiner moi-même, malgré ça. C'est que je pense être la seule qualifiée pour ça. Retourne toi s'il te plaît. »

Elle saisit entre ses mains la queue rose et la parcourut brièvement, avant d'appuyer assez fermement au niveau des hanches pour cambrer Ernest et observer la posture du dos. Il y avait quelque-chose d'à la fois voyeur et tendre dans son regard. Imperturbable, elle continua.

« Assis s'il te plaît. C'est aussi ça qui fait la beauté de votre genre. La multiplicité des causes ! Un de mes patients est un mutant métamorphe bloqué sous la forme d'une souris, figure toi. Il fait parti des spécimens que j'ai mis à disposition de Carval, d'ailleurs, tu le rencontreras sûrement… Il est un peu plus jeune que toi, j'espère que vous deviendrez vite copains. Ouvre la bouche ? Dommage que Carval… »

Qwelbel s'interrompit et regarda d'un air sévère son micro. Elle se servit d'une petite lampe tubulaire pour examiner l'intérieur de la gorge et l'état des dents. La même lampe servit ensuite à tester la rétractation des pupilles.

« Enfin, tout pour la science, on trouve ses sujets où on peut. Je suis enthousiaste. Tu es un spécimen beaucoup plus unique : difficile à cloner correctement. Ça te rend précieux, évidemment. Ah, mais je l'aurais presque manqué. »

Ses yeux s'étaient arrêtés sur l'endroit où aurait dû se trouver la main manquante du mutant. Elle défit le bandage.

« Ben alors, comment tu t'es fait ça, Ernest ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 15 janvier 2015, 15:02:13
La première impression d’Ernest sur Qwelbel ne se vérifia pas. Il n’avait sans doute pas à faire à une sadique dissimulée sous un masque d’hypocrisie. Non, il se pouvait que la doctoresse soit, à sa façon, réellement bien intentionnée. En fait, elle semblait passablement déconnectée de la réalité. Elle officiait dans un cauchemardesque complexe scientifique sous la houlette d’une organisation terroriste et elle était capable de demander au prisonnier si son séjour se passait bien. Ahurissant ! Si le mutant ne s’était pas contrôlé, il aurait fait preuve de ses sarcasmes corrosifs. C’aurait été une grosse erreur. Peut-être pouvait-il bien s’entendre avec cette femme s’il y mettait du sien. Il lui fallait des alliés, pas des ennemis. Il se laissa donc examiner, tel un animal, sans réticence apparente. Ce n’était de toute façon pas spécialement désagréable. Il s’appliqua également à répondre aux questions. Le probable micro ne lui avait pas échappé. Il choisit donc ses mots avec soin.

« Ho, je n’ai pas trop à me plaindre. Je n’ai pas encore noué des amitiés dignes de ce nom, mais je m’efforce d’être en bon terme avec tout le monde. »

Aucune mention d’Eve. Il ne voulait surtout pas la mettre en avant. Aucun mensonge. Il aurait été trop simple de les repérer.

« Du côté de mon père, aucun antécédent. Ça a été vérifié. Du côté de ma mère, j’en sais rien, on est un peu en froid voyez-vous. »

Doux euphémisme. Il exécrait Ashley Willard à peu près autant que Carval lui-même. Elle l’avait reniée, rejeté. Jamais il ne pourrait le lui pardonner !

« Non, je ne me toilette pas avec la langue. Mais si vous pouvez me procurer une brosse, je ne suis pas contre. ... Je ne suis pas catégorisé "hybride" au sens strict du terme car les effets premiers de ma mutation n’ont strictement rien à voir avec l’hybridation animale. Mon évolution physique n’est qu’un effet secondaire. Et elle n’est pas conjuguée avec un impact comportemental. Je ressemble à un rat, je n’en suis pas un. »

A le voir, n’importe qui aurait juré le contraire. La nuance génétique était, dans les faits, pratiquement impossible à remarquer, d’autant plus impossible que lors de ses moments de folie ou de négligence, le jeune Lenoir était plus bestial que la plupart des hybrides. La suite des propos de Qwelbel attira particulièrement son attention. Un métamorphe, plus jeune que lui, bloqué sous sa forme de souris ? La description correspondait parfaitement à Tchézaré Nyx, l’un des rares individus en ce bas monde qui avait croisé sa route sans avoir à le regretter. Et pour cause, Ernest l’avait trouvé dans les égouts de New-York et décidé de l’aider. Ils étaient même devenus bons amis. Et puis, sans prévenir, la souris s’était volatilisée. Le mutant rat comprenait désormais pourquoi. Il n’eut guère l’occasion d’en être peiné car déjà une nouvelle information captait son intérêt. Dès que la doctoresse termina de lui examiner la gueule, il reprit la parole.

« J’ai hâte de croiser ce métamorphe. Mais que disiez-vous au sujet du clonage ? »

Carval n’avait quand même pas tenté de le cloner ! Si ? Il devait être assez timbré pour cela. L’idée le mit particulièrement mal à l’aise. C’était une perspective à laquelle il ne s’était pas du tout préparé. Il se rassura en se disant que rien n’était sûr, il devait se faire un film.

« La main, je l’ai perdu lors de mon kidnapping. J’aimerais bien la récupérer d’ailleurs. Il n’y a pas un mutant doué de régénération dans le personnel ? »

Il ne perdait rien à demander.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 29 janvier 2015, 21:42:20
Qwelbel resta de marbre en apprenant la façon dont l'adolescent avait perdu sa main. Son regard demeura fixe quelques secondes, puis elle dit, d'un ton absolument neutre, en rangeant sa lampe de poche :

« Je vais te nettoyer ça. Je sais, tu es immunisé aux infections, mais enfin… »

Elle alla chercher une compresse, du désinfectant et un rouleau de tissu blanc. Après avoir pulvérisé le liquide antiseptique sur le premier dispositif, elle tamponna doucement le moignon. Puis elle découpa avec des petits ciseaux de quoi faire un bandage. Ce faisant, elle déblatérait :

« Un membre du personnel doué de régénération ? Oh, ce serait utile, Ernest. Mais non, nous n'avons pas ça. En revanche, nous avons une puissante substance curative extraite d'un mutant. Malheureusement, elle est en quantité limitée. On ne sait pas exactement quand on en aura d'autre. De toute façon, Carval a mis ce projet de côté lorsqu'il a vu que ça ne réglait pas son problème. »

Même si elle jetait de temps à autre des regards à son micro, le ton de Qwelbel était assez insouciant. Elle ne paraissait pas se rendre compte qu'elle donnait des informations à Ernest – ou si elle s'en rendait compte, elle le faisait avec un naturel qui indiquait qu'elle n'avait pas reçu de consigne particulière à ce sujet.

« Oui, le clonage, évidemment. Mais de ça, je ne peux pas dire grand-chose. Je ne suis pas une experte, ce n'est pas ma branche ! J'ai fait des études de médecine vétérinaire. Le dispositif arrivé avec Carval est beaucoup trop compliqué, du reste. »

Après avoir terminé le bandage, qui était bien plus beau que le premier, elle s'éloigna une nouvelle fois, laissant Ernest se conforter dans sa position assise. Elle revint avec une boîte comportant au moins une seringue assez large et un autre petit ciseau courbé, visibles car ils qui dépassaient. Elle en extrait un coton-tige.

« Tu pourrais faire « aaah », Ernest ? » fit-elle en lui enfournant le bâtonnet dans la bouche, et en grattant un peu l'intérieur de ses joues avec.

Cela fait, elle rangea le coton-tige dans une petite pochette en plastique translucide, et attrapa le ciseau. Toujours avec douceur, elle s'en servit pour couper le bout d'une griffe, qu'elle rangea également dans un étui individuel. Puis ce fut au tour de la seringue.

« Tu as déjà fait des prises de sang, non ? Ça ne fait pas mal, ne t'inquiète pas. Pense à quelque-chose de joyeux ! »

Elle désinfecta brièvement la zone du coude retenue pour le prélèvement – encore par habitude, sans doute – profitant du liquide pour écarter un peu la fourrure, puis piqua et aspira quelques gouttes. Elle nettoya encore le sang qui perlait.

« Voilà, c'est fini ! Enfin, il reste encore deux prélèvements non-invasifs à effectuer… »

Elle prit deux fioles, l'une légèrement plus volumineuse que l'autre, dans sa mallette, et les tendit à Ernest.

« Alors, la plus grosse est pour l'urine, l'autre pour le sperme. Je te conseille de remplir la première en premier » indiqua-t-elle sans intonation particulière. « Je te laisse faire. »

Même si la phrase précédente aurait pu signifier qu'elle allait s'éloigner et laisser Ernest seul à son affaire, elle ne recula que d'un pas. Elle appuya une de ses mains sur le sommet d'une étagère basse, et s'adressant toujours à Ernest, elle prononça quelques mots supplémentaires.

« Nous disposons déjà ces données, tu sais, mais Carval veut savoir si la concentration s'est altérée de quelque manière. Il paraîtrait que ça peut tout changer. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 29 janvier 2015, 23:58:17
Ernest ne perdait pas une miette de ce que Qwelbel disait. Il faisait également attention à son ton, à ses réactions, tâchant de la cerner le plus justement possible. L’art d’une communication réussie passait par l’adaptation. Plus il connaissait ses interlocuteurs, plus il pouvait s’adapter à eux. Apparemment, il ne fallait pas trop espérer apitoyer la doctoresse. La vue d’une main coupée ne l’avait pas émue. En travaillant ici, elle avait dû s’accoutumer aux mutilations en tout genre. Et puis, encore une fois, sa présence dans le complexe prouvait que ce n’était pas un modèle de vertu. Tant pis... La puissante substance curative, le jeune mutant avait sa petite idée sur sa provenance : Eve. Ses chances pour en obtenir étaient minces, voir inexistantes, sauf s’il pouvait prouver qu’être manchot entravait la bonne marche des expériences. Pas facile... Il fallait croiser les doigts pour que sa collègue de cellules récupère son pouvoir. Concernant le clonage, rien de neuf. C’était trop vague pour savoir ce à quoi Carval était parvenu et qu’est-ce qu’il visait. Seule certitude, l’Altérium devait toujours l’obséder.

Durant les prélèvements, l’hybride rat demeura silencieux. Il se laissait toujours manipuler docilement. Il finit par se demander dans quel état se trouvait Nyx. Il avait vraiment beaucoup de mal à l’imaginer dans cet univers si dur, lui qui était si sensible. Nyx face au docteur Carval... Pauvre souris...

La vue des deux flacons, et surtout la consigne qui s’y rapportait, chassèrent les pensées d’Ernest. Il les prit, une expression ennuyée se peignant déjà sur sa figure. La prise de sang, il s’y était attendu. La prise d’urine, non. La prise de sperme, encore moins. Une prise de salive aurait été moins problématique. Beaucoup moins, d’autant plus qu’il comprit tout de suite qu’il ne pouvait pas compter sur la moindre intimité. Ici, dans ce cabinet, il était un animal avant d’être un cobaye ou un prisonnier.
« Ha c’est bête, j’ai fait pipi avant de venir. J’ai peur d’avoir la vessie vide. Si j’avais su... »
Il déposa les flacons sur la couche plastifiée puis fourragea dans son pelage pour en dégager son pénis. Avec son moignon, il calla son sexe contre une cuisse, le temps qu’il puisse aller chercher de sa main unique le gros flacon.
« C’est fou, avec une seule main, tout est plus difficile... »
Une fois en position, il n’eut plus qu’à se forcer. Il lui fallut près de trois minutes pour que quelques malheureuses gouttes finissent par tomber. Il se força encore, sans résultat. Alors il passa à l’autre flacon. Il marqua une nette hésitation, fixa Qwelbel...
« Excusez-moi, je crois que je vais mieux y arriver comme ça. »
Il se leva sur le lit, tourna le dos à la doctoresse et s’agenouilla. Une fois fait, il plaça le flacon entre ses genoux et, tout en se jurant que tôt ou tard il trouverait un moyen de se venger de l’ensemble du personnel, il se masturba vigoureusement. Là encore, ce ne fut pas rapide, la situation était loin d’être idéale. La verge en érection, le petit mutant ne sentait rien venir. Il ferma les yeux et essaya de penser à ses magasines pornos. Une image, dans sa tête, fit tilt, engendrant l’excitation. C’était celle d’une blonde au corps sculptural, dans le plus simple appareil, qui lui faisait un massage très osé. Dans son dos, sa queue frétilla. Anticipant l’éjaculation, il visa le flacon.
« Voilà », fit-il en tendant sa semence.
Il était un peu essoufflé et une odeur évocatrice flottait dans l’air.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 05 février 2015, 21:47:56
Les bras croisés, Qwelbel regarda faire Ernest, sans que son visage exprime d'émotion particulière. Elle observait attentivement, toutefois, et ses yeux ne quittèrent pas le dos du mutant lorsque celui-ci se retourna, dandinant périodiquement de gauche à droite, par un biais inconscient sans doute, pour suivre les mouvements de sa queue. Elle attendit sans un mot de plus que les prélèvement soient terminés, affichant juste un sourire ravi quand la chose fut faite. Elle rangea les flacons dans sa mallette et les dénombra.

« Pas besoin de plus de quantité : sang, salive, urine, sperme. Bien joué Ernest ! On peut passer à la suite, ça ne sera plus très long. Suis-moi maintenant s'il te plaît. Tu te rhabilleras plus tard. »

Elle ouvrit un des tiroirs et en sortit un appareil avec un écran LCD de la taille d'une carte de crédit, duquel pendait deux fils, reliés à des électrodes. Puis elle se dirigea vers le fond du cabinet, et ouvrit une porte de l'autre côté du bureau, dont la poignée blanche était cachée par l'écran d'ordinateur.

Elle débouchait sur une seconde salle, plus petite mais également plus équipée. Rien n'était cependant très effrayant : il y avait beaucoup de matériel qui n'aurait pas dépareillé dans un gymnase. Qwelbel, sa petite boîte toujours à la main, désigna un tapis roulant destiné à pratiquer la course en intérieur. Il n'avait pas de point d'appui, étant relié à un terminal situé sur le côté, vers lequel la doctoresse se dirigea pour l'allumer.

« Il s'agit juste un test sportif. Tu n'as rien contre courir un peu, pas vrai Ernest ? J'ai lu que tu aimais bien l'exercice physique. »

Une fois Ernest installé sur le tapis, la scientifique lui installa les électrodes, au niveau de la poitrine ; l'un sous son sein droit, l'autre un peu plus haut et un peu plus à gauche. Le petit appareil tenait sans problème entre les deux appuis. Son écran LCD affichait quelques chiffres et un minuscule électrocardiogramme, mais probablement transmettait-il surtout des informations au terminal de Qwelbel.

« Prêt ? Tiens toi bien, je lance ! »

La phase préliminaire durait environ deux minutes, durant lesquelles, après quelques secondes passées à vitesse de marche, le tapis permettait une allure de course très modérée. Progressivement toutefois, il commença à accélérer, trop subtilement d'abord pour qu'il soit aisé de s'en rendre compte, mais la différence ne tarderait pas à se faire manifeste.

Au bout d'une demi-dizaine de minutes, Qwelbel s'approcha avec un autre coton-tige, et le frotta contre l'aisselle du mutant, avant de le ranger également dans un petit sachet plastique. Elle ne tarda pas à s'écarter toutefois. Le tapis allait continuer à prendre de la vitesse, jusqu'à ce qu'irrémédiablement il atteigne une cadence trop élevée même pour un champion du cent mètres. L'intérêt était de connaître l'allure limite.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 06 février 2015, 14:17:13
Ernest se doutait que la prochaine étape allait être le test physique. Il se doutait aussi qu’il n’allait pas pouvoir se rhabiller. La doctoresse, ou plutôt la vétérinaire, devait estimer cela très superflu. Il se demanda un instant si les captifs non hybride avaient droit à un peu plus d’intimité. Avec Carval dans les parages, ce n’était même pas certain. Quoi qu’il en soit, la vue du tapis roulant lui rappela forcément ses quinze jours d’incarcération. Il parvint sans trop de mal à chasser ses souvenirs. L’heure quotidienne de sport était l’une des rares choses à peu près agréables dans son supplice. Obéissant, il se mit sans mot dire en position et laissa Qwelbel installer son petit appareil.

La machine démarra... Le petit mutant se mit à marcher, puis à trottiner, puis à courir. Il allait debout bien sûr. Son rythme était régulier, sa respiration aussi. Ses performances témoignaient de sa bonne santé. Après un petit moment, la femme refit un prélèvement : sueur cette fois. Le test se poursuivit. Puisqu’il réclamait peu de concentration, Ernest eut tout le loisir de penser à autre chose. Nyx encore... Pourquoi lui ? Sans doute parce que c’était l’un de ses rares véritables amis. Il l’imagina à sa place, sur le tapis roulant, sous les yeux de l’impassible Qwelbel. Il l’imagina nu et haletant... Cela avait dû arriver. Et est-ce que lui-aussi avait dû s’abaisser à la masturbation afin de remplir un petit flacon ? Le rat serra les dents, soudainement furieux. Il eut envie de sauter à la gorge de la vétérinaire, de la mettre à mort comme il savait si bien le faire. Malgré ses séjours répétés chez le psychologue, il demeurait très impulsif. Il sut toutefois encore se maîtriser. Le rythme sans cesse croissant de la machine l’aida à faire le vide.

Plus il devait aller vite, plus il se penchait en avant, plus il ressentait le besoin d’aller à quatre pattes. Seulement il avait une main en moins et la blessure, trop récente, allait sans doute l’empécher de prendre appui sur son moignon. Il n’en était pas certain, mais il se résolu à ne pas essayer. Il voulait ne pas donner au docteur sa véritable vitesse de pointe. Le voilà arrivé à sa limite en position bipède. Il était quasiment plié en deux. Il ne suivait plus le rythme. Son équilibre devint précaire. Sans doute aurait-il pu encore un peu forcer, mais il préféra ne pas rétablir son équilibre. La gravité fit le reste : il s’effondra, cessant dès lors son effort. Il était essoufflé et en sueur mais savait ne pas avoir grillé toute son endurance.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 13 février 2015, 16:01:30
Dès lors qu'Ernest tomba, Qwelbel regarda son écran et eut un sourire soudain, un peu trop brusque et étrange, à bien y réfléchir, pour être celui d'une personne absolument saine d'esprit. Elle frappa quelques coups dans ses mains, en un petit applaudissement enthousiaste. Entre-temps, elle avait rangé sa boîte à échantillons dans un tiroir.

« C'est excellent Ernest ! Le docteur Carval sera ravi ! Enfin, sûrement. Je crois qu'il dispose de données plus anciennes à ce sujet. » Elle regarda une nouvelle fois son écran : «  Alors, j'ai une bonne nouvelle ! La procédure écrite pour toi par le professeur Po comporte plusieurs ponctions invasives – et évidemment, à cause de ta petite particularité, il serait trop coûteux de t'anesthésier. Maaais… le docteur Carval a tout rayé ! Il a juste indiqué de te mener en salle Thoosa. Chouette, non ? »

La doctoresse donna au mutant une serviette pour s'essuyer un peu, et le laissa se rhabiller. Puis elle ouvrit la porte qui menait au couloir. Derrière, la requine attendait, vaguement impatiente. Elle avait un pansement enroulé autour de la bosse qui lui servait de nez. Elle se contenta de saluer Qwelbel de la tête, s'attendant sans doute à ce qu'elle les quitte là. Toutefois, la scientifique l'interrogea.

« Où est la salle Thoosa ?
– Dans l'autre aile, j'crois. Jamais emmené personne là-bas.
– Si c'est une première, je préfère venir avec toi. »

De sa main gantée, Qwelbel attrapa de manière amicale, presque maternelle, la main valide d'Ernest. Le trio revint vers l’ascenseur, où non-loin demeurait toujours le même réceptionniste.

« Bonjour George !
– Bonjour Victoria.
– Thoosa ?
– Oh. Couloir droit, puis à gauche. Tout au fond. Du couloir de gauche.
– Merci ! »

La marche se poursuivit selon les instructions données par le scientifique. Tous les couloirs se ressemblaient, et tournaient en angle droit autour des salles rectangulaires. Les portes elles aussi se ressemblaient toutes, même si quelques rares poignées différaient, la seule chose notable était le nom qui y était inscrit. Qwelbel ne se priva pas de commenter joyeusement à l'attention d'Ernest :

« Les salles ici portent le nom de divinités gréco-romaines, tu avais remarqué ? Janus est le dieu des commencements, il a deux têtes tournées dans un sens opposé : l'une regarde le passé, l'autre le futur. Portunus est un dieu des portes et de ports, des départs, il est associé avec Janus, dans la plupart des textes. Quant à Thoosa, je crois savoir qu'elle est la divinité de la réflexion, de la réflexion avant l'action en particulier. C'était aussi la mère du Cyclope. Par contre, je n'ai pas la moindre idée de ce qu'il y a à l'intérieur. Ah, tiens, celle-ci n'a pas de nom. Hm, ah oui. Oui, celles-ci, ce sont des toilettes. »

Elle avait l'air de trouver le sujet si passionnant qu'on aurait pu croire qu'elle faisait faire la visite d'un monument historique. Bientôt, tout au bout du deuxième couloir, donc, se dessina la porte Thoosa. Elle n'avait rien de particulier.

« C'est ici que nos routes se séparent Ernest ! Bon courage avec ce qu'il y a à l'intérieur. J'espère qu'on se reverra vite ! »

La requine ouvrit la porte alors que Qwelbel poussait légèrement dans le dos d'Ernest pour l'inciter à pénétrer dans la pièce. Puis très vite elle referma derrière lui, le laissant de nouveau seul dans un environnement inconnu… surtout que l'endroit avec quelques similitudes avec Janus. Mais si elle disposait bien d'une caméra sur le mur du fond, elle était plus troublante encore. En effet, la pièce ne disposait pas d'un siège, mais d'une table dans une matière plastique grise. De plus, elle était éclairée par des néons qui n'émettaient qu'une lumière rouge.

Cependant, le plus surprenant était certainement la chose qui se trouvait juste derrière la table. Il s'agissait d'un long et large tube en verre transparent, rempli d'un liquide légèrement trouble dans lequel flottait… une cervelle. Le cerveau, bien rose et bien vivant, était vraisemblablement humain. Plusieurs fils noirs et très fins tombaient du plafond et disparaissaient dans les plissures de sa chair molle.

Ernest eut quelques dizaines de secondes pour se familiariser avec la pièce. Toutefois, bientôt, une voix masculine émergea d'un microphone.

« Bonjour, rat. Tu as grandi. »

Elle était bien connue : c'était celle de Carval.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 13 février 2015, 17:17:37
Qwelbel était folle, tout simplement folle. Ernest s’étonna de ne pas s’en être rendu compte plus tôt. Cette attitude en inadéquation avec le contexte, ce sourire, et même maintenant qu’il y pensait, certaines remarques... Combien de fous y avait-il dans le personnel ? Quoi qu’il en soit, l’hybride rat s’essuya, se rhabilla et suivit le mouvement sans mot dire, pas mécontent d’échapper aux prélèvements invasifs. Pour autant, ce n’était pas terminé, contrairement à ce qu’il avait espéré. Le voilà dans les couloirs, en route vers une nouvelle salle, une nouvelle étape. Il écouta d’une oreille distraite les explications de la doctoresse au sujet des noms de pièces. Les divinités gréco-romaines, il s’en fichait royalement. Plus intéressante était la disposition des lieux qu’il ne manqua pas d’observer. Chaque porte, chaque virage, il voulait avoir en son esprit le plan le plus complet possible du complexe.

Le voilà à destination. Le petit mutant passa le seuil de la salle Thoosa en s’efforçant de demeurer calme. Alors qu’il découvrait l’endroit, il entendit la porte se refermer dans son dos. Il était seul maintenant, seul avec un... cerveau en bocal. Vision étrange, il ne s’y était pas attendu. Du coup, il ne sut comment réagir. Il demeura immobile, ne cessant de tout détailler. Puis vint la voix... la voix redoutée et haïe. Depuis qu’il avait quitté Eve, il s’était préparé à la réentendre. Elle ne lui fit pas moins d’effet.

Ernest eut un geste de recul instinctif et se retrouva, dès lors, adossé à la porte. Dans le même temps, il retroussa ses babines, dévoilant ses dents serrées. Envie de fuite, envie de tuer, le voilà pris entre des réactions contraires. Il escomptait à la base jouer l’inoffensif. Impossible ! Ce fut sa rancœur qui s’imposa. Une froideur assassine passa dans son sanglant regard. Il fixa tour à tour le cerveau et la caméra. Il s’avança d’un pas, de deux... quelques secondes de silence puis il s’exprima. Son ton, paradoxalement assez calme, témoignait d’une saisissante hostilité. Le ton du confrériste qu’il avait été, du psychopathe, du monstre.

« Et toi, tu as rétréci, enfin, si c’est toi que je vois là. Tes expériences auraient-elles mal tournées ? Ce serait terriblement ironique. Enfin bref, passons. C’est quoi le programme ? On va reprendre là où on s’était arrêté la dernière fois ? Vas-y, tente encore une fois de me toucher, comme tu le faisais ! Essaie !! »

Il s’était presque mis à crier sur la fin. D’un bond, il fut sur la table grise. Il se demanda un instant si le tube en plastique était à l’épreuve de ses morsures. Sans doute, hélas...
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 19 février 2015, 16:46:49
Le conteneur du cerveau ne paraissait pas particulièrement solide : pour une personne disposant d'une force moyenne, il était à peu près impossible à briser à mains nues, mais il était à la limite possible d'en rayer la surface à coups de griffes, ou de l'éclater avec un quelconque objet contondant. Des hauteurs, la voix de Carval, assurée, se teinta vite d'ironie. Il eut un rire court et froid, assez mal retransmis par les haut-parleurs de la salle.

« Moi, dans ce tube ? Allons, Vermine, ne soit pas ridicule. Non, en réalité, je suis... »

La porte – la même par laquelle Ernest était entré – s'ouvrit soudain, et se découpa dans l'ouverture la silhouette du docteur, dans sa blouse blanche. Ses paroles émergeaient de sa bouche, mais continuaient en même temps à résonner dans la salle, avec un léger délais.

« Juste derrière toi. »

L'effet d'écho se prolongea jusqu'à ce que Carval, avec un sourire, appuie du pouce sur le micro dans son col pour le couper. Le scientifique n'avait pas beaucoup changé. Il avait toujours les mêmes cheveux blonds et longs qui encadraient son visage rusé. Habillé d'une tenue de travail blanche et portant des gants en plastique fin, il n'en dégageait pas moins une certaine prestance que ne pouvaient que lui envier bien des hommes, même sur leur trente-et-un. Il n'avait pas vieilli : en réalité, il n'avait jamais semblé aussi jeune et en bonne forme. Il désigna le cerveau dans le bocal en étendant le bras gauche.

« Il s'agit d'un ami à moi, à qui il est arrivé quelques mésaventures. Sa presque-mort n'était pas une raison suffisante pour me passer de ses services. D'ailleurs, maintenant qu'il est aveugle, sourd et muet, il est d'un tempérament beaucoup plus supportable. C'est fou ce que Cyber-Tech peut faire en matière de conservation d'organe. Savais-tu que leur actionnaire majoritaire survit dans un état proche de celui-ci ? »

Richard Carval ne possédait aucune protection visible, et ne paraissait pas le moins du monde angoissé par sa proximité avec un cobaye qui avait des raisons de lui en vouloir à mort. C'était d'autant plus surprenant que le docteur – ayant fuit à succès des laboratoires de l'Olympe Corp – n'était pas particulièrement connu pour son courage physique. Après avoir observé un instant la cervelle en suspension d'un air un peu absent, il riva son scrutateur regard d'aigle sur Ernest.

« On s'éloigne. Je vois que tu as déjà trouvé ta place sur la table. Bien ! Allongé, maintenant. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 19 février 2015, 17:47:29
Ernest tourna la tête lorsqu’il entendit la porte pivoter sur ses gonds. Carval... Richard Carval se tenait bien là, devant lui, avec sa classe insolente et ses yeux inquisiteurs. Cette vision eut sur le jeune mutant au moins autant d’effet que la voix du docteur, voix qu’il entendait directement désormais. Richard parla mais l’hybride n’y prêta aucune attention. Enfin, si, il aurait été bien incapable d’ignorer ce timbre, ce ton exécré. Mais les mots, leurs sens, échappa à sa conscience. A la réalité se mêlèrent ses souvenirs. Retour dans le premier labo, autre paroles, autre situation, mais le même scientifique, le même ressentiment.

Ernest faillit défaillir. Peut-être aurait-il mieux valut que ce soit le cas. Passé cette seconde de malaise qui le vit en proie à un vertige, son esprit exécuta une froide analyse. Le Docteur Carval se trouvait à une toute petite distance de lui. Il était seul. Rien ne le protégeait. La pièce ne comportait aucun système de sécurité visible. N’était-ce pas là une opportunité ? S’il ne la saisissait pas, il allait s’en vouloir. Si quelque chose lui avait échappé, au moins pourrait-il savoir quoi. De toute façon, il n’était plus maître de ses actions. Le self contrôle d’Ernest avait volé en éclats. Une pulsion de rage folle l’inonda. A cet instant précis, sa propre vie ne comptait plus. Seul comptait la mort de Carval.

Le temps se ralentit. Le jeune mutant ne vit plus rien, sauf le docteur, n’entendit plus rien, sauf le docteur. Il eut l’impression d’assister à un film. On lui ordonnait de s’allonger. Ce fut le déclique. Il se baissa bien, mais pour terminer de pivoter et prendre son élan. Il bondit, galvanisée par l’adrénaline, gueule grande ouverte. Si tout se passait bien, il pouvait atteindre le cou. A défaut, il mordrait ce qu’il pouvait. La moindre contamination à l’Altérium était potentiellement fatale.

Les dés étaient jetés...
Peut-être venait-il de compromettre tout son début de plan. Tant pis, il ne pouvait faire autrement...
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le vendredi 20 février 2015, 23:17:46
Au moment où il bondissait, Ernest, s'il en était encore capable, devait se rendre compte, à l'air confiant que le docteur affichait toujours, à l'absence de la moindre surprise sur son visage – comme s'il s'y était attendu depuis le moment où il était entré – que les choses n'allaient probablement pas bien se passer pour lui. Pourtant, rien ne n'empêcha le mutant d'agir jusqu'à ce qu'il soit sur le point de planter ses incisives dans la jugulaire du scientifique : mais une fraction de seconde avant qu'il ne déchire l'artère, une poigne surhumaine lui agrippa le cou et le maintint à distance respectable.

« Tu es encore plus mal élevé qu'avant » siffla le savant fou.

Carval maintenait à présent Ernest au-dessus du sol, à la force de son seul bras droit, avec la même facilité que s'il avait tenu un petit rongeur s'agitant dans sa paume. Le mutant se débattit avec rage, toutefois la seule chose qu'il était capable d'atteindre de ses griffes, dans cette position, était le membre qui le maîtrisait… Mais s'il parvint à déchirer le bras de la blouse en plusieurs endroits, n'en laissant que quelques lambeaux, et même, il put le penser un instant, à entailler la peau, la chair qui se trouvait dessous n'avait rien d'humaine.

Puis il avança, tenant toujours Ernest à bout de bras, et le plaqua finalement contre le métal froid de la table.

« J'avais dit couché. »

L'épiderme était surnaturellement bronzé, presque noir, et la kératine peinait à percer ce qui se trouvait dessous. C'était une matière sombre, comme morte et nécrosée, si ce n'était qu'elle était rigide et granuleuse. Des rares entailles, superficielles, que l'hybride y fit au prix d'un certain acharnement, ne suinta qu'un liquide incolore qui ne ressemblait en rien à du sang. D'ailleurs, Carval ne paraissait pas ressentir la moindre douleur.

« Tu ne t'en souviens pas, évidemment. Mais tu es le responsable de ça, rat. De ça – et aussi de ça. »

Il trouva le loisir de pointer de nouveau le cerveau du doigt.

« La contamination par l'arachnéum, ton venin, progresse… Mais lentement, ne t'inquiète pas. Nous aurons tout le temps nécessaire pour servir la science, toi et moi. Seulement si nous passons aux choses sérieuses dès maintenant, naturellement. »

Le savant aplatit alternativement les membres d'Ernest sur le plan de travail, écartés en X, et à chaque fois un arceau d'acier semblable à ceux de la chaise de JANUS venait se refermer, fixant le mutant aux poignets, sous les aisselles, au-dessus du genou et aux chevilles.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 21 février 2015, 11:44:40
Une fois entravé, Ernest lutta encore un peu. Tout ce qui venait de se passer, son cerveau l’avait enregistré, mais il décryptait au ralenti. Maîtrisé par Carval, comme ça ? Bon dieu, jamais il n’aurait pu le prévoir ! Comment allait-il pouvoir abattre ce type ? Et depuis quand il avait muté ? Depuis quand l’hybride avait-il changé quelqu’un en cerveau dans un bocal ? Effectivement, il ne s’en souvenait pas. Les dents serrées, il s’épuisait, refusant l’évidence. Un filet de bave serpentait sur son museau.

Puis, tout d’un coup, sa rage folle se tarit. Elle le laissa sans force. Et comme il le craignait, derrière la fureur, il n’y avait plus que de la peur. Son courage fondit comme neige au soleil. Il était là, sur cette table, presque écartelé. Il sentait le métal froid contre son dos. Il sentait le regard acéré du docteur. Il pouvait difficilement concevoir scène plus horrible. Désormais immobile, il redressa la tête. Il fixa sa tenue bleue de détenue, protection risible. Il fixa ensuite Richard. Il déglutit avec difficulté et eut un rire nerveux puant de trouille.
« Ok, ok, j’ai joué, j’ai perdu. Mais fallait bien que j’essaie, pour le fun, non ? Je serais sage maintenant. Juré ! »
Nouveau rire. "Je serai sage", la formule magique derrière laquelle il se réfugiait dans ce genre de situation.
« C’est vous le big boss. Je ferai tout ce que vous voulez, absolument tout. Mais, heu, soyez sympa, me tapez pas trop. C’est pas ça qui fait avancer la science, hein ? »
Il n’était pas loin de se pisser dessus. Sans doute l’aurait-il fait si sa vessie n’avait pas été aussi vide. Il avait honte de lui. Mais tant pis, il était prêt à tout pour obtenir trois fois rien. Si son rôle se limitait à fournir de l’Altérium, peut-être pouvait-il s’en sortir sans trop de bobo.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 22 février 2015, 19:29:31
La soumission soudaine d'Ernest tira un petit sourire satisfait au docteur. En vérité, même s'il n'y avait que peu d'êtres sur Terre plus sûr de ses propres compétences, il s'étonna presque de l'effet qu'il produisait encore sur l'adolescent, plusieurs années après. Il songea qu'il était agréable de se surprendre encore soi-même sur la qualité de son travail.

« Te frapper, non. Mais pour la science, rat, tu vas avoir l'honneur de mourir aujourd'hui. D'ici… neuf minutes et une vingtaine de secondes. »

Content de sa déclaration soudaine et l'hybride bien sanglé, il se détourna de la table d'opération et revint jusqu'à la porte. Il attendit les bras croisés seulement quelques instants, mais ce court délais parut l'agacer un peu. Il ouvrit finalement la porte lui-même – laissant pénétrer un peu de lumière blanche dans la pièce à l'éclairage rouge. Le bruit des roulettes d'un chariot d'hôpital se fit entendre, et celle d'une voix d'homme, visiblement intimidé, qui murmurait presque, qu'Ernest ne connaissait pas, et auquel Carval s'adressa assez brièvement mais sur un ton soudainement assez guilleret :

« J'ai juste besoin de l'innervant, là, du stabilisateur, et du stimulant neural. Non, pas besoin de l'anticonvulsif sur le sujet souche. Il ne convulse jamais. … En salle Echidna, de l'autre côté, c'est prêt ? Bien. … Oui, je vais le piquer moi-même. »

Puis le savant referma la porte et revint à pas lents vers Ernest, tenant à la main trois seringues. Les deux premières contenaient des liquides incolores et la dernière, plus grosse, qui n'avait pas d'aiguille et qui ressemblait plutôt à une pipette, un liquide rouge. De nouveau il se pencha au-dessus d'Ernest.

« Nous devrions être fiers de ce que nous aurons fait pour l'humanité. »

Carval rajusta le plastique d'un de ses gants, produisant un claquement sinistre qui résonna dans la pièce. Rapidement, il enfonça une des aiguilles dans l'une des veines de l'avant-bras valide du mutant. Au bout de quelques instants, l'adolescent éprouva dans son corps une sensation familière : les picotements tantôt de l'ordre de la chatouilles, tantôt proches de la brûlure, étaient presque identiques, dans leur progression, à ceux ressentis dans le bureau de Tobias Miller, après qu'il lui ait fait boire le traître médicament. Il n'y avait cependant pas le même engourdissement : il restait parfaitement lucide.

« Sais-tu à partir de quoi est fait ce sérum qui innerve l'arachnéum ? … à partir d'arachnéum. »

Le docteur attendit quelques secondes de plus, et injecta le second produit de la même manière. Celui-ci ne procura à Ernest aucune sensation particulière. Il ne restait alors plus que le dernier liquide rouge.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le dimanche 22 février 2015, 20:47:47
C’était... c’était quoi ce délire ? Mourir ? Impossible ! Sous l’effet de la surprise, les yeux d’Ernest devinrent ronds comme des soucoupes. Il avait craint une punition pour son acte de rébellion. Lors de ses quinze jours de supplice, c’était ainsi que cela fonctionnait. Il avait également craint une expérience douloureuse. Mais mourir, c’était encore plus imprévu, plus inconcevable que la manière dont il avait été neutralisé. Sur le coup, il en resta bouche bée. Paradoxalement, un instant plus tôt, il se fichait éperdument de sa propre sécurité. Maintenant, c’était très différent. Il n’était plus aveuglé par sa rage. Il voulait vivre. Vivre ! Scrutant l’effroyable docteur, il se laissa piquer sans mot dire. La sensation d’engourdissement le fit sortir de son mutisme.

« Vous mentez ! Vous pouvez pas me tuer, je vous suis indispensable ! Sans moi, pas d’Altérium ! Sans Altérium, pas d’expérience ! Vous cherchez juste à me faire flipper. Ben c’est réussi, vous pouvez être fier de vous ! »

En effet, c’était réussi, indéniablement. Il ne s’en était même pas rendu compte, mais il avait mouillé son pantalon. Sa vessie n’était peut-être pas si vide en fin de compte. Ses mots étaient imprégnés de peur mais aussi de conviction. Il voulait croire à ce qu’il disait. Etre indispensable, c’était la plus grande des sécurités. Mais déjà, le doute s’insinuait en lui. Les allusions au clonage, la photo de lui-même lors du test de la veille... Et puis, c’était quoi la salle Echidna ? C’était aussi un nom de dieu ? L’hybride s’intéressait peu à la mythologie grecque, mais une leçon scolaire lui revint en mémoire. Echidna avait engendré nombre de monstruosités. Pas de quoi être rassuré sur la suite des événements.

« Allez, soyez sérieux, c’est quoi le plan ? Vous pouvez me le dire, ça changera rien de toutes façons ! »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 23 février 2015, 01:09:27
Carval émit un petit claquement de langue entre l'amusement et la réprobation… qui s'orienta quand même davantage vers l'amusement lorsqu'il repéra l'incontinence dont était victime Ernest.

« Ne confonds pas fierté et orgueil. Tu n'es pas indispensable. Tu réfléchirais et tu comprendrais qu'il serait impossible pour moi de réaliser un produit à base d'arachnéum sans disposer d'arachnéum. Mais c'est vrai. Tu es un bon spécimen de rat. Le seul encore capable de survivre ex vitro. De loin le plus proche du spécimen original – celui qui aurait été idéal, évidemment, mais hélas nous devons composer sans. Le meilleur que j'ai à ma disposition, donc. Pour l'instant. »

Il agita la grosse seringue devant le nez du mutant, en faisant miroiter l'inquiétant liquide rouge… mais l'éloigna finalement.

« Pas pour toi. »

Il passa derrière le cobaye : celui-ci pouvait cependant encore le voir marcher jusqu'au tube en se contorsionnant un peu. Il y avait au pied du dispositif de conservation d'organe une petite ouverture sphérique de seulement quelques centimètres. Carval y enfonça la seringue et appuya pour y déverser son contenu. De lourdes volutes carmins, presque semblables à une fumée épaisse, s'élevèrent derrière la vitre. Le docteur tapota doucement le plastique.

« Cette cervelle appartenait à un mutant nommé Calque. Calque possédait un pouvoir fascinant. Mais le sujet prime l'a mordu et c'est comme ça qu'il est mort : enfin presque. Heureusement l'arachnéum n'a pas altéré ses précieuses facultés, au contraire. En fait, depuis ton arrivée ici, tu as croisé quatre personnes ayant été contaminées par l'arachnéum. Certaines se portent mieux que d'autres. »

Le savant fut de nouveau au côté du mutant. Il sortit une tablette numérique, et la consulta tout en répondant de manière distraite.

« J'imagine que tu ignorais que tu étais toi-même un clone. Tu veux savoir comment était le – véritable – » il insista mesquinement sur le mot « Ernest ? Beaucoup mieux que toi. À tout point de vue. Le clonage n'est pas parfait, l'arachnéum subit une légère dénaturation à chaque nouvelle génération de clones. Il se stabilise légèrement, devient plus facile à manipuler, mais il perd aussi de la complexité, une amplitude d'expression. On peut réaliser moins de choses avec, encore qu'on les fasse plus facilement. En conditionnant les clones, il est possible d'orienter un peu la façon dont l'arachnéum se dénature. Cela n'est pas toujours souhaitable, mais ça peut-être utile, pour… ah, ça ne devrait plus tarder. Tu voudrais voir ça ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 23 février 2015, 09:44:24
La surprise d’Ernest devint telle que sa terreur en fut presque occultée. Après un instant de complète stupéfaction, il refusa tout d’abord la vérité que lui livrait Carval. Ce fut avec hargne qu’il glapit :
« Vous mentez ! C’est pas possible ! Si j’étais un clone, je le saurai ! Vous essayez de me manipuler, je sais pas pourquoi, mais c’est ça votre plan ! Je... je... »
Il ne croyait plus à ses propres affirmations. Il y avait du désespoir dans ses mots, des mots creux, des mots d’impuissance. Il avait déjà à sa disposition trop d’éléments. La télépathie permettait de faire oublier n’importe quoi. Et quel intérêt le docteur pouvait-il avoir à lui mentir ? Il était tout puissant dans ce labo. Le jeune mutant recommença à lutter contre ses entraves, mais juste quelques secondes. Ses forces lui faisaient clairement défaut. Il ferma les yeux, eut un sanglot de rage, rouvrit les yeux et fixa la tablette numérique. Il n’osait plus croiser le regard du scientifique. Lorsqu’il s’exprima de nouveau, ce fut d’une petite voix suppliante :
« Comment ? ... Depuis quand ? ... C’est lors de mon arrivé ici, c’est ça ? ... Où est le... le... »
Il ne parvint pas à dire le vrai Ernest. Il chercha un autre terme.
« ... sujet prime ? ... Combien on est ? »
Il voulait savoir, comprendre. Il était trop secoué pour éprouver autre chose qu’un trouble vertigineux. S’il n’était pas l’authentique Ernest Lenoir, alors il était un imposteur, une version jetable qui d’ailleurs n’allait pas tarder à l’être. Comment accepter ?
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 23 février 2015, 22:50:36
Carval allongea le bras pour permettre à Ernest de regarder l'écran de sa tablette, qui affichait une image probablement retransmise par une caméra, la salle Echidna. La vue n'avait pour le moment rien d’époustouflante ; c'était une salle qui ressemblait beaucoup à celle dans laquelle ils se tenaient, à la différence qu'il y avait deux tables en métal, et pas une seule. La lumière, elle, était pour sa part d'un blanc tout à fait commun. Dans un coin de la pièce, il y avait deux médecins en blouse que le mutant ne connaissait pas. L'un était un grand homme barbu, assez âgé, l'autre un individu plus jeune portant des lunettes aux verres épais.

« Non. Tu es une copie réalisée dans les laboratoires de l'Olympe Corporation. Tu as été crée pour leurrer les x-men, pour qu'ils t'emportent toi, et pas le sujet prime. Tel est le but originel de ton existence : être un leurre. Même tes souvenirs avec moi, ce n'était pas vraiment toi… Je sais, c'est décevant. Mais maintenant je t'offre une nouvelle raison d'être. Le véritable Ernest Lenoir… est mort, j'imagine. Il a été égaré quelque-part en Sibérie, après avoir fait prendre beaucoup de retard à notre projet. Ingrat. Quant aux autres clones, j'en ai encore trois à disposition, mais je peux t'assurer que tu aurais du mal à les considérer comme des frères. J'ai dû recoller les morceaux qui restaient d'eux. »

Il y eut un crépitement électrique, et Carval s'arrêta de parler. Le processus, manifestement, venait de débuter. Des diodes s'étaient allumées tout le long du tube, et des petits courants parcouraient à présent le liquide. Un rai lumière jaune émergea de la cervelle, et piqua vers le sol : là, il fut guidé par une rainure sur le sol, dans laquelle il s'engouffra. Le sillon le conduisit vers la table où était attaché Ernest, qu'il finit par frapper au sommet du crâne. Le processus était indolore, mais les fourmillements du mutant se firent plus prononcés. S'il n'avait pas été prévenu, peut-être même le cobaye ne se serait-il rendu compte de rien.

Puis dans la pièce, la lumière surnaturelle se tarit progressivement… et progressa de la même manière dans la salle Echidna, atteignant les deux tables vides par des conduits parallèles. La suite fut plus impressionnante, et se produisit simultanément et d'une manière semblable sur les deux plans de métal côte à côte.

« On ne vous clone que par deux, pour l'instant. De bonnes pistes sont à l'étude pour vous reproduire plus vite. Malheureusement ce qui reste de Calque n'a pas une capacité infinie à générer des rats. Cela m'a contraint à faire quelques optimisations dans mes plans. »

Il n'y eut d'abord que des frémissements dans l'air, puis la constitution d'une petite boule de chair, en suspension, qui se mit à tourner sur elle-même. À chaque tour, elle gagnait en grosseur et en complexité, et on pouvait voir s'y greffer de nouveaux tissus. Bientôt, Ernest pu y distinguer des organes, et il eut même le temps d’apercevoir le battement d'un cœur. Mais très rapidement, une couche d'os puis de peau puis de fourrure vint recouvrir ce qui ressemblait à présent à… deux copies conformes de rats humanoïdes. Ils ne portaient pas de vêtement, mais avaient la même absence de main.

« Voilà qui doit t’impressionner, rat. Ils ont tous tes souvenirs, exactement, jusqu'au moment où je t'ai injecté le stabilisateur. Le passage où je t'annonçais que tu allais mourir inclus. Pour l'un d'entre-eux, je n'ai pas menti. J'ai ordonné que ce soit celui de droite qui meurt. L'un plutôt que l'autre, je n'ai pas de raison précise… la mort est parfois arbitraire. Il nous fallait simplement des organes de rechange. »

Ernest put voir que l'un des scientifiques injecta un produit au cobbaye de gauche, qui cessa presque aussitôt tout mouvement. Carval appuya sur son micro et s'adressa aux opérateurs de la salle Echidna.

« Débutez la vivisection maintenant. »

Le scientifique aux lunettes approcha alors un chariot plein de matériel chirurgical. Il se saisit d'une grosse tondeuse, et rasa sommairement le torse de l'Ernest de droite. Puis, les mains gantées, le savant barbu, lui, dégagea un scalpel d'une trousse et commença doucement à inciser la peau du rat, en X. Aucun bruit n'était retransmis par la caméra, mais l'ambiance sonore de la salle n'était alors pas très difficile à deviner.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 23 février 2015, 23:57:33
Ernest fut complètement absorbé par ce qu’il vit et entendit. Son clonage en direct, incroyable ! Il n’aurait su dire s’il était terrifié ou fasciné. Probablement les deux à la fois. Son trouble alla croissant. Tant d’informations en l’espace de quelques secondes, la remise en cause de sa propre existence... cela faisait beaucoup même pour un cerveau de surdoué. Une constatation, cependant, l’aida à retrouver un peu de calme. Ce n’était pas lui qui allait mourir. Dès lors, sa faculté d’analyse rapide reprit tant bien que mal du service. Le jeune mutant, de plus, n’était pas un modèle d’altruisme. Pour l’heure, il se fichait éperdument du devenir de ses doubles visibles à l’écran. Seules comptaient sa propre vie ainsi que celles de quelques prisonniers : Nyx et Eve essentiellement. Il osa de nouveau regarder le docteur Carval. Lorsqu’il s’exprima, sa voix était toujours marquée par l’émotion.
« Si je comprends bien, le sujet prime vous a échappé et tous les anciens clones, moi excepté, sont dans un sale état. Puisque ce que vous appelez l’Aracnéum se détériore à chaque génération, je suis donc votre meilleur spécimen. »
Depuis des mois, il n’était qu’une doublure et il ne le savait pas... Non, il ne devait pas y songer maintenant. Les problèmes existentiels, il aurait tout le temps d’y repenser plus tard. Il reporta son attention sur l’écran. L’un des rats allaient avoir droit à une vivisection, il ne l’enviait pas. Quel était le destin du second ? Ernest nota l’absence de main. Il dit aussi, mais d’avantage pour lui-même :
« Eux ne savent pas qu’ils sont des clones... Vous ne m’avez fait cette révélation qu’après les injections... »
Il en ressentit une satisfaction quasi malsaine. Il était supérieur à eux, tout comme le sujet prime était supérieur à lui. Mais le sujet prime était peut-être mort. Il revint à Richard. Son ton retrouvait de l’assurance :
« Docteur, ce que vous faites de mes clones, je m’en branle. Vous pouvez me cloner autant de fois que nécessaire et si vous voulez mon Altérium, aucun souci. Il y a pas besoin de m’enchaîner pour ça. On pourrait pas envisager une forme de collaboration un peu plus pacifique ? »
Il indiqua du museau ses entraves. Il réalisa par la même occasion qu’il s’était pissé dessus. Il tâcha d’ignorer. Il avait une stratégie en tête et elle consistait à ramper.
« Je veux dire, si vous me maltraitez pas, j’aurai pas de raison de vouloir vous trucider à la moindre occasion. Filez-moi deux trois privilèges dans ce complexe et je vous obéis au doigts et à l’œil. Vous allez y gagner, je suis sûr ! »
Il remettait en place son plan de gentil toutou, il passait juste à l’étape supérieur. Le pire, c’était que la trouille qu’il éprouvait à l’égard de Carval le poussait à être honnête. Il comploterait quand il aurait reprit du courage.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 25 février 2015, 02:53:36
La tablette fut retirée de la vue d'Ernest lorsqu'un premier organe – probablement un rein – fut extrait de la poitrine du cobaye, dont les tremblements contraint par les attaches indiquaient qu'il n'avait hélas pas encore sombré dans l'inconscience. Carval effectua quelques mouvements de doigts sur l'écran tactile. La proposition du mutant parut le surprendre un peu, mais il ne laissa qu'une fraction de seconde cette émotion indésirable s'inscrire sur son visage.

« Je préfère entendre ça. Ça fait longtemps que j'attends que tu saisisses l'importance de mes expériences. Sois un gentil rat, et je pourrais penser à quelques améliorations de tes conditions de résidence ici. » Il fit défiler une liste sur la tablette. « Livres, alcool, tapis roulants. Toutefois… »

La voix du scientifique reprit plus d'assurance lorsqu'il aborda le sujet suivant. C'était un homme manifestement beaucoup plus à l'aise lorsqu'il s'agissait de manier le bâton plutôt que la carotte. Il consulta encore une liste déroulante :

« Toutefois ton comportement déplorable lorsque tu m'as vu ne peut pas rester impuni. Tu as voulu profiter de la situation, tu as cru que j'étais vulnérable. Je ne suis jamais sans défense, Vermine, retiens bien ça. Ça, et que la révolte est mauvaise, pour nous deux. Tu écoperas d'une punition un peu plus tard, j'ai déjà prévu quelque-chose. Ce n'est peut-être pas très efficace d'un point de vue Pavlovien de différer autant la sanction mais… je suis certain que tes capacités cognitives un peu supérieures à celles d'un chien te permettront de faire l'association quand même. En attendant, tu n'as qu'à garder ces vêtements là. Je te souhaite une bonne fin de journée, rat. À bientôt. »

Carval ouvrit la porte et sortit de la salle, abandonnant Ernest attaché et seul un moment. Au bout de quelques minutes, sans que rien ne l'ait annoncé, les sangles de métal se rétractèrent. Personne ne vint chercher le mutant, cependant, qui était laissé libre de ses mouvements. Peu après, la lumière rouge s'éteint, plongea la salle dans le noir. Derrière la porte, d'ailleurs, il n'y avait rien : aucun surveillant.

Les couloirs étaient vides, les scientifiques, tous dans leurs salles, ne circulaient pas. Personne ne lui ferait de reproche s'il s'égarait un peu dans les couloirs, ou même s'il flânait, tant qu'il ne s'aventurait pas dans une autre pièce. Des caméras situées à des angles stratégiques pouvaient toutefois lui donner la presque certitude qu'il était toujours surveillé.

À l’accueil, s'il marchait jusque là, la Requine, un bandage toujours sur le nez, patientait en compagnie du réceptionniste pour lui faire prendre l'ascenseur. Elle lui ouvrirait alors la porte de sa cellule, qui était identique à celle qu'il avait quitté, Eve assise sur son lit, les pieds ballants dans le vide.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 25 février 2015, 09:28:06
Ernest ne prit pas le risque d’ajouter quelque chose aux propos du docteur. Exprimer trop ouvertement sa satisfaction face à la perspective d’améliorations de ses conditions de détention aurait été contreproductif. De même, chercher à éviter la punition était totalement inutile. Globalement, il était plus soulagé qu’inquiet. Il estimait s’en être très bien sorti en dépit d’un début de rencontre catastrophique. Il se contenta d’acquiescer d’un signe de tête avant que Carval ne se retire. Puis il attendit la suite.

Cette suite le troubla. Le voilà libre de ses mouvements, sans garde pour le raccompagner. Surveiller, il savait qu’il l’était. Et très étroitement même. Hors de question donc de faire une bêtise. Tout d’abord, il se leva et sauta au bas de la table. Il grimaça quelque peu à cause de son pantalon mouillé. L’urine était en train de refroidir. Il puait mais tant pis, il ne pouvait rien y faire pour l’instant. Il attendit sagement quelques minutes qu’on vienne le chercher. Mais personne ne vint. Il tendit l’oreille, tout était calme dans les couloirs.
« Bon... »
Il se décida enfin à sortir de la pièce. Il se dirigea directement à l’accueil. Il estimait que c’était un test. Les simples cobayes ne devaient assurément jamais déambuler seul. Son statut avait donc peut-être déjà un peu changé. Exemplaire, il devait être exemplaire ! Il avait grillé son joker en attaquant Richard, il n’avait plus le droit à la moindre erreur. Il trouva donc la femme requin, lui adressa un sourire piteux car elle ne manqua pas de constater son incontinence, puis il se laissa ramener dans sa cellule.

« Salut Eve », dit-il à la demoiselle, sitôt la porte refermé.
Il affichait une attitude décontractée. Devançant ses interrogations, il ajouta :
« Heu ouais, je me suis pissé dessus. Mais t’en fais pas, ça c’est plutôt bien passé. Mieux en fait que je l’avais envisagé. »
De toute façon, il y avait une sensible amélioration. La dernière fois qu’il était revenu du labo, il était inconscient. Il avança vers le lavabo. Sans se gêner, il retira son pantalon. Il voulait le rincer. Néanmoins, il était trop petit et avec une seule main, la manœuvre devenait très ardue. Il regarda Eve.
« Tu m’aide ? Ce serait bien si je pouvais aussi me nettoyer les jambes. Je me sentirai moins crade. »
Il demandait cela avec désinvolture. Dans son esprit, il débutait toutefois ses calculs. Il voulait toujours s’évader, mais dans l’immédiat, c’était mission impossible. A court terme, il espérait obtenir un maximum de privilèges et en faire profiter la jeune femme, pourquoi pas aussi son ami souris.
« Ha, j’oubliais... J’ai été cloné. Si tu croises un autre moi, regarde ça avant, on sait jamais. »
Il se tourna, souleva son haut, et désigna son matricule à la base de sa queue. Là encore, il avait un ton badin.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 25 février 2015, 20:07:09
À peine Ernest était-il entré dans la pièce qu'Eve s'était laissée tomber de son lit pour aller le rejoindre. Elle avait d'abord parut inquiète de l'état du pantalon de son compagnon de cellule, mais celui-ci parvint sans trop de difficultés à la rassurer au moins sur ce point. Elle se contenta d'afficher une moue indécise : la situation avait un caractère un peu salace qui aurait sûrement fait rire Matt'. C'est en songea à cela, et à toutes les atrocités dont avaient pu résulter cette simple tâche humide, que la jeune fille n'exprima pas le moindre signe d'amusement. En revanche, elle ne faisait pas mystère de son bonheur de revoir Ernest en un seul morceau.

« Si tu peux revenir dans cet état là à chaque fois, ça me va ! »

Elle ne se fit pas prier pour aider à nettoyer le pantalon de son codétenu, le plaçant dans le lavabo pour le rincer. Elle ne s'y prenait pas particulièrement bien, pas comme l'aurait fait une personne habituée à faire la lessive ou à simplement détacher un vêtement, mais elle y mettait de la bonne volonté et la tâche n'était pas très difficile. L'adolescente s'arrêta cependant un instant lorsqu'Ernest lui annonça qu'elle risquait de rencontrer des copies de lui-même.

« Cloné ? Ce n'est jamais arrivé, ça doit être nouveau… Comment… comment sont tes clones ? Ils sont déjà grands ? Ils te ressemblent exactement, dans leur physique et leur… manière d'être ? »

Une fois fait, elle alla cherche sa propre couverture et en déchira celle-ci en deux. Elle revint vers le lavabo avec le pan de tissu, et l'imbiba à son tour d'eau, le roulant en boule. En essorant un peu le drap, elle obtint un substrat de serviette-éponge. Elle se plaça derrière Ernest et se pencha un peu.

« En tout cas je te confirme que tu es bien mon Ernest. Tu as le bon numéro. Attention c'est un peu froid. »

Doucement, elle commença avec beaucoup d'application à passer le linge humide sur la fourrure déjà humide de l'hybride, la débarrassant comme elle pouvait de son odeur. L'activité fit rosir un peu ses joues. Finalement elle tendit la serviette de fortune au mutant.

« Je… te laisse faire l'avant, d'accord ? Est-ce que tu as vu ce docteur Carval ? Il est comment ? Toujours aussi affreux ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 25 février 2015, 22:39:52
« Mes clones... de ce que j’ai vu, ils ont exactement la même tête que moi. Il leur manque même la main. Le caractère, je présume que c’est le même. Ils ont mes souvenirs. C’est vraiment des copies conformes. Enfin, conforme au moment du clonage. L’un est déjà mort. Il a eu droit a une vivisection. L’autre, je sais pas ce que Carval va faire de lui. »
Ernest répondait avec détachement. Il laissait Eve l’essuyer sans spécialement y prêter d’attention. Il regardait droit devant lui, dans le vague. Il prit la serviette de fortune lorsque la jeune femme la lui tendit et poursuivit l’essuyage.
« Oui, j’ai vu Carval. Et oui, il est toujours aussi affreux. Ça a été assez... éprouvant. Pour tout te dire, j’ai essayé de le tuer. Pas très malin de ma part... Il m’a promis une punition. Un mauvais moment en perspective, mais je survivrai. Il ne peut pas trop m’amocher. Il a besoin de moi. Et puis j’lui ai juré que je serai sage. J’ai intérêt à l’être. »
Estimant s’être nettoyé autant que possible, il jeta le tissu déchiré  dans un coin. Puis, il alla s’assoir sur son lit. Son pantalon, il le remettrait lorsqu’il serait sec. Il faisait chaud ici, aucune raison d’être pressé, surtout qu’Eve avait déjà eu tout le temps de le voir à poil. Lorsqu’il reprit la parole, il fixait ses pieds et son ton trahissait de la préoccupation.
« J’ai le bon rôle dans cette histoire. Carval me clone et c’est mes clones qui ramassent. Moi, je devrai avoir relativement la paix si je me tiens à carreau. Mais... Mais... En fait, Eve, je suis aussi un clone. Tu n’as jamais croisé le véritable Ernest Lenoir. Je... »
Il soupira. Ce n’était pas de la comédie, il était réellement troublé.
« Tu sais, je t’avais parlé de mes quinze jours dans un premier labo. C’est là-bas que j’ai fais la rencontre de Carval. Et c’est là-bas qu’Ernest a été cloné pour la première fois. J’ai servi de leurre pour que les X-Men me ramène, moi, la copie, et pas le vrai. Carval vient de tout me révéler. S’il a besoin de moi, c’est parce que le vrai Ernest lui a échappé. Il est sûrement mort. Un leurre, une copie... ça fait bizarre de le savoir... »
Tellement bizarre qu’il avait besoin d’en parler.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 12 mars 2015, 00:42:13
Il y eu un petit moment de flottement, Eve ayant laissé parler sans l'interrompre son compagnon de cellule, et n'ayant pas repris la parole ensuite. La jeune fille était dérangée par la nouvelle, sans doute, mais elle ne voulait cependant pas le laisser paraître, ce qui aurait rendu la déclaration gênante. Elle se hasarda donc à une première réponse un peu rapide, pas très naturelle, qui prit toutefois un peu plus d'assurance en même temps de son cerveau se forgeait ses propres convictions.

« Ben, c'est pas très grave, pas vrai ? Quelle différence ça fait ? L'autre Ernest doit être une personne géniale, mais on ne la connaît pas. Si ça fait plusieurs années, alors il doit être très différent de toi maintenant, s'il est encore vivant. Différent, mais pas plus véritable, je crois. »

Elle ne se permettait pas de lâcher Ernest du regard : elle ne voulait pas l'abandonner seul avec un questionnement identitaire qui devait le déchirer. Néanmoins elle devait avoir compris que des bons sentiments seuls ne seraient peut-être pas suffisants pour calmer un esprit aussi vif que celui du mutant. L'adolescente songeait qu'il ne lui en voudrait pas d'aborder aussi vite quelques points plus difficiles.

« Par contre tes clones à toi je… je sais pas trop comment voir ça. T'es bien le bon Ernest, celui que je connais mais… si les autres sont identiques à toi quand tu as été cloné, ils me connaissent et je les connais, aussi, non, même s'ils sont déjà un peu différents maintenant ? Du coup, je sais pas, se ficher de leur sort, alors que peut-être ils pensent à moi, ça me paraît pas bien… je sais pas. Mais en même temps ce que je pense, ça ne change pas grand-chose, sûrement. Je sais pas... »

Son visage était pensif, malgré ses aveux d'ignorance répétés, elle se donnait assez de mal pour déterminer la posture qu'elle devait prendre. L'hybride lui avait avoué tour à tour être un truand, puis, le jour d'après, un clone. Laquelle de ces révélations la troublait le plus ? Peut-être aucune des deux : un passé difficile éclairait Ernest sous un angle où il apparaissait paradoxalement plus fragile et plus sensible.

« Mais ce que je sais c'est que j'aime un peu la personne devant moi. Clone ou pas. »

Un pas en avant suffit pour qu'elle se retrouve collée à Ernest, ses bras fins serrant avec douceur le mutant à fourrure tout contre elle. Il n'y avait peut-être pas toujours besoin de grandes réflexions – se mit-t-elle à espérer – pour se sentir un peu mieux.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 12 mars 2015, 14:23:56
Ernest ne répondit rien. Il se contenta de rendre à Eve son étreinte. Elle le serrait, il la serrait et effectivement, le geste dépassait les mots. Il s’abandonna à cette tendresse dont il était peu coutumier, acceptant un instant de n’être rien de plus qu’un adolescent en détresse. Et dire qu’il avait envisagé de convaincre la jeune femme de coucher avec Matt afin de mettre ce dernier dans sa poche. Il eut honte de cette pensée. Ce n’était de toute façon plus nécessaire puisqu’il avait une chance de s’attirer les bonnes grâces de Carval.

Il songea aussi qu’Eve avait raison. Si le sujet prime était encore en vie actuellement, il ne pouvait être que très différent de lui. Leurs chemins s’étaient séparés depuis des mois. Le sujet prime n’était jamais allé à la Confrérie. Il n’était jamais retourné ensuite à l’Institut. Il n’était pas devenu un criminel désireux de se racheter. Non, il n’avait été que la chose du docteur avant de parvenir à fuir. S’il était encore de ce monde, où était-il ? Que pensait-il ? Que faisait-il ? Sa place légitime était occupée par un autre. A quel rôle pouvait-il encore prétendre ? En fait, il était clairement de trop. Mieux valait qu’il soit réellement mort.

Et que penser des autres clones de première génération ? D’après Richard, pas grand-chose. Ils étaient dans un sale état. Les organes issus de la vivisection devaient leur être réservés. Ernest était le seul clone de première génération à peu près intact, le seul dupli câble et c’était bien la seule chose qui pouvait le rassurer. De là provenait sa valeur.

Qu’en était-il du clone de seconde génération, celui qu’Ernest avait vu sur l’écran du scientifique ? Il pouvait éprouver un peu d’empathie à son égard car son destin n’allait sûrement pas être très drôle. Ce clone ci ignorait tout, il devait penser être le vrai Ernest et pourtant, rien n’empêchait Richard Carval de le sacrifier dans l’une de ses expériences. Quel genre d’expériences d’ailleurs ?

L’hybride-rat, sans cesser de réfléchir, se dressa sur son lit pour arriver à la hauteur de la jeune femme. Il glissa son museau sur son épaule, contre son cou. Il continuait de la serrer, d’être contre elle. Ses jambes nues percevaient le tissu de sa tenue. Si elle, de son côté, devenait plus entreprenante, il risquait fort d’avoir envie de sexe. Il n’était pas un amateur en la matière. Et il n’était pas du genre à se refuser des plaisirs, au contraire. Mais pour l’instant, il n’y pensait pas. Ce n’était qu’affection sincère. Elle était si gentille avec lui. Il en avait besoin.

« Merci, dit-il au bout d’un moment, presque dans un murmure. On verra bien de quoi est fait l’avenir. On n’a que peu de prise sur lui. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 15 mars 2015, 19:04:49
La jeune fille laissa l'étreinte se poursuivre autant qu'Ernest en eu besoin, puis s'écarta d'un pas avant de s’asseoir sur le lit, à côté de lui. Elle lui sourit en hochant la tête.

« Oui, de toute façon, comme on ne contrôle rien... il ne reste qu'à se détendre, pas vrai ? Puis, faire attention les rares fois où on peut choisir quelque-chose. Au moins, tu es sûr de la valeur que tu as pour eux. »

Elle disait cela gentiment, mais on pouvait déceler dans son ton une pointe d'angoisse dissimulée, probablement parce que ce n'était en rien son cas. Son avenir était encore plus incertain pour elle que celui de l'hybride, face à ce nouveau docteur qui ne paraissait absolument pas s'intéresser à elle.

Quelques minutes encore passèrent avant que la porte ne s'ouvre. Se profilèrent le nez bandé de la requine et un petit chariot d'hôpital, semblable à ceux qu'Ernest avait déjà vus circuler dans le complexe, qu'elle poussait devant elle. Elle le positionna dans la cellule et lâcha un simple :

« N'en mettez pas partout » avant de refermer la porte.

Sur le chariot, deux assiettes fumantes, dont l'excellente odeur de viande embauma vite toute la pièce. Il s'agissait de deux steaks, qui ressemblaient à du bœuf, encore un peu saignants, accompagnés de petits féculents vert-gris en forme de cacahuètes, atypiques mais assez appétissants. Il y avait également des couverts en métal, fourchettes et couteaux, et deux verres à whisky. En effet, une pleine bouteille d'un whisky breton, 10 ans d'âge si on en croyait l'étiquette, trônait fièrement entre les plats.

« Oh, ça c'est fou. J'ai jamais eu quelque-chose comme ça. »

Eve se leva pour aller examiner le chariot, et repéra rapidement un petit morceau de papier posé à côté de la bouteille.

« Il y a un mot :
      De ma réserve personnelle,
      Bois à la santé notre collaboration future.
      Richard.

En alcool je n'y connais rien, mais le reste a l'air meilleur que tout ce que j'ai mangé depuis que je suis ici. Ça ressemble à ce qu'on servait dans les restaurants où m'emmenait mon oncle. Peut-être que le docteur est devenu plus sympa ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le dimanche 15 mars 2015, 23:02:50
Immobile sur son lit, une main portée à son museau, Ernest regardait le chariot, effaré. Il ne s’était pas du tout attendu à cela. Déjà des privilèges ? Avant même la punition promise ? Peut-être un moyen de le motiver à agir docilement. Il ne doutait pas un seul instant de l’effroyable talent du docteur Carval dans l’exercice de ses fonctions, à savoir la recherche scientifique affranchie de toute considération morale. Mais quand était-il de ses talents de manipulations ? Avait-il besoin de subtilité dans la présente situation ? Était-ce déjà la stratégie du bâton et de la carotte ? L’hybride-rat tenait à comprendre. Comprendre pour prévoir. Prévoir pour planifier. Ce plateau repas le troublait. Puis il jugea qu’il se pausait trop de questions. Il se laissa aller à l’enthousiasme.

« Plus sympa ? Ho, non. Mais je l’ai surpris en lui jurant que je serai sage. Ça l’arrange que je sois coopératif. Peut-être qu’il veut me montrer à quel point c’est également dans mon intérêt de l’être. »

Il sauta au sol et s’approcha du chariot. Il considéra la viande avec un brin de suspicion. Il se pouvait fort bien que ce soit du rat, du gros rat. Il préféra ne rien dire. Il saisit la bouteille de sa main valide et la déboucha avec les dents. Son efficacité trahissait l’habitude. Il remplit les deux verres et en tendit un à la jeune femme. Puis il prit le sien.

« Je suis contant que tu puisse bénéficier de mon traitement de faveur, Eve. Qui sait, peut-être que les jours prochains ne seront pas si insupportables que ça. A ta santé ! »

Il trinqua et but. Il avait l’intention de profiter du repas autant que possible.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 16 mars 2015, 00:20:23
La jeune fille regardait le plateau avec une certaine fascination. Elle s'était saisie doucement d'un couteau, qu'elle examinait sous tous ses angles, le faisant tourner avec une précaution un peu ridicule entre ses doigts.

« C'est un vrai, il a même une pointe. D'habitude, ils font tout pour qu'on ne puisse pas agresser un gardien, ou pire, se suicider. En tout cas, il doit te faire un peu confiance, j'imagine. »

Elle reposa l'instrument en métal et considéra le verre que lui tendait Ernest. Elle le saisit avec la même délicatesse dont elle avait fait usage pour manipuler le couteau, comme s'il s'était agi d'un objet tout aussi dangereux. Le liquide doré luisait sous la lumière blafarde du néon du plafond.

« Je n'ai jamais bu d'alcool. C'est bon ? »

Comme elle voyait qu'Ernest ne se gênait pas pour boire, elle le porta à ses lèvres, qu'elle trempa dans le breuvage. Eve eut instantanément une grimace de dégoût. Elle reposa le verre sur la table avec empressement.

« Non… peut-être plus tard. »

Elle prit plutôt son plat et ses couverts, et alla s’asseoir sur le lit. Les bouchées méfiantes des deux prisonniers purent leur apprendre que la nourriture était aussi agréable au palais qu'elle l'était pour l’œil et pour le nez. Le goût était un peu fort, comme s'il s'était agi de gibier, mais la viande, assez épaisse, était très bien cuisinée et très tendre : elle fondait presque dans la bouche. Les féculents, eux, avaient le goût de haricots, en un peu plus salés, sans qu'il soit possible de savoir si cette propriété leur était intrinsèque ou si elle provenait de la manière dont il avait été préparés. Ils avaient toutefois une certaine tendance à donner soif.

Son assiette bien entamée, Eve se leva pour aller chercher de nouveau son verre d'alcool.

« Bon… deuxième essai ? On m'a dit que c'était moins mauvais la deuxième fois. »

Cette fois, elle parvint à en ingurgiter une gorgée avant de s'interrompre, les yeux légèrement rouges. Elle sourit cependant, l'air contente d'avoir franchi le pas. Mais l'adolescente ne comptait manifestement pas s'arrêter là. Elle braqua un regard bleu enthousiaste dans celui d'Ernest.

« J'ai vu un jeu dans une série sur la fin du monde : je dis quelque-chose que je n'ai jamais fait. Si tu l'as fait, tu bois un verre. Si tu ne l'as pas fait, je bois un verre. Ensuite, à ton tour. Je commence par, hmm… je n'ai jamais été arrêtée par la police. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 16 mars 2015, 08:51:42
Ernest s’amusait beaucoup à regarder la réaction d’Eve. Cela lui allégeait aussi la conscience. Ramper devant Richard Carval lui coûtait. C’était lâche, pitoyable. Lui qui avait toujours rêvé d’être un héros se considérait désormais comme un zéro. Se jurer qu’il allait en profiter pour s’enfuir ne suffisait guère à accepter cette soumission car au fond de lui, il savait que sa terreur du docteur le liait plus fermement que des chaînes. Oserait-il réellement retenter quelque chose s’il vivait dans des conditions acceptables ? N’aurait-il pas trop à perdre ? Au moins, il offrait un peu de joie à sa collègue d’infortune. Un petit succès. Il devait retrouver son ami Nyx et faire en sorte qu’il soit transférer ici, qu’il puisse lui-aussi bénéficier des privilèges. Ainsi, il pourrait être un peu fier de tout cela, justifier sa conduite. Il n’y avait que deux lits dans la cellule mais les deux hybrides étaient assez petits pour occuper le même sans se bousculer.

La proposition d’Eve extirpa l’hybride-rat de ses réflexions. Voilà un jeu plaisant. Il opina puis, sans rien ajouter, vida son verre. Car oui, il avait été arrêté par la police.

« Je dois te prévenir, je tiens très bien l’alcool. Même si je buvais toute la bouteille, ce n’est pas certain que je commence à en ressentir les effets. »

Il eut un sourire coquin.

« A mon tour. Je n’ai jamais... eut de mauvaise note à l’école. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 16 mars 2015, 11:50:35
Souriant, la jeune fille apprécia ce premier tour de jeu remporté. Elle ne prit pas réellement la déclaration d'Ernest au sérieux. Après tout, s'il était un plus épais qu'elle, il était surtout plus petit.

« Frimeur ! Tu peux pas être aussi résistant que ça. Enfin. Je n'ai été à l'école que la dernière année, pour la middle school. J'aurais dû faire une deuxième rentrée après. À la fin j'étais dans les meilleures de la classe, mais bon, en début d'année j'ai eu quelques mauvaises notes, alors je suppose… »

Eve contempla son verre d'un air grave. Elle en avait déjà bu une gorgée, mais il en restait beaucoup, de son point de vue, dans le récipient. Après avoir hésité une seconde, elle se pinça le nez et bascula le contenu du verre dans sa bouche, suite à quoi elle eut un toussotement mouillé qui menaça de lui faire régurgiter ce qu'elle venait d'avaler. Mais finalement la dose d'alcool parut passer.

Un air victorieux passa sur le visage de l'adolescente.

« Ça brûle la gorge, mais on m'a déjà fait pire. Qu'est-ce que tu dis de : je n'ai jamais vu mon père embrasser ma mère. Je ne sais même pas s'ils se sont aimés, un jour. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le lundi 16 mars 2015, 14:32:03
Ernest se garda bien d’expliquer que sa résistance à l’alcool était dû à sa mutation. L’Altérium le protégeait de tout ce qui pouvait affecter son organisme. Sur lui, même les drogues classiques étaient sans effet ou presque. Pour être ivre, il devait vraiment boire comme un trou. Non, inutile d’expliquer. C’était tellement mieux de le prouver. Il considéra avec intérêt la bouteille de whisky. Il se dit qu’Eve allait avoir son compte très rapidement. Comment se comporterait-elle alors ? Il était curieux de le découvrir. Mais inutile de hâter les choses.

Normalement, la jeune femme aurait dû vider de suite un nouveau verre. Le petit mutant avait vu ses parents s’embrasser à quelques reprises. Ashley était très spontanée. Mais cela, c’était avant l’éveil de son gène X, avant qu’il ne devienne un rongeur humanoïde. Il mentit très légèrement.

« Avant, mes parents s’aimaient et je ne doute pas qu’ils se sont embrassés de nombreuses fois. Mais jamais devant moi. »

Il se servit un verre.

« Quand je suis devenu ce que je suis, leur vie de couple a viré au vinaigre. Ma mère n’a pas accepté, elle a réclamé le divorce. »

Sa mère ? Il réalisa qu’il n’avait pas de mère, ni de père. C’était le sujet prime qui en avait. Tout compte fait, c’était vraiment à lui de boire, ce qu’il fit, cul sec. Inébranlable, il poursuivit :

« Et puis, d’un point de vue technique, je n’ai pas de parents, je suis un clone. »

Il ne disait pas cela d’un ton triste. Une mère comme Ashley Willard, il s’en passait sans regret. C’était presque un poids de moins. Quant à Philippe Lenoir, il n’était déjà plus de ce monde. Ernest s’intéressa à son assiette. Il n’allait pas perdre une miette de ce festin. Il adopta ensuite une pose fanfaronne, oubliant qu’il n’avait toujours pas renfilé son pantalon. C’était révélateur d’une autre habitude.

« Bon. Deux verres et toujours sobre. A mon tour... Je n’ai jamais eu l’impression d’être normal. Avant la révélation de ma mutation, j’étais fils de milliardaire et surdoué en prime. Ma vie a toujours été particulière. »

Là encore, il réalisa qu’il parlait d’un passé qui n’était pas le sien. Il ne voulut pas rectifier.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le lundi 16 mars 2015, 23:24:43
Eve ne se rendit compte qu'à posteriori que les questions sur la famille étaient peut-être à éviter, vis à vis de quelqu'un qui venait de découvrir qu'il était un être totalement artificiel, conçu en laboratoire, et dont la mémoire était celle d'un autre. Elle faillit s'excuser maladroitement, mais voyant qu'Ernest ne semblait pas trop lui en vouloir, elle n'en fit rien. À la place, elle adopta une expression faussement courroucée.

« Hey, c'est un peu de la triche, ça. Se sentir, pas se sentir… Enfin. J'étais dans une école privée, tous les enfants avaient de l'argent. J'étais pas encore mutante, j'avais des amies. Alors je pense que j'étais normale. Une fille normale. »

Elle se versa un verre et, tout en regardant son compagnon de cellule, pour se distraire de ce qui l'attendait peut-être, elle l'inclina de nouveau au-dessus de son visage. Elle s'arrêta à la moitié du contenu, toussant encore. Sa réaction la fit pouffer un peu, cette fois. Elle s'arrêta un instant pour souffler, puis elle s'y reprit et avala la seconde moitié.

« Vi, c'est vraiment moins mauvais les fois suivantes. Alors… »

La jeune fille fronça les sourcils. Même si l'alcool ne s'était pas encore vraiment diffusé dans son sang, elle était un peu rouge, et par effet nocebo, elle devait déjà avoir quelques difficultés à se concentrer. Trouver une question qui ne la ferait pas boire encore devenait plus difficile.

« Je n'ai jamais tué quelqu'un. Aucun animal, même. Je ne supportais pas lorsque les autres enfants écrasaient les insectes. »

Un sourire agréable et un peu lunatique était à présent inscrit sur son visage.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 17 mars 2015, 09:06:01
Ernest baissa les oreilles, joignit les mains et adopta un ton exagérément contrit.

« Ha, ce que c’est fourbe ! Je t’ai avoué mes crimes et tu en profites. Ma vengeance sera terrible, terrrible ! Mais avant, je dois mériter mon juste châtiment. »

Il abordait volontairement ce sujet délicat avec dérision, histoire de ne pas souligner qu’en effet, il était un meurtrier. D’ailleurs, il n’entra pas dans les détails. Il ne précisa pas non plus que c’était bien lui, et non le sujet prime, qui avait du sang sur les mains. Il se versa son troisième verre et le vida cul sec, comme les autres. Il le reposa avec fermeté et brandit les bras.

« Comme du petit lait ! »

Il désigna la jeune femme d’un index menaçant. Il la sentait déjà vaseuse.

« A mon tour ! Depuis l’éveil de mon gène X, je ne me suis jamais coupé les cheveux ! »

Forcément, il n’en avait pas. Le pelage de sa tête était identique à celui du reste de son corps.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 17 mars 2015, 11:09:27
Eve s'exclama aussitôt, rassurée de ne pas écoper d'une dose supplémentaire :

« Tu bois ! Jusqu'à maintenant, je pensais même pas qu'on pourrait avoir des couteaux à bout rond, alors, genre… des ciseaux… aucune chance… et je suis ici depuis que je suis mutante. »

Les feux du whisky échauffaient petit à petit son corps. Elle s'y était attendue et s'en rendait vaguement compte. Le processus, inédit pour elle, lui fit cependant momentanément un peu peur, et elle choisit d'interrompre un instant le jeu. Sans aucune habitude de l'alcool, deux verres d'un breuvage aussi fort étaient déjà une dose importante pour la jeune mutante, dont la constitution était très loin d'être massive.

« Ouais, alors t'es un tueur Ernest ! Quand je suis entrée ça m'aurait fait peur, j'étais tellement conne quand je suis entrée… mais maintenant je m'en fiche. J'étais contente que Loïc casse la gueule à ce monstre, tu sais. Et ça me rassure que tu sois là. Tu me racontes, les gens que t'as tués ? La dernière personne que t'as tuée, par exemple. Est-ce qu'elle le méritait ? »

Son ton était décontracté et un peu exalté. Les premiers effets réels de l'alcool, et sa désinhibition, commençaient à s'y déceler. Mais à la façon avide dont elle posait la question, on pouvait se demander si la boisson ne faisait pas naître chez-elle une légère fascination pour la violence – à moins qu'il n'en soit que le révélateur.

Toujours souriante, elle insista en haussant brièvement les épaules, incitant son compagnon de cellule à lui confier ses crimes sans réserve :

« Tant pis si c'était pas le cas, hein. On a pas toujours le choix. La prochaine personne que tu voudrais tuer… c'est le docteur Carval ? »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 17 mars 2015, 13:13:43
Ernest était un peu surpris qu’Eve lui demande cela. L’alcool y était pour quelque chose, c’était visible comme le nez au milieu de la figure. Face à lui, la jeune femme changeait progressivement et il était toujours aussi curieux de savoir à quoi ce jeu allait aboutir. Il était joueur et il aimait les surprises. Tout en remplissant distraitement son verre, il se mit en devoir de répondre. Il prit le ton de la conversation, comme s’il abordait un sujet anodin.

« Ben... oui, je suis un tueur. Peu de mes victimes le méritaient. Pour certaine, j’en sais rien du tout. Comme je te l’ai dis, j’ai travaillé pour la Confrérie. A plusieurs reprises, on m’a chargé de zigouiller quelqu’un, comme un tueur à gage en somme. Je suis pas très fier de tout ça. »

Il but le verre, toujours cul sec.

« Mais certains le méritaient, reprit-il avec plus de conviction. J’ai passé pas mal de temps à traîner dans la rue. Des gens qui se foutaient de ma gueule, il y en avaient. Ils pensaient que j’étais juste un nabot pouilleux, une raclure qui n’aurait jamais dû sortir des égouts ou des poubelles. Je supporte pas qu’on me marche sur les pieds et je leur ai fait comprendre. Ha ça oui ! Avec eux, j’me suis défoulé ! C’était pas beau à voir, j’te jure ! Au pistolet, au poignard, ou juste avec les dents et les griffes, j’en ai fait des puzzles ! »

Il préférait évoquer les meurtres qui le mettait le plus en valeur. Il préféra également éviter de parler de Carval. Il croisa les bras, bomba le torse et leva fièrement le museau.

« Si quelqu’un te fait chier, il va avoir de mes nouvelles. J’suis ton rat de garde ! »

Il commençait à peine à se sentir un peu plus joyeux que d’ordinaire.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 17 mars 2015, 14:48:26
La jeune fille éclata d'un rire sincère quand Ernest évoqua sa mission de « rat de garde ». Un joli rouge avait à présent envahi ses joues, claires jusqu'alors, mais elle avait l'air heureuse. Elle avait réagi aux récits des exploits meurtriers du mutant avec un enthousiasme paisible mais non-dissimulé.

« Je me sens en sécurité avec toi. Je… crois que je ne me suis jamais sentie aussi bien, depuis que je suis ici, juste, juste avec toi. »

Elle regarda la bouteille : elle avait bu deux verres, alors que son compagnon en avait pris déjà quatre. Au final, il restait encore beaucoup de boisson dans le récipient, sans doute de quoi remplir une dizaine de verres. Elle n'arrivait pas à dire si Ernest se trouvait dans le même état qu'elle. La double dose ne paraissait pas vraiment agir. Mais de toute façon, la conscience des risques semblait s'évaporer peu à peu, à mesure que l'alcool se diffusait dans son sang…

« Alors ma phrase… »

Eve eut un sourire un peu plus puéril qu'à l'habitude. Elle prit son temps et lentement se pencha vers l'hybride.

« Je n'ai jamais fait l'amour avec un garçon… »

Elle avait à la fois chuchoté et parlé très vite, ce qui avait rendu sa phrase à peine compréhensible. Elle en avait probablement assez honte (elle aurait été gênée de devoir le répéter), mais l'alcool faisait son œuvre… et elle ne pouvait pas non-plus cacher une certaine excitation à l'idée d'aborder ce type de sujet avec Ernest. L'adolescente se redressa un peu, et ses joues paraissaient encore plus rougies que quelques secondes avant ; elle gardait quand même bonne figure.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 17 mars 2015, 16:49:41
Décidément, Ernest allait de surprises en surprises. En fait, il ne connaissait pas assez Eve pour prévoir ses réactions en pareille situation. Pour elle-même, l’expérience devait être inédite. Elle semblait heureuse et c’était ce qui comptait. Pour la première fois depuis longtemps, elle pouvait oublier sa condition de cobaye. Le petit mutant eut un rire léger, pas du tout troublé.

« Bon, ben bois. Moi non plus, je n’ai jamais fait l’amour à un garçon, je suis pas homo. »

Il ajouta, sur le ton de la confidence :

« Mais je suis pas puceau non plus. J’avais une petite copine, avant, une hybride féline. Un chat avec un rat, avoue que c’est pas mal ! On s’est bien envoyé en l’air. Puis elle m’a laissé tomber. Sinon, j’ai payé quelques prostituées qui étaient disposées à faire ça avec moi. C’était au moins triple tarif. En fait... en fait... »

Il fixa la jeune femme avec malice et donna sa phrase :

« Je n’ai jamais fait l’amour à une fille non hybride sans avoir à payer. »

Forcément, il allait devoir vider un autre verre, mais il en avait envie, ce n’était pas un problème.

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 17 mars 2015, 20:30:11
L'adolescente accueillit la réponse d'Ernest avec un nouvel éclat de rire, heureuse que l'atmosphère ne se tende pas trop. La question lui avait parut tellement délicate qu'elle avait mal choisi ses mots.

« Bon, c'est la première fois que je perds… Huuh, faudrait pas que ça arrive trop souvent, je… je sais pas comment je vais finir. »

Elle se versa un verre. L'exercice de précision était visiblement plus difficile que la première fois, et Eve dut se concentrer un minimum pour ne pas verser de liquide en dehors du récipient. En revanche, l'ingurgitation fut moins délicate : elle réussi presque à avaler les quelques centilitres d'une seule traite, et ses toussotements habituels ne furent cette fois qu'un léger gémissement amusé.

« Ben, toutes ces filles, elles étaient connes alors. Moi je te trouve très mignon. Je t'aurais rien demandé du tout si j'avais été une… Mh, dis, avec l'alcool, je devrais me sentir mal, pas vrai ? Vomir, tout ça ? Mais, je me sens bien. J'ai jamais été aussi… en forme ! » tenta-t-elle.

Son élocution qui devenait légèrement plus irrégulière témoignait pourtant d'un effet habituel et certain de l'ivresse pour qui était habitué à côtoyer des individus dans cet état. Sans doute l'effet n'était-il pour le moment qu'euphorisant, ou bluffait-elle un peu pour se donner une contenance.

« Oh, tu es bête… Vas y, bois ! Hey, mais tu en es à combien de verres ? C'est ton cinquième ? Est-ce que ça va toujours ? Je vais te faire boire encore… Je n'ai jamais embrassé personne sur la bouche. »

Ce n'était pas très subtil, mais elle avait l'air ravie de sa phrase. Elle attendit qu'Ernest s’exécute puis ajouta :

« On peut arrêter si tu veux. Un super rat de garde qui a trop bu ça ne garde rien… On a qu'à dire qu'on peut remplacer un verre par un gage, à partir de maintenant. Le choix entre un verre, ou un gage. »

Elle se pinça les lèvres tout en continuant à sourire. Depuis une bonne minute, elle gigotait légèrement sur place.

« Excuse, faut vraiment que j'aille aux toilettes. Tu regardes pas, d'accord ? »

S'il y réfléchissait, Ernest se rendrait compte qu'il ne l'avait jamais vu dans cette situation. Comme il semblait peu probable qu'Eve ne produise aucun déchet, il pouvait en déduire que par coquetterie féminine, elle avait soigneusement reporté, parfois avec peine, cette tâche aux moments où il était endormi ou absent. Une coquetterie féminine que l'alcool semblait assouplir.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 17 mars 2015, 21:19:15
Effectivement, Ernest ayant déjà embrassé quelqu’un sur la bouche, il dut boire un verre supplémentaire. Il ne se donna même pas la peine d’expliquer quoi que ce soit à ce sujet, tant tout était limpide.

« Un gage, ouais, bonne idée. Moi, ça me va. Mais je tiens le choc, t’en fais pas. Je te l’ai dit, je tiens très, très bien l’alcool. »

Les premiers effets d’une ivresse modérée se répandaient en lui. Trop peu pour le satisfaire lorsqu’il buvait seul. Il pouvait sans peine se comporter normalement s’il le voulait. Lorsque la jeune femme lui demanda un peu d’intimité, il se tourna face à un mur et enfouit son visage dans ses bras. Une attitude exagérée, mais c’était pour la forme.

« Vas-y, je regarde pas. »

Et il n’allait effectivement pas regarder. Il n’était pas idiot, il se rendait compte qu’il plaisait à Eve. Elle lui parlait ouvertement de sexe, elle était bourrée, il pouvait avoir sous peu bien plus que quelques visions indiscrètes. Inutile de brusquer les choses. Tout devait venir d’elle. Ainsi, il n’aurait rien à se reprocher.

« Bon, ben c’est à mon tour, déclara-t-il alors qu’il était toujours face au mur. Je n’ai jamais... hummmm... pensé un jour n’être qu’un clone. »

Bien sûr, cette situation étant tout à fait personnelle, il ne pouvait que perdre. Il choisirait sans hésiter le gage. Et si Eve jouait finement, elle pourrait lui en donner un second dans la foulée. Comment allait-elle en profiter ?
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mardi 17 mars 2015, 22:50:23
« Je te fais confiance ! » lança la jeune fille.

L'affaire fut plutôt longue – presque étrangement longue – à se concrétiser, mais finalement, la mutante revint vers Ernest. L'équilibre de son pas, déjà d'ordinaire un peu fébrile, ne s'était pas amélioré. Cherchant à camoufler qu'elle était un petit peu chancelante, Eve prit sobrement appui sur le lit.

Elle n'avait à présent plus aucune retenue de ton lorsqu'il s'agissait de s'exprimer et son élocution était totalement extravertie. Dans un premier temps, son imaginaire désinhibé trouva presque aussitôt quelque-chose d'assez gentil à proposer à son compagnon de cellule.

« Rooh, mais Ernest, t'en fais encore exprès ! Tant pis alors… puisque c'est comme ça… un verre, ou alors, tu danses quelque-chose… ce que tu veux ! Tu as déjà appris à danser ? Moi je faisais du ballet ; ballet classique ! J'aurais aimé en faire encore, encore, j'étais super… douée… Je suis sûre ; t'es doué aussi… »

Eve ramena le bras qui ne lui servait pas à assurer sa posture debout sur sa hanche, dans la position de celle qui attendait une démonstration avec sévérité, voire scepticisme. Elle était contente de son idée des gages : le jeu n'aurait jamais pu durer si longtemps dans le cas contraire, même si Ernest échouait volontairement à poser des affirmations pertinentes et qu'il semblait avoir une résistance surnaturelle à l'alcool. Elle s'en rendait à peine compte. À présent, elle pouvait se permettre elle aussi de détourner le jeu.

« Mais moi aussi je peux être nulle si je veux… je ne suis jamais allé sur Mars. Haha ! »

Ses yeux brillaient, d'amusement, et sans doute aussi un peu de fantasme, dans la perspective de ce que l'hybride pourrait lui demander. Elle n'avait plus du tout l'air farouche.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mardi 17 mars 2015, 23:26:23
« Ok, je vais danser. »

Ernest n’avait jamais appris une quelconque chorégraphie. Lorsqu’il se rendait en boîte de nuit, il se contentait de s’agiter en rythme. Et il avait un bon sens du rythme. S’ajoutait à cela une agilité certaine, une énergie débordante et un entraînement martial. Il avait en somme toutes les cartes en main pour improviser honorablement quelque chose. Il se lança dans une démonstration acrobatique assez exubérante sur un tempo soutenu qu’il marquait de sa voix. Plusieurs des figures qu’il exécuta étaient largement hors de portée d’un néophyte et, plus encore, d’un néophyte ivre. Il se tint notamment en équilibre sur son unique main tout en soulignant le tempo en heurtant ses chevilles l’une contre l’autre. De retour sur ses pieds, il tourbillonna assez gracieusement en imprimant à sa queue un mouvement fluide. Tout ne fut pas parfait pour autant. Certains enchaînements étaient un peu douteux, mais tant pis. Il finit par s’immobiliser face à Eve, qui venait de donner sa phrase. Il s’inclina théâtralement devant elle, comme si elle était tout un public, avant de déclarer :

« Puisque c’est ainsi, ton gage est de danser avec moi ! »
 Il comptait sensiblement baisser son rythme et le niveau de ses cabrioles afin que la jeune femme, plus vacillante qu’elle ne voulait le laisser voir, puisse l’accompagner sans problème. Quand elle se fut exécuté, l’hybride rat reprit malicieusement la parole :

« Je n’ai jamais fait de voyage en sous-marins. »
 
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 18 mars 2015, 11:15:45
La démonstration de danse d'Ernest fit son effet sur Eve. Elle était en effet très impressionnante, et la jeune fille n'avait pas vu exécutées de telles acrobaties depuis bien longtemps. Elle applaudit volontiers lorsque l'hybride eut terminé sa partie seul et vint saluer avec classe devant elle.

« Peut-être que je préfère prendre un verre… plutôt que de danser avec toi… mais non… » s'amusa-t-elle.

Elle attrapa toutefois la main qu'on lui tendait sans se faire davantage prier. Les chorégraphies qui suivirent furent nécessairement moins acrobatiques. Eve n'avait pas menti cependant : elle avait très certainement des habitudes et des facilités héritées d'une pratique rigoureuse du ballet. Simplement,  sans être ridicules, l'alcool le manque d'entraînement récent ne rendaient pas les mouvements de son corps fin réellement flamboyants.

« Dommage qu'on ait pas plus, plus de place… »

L'adolescente tenait sur ses pieds et parvint même à esquisser quelques pas, ce qui dans son état était déjà beaucoup. De plus, elle était maigre, beaucoup trop légère pour sa taille, ce qui la rendait facile à manipuler et à rattraper, même pour un partenaire avec la carrure d'Ernest. Au fur et à mesure de la danse, Eve hésitait de moins en moins à se rapprocher de son compagnon de cellule, et  n'évitait plus du tout le contact, les frottements, entre leurs corps. On pouvait même la soupçonner de les favoriser un peu.

Finalement, elle profita d'être collée au mutant pour lui imposer son prochain gage.

« Ton gage… tu voudrais… m'embrasser, vraiment ? Ou boire un verre… si tu préfères… et je n'ai jamais été présidente des états-unis. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 18 mars 2015, 11:42:12
Sans chercher à les provoquer lui-même, Ernest ne refusa aucun contact. Il était trop heureux de plaire à quelqu’un, surtout depuis que sa petite copine l’avait largué. Il était ado, les hormones le travaillaient, mais c’était plus que cela. Clone ou pas, il n’avait plus de famille et si peu d’amis. Il se sentait seul, même s’il ne voulait l’avouer. Alors, il tenait particulièrement à ses rares bonnes relations. C’était aussi pour cette raison qu’il voulait retrouver et aider Nyx. La danse se poursuivait, pas aussi ridicule qu’il ne s’y était attendu. Puis vint le gage. Sans répondre, sans hésiter, il se dressa sur la pointe des pieds et déposa un baisée sur les lèvres de la jeune femme. Quelque chose de délicat, pas de grossier. La morphologie de sa gueule et la présence de ses longues incisives rendaient l’expérience un peu atypique pour sa partenaire.

« Satisfaite ? demanda-t-il ensuite, avec un air filou. Puisque je ne suis pas le président, c’est à ton tour de m'embrasser », ajouta-t-il peu après.

Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le mercredi 18 mars 2015, 19:39:33
Un rire tendre suivit le bref contact des lèvres (et museau) des deux adolescents. Eve découvrait la sensation de ce premier baiser, aussi court fut-il, avec bonheur… et d'autant plus d'enthousiasme qu'Ernest ne se retint pas de lui demander de lui retourner.

« Hmm... » répondit-elle seulement, sans rouvrir la bouche, en faisant passer ses cheveux blond-roux derrière ses oreilles pour dégager son visage. « Bon, ne te moque pas trop… »

Elle raffermit sa douce étreinte sur les épaules de son partenaire, et, courbant légèrement le dos, approcha sa bouche du visage allongé. Lorsqu'elle se posa contre la peau de l'hybride, il devint évident que l'adolescente désirait délivrer au mutant un baiser beaucoup plus passionné que le premier. Elle ne savait manifestement pas vraiment comment s'y prendre, mais elle fit tout de même une tentative pour sortir sa langue d'entre ses lèvres pâles, et – comme elle le pouvait – chercher celle de son compagnon de cellule.

La communion buccale fut aussi intense qu'elle put la rendre, leurs deux visages aussi réunis que possible ; assez intense pour qu'un filet de salive lie encore les deux jeunes gens quand, après vingt bonnes secondes, la jeune fille rompit le contact. Elle ne se détacha pas d'Ernest pour autant, et pouffa :

« Oh, c'était drôle… » Son ton devint rapidement plus troublé et s'affaiblit, cependant : « Je… Dis, Ernest… m'oblige pas à demander la suite moi-même. »

À peine eut-elle prononcé ces paroles qu'elle détourna les yeux, et se blottit contre le mutant, sa tête par-dessus son épaule. Tout contre la fourrure du mutant, son cœur battait vite, et fort.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le mercredi 18 mars 2015, 22:32:01
« La suite ? » reprit Ernest avec sa malice de circonstance.

Eve débutait bien. Ses actions témoignaient de son inexpérience mais elle y mettait tout son désir. C’était en fait exactement l’inverse des prostituées dont il avait été le client. Celles-là étaient des professionnels sans motivation à son égard. L’un dans l’autre, il préférait déjà la présente expérience.

« Il me semble que la suite, c’est de cesser de jouer et de passer aux choses sérieuses. »

L’hybride-rat se dégagea avec douceur puis, devant Eve, il retira son haut d’une manière un peu cérémoniale. Il aurait pu faire mieux s’il avait eu ses deux mains, mais il devait se contenter des moyens du bord. Une fois nu, il écarta les bras, tenant toujours l’habit, puis enfin le lâcha.

« La suite, c’est le lit. Enfin, si tu es certaine de vouloir continuer. Tu es sûre de vouloir de moi ? Pour ta première fois, tu choisis un garçon pas mal atypique. »

Il fixa la jeune femme, puis abaissa son regard sur lui-même. Son corps velu et tout de même plutôt musclé. Il se tourna comme pour s’exposer complètement à sa collègue de cellule, même si elle avait déjà tout vu de lui. C’était d’ailleurs ainsi qu’elle l’avait connu puisqu’on l’avait conduit ici dans le plus simple appareil.

« Si tu ne sais pas comment faire, ne t’en fais pas, c’est très simple. Commence par me prendre pour ta peluche. La suite viendra tout seul. »
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 19 mars 2015, 00:21:23
« Non… non, tu es vraiment… bien… beaucoup plus que Matt' beaucoup plus… et beaucoup plus que tout les autres… »

L'émotion d'Eve était visible : elle tremblait même légèrement en regardant Ernest se déshabiller.

« Je dois être nue aussi… pas vrai ? » murmura-t-elle.

Après une hésitation, elle se tourna pour retirer son haut, offrant à son compagnon de cellule la vision de son dos tailladés. Les cicatrices paraissaient d'ailleurs un peu moins marquées que le jour précédent. En revanche, sa maigreur n'était pas moins révoltante, et sa peau martyrisée collait à chacun de ses os. Nue, sa silhouette était très gracile, et si ce n'était sa taille, elle n'aurait pas dépareillé dans un défilé de mannequins en sous-poids.

Le pantalon en tissu recyclé descendit de même lentement sur ses jambes. Il était temps, semblait-il, car, outre les quelques traces de sueur, la fine toile avait commencé à sérieusement s'assombrir à un endroit qui n'avait rien d’innocent. Elle se retourna finalement, son bras gauche cachant sa poitrine, et son autre main posée sur son entrejambe.

Bientôt cependant elle parvint à s'en amuser un peu. Elle eut un rire encore un peu gênée.

« C'est pas juste… j'ai pas autant de fourrure… Enfin, tu m'as déjà vue, de toute façon… »

Elle écarta ses bras, se révélant entièrement. En effet, la densité des pilosité n'avaient rien de comparables, et si lors de la douche l'adolescente n'avait pu se préserver d'une certaine impudeur, ce n'était qu'à présent qu'elle avait réellement l'impression de se montrer d'une façon intime.

« Ça va ? Je… te dégoûte pas trop ? »

L'adolescente avait besoin d'être rassurée, mais elle était aussi curieuse, d'une certaine façon, du jugement qu'un garçon qu'elle désirait pouvait porter sur son corps. Hésitante, elle revint vers Ernest, et chercha de nouveau à se blottir contre-lui.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le jeudi 19 mars 2015, 12:16:47
« Toi ? Me dégouter ? C’est la belle qui demande ça à la bête ? Je serais mal placé pour te repousser. »

Et d’ailleurs, il ne la repoussa pas. Il osa la regarder sans la moindre timidité. Il accepta de se coller à elle sans la moindre réticence. En fait, il transpirait d’assurance, chose peu étonnante car il était tout à fait instruit sur le sujet.

« Tu es maigre comme un clou  et couverte de cicatrices et pourtant, ça suffit pas à te rendre moins charmante. »

Pure flatterie qu’il débitait avec une conviction feinte. Honnêtement, il trouvait Eve banale physiquement. Et elle le demeurerait même remise de sa captivité dans le labo. Elle était trop jeune à son goût. Lui, il fantasmait sur les femmes tout à fait adulte, les gens d’expérience dépourvu d’innocence, les bombes sexys à grosses poitrines et au vice accroché à la peau.

« Et puis, le plus important, c’est ce qu’il y a à l’intérieur. Je dis pas ça comme une sorte d’excuse. C’est une vérité que beaucoup on jamais pigé. Le cul sans sentiment, c’est pas mal, je suis pas contre, mais c’est tellement mieux s’il y a quelque chose derrière. Rien qu’un peu de tendresse et de sincérité, c’est déjà mieux qu’un corps de mannequin. »

Cette fois, il disait le fond de sa pensée. C’était parce que lui-même était particulièrement dépravé et perdu qu’il pouvait paradoxalement appréhender l’inestimable valeur d’une relation amoureuse digne de ce nom. Il sut à cet instant qu’il ne voulait pas que ce moment se change en orgie. Il allait rester délicat et il espérait qu’Eve ferait de même. Le sexe sauvage, ce ne serait pas avec elle. Il aurait l’impression de salir la jeune femme, de briser ce qui lui plaisait en elle. Il la prit par la main et l’entraîna vers le lit.

« Pour les minutes à venir, je suis à toi, ta peluche, ton doudou, ton garçon. »

Encore trop sobre, son cerveau pouvait toujours calculer. Il remarqua les traces moins marquées sur le physique de sa compagne. Était-elle en train de récupérer peu à peu ses pouvoirs de guérisons ? D’une façon ou d’une autre, il devait trouver le moyen de récupérer sa main perdu.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le jeudi 19 mars 2015, 22:58:09
Se laissant prendre par la main et amenée jusqu'au lit par Ernest, l'adolescente ne répondit rien, et se contenta de hocher la tête. Elle était probablement trop intimidée pour formuler une réponse sur un sujet aussi complexe que les sentiments, mais le discours de son compagnon parut lui parler quand même. Sans doute n'avait-elle jamais envisagé la sexualité autrement que comme la concrétisation d'une relation romantique, aussi l'hybride prêchait-il une convaincue. Le simple fait qu'elle n'ait jamais cédé à Matt' signifiait qu'elle attendait un peu plus qu'un physique de joli garçon pour s'offrir.

Elle s'assit sur le matelas et, lorsque son partenaire eut fait de même, remonta sa main le long de son bras et la posa de nouveau sur ses épaules, s’essayant de nouveau à l'embrasser. Un peu moins indécise que lors du premier baiser, l'alcool lui donnant encore un peu de fougue, elle chercha à presser plus naturellement Ernest contre-elle, alors que ses doigts parcouraient doucement la fourrure de son dos. Les langues défaites de nouveau, elle précisa à voix basse :

« Je suis désolée… Je ne sais pas… trop… quoi faire. Je ne m'intéressais pas à… ça… quand je suis entrée, alors j'ai eu juste… juste l'imagination… »

Ses mains passèrent lentement du dos au ventre d'Ernest, sans quitter la surface de sa peau. Enfin elles descendirent, sans trop donner l'impression de savoir ce qu'elles faisaient, vers son entrejambe. Elles ne se décidèrent qu'assez tard à aborder cette zone, à tâtons, la jeune fille n'osant pas vraiment poser les yeux dessus. Elle préférait regarder son compagnon dans les yeux, alors que ses tentatives d'approche, qui manquaient simplement terriblement de technique, se faisaient plus audacieuses.

« C'est… par ici, hein ? » fit-elle, d'un ton redevenu plus léger. Après tout, ça ne semblait pas si difficile…
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le vendredi 20 mars 2015, 00:03:36
« Oui oui, c’est par ici. »

Ernest passa son unique main dans les cheveux d’Eve, avec douceur, tout en la dévisageant. Il la laissait agir à sa guise. Étrangement, il ne parvenait pas à s’abandonner au plaisir du moment. Il avait découvert qu’il n’était qu’un clone. Si le choc initial était passé, cela continuait de le troubler. Lui il était là, sur le point de faire l’amour. Où étaient les autres clones ? Il ne doutait pas un seul instant que tous auraient payé cher pour être à sa place. Des sentiments contradictoires s’affrontaient dans son esprit. Il en fit abstraction un moment, prenant alors l’initiative. Il invita la jeune femme à se coucher. Il se coucha à côté d’elle et, toujours avec délicatesse, passa ses doigts sur la peau aux multiples cicatrices. Ce laboratoire était un lieu monstrueux. Pouvait-il se contenter de ne penser qu’à sa survie ? Ne serait-il pas plus héroïque de chercher à faire cesser ce cauchemar pour tout le monde ? Plus héroïque ou plus stupide. Il se blottit contre Eve, sur le point d’enfin mettre ses réflexions de côté, mais une autre question lui tarauda l’esprit. Et s’il la mettait enceinte ? Et s’il la contaminait à l’Altérium ? Tout ceci n’était pas raisonnable. Ce fut trop. Normalement, il aurait même dû refuser les baisées. Elle pouvait le caresser à loisir, mais il ne fallait pas aller plus loin. Pas sans protection car il tenait à elle. Trop souvent les jeux finissaient en drame.

« Eve, lui murmura-t-il à l’oreille. Je crois qu’on devrait s’abstenir d’aller jusqu’au bout. Tu peux me câliner mais on ne doit pas aller plus loin. Ma mutation pourrait te mettre en danger. Il nous faudra des préservatifs. Excuse-moi, je n’y avais pas pensé tout de suite. »

Sans doute avait-il vraiment changé depuis son retour à l’Institut. Avant, il n’aurait pas hésité une seule seconde. Avant, il aurait été égoïste.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le samedi 28 mars 2015, 14:02:52
Les caresses d'Ernest ne laissaient pas la jeune fille indifférente : engagée dans une ivresse qui s’affirmait, elle gémissait doucement en profitant du contact de la fourrure chaude contre sa peau nue. Elle se sentait plus à l'aise, dès à présent, pour se réfugier entre les bras de son compagnon. Depuis que ce dernier prenait progressivement les devants, elle était en confiance totale, et elle n'avait jamais eu l'air aussi sereine.

Elle parut à peine comprendre ce qu'impliquait la réserve qu'il lui énonça bientôt. Son cerveau n'était probablement plus en état de considérer les choses concrètement, et elle accepta la restriction comme un élément sans importance, qui n'allait certainement pas couper court à la transe sensuelle dans laquelle elle était plongée. Elle était loin encore d'avoir peur.

« D'accord… T'en vas pas, c'est tout… » murmura-t-elle, en entremêlant ses jambes avec celles du mutant, comme pour l'empêcher de s'éloigner.

Il était clair qu'elle ne prendrait aucune autre initiative pour le moment et que si le rapport devait aller plus loin dans l'immédiat, ça ne serait sans doute pas de son fait.

Ce ne fut toutefois pas dans la tête de la prisonnière que s'opéra un changement. Le cerveau de l'hybride, s'il était encore bien en état de réfléchir, devait réaliser peu à peu quelque-chose d'anormal dans son propre corps. Sa bouche se remplissait de salive dans des proportions inhabituelles, ce qui devait finalement l'obliger à en déglutir de grosses quantités. Sa sudation, de même, se faisait excessive, alors que la température n'avait pas beaucoup augmenté, il sentait la sueur par grosses gouttes ruisseler dans sa fourrure. De ce qu'il pouvait constater, Eve était d'ailleurs dans un état proche. Enfin, alors qu'il s'était soulagé il y avait peu de temps, une envie d'uriner menaçait de tirailler de nouveau dans sa vessie.

Ces symptômes ne pouvaient lui rappeler qu'une chose, enfouie dans les méandres d'une mémoire qui n'était pas la sienne : l'augmentation de la production de fluide corporel était l'effet majeur du Tantale.

Peut-être serait-il en mesure néanmoins de constater que des éléments s'ajoutaient aux sévices physiques de la substance. En effet, il devait constater que sa pensée était elle-même peu à peu altérée. En réalité, mais ce n'était au départ que très insidieux, il devait avoir l'impression qu'elle se dissociait…

Quelque-chose de différent naissait peu à peu. Quelque-chose qui était lui ; mais une partie de lui seulement. Les modes de fonctionnement les plus primitifs de son cerveau. Ils menaçaient de prendre le dessus, et déchargeaient avec une force toujours croissante les pulsions les plus animales : manger, boire, et surtout se reproduire. Son être conscient et raisonnable, lui, devait perdre les commandes. Au fur et à mesure que la substance agissait, il deviendrait de moins en moins capable de contrôler ce corps animé d'une sous-intelligence bestiale, réduite à un spectateur impuissant, mais toujours parfaitement éveillé.

Même s'il elle avait probablement déjà commencé, la transformation était comme une ivresse, progressive et, lorsqu'on se s'y attendait pas, sournoise. Il lui faudrait plusieurs minutes pour changer un être maître de lui-même en une presque-bête schizophrène.
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Mascotte le samedi 28 mars 2015, 19:22:48
Sitôt qu’Ernest eut constaté son état anormal, il pensa immédiatement à la bouteille d’alcool. Le produit était dedans et lui, en grand imbécile, avait bu verre sur verre ! Pourquoi ne s’en était-il pas douté ? Était-ce là la punition promise par le docteur ? Maudit soit-il ! Mais le petit mutant était le premier fautif. Il avait baissé sa garde, il avait accepté sans se méfier un cadeau de Carval, un cadeau bien trop hâtif pour constituer une récompense. Non, vraiment, il était stupide !

Il ferma les yeux, chercha à rassembler ses pensées. Il devait tout de suite se séparer d’Eve, stopper ce qui était en train de se mettre en place avant que ce ne soit trop tard. Mais n’était-ce pas déjà le cas ? Il sentait les mains de la jeune femme sur son corps. Il sentait sa peau, sa chaleur. Il avait envie d’elle. Même sans la drogue, il avait du mal à s’abstenir. Il se raidit, tenta de se redresser. Eve le retint dans son étreinte passionnée. Elle avait emmêlée ses jambes dans les siennes. Il se laissa retomber sur le ventre de sa compagne. Il nicha sa tête dans son cou, se frotta à elle, entreprenant malgré lui. Quoi qu’il ne divergeait pas encore de la ligne de conduite qu’il s’était fixé.

« Tu peux caresser ça aussi », lui murmura-t-il.

De sa poigne moite, il lui saisit une main qu’il guida sur ses fesses velues, constellées de gouttes de sueur. Dans le même temps, il lui mordilla l’oreille, bavant au passage sur le matelas. Sa respiration s’emballait. Tout s’emballait. Son érection en témoignait. Sa queue de rongeur, elle, palpitait, comme électrisée. Il essaya encore de se contrôler. Mais il ne contrôlait plus rien. Il écumait comme s’il avait la rage. Il devenait brusque dans ses mouvements, sauvage. Sa partie lucide de sa conscience fut envahie de honte lorsqu’il se vit uriner sans retenue sur Eve. Il trempa ses propres jambes. Le lit allait être dans un sale état. Avec la transpiration, il avait un peu l’impression de patauger. La scène n’avait rien, strictement rien d’érotique. Non, c’était pathétique.

« Caresse plus ! Plus fort ! Tire ! Pince ! » ordonnait-il d’un ton qui frôlait la démence.

Haletant, la langue pendante, le regard fou, il la pénétra, esclave de ses pulsions. La suite était toute tracée...
Titre: Re : Le Cauchemar d’Ernest [PV]
Posté par: Le Messager le dimanche 29 mars 2015, 04:30:33
Les premières secondes, Eve parut ravi qu'Ernest se montre un peu plus entreprenant et actif. Le corps brûlant, elle se laissait manipuler par les mains expertes de son compagnon, ne retenant pas les quelques gémissements plus sonores qui traversèrent ses lèvres, conséquences de son plaisir naissant. Elle ne broncha même pas lorsqu'elle sentit ses longues dents venir taquiner son oreille. Pour elle, tout ça n'avait finalement pas vraiment changé : ce n'était encore qu'un jeu.

Lorsque l'hybride commença à devenir réellement féroce, elle ne se plaignit pas davantage. Elle se contracta un peu, devint plus raide. Elle appréciait un peu moins ce nouveau traitement, qui allait trop vite pour elle, qu'elle ne comprenait pas. Mais l'alcool et l'inexpérience aidant, elle se dit que cela devait faire partie du processus.

Pendant plusieurs minutes encore, elle n'osa rien dire, espérant que son partenaire se rende compte qu'elle était moins enthousiaste, et tempère un peu ses ardeurs. Elle ne voulait pas gâcher le plaisir du mutant, ou pire, donner raison à Matt' qui se plaisait à la qualifier de frigide. Ce ne fut que lorsqu'elle sentit l'urine couler sur son ventre qu'elle émit un début de protestation. Même elle se rendait compte que ce n'était pas un comportement normal.

« Ernest… qu'… qu'est-ce que… tu fais ? » gémit-elle, soudainement angoissée. « Arrête, s'il te plaît… s'il te plaît : tu me fais peur… »

Elle prit encore du temps, pourtant, à commencer à se débattre. Seulement la pression qui s'exerçait à présent entre ses cuisses lui confirmèrent que la situation n'allait pas s'améliorer.

« Je comprends pas, je comprends pas tu avais dit… » elle haletait, cette fois réellement paniquée.

Elle poussa une plainte alors que le sexe de l'hybride s'introduisait en elle sans précaution. Au moins la lubrification n'était-elle pas un problème. En s'enfonçant, la verge déchira, probablement sans y prêter attention, le dernier témoin de sa virginité, et ressortie tâchée d'un peu de liquide rouge.

« Ça fait mal, arrête ! Ernest ! » l'adolescente sanglotait et criait à présent, s'agitant en cherchant à se débarrasser de cette masse hostile au-dessus d'elle.

Moindre mais notable sensation ressentie par le mutant, apparurent à l'extrémité de son moignon bandé des picotements. S'il n'y avait pas eu de pansement, il aurait pu constater que des bourgeons de doigt se formaient progressivement.

Avant que son compagnon de cellule ne puisse réellement donner de rythme au coït, la jeune fille parvint à chuter de la couche étroite, atterrissant sur le sol et frappant, sans vraiment le vouloir, l'hybride du talon. Dans un fracas, le chariot qu'elle percuta se renversa. Rampant sur le dos, fébrile, elle tenta de s'éloigner.

« Laisse moi… »