« I am the passenger
I stay under glass
I look through my window so bright
I see the stars come out tonight »
Dans son immense appartement, Milwën écoutait de la musique terrienne, un cadeau qu’un cadre de la société lui avait apporté suite à ses vacances officieuses sur Terre, vacances qui avaient aussi servi de voyage d’étude sur le comportement terrien, à l’occasion d’un séminaire tout aussi secret sur le comportement d’une société « uniraciale », c’est-à-dire une société où il n’y avait que des humains. D’un strict point de vue politique, une société de ce type était très intéressante, car on y observait que, malgré des caractéristiques génétiques tendant à considérer que les Terriens ne formaient qu’une seule race, ils avaient tendance à se considérer comme des races différentes. Ce voyage serait l’occasion de tout un colloque confidentiel sur ce qui faisait une race, l’exemple terrien étant évidemment sur toutes les lèvres. Cependant, du fait du secret national, de l’intérêt impérieux de la Nation, Novac n’avait pas le droit de parler de ce colloque, et toutes les publications seraient concentrées exclusivement entre les mains des militaires. La Baronne attendait toutefois ce moment avec impatience, et, pour s’imprégner de la culture terrienne, elle écoutait de la musique, regardait des films terriens, et lisait des livres. On pouvait dire bien des choses sur les Terriens, mais ils avaient une production artistique plutôt bonne. Milwën se régalait à écouter Iggy Pop. Assise sur un confortable fauteuil en cuir, jambes croisées sur son bureau, elle avait la tête renversée en arrière, et, tout en écoutant la musique, sirotait un bon verre de vin d’origine nexusienne. Il n’y avait rien de mieux pour commencer la journée.
Cette dernière s’annonçait particulièrement riche en rebondissements. Outre l’organisation du colloque scientifique, Milwën devait aussi planifier une réunion entre les Tekhanes et une délégation ashnardienne, qui se tiendrait dans les salons privés de Novac Tower. Cette réunion faisait suite aux dispositions ayant été prises il y a plusieurs mois entre Tekhos, Novac et Ashnard, afin d’organiser un traité mutuel de coopération face à la menace formienne. Concrètement, devant l’augmentation sensible des bio-infestations à travers le monde, Tekhos avait passé des accords pour permettre une intervention plus rapide des forces tekhanes, afin de lutter contre la menace formienne. De tels traités étaient passés avec la plupart des États forts de Terra, incluant aussi Nexus, mais, concernant Ashnard, la situation avait été plus problématique. L’Empire étant une dictature, les questions portant sur la remise en cause de sa souveraineté étaient des questions houleuses, glissantes, et risquées.
*L’une des conditions de ce traité était de leur accorder un droit de regard sur nos installations... Fort heureusement, leurs connaissances limitées font que, même si, par le plus extraordinaire des hasards, ils mettaient la main sur nos formules, ils n’y comprendraient rien.*
Pour autant, la prudence était de mise, car on ne savait jamais ce qui pouvait arriver. Devant les jours tendus qui s’annonçaient, Milwën préférait donc se détendre, ce qu’elle faisait de toute manière à chaque fois. La musique se terminait tranquillement quand une sonnerie retentit dans la pièce. Soupirant légèrement, Milwën reposa son verre sur son bureau circulaire, puis appuya sur un bouton de son téléphone. Un holoprojecteur diffusa immédiatement devant elle une petite image, une sorte d’écran translucide montrant sa secrétaire, Wanda (http://artgerm.deviantart.com/art/Pepper-Grayscale-II-282317425?q=gallery%3Aartgerm%2F157933&qo=86).
« La délégation ashnardienne est arrivée au port, Baronne.
- Fort bien. »
Tout en parlant, Milwën s’était relevée, regardant par ses énormes baies vitrées Novac City. La capitale s’étendait à perte de vue. Sans égaler les grandes métropoles tekhanes, Novac City restait une cité impressionnante, une cité bioécologique où les capteurs de pollution flottaient toujours dans le bas. Comment ne pas ressentir un élan de fierté en voyant ces fières tours ? Novac était un exemple pour le monde entier, sur de nombreux points de vues.
« Ils désirent naturellement instamment vous voir » rajouta prudemment Wanda.
La Baronne esquissa un léger sourire, avant de se retourner. A chaque fois qu’elle marchait, ses plaques d’armures cliquetaient légèrement sur son corps.
« Dites-leur que je les recevrais comme en dispose mon agenda, durant la réception à Novac Tower.
- Très bien, Madame.
- Et... Wanda ?
- Madame ?
- Vous ne m’avez pas dit comment votre WE s’est passé, avec Nila.
- Oh... »
Wanda venait d’arriver récemment à Novac, et ne savait pas que Milwën avait une mémoire d’éléphant. C’était, non seulement quelque chose d’instinctif, mais aussi lié à ses nanomachines. Ils accroissaient de manière sensible ses capacités intellectuelles. Les chercheurs qui comparaient les non-implantés à de « futurs primates » n’étaient pas si éloignés que ça de la vérité. Les nanomachines permettaient au cerveau humain de fonctionner bien plus efficacement, sans saturation, et donc de stocker un bien plus grand nombre de données.
« Et bien... Il s’est bien passé, Madame.
- Ne soyez pas si renfermée, Wanda. Vous êtes l’une de mes secrétaires personnelles, ce qui revient à dire que nous sommes appelées à nous connaître intimement.
- Euh... Et bien, nous... Nous avons fait l’amour, Madame.
- Voilà qui est mieux. »
Avec un léger sourire, Milwën termina la conversation.
En contrebas, la réception du bâtiment central de Novac, le nouveau siège administratif de MERCATEL, était immense. Il y avait des centaines de personnes qui entraient et ressortaient, et la salle de réception s’étalait sur deux étages, avec des escalators, des murs qui semblaient faits d’or. Il fallait traverser un portique de sécurité avec des détecteurs de métal, et des gardes, pour pénétrer dans les locaux. Le bureau de réception était un grand bureau circulaire comprenant une quinzaine d’hôtesses, environ. De grands écrans plats en hauteur donnaient des informations, que ce soit des spots publicitaires vantant les implants génétiques, les séjours touristiques, ou donnaient des informations. Il y avait dans la seconde partie du hall de réception une rangée d’ascenseurs pouvant contenir au moins une quinzaine de personnes. Les caméras de sécurité étaient de discrets ronds oculaires dans les coins, et, pour orner le tout, une rotonde dominait la pièce, montrant un ciel artificiel, correspondant au temps qu’il faisait dehors.
Ce fut devant une hôtesse aux cheveux roses foncés, Sonia (http://artgerm.deviantart.com/art/Pepper-Delivery-260140112?q=gallery%3Aartgerm%2F157933&qo=102), qu’Izanami se rendit. Elle portait de longs gants de rouge, et une sorte de combinaison blanche moulante qui la dénudait partiellement. Une très belle femme, qui fit un sourire ravissant devant la femme.
« Bonjour, Madame. Puis-je vous être d’une quelconque assistance ? »