Le Grand Jeu

Plan de Terra => Ville-Etat de Nexus => Discussion démarrée par: Archie le dimanche 24 février 2013, 21:22:38

Titre: Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le dimanche 24 février 2013, 21:22:38
Archie était arrivé la veille, par un portail que son protecteur avait dressé pour lui. La discussion entre-eux avaient été âpre, mais en fin de compte, ils avaient fini par tomber d'accord. Même le jeune garçon ne pouvait rester vigilant 24h sur 24, et ceux qui lui en voulaient, eux, ne lui laissaient pas de répit. Après ce qui s'était passé dans le quartier de la Toussain, ils n'hésiteraient même plus à venir le chercher jusque dans le lycée lui-même. Il n'était plus en sécurité nulle part... nulle part sur Terre. Cela faisait longtemps qu'il connaissait l'existence d'une autre dimension, il l'avait lu dans l'esprit de l'incroyable nombre d'individus étranges qui déambulaient dans Seikusu. Il en avait croisé au moins une centaine, et estimait leur nombre à un bon millier. La décision avait donc été prise : la seule façon qu'il lui restait d'échapper aux chiens fous dépêchés par ses créateurs, c'était de changer de dimension. Rien que ça. Les capacités de son cerveau avaient beau être formidables, il ne trouvait pas dans les sciences modernes d'équation pour expliquer comment cela était possible.

Et pourtant, il avait traversé cet étrange cercle, et il était arrivé dans une ville, qui, à l'évidence, n'était pas du même monde. Il se serait cru retourné au moyen-âge, aussi bien culturellement qu’architecturalement. La noblesse côtoyait l'esclavagisme, la justice expéditive à base d'avis de recherche, le banditisme à l'ancienne. Si ce n'était que les individus qui y déambulaient n'avaient pour certain pas grand-chose d'humain, hybrides animaux, elfes, et même vampires. Scrupuleux et méthodique, il avait entreprit de parcourir la ville pour s'en constituer une carte mentale : évidemment, la tâche n'était pas possible à faire en un jour. Aussi s'était-il couché et avait reprit le lendemain.

Le petit matin revint, et Archie, après avoir pris un repas de tripes et de pommes de terre qu'il trouva d'une saveur affreuse -mais il n'était pas difficile- sortit de l'auberge dans laquelle il avait loué une chambre. Son protecteur lui avait donné un peu d'argent, cependant, il ne pourrait vivre éternellement à ses crochets. Il devrait trouver un moyen de gagner sa vie par lui-même. Les capacités du jeune garçon étaient nombreuses, et il n'avait que l'embarra du choix. Lorsqu'il était encore sur Terre, il avait pensé à devenir super-héros : quelque-chose qui ne payait pas beaucoup. En revanche, il y avait une activité qui payait beaucoup mieux, et qui n'en était pas si éloigné. Chasseur de primes. De suite, cela remua dans son esprit les souvenirs de vieux westerns en noir et blanc qu'il avait regardé lorsqu'il était encore en laboratoire. C'était décidé, il allait traquer les bandits. Ni une ni deux, il se rendit au poste de garde, et enregistra une à une toutes les avis qu'il trouva exposés. Leurs moindres détails resteraient tous sans exception gravés dans sa mémoire pendant des années.

Puis il entreprit de reprendre où il s'était arrêté la veille. Il était en train de calculer le temps précis que l'entreprise allait lui prendre, quand une petite silhouette attira son attention. Un manteau blanc et une ceinture rouge. Parmi la masse des passants et des individus sur lesquels reposaient des primes, cela n'aurait interpellé personne, pas même un garde. Il aurait fallu un incroyable hasard pour qu'un soldat vienne à se rappeler à ce moment précis que cela était un élément d'un avis de recherche. En revanche, pour Archie, se souvenir de ce détail était plus qu'élémentaire, il aurait fallu un miracle pour qu'il ne s'en souvienne pas très précisément.

Sans précipitation, le jeune garçon jeta un regard à la silhouette, et compara ce qu'il voyait à la description. Une carrure féminine et frêle (encore qu'elle faisait presque dix centimètres de plus que lui) quelques mèches de cheveux gris qu'il apercevait.

-Probabilité de correspondance entre l'individu recherché et l'individu en présence, 85%, énonça-t-il à voix basse pour lui-même.

L'adolescent était encore à une vingtaine de mètres de sa cible, et il commença à s'en rapprocher assez lentement. Il n'était pas très sûr de savoir de quelle façon la capturer. Il aurait sans doute pu le faire d'ici, mais avec toute cette foule, il rencontrerait peut-être des opposants. Tout en continuant à réduire la distance, il se mit progressivement à sonder l'esprit de la fugitive, non pas pour lire dans ses pensées immédiates, les seules auxquelles il aurait accès dans cet état, mais pour être sûr de ne pas la perdre si jamais elle tentait de le semer. Puis il mit son plan à exécution. Il se contenta d'introduire un léger sentiment d'insécurité, l'impression d'être épiée, dans l'esprit de sa cible, et tenta de le renforcer du mieux qu'il pu la paranoïa qui devait déjà exister dans la tête de quelqu'un recherché. Avec un peu de chance, qu'elle se rendre compte ou pas qu'il tentait de l'appréhender, cela la ferait bouger, il l'espérait vers un endroit moins fréquenté.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le dimanche 24 février 2013, 22:45:56
Bien bien bien... Une nouvelle journée se lève sur Nexus. Je quitte ma planque, une parmi les nombreuses que je j'ai installées au quatre coins de la ville. Une précaution nécessaire, si on veut survivre, quand on est voleur. Cela étant, en ce moment ce n'est pas survivre qui m'inquiète. Depuis peu, le nombre de poursuivants à mes trousses a considérablement baissé. Je me demande si Asul y est pour quelque-chose... Le vieil homme a plus d'une oreille dans la haute, et plus d'un tour dans son sac.

Bref, il fait beau, il y a du soleil, le temps idéal qui fait marcher les commerces. Et par ricochet, idéal pour aller chiper des bourses ! D'ailleurs, je ne peux m'empêcher de penser. On dit que les marchands sont des voleurs (ce qui est loin d'être faux, dans les faits), et pourtant, c'est moi que l'on pourchasse. Ironie du sort...

En tout cas, ça fait du bien de pouvoir se promener librement sans avoir à craindre une attaque inopinée. Bon, toujours faire attention aux gardes, mais eux-mêmes ne sont pas très attentifs, donc c'est peinard... Enfin, je crois...

J'ai l'impression de me tromper. Comme si un sixième sens m'alertait d'un danger quelconque. Bon, j'ai une bonne intuition, mais là, c'est pire qu'une sonnette d'alarme. On dirait vraiment que j'ai quelqu'un aux trousses. Le problème, c'est que j'ai beau chercher dans mon environnement, je ne vois aucune personne suspecte. Rien qui ne fait penser à un chasseur de prime, ou pire, un assassin. Quoiqu'il en soit, je dois agir, et vite.

Je pique un sprint soudain en direction d'une petite ruelle non loin. Quelques caisses entreposées là m'aident à atteindre une certaine hauteur. De là, des briques saillantes d'un coté et de l'autre me permettent de me hisser jusqu'aux toits. Ce n'est pas la première fois que j'ai ce genre d'exercice, aussi il ne me faut pas longtemps pour contempler Nexus par le haut. Je reste là, par contre, trop curieuse de connaître mon poursuivant.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le dimanche 24 février 2013, 23:27:24
Je suis très satisfait de voir que mon plan fonctionne. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, malgré le fait que je sois télépathe, je ne comprends pas mieux le mode de pensée de la plupart des gens. Au contraire, je pense que si un psychiatre analysait mon psyché, il en déduirait que je suis au bord de l'autisme. J'ai le plus grand mal à me mettre à la place de quelqu'un d'autre, et, à vrai dire, si je n'avais pas cette capacité à aller chercher directement des informations sur l'état d'esprit de mes interlocuteurs, il n'est pas dit que je sois capable d'en déduire leur humeur. Heureusement, cette fois, j'ai visé juste : je la vois, elle s'échappe. Alors qu'elle disparaît à ma vue, son esprit demeure pour moi assez simple à repérer, puisque je suis toujours en connexion avec lui. Je peux suivre sa trace aussi nettement que si elle avait laissé une traînée fluorescente sur le sol. Il faut quand même que je prenne garde, mes capacités ont des limites, notamment de portée. Je ne pourrais continuer à la localiser si elle courait jusqu'à l'autre bout de la ville.

Elle va vite, et je n'ai pas vraiment le choix, il faut que je la poursuive. Faire du sport ne m'a jamais beaucoup amusé, cela m'a toujours paru quelque-chose de primaire, et d'accessible à tous. Faire du sport, cela m'a toujours paru gâcher mes capacités à faire autre chose, aussi. Pourquoi devrais-je faire de la musculation alors que je peux sans mal soulever n'importe quelle haltère sans même me servir de mes mains ? Pourquoi devrais-je courir lorsque je peux évoluer dans les airs plus vite que n'importe quel champion de 100m au sol ? Pour éviter d'attirer l'attention, peut-être. Je sais que beaucoup utilisent ici ce que l'on nomme vulgairement magie, mais vestige de mes habitudes sur Terre, ou je devais au mieux cacher mes capacités, je préfère me faire discret. Alors je cours, et je n'aime pas vraiment ça. Très vite, mes poumons s'enflamment, et je sens mes mollets devenir durs. Je suis parti trop vite, sans échauffement, et sans entraînement. Je pense que demain, j'aurais des courbatures. Tant pis, je m'aide un peu, je renforce mon pas, je réduis les frottements de mes pieds sur le sol. Au final, je cours sur une sorte de coussin d'air de quelques millimètres, qui avance à ma place. Mon esprit est beaucoup plus efficace que mon corps : c'est beaucoup plus agréable.

Enfin, elle s'arrête de bouger, du moins en long et en large. Je lève les yeux, je l'observe monter avec agilité sur une pille de caisse. Un instant, j'envie son adresse. J'aurais bien été incapable d'en faire de même sans télékinésie. Quand bien même mon cerveau aurait analysé chaque prise, calculé chaque trajectoire, je n'aurais sans doute pas eu les capacités physiques pour exécuter exactement ce qu'il m'aurait dicté. Mais encore une fois, un tel talent m'est inutile. Nous sommes dans une petite ruelle, personne ne nous observe vraiment. Sans même me soucier de faire semblant de grimper comme j'avais fais semblant de courir, je m'envole, tout simplement, à la verticale.

J’atterris sur le toit, elle a complètement stoppé sa fuite. Je ne sais pas immédiatement ce qui l'a motivée, alors je cherche dans ses pensées immédiates. Elle cherche à savoir qui est à ses trousses. Je n'en vois pas l'intérêt, mais à présent, elle a sa réponse. J'ignore comment elle va réagir. Je n'ai pas l'air de grand-chose, en réalité, et cela m'importe peu. Je suis moins grande qu'elle, je ne dépasse pas le mètre cinquante, je suis maigre, je fais à peine adolescent. Je porte une tunique simple en toile brune que j'ai acheté en arrivant, pour me fondre plus facilement dans le paysage. J'ai l'air de ne jamais avoir vu le soleil, aussi, étrange dans une contrée ensoleillée comme celle-ci. Vraiment, je ressemblerais à un inoffensif gamin aux yeux un peu trop bleus si je n'avais pas lévité à une dizaine de centimètres de tout appui. Ce dernier élément, évidemment, me trahi un peu. C'est volontaire, j'espère qu'à présent, elle va se soumettre sans faire d'histoires. Je me pose sur le toit, pour économiser mon énergie.

-Vincente Valentyne, connue sous le nom de double V. Veillez confirmer qu'il s'agit bien de votre identité, j'articule sans agressivité, de ma voix assez aiguë.

La question est stupide de prime abord, évidemment. Cependant, quoi qu'elle réponde, je saurais, en scrutant son esprit, si elle ment ou non, et j'en déduirais ainsi qui elle est. Je pourrais aussi l'immobiliser dès maintenant. Je n'en fais rien. Un reliquat de la présomption d'innocence, ou peut-être je trouve cela un peu trop facile. Je n'en sais rien, ma partie humaine est parfois hermétique à la raison.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 25 février 2013, 01:07:48
Mon poursuivant ne tarde pas à se montrer. Et le voir m'en bouche un coin. Plus petit que moi, ce qui est déjà assez rare en soi, malingre, et aussi blanc que mon manteau. Ce gus-là est bien parti pour gagner la palme du poursuivant le plus insolite. J'en ai  presque envie de rire, mais en voyant qu'il flotte dans les airs à coté de moi, je déchante complètement. Magicien, ou pire, sorcier. De tout ce qui peut m'en vouloir, c'est le plus problématique auquel j'ai affaire. Et mince !

Vincente Valentyne, connue sous le nom de double V. Veillez confirmer qu'il s'agit bien de votre identité.

Sa voix me fait penser à un enfant, ce qui correspond bien à son apparence. Mais un pratiquant des arts occultes, quelque soit son age, est une sérieuse menace. Je ne dois baisser ma garde sous aucun prétexte. Dans le même temps, le combat direct est à proscrire. Il suffit d'un sort, et s'en est fini de moi. Je dois trouver le moyen de me carapater en vitesse, sans qu'il ne me rattrape...

" Et si c'est bien moi ? Tu es venu m'arrêter ? C'est pour me livrer au poste de garde le plus proche, ou quelqu'un t'a engagé ? Peut-être même que tu as été engagé pour me tuer, ou encore, ce serait une vengeance personnelle ? "

Pendant que je parle, ma main descend à ma ceinture. Il faut que j'arrive à récupérer un fumigène, sans quoi je n'arriverai pas à me débarrasser de lui. Pourvu qu'il ne remarque pas mon manège...
Finalement, ma main se referme sur une des cartouches. Je la décroche et l'enclenche vivement.

" Désolée pour toi, mais ça n'est pas dans mon programme du jour ! "

Et je lance la cartouche à mes pieds. Rapidement, le mélange des composants crée une fumée dense, nous plongeant dans le brouillard le plus impénétrable. Ni une ni deux, je tourne les talons. Si je veux le semer, il va falloir emprunter les grands moyens...

Rapidement, je bondis de toit en toit, en essayant de ne pas déraper. Même avec l'habitude, le moindre faux-pas peut avoir des conséquences désastreuses, et je ne veux pas finir ma vie le dos brisé. Arrivée au bout du paté de bâtiments, j'avise le toit d'une diligence. Une aubaine ! J'ajuste mon saut, et atterris pile dessus, sans passer au travers. Seulement, je ne peux pas m'arrêter ici, sinon je vais me faire attraper.

Des poutres saillantes à un angle de bâtiment sont mon objectif suivant. Je parviens à m'en saisir, et les escalade en vitesse. De retour sur les toits, je ne perds pas une seconde et continue ma course. Il faut que je le sème, et radicalement. Et j'ai ma petite idée...
Je fonce vers un bâtiment que je sais être une auberge. C'est un pari risqué que je m'apprête à faire, mais c'est dans l'ère du temps... Au bord du toit, je plonge, et saisis au vol une poutre de la charpente. L'effort me vrille le bras, mais ce n'est pas le moment. La cible de cette cabriole est une des fenêtres de la façade. Mes pieds percutent le verre, qui vole en éclat. Je roule dans la chambre, et parviens à me remettre debout. Quelques petites entailles dues aux fragments de verre sur les bras et les jambes, mais il faut que je continue. Sans plus attendre, je sors sur le balcon intérieur. La salle commune est sous mes yeux, mais encore faut-il que j'y descende, et atteigne la sortie...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le lundi 25 février 2013, 01:50:32
-La première proposition était la bonne, je fais, toujours sans sentiment particulier.

Extérieurement, je dois être la froideur même, mais intérieurement, je bouillonne. Je n'ai jamais fais ça avant, traquer les criminels, c'est une activité vraiment nouvelle, et, je dois dire, assez excitante. Pour une première fois, je trouve que je ne m'en sors pas trop mal : j'aurais pu courser une personne innocente, mais sa réaction exclue tout de suite cette possibilité. Les probabilités qu'elle soit bien l'individu connue sous le nom de double V viennent de grimper de presque 15%, ce qui ne laisse plus beaucoup de place au hasard. Et même dans le cas où elle m'aurait trompé, elle a nécessairement quelque-chose à se reprocher. On ne court pas sur les toits quand on est un honnête citoyen, enfin, les situations qui en pousseraient un à le faire sont suffisamment rares pour que je puisse raisonnablement l'estimer.

Je sais ce qu'elle va faire avant même qu'elle commence à déplacer sa main vers sa ceinture. Ce qui ne me laisse quand même pas beaucoup de temps pour réagir. Elle pense vite. Pas aussi vite que moi, évidemment, elle reste humaine -ou quelque-chose de proche-, mais pour une humaine, elle est plutôt vive. Je n'ai pas vraiment eu le temps d'analyser ce que contient son projectile -elle ne l'a pas pensé suffisamment clairement-, mais il est possible qu'il soit fortement destructif, dans la limite, évidemment, qu'elle le lance relativement proche de sa propre position. La prudence, dans ce genre de situation, ne me semble toutefois pas superflue. Je m'élève dans les airs et tend devant moi un petit champ de force destiné à dévier les éventuels débris.

Il s'agit finalement d'un simple fumigène. La gène qu'il provoque chez-moi est assez mineure. Je n'ai pas grand mal à écarter le brouillard pourtant épais qui se dresse devant moi, surtout que j'en suis déjà en parti extrait de part ma position dominante. La diversion me fait quand même perdre quelques secondes. J'aurais sans doute pu l'immobiliser avant, empêché sa main d'atteindre la grenade, ou même simplement écarter la grenade en dehors de sa portée. Je me projette en avant, à ses trousses. Tout en la poursuivant, je cherche pourquoi je ne l'ai pas fais.

Peut-être pour le spectacle impressionnant qu'elle donne. Car si je n'ai moi-même jamais beaucoup apprécié la pratique d'un sport, cela ne m'empêche pas d'être, dans une certaine mesure, sensible aux exploits physiques. Sa façon de virevolter d'un bâtiment à l'autre est stupéfiante, digne des héros les plus agiles des quelques films d'action que j'ai vus. Lorsqu'elle est en l'air, lorsque ses pieds ne touchent plus le sol, avant d’atterrir, de saisir une nouvelle prise, et de se lancer encore, elle paraît voler : bien plus que moi, dont le déplacement est certes efficace et sans risque, mais beaucoup plus lisse. Voilà peut-être d'où vient l'étymologie du mot voleuse.

Je ne la poursuis même plus, je me contente de la suivre, et de l'admirer, comme on admire une artiste de cirque. Hypnotisé par sa danse, j'oublie même un instant que je suis supposé la capturer. Ses mouvements s'enchaînent parfaitement, sans même une rupture lorsqu'elle défonce de ses deux pieds tendus le verre d'une fenêtre. Silencieux, je m'engouffre à mon tour. Les rares passants témoins de l'affaire portent plus volontiers attention aux cabrioles bruyantes de double V qu'à moi, lévitant discret et sans trop d'effort apparent. En réalité, je ne suis pas très habitué à cet exercice, et je sens bien que je ne tiendrais pas éternellement un tel rythme. Une goutte de sueur perle sur mon front. Je pense avoir quand même beaucoup plus de réserve qu'elle, et ce à tout point de vue. Elle a beau être douée, sauter d'un bâtiment à l'autre demande énormément d'énergie.

-Désolé, je reprends son intonation, mais on ne me sème pas facilement !
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 25 février 2013, 02:37:58
Désolé, mais on ne me sème pas facilement !

Toujours derrière moi ? Celui-là est un sacré coriace, doublé d'un fichu pot de colle. Il va me falloir jouer serré, et risqué, pour m'en débarrasser. Un rapide coup d'oeil me permet d'évaluer la situation, et mes possibilités. Heureusement, la salle commune est quasiment vide, donc de ce coté-là, je ne serais pas gênée. Vincente, ma fille, voilà le moment d'y aller à fond.

En un saut, je suis sur la rambarde du balcon. J'utilise toute la force de mes jambes pour me propulser jusqu'au lustre, ce qui me permet d'atteindre le milieu de la salle. Une roulade pour amortir la chute, et un regard en arrière. Zut ! Il lévite ! Pas étonnant qu'il ai pu me suivre jusque là. Attends un peu, mon gaillard, j'ai d'autres surprises en réserve...

Je m'élance vers la porte, mais au dernier moment, mon pied se glisse entre les barreaux d'un tabouret. Vivement, je me retourne et balance mon pied, ce qui transforme l'objet en projectile. Je comptais le toucher, mais ce type, par je ne sais quel moyen, bloque mon lancer avant que le tabouret n'a parcouru la moitié de la distance.

Tout ça sent mauvais, très mauvais. Je ne vais pas réussir à le semer à ce rythme, du moins pas avant que la garde ne rapplique. Tant pis, je joue mon va-tout.

Physiquement, il est surement plus faible que moi, donc il faut que j'arrive à l'épuiser suffisamment pour qu'il ne puisse plus utiliser son pouvoir. Et pour ça, on va le faire bouger un peu.
Sans attendre, je bondis en direction des escaliers, que j'escalade quatre à quatre. Bien sur, le gamin me colle toujours le train. Je traverse le balcon, et alors que j'arrive vers la fin, je prends appui sur la rambarde et la franchis d'un passement de jambe. J'amortis ma chute tant bien que mal, mais je sens que c'est un mouvement que je vais regretter plus tard...

Le gamin, lui, descend tranquillement, mais j'ai le temps de voir que lui aussi atteint ses limites. J'ai peut-être une chance de lui échapper, finalement... Aussi vite que le permettent mes jambes douloureuses, je tente de prendre appui sur le mur pour me propulser jusqu'au balcon à nouveau, mais cette fois, il ne me laisse pas faire. Une force inconnue me bloque en plein élan, et me ramène brutalement au sol. Je crois que ce coup-ci, c'est la fin des haricots pour moi...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le lundi 25 février 2013, 03:51:22
Ça faisait longtemps que je n'avais pas été autant pris par quelque-chose ! Si je remonte dans ma mémoire, je dirais au moins depuis la dernière conférence de mécanique quantique à laquelle j'ai assisté. Cette exploitation de l'effet tunnel avait vraiment été passionnante : il existe, dans ce modèle physique, une chance, assez infime, qu'une particule puisse franchir une barrière de potentiel sans pour autant disposer de l'énergie nécessaire. Dans l'absolu, on pourrait même conjecturer qu'il existe une très petite probabilité qu'un humain traverse spontanément un mur, pour faire simple. Mais je crains que ça n'est pas beaucoup à voir avec la situation.

Bon, sans trop faiblir, je continue à la suivre. Elle me lance un tabouret, par une méthode assez habile. Cela ne représente pour moi aucun danger, même s'il avait été lancé dans mon dos. Je n'en fais pas beaucoup de cas : je l'intercepte au vol, et je prends même la peine de le faire atterrir sur ses pieds. Je la sens qui panique. L'appréhension commence à la gagner, elle se rend compte qu'elle ne va sans doute pas réussir à me distancer. Elle va finir par faire une erreur, et je me mets à espérer qu'elle ne va pas trop se blesser. De fait, je gagne encore du terrain, sans vraiment me presser. J'essaie de repousser un peu l'échéance, le moment où je la stopperai totalement. Je pense qu'en l'état, que je suis en mesure de stopper sa course, mais je n'en fais rien. La voir courir, l'observer perdre peu à peu ses forces est un spectacle presque aussi intéressant que d'assister à sa voltige. Il y a quelque-chose de fascinant là-dedans, enfin, je ne suis pas sûr que ce soit très sain.

Nous parcourons encore la large pièce pendant un moment : elle prend tous les risques, n'hésitant pas à se suspendre à des lustres pour tenter de me fuir. Une partie de moi me dit que la laisser s'épuiser, la pousser dans ses derniers retranchements serait objectivement intéressant. Cependant, quand je sens que dans son esprit la douleur émerge, je choisis de couper court à la course-poursuite. D'autant que moi-même, je commence à fatiguer. Les plaques de métal qui parcourent ma colonne vertébrale sont brûlantes, ma tête me fait un peu mal, mon cœur frappe violemment ma poitrine sous l'effort continu. J'ai rarement autant poussé mes capacités à bout : j'ai un peu peur que cela m'entraîne vers une crise. Mes implants ne sont pas toujours très stables lorsqu'ils sont utilisés trop intensivement, et j'en perds parfois le contrôle (encore que parfois, cela survient sans raison immédiatement identifiable).

Je l'arrête donc lorsqu'elle s'élance de nouveau sur un balcon. Je l'enveloppe totalement dans un champ télékinésique, puis je la rapproche aussitôt de moi. Un colosse aurait eu toutes les peines du monde à résister à mon pouvoir, alors elle n'avait pas de grande chance de m'échapper. Surtout que la force n'offre aucune réelle prise physique : le cerveau a généralement l'impression que l'air devient partout  et soudainement solide. Le phénomène, pour ceux qui n'étaient pas habitués, était assez étrange, tous les muscles ou presque étant paralysés. Je la laisse dans une position un peu absurde. Elle flotte à presque un mètre du sol. Quant à moi, je me pose sans heurt.

-Vincente Valentyne, connue sous le surnom de Double V. Coupable de plusieurs vols à la tir, cambriolages, coups et blessures sur des gardes en exercice. Recherchée pour 3500 pièces d'or. Une jolie somme, qu'est-ce que tu en dis ?

Elle ne répond pas, je suis un peu perplexe : l'avis disait pourtant qu'elle était assez irritante, je m'étais donc attendu à une réplique cinglante. Puis, je constate que son visage rougit assez vite. Je penche la tête sur le côté, et sonde ses pensées.

-Ah, désolé. Un oubli...

Je desserre l'étreinte au niveau de sa cage thoracique et de sa gorge, la laissant de nouveau respirer. Je n'ai pas très envie de rapporter un cadavre à la garde, principalement parce qu'il n'est pas précisé si la cible doit être rapportée morte, vive, ou si cela n'a pas d'importance. Je préfère ne pas prendre de risque.

-C'était bien, cette poursuite. Tu es la personne la plus agile que j'ai jamais rencontrée. Je plains les pauvres gardes qui ont du essayer de te suivre, quelques fois. Désolé, je sais, ce n'est pas très juste de te faire prendre comme ça. Mais ça serait plus injuste si tu ne t'étais pas faite prendre tout court, pas vrai ? La loi, c'est un peu la justice.

La maintenir comme ça me demande beaucoup d'énergie : je cherche la manière optimale de la tenir en place. Finalement, je relâche en grande partie ma télékinésie, ne gardant qu'une contrainte au niveau des chevilles, que je garde collées entre-elles. Pour que la manœuvre soit efficace, je la retourne, tête en bas. Cela ne doit pas être très agréable pour elle, mais c'est le moins fatigant et le plus sûr pour moi. Les pans de son long manteau blanc, sa capuche, ses cheveux courts et gris, pendent. C'est assez amusant, mais je ne souris pas. Comme elle a les mains libres, je juge plus prudent de lui enlever toute réserve de projectiles éventuelle. Me tenant toujours à deux bons mètres d'elle, je dénoue alors sans la toucher sa ceinture, probablement encore pleine de divers fumigènes ou objets pointus et tranchant. J'amène l'étoffe rouge jusqu'à moi, et l'enroule autour de mon épaule. Après une hésitation, je fais de même avec le manteau, qui prend la voie des airs et termine en tas derrière moi.

-Tu caches quelque-chose de potentiellement létal, dans tes bottes, ailleurs ?

Encore une fois, la question n'a qu'un but : amener le sujet dans ses pensées immédiates. Je la regarde. Sans tout son attirail, elle est beaucoup moins impressionnante. Elle fait à peine plus vieille que moi. Quelle est la loi exacte dans cette ville de Nexus ? Dans beaucoup de pays, elle n'aurait jamais été condamné aussi durement, mais je doute qu'ici, les législations soient aussi conciliantes. Allait-on lui couper la main, ou juste la jeter en prison ? Je me souviens que l'affiche parlait d'un ''visage relativement standard''... Je le trouve plutôt beau, je crois. Ses yeux verts sont presque aussi captivants que les cabrioles que quelques minutes plus tôt, elle exécutait encore. Je ne me suis jamais trop posé de questions sur ce que je considérais comme mes canons de beauté : ce n'est pas le sujet que je parcours avec le plus de facilité, tant il est subjectif. Néanmoins je pense qu'ils ne s'éloigneraient pas beaucoup de la silhouette suspendue que j'ai devant moi. Je l'observe, la détaille, sans chercher à cacher mon regard.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 25 février 2013, 12:10:00
Le pouvoir de ce gosse est tout sauf minable. En un clin d'oeil, je suis complétement immobilisée. J'ai beau tenter de me débattre, je ne bouge pas d'un pouce. Lui se pose à coté de moi, et commence son discours.

Vincente Valentyne, connue sous le surnom de Double V. Coupable de plusieurs vols à la tir, cambriolages, coups et blessures sur des gardes en exercice. Recherchée pour 3500 pièces d'or. Une jolie somme, qu'est-ce que tu en dis ?

Je vais te le dire, ne t'en fais pas !
Ou du  moins, j'aimerai, mais ma bouche ne m'obéit plus. D'ailleurs, parlant de ça... Je n'arrive plus à respirer ! J'essaye encore et encore, mais l'air ne veut tout simplement ni entrer, ni sortir ! Il veut me tuer par asphyxie ou quoi ?

Ah, désolé. Un oubli...

Je t'en foutrai, de l'oubli, moi ! En tout cas, maintenant, je peux respirer, j'en profite pour avaler de grandes goulées d'air. Entre ça et la cavalcade, j'en ai bien besoin.

C'était bien, cette poursuite. Tu es la personne la plus agile que j'ai jamais rencontrée. Je plains les pauvres gardes qui ont du essayer de te suivre, quelques fois. Désolé, je sais, ce n'est pas très juste de te faire prendre comme ça. Mais ça serait plus injuste si tu ne t'étais pas faite prendre tout court, pas vrai ? La loi, c'est un peu la justice.

Eeeeeeyh !

Non mais... À quoi il s'amuse, là ! Me voilà pendue par les pieds comme un vulgaire jambon ! Et en prime, il me retire mon équipement, et mon manteau. Il ferait bien de ne pas l'abimer, où il aura affaire à moi.

Tu caches quelque-chose de potentiellement létal, dans tes bottes, ailleurs ?

" Pfff... Et tu crains quoi exactement ? Tu parles d'objet létal, pourtant c'est toi qui a failli me tuer il y a un instant, je te signale. "

Maintenant que je peux l'observer plus posément, si tant est qu'avec la tête en bas, c'est tout sauf évident, j'en profite. D'autant que lui non plus ne se gêne pas pour me détailler.
En dehors de ce que j'avais déjà pu voir, sa peau pale au possible, sa silhouette maigrelette, et sa petite taille, d'autres détails me sautent aux yeux. En premier lieu, les siens. Ils sont d'un bleu saisissant, trop intense pour être naturel. Avec sa teinte de peau, l'effet est encore plus marqué. En dehors de ça, il y a ses cheveux sombres, formant une masse informe sur son crane. Quand aux vêtements, il porte des fripes informes et bon marché, sans couleur. En fait, si on met ses pouvoirs de coté, il a juste l'air d'un gamin paumé...

" Bon, et maintenant, c'est quoi la suite de ton programme ? Me livrer aux autorités ? C'est ça ton plan ? Parce que si c'est le cas, tu vas être déçu, surtout pour la récompense sur ma tête.
Et franchement, ça va te servir à quoi, hein ? Tu parles de justice, mais c'est quoi, la justice, pour toi ? On te dit " les voleurs sont des méchants " et tu gobes ça ? Tu crois qu'on est voleur par vocation, que c'est un choix qui nous est proposé ? Dans l'ensemble, c'est vrai, mais si tu connais les alternatives, c'est un choix vite fait, si tu veux vivre. Alors garde ta morale, tu veux ? "


Je me la joue un peu, mais en réalité, je n'en mène pas large. Si effectivement, il prévoit de me livrer aux autorités, c'est l'enfer qui m'attend. Il n'est pas rare que les officiers viennent satisfaire leurs appétits sur les détenus, plus encore s'ils sont jeunes,  ou si c'est des femmes. Alors une jeune femme... Et après... Soit c'est l'exécution, soit c'est le marché aux esclaves. La mort du corps, ou la mort de l'âme. Je suis mal...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le lundi 25 février 2013, 13:57:21
Je peste : elle doit tellement bien connaître les moindres artifices qu'elle cache dans sa tunique qu'elle n'y songe même pas en me parlant. À moins qu'elle n'en ait tout simplement pas, évidemment, mais dans ce cas, j'avais espéré que la réponse lui traverse également l'esprit. Je suis donc dans la seule situation qui me rend encore incertain de sa dangerosité réelle. Lui laisser les mains libres est déjà un risque, j'ai constaté qu'elle était assez vive pour me surprendre, même lorsque je lisais ses pensées. Il lui faudrait beaucoup de chance, et une bonne dose d'inattention de ma part, mais un couteau, ou quelque-chose d'aussi rapide pourrait m'atteindre sans que j'ai le temps de réagir.

Quoi qu'il en soit, elle est totalement à ma merci, et je dois avouer que c'est un sentiment assez grisant. Je comprends tout à fait le plaisir sadique que ressentent les geôliers en enfermant leur victime. Ce n'est pas digne du justicier que je suis, et je tente de résister aux pulsions malsaines qui m’assaillent. Je continue à scruter machinalement le fil de ses pensées, et je sens la peur, bien cachée. Je m'y attarde, pour en connaître sa nature. Les sévices qui l'attendent si elle est prise, au moins, j'ai ma réponse. C'est vrai que l'esclavagisme, ce fléau disparu de la Terre, existe à Nexus, et que le commerce d'êtres humains semble assez foisonnant. Est-ce si horrible ? Je n'en sais rien, les grecs, les romains, malgré leur grande sagesse, en usaient sans scrupule. Je me suis toujours senti plus près de la République de Planton que de Politique d'Aristoste : la servitude ne m'a jamais parue très souhaitable. Cependant, je dois avouer que j'ai sans doute beaucoup été influencé par les lumières un peu aveuglantes de l'éthique moderne. Peut-être, après tout, n'est-ce pas si mal.

Elle songe aussi assez nettement à ce que les gardes font subir aux prisonnières. Je ne doute pas une seconde qu'un soldat la trouve à son goût. Je déglutis. L'idée à beau ne pas venir directement de moi, cette perspective engendre dans mon esprit un tourbillon de pensées concupiscentes. Toute la rationalité du monde, toute la puissance de calcul de mon cerveau n'est pas grand-chose face aux plus bas instincts de ma partie humaine. D'autant que j'ai beau jouer l'indifférent, je ne suis en réalité pas très difficile à appâter, sans doute un effet secondaire de mon jeune âge. Tant d'images de nature douteuse s’exhument, s'offrant à moi avec la précision que seule une mémoire absolue permet. J'ai toujours éviter ce genre de chose, quand bien même, avec un peu d'aide de ma télépathie et le nombre de filles faciles à Seikusu, j'aurais pu mille fois m'y prêter. Mais je n'ai jamais été aussi proche de pouvoir imposer une volonté aussi primaire à quelqu'un. Qui m'en tiendra rigueur ? C'est une criminelle, et il n'y a personne pour nous observer. Je mon pantalon se serrer. Je repousse tant bien que mal ses pulsions.

Celles-ci ne sont hélas pas totalement sans effet sur ma logique. Je considère la logique comme quelque-chose de sûr, mais je ne suis pas assez stupide pour ne pas savoir que même elle, dans une certaine mesure, est subjective. Une part de moi-même me pousse savamment au constat suivant : je ne peux pas prendre le risque qu'elle cache encore des armes. Je me rends compte que mon raisonnement est largement influencé, et pourtant, il me paraît tout-à-fait justifier. Je n'ai pas envie de perdre la vie pour une petite négligence. Des questions stupides et hors propos me passent par la tête sans que je puisse rien y faire, sa pilosité corporelle est-elle grise, comme ses cheveux ? ; sa peau sous sa tunique est-elle plus claire ?

-Très bien, puisque tu ne veux pas répondre... je réplique, d'une voix un peu rauque.

Je prends un air concentré, et je paralyse ses bras à la verticale, tendus. Ses bottes sont délacées, et tombent à côté d'elles. Puis je tente de faire descendre sa tunique par télékinésie. Je n'y parviens pas de suite, mais je ne suis pas disposé à perdre mon temps : je m'y reprends une deuxième fois, tirant assez violemment pour finalement la faire glisser sur le sol. Il ne me faut qu'une toute petite impulsion pour défaire ce qui retient encore sa poitrine. C'est une position qui la met assez en valeur, je crois. J'inscris à jamais cette envoutante étendue de peau nue dans ma mémoire. La vue de cette zone normalement cachée aux regards me donne l'irrésistible envie d'aller plus loin. Son short remonte le long de ses jambes, puis je le dépose lui aussi non loin. Je me mords la lèvre inférieure, songeur, mon regard reflétant, et c'est chose rare, un certain désir. Je n'ai jamais vue de femme nue de mes propres yeux, la perspective m'excite assez. Elle a les jambes serrées, si je les desserrai un peu pour mieux pouvoir observer... si elle n'a pas d'armes... Je commence à ôter son dernier habit. Mon cœur bat la chamade. Je me sens coupable, des sueurs froides coulent dans mon dos, laissant un sillage glacial. Alors que je n'en suis pas encore aux genoux, je renonce, et laisse retomber l'étoffe à sa place. Je baisse les yeux, honteux.

-Je... euh... suis désolé. Je soupire, avec un léger regret. La suite du programme est la suivante. Je ne vais pas pouvoir te transporter comme ça, alors je vais t'attacher. Et ensuite, je t’emmène au poste de garde. 3000 pièces, c'est plus que ce que gagne un paysan en un an de travail, je le crains... Tu aurais peut-être du songer à te livrer toi-même...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 25 février 2013, 15:35:48
Très bien, puisque tu ne veux pas répondre...

C'est ça, compte-là dessus, bonhomme. Eyh, mais... Il me fait quoi là ? Je ne contrôle plus mes bras ! Les voilà qui se tendent à la verticale, au dessus de ma tête. Enfin, question de point de vue, mais bref... Mais ? Ma tunique! Il est en train d'enlever ma tunique ! Impossible, je ne peux rien faire. Je n'ai plus que ma brassière pour protéger mes parties féminines.
Ce porc, il me l'enlève aussi ! Mes seins sont à l'air libre. Je le vois se régaler, les matant sans gêne.

" À quoi tu joues, sale porc ! C'est ça ta justice ? Tu es juste dégueulasse ! "

Si ma rage l'a atteint d'une manière ou d'une autre, il n'en montre rien. Par contre, ça ne l'a pas refroidi, et il continue son petit manège. Je sens mon short quitter mes hanches. Je me débats comme je peux, mais à l'envers, jambes et bras immobilisés, mes tentatives sont bien vaines. Sans pouvoir lutter, je suis quasiment nue. Il me reste juste un boxer pour protéger la partie la plus intime de mon corps. Mais ce pervers n'en reste pas là.
Inévitablement, il veut ôter ce dernier vêtement. Je le sens bouger, impuissante. Les larmes me montent aux yeux, et je serre les dents à me faire mal. Ce salaud doit bien se délecter de me voir comme ça, nue et sans défense. Soudain, mon boxer retrouve sa place initiale.

Je... euh... suis désolé. La suite du programme est la suivante. Je ne vais pas pouvoir te transporter comme ça, alors je vais t'attacher. Et ensuite, je t’emmène au poste de garde. 3000 pièces, c'est plus que ce que gagne un paysan en un an de travail, je le crains... Tu aurais peut-être du songer à te livrer toi-même...

Désolé ?! C'est tout ce qu'il trouve à dire ? Ce sale type m'a humiliée, et espère me calmer avec un "Désolé" ? Il rève si c'est le cas ! Je lui ferai payer ça, même si ça doit être la dernière chose que je puisse faire dans cette vie.

" Lache-moi, alors ! Laisse-moi me rhabiller ! "

Je ne dois pas être belle à voir, enragée comme j'étais. Mais pour le moment, je m'en moque pas mal. Tout ce que je veux, c'est le faire payer, n'importe comment, mais qu'il paye ce qu'il m'a fait subir. J'imagine tout un tas de choses, ma colère ne m'aidant pas à me concentrer. Pas bon pour un voleur, mais pour l'heure, il n'y a que ma vengeance en tête.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le lundi 25 février 2013, 16:16:39
Elle m'insulte. Je ne suis pas très sensible aux insultes en règle générale. Les autres élèves m'insultaient souvent, quand j'étais au lycée : parce que je suis trop petit, trop faible, trop intello, trop bizarre, parce que j'ai plusieurs classes d'avance. Mais s'ils ne me faisaient rien, c'était parce que j'étais persuadé d'être tout simplement plus intelligents qu'eux, et qu'ils reportaient leur médiocrité sur moi. Ici, même en usant de mauvaise fois, je ne peux pas trop appliquer ce principe. Elle a raison, je suis un être relativement pervers. Pas plus pervers que la moyenne, je crois, mais ça n'était pas une excuse en soit. Je ne m'énerve pas, j'ai déjà assez dévié du code moral que j'avais imaginé comme ça. Je ferais un bien piètre héros, alors autant que je sois un chasseur de primes correct. D'un autre côté, quand je l'aurais délivré au poste de garde, cela n'aura plus vraiment d'importance : elle verra bien pire.

-Tu es en colère, je constate, d'une voix redevenue froide. Je ne peux pas permettre ça à quelqu'un qui veut me tuer. Trop risqué. Désolé.

C'est vrai, si je lui ai enlevé ses habits, j'essaie de le croire, c'est avant tout parce que je craignais qu'elle y cache des armes. Quand je ne la maîtriserais plus télékinétiquement, je devrais être sûr qu'elle ne puisse me nuire. C'est une voleuse entraînée, et elle a sûrement eu l'occasion de se battre, ce n'est pas mon cas. Ses réflexes et sa vitesse constituent pour moi un danger certain. Je trouve sans mal une solution au problème. À l'aide de mon pouvoir, j'arrache un rideau bordeaux tendu dans l'espace qui mène au balcon. Je le fais léviter jusqu'à elle, puis je positionne les bras de VV en croix sur sa poitrine et finalement, enroule le lourd tissu autour de son corps, seule sa tête et ses pieds dépassent. Je prends ensuite la ceinture rouge, puis l'utilise pour fermer bien solidement le paquet. Enfin, je la remets à l'endroit, et je lâche l'emprise. Elle retombe sur le sol, mais sa capacité de mouvement n'est pas meilleure : elle devrait être obligé pour avancer de faire seulement de minuscules pas. J'hésite à faire une laisse, mais je renonce. Elle n'a aucune chance de s'enfuir, de toute façon, pas besoin de l'humilier plus.

-Voilà, je ne te tiens pas, mais je peux le faire, alors évite d'essayer de t'enfuir. Je te rattraperai facilement, de toute façon.

Je prends sur mes épaules le reste de ses habits, je ne suis pas très musclé, mais la charge n'est pas excessive. Enfin, je lui fais signe de me suivre. J'ai enregistré tous les chemins qui menaient au poste de garde, et je connais précisément celui que je vais emprunter, à la fois court et pas trop fréquenté. Il ne faudrait pas que quelqu'un se mette en tête de me voler ma prise.

-Alors, ils vendent les criminels comme esclaves, à Nexus ? Ils sont plus utiles comme ça qu'en prison, je suppose... Je ne sais pas trop quoi en penser, ça n'existe pas de là où je viens. Mais si tu as nuis à la société, c'est assez juste que tu te rachètes... Non ?

J'espère que lui parler va la calmer un peu : pour catalyser le processus, je tente de diminuer son agressivité au moyen de quelques suggestions psychiques.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 25 février 2013, 19:14:50
Tu es en colère. Je ne peux pas permettre ça à quelqu'un qui veut me tuer. Trop risqué. Désolé.

Et toi, à ma place, tu te laisserais faire avec un grand sourire, peut-être ? Normal que je veuille te tuer, non ? Tu connais beaucoup de filles qui ne le voudraient pas, après un tour pareil ?
En attendant, ça ne résout aucun des mes problèmes, à savoir ma nudité et comment lui planter un truc pointu, aiguisé et tranchant. Lui, en revanche, trouve le moyen d'en régler un. À l'aide d'un rideau, il n'emmaillote fermement, et scelle le tout avec ma ceinture. C'est à peine si je peux bouger maintenant.

Voilà, je ne te tiens pas, mais je peux le faire, alors évite d'essayer de t'enfuir. Je te rattraperai facilement, de toute façon.

Je le hais, je le hais, je le hais ! Ce sale gamin, qui se la joue justicier juste parce qu'il a certains pouvoirs !

Alors, ils vendent les criminels comme esclaves, à Nexus ? Ils sont plus utiles comme ça qu'en prison, je suppose... Je ne sais pas trop quoi en penser, ça n'existe pas de là où je viens. Mais si tu as nuis à la société, c'est assez juste que tu te rachètes... Non ?

Mais qu'est-ce qu'il me débite comme inepties ? Se racheter pour avoir nui à la société ? N'importe quoi ! La seule chose qui m'attend, c'est servir de jouet sexuel à un noble corrompu. Il appelle ça se racheter ? Et nuire à la société... Cette blague ! Il ne connait rien de moi, de ce que j'ai vécu. J'ai passé mon enfance dans la misère, c'est pour survivre que je vole. Contrairement à ces nobles ventripotents, qui se moquent bien du fait que plus de mille personnes meurent de faim, du moment qu'eux puissent se goinfrer sans retenue. Oui, c'est ça la réalité. Alors ça justice et sa morale, qu'il les garde dans sa poche !

D'ailleurs, je n'ai toujours pas dit mon dernier mot. J'ai encore des choses à tenter, et je n'abandonne pas si facilement. Alors qu'il me tourne le dos, je me replie sur moi, fléchissant les jambes. Je ne peux peut-être pas marcher, mais je peux sauter. Et je ne m'en prive pas. D'un salto plus ou moins réussi, je lui assène mes deux pieds dans le dos, l'envoyant contre la porte. La réception est douloureuse, mais je fais avec. Je n'ai pas beaucoup de temps...

Un mouvement de mon poignet déclenche le mécanisme de ma dague. Cet idiot m'a peut-être retiré tout mes vêtements, mais il n'a pas pensé à mes brassards ! Une aubaine, puisque le gauche contient cette lame très utile. Tant bien que mal, je me démène pour couper la toile qui me maintient prisonnière. Je ne sais pas si le choc l'a assommé ou non, mais pas question de trainer.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le lundi 25 février 2013, 20:12:30
D'accord, sa situation n'est pas idéale, mais elle n'est pas, et de loin, la pire dont elle aurait pu souffrir. Au moins, sa semi-nudité est cachée, et l'étreinte sur son corps est tout-à-fait supportable : elle n'est même pas tenue en laisse. J'aurais aussi pu juste lui attacher les mains dans le dos et les chevilles ensemble, avec une corde qui lui aurait écorché la peau, avant de la traîner dans les ruelles, son absence de vêtement exposée aux yeux de tous. J'aurais pu. J'aurais du, peut-être, sans doute.

Encore une fois, j'anticipe son mouvement moins d'une seconde avant qu'elle l’exécute. Presque aussitôt, je sens ses pieds percuter avec force mon dos, et j'ai à peine le temps d'adoucir un peu ma trajectoire, alors que je fonce droit vers une porte fermée. Je m'étale sur le sol, face contre terre. Sous le choc, mes dents supérieures entaillent violemment ma langue, et un goût de sang se répand dans ma bouche. Des étoiles envahissent ma vision. J'essaie de suite de me relever, craignant qu'elle se jette sur moi. J'esquisse une grimace de douleur lorsque je me rend compte que j'ai du mal à me redresser, ma colonne vertébrale m'élançant à chaque tentative. Je suis plié en deux, et je dois reprendre mon souffle avant d'endurer la souffrance d'une remise sur mes pieds. Je me frotte le dos avec appréhension. Je ne crois pas avoir grand-chose, mais certains mouvements risquent de m'être pénibles dans les prochaines heures. Je pense cependant avoir assez de volonté pour surmonter cette difficulté.

Alors que je me redresse, je la vois, qui tente de se défaire du rideau : malgré mes efforts, elle a réussi à dissimuler une dague je ne sais trop où. Je tente d'arrêter sa main avant qu'elle se libère complètement. Je constate que ma télékinésie est extrêmement faible. J'arrive à la dévier un instant, mais de n'arrive pas à la bloquer. Je fronce les sourcils, et fait comme si de rien n'était. Je touche l'arrière de mon cou. Le choc a peut-être endommagé une liaison cybernétique particulière, ou plus probablement, l'a coupé. Je me sens toujours aussi intelligent, alors l'implant n'a pas pu être totalement détruit : j'ai déjà eu à vivre des situations où il n'agissait plus, et cette retombée dans l'autisme était autrement plus désagréable. Je m'inquiète un peu, sans plus. J'ai déjà reçu des coups plus violents, et aucun ne m'a jamais réduit définitivement. Toujours est-il qu'elle a peut-être sentie que mon pouvoir à décliné. Je suis sans défense, modérément en danger. Je sais que si elle m'inflige des blessures trop graves, j'entrerais en crise, et ce serait elle qui se mettrait à sérieusement risquer quelque-chose ; ça ne m'arrange pas non plus. Je dois simplement gagner du temps, pendant que je retrouve mes facultés. C'est la meilleure chose à faire.

-Ça ne sert à rien de courir, je te rattraperais toujours facilement. Je lis dans tes pensées, tu ne peux pas m'échapper... Je feins l'indifférence, alors que je continue à me frotter la nuque.

Si elle me lance sa dague, je suis assez confiant : je m'y attends, et elle est suffisamment légère pour que je puisse quand même l'écarter de sa trajectoire. Je cherche à sonder son esprit, et j'y parviens sans trop de mal. J'essaie, dans ses pensées immédiates, de trouver un quelconque sujet pour la troubler, tout en restant hors de portée. Je relève par hasard un forte rancœur envers sa mère, je ne sais pas exactement à quoi cela fait référence, mais cela fait mon affaire.

-Alors, ta mère était voleuse aussi, ou c'était juste une personne pas très fréquentable ? Comment on devient la légendaire double V, au juste ?
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 25 février 2013, 23:21:58
Je parviens peu à peu à m'extraire du tissu épais. J'en profite pour lui jeter un coup d'oeil. Mince, il a déjà reprit ses esprits ! Je ne faisais pas d'illusions, mon coup était trop imparfait pour être vraiment efficace, mais j'avais quand même espéré l'avoir assommé pour un peu plus longtemps...
Ma main échappe brièvement à mon contrôle, mais pas plus de quelques secondes. De quoi ? Il avait pourtant réussi à me paralyser entièrement ! Mon coup n'était pas aussi nul que ça, finalement...

Je mets à profit ce répit pour découper ce qu'il reste de tissu, en prenant garde à ne pas abimer ma ceinture. Finalement, je suis libre, presque nue, mais libre. Pas la meilleure situation, mais toujours mieux qu'il y a 30 secondes. Il se tient face à moi, l'air pas plus impressionné. Mais si ce que je pense est juste, que ses pouvoirs sont pour le moment inopérants, alors c'est ma chance. Une preuve qui va dans ce sens, il n'a toujours pas tenté de me bloquer comme il l'avait fait tout à l'heure. Cette fois, l'heure de la revanche a sonné !

Alors, ta mère était voleuse aussi, ou c'était juste une personne pas très fréquentable ? Comment on devient la légendaire double V, au juste ?

Quoi ? Qu'est-ce qu'il raconte à propos de ma mère ? Ma mère... Une putain, qui m'a toujours détestée. Le terme de mère est faux, on devrait dire génitrice, pour elle. Une sale truie, qui n'a jamais eu d'affection pour moi, d'attentions à mon égard. C'est à cause d'elle que je suis partie vivre dans les rues. Et c'est pour survivre que j'ai appris à voler. Juste pour survivre... Quand d'autres ont de quoi nourrir vingt personnes. Quel mal à les voler un peu ? Ils n'ont pas besoin du quart de ce qu'ils ont, là où d'autres en ont même pas un vingtième ! Et c'est eux les justes, les bons ? Eux qui prennent tout, et ne donnent rien ? Quelle hypocrisie !

" Je n'ai pas de mère ! La putain qui m'a mit au monde n'a jamais voulu de moi ! J'ai vécu en mendiante dans les rues sordides de cette ville ! Si je vole, c'est parce que je n'ai pas d'autres choix, si je veux vivre un jour de plus ! "

La rage aveugle qui m'habite désormais me fait perdre toute prudence. Je lui fonce dessus, l'attrape par le col, et le projette au sol. Avant qu'il n'ai pu faire le moindre geste, je me laisse tomber à cheval sur lui, et lui prends le cou dans une main, l'autre, dague prête, étant tendue derrière ma tête, attendant de frapper.

" Si tu veux vivre, quand ta maison est une caisse moisie, tu crois avoir beaucoup d'options ? À part voleuse et pute, tu crois que je pouvais faire quoi ? Tu crois que j'avais envie de vivre en me disant que j'étais juste un objet sexuel, comme ma génitrice ? Hein ? Ravaler sa fierté et mettre de coté son honneur ? Vivre avec un statut si dégradant que personne ne te considère comme un être humain à part entière ?
Oui, je vole ! Je vole pour survivre ! Pour survivre ! Chaque nouveau jour est un combat, pour moi ! Mais chaque victoire n'est jamais définitive ! Et en face, ces nobles, pourris jusqu'à la moelle, tu crois qu'ils comprennent ce que ça veut dire ? Un centième de leur fortune me suffirait pour vivre jusqu'à ma mort ! Alors où est le mal, à leur en prendre un peu ? "


Je hurle à plein poumon, alors que mon visage est à peine à plus de vingt centimètres de sien. Mes cris sont ponctués par ma main gauche, qui descend frapper, encore et encore. Les tintements métalliques de ma dague ne me parviennent pourtant pas, pas plus que je ressens les chocs dans mon poignet. Ma vue se brouille, alors que des larmes incontrôlables montent à mes yeux, pour couler le long de mes joues. Dans ma colère et ma rage, tout se mélange dans ma tête, au point que je ne distingue plus l'objet de ma haine. Ma haine...

" Ce monde est pourri ! Pourri jusqu'aux racines ! Cette prétendue justice dont tu parles, elle n'existe pas ! C'est une invention, créée de toute pièce par les puissants, pour légitimer leur domination, et imposer la servitude ! Vivre en étant juste, c'est de l'esclavagisme déguisé ! Pour eux, on n'est rien de plus que du bétail ! Tant qu'on leur rapporte plus, ils te gardent, mis se débarrassent de toi à la seconde où tu ne les intéresses plus !
Ils ne supportent pas que quelqu'un puisse vivre hors de leur influence ! Si tu refuses le collier, alors ils n'hésitent pas à t'abattre ! Tu m'entends ?! C'est ça, la justice que tu me vantes ! Moi, je veux juste vivre ma vie librement ! Si je pouvais le faire autrement qu'en volant, ce serait avec plaisir ! Mais c'est impossible ! Impossible ! Alors, je suis sensée faire quoi, M. le justicier ? Hein ? Je suis sensée faire quoi ?! "


Tout s'achève dans un hurlement final, ponctué par un dernier coup de dague.

Peu à peu, ma rage reflue. En sueur, haletante, le voile rouge que j'avais devant les yeux se dissipe progressivement. Je constate alors qu'en dépit des nombreux coups portés, aucun n'a été létal. En fait, jamais ma lame n'a tranché sa chair. Est-ce moi qui ai inconsciemment évité de le blesser, ou lui qui a détourné  les coups ? Je n'en ai aucune idée, et je m'en moque pas mal. Je suis juste vidée, plus aucune énergie ou volonté. Ma tête tourne, mes membres sont lourds. Je me laisse aller, et tombe sur le dos, pendant que lui se redresse.

" Finis ton travail. Je suis fatiguée de cette maudite comédie. "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 26 février 2013, 01:21:58
J'esquisse une nouvelle grimace lorsque je comprends qu'elle a repéré ma faiblesse. La suite, je le sens, ne va pas beaucoup m'amuser. Sans mes capacités de télékinésie, je suis sans défense, surtout face à un adversaire aussi expérimenté. Je connais bien quelques techniques d'art martiaux -en réalité, je connais parfaitement la théorie d'un bon millier d'entre-elles- mais mon corps n'est pas suffisamment fort, je le sais, pour les exploiter correctement. Je n'ai de toute façon pas trop le temps de réagir qu'elle est déjà sur moi. Son style est efficace, et je serais admiratif si je n'en étais pas l'impuissante victime. Sans trop savoir comment, je me retrouve sur le sol, encore. Je gémis, alors que mon dos percute le plancher. Un éclair de douleur fait claquer ma mâchoire, avec la souffrance, quelques larmes viennent surgir au coin de mes yeux. Je n'y prête pas attention. Je ne peux pas me le permettre.

J'ai bien senti qu'elle allait tenter de me frapper. Si elle s'y prend avec suffisamment de volonté, et enfonce son poignard dans un point critique, ma tête, ma gorge, mon cœur, je ne pourrais pas y faire grand-chose. Peut-être mes implants se rebelleraient-ils et auraient, dans un dernier maestrom, englouti au moins l'étage entier, si ce n'était le bâtiment, mais dans tout les cas, je n'y survivrais sans doute pas. J'aurais eu la satisfaction de l'emporter avec moi, tout en agonisant. Je ne suis pas sûr que ce soit vraiment une satisfaction, en fait. La perspective n'est pas très alléchante, alors je décide de tenter de rester en vie. Heureusement, ses coups manquent de précision. Elle abat sa dague au hasard, ou presque... ce qui me permet de l'influencer légèrement pour qu'à chaque fois, ils ne tombent pas sur moi.

La première chose à laquelle je pense est donc ma défense. Néanmoins, d'autres éléments parasites viennent rendre l'exercice d'une difficulté élevée. Avant même d’interpréter ses propos, qui me paraissent alors comme un long flux de paroles impossible à interpréter, ce sont mes yeux qui dirigent mon cerveau. Elle est à califourchon sur moi, sa poigne sans douceur sur mon cou, ce n'est pas une sensation très agréable, et pourtant. Elle est toujours presque nue. À chaque coup, le muscle de son bras gauche se tend, son dos se courbe, sa poitrine remue un peu. Puis, c'est son odeur qui arrive à mes narines. Elle sent la sueur, la transpiration, je peux même distinguer son haleine. Ça non plus, étrangement, cela ne me dérange pas, au contraire. Je ne peux décidément pas dire, que, physiquement, c'est plaisant, mais je dois avouer, malgré moi, qu'il y a quelque-chose d'excitant à tout cela. Peut-être est-ce parce que je n'ai jamais été aussi proche de mourir ? Si l'ange de la mort ressemble à cela, je songe que ce n'est pas si mal, de mourir. Distrait, je manque de dévier un coup, et celui-ci glisse in-extremis sur une de mes côtes, laissant un trait sanglante très superficiel. La douleur me fait reprendre un peu mes esprits, et le sens des priorités.

Enfin, elle s'effondre sur le côté. Un peu de répit. Je cesse de n'être qu'un sac d'émotions contradictoires. J'arrive à réfléchir, à interpréter ce qu'elle m'a crié. Ma mémoire absolue m'aide à faire en un instant le tri dans les sons que j'ai entendu. Les images que renvoient les images que j'ai capté dans son esprit sont chaotiques, tout s'y entremêle. Je n'ai jamais ressenti une telle confusion depuis ma rencontre avec Amaluna, une schizophrène à un stade critique. Je vois le visage de sa mère, je vois même des scènes où, petite déjà, elle porte la main sur elle. Je vois, plus flous, les visages des hommes qu'elle avait l'habitude de ramener au domicile familial. Lui-aussi, je le vois : il n'y a pas grand-chose à en sauver. À mesure que ses pensées couraient, je revois quelques uns de ses premiers vols, souvent par nécessité, sans doute pas toujours. Je sais que j'ai une vision partiale de sa vie : j'ai seulement comment elle se représente les choses, sans autre point de vue. Je ne peux pas dire qu'il s'agit d'une analyse objective. Je me relève, avec une difficulté supérieure encore à la première fois. Je me sens tout cassé. Mais je récupérerai.

Sa réplique, agrémentées des images de son passé, a été suffisamment forte pour m'enlever toute envie de revanche. Je ne sais pas encore si je vais la livrer, ou non. D'une voix sans éclat, j'énonce :

-On a tous nos problèmes, je suppose... Quoi que tu en dises, tu as eu une mère. Moi, je n'ai jamais eu ni père, ni mère, juste des cellules congelées prélevées dans un stock. Tu as grandi dans une cabane, j'ai grandi dans un bunker, je n'en suis sorti qu'il n'y a qu'un an. Tu es recherchée par les autorités de la ville, j'ai dû quitter mon monde natal pour fuir mes créateurs.

La comparaison est facile à faire. Au final, nos points communs sont terriblement nombreux. Je la sens au bord de l'inconscience. Je ne peux m'empêcher de l'admirer encore, ce corps gracile, pâle, nu, couvert de sueur, qui se soulève à chaque respiration agitée. L'idée même, que je me fais, en ce moment, de la beauté. Les grecs cherchaient la perfection dans le corps de l'homme, mais je crois que je peux à présent leur donner tord. Je n'ai plus du tout le courage de lui faire quoi que ce soit. Je conclus.

-Tu es obligée de voler pour survivre. Moi je suis obligé d'attraper les voleurs.

Je remet un peu d'ordre à mes habits avec ma main. De petits fourmillements à l'arrière de mon crâne m'indiquent que ma télékinésie est sans doute de nouveau opérationnelle. J'espère sincèrement que je n'aurais plus à m'en servir. Je me retourne, attrape son haut, son tee-shirt, et son short. Je lui tends une main, pour l'inviter à se relever.

-Bon, tu devrais te rhabiller, je crois.

Je soupire, et tente un peu maladroitement de me justifier.

-Il y avait trop d'éléments à prendre en compte. Quand je me suis mis en tête de devenir chasseur de primes, j'ignorais qu'on pouvait rechercher des gens aussi jeunes. J'ignorais qu'on pratiquait encore la torture, l'esclavage, même vis-à-vis de ses jeunes gens. Tu sais, de là où je viens, les autorités ont souvent le bon rôle. Elles ne sont pas parfaites, bien sûr, mais elles sont plutôt un élément positif. Ici, finalement je n'en sais rien. Je pensais que ce serait une façon utile de gagner ma vie. C'est plus facile d'être un super-héros, de là où je viens. Je suis complètement paumé, je termine, amère.

Je lui donne ses vêtements et me retourne. Si elle veut s'enfuir, elle en a toute la latitude.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mardi 26 février 2013, 03:37:36
Allongée au sol, le corps complétement exposé, je regarde le plafond. Ou plutôt, je le vois sans le voir. En fait, les images captées par mes yeux ne sont pour moi que fatras de lumières et de teintes, sans signification. Rien de ce que mes sens ne reçoivent n'a de signification. Après cette déferlante de colère, de rage et de haine, je me sens comme un réceptacle vide. Quelques larmes coulent encore de mes yeux, mais je n'y prête pas attention, pas plus qu'à ma respiration encore saccadée. C'est comme si on m'avait retiré mon âme. Je n'ai plus aucune pensée, pas le moindre sentiment. Une indifférence totale m'habite. On pourrait me menacer avec un pieu enflammé, ou me tendre le joyau le plus précieux de l'univers, que je ne réagirais pas différemment. En fait, je ne réagirais même pas du tout.

Lui, debout à coté de moi, je ne sais pas à quoi il pense. Je l'entends parler, mais c'est à peine si j'y fais attention. Les paroles qui sortent de sa bouche ne sont pour moi que sons, sans la valeur ajoutée qui permet la communication. Je le vois s'agiter, puis me tendre mes vêtements. Je n'ai aucune envie de réagir, mais un élément parvient à percer les brumes de mon esprit.
Je vois dans ses yeux la compréhension. La vraie, la pure compréhension, celle qui n'existe que chez ceux qui ont vécu des expériences similaires. Soudain, ses paroles regagnent leur sens, et je ne peux m'empêcher de constater à quel point nos histoires sont semblables. Je parviens à m'extraire de mon apathie, et saisis mes vêtements pour me rhabiller.

Lui me tourne le dos, continuant ses explications. Je pense en profiter pour m'enfuir, mais en une fraction de seconde, je change d'avis. À la place, je me traine jusqu'à un pilier proche, où je m'adosse. Mes cotes me font souffrir, surement une conséquence de mes nombreuses acrobaties. De là, je l'observe.
Il n'a pas bougé depuis qu'il s'est retourné. Sa phrase finie, il s'est juste tu, sans attendre de réponse. Plus que jamais, le voir ainsi de dos me fait penser à un gamin paumé. Toutes les velléités que je nourrissais à son égard se sont envolées. Dans le fond, il est très semblable à moi. J'ai même l'impression de me voir en plus jeune, comme dans un miroir reflétant le passé. Perdus dans un monde où les règles nous échappent, lutant comme nous le pouvions pour survivre. Lutter en permanence contre le courant, pour garder la tête hors de l'eau, ne pas être emportés par les vagues... Je l'avais mal jugé.

" Toi et moi avons énormément en commun... Bien plus que j'aurais pu imaginer... "

J'essaye d'ajuster ma position, mais un élancement dans ma poitrine me fait renoncer. Lui n'a toujours pas bougé, sa position est restée la même.

" Non... Bien plus que d'avoir des éléments en commun, c'est notre destin qui est le même... Lachés sans préparation dans un monde voulant notre mort, forcés de trouver un moyen de ne pas se faire emporter...

Tu sais, pour moi, Double V, ça plus de signification que ça en a l'air... C'est la preuve de mon existence. Je n'ai pas de famille, pas d'amis ou de proches. Si je devais mourir, au moins Double V restera une trace infime, la preuve que Vincente a existé, a vécu sur cette terre. "


Je ne sais pas pourquoi je lui raconte tout ça. Toujours est-il que le dire me donne l'illusion d'être allégée d'un fardeau.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 26 février 2013, 15:30:51
Sa voix, ses propos plutôt, sonnent familiers à mes oreilles. Depuis Jules César, déjà, les hommes cherchent à laisser une marque dans l'Histoire. Je ne crois pas que beaucoup puissent réussir mieux que lui, et pourtant, certains ont bien plus. Je suis, en terme de Q.I, bien plus intelligent que Jules César, je suis plus puissant que lui, je lis même dans les pensées ! C'est évident, maintenant qu'elle l'évoque, que mon comportement, ma volonté de devenir chasseur de primes, sont liés à ce désir de notoriété, de persistance. Cela paraît peut-être un peu puéril, et pourtant, quel autre but viser ? La richesse, le pouvoir, même la connaissance, que j'aime tant, ne sont, je crois, que des moyens, pas des finalités.

-Et si j'avais capturé double V, tu crois que moi aussi j'aurais laissé quelque-chose à la postérité ? Je m'appelle Archie. Tu pourras t'en souvenir comme celui qui a failli attraper double V...

Je me retourne, à présent certain qu'elle s'est habillée. Je songe avec regret que ce serait sans doute la seule fois de ma vie où je l'aurais vue dans cet état, enragée, dangereuse et si sensuelle en même temps. Ça n'a pas d'importance, pour moi, une fois correspond à toujours. Ce pan de ma mémoire ne s'effacera qu'à ma propre mort. J'essaie de faire de l'humour. Ce n'est pas très naturel pour moi. Je sais qu'il faut sourire, alors je souris un peu timidement, pas tellement sûr de ce que je suis en train de dire.

-... avant d'être vaincu par ses charmes, j'avance, sur un ton que je veux amusé. L'idée pourrait assez bien appartenir un récit épique, cela me plaît.

Elle souffre, physiquement. Peut-être plus que moi, et ce n'est pas peu dire. Notre course-poursuite a du épuiser ses muscles, et le déchaînement d'émotions qu'a provoqué la rétrospective de sa vie a du épuiser son esprit. Le moindre mouvement, le simple fait de se replacer, lui fait mal. Moi, je m'en sors avec quelques bleus, une entaille à la poitrine, et le dégoût de m'être trompé. Je n'aime pas me tromper : je dispose de tous les outils pour ne pas le faire, alors quand cela arrive, je me considère être comme le seul coupable. Je n'aurais pas du me lancer aussi vite dans quelque-chose, pas avant d'appréhender toute la complexité de ce monde.J'ai largement pêché par impatience. Je vais maintenant devoir réparer mon erreur, c'est la moindre des choses.

-Je suis désolé de t'avoir mise en danger sur le moyen terme. Je ne crois pas que tu sois capable d'échapper à un garde, même boiteux, dans cet état... Si tu veux, je connais l'emplacement d'un portail vers le monde d'où je viens. Personne ne t'y chercheras, là-bas, tu pourras récupérer... Même y rester plus longtemps si tu veux.

Je ne vois pas tellement comment je peux l'aider autrement, de toute façon. Puis j'entends des pas, suivis de frottements métalliques, qui proviennent des étages du dessous. Ils ne peuvent être produits que par des hommes armés. Des hommes armés qui se dépêchent. Je ne sais pas vraiment qui a appelé la garde, peut-être quelqu'un a-t-il été gêné par toute l'agitation engendrée par la traque.  Le propriétaire de l'endroit où nous-nous trouvons, possible. Il n'aura pas grand-chose à me reprocher, si ce n'est l'état d'un rideau et l'intrusion chez-lui. En revanche, s'ils l’interpellaient, double V risquait gros. Je perdrais alors tout, la prime, et ce que je pense juste.

-Je crois qu'il ne faut pas trop s'attarder ici. Je vais rester avec toi, si tu veux. Tu peux marcher ?

Si ce n'était pas le cas, je me sentais capable de la transporter, elle n'était pas si lourde. Et quand bien même elle aurait pesé une tonne, je crois que j'aurais trouvé l'énergie de la porter jusqu'au bout du monde.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mardi 26 février 2013, 17:33:21
Et si j'avais capturé double V, tu crois que moi aussi j'aurais laissé quelque-chose à la postérité ? Je m'appelle Archie. Tu pourras t'en souvenir comme celui qui a failli attraper double V...

Oh oui, je me souviendrai de toi, Archie. Tu es le premier de beaucoup des choses... Le premier à avoir réussi à me capturer, le premier à avoir fait sortir toute cette rage qui était en moi... Et le premier dont je me sens si proche.
Je réalise soudainement qu'il m'avait dit lire mon esprit. Il a certainement du lire ce que je viens de penser. Je panique un bref instant, puis me calme aussitôt. Après tout ce qu'on s'est dit, toute l'honnêteté dont on a fait preuve, pourquoi irais-je lui cacher des choses ?

... avant d'être vaincu par ses charmes.

De... De quoi ? Mes charmes ? Un bref rire quitte ma poitrine. Je ne suis qu'une pauvre fille des rues. Et je doute avoir été attirante tout à l'heure, en plein chaos émotionnel, manquant de peu le tuer. Ou a-t-il vu quelque-chose de particulier à ce moment-là ? L'esprit peut parfois voir des choses qui échappent au regard...

Je crois qu'il ne faut pas trop s'attarder ici. Je vais rester avec toi, si tu veux. Tu peux marcher ?

Avec difficultés, je parviens à me mettre debout. Mes cotes sont vraiment douloureuses. En aurais-je quelques-unes de fêlées ? Probable... De même, ma jambe droite supporte mal mon poids. Pas étonnant, avec mes sauts de tout à l'heure... Et mes chutes, surtout.
Je m'appuie sur le mur, mon autre main tenant mes cotes. Boitant, j'essaye de gagner une sortie. Il semblerait que la garde se soit décidée à se montrer. Ayant regagné un peu de volonté, je refuse d'être cueillie de la sorte. Dans le même temps, je ne pense pas pouvoir aller bien loin comme ça...

" Tu ferais bien de décamper tant qu'il est encore temps... Les gardes ne sont pas des tendres, la moindre suspicion envers quelqu'un est motif d'emprisonnement. Et à partir de là, il n'y a plus beaucoup d'espoir...
Aller, file ! Je me débrouillerai, je suis Double V, tout de même... "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 26 février 2013, 19:03:53
Cette fois je souris vraiment, avec sincérité. Cela ne m'arrive pas souvent : la plupart du temps, je n'ai l'air sympathique que pour ne pas paraître trop étrange. Montrer un peu ses dents aide à se faire accepter en société. Mais ici, une vraie satisfaction m'habite, alors que je capte quelques pensées positives de double V. Je ne pense pas être digne de l'attention qu'elle me porte, et pourtant, je crois maintenant que j'aurais fais n'importe quoi pour arriver à cela. Étrange qu'une route aussi chaotique m'y mène : tout aurait pu si mal tourner. J'aurais eu l'air vraiment stupide au final, avec mes 3000 pièces. Mon cœur me fait mal, il frappe ma poitrine un peu trop fort, et ça n'a rien à voir avec l'énergie que j'ai dépensé jusqu'ici. Une sensation que j'ai toujours ignorée, jusqu'ici, je me disais que c'était quelque-chose destiné aux gens incapables de faire abstraction de leurs émotions. J'avais peut-être raison, mais je me rends compte que je suis exactement dans le même cas qu'eux. Toute la puissance de calcul du monde n'y fait donc rien.

-Tu vas pas t'en sortir, tu le sais. Et ça va être ma faute... Hors de question, si tu te fais attraper, autant que ce soit moi qui empoche la récompense. Difficile de savoir si je suis sérieux. Je ne pense pas l'être : la perspective d'une prime ne me paraît plus du tout aussi alléchante.

Son impression que je lis dans son esprit, quand je la vois commencer à essayer de se mouvoir, rejoint la mienne. Ses chances de fuite sont presque inexistantes, surtout que j'ai du la priver des quelques artifices d'urgence qu'elle gardait sur elle en cas de situation difficile. Son manteau blanc, sur ses épaules, paraît une charge trop lourde pour son corps blessé. Il ne l'est pas pour moi, loin de là. Je cherche des yeux un meuble un peu lourd, et je n'en trouve aucun. Tant pis, je saisi une table basse et l'envoie barrer l'escalier qui mène à l'étage inférieur. J'y ajoute un tabouret, semblable à celui qu'elle m'avait jeté, et les quelques tringles à rideau qu'il reste. C'est une manœuvre qui semble un peu désespérée... Cela fera peut-être perdre un peu de temps aux gardes, ou du moins, les fera hésiter un instant. Puis je prends une grande respiration, en prévision de l'effort à venir, et qu'il va me falloir soutenir.

-Désolé si ça te rappelle de mauvais souvenirs.

Elle s'élève de quelques centimètres au-dessus du sol, comme si une plate-forme invisible venait de surgir sous ses pieds. J'essaie de rendre ça le moins contraignant possible, mais je dois quand même m'assurer qu'elle ne tombe pas. Je referme le champ télékinétique pour enlacer le bas de ses jambes. Cela devrait suffire. Puis je m'occupe de moi, et me soulève à mon tour. Sans lui laisser trop l'occasion de protester, nous passons par-dessus le balcon où elle avait envisagé de sauter avant que je l'intercepte. Flottant dans l'air d'abord avec une certaine lenteur, j'accélère et j'augmente l'altitude. Il faudrait mieux que les soldats ne nous aperçoivent pas, je ne suis pas sûr d'être capable de dévier une pluie en flèche tout en faisant voler deux personnes. Nous sommes à une vingtaine de mètres de hauteur, et seuls quelques bâtiments parmi les plus majestueux nous dépassent encore. Je préfère ne pas trop regarder en bas, le vertige pourrait me déconcentrer. Après une hésitation, j'augmente encore la vitesse de notre déplacement. Je n'ai pas très envie que l'exercice dure trop longtemps. Le vent me cingle le visage.

-Tu ne devrais pas en douter, tu es la personne la plus attirante que j'ai jamais rencontrée, j'arrive à articuler, la mâchoire serrée par l'effort.

C'est un peu sournois de ma part de lui dire ça alors que nous sommes suspendus au-dessus du vide, et qu'elle n'a certainement pas envie que je la laisse tomber. Je ne sais pas vraiment pourquoi cette phrase a traversé mes lèvres. Quand bien même elle répond directement à ses pensées, elle me gène un peu, après coup. Je tente finalement de changer de sujet, retour à des choses plus terre-à-terre.

-Tu as une planque, un endroit où te cacher ? On peut aussi prendre le portail dont je t'ai parlé...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mardi 26 février 2013, 21:06:27
Il m'aide à m'échapper... A-t-il lu dans mes pensées, ou est-il arrivé à la même conclusion que moi, je n'en sais rien, mais il sait que mes chances sont terriblement maigres. Dans mon état, même le moins motivé des gardes n'aurait aucune difficulté à me mettre le grappin dessus, et je les ai trop longtemps nargués pour qu'ils abandonnent facilement.
Archie utilise à nouveau son pouvoir pour nous faire voler. Si je n'étais pas aussi mal en point, je trouverai l'expérience des plus extraordinaires. Voler, le rêve absolu de tout être humain, le synonyme même de la liberté...

Tu ne devrais pas en douter, tu es la personne la plus attirante que j'ai jamais rencontrée.

Sa déclaration me prend de court, au point que j'en oublie un instant mes douleurs. Sur le coup, je ne sais quoi penser, sans parler de savoir quoi dire. Puis un cri change mes préoccupations premières.
En bas, dans une des rues, une escouade de garde nous regarde. Je les vois, une crainte naissant en moi, nous ajuster avec des arbalètes. Une volée de carreaux vole dans notre direction ! Je ressens une douleur cuisante au flan, mais je n'ai pas le temps d'y prêter attention. Du coin de l'oeil, je vois Archie donner des signes de faiblesse. À ce rythme, on ne tiendra pas longtemps...

" Pose-nous là, dans cette ruelle ! "

Sitôt qu'Archie me relâche, je me dépêche de rejoindre une petite grille au niveau du sol. Quelques coups de pied ont vite fait de desceller les barreaux. Devant l'urgence de la situation, mes souffrances s'estompent. Je commence à me glisser dans l'ouverture créée.

" Archie ! Vite, par ici ! "

Nous atterrissons tout les deux dans une galerie taillée à même la terre, puis aménagée pour être plus... civilisée. En fait, ça ressemble plus à un couloir entièrement fait de pierres taillées. Il n'es pas très haut de plafond, ni très large, mais il est possible pour nous d'avancer sans se pencher, et d'être cote-à-cote. D'un coté comme de l'autre, il s'enfonce dans des ténèbres impénétrables. Après un instant de réflexion, je m'engage vers la droite. Ma main se glisse dans mon sac, pour en extraire un cristal. Celui-ci commence à émettre une légère couleur ocre pâle, nous permettant de voir notre environnement immédiat.

" Par le passé, il y a eu un grand chantier dans toute la cité. De nombreuses galeries comme celle-ci ont été creusées. Elles devaient servir à évacuer les ordures de la ville. Puis l'idée a été abandonnée pendant la réalisation.
Quant à ce cristal, il a la propriété d'émettre de la lumière au contact d'une source de chaleur. La chaleur humaine suffit à le faire réagi... Kch ! "


Un éclat de douleur me force à m'arrêter. Je porte la main au flanc, pour sentir mon vêtement humide et anormalement chaud. Je retire ma main, pleine de sang. Et je repense à tout à l'heure. Un des carreaux m'a frôlé d'assez près pour entailler ma chair. Une chance qu'il ne s'y soit pas planté, mais à terme, ça ne fera pas grande différence...

" Ces galeries forment un vrai labyrinthe, il est impossible de s'y retrouver... Sauf si on sait où aller. "

Je reprends ma marche. Dans ma tête, j'ai une idée de la direction à prendre. J'ai vu d'où je partais, donc je sais quelles galeries emprunter. Je m'efforce de me focaliser dessus, car si je ne tiens pas jusque là, tous mes espoirs se reporteront sur Archie. S'il lit mes pensées, qu'il sache exactement quel chemin prendre pour sortir...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 26 février 2013, 22:26:57
C'est un peu la panique. Je n'ai pas vu les flèches fuser, je n'ai pas réussi à les anticiper, et pour cause : ce sont des carreaux d'arbalète. La technologie à Nexus est plus avancée que je le croyais. J'ai lu dans un livre d'histoire traitant de l'armement médiéval qu'un carreau peut atteindre plus de 300km/h en vol. Heureusement, nous sommes déjà assez loin, et une fois les premiers traits manqués, je peux entamer une manœuvre d'esquive assez maladroite. Je peux arrêter même des balles, mais pas dans cet état, et surtout, pas à cette vitesse. Je n'ai pas trop le choix, et je dois suivre l'indication que me donne Vincente. Brusquement, je nous fais perdre de l'altitude, et finalement, nous atterrissons sur le sol d'une ruelle mal entretenue. Je suis sûr de ne pas avoir été touché, et pourtant, j'ai une impression dérangeante.

Cependant, je n'ai pas le temps d'en chercher l'origine. Malgré ses blessures, double V trouve un passage dissimulé, et s'y engouffre aussitôt. Je ne sais pas d'où elle tire toute cette vigueur, sa volonté est impressionnante. Je ne suis pas très confiant, mais je la suis tant bien que mal, je ne suis pas très à l'aise lorsqu'il s'agit de prendre des échelles.

-Tu es sûre que c'est une bonne idée ? je m'enquière, inquiet.

Je ne connais pas la ville, mais les souterrains sont rarement les endroits les mieux fréquentés. Je pense d'abord qu'il s'agit d’égout, et m'attend à un milieu humide. Son explication me rassure un peu. J'espère simplement qu'il n'y a pas trop de rats. En grand nombre et de la taille de chats, je ne doute pas qu'ils puissent s'en prendre à des humains blessés. Je me rends compte en même temps qu'elle qu'elle est blessée, identifiant la cause de mon désagréable sentiment. Elle a probablement été touchée par un carreau. J'essaie de ne pas trop m'alarmer. Paniquer ne résoudra rien. Nous aurions été sur Terre, j'aurais pu appeler une ambulance, ou trouver un médecin... Je n'ai que des idées très théoriques concernant la façon dont soigner ce genre de plaie sans le matériel moderne. Vu le niveau d'hygiène de Nexus, à peine supérieur à celui d'une cité médiévale, la moindre entaille peut s'infecter.

-Il va te falloir des soins, yebat... Tu ne peux pas continuer à perdre du sang comme ça, tu vas t'épuiser.

Et notre survie de tous les deux en dépend. Si ce qu'elle dit est vrai, elle ne doit surtout pas perdre conscience, où je me retrouverai perdu. Je ne pourrais pas la sauver si je suis désorienté, sans connaître les sorties d'une galerie obscure. Mes pensées sont tellement occupées que je remarque à peine son cristal lumineux. J'aurais le temps de me demander comme celui-ci fonctionne plus tard, quoiqu'il soit fascinant que la population ait trouvé par la magie comment se passer de technologie. Cela explique, d'ailleurs, peut-être, leur retard. Lorsqu'on est capable de s'éclairer grâce à des objets ensorcelés, peut-être n'a t'ont pas besoin d'électricité. J'ai senti qu'elle tenait beaucoup à son manteau. Je n'ai pas le cœur à l’abîmer, alors je modèle un champ de force très fin, suffisamment pour être tranchant, et coupe sans faire d'histoire une manche à ma tunique de cuir.

-Bouge pas. Je ne crois pas que ça va être très agréable.

La bandelette s'enroule autour de son torse, garrottant la blessure, et coupant court à tout risque d'hémorragie. J'essaie de rendre le processus le moins douloureux possible, mais je n'ai rien qui soit susceptible d'atténuer sa souffrance. Je ne veux pas la vexer en la portant pendant tout, toutefois, je crains qu'inexorablement, ses forces déclinent, aussi j'opte pour une solution entre les deux. Sa jambe droite peine à la supporter son poids, alors j'allège la charge qui lui pèse en la soutenant par télékinésie. Ma tête est brûlante, j'ai l'impression que le métal de ma colonne vertébrale est chauffé à rouge. Mon visage est trempé par l'effort que j'ai fourni jusqu'ici, heureusement à présent, il est plus modéré : je peux m'en remettre à mon propre corps pour marcher. Je ne sais cependant pas combien de temps cela va continuer. Je me contente de nous diriger selon ses propres instructions.

-Tiens bon. Il doit bien y avoir une hospice quelque part...

Je n'y crois pas moi-même, quand nous serrons sorti, je ne sais pas où, il y a peu de chance que nous tombions sur ce genre de lieu. Au fur à mesure que nous avançons, je dois la soutenir de plus en plus, et je sens qu'elle ne tiendra plus longtemps. Je commence à être réellement désespéré. Si je m'en sortirai peut-être, ne serait-ce qu'en me reposant puis en forant le plafond jusqu'à la surface, ça ne serait probablement pas son cas.

-Une sortie !

En effet, avec soulagement, je distingue une lumière, au loin. Je n'ai aucune idée de l'endroit sur lequel le boyau débouche, peut-être sur quelque-chose de pire. Je capte d'autres esprits dans les alentours. Je grimace, leurs quelques pensées arrivant à moi : il s'agit de bandits, en tout cas des individus peu recommandables. Nous avons suffisamment d'équipement sur nous pour les intéresser, et je suis épuisé.

-Il y a d'autres individus, là-bas. Je ne sais pas si je pourrais t'en protéger, je suis désolé...
Titre: Re : Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 27 février 2013, 00:18:04
J'ai rarement été dans une situation aussi critique. En fait, c'est même la première fois que je suis si près de la mort. Pas franchement agréable, comme situation. Pourtant, ma volonté, celle qui m'a permit de me battre toute ma vie, celle qui a fait de moi ce que je suis aujourd'hui, me pousse à avancer, à continuer à mettre un pied devant l'autre, encore et encore.

Mon état est pourtant grave. Ma jambe supporte à peine mon poids, et mes cotes me font souffrir à chaque nouvelle inspiration. Quant à ma blessure au flanc, je suis reconnaissante envers Archie, qui m'a posé un garot d'urgence. Certes, ça me fait souffrir, mais ça limite l'hémorragie, ce qui est somme toute préférable. Mais je sens bien que je ne tiendrai pas longtemps comme ça.
Il faut pourtant que je nous sorte de là. Je ne peux pas me permettre un moment de faiblesse, pas avant d'avoir atteint un endroit sur. Je fais confiance à Archie, je sais que je peux compter sur lui, mais il ne connait rien des lois de cette ville, et je ne peux pas, je ne veux pas lui faire courir de risques par ma faute.

Les galeries se succèdent les unes aux autres. Intérieurement, je sens mon esprit flancher. J'ai beau essayer de maintenir l'allure, notre progression a considérablement diminuée. Je me sens fiévreuse, mon corps est brulant, or mes mains et mes pieds sont glacés. De même, ma gorge est sèche, et j'ai de plus en plus de vertiges. Je n'ai pas des masses de connaissances médicales, mais ça me semble clair que mes blessures commencent à avoir raison de moi. Puis, alors que je commençais à perdre espoir, j'aperçois la fin de la galerie. Enfin à l'air libre ! Si je ne me suis pas trompée en chemin, on doit être au bon endroit...

Il y a d'autres individus, là-bas. Je ne sais pas si je pourrais t'en protéger, je suis désolé...

Pas besoin de se protéger. On est là où je voulais aller.
Notre environnement immédiat est un terrain vague au pied des murs de la ville, un peu à l'écart des bâtiments de l'enceinte extérieure. La végétation y est dense, personne n'ayant jamais eu l'envie, le courage ou la motivation de s'en occuper. Il y a même un bosquet d'arbres rachitiques un peu plus loin, et c'est dans cette direction que je nous guide.

En dépit de ma vision faiblissante, j'aperçois une tête d'enfant non loin du bosquet. Je n'ai pas le temps de l'identifier, car elle disparaît aussitôt, mais ça me convient : le message va être transmit, Archie et moi sommes saufs.
Rapidement, une myriade d'enfants, précèdés de quelques jeunes, vient à notre rencontre. J'ai le temps de voir Lena, l'ainée du groupe, reconnaissable à ses cheveux bruns bouclés, où se mêlent déjà des mèches grises. Nous avons le même âge, et nous nous considérons comme des sœurs. Je vois aussi Raku, d'un an mon cadet, et ses cheveux noirs en bataille. Ce doit être le plus bagarreur, et il parle toujours de devenir aventurier, de partir loin et de devenir riche. Je le soupçonne d'être amoureux de Lena, raison pour laquelle il est toujours là.

- Vincente ! Qu'est ce qu'il t'arrive ?
- Du sang ? Tu es blessée ?
- Hey ! Vincente ! Reste avec nous !
- Grande sœur Vincente !
- Et lui, c'est qui ?


J'ai à peine conscience de Raku qui m'arrache de l'épaule d'Archie pour m'en éloigner, ni des mains de Lena qui s'affaire déjà aux premiers soins. Mais je sais que j'ai peu de temps pour expliquer la situation, et sauver Archie.

" J'ai eu un problème... Avec la garde... Archie m'a sauvée... Sans lui, je serrais... Morte ou... En prison...
J'ai... J'ai confiance... En lui... "


Ce sont mes derniers mots avant que ma conscience ne s'éteigne, comme une bougie que l'on souffle.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mercredi 27 février 2013, 01:25:17
Je suis nerveux, mais je sens un grand soulagement chez Vincente, alors cela me rassure un peu. Elle a l'air de bien connaître l'endroit. Peut-être y a-t-elle des amis, je me mets à espérer qu'elle connaisse une guilde de voleur organisée, un apothicaire retiré, ou même une vieille femme avec quelques connaissances en herboristerie. Finalement, contre toute attente, c'est une bande de gamins qui nous accueille. J'aurais préféré quelque-chose de plus sûr, mais enfin, c'est mieux que rien. Ils ont l'air d'être des durs, leur posture, leur attitude reflètent, je crois, une connaissance de la rue. Leurs pensées sont agitées, parfois agressives, envers moi. Ils se demandent qui je suis. Double V leur répond, elle fait de moi son sauveur. Elle oublie de leur dire que c'est de ma faute si elle a pris le moindre risque, et si elle est actuellement dans un si sale état. Je n'en rajoute pas. J'aurais du mal à les maîtriser tous.

-Faites attention, elle a reçu un carreau d'arbalète à la poitrine, j’avertis, d'une voix un peu trop absente, même pour moi.

C'est étrange, mais quand ils enlèvent Vincente de mon épaule, je me sens attaqué, j'ai l'impression qu'on me vole un bien précieux ; bien plus précieux que 3000 pièces d'or, je pense. C'est à contrecœur que je leur cède son corps. Je la vois partir. Ils s'en occuperont sans doute beaucoup mieux que moi, quand bien même mes connaissances en matière de médecine n'ont rien à envier à un praticien professionnel. Je regarde d'un mauvais œil les instruments de premiers secours que va chercher une autre fille, Lena. Elle est assez jolie, elle aussi, ses cheveux sont plus longs que ceux de Vincente, plus sombres aussi : cependant, certains sont gris. Je m'interroge sur ce qui peut expliquer une telle couleur, pourtant peu courante à cet âge. Il est possible que les génotypes de Nexus présentent-ils des variations endémiques. Ou alors, cela est causé par l'environnement. Où sommes-nous, au juste ?

De petites cabanes, quelques arbres, dans un terrain qui n'a pas été entretenu depuis sans doute des décennies. Il y a des herbes folles partout, les sentiers ne sont tracés que par le passage incessant des enfants. Ce n'est pas vraiment le lieu parfait pour garantir l'hygiène. Au moins, je suppose que nous y seront en sécurité. Double V a beau m'avoir introduit correctement, je sens ses compagnons suspicieux. Ils ont l'air de beaucoup tenir à elle, quel autre genre de personne appelle-t-on grande sœur ? Je ne sais même pas s'il existe un vrai lien familial entre eux, je ne pense pas. De tous les souvenirs que j'ai capté, aucun n'avait de rapport avec une éventuelle fratrie. J'en conclus qu'il s'agit probablement d'enfants abandonnés qui se sont regroupés pour survivre. Certains sont plutôt jeunes, quelques uns ont mon âge, voire sont un peu plus vieux. Avec mon mètre cinquante, je suis à peu près dans la moyenne de taille. Aucun, cependant, n'est réellement adulte. Cela me fait penser au pays imaginaire de Peter Pan, où se cachaient ceux qui ne voulaient pas grandir.

Maintenant que Vincente est inconsciente, je me sens seul. Les autres membres de la bande semblent avoir un peu peur de moi. Je ne sais pas trop quoi faire, alors je m'assure qu'elle se rétablit bien. Par le biais de ma télépathie uniquement, hélas, parce que le plus vieux des garçons n'a pas voulu que je pénètre dans la cabane où elle se repose. Je n'ai pas pour habitude d'être inactif, je déteste ça, pourtant, je reste oisif. Je suis assis sur une grosse racine, juste en périphérie du camps. Je m'assure que personne de suspect ne vienne nous déranger. Je regarde le soleil de midi, le ciel bleu. Il y a quelques nuages à l'horizon. Quand va-t-il pleuvoir ? Je pourrais essayer de développer un modèle météo, un exploit que seules les puissances de calculs de ses dix dernières années ont permis, et qui m'est accessible, au prix de plusieurs heures de concentration. En d'autres circonstances, cela m'aurait amusé. Je n'en trouve pas la volonté.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 27 février 2013, 03:49:53
Je n'ai aucune idée du temps pendant lequel je fus inconsciente. J'avais juste le sentiment que mon corps flottait, inerte, dans un espace sans fin. Le temps n'y avait plus cours, mon cerveau semblait avoir cessé toute activité. Une sorte de sérénité absolue m'avait envahie, et c'était une sensation plutôt agréable.

Le retour à la réalité fut autrement plus dur. Ma conscience emmergea péniblement, et mes yeux commencèrent à percevoir la lumière. J'étais désorientée, je ne savais pas où j'étais. Un éclair de douleur explosa dans ma poitrine quand je voulu bouger, et en y portant la main, j'y sentis un cataplasme, couplé à un bandage artisanal. Puis mes souvenirs remontèrent également.

Mon altercation avec Archie. Moi déchainant ma rage. Archie me sauvant de la garde. La fuite par les galeries. La bande.

Je suis de retour chez moi. Un bruit sur le coté me fait tourner la tête. J'ai le temps de voir une tête blonde quitter la pièce. Peu après, Lena entre, une petite fille à ses talons. Je reconnais Nila, une fille qui m'a prise en affection dès son arrivée, et qui a fait de moi sa grande sœur d'adoption. C'est également elle qui a du veiller sur moi, ses cheveux blonds sont inimitables. Puis mon regard retourne sur Lena. Son visage soucieux est un message très clair.

- Tu nous a fais une peur bleue, Vincente.

Son ton de réprobation n'est pas très convaincant. Je tente de lui répondre, mais je n'arrive qu'à émettre un faible chuintement.

- Ne te force pas. Tu as de sérieuses contusions à la jambe et à la poitrine, et cette entaille t'a fait perdre énormément de sang.

En dépit de ses dires, je ne suis pas dupe à propos de ses réels sentiments. Sa voix perd en assurance petit à petit, et des larmes lui montent aux yeux.

- On a cru... J'ai cru... Que tu allais nous quitter... Juste sous mes yeux. Tu n'as pas le droit, Vincente ! C'est injuste de me laisser seule, tu sais ! Je t'interdis de mourir comme ça !

Et elle éclate en sanglots. À ses cotés, Nila en fait de même, avant de se jeter sur moi. Le choc réveille mes blessures, mais j'encaisse, elle est dans son droit. Lena ne tarde pas à me rejoindre également. Je voudrais les toucher, mais mes bras sont trop faibles, alors je me contente de les regarder.

" Désolée... "

C'est tout ce que j'arrive à dire. Puis le défilé commence. Raku est le premier à entrer, puis Gil et Kano, les suivants en terme d'âge, et les derniers ainés. Suivent plusieurs enfants. Je distingue deux nouvelles têtes, mais tous sont présents. Les voir se serrer autour de moi, lire l'inquiétude qu'ils se sont fait, le soulagement qu'ils epprouvent, me réchauffe le coeur. Je repense à ce que j'ai dit tantôt à Archie, à propos de laisser une trace de mon vécu. Je pense maintenant que cette trace existait déjà, j'étais trop aveugle pour m'en rendre compte. D'ailleurs, parlant d'Archie...

" Où... Où est... Archie ? "
- Qui, le type avec qui tu es arrivée ? Il est assis un peu à l'extérieur du camp.
" Tu peux... Tu peux aller... Le chercher... S'il te... S'il te plait ? "
- Tu es sûre de toi ? Tu ne crois pas que...
" C'est bon... Je te l'ai... Dis, non ? Je... Lui fais con... Confiance... "

Raku cesse de discuter, et va le chercher. Archie... Ona eu des divergences au début, mais c'est une bonne personne finalement. Sans lui, je serais sûrement morte à cette heure. Je lui en dois une. Non, plus que ça, j'ai une dette à son égard.
Il y a énormément de choses que je voudrais lui dire, à propos de ce qui s'est passé entre nous, à propos d'ici... Mais je crains ne pas en avoir la force...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mercredi 27 février 2013, 14:24:31
Je la sens qui se réveille : sa conscience s'éveille, difficilement, mais elle est bien là, elle n'a pas disparu. Le plus dur est fait, je crois, elle devrait se rétablir maintenant. Il est près de six heures du soir, si du moins le soleil s’attelle ici à la même course que sur Terre. J'ai attendu toute la journée, je n'ai pas mangé. L'utilisation de mes pouvoirs me fait perdre beaucoup de calories, c'est sans doute la raison, d'ailleurs, de ma petite taille et de ma faible carrure. Toutefois, je ne me voyais vraiment pas d'aller quémander de la nourriture à la bande de double V, je ne sais même pas s'ils en ont assez pour nourrir tous leurs membres. J'avais l'impression d'être faible, jusqu'ici, mais la fatigue se dissipe lorsqu'elle revient à elle. C'est stupide, parce que ce n'est qu'un élément parmi d'autres de son passé proche, mais je suis content de faire partie du premier souvenir qui remonte à elle.

Je fronce les sourcils lorsque sa douleur reprend vivement. Ces gamins pourraient un peu faire attention. Enfin, ils ont l'air de tenir à elle autant que moi, ce qui est d'autant plus compréhensible qu'ils la connaissent peut-être depuis toujours. Finalement, nous ne nous sommes côtoyé que pendant un temps assez court, et pas vraiment très agréable. Je ne sais pas trop pourquoi son sort m'importe autant. Je me demande si ce n'est qu'un effet de la culpabilité. Je suis le seul et unique responsable de ses blessures, après tout. Mais enfin, si ça n'avait été que ça, peut-être serais-je déjà parti. Je m'attends à passer une nuit dehors, alors qu'elle va sûrement se rendormir sans plus se préoccuper de moi. Mon cœur bondit lorsqu'elle demande à un jeune homme d'aller me chercher. Ça ne lui fait pas très plaisir, je crois, il est surtout perplexe. Je me lève, et je me dirige vers la cabane.

-Elle a demandé à te voir, il m'avertit, alors que nous nous croisons.

Je hoche la tête ; j'étais déjà en chemin avant qu'il ne me dise quoi que ce soit. Concernant ma capacité à lire les esprits, ce n'est pas très discret, et son interrogation à mon égard doit encore croître. Je n'en ai pas grand-chose à faire. Je prends une grande inspiration et entre dans la hutte. Je vois tous les yeux de ces enfants, qui m'observent. Cela ne me met pas trop en confiance, ils se demandent tous pourquoi je suis là. Je n'ai pas de réponse à leur apporter. J'essaie de les ignorer. Une fois que mon regard s'est posé sur Valentine, ce n'est pas si difficile.

-Alors, comment vont les 3000 pièces d'or ?

Mon sens de la plaisanterie est toujours aussi maladroit, mais ne rien dire m'aurait fait paraître encore plus idiot, encore que. C'est amusant de savoir qu'elle considère avoir une dette envers moi, alors que me sentant responsable de son état, je songe au contraire que c'est moi qui dois me racheter. Je reste quelques secondes silencieux, à regarder son visage fatigué. Je m'égare dans ses iris verts, j'avale ma salive avec difficulté. Je sens le malaise de l'assemblée face à mon mutisme, et il se transmet aussitôt à moi. Je me décide à ouvrir de nouveau la bouche.

-Ça aurait été plus élégant de partir sans bruit, comme un loup solitaire, avant que tu te réveilles, pas vrai ? Je n'ai peut-être pas assez travaillé mon personnage...

Il y a un peu trop de monde pour les déclarations plus intimistes, je crois. Pas facile d'avouer à quelqu'un ce que l'on ressent lorsque le matin même, on manquait presque de la violer pour une raison douteuse, et qu'en ce moment même, les regards interrogatifs d'une dizaine de gamins sont braqués sur soi. Surtout que je n'ai aucune expérience dans le domaine, les idées qui me viennent sont toutes extraites de films ou de romans. Je trouve ça un peu ridicule. Je me mors la lèvre inférieure, embarrassé.

-Je voulais juste, hm, m'assurer que tu te remettais bien. Je ne vais pas t'embêter plus longtemps, je crois que j'ai déjà fais assez de dégâts comme ça, je conclus, avec un sourire un peu mélancolique.

Je me retiens d'ajouter une dernière phrase plus conditionnelle. Même si j'en ai très envie, ça ne serait pas très digne, je pense.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 27 février 2013, 23:30:10
Archie finit par arriver. Je sens un brin de tension parmi les enfants, mais quoi de plus normal ? Archie me regarde, et je le regarde. Je dois faire pitié à voir, blessée et faible. Lui en revanche, n'est pas très différent de quand je l'a quitté. Il se lance dans quelques phrases qu'il a sans doute du répéter à l'avance. Ou peut-être pas, finalement.

Je ne sais peut-être pas lire dans les pensées comme lui, mais je sens qu'il a plus à dire que ce qu'il dit. Je demande à la bande de nous laisser seuls. Il y a quelques réticences, mais tous finissent par quitter la hutte. Toujours allongée, je regarde Archie, cherche à deviner ce qu'il peut bien penser.

" Quoi que tu penses... C'est moi qui ai une dette envers toi... et non le contraire... Ce qui s'est passé entre nous... C'était dans l'ordre des choses... Mais rien ne t'obligeait à m'aider... comme tu l'as fait... "

Je m'interromps un instant, laissant passer une vague de douleur.

" Tu connais mon passé... C'est ici que j'ai grandi... Pas le grand luxe, hein ? Pas très prestigieux... pour la grande Double V... Tu ne penses pas ? "

Ma tentative d'humour, comme la sienne tantôt, sonne faux. Je lâche un long soupir.

" Lena, la fille qui m'a soignée... a mon age. On est... comme des sœurs... l'une et l'autre... Elle a vécu de telles difficultés... qu'elle commence déjà... à avoir des mèches grises...
Raku, le garçon... s'est fait battre à mort... avant d'arriver ici. Son dos... est couvert de cicatrices...
C'est ça... la réalité ici... "


Parler de ça me fait sentir mélancolique. Je ne regarde plus Archie, j'ai peur de ce que je pourrais voir dans ses yeux. Je ne sais pas exactement en quoi ça me fait peur, mais quelque-chose en moi me dit que je ne suis pas prête pour ça. Je change de sujet.

" Tu n'as nul part... où aller, pas vrai ? Pourquoi... pourquoi tu ne resterais pas ? Au moins... le temps que je... que je récupère un peu... "

Lena, qui devait écouter à la porte, entre à ce moment. Elle me fixe du regard, et je le lui rends. Nous restons comme ça un instant, puis elle finit par accepter. Elle entraine Archie à sa suite, me laissant seule.
Je ne sais pas pourquoi, mais un sourire me monte aux lèvres. Puis le sommeil vient prélever son du...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le jeudi 28 février 2013, 01:20:03
-Pas terrible... Vous avez l'air très solidaires. Tu as des gens qui tiennent à toi, c'est déjà plus que beaucoup.

À commencer par moi, je songe. Mes amis se comptent sur les doigts de la main, les personnes avec qui j'ai eu une conversation amicale sont à peine plus nombreux. Je ne veux cependant pas lui transmettre mon impression globale de solitude. Vincente est sans doute la seule personne à qui j'ai réellement été utile jusqu'ici dans ma vie, et encore, cela découle d'une erreur de ma part... Je sais ce qu'est devenu Squall, un parfait accroc au sexe, et j'avoue que je m'en sens un peu coupable : c'est ma seule faute s'il a rencontré Ivy, cette dangereuse nymphomane aux expériences végétales douteuses. Quant à Amaluna, malgré ma télépathie, je n'ai rien pu faire contre la maladie mentale qui la ronge toujours, emplissant son esprit d'une trame d'illusions sans fin. De là à me sentir fier, au final, d'avoir sauvé double V, il n'y a qu'un pas... sa conviction déteint un peu sur ma mienne. Et puis, je crois que ça m'arrange un peu.

Elle avance que je n'ai nulle part où aller. C'est faux. J'ai loué une chambre d'auberge pour un mois, payé d'avance. C'était moins cher. Je ne lui dis pas, c'est inutile. Je n'ai aucune envie d'y rentrer, même si cela implique de dormir à la belle étoile et sans couverture, devant sa cabane. J'ai encore des choses à lui dire, surtout qu'à présents, nous sommes seuls. Enfin, presque, puisqu'une des filles écoute à la porte. C'est presque comme si elle n'était pas là. J'hésite. Je suis sur le point de me lancer lorsque l'espionne débarque. Je soupire, mais elle a raison, il est temps de la laisser se reposer. Je ne sais pas combien de temps va durer son rétablissement, je sais simplement que je resterai au moins aussi longtemps dans les alentours du camps, pour m'assurer qu'il ne soit perturbé par personne. Je lui lance un dernier sourire, et essaie discrètement d'introduire chez-elle un peu de bien-être par télépathie.

Je m'éloigne avec Lena. Si ses quelques cheveux gris sont la conséquence des difficultés qu'elle a rencontré dans la vie, quel genre d'horreurs à donc pu endurer Vincente pour qu'il ne lui reste plus aucune mèche colorée ? Je n'ai qu'une partie des réponses, je ne suis pas sûr de vouloir en savoir plus. La jeune femme m'explique brièvement le fonctionnement du camps, l'importance qu'à double V pour leur survie à tous, et surtout pour celle des moins âgés. Je comprends mieux leur émoi lorsqu'elle est rentrée blessée. Ils l’appellent grande-sœur, mais elle a presque le rôle d'une mère, les protégeant, les nourrissants. Cela ne me surprend plus beaucoup, j'ai compris depuis qu'elle n'était pas une voleuse comme les autres. Je sens que je vais finir par légitimer le vol, moi qui ai toujours aimé un certain ordre social. Et après tout, pourquoi pas ?

Manger, à présent, on me le propose, et ce n'est pas superflu. J'ai ignoré dans la journée les signaux de détresse envoyés par mon estomac, mais mon corps à des limites physiques. À ne pas me sustenter, je risque de tout simplement m'évanouir. Je crois qu'ils n'ont pas besoin d'une autre personne en sale état, j'accepte donc ce qu'ils me proposent. À première vue, cela me semble mauvais : des morceaux de viande rouge flottant dans une bouillie brunâtre. L'aspect repoussant n'est toutefois rien comparé au goût terrifiant de la mixture. Je crois n'avoir jamais rien mangé d'aussi immonde, et soudain, les tripes qu'on m'a servies à l'auberge me paraissent un met de luxe. Avaler chaque bouchée est presque aussi dur que de voler sous une pluie de carreaux... Je prends sur moi pour ne pas faire la grimace et pour en finir la plus grande partie. Je ne veux pas insulter leur spécialité locale, quand bien même elle est à base de rat.

Puis on m'indique une cabane, que je partagerai avec deux autres garçons. Ils sont assez jeunes, alors je ne crains pas trop qu'ils se montrent hostiles. Il y a un trou dans le coin gauche de la hutte, qui laisse passer la lueur des étoiles, et parfois quelques courants d'air. Je me place dessous. Une couverture me fait office de matelas -je me félicite déjà qu'elle ne soit pas envahie de vermines-, alors qu'on en a laissé une autre, plus petite, pour me couvrir. Je m'assois, rabat le drap sur moi. Je m’allonge. Les minutes passent sans que je parvienne à fermer les yeux. Je me tourne sur le côté. Je me remets sur le dos, au moins, j'ai vue sur la voie lactée... ou ce qui équivaut dans ce monde. J'entends les légers ronflements émis par mes deux partenaires de chambres. Ils dorment déjà, sans doute éreintés par une journée difficile.

Mes pensées vagabondent, me maintiennent éveillé. Elles convergent toutes vers la rencontre avec Vincente. Je me souviens dans les moindres détails de ma mémoire absolue notre course-poursuite, puis le moment où, enfin, je la tiens. Un bref échange, et je commence à la déshabiller. Mon cœur s’accélère quand je révèle son abdomen délicat mais musclé, sa poitrine, encore couverte. Ma main passe sous la couverture, sous mon pantalon devenu trop étroit, vient libérer ma verge dressée. Mon autre bras va chercher ma tunique, et la relève assez haut. Je retire le tissu qui cache son buste. Mes doigts commencent à faire des va-et-vient, d'abord timides. J'enlève son short, je contemple ses jambes, taillées pour les sprints, les sauts. Une chaleur familière commence à monter en moi. J'hésite, je fais glisser son dernier vêtement ; je me reprends, je le laisser retomber. Je me sens stupide, pourquoi n'ai-je pas été plus loin ? Il ne m'en aurait pourtant rien coûté, elle m'aurait sans doute pardonné de la même façon. Le rythme de ma main augmente, son trajet, de haut en bas, devient presque machinal. Je passe la frustration. En accéléré, Vincente se retrouve au-dessus de moi. Sa main tient mon cou, bloquant légèrement ma respiration. Un mouvement de plus, je ne sais pourquoi, fait frisonner tout mon être. Je laisse échapper un gémissement. Ses seins blancs qui oscillent, sa transpiration, son odeur. Mes muscles se contractent, j’accélère encore. Ses yeux verts, humides, désespérés, sa rage, presque bestiale. En plusieurs jets, le liquide laiteux se répand sur mon ventre nu.

Je continue encore quelques secondes, puis j'arrête. Je réajuste la couverture. Je m'endors. Enfin.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le jeudi 28 février 2013, 23:25:26
Sans surprises, il me fallut un bon moment pour me rétablir. La première journée fur un cauchemar, le moindre effort physique m'épuisait. Ce n'est qu'au quatrième jour que je pus enfin me lever et marcher un peu. Pendant cet intervalle, Lena et Nila se relayèrent pour prendre soin de moi, et je leur dois ma reconnaissance pour ça. Lena en profita pour me tenir informée de la situation actuelle dans les bas-fonds. Dans les secteurs environnants, ça allait, mais dans les parties les plus à l'est, il y avait eu du vilain. Une bande avait été massacrée, et une autre avait disparu. Rien ne permettait de l'affirmer, mais tous craignaient que ces violences se répandent, peut-être jusqu'ici. Je promis d'en parler à Asul, il doit sûrement savoir quelque-chose.

Le camp reçu un visiteur pendant cette période là. Plus precisemment, Lya, mon amie l'hermine blanche, avait retrouvé ma trace, et m'avait rejointe. J'imagine sans peine le calvaire que ça a du être pour elle, aussi me suis-je faite pardonner en la laissant se servir dans mon bol. Sa venue fut également un vrai divertissement pour les enfants, aidant à faire passer la pilule sur mon état, et la présence d'Archie.

Le garçon, justement, resta au camp le temps que dura ma convalescence. Il se servit de son pouvoir pour aider lors de quelques travaux, si bien qu'il finit par convaincre même le réticent Raku, et fut intégré parmi la bande. Il passa me rendre visite à de nombreuses reprises, à chaque fois que j'étais seule. Nous échangions quelques banalités, ou alors je lui expliquais tel ou tel point sur ce monde.

En mon fort intérieur, je ne savais plus trop où j'en étais, concernant Archie. J'étais contente de le voir franchir le rideau de la hutte où j'étais, mais pourtant, sa présence me mettait mal à l'aise, au point que j'en venais à souhaiter qu'il parte. Mais il me manquait à la seconde où il quittait mon champ de vision. De même, je m'arrangeais toujours pour avoir un sujet de discussion. Pour une raison inconnue, je ne voulais pas qu'il choisisse un sujet. Je ne voulais pas savoir ce qu'il pourrait avoir à me dire.

Enfin, à l'aube du cinquième jour, je fus à nouveau sur pieds. Je n'étais pas encore complètement rétablie, mais largement assez pour ce que j'avais à faire. Quelques affaires avaient été laissées en suspens, et je devais y mettre de l'ordre. Quand elle l'apprit, Lena me tomba dessus comme un mur de briques, et me fit jurer, sous la menace d'une infinité de tourments, de revenir sitôt que j'avais fini, et qu'aucune excuse ne serait acceptée.

Équipement paré, manteau au vent, Lya sur mon épaule, je pris congé des enfants, et en compagnie d'Archie, pris la direction des quartiers de Nexus...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le vendredi 01 mars 2013, 01:24:00
Les journées me paraissent interminables. Bien malgré moi, je dois avouer que je me suis rarement autant ennuyé. Je ne peux décemment pas m'éloigner du camps, terrorisé à l'idée qu'on vienne troubler sa quiétude sans que je sois présent pour le défendre (et les nouvelles de destructions et de pillages qui viennent des environs ne me rassurent pas). Mais ici, il n'y a rien, pas de cinéma, pas de télévision, pas même un livre. Je m'occupe comme je peux, mettant mes capacités au service de quelques tâches qui auraient été autrement hasardeuses. Certaines choses sont plus faciles à faire, par télékinésie. Je ne peux pas dire non plus que je m'intègre très bien à la communauté ; je n'arrive pas vraiment à leur parler, à avoir des conversations intéressantes avec eux. Eux, m'intègrent en revanche correctement, ils essaient de m'adresser la parole, et le fait que je puisse les aider me rend à leur yeux un peu plus sympathique, encore que je continue à en effrayer.

Un seul moment me paraît passer beaucoup trop vite : ce sont mes courtes, trop courtes, entrevues avec Vincente. Je sais qu'il faut qu'elle se rétablisse, mais j'aurais tellement préféré qu'elle puisse me parler plus longtemps. Pourtant, à chaque conversation, j'ai l'impression qu'elle m'esquive. J'ignore pourquoi, et c'est aussi son cas, malheureusement, ma présence directe semble un peu la mettre mal-à-l'aise. Je ne sais pas comment le prendre. Parfois, elle commence à aborder très vite un sujet, comme si elle cherchait à m'empêcher de mener la conversation comme je l'entend. Cela me frustre, car au bout de quatre jours, j'ai la sensation que nous n'avons rien échangé, quand bien même j'ai appris dans cet intervalle de temps plus sur Nexus que sur de nombreuses villes terriennes. Je suis beaucoup moins perdu sur un plan culturel, géographique, moral. Sur le plan de mes objectifs, au contraire, je n'ai jamais été dans un tel brouillard.

Je suis content, lorsque, enfin, Vincente se considère rétablie. Pas seulement parce qu'elle est de nouveau sur pieds, que sa rémission s'est bien déroulée, mais aussi parce que je vais enfin pouvoir bouger. L'oisiveté et l'immobilité étaient en train de détruire, pour un peu, je me serai cru de retour dans le bunker-laboratoire, enfermé dans quelques pièces exiguës. J'attends au dehors que double V s'habille et s'équipe. A-t-elle ressenti mon ennui ? Je lui suis en tout cas très reconnaissant de me prendre avec elle pour régler ses affaires. Je n'aurais pu rêver meilleure occasion de la côtoyer de façon naturelle, là où nos conversations finissaient par être lourdes et pleines de gêne. Puis elle me rejoint, je la vois s'approcher. Ses mouvements sont toujours aussi gracieux et assurés que dans mes souvenirs, malgré ses blessures pas tout-à-fait disparues.

-Alors, où allons-nous ? je demande, enthousiaste.

Je lui demande, oui, plutôt que de lire directement dans ses pensées. Cela évite les confusions, et entendre sa voix est assez agréable, en réalité. Dans sa tenue, seul un élément nouveau est apparu, un animal blanc, une sorte de belette. Je sais qu'il s'agit d'une hermine. Je n'en avais jamais vu en vrai avant, encore moins des dressées, et je trouve amusant qu'une telle espèce se retrouve ici, à Nexus. Les bêtes sont facile à influencer, par télépathie. Prévoir leur réaction est plus difficile, et je les trouve un peu aléatoires. Je juge le risque qu'elle représente tout de même assez faible. Par contre, je constate que c'est quand même un signe particulier vraiment frappant. Combien de personnes se baladent avec un mustélidé sur leur épaule ?

-Tu n'as jamais peur qu'on te reconnaisse, dans la rue ? Si la garde était plus organisée, ça serait un enfer. Je m'inquiète déjà.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le vendredi 01 mars 2013, 02:16:57
" Si elle était mieux organisée, oui. Seulement, ce n'est pas le cas. La plupart des gardes sont des paysans qui en avaient marre de travailler dans les champs, mais ils n'ont pas plus de motivation maintenant. Il y a bien des jeunots qui y rentrent par idéal et font preuve de zèle, mais eux aussi déchantent vite. Et j'ai également un allié qui s'assure qu'on ne s'interesse pas trop à moi... "

Je lui raconte tout ça pendant que nous nous éloignons du camp. Quelques enfants, dont Nila, nous font des signes d'au-revoir, signes que je leur rends. Puis nous arrivons devant l'entrée de la galerie que nous avons empruntée pour arriver il y a 5 jours.

" De tout façon, avant toi, personne n'avait jamais réussi à m'attraper. Quant à Lya, mon hermine, quasiment personne ne sait qu'elle est avec moi.
Bon, on va devoir repasser par là. Ça va un peu rallonger le voyage, mais je n'aime pas traverser les bas-fonds. C'est la zone la plus dangereuse de tout Nexus, peu importe qui on est. "


Je m'engouffre dans le conduit, Archie sur mes talons. Après quelques mètres, je sors mon cristal lumineux. Relativements communs, quoique peu employés en raison de leur particularités, ces cristaux sont chargés d'énergie magique. Le contact entre le minéral et le flux leur confère cette propriété des plus appréciables.

Nous continuons notre cheminement dans les galeries, devancés par Lya. Mon amie l'hermine joue le rôle d'eclaireur, une chose que j'avais oublié la dernière fois. Cela dit, entre son absence et l'urgence de la situation, j'ai des excuses.
Mais il reste vrai que je ne suis pas la seule à emprunter ces galeries, et les rencontres pouvant être faites sont rarement plaisantes... Les sens aiguisés de Lya l'avertiraient si quelque-chose était dans les parages, et elle me le ferait comprendre aussitôt.

Après une bonne demi-heure de marche, un rai de lumière se fait voir. Je range mon cristal, et m'approche du soupirail. Comme d'ordinaire, le manque d'entretien et la rouille le rendent fragile, et je n'ai aucun mal à le déloger. Je me hisse dans la ruelle, puis aide Archie à faire de même. Nous rejoignons le flot de passants dans la rue principale, et j'en profite pour rompre le silence que j'avais instauré dans les galeries, pour éviter d'attirer l'attention.

" Bien, au programme du jour : je dois passer récupérer quelques objets à revendre, et prendre des renseignements sur la situation dans l'est des bas-fonds. Puis, il me faudra récupérer de la nourriture pour les enfants. Lena m'a imposé d'être de retour au camp avant demain soir. Ça te va ? "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le vendredi 01 mars 2013, 03:51:17
Les galeries, un lieu qui ne met personne vraiment à l'aise, pas même Vincente, qui se méfie des éventuelles mauvaises rencontres que nous pourrions y faire. Je ne sais pas comment elle fait pour se fier aux sens de son hermine, pour ma part, je me contente d'être particulièrement vigilant sur un plan télépathique. Je devrais moi-même être capable de détecter des individus qui s'approcheraient de nous. Heureusement, à part la trace diffuse de quelques rats errants, et un animal plus gros, sans doute un chat sauvage, je ne capte l'esprit d'aucun être vivant. L'obscurité, dissipée uniquement par la lumière du cristal ocre, rend l'ambiance à la fois inquiétante et intimiste. Je me demande, amusé, comment elle réagirait si je lui prenais la main. J'y renonce : elle doit être suffisamment stressée comme ça, retrouver son chemin dans ces tunnels n'est pas chose aisée. Puis nous sortons par une sortie identique à la dernière fois. Elle m'adresse de nouveau la parole.

-Alors ce n'est pas la légendaire double V qui fait la loi chez-elle ? je réplique, malicieux.

J'avais déjà remarqué depuis un temps l'autorité qu'exerçait l'autre fille, Lena, sur l'ensemble de la bande. Quand Vincente sort, ce qui doit arriver assez souvent, ce doit être elle qui s'occupe de gérer tout ce monde. Si même les voleurs se mettent à respecter un emploi du temps, maintenant... Cependant, jusqu'à demain soir, même en comptant le trajet du retour, ça fait déjà pas mal de temps à passer. À passer ensemble. Enfin, c'est probablement que la liste des choses à faire est plus longue qu'elle en a l'air.

Nous marchons. Si ne nous sommes pas dans les bas-fonds, les quartiers que nous traversons ne sont pas très riches pour autant. Nous passons dans une large rue, qui doit servir certains jours de place pour un marché secondaire. Les choses à y voler ne doivent pas manquer. Je suis toujours pas très rassuré, ses explications ne m'ont pas tout-à-fait convaincu : les gardes sont peut-être des pleutres pour leur grande majorité, mais, j'en suis la preuve, certains chasseurs de primes peuvent être particulièrement coriaces. Surtout que les 3000 pièces d'or de la récompense peuvent en faire lever plus d'un. Je dois me faire une raison, Vincente aime vivre dangereusement. J'espère simplement qu'avec moi, cela devient, justement, un peu moins dangereux. Je m’attelle à sonder les esprits des moindres passants, m'attendant à tout moment à ce que derrière une apparence anodine se cache un redoutable tueur à la solde de la garde. Je n'en détecte pas un seul. Je suis peut-être paranoïaque.

Soudain, ma partenaire tourne, s'engouffrant dans une ruelle périphérique. De là, elle dégage au sol, recouvert par un tonneau, ce qui ressemble à une plaque d’égout scellée. Adroitement, elle fait tourner entre ses doigts certaines vis, et le pavé de fer coulisse sur le côté. Elle se saisit, sans que j'ai vraiment le temps de les apercevoir, de quelques bijoux. Je fais le guet, pas très sûr de moi.

-Alors ça y est, je suis officiellement complice de recel... je murmure, sans en paraître très affecté. Je crois que ma conscience va supporte ça. Je souris.

Je n'arrive toujours pas vraiment à me dire que Nexus est mon monde, et ainsi, ses lois me passent un peu au dessus de la tête. Sur Terre, faire une telle chose m'aurait probablement révolté, sur Terra, cela me trouble à peine. Vincente remet la plaque et le tonneau en place, et nous repartons. À mesure que nous marchons, la qualité des rues et des façades m'indique que nous nous rapprochons des quartiers plus aisés. J’aperçois, sur le côté, une échoppe où un homme se fait tatouer sur le bras un symbole que je ne connais pas.

-Tu as déjà pensé au tatouage ? De là où je viens, les, hm, bandits, ont souvent un signe distinctif de ce genre.

Je ne me souviens pas avoir vu quelque-chose de semblable sur son corps, que j'ai eu -il faudrait sans doute que j'arrête d'y penser- largement l'occasion d'observer, mais j'ai peut-être raté un élément déterminant.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le vendredi 01 mars 2013, 18:08:07
Je sens Archie tendu. Il se montre hyper-attentif à son environnement, craignant un danger chaque fois qu'un passant nous croise. Bon, c'est vrai qu'il n'a pas tord d'être ainsi sur ses gardes, mais à être trop méfiant, on finit par attirer la méfiance. Il faudra que je lui en touche deux mots...
Je l'emmène à ma cache, une trappe dissimulée dans laquelle quelques bijoux, fruits de mes larcins récents, et dont j'espère bien tirer quelques pièces. J'entends Archie faire un commentaire sur le fit qu'il se rendait complice d'un délit, ce qui me fait sourire.

T'en fait pas, c'est comme tout. La première expérience est marquante, après c'est juste une question de temps pour que ça devienne une habitude.

Puis nous nous remettons en route. Ma destination est les hauts quartiers de Nexus, là où est installé Asul, mon receleur. En chemin, Archie me désigne une boutique de tatouages, me demandant si j'avais déjà envisagé la chose. Là d'où il vient, c'est chose courante, en tout cas.

Ici aussi. Mais c'est avant tout un symbole d'appartenance à un clan, à une guilde... En tout cas, pas de ça pour moi, tant que ça impliquera de rester immobile pendant plus de deux heures : trop risqué.

Je continue mon chemin, bifurquant dans une série de ruelles, jusqu'à déboucher dans une impasse. Nous y sommes, Asul est juste là. En fait, pour les non-initiés, comme c'est le cas d'Archie, il n'y a rien, juste un escalier et une porte. Mais telle est la volonté d'Asul.

Officiellement, Asul n'a pas d'existence. Pourtant, il est surement une des personnes les plus célèbres de la cité. Dans la Nexus des ombres, du noble le plus haut placé au brigand le plus miteux, tous connaissent Asul. Dans une ville agitée par les complots et les guerres de territoire, Asul s'est imposé comme zone neutre. Un pari impossible, qu'il a pourtant réussi. N'étant d'aucun camp, il agit comme intermédiaire, informateur, receleur, et bien d'autres rôles encore. Mieux encore, il assure ces services avec une qualité experte, ce qui le rend terriblement influent. En temps normal, une telle personne aurait été intégrée de force à un camp ou un autre, quand elle n'est pas tout simplement tuée. Pourtant, Asul a très peu d'ennemis, ou en tout cas, très peu en état de lui nuire.

Sans hésiter, j'entre dans la battisse. Asul est juste là, assit à un bureau, et semblant lire quelque ouvrage. Le vieil homme semble avoir l'age de la ville, ce qui est peut-être vrai. Personne ne se souvient d'une époque où Asul n'était pas présent, pas même l'ancien le plus vénérable. Une véritable chape de mystères entoure Asul. Qui est-il, d'où vient-il, comment obtient-il tout ces renseignements, et comment se débarrasse-t-il de ses ennemis, … Tant de questions qui seront à jamais sans réponse.Vêtu d'une robe bleue nuit décorée de symboles argentés, son visage indéchiffrable n'offre aucun élément marquant, que se soit sa bouche, son nez, ses yeux verts ou ses cheveux touffus, absents sur le sommet de son crane. Pourtant, et en dépit de son apparence anodine, personne n'ose s'en prendre à lui.

Pour une raison connue de lui seul, il m'a prit sous sa protection lors de mes débuts. J'ai pu ainsi évoluer librement, sans avoir trop à craindre des foudres des guildes de voleurs ou des coteries de nobles. Aujourd'hui encore, il s'arrange pour limiter les avis de recherche à mon nom, et désigner des cibles plus prioritaires que ma personne. La rumeur, persistante, veut que cette protection soit due à des faveurs sexuelles, volontaires ou forcées. Lui prétend que je suis la fille qu'il aurait toujours voulu avoir. La vérité restera sans doute un éternel mystère, comme le reste...

Comme je m'avance, il lève les yeux de son livre, et se livre à une courte gymnastique oculaire. Sans parler, je lui réponds par un exercice similaire. Il prend alors une clochette qu'il fait sonner. Une des bibliothèques pivote alors, révélant Ludivia, la jeune terranide-chat chargée de l'accueil des visiteurs, et de les faire patienter le temps qu'Asul les rejoigne. Pourtant, lorsque je franchis le pas de cette porte dérobée avec Archie, Asul se lève et s'engage à notre suite.

Nos débouchons dans un salon à la décoration feutrée et sobre, mais meublé de façon à être agréable. Quelques fauteuils, un divan, une table basse, et un grand buffet plus loin, forment le mobilier de la pièce. Sans cérémonie, je prends place dans un fauteuil pendant qu'Asul fait de même.

Et bien et bien, ma fille, je ne pensais pas voir un jour avec un compagnon !

Je me fige. C'est vrai que j'ai entrainé Archie dans mon quotidien de voleuse sans lui demander son avis. J'étais tellement bien en sa présence, et elle me semblait tellement naturelle, que je n'ai pas réfléchis une seule seconde. Il a surement mieux à faire, où en tout cas, peut-être ne veut-il pas être mêlé à tout ça. Je lui jette un regard confus, essayant de connaître ses intentions.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le dimanche 03 mars 2013, 00:45:59
-Reste à savoir si c'est une bonne habitude, alors !

Je ne suis pas sûr que ce soit le cas, mais je refuse d'y voir autre chose qu'un jeu. Je me demande si, si elle avait exercé le métier d'assassin, je l'aurais suivi aussi aisément. À ce que j'ai pu lire sur les avis, elle n'est pas recherché pour meurtre, alors ça ne doit pas trop être dans ses habitudes... à moi qu'elle le cache bien. Accompagner une voleuse, je crois que j'aurais pu tomber sur bien pire, plus violent, plus immoral. Peut-être, si nous coopérons un peu plus longtemps, je pourrais essayer de la diriger vers autre chose. Elle ne manque pas de talent, d'intelligence, d'adresse. Il doit y avoir des activités moins dangereuses et tout aussi lucratives auxquelles elle conviendrait tout autant. Rien d'évident ne me passe par la tête. Tant pis, je continuerai de garder un œil ouvert.

Les chemins que nous prenons me sont pour l'instant inconnus. Pour l'instant seulement, car à mesure que nous avançons, ma mémoire retient tout ce que mes yeux voient, enregistre l'emplacement des bâtiments, la nature des boutiques, le visage des habitants. Enfin, c'est un cul-de-sac auquel nous aboutissons. Je comprends, malgré l'apparente insipidité du lieu, que nous sommes arrivés. Je lance ma télépathie sonder les éventuels esprits présents. J'en détecte un seul, celui d'une femme ; les pensées qui la traversent sont un peu différentes de ce que j'ai l'habitude de lire, pas dans leur contenu, mais plus dans leur couleur. J'en conclus qu'elle n'est probablement pas tout-à-fait humaine. Rien d'agressif ne semble nous attendre derrière cette mystérieuse porte.

-Asul est une femme ?

Je suis un peu perplexe, persuadé de l'avoir entendu penser à son receleur au masculin. Cela prouve bien que je ne suis pas à l'abri d'une erreur d'interprétation, surtout lorsqu'il s'agit de lire un esprit aussi vif que le sien. Il semblerait qu'elle est parfois un peu dure à suivre, aussi bien physiquement que mentalement. Je hausse les épaules : c'est un détail.

Un détail par rapport à ce que je découvre en rentrant. En face de nous se dresse un vieil homme, qui dans son apparence n'a rien de surprenant. En revanche, là où devrait se trouver une trace, même infime, de ses raisonnements, il n'y a rien. Pas la moindre pensée diffuse suggérant qu'il se serait assoupi. Je fronce les sourcils, alors que la femme que j'ai, elle, bien détectée, est appelée. Nous nous approchons, ma méfiance est maximale. Je connais quelques personnes, à Seikusu, dont j'ai été incapable de lire l'esprit, car ils me rejetaient avec violence ; je les évitais soigneusement. D'autres encore parviennent, je ne sais comment, à me faire oublier après coup ce que j'y ai trouvé, du moins je le déduis car ce sont les seules parties de ma mémoire qui sont floues. Lui, il est simplement absent du plan psychique. Je fronce les sourcils, puis je me reprends. Vincente a l'air calme, elle le connaît à l'évidence bien. Elle ne peut pas se rendre compte de son étrangeté. Il pose une question qui la gêne, mais c'est sur un tout autre point.

-Je profite juste de l'honneur qu'elle me fait en me tolérant à ses côtés, je ne lui suis pas très utile...

J'ai pris l'initiative de lui répondre, d'un ton poli et effacé. Je m'efforce de paraître le plus inoffensif possible, et surtout de cacher ma paranoïa qui va croissante à mesure que les scénarios se montent dans ma tête. Je choisi d'en faire part à Vincente : autant qu'elle soit au courant. Je concentre ma télépathie, puis je formule mentalement quelques phrases distinctes. J'ai rarement recours à ce procédé, parce qu'il est plus difficile et plus effrayant qu'une simple parole, néanmoins, mes mots doivent clairement résonner à son esprit :

Fais attention, je n'arrive pas à lire ses pensées. Il n'a pas l'air dangereux comme ça, mais je ne peux pas anticiper ses actions. Je vois deux explications possibles, soit c'est un télépathe d'une puissance incroyable, soit c'est une machine.

Une troisième possibilité me vient en tête. Ce pourrait aussi être un cadavre. Je préfère l'écarter pour le moment.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 04 mars 2013, 02:55:41
Je sens la peur en moi. J'ignore de quoi, j'ignore pourquoi, mais je sens cette peur. Peur de ce qu'Archie pourrait dire. Quelles paroles pourraient pourtant me faire peur ? C'est insensé. Et pourtant, c'est ce qui est en train de se passer.
Finalement, Archie sort une phrase relativement anodine. Je me rends compte alors que j'ai retenu ma respiration jusque-là. Pourtant, mes craintes ne diminuent pas. Au fond, je n'ai pas de réponse à mes questions. Je sens qu'Archie n'a pas tout dit, qu'il a encore des choses à cacher. Et c'est la nature de ces choses qui m'inquiète. Quand j'y pense, j'ai le sentiment de ne pas vouloir savoir ce que c'est, de les laisser là et de les oublier.

Je suis tellement obnubilée par ça que je manque de rater la voix d'Archie. Pourtant, celui-ci ne parle pas ! Il me faut un temps avant de comprendre qu'il utilise ses pouvoirs pour me parler directement dans ma tête. Le sujet de son inquiétude, à l'opposé du mien, manque de me faire pouffer de rire. Visiblement, la nature d'Asul l'angoisse. J'essaye de formuler ma pensée en phrases.

* Je ne sais pas qui est Asul, mais j'ai confiance en lui. Et j'ajouterai qu'il y a des secrets qu'il vaut mieux laisser dormir... *
- Alors, en quoi ce vieil homme peut t'être utile, Vincente ?

Focalisée sur Archie, j'en avais oublié le motif de ma venue. Je sors de mon sac les bijoux récupérés tantôt, et les pose sur la table. Asul en ramasse un, l'examine attentivement, puis fait un signe à Ludivia. Sans un mot, la terranide récupère la marchandise, et part dans la pièce à coté, pour estimer la revente, et la part qui me reviendra.

J'en profite pour interroger Asul au sujet des évènements dans l'est des bas-fonds. Évidemment, le vieil homme est au courant. Il semblerait que le trafic d'enfants soit revenu à la mode... Mais pourrait connaître un déclin rapide, un ami d'Asul ayant perdu la vie dans les affrontements. Je suis rassurée : si Asul s'en occupe, aucune chance de voir ces actes se reproduire, et pour longtemps.

Finalement, après avoir discuté de tout et rien avec le vieil homme, Ludivia revient avec une bourse bien garnie qu'elle me remet, toujours silencieusement. Puis nous quittons la demeure. Sur les marches, je fais le point. Plus exactement, il y a maintenant un point que je voudrais éclaircir. Et la personne qui pourra me fournir les réponses est toute proche...

Résolument, je m'enfonce dans les hauts quartiers. J'y ai récemment installé une planque, ça fera l'affaire pour ce qui va suivre. Mon objectif est une bâtisse reconvertie en réserve. Si la plupart de l'espace est occupée, il y a  un espace sous les combles qui lui est laissé à l'abandon, car inexploitable. Mais que j'ai pu investir, en ménageant un accès via le toit.

J'arrive en vue du bâtiment en question. La tension monte en moi, mais c'est une étape essentielle. Je fais signe à Archie d'attendre un peu, et pars en éclaireur. Comme escompté, le coin est désert. J'escalade l'arbre le plus proche, dont les branches donnent un accès direct au toit. Archie me rejoint pendant que je déverrouille la trappe d'accès. Puis nous nous glissons tout les deux à l'intérieur. Dans le petit espace, il n'y a rien de particulier à voir. Juste un minimum de matériel, et un coin couchette. Mais pour moi, le sujet est ailleurs. Je prends la parole d'une voix tremblante, le dos tourné.

" Archie... Tu n'as pas été franc tout à l'heure... Pourquoi tu me suis ? "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le lundi 04 mars 2013, 14:15:32
À défaut de pouvoir anticiper les actions du vieillard, je ne rate aucun de ses mouvements. Je connais plus d'une centaine de signes corporels annonciateurs d'agressivité : j'ai toujours pensé jusqu'ici qu'ils ne me serviraient jamais à rien, comme quoi j'avais tord. Cependant, je dois bien avouer que son visage n'offre pas beaucoup plus de prise que son esprit, je peine à distinguer la moindre expression involontaire. Cet Asul m'inquiète de plus en plus, je n'ai pas l'habitude d'être face à un interlocuteur dont je ne peux rien déduire sur les intentions. Si Vincente n'avait pas eu une telle confiance en cet homme, j'aurais probablement déjà pris mes jambes à mon cou, ou plus probablement je me serai éloigné très prudemment. Bon, elle semble trouver mon angoisse assez ridicule, alors j'évite de trop l'alerter. Si sa relation avec lui marche depuis aussi longtemps, je ne devrais pas la troubler, qui qu'il soit. Je surmonte mon stress en tentant de n'entendre ses paroles par l'intermédiaire des pensées de double V, un exercice difficile mais qui réduit un peu la menace qu'il représente pour mon inconscient.

Lorsque nous ressortons, après qu'elle ait revendu ses bijoux volés, et qu'elle ait pris la température de la ville, je suis quand même très soulagé. Asul n'est pas seulement mystérieux, il est aussi visiblement très puissant, et très informé. La manière dont il parle de s'occuper du trafic d'enfants m'effraie un peu, même si je sais que la cause est probablement juste. Quand j'aurais un peu de temps, je crois que j'essayerai d'enquêter un peu sur ce personnage qui semble presque omniscient. Ma paranoïa doit y être pour beaucoup, mais pendant un moment, j'ai même eu l'impression diffuse qu'il fouillait lui-même mes pensées... à moins que ce ne soit que les quelques coups d’œil qu'il me jetait de temps en temps... Je m'excuse pour mon attitude, alors que nous nous éloignons du repaire du receleur.

-Désolé, ne pas savoir ce que mon interlocuteur pense me met mal-à-l'aise. C'est stupide, la plupart des gens sont toujours dans cette situation quand ils s'adressent à quelqu'un... on s'habitue un peu vite à lire les esprits, je crois.

Puis, sans me donner de nouvel objectif clair, Vincente me mène dans une nouvelle direction. Nous allons vers des quartiers qui ont l'air mieux fréquentés, je ne devrais pas être trop inquiet. Pourtant, sa détermination, et quelques unes de ses pensées que je capte me font pressentir ce à quoi elle aspire. Je me mords la lèvre inférieure, et prépare ma défense : nous continuons à monter dans la ville. Elle m'indique un chemin d'accès qui passe par un peu d’escalade. Sans surprise, je suis obligé d'user d'un peu de télékinésie pour ne pas trop souffrir de l'escalade, ou plutôt parce qu'il s'agit d'une autre de mes mauvaises habitudes. Relativement à mon poids, mes muscles, même avec le retard de développement qu'ils acquiescent, ne sont pas si faibles que ça. Je rejoins immédiatement son avis, l'endroit est exigu, et il n'y a rien à voir, si ce n'est qu'elle possède vraiment des caches partout dans Nexus.

Elle me pose une question, ce à quoi je m'étais attendu. Je ne l'avais néanmoins pas envisagée sous cet angle, et cela m'oblige à revoir un peu ce que j'avais préparé.

-Pourquoi je te suis ? Yebat', tu m'avais dis avoir une dette envers moi, non ? Alors j'attends juste une occasion pour que tu la paie.

Évidemment, mon ton n'a rien de sérieux, mais je la sens si tendue, ne serait-ce que dans l'intonation tremblotante de sa voix, que j'essaie de la détendre en faisant un peu d'humour, alors que moi même je suis loin d'être à l'aise. Seule ma préparation me permet de faire encore un peu de style.

-Sérieusement : je n'ai pas été très loin de la réalité dans ce que j'ai dit à Asul tout à l'heure. Je ne te sers à rien, et je considère qu'arpenter la ville avec double V est un honneur qui ferait envie à bon nombre de personnes.

L'interrogation est simple, et je pourrais la faire tourner assez longtemps en rond sans mentir une seule seconde. Toutefois je vois bien ce que la question implique et où elle veut en venir, et je n'ai pas l'intention de la tourmenter.

-Mais si tu cherches une raison plus profonde, ben... rétrospectivement, je ne suis pas tombé amoureux de toi dès la première seconde, désolé...

Je marque une petite pause, à la fois pour ménager un effet, mais surtout parce que je sens l'émotion me monter à la gorge, la serrant dans un étaux invisible. Je commence à avoir un peu de mal à articuler, à détacher les mots les uns des autres. Je risque de bégayer. Je voudrais aller très vite, pourtant. J'inspire, j'ignore mon cœur qui refuse de se calmer. Je peux bien lui laisser ça, lui qui est d'habitude si régulier et paisible.

-...Cela m'a pris quelques minutes, en fait. Je ne me le pardonne pas, mais il fallait avouer que te poursuivre m'occupait une bonne partie de l'esprit...

Heureusement qu'elle me tourne le dos, finalement, car même ainsi, je ne sais pas où regarder. Il y a un ravin entre connaître dix mille manières de faire une déclaration, et la faire. J'ordonne à mes jambes un peu faibles de rester bien droites, je suis suffisamment petit pour ne pas avoir besoin de m'affaisser plus.

-Je sais, désolé, je te l'avais déjà plus ou moins dis, mais comme on était en train de survoler Nexus sous une pluie de carreaux, je me suis dis que tu avais peut-être mieux à penser à ce moment là.

Je prends mon courage à deux mains, et je fais un pas en sa direction. Pas besoin de plus, dans cette situation, pour être pratiquement collée à elle. Je ne n'avais pas été aussi proche d'elle, en fait, depuis le moment où j'ai renoncé à la capturer. Je tente de poser une main timide sur son épaule, puis une seconde, lui laissant tout loisir de me repousser, ou de s'éloigner. Sa propre incertitude rend tout si difficile... Ma voix devient moins forte, comme si j'avais honte de ce que j'allais dire.

-Mais je comprendrais très bien que ça ne soit pas réciproque, ou que tu préfères ne pas te prendre la tête avec ça. Je ne suis pas grand-chose, alors que tu es Vincente Valentyne. J'hésite, puis je parviens à rajouter, avec une certaine difficulté, les mots se bousculant dans ma bouche : et tellement plus, aussi...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 04 mars 2013, 22:52:49
Amoureux...

Ce mot résonne dans ma tête. C'est... Je ne sais pas. Je n'arrive pas à savoir. Moi qui me vante de ma vivacité d'esprit, je n'arrive pas à aller au bout d'une seule pensée. Je suis perturbée, déboussolée. C'est un sentiment nouveau pour moi, et qui me dépasse complètement.

Je sens Archie s'approcher, et poser ses mains sur mes épaules. Instinctivement, je veux le repousser, mais je n'en fais rien. À la place, mon bras vient serrer ma poitrine. Je ne sais plus où j'en suis, je suis perdue, complètement. Ses mains sur mes épaules, je voudrais les fuir et les prendre en même temps. Incapable de faire quoi que ce soit, je reste là, immobile.

Mon cœur bat à tout rompre dans ma poitrine, et j'ai du mal à respirer. C'est la première fois que je sens ça. Une douleur irradie dans mon corps, ça me fait mal. Je ne comprends pas cette souffrance physique. Mais ça ne me permet pas de l'ignorer.
Sang et larmes montent. Ma tête tourne, alors que ma vue se brouille. J'ai l'impression de perdre le contrôle de la situation, de mon corps, de mon esprit...

Mais pourquoi ? Pourquoi Archie est-il amoureux de moi ? Je ne suis rien d'autre qu'une fille misérable, une voleuse. Tout ce que je sais faire, c'est ça, voler. Je n'ai rien d'autre, pas le moindre charme. Des belles filles, il y en a plein les rues de ce quartier, et toutes seraient ravies d'être l'élue d'une personne aussi puissante qu'Archie. Alors pourquoi ? Pourquoi ?

" Pourquoi ? "

Ma voix est chevrotante, chargée d'émotion. Je fais volte-face et saisis Archie par le col. Je suis un peu plus grande que lui, j'avais oublié. De fait, je le domine légèrement. Je plonge mon regard dans le sien. Ses yeux bleu tranchant me fixent. C'est fou, en dépit de leur froideur, ils semblent si intensément vivants... Ma voix se brise sur mes dernières paroles.

" Pourquoi ? Pourquoi es-tu amoureux de moi, Archie ? Qu'est-ce que Vincente, une fille pitoyable, à l'existence insignifiante, a de spécial ? Au point de risquer sa vie pour la sienne ? Au point de rester 5 jours dans un taudis crasseux à attendre ? Au point de la suivre dans sa vie de voleuse ? Répond-moi, Archie ! "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 05 mars 2013, 00:54:09
Après avoir posé sa question, elle se retourne, assez vite. Un instant, je crois qu'elle va me frapper : je suis suffisamment concentré pour ne pas esquisser le moindre geste de défense. Elle m'agrippe. D'un point de vue extérieur, le geste aurait pu paraître assez violent, mais la violence ne traverse pas son esprit, et son geste n'en contient pas plus, quand bien même il ne me met pas en très bonne posture. Ses yeux verts me fixent, essaient de saisir les miens. Je dois faire un gros effort pour soutenir son regard absinthe, alors que mon instinct me pousse seulement à baisser le mien, et à filer sans demander mon reste. Pus grande, plus forte que moi, en me tenant ainsi, elle m'agresse presque... et ça ne me dérange pas le moins du monde. J'affiche néanmoins un air mi-abattu, mi-amusé. Ce qu'elle me demande, je le sais, je n'y trouverai pas de réponse satisfaisante. Je soupire, et lance d'une petite voix.

-Je dois vraiment répondre à ça... ? Yebat', dans les histoires, quand le prince dit à la princesse qu'il l'aime, elle ne cherche pas à comprendre : ils s'embrassent et c'est terminé... Je ne dois pas ressembler assez à un prince, c'est pour ça.

Pourquoi je l'aime ? Un texte de Pascal, un philosophe français, me revient. Il prétendait que l'on ne pouvait aimer une personne qu'à travers ses qualités, son physique, son intelligence, son talent, des traits de son caractère... et pas pour une éventuelle chose immatérielle, une quelconque âme, qu'il était de toute façon impossible d’appréhender. Pascal est sans doute mon auteur préféré, et malgré qu'il n'ait pas disposé d'un centième de mes capacités de calcul, il était un plus grand génie que je ne le serais jamais. Et pourtant, il lui manquait une chose qui aurait peut-être fait changer son appréciation : il était incapable de sonder les esprits comme je le fais, donnant alors corps à cette âme qu'il ne pouvait voir.

-Tu le sais déjà sans doute, je ne connais pas beaucoup de personnes de qui je me sens aussi proche. Mais je ne sais pas trop si c'est le passé qui est important...

Je pourrais lui parler des nombreux éléments qui nous rapprochent. Je pourrais lui parler de son corps, diaboliquement gracieux et sensuel, qui exerce sur moi une attraction charnelle sans précédant. Je pourrais lui parler de son esprit, d'une rare vivacité, que j'ai tant de plaisir à suivre par télépathie. Je pourrais même lui parler des zones de mon cerveau qui sont impliquées dans ce processus d'attachement, je les connais, pour la plupart. Toutefois, ce serait briser toute la magie du phénomène. Je pourrais essayer quelque-chose de poétique, mais j'ai beau avoir en mémoire des milliers de poèmes dans toutes les langues, cela ne fait pas de moi un poète. Alors j'essaie, pour une fois, de mettre des mots sur des choses presque impossibles à mettre en mots. Tant pis, si ce sont des banalités.

-C'est vrai, il y a plein de filles dans les rues... je ne les connais pas, et je n'ai pas plus envie que ça de les connaître. C'est peut-être de la bêtise, de l'obstination, mais pourquoi j'irai à leur rencontre ? J'ai déjà trouvé la personne... enfin...

Une faille dans mon discours, une rupture au milieu d'une phrase. Ça ne m'arrive pas souvent. Je reprends une inspiration, je ne dois pas céder à la panique. Les battements de mon cœur vont jusqu'à frapper mes tempes, la sueur commence à perler de mon front.

-Je n'ai jamais été aussi bien en compagnie de quelqu'un jusqu'ici. Il n'y a personne d'autre avec qui je veux plus être que Vincente Valentyne. Que toi. Je n'ai pas de meilleure explication, désolé...

Ses yeux sont humides. Elle tremble. Je n'ai pas besoin d'une quelconque faculté de lecture mentale pour voir qu'elle est sur le point de basculer d'un côté ou de l'autre. Ce n'est pas facile d'être celui qui doit rester à peu près maître de lui-même, pour soutenir l'autre. Moi aussi, j'ai envie de m’effondrer, de céder à l'émotion. Mais il faut que j'y résiste, encore au moins quelques secondes.

-Tu sais, ce n'est pas quelque-chose de très triste... je suis même sûr que ça peut être assez agréable, peut-être avec un peu de recul...

J'hésite à attraper ses mains pour les serrer dans les miennes. Je crois que j'en ai déjà suffisamment fait en ce sens, je ne veux pas avoir l'impression de la forcer. Si elle veut aller plus loin, elle devra elle-même faire la route. Un vieux titre de Billy Paul, The Times Of Our Lives passe dans ma tête, je ne sais pourquoi : comme s'il sortait d'un Jukebox, le moindre accord de clavier résonne à mes oreilles.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 06 mars 2013, 00:44:06
Il biaise. Il ne répond pas à ma question.

J'ai envie de le frapper pour ça. Mais à l'idée de lui faire mal, mon envie ne prend pas corps. Je ne comprends plus rien. Je me sens déchirée entre plusieurs sentiments, tous différents.
J'aimerais le haïr, mais je n'y arrive pas. Je voudrais fuir, mais je ne peux me résoudre à être loin de lui. J'en deviens folle. Non, je pense plutôt être sur le point de craquer, mais sans comprendre pourquoi.

Puis un mot me revient : amoureux.

Archie s'est confessé. Et moi ? Suis-je amoureuse de lui ? Je ne sais pas. Je n'ai jamais envisager tomber un jour amoureuse. Plus exactement, c'est un privilège que j'ai banni de ma vie. Un luxe que je ne peux pas me permettre. Pour survivre, j'ai du faire une croix dessus. Dans un monde de misère et régit par la mort, l'attachement ne mène qu'à la douleur. Pour tailler mon chemin, j'ai fermé mon cœur, je l'ai barricadé.
Du moins, je croyais...

Je repousse Archie. J'ai besoin de crier, de hurler, de pleurer. Je serre les dents, tout en sachant que cette boule dans ma gorge sera la plus forte. Je tombe à genoux au milieu de la pièce. Mon poing vient heurter le mur quand les premières larmes tombent de mes yeux. Je voudrais parler, mais je n'arrive pas à produire de sons intelligibles.

Ce conflit interne me ravage. Je suis déchirée entre deux parties de mon être. L'une aime Archie, l'autre n'est pas conçue pour aimer. L'impossibilité de concilier les deux me fait souffrir atrocement. Mes sanglots sortent avec difficulté, incapable d'exprimer franchement ma douleur. Je voudrais que ça cesse, mais je ne sais pas comment...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mercredi 06 mars 2013, 02:33:56
Je crois qu'en réalité, je préfère quand elle me pose des questions, même difficiles, même insolubles. J'ai beau ne pas être très doué pour répondre lorsqu'il s'agit de choses abstraites, ou de mes propres sentiments, je peux quand même me reposer un peu sur des raisonnements. Ce que je lui ai répondu ne l'a pas touchée autant que j'avais espéré, à moins que ce ne soit le contraire. Je voulais éclaircir un peu son esprit, mais je n'ai réussi qu'à le rendre plus confus et plus chancelant encore. Je suis à la fois déçu, et furieux contre moi-même. J'aurais peut-être du être plus explicite, ou plus technique. Il n'y aurait pas eu de magie, de poésie, beaucoup moins d'émotion, néanmoins, elle aurait probablement vue la situation sous un angle plus rationnel.

Elle hésite à me frapper, me repousse. Sitôt à ma place, je ne cherche pas à avancer de nouveau. Je cherche à maintenir une distance de sécurité, non pour moi, mais pour elle, pour ne pas la troubler encore plus : comme l'espace qui sépare un électron d'un noyau atomique, soumis à plusieurs forces, suit une complexe équation, je cherche une position d'équilibre. Je secoue la tête. Une goutte de sueur coule sur mon front.

-Je suis vraiment désolé, Vincente. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça.

Mon visage est neutre, mes lèvres sont serrées, mes yeux rougis. Je la regarde, elle est à genoux. Ses pensées deviennent de plus en plus lapidaires, courtes, fortes. Son poing s'écrase contre la cloison. Lorsque j'ai préparé cet entretient, j'ai prévu beaucoup de choses, le refus net et froid, l'incertitude qui m'aurait laisser prendre des initiatives... il y avait aussi cette possibilité que nous nous tombions dans les bras. Comment ma simple présence peut-elle causer chez-elle un tel traumatisme ? Elle semble en lutte avec elle-même, je suis conscient d'avoir provoqué ce duel à mort, alors que j'aurais pu l'éviter. J'ai l'impression d'avoir gâché quelque-chose. J'ai été trop rapide, trop prétentieux. Le bilan de ma pitoyable opération se résume à un seul mot qui me glace : l'échec.

-J'aurais vraiment voulu que ça se passe bien...

Je ne suis plus en mesure de l'aider, mon expérience personne ne me sert plus à rien : je ne me suis jamais interdit d'aimer quelqu'un, cela n'arrivait juste pas. Le superordinateur qui me sert de cerveau se chargeait simplement de mettre une distance entre moi et les autres. C'est la première fois où j'arrive à la réduire, à la franchir, et cela cause tant de douleur à l'autre. Ce n'est peut-être pas la bonne manière de faire, ou ce n'est peut-être tout bonnement pas une chose à faire. Son état, ses interrogations, sont contagieux. La question me revient à l'esprit. Pourquoi est-ce si difficile ? Elle veut que cette situation cesse. Ma bouche se déforme sur le côté, est prise d'un petit spasme, un semi-sanglot. Une larme coule sur ma joue.

-Je te laisse réfléchir, si tu veux, je propose en me retournant, pour ne pas exposer mon propre chagrin. J'ai une chambre aux Trois Corbeaux, dans les quartiers ouest.

Le sentiment de l'abandonner à son sort me déchire, mais je ne vois plus comment faire autrement. En partant, je risque de faire plus de dégâts encore, je n'ai pas beaucoup d'autres choix. Ma présence la bloque, l'embrouille. Elle a peut-être besoin de temps, c'est la seule chose que je peux raisonnablement espérer.

-Tu sais où me trouver. Fais attention à toi, je murmure, en me hissant au dehors.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 06 mars 2013, 20:11:24
J'entends Archie me parler, mais je ne comprends pas ce qu'il me dit. Ou plutôt, je n'y fais pas attention. Tout mon être est centré sur ce conflit interne qui fait rage. Du coin de l'oeil, je vois Archie quitter la pièce. Où va-t-il, je m'en moque. J'ai juste besoin d'être seule.
Je m'affaisse peu à peu, jusqu'à finir prostrée au sol, ma tête dans mes bras. Quelques sanglots sporadiques éclatent. Pourquoi ai-je autant de mal à exprimer ce que je ressens ? Je reste ainsi, pendant un temps infini, incapable de faire passer la douleur...

~~~~~

Combien d'heures se sont écoulées ? Je l'ignore. Peu à peu, la douleur a fini par refluer. Je me lève. Un coup d'oeil à l'extérieur me permet de constater que la nuit est tombée depuis quelque temps. Pourtant, je n'ai pas sommeil. Je sors. Debout sur les toits, je décide de courir. Pourquoi, pour aller où, je n'en sais rien. Juste courir. Juste sentir le vent et le frisson. Pourtant, j'ai beau courir de droite et de gauche, sauter d'un toit à l'autre, et voler au dessus des rues, je ne sens rien. Je m'arrête, et constate que je suis devant l'auberge des Trois Corbeaux, là où est Archie. À cette pensée, une pointe de douleur me traverse, et je décide de faire demi-tour. Mais quelque-chose me retient.

Trois silhouettes encapuchonnées semblent s'escrimer sur une porte de service de l'auberge. Des voleurs ? Ou pire ? Et pour quoi ? À l'instant où j'envisage qu'ils pourraient être là pour Archie, mon corps est parcouru d'une onde glacée. Mais j'écarte cette hypothèse rapidement. C'est impossible, pas vrai ? …
En un saut, je suis au dessus d'eux. Je me penche et écoute ce qu'ils disent.

- Eh, t'es sur qu'il est là ?
Mais ouais, j't'ai d'jà dit que j'l'ai vu entrer ici ce soir !
Bon, magnez-vous, on va pas passer la nuit là !
Tranquille, il va pas s'envoler, avec la drogue que j'lui ai filée.


Bon, je ne suis pas plus avancée... Je sais juste qu'ils en ont après quelqu'un, que ce quelqu'un est drogué, et que la gueule de bois à son réveil sera surement le cadet de ses soucis. Les trois hommes finissent par forcer la serrure, et s'engouffrent dans l'auberge. Je suis tentée de les laisser faire, mais l'idée qu'ils soient après Archie me taraude. Finalement, j'entre à leur suite.

Eux ne perdent pas leur temps. Discrètement, ils montent à l'étage, semblant chercher une chambre précise. À voir l'efficacité et le silence avec lequel ils agissent, ce ne sont pas des simples bandits. Ce qui me rassure, c'est que ce ne sont pas des pros non plus, sans quoi ils m'auraient déjà repérée.
Ils semblent avoir trouvé la pièce qu'ils cherchaient. Ils y entrent sans un bruit. Je m'approche doucement.

- Et beh, y'dord bien, le lascard !
Sur, c'est puissant ce truc tu sais ?
C'est l'bon au moins ? Qu'on ait pas fait tout ça pour que dalle ?
T'es lourd, mais oui ! Blanc comme un cul et les cheveux noirs, c'est lui j'te dis !
Faites gaffe à pas le réveiller, vous savez de quoi il est capable...


Mes doutes prennent de plus en plus d'ampleur. Risquant le tout pour le tout, je regarde dans la chambre. Et sur le lit, je vois le visage d'Archie, plongé dans un profond sommeil.

Je ne sais pas exactement ce qui c'est réellement passé ce moment-là dans ma tête. Mais les conséquences, elle je m'en souviendrai toujours. Ma mai droite plonge à ma ceinture pour dégainer ma dague, pendant que ma main gauche déploie ma lame cachée. Sans attendre, je me rue dans la pièce, frappant deux des hommes au flanc alors qu'ils me tournaient encore le dos. Il s'effondrent en hurlant. Le troisième n'a pas le temps de réagir que mon bras se lance, plantant ma dague dans son ventre, pendant que ma lame le cueille à la gorge. Il meurt dans un gargouillis de sang. Vivement, je me retourne, et achève les deux autres d'une frappe dans l'oeil, atteignant leurs cerveaux et les tuant sur le coup.

Je me redresse, et me tourne vers le lit. Archie est là, il me regarde. Je m'élance vers lui, et le prends dans me bras. Je serre son corps chaud, vivant, contre moi.

" Merci. Merci... "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mercredi 06 mars 2013, 22:44:22
Je m'éloigne. Je la laisse, seule, je m'éloigne. J'ai presque réussi à tenir une parfaite neutralité jusqu'ici, à cacher mes émotions, mais à présent, chaque pas est un supplice, un déchirement. J'avais presque espéré qu'elle me retienne. J'ai été stupide. Elle ne reviendra probablement jamais, je ne sais même pas si elle a entendu ce que je lui ai dis, si elle sait où me retrouver. Sitôt que je suis sûr d'être assez éloigné d'elle pour ne pas l'alerter, mon indifférence disparaît tout-à-fait, mes larmes coulent. Elles dévalent mon visage, chaudes. Je n'ai pas réellement pleuré depuis dix ans, neuf mois, et trois jours. Ce n'est pas aussi bruyant que je l'aurais cru. Mon chagrin est silencieux. Je suis juste décomposé, adossé au mur en pierre blanche d'une bâtisse, à peine écarté de la route. De temps en temps, un sursaut vient agiter ma poitrine.

Je suis un imbécile. Un imbécile et un lâche. Je n'ai rien trouvé de mieux que de l'abandonner, alors qu'elle avait peut-être besoin de moi. Pourquoi je me sens obligé d'utiliser le mot peut-être ? Elle avait besoin de moi, il n'y a pas à nuancer. J'ai juste eu peur d'échouer encore, et cette crainte stupide m'a coûté l'infime espoir qu'il me restait. Je n'ai aucune excuse qui vaille. Je lui ai fais du mal, j'ai mérité tout ce qui m'arrive. Je mériterais même infiniment plus. Je ferme les yeux. Mes paupières sont brûlantes, comme si j'avais de la fièvre. Je sais que je ne suis pas malade au sens strict du terme. Je tombe en position assise, au bord de ce chemin. Je ne me relève pas. Je prends ma tête dans mes bras, et je reste ainsi. À la vue de tous ces passants, je m'en fiche. Je ne les vois plus. Je ne veux plus les voir.

Enfin, au bout d'une heure et vingt-deux minutes, mon chagrin semble se tarir. Rien ne vient le remplacer, aucune colère, aucune sage résolution. L'impression de vide, l'absence de volonté. La cruelle absence de sens dans ma vie me frappe. Vincente protège sa bande, le commerçant fait marcher ses affaires, l'artiste compose son œuvre. Et moi ? Je n'ai pas d'inspiration, pas d'attrait pour l'argent, et personne à aimer. Je ne fais qu'errer, en causant du mal autour de moi. Malgré les grands pouvoirs dont je suis doté, je ne sers à rien, pour personne. Pire, je suis nocif. Siridov, l'agent qui a essayé de me capturer avant d'être repoussé par Sentinel, avait raison. Je ne suis pas humain. Je ne suis qu'un monstre, socialement inadapté et dangereux. S'il avait été face à moi, je lui aurais demandé de me me ramener en laboratoire, je me serais laissé faire. Au moins, j'y aurais peut-être fait avancer la science.

Mais voilà, il n'y a pas de Siridov, il n'y a personne pour faire attention à moi, pour me trouver le moindre intérêt. Je n'intéresse personne, et personne ne m'intéresse. Sans me soucier des regards, qui, cette fois, se posent bel et bien sur moi, je prends mon envol, d'un air las. Presque absent, je file en ligne droite, au dessus des toits, vers l'auberge des Trois Corbeaux. J'y ai loué une chambre. C'est la seule chose à laquelle je peux encore m'attacher, finalement, dans ce monde. Je n'y réfléchi de toute façon plus. Je n'en ai plus l'énergie. J'ai un objectif, aussi désuet soit-il, c'est le plus puissant : me coucher, dormir.

Je me pose juste devant la porte de l'auberge. Je ne compte pas les gens qui ont du me voir. Je m'en fiche. Je pousse la porte, comme un zombi, décomposé. Je m’apprête à monter les escaliers qui me mènent à mon lit, avec la même indifférence morbide. Toutefois, une voix, semblant venir de très loin, m'interpelle. Pourtant, elle vient du tenancier, qui est juste à côté de moi. Mécaniquement, je tourne mon regard vers lui. Il a un sourire triste et compréhensif.

-Laissez-moi deviner... le jeune monsieur est en plein chagrin d'amour ?

Je ne lui réponds pas. Je m'apprête à repartir, sans aucune forme de politesse. C'est un homme intelligent. En temps normal, j'aurais du être intéressé, mais en l'état, je ne le suis pas un instant. J'ai juste envie qu'on me laisse tranquille. Il insiste cependant :

-Bah, mon gars, ce sont des choses qui arrivent ! Une de perdue... Allez, un verre pour faire passer, c'est la maison qui offre.

Je m'arrête. C'est une perspective qui me semble en valoir une autre. Je n'ai jamais bu d'alcool de ma vie. Je trouvais ça trop dangereux, j'ignore quel effet cela peut avoir sur mes implants, et surtout, cela me semblait inutile. Je le laissais avec un certain dédain aux pauvres hères qui n'avaient que ça. Mais en matière de dénuement, je n'ai à présent plus rien à leur envier. Je m'arrête, je m'assois sur un tabouret. Je cède.

Je bois une première gorgée bière, mousseuse. Je manque de la recracher. Le goût est affreux, et je n'y suis pas habitué. Tous les ingrédients de la mixture, tous plus délétères pour la santé les uns que les autres, me reviennent en mémoire. Je termine cependant la choppe. Je suis déçu, pas un seul souvenir n'a quitté mon esprit, tout est encore vif, la douleur, le désespoir. Cela n'ira pas assez vite, avec une concentration si faible, même avec ma carrure. Je pose quelques pièces sur le comptoir.

-Ce que vous avez de plus fort, je demande, d'une voix cassée.

L'aubergiste lève un sourcil, mais ramasse volontiers le pécule et apporte une bouteille d'un liquide jaune, translucide. On pourrait presque le prendre pour de l'eau croupie.

-Une liqueur d'Ashnard : ça fait pas du bien au gosier, mais si c'est ce que vous voulez... fait-il, avant de sortir un verre.

Je lui fais signe de verser directement dans la choppe que je tiens à la main. Je ne veux pas utiliser de récipient plus délicat, je ne veux plus rien risquer de briser. Il hausse les épaules, et s’exécute. Je bois presque cul sec. Je convulse un instant. J'ai l'impression d'avoir avalé une braise. Tout mon corps ayant été traversé par l'alcool, de ma gorge à mon estomac, me brûle affreusement. J'ouvre la bouche, cherchant un peu d'air. Je refoule l'envie de vomir qui me vient. Puis la chaleur devient peu à peu agréable. Le sang revient dans mon visage, mes yeux se rallument. Je donne encore de l'argent. Ce sont mes dernières économies. Je reprends une pleine choppe de l'élixir incolore. Je la bois, aussi soudainement que la première. Les effets sont proches, mais plus intenses, la phase douloureuse est plus courte. Je n'ai qu'une envie, boire encore.

C'est à cet instant que je remarque la présence à côté de moi d'un autre client. Je ne vois pas son visage. Je tente de lire son esprit : c'est difficile, mais ça n'a rien à voir avec lui. J'entraperçois quelques bribes de son métier. Étrange, cela ne fait pas partie de ses pensées immédiates. Peut-être l'alcool débride-t-il certaines de mes capacités. Il est chasseur d'esclaves occasionnel, il s'occupe principalement de remettre sur le marché les terranides qui traînent dans la ville basse, quand il arrive à en attraper. Cela m'indiffère, même si la veille cela m'aurait peut-être scandalisé. Je le trouve même plutôt sympathique. Il s'adresse à moi. Je n'ai plus trop les capacités de saisir chacun de ses mots. Il me propose de me payer un autre verre, puisque j'ai l'air d'aimer ça. Mon corps frêle supportera-t-il une autre dose ? Quelle marge me reste-t-il avant le coma éthylique ? Je me rends compte que je ne suis plus capable de répondre à cette question. Je m’esclaffe, et accepte. Je trempe les lèvres dans le breuvage, je le trouve d'un goût un peu différent, pas désagréable. Mes papilles ne sont de toute façon plus très exigeantes.

Puis je sens l'inconscience arriver. J'ai sans doute un peu trop abusé. Ils n'ont pas les mêmes moyens médicaux, dans ce monde. Je vais sans doute mourir dans mon propre vomi. C'est arrivé à des plus grands que moi. Mourir comme ça, ça n'est pas vraiment mourir. On sent à peine partir. Je ne suis pas en état de combattre les ténèbres qui s'emparent de moi. C'est trop tard.

***

Un cri. J'ai mal à la tête, terriblement mal à la tête, et au ventre. Je n'ai pas envie d'ouvrir les yeux, et pourtant, mon instinct de survie m'y oblige. Car c'est un cri d'agonie que j'ai entendu. Un voile blanc apparaît devant moi, je distingue quelques couleurs. J’aperçois Vincente. Elle est tellement belle, pure, au milieu de tous ces cadavres. Une ange immaculée au milieu d'une marre de sang. Une image biblique. J'ai un grand sourire béas, je me dresse en position assise. Moi qui ne suis pas très croyant, je dois me faire une raison : le paradis existe peut-être, et si c'est le cas, j'y suis sûrement. Je n'ai plus trop la notion du temps, du mouvement. Je sens ses bras m'enserrer. C'est agréable, tellement agréable. Dommage qu'elle sente aussi fort le mauvais alcool. J'ai un vertige, je serai retombé sur le dos si elle ne m'avait pas encore tenu. J’enfouis ma tête dans son cou, répond à son étreinte par la mienne, plus fébrile mais déterminée. Je ne sais pas si c'est un dernier plaisir hallucinatoire que mon cerveau m'offre, ou la récompense d'une quelconque divinité. Je veux profiter de cet instant, quel qu'il soit. M'approcher d'elle, le plus possible, et y rester. Je suis serein, je me sens flotter, je ne sens plus de douleur. Je n'ai pas de mots à apporter. Je ne veux rien ajouter.

Ce n'est pas l'avis de cette silhouette, qui s'avance, dans l'encadrement de la porte. Il est un peu trop loin pour que je le vois distinctement, ma vision est de toute façon brouillée, floue. Je distingue qu'il tient dans sa main un objet lumineux, une lanterne sûrement. Dans son autre main, il tient une arme, une petite arbalète, sans doute. Il est assez ventru. J'ai beau ne pas très bien pouvoir l'observer, il m'est familier. Je ne me souviens plus exactement, ça m'agace. Je n'ai pas l'habitude de ne pas me souvenir. Ce dont je ne me souviens pas n'existe pas. Il s'exclame quelque-chose. Qu'est-ce qu'il dit ? Je ne sais pas. Il semble nous en vouloir, il nous menace et il beugle. Je n'aime pas l'entendre beugler, il me donne la migraine. Il me dérange. Je n'ai pas besoin d'une telle indélicatesse dans mon rêve. Il doit disparaître. Je le regarde et fronce les sourcils, perdant mon sourire.

Il éclate. Le gros homme éclate, soudainement, presque en silence. Des morceaux de chair sanguinolents sont projetés dans tous les sens, sans qu'on puisse vraiment identifier à quelle partie de son défunt corps ils appartenaient. À l'endroit où il se tenait, il n'y a plus qu'une trace rouge sur le sol, une lanterne et une arbalète tombent. Je suis soulagé. Je me sens de nouveau bien. Cela me revient maintenant : il s'agissait de l'aubergiste. Je ne sais pas s'il a eu le temps d'alerter la garde. Je m'en fiche. Je les ferais tous exploser s'ils viennent me troubler. Je trouve cette perspective amusante. 'essaie de rire, mais ma bouche est engourdie, comme le reste de mes muscles, d'ailleurs. Ce que je produis ressemble plus à des toussotements qu'à de vrais éclats de rire. Tout est si simple, finalement.

Pourquoi est-ce que je cherchais des solutions compliquées ? Je fais ce que je veux, car je peux tout. Les substances qui empêchent mes pouvoirs de fonctionner se comptent sur les doigts de la main, et il ne doit pas y en avoir une seule sur Terra. Et je ne veux rien d'autre que rester avec Vincente. Je la regarde, je la sens. C'est la plus belle chose que j'ai jamais vu de toute ma vie. Je la serre encore, je caresse ses cheveux. Elle s'exclame qu'elle m'aime... je crois. Je lui réponds, amoureusement. Hélas, assez faiblement, incapable d'articuler.

-M'aosi, gueteme...

Je pense que je n'ai jamais été aussi heureux. Seul une infime partie de mon esprit fait vaguement dissidence, ayant l'impression d'avoir manqué quelque-chose d'important. Je balais ce doute sans difficulté. Tout est bien.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le jeudi 14 mars 2013, 23:39:24
Archie est indemne. Une infinité de choix auraient pu causer un résultat différent, pourtant. Si je n'avais pas voulu sortir, si je n'étais pas allée au 3 Corbaux, si je n'avais pas vu les hommes, si, si, si... Tant de possibilités que ça finisse mal. Mais non. Archie est là, je le tiens, il me tient, et j'aimerais que nous restions ainsi encore longtemps. Mais un cri nous interrompt.

Je me retourne. Un homme, l'aubergiste probablement, se tient dans l'embrasure de la porte. Il est paniqué, sûrement par la vue des cadavres. Alors que j'essaye de prendre la parole pour lui expliquer, il se tait soudainement. L'instant d'après, il explose. Je ne suis pas sûre d'utiliser le bon terme, pourtant je ne vois pas comment mieux expliquer la situation.
Archie se met à rire bêtement, puis à bégayer. Je ne l'ai jamais vu comme ça, lui qui semble toujours maître de lui. Puis une odeur agressive me fait comprendre l'ampleur du problème : Archie est ivre.

" Bon sang Archie, que ce que... "

D'autres cris résonnent. Visiblement, toute l'auberge commence à ce réveiller. Aie, la situation se complique grandement... Si quelqu'un me voit, il me prendra sûrement pour l'agresseur, et si le lien avec Double V n'est pas fait, je serais chanceuse. D'un autre coté, je ne peux pas m'enfuir tout en portant Archie. Mais si je le laisse, il y a des chances qu'il tue ceux qui s'approcheront, comme feu l'aubergiste. Vite, une solution, une solution...

J'entends que ça commence à bouger. Je n'ai plus beaucoup de temps... Tant pis, je joue le tout pour le tout. Je récupère les fioles d'huile dans mon sac, qui me servent quand je suis poursuivie, pour déséquilibrer mes poursuivants. Je les jette aux quartes coins de la pièce, où elles se brisent, répandant leurs contenus. Puis je reviens vers Archie.

" Retrouve-moi au parc ! "

J'empoigne ma dague, et lui flanque un grand coup du pommeau dans la nuque, l'assommant promptement. Je m'en veux d'agir ainsi, mais je n'ai pas de meilleure idée pour le moment. Heureusement, son corps frêle me permet de le tirer hors de le pièce facilement. Un cri me signale que j'ai été vue... Sans trainer, je rerentre dans la chambre, attrape la lanterne trainant au sol, et ouvre la fenêtre d'un coup de pied. J'envoie la lanterne au sol, et saute. Je l'entends se briser, et le feu se répandre. Puis l'atterrissage change l'ordre de mes préoccupations. Bon, rien de cassé, c'est déjà ça. Et avec l'incendie naissant, tout le monde sera plus préoccupé à combattre les flammes qu'à me courir après. J'en profite pour disparaitre dans la nuit, priant pour qu'Archie de souvienne du rendez-vous fixé...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 26 mars 2013, 15:09:41
Mon bonheur ne s’embarrasse pas de discernement, de raisonnement, de lucidité. Je n'entends pas les cris, ou plutôt mon inconscient les chasse aussitôt qu'ils atteignent mes oreilles. Le cerveau est une machine capable de se mentir à lui-même, et c'est encore plus vrai pour le mien, qui n'est qu'en partie organique. Une zone de mon encéphale est tout-à-fait capable d'agir indépendamment de l'autre, de commander mon corps, de diriger mes pensées ou d'utiliser mes pouvoirs. Pourtant, même cette schizophrénie ne parvient pas à filtrer tous les indices de l'horreur de la situation. Des images passent, des sons, élargissent la brèche, avec une vitesse proportionnelle à ma puissance intellectuelle. En l'espace de quelques secondes, je ne me sens plus du tout bien. J'ignore encore ce qui se passe, mais je dois me retenir pour ne pas hurler. Je jette un regard terrorisé à Vincente, puis je sens un coup sourd, à l'arrière de mon crâne. Des étincelles emplissent mon regard. Je lutte malgré moi contre l'inconscience : à l'endroit où j'ai été frappé, ce sont principalement mes implants qui ont été touchés. Ils me lâchent, finalement, après s'être débattus. Le reste de mon esprit, excessivement faible, ne tarde pas à suivre.

***

J'ai mal à la tête. Encore ? Je suis sur le sol, l'odeur m'indique qu'un tas d'ordure se hisse non-loin : ou peut-être suis-je même posé dessus. J'ouvre des yeux affolés, et je porte une main à ma bouche. J'essuie machinalement les sucs gastriques qui en débordent. Je tousse, expulsant de ma gorge les glaires aigres. J'ignore combien de temps je suis resté dans le noir. Mon horloge interne a été complètement bousculée par toutes ces substances. Je regarde le ciel : je suis dans une ruelle grise, étroite, sale, et il fait jour. Puis-je espérer qu'il ne se soit passé qu'une journée ? Je frisonne. Pourtant, la météo n'a pas l'air particulièrement difficile. Je mets un temps à comprendre que je suis presque nu. On m'a pris ma tunique, mes chaussures, des habits neufs, si l'on exceptait une manche, achetés la veille. Sans surprise cette fois, je constate que naturellement, ma bourse est absente. J'ignore quelle a été la suite des événements, mais il est probable qu'on m'ait laissé pour mort.

Je soupire, et me lève. Mes premiers pas sont difficiles, cependant, j'ai plus de résilience que je le pensais. Très vite, j'arrive à reprendre une marche normale. Je me frotte l'arrière du crâne : j'ai faim. Je pense que mon organisme, en consommant intensément mes ressources énergétiques pour me maintenir en vie, a accéléré l'élimination des drogues qui circulaient dans mon organisme. J'ai lu rapport dans les dossiers me concernant qui évoquait un processus de ce type, destiné à récupérer plus rapidement des blessures. Je pensais que mes créateurs n'avaient pas eu le temps de l'implanter, ou y avaient renoncé. Je ne sais pas trop quoi penser. Fait rare, mes souvenirs sont flous. Ma mémoire de la veille, et de la nuit, est fragmentaire. Les éléments dont je dispose me permettent quand même de reconstituer un tableau cohérent. Je sais principalement que j'ai beaucoup bu, et que quelque-chose à mal tourné, ensuite. Je suis cependant incapable de discerner le réel de l'onirique. Mon cerveau ne faisait alors plus de distinction nette entre ce qui relevait du rêve et ce qui relevait de la réalité. La violence s'impose comme élément principal de la scène.

Il n'y a qu'un seul détail qu'il me reste : Vincente m'a demandé de la retrouver au parc. De quel parc s'agissait-il ? L'a-t-elle précisé ? Je n'en sais rien. Je ne suis même pas absolument certain qu'elle ait été présente. Il est tout simplement possible que je sois entré en crise, et ait causé de lourds dégâts. Une angoisse m’envahit. Et si je lui avais fait du mal ? Et si je l'avais tuée ? La perspective me terrifie. C'est impossible. Il faut que j'en ai le cœur net. Courant presque, je me dirige vers l'espace vert le plus proche, espérant que ce soit le bon. Essoufflé, je me retrouve à demi-nu au milieu les arbres. Les plaques de métal qui parcourent mon dos le long de ma colonne vertébrale sont particulièrement visibles : tant pis. Il y a une fontaine, pas de trace de double V, ni physique, ni mentale. Je m'agenouille devant l'eau. J'y plonge la tête. D'abord pour me débarbouiller. Puis de plus en plus longtemps. Je suis un monstre contre-nature. Elle est probablement morte, et c'est uniquement ma faute. Ma gorge est serrée, alors que mon visage éprouve la froideur du bassin. La noyade. Est-ce une mort assez cruelle pour l'abomination que je suis ? Je devrais aller me rendre à Siridov. Ils me tueraient, me disséqueraient, probablement. Je l'aurais bien mérité. Je ne me sens pas la force de pleurer. Je reste là, muet, immobile. J'espère.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le samedi 30 mars 2013, 22:08:05
Archie ne s'est pas présenté au parc le premier jour. Ni le suivant. Je suis taraudée par l'angoisse. Cet élément n'est pas resté inaperçu aux yeux de Lena, lorsque je suis retournée au camp la première nuit. Avec la frayeur que je lui ai causée il y a une semaine, je ne me sentais pas vraiment le droit de lui mentir, même si je ne lui ai pas tout dit. Je me doute bien qu'elle n'est pas dupe, mais heureusement, me fait confiance et n'insiste pas trop.
Toujours est-il que cette absence d'Archie m'inquiète. Je veux m'interdire d'y penser, mais l'idée qu'il ai pu mourir cette nuit là revient sans cesse. J'ai passé deux jours complets dans ce maudit parc, sans résultats. Pourtant, j'avais d'autres choses à faire... Mais je continue à parcourir ces allées, dans l'espoir, de plus en plus mince, d'apercevoir la maigre silhouette d'Archie.

Aujourd'hui encore, j'erre dans ce parc. J'essaye de me convaincre que ce sera la dernière journée, et qu'après, il faudra se résoudre à effacer Archie de ma mémoire. J'ignore si j'y parviendrai... Trop de choses se sont passées pour que je l'oublie aussi facilement. Tant de choses... Et tant encore sur lesquelles je n'ai pas mit de mot. Pourtant, s'il y a une chose de sûre, c'est que je tiens à retrouver Archie. Ne serait-ce pour m'assurer qu'il aille bien. Même si, je le sens, d'autres raisons me poussent encore à trainer dans ce parc.

C'est en revenant vers la fontaine centrale que je le vois. Penché vers le bassin, je ne vois que son dos, mais pourtant, je sais que c'est lui. La pâleur de sa peau, sa maigreur, ses cheveux noirs, ces éléments inimitables meconfirment ce que je sais déjà. Je remarque également des pièces de métal incrustées dans son dos, mais ce détail ne me fait ni chaud ni froid. J'ai eu l'occasion de voir pire, et à plusieurs reprises. Mais le trouble survient là où je ne l'attendais pas.

J'avais imaginé des dizaines de scénarios, au sujet de ces retrouvailles. Comment il allait être, comment je réagirai, puis comment lui réagira. Pourtant, alors que j'allais prendre la parole, le blocage survient. Je n'arrive pas à dire un mot, à faire un geste. Je suis comme paralysée, et je n'arrive ni à savoir pourquoi, ni comment m'en sortir.

" ... A... Archie... ? "
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le dimanche 31 mars 2013, 04:03:28
Elle est là, dans mon dos. Étrangement, je ne l'ai détectée qu'assez tard. Le choc, les événements d'il y a -je viens de le lire dans son esprit- deux jours de cela, auraient-ils un peu déréglé ma télépathie ? Probablement pas. Ma faiblesse vient plus certainement de l'état émotionnel qui était le mien : des questions un peu trop nombreuses qui se bousculaient dans ma tête, de mon abattement, de mon dégoût de ma propre personne, de ma résignation. Je peux à présent parler de cela au passé, car à la seconde où j'ai pu confirmer, et cela ne m'a guère pris plus d'un instant, que c'était bien elle qui s'approchait de moi, un grand éclair de joie m'a traversé. Il m'a presque fait sursauté. J'ai du serrer le bord de la fontaine pour ne pas me relever brusquement. Non, je ne veux pas la brusquer.

Les choses ont-elles changées, en un couple de jours ? Je n'en suis pas convaincu. Je suis le fil confus de ses pensées. Elle paraît toujours aussi fragile. Pourtant, elle s'était préparée ? Ma seule présence semble la bloquer, à moins que ce ne soit autre-chose... elle-même n'en est pas sûre. C'est embêtant, car je n'en sais pas plus qu'elle. Si elle avait eu la moindre idée, j'aurais pu l'aider, mais malheureusement, son propre esprit lui est aussi opaque, sinon plus, qu'à moi. Je reste à fixer l'eau. Je sais qu'elle est toujours derrière moi. Ne pas la voir directement m'aide à contenir mes sentiments. J'ai peur d'être trop instable, et elle n'a pas besoin de ça. C'est peut-être la solution. Devrait-on arrêter de se rencontrer, et simplement communiquer par télépathie ? Elle m’appelle par mon nom, d'une voix hésitante. Je ne lui réponds pas. Je ne me retourne pas, je ne bouge pas les lèvres.

J'hésite. S'adresser à elle en s'introduisant directement dans ses pensées ? C'est sûrement la solution la plus sage. Celle qui aurait le plus de chance, de défaire au bout d'un moment le nœud si compliqué de ses sentiments. Même si on prenait en compte ce que je pourrais trouver en matière de psychologie dans mes connaissances, cela serait long, complexe, sans doute pénible. Et si ce nœud était un nœud gordien ? La légende originelle disait que quiconque déferait ce nœud incroyablement sophistiqué deviendrait maître de toute l'Asie. Quand un roi perse le défia, Alexandre le Grand, confronté à ce problème qu'il ne savait résoudre malgré son esprit, avait trouvé une solution plus simple : il avait tranché le nœud de son épée.

Vincente !

Le message télépathique est fort, intense, radieux, brusque. Peut-être même, par sa soudaineté et sa puissance, il l'étourdira, un peu. Je laisse éclater ma joie contenue depuis une bonne minute. Profitant de l'hébétement causé par ma manifestation, je donne de ma personne. Je n'en ai pas l'habitude, et ne suis pas du tout confiant dans mes chance de réussite, mais je me lance. Je me retourne, et je franchis d'un pas la distance qui nous sépare. Enfin, créant un petit champ de force sous mes pieds, pour arriver à sa hauteur, j'écarte les bras et les referme autour d'elle. Ma vitesse d’exécution ne lui laisse pas vraiment l'occasion de me repousser. Je me colle à elle, je l'étreins de toute mes forces, quand bien même celles-ci sont pour elle tout-à-fait négligeables.

Enfin, j'incline légèrement ma tête ruisselante d'eau, et j'approche assez rapidement mes lèvres des siennes. Toutefois, je ne les colle pas directement, lui laissant, cette fois, la latitude pour refuser le baiser. Je crève de peur. Je tremble. Un instinct, presque une pulsion de survie, m'incite à fermer les yeux, comme pour éviter de contempler l'animal féroce, le prédateur, qui va bientôt me déchirer en morceaux. J'y résiste, je ne sais comment. J'essaie de capter son regard vert, directement, sans faire attention aux gouttes qui, dégringolant de ma chevelure trempée, risquent de tomber sur le mien. J'avais prétendu une dizaine de secondes plus tôt que je ne voulais pas la brusquer. Je me demande qui, en cet instant, est le plus brusqué des deux. Tant pis. Nous en sommes là : j'ai donné le coup d'épée. Reste à savoir si le roi perse apprécie la solution.
Titre: Re : Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le lundi 01 avril 2013, 23:25:17
Vincente !

L'intensité de sa voix résonne dans mon esprit. Je suis presque sonnée tant ce cri, silencieux pour n'importe quelle autre personne, est puissant et soudain. Ce cri exprime toute la joie qu'il a à me revoir, et cette joie me fait vaciller. Soudainement, toutes mes appréhensions me reviennent à l'esprit.
Archie ne me laisse pas le temps de réagir. Avant même que je ne m'en rende compte, ses bras me serrent, alors que son visage est penché sur le mien. N'était-il pas plus petit que moi ? Pourtant, je sens dans son étreinte la force des sentiments qu'il éprouve. Ses lèvres sont à quelques centimètres des miennes, et je devine ce qu'il a en tête. Je pensais qu'il allait prendre mes lèvres, mais il reste en attente. C'est à moi de décider de la conclusion.

Qu'est ce que je souhaite ? Je sais maintenant que les sentiments que j'ai pour Archie vont au-dela de la simple amitié, mais jusqu'où vont-ils exactement ? Jusqu'où je serai prête à aller, à  me donner ? Archie est au-dessus de moi, dans l'attente. Je vois qu'il est rongé par l'angoisse. Mon manque de décision le stresse, il aimerait connaitre le mot final de cette histoire. Je devrais faire comme lui, essayer de me jeter à l'eau...

Lentement, trop peut-être, je viens poser mes lèvres sur les siennes. Je suis surprise de la sensation ressentie. C'est chaud et doux, et incroyablement agréable. Est-ce ceci, un baiser ?
Je continue encore un peu, avant de reculer. Mon esprit est confus. En fait, je ne pense pas enore avoir le courage de pousser plus loin. Je n'ose même pas regarder Archie.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mardi 02 avril 2013, 02:11:20
Jusqu'au dernier moment, j'ignore ce que va choisir Vincente. Je me prépare même mentalement à recevoir une gifle, ou plus simplement un refus. Qu'aurais-je fais alors ? Je me serais excusé, sans doute, et avec un peu de honte et d'abattement, je lui aurais demandé la suite du programme. Nous serions sans doute restés amis, au moins un temps... jusqu'à ce que d'autres opportunités nous sépare. Quel genre d'homme aurait-elle apprécié, au futur ? Un autre voleur, sans doute. Quelqu'un capable de la suivre dans son art, sans utiliser les facilités qui sont les miennes. De plus vieux, sans doute, aussi. Les femmes choisissent souvent des partenaires plus âgés, et ça joue en ma défaveur. Si on faisait le bilan, mon pronostique se porterait sur un roublard plus expérimenté qu'elle... ça ne devait pas courir les rues, je pouvais me rassurer.

Puis j'oublie tout ses pronostiques, lorsque ses lèvres touchent les miennes. Leur contact me fait presque sursauter. Je réalise que je ne l'ai jamais réellement approché de près que très brièvement, et jamais pacifiquement. Il y a un tas de livres pour adolescents et pré-adolescents sur le thème « comment embrasser une fille ». Et tous débouchent plus ou moins sur la même conclusion : écoutez votre instinct, un bon baiser est une histoire d'alchimie entre deux partenaires. Bon sang ! Je passe mes mains dans son dos. Je déteste ce genre de conseil. Je lui caresse la nuque, sans trop y penser. Je n'ai aucun instinct... je ne suis que rationalité pure, je suis presque un robot ! Mon autre main la serre encore plus fort. Pourquoi n'ont-ils pas pensé aux gens comme moi ?

Nos visages s’effleurent. Je panique, est-ce que je dois y mettre la langue ? Pourquoi personne n'a-t-il jamais théorisé ça PRECISEMENT ? Je ferme les yeux. Mon visage n'est pas le seul à réagir à la situation. Tout mon corps est électrisé, plein de tension érotique. J'ai envie de me coller contre-elle, de sentir son être, sa chaleur, dans son ensemble. Timidement, mon muscle buccal passe sur sa bouche, y déposant un peu de salive. Puis elle se soustrait à mon étreinte. Mince, c'est déjà terminé ? Je soupire, enfin, je souris. Hésitant, je lui demande :

-Ça, euh, t'as plu ? Je n'avais jamais fais ça, avant... Je n'ai pas du être vraiment super, ce coup-ci, désolé...

Je me détourne un instant d'elle, cherchant mes mots. Je sais pertinemment, en lisant ses pensées, qu'elle n'a pas non plus beaucoup d'expérience là-dedans... Peut-être encore moins que moi, qui ait quand même accès à une grande base de connaissance sur le sujet. J'essaie de la détendre... comme si c'était facile. Ça n'a aucun intérêt si elle... culpabilise... ou se bloque... ou je ne sais trop, de cette manière. J'espère avoir déjà franchi un grand pas. Ai-je complètement enjamber le ravin où je menaçais de tomber ? Je n'en suis pas encore sûr, cependant, mon sourire s’élargit encore.

-Je ferrai mieux la prochaine fois, alors ? je lance sur un ton taquin. On recommence quand tu veux.

Je redescend de ma plate-forme. Oui, je fais bien presque dix centimètres de moins qu'elle. C'est peut-être moins impressionnant ainsi.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mardi 02 avril 2013, 23:53:27
Les premières paroles d'Archie ne parviennent pas à franchir la brume qui entoure mon esprit. Actuellement, je suis un peu perdue. Ça m'était déjà arrivé de flirter avec des garçons, parfois même des filles, mais jamais avec autant de sentiments derrière. J'ai l'impression d'avoir activer quelque-chose, sans très bien savoir quoi. Puis je refais un peu surface, juste à temps pour entendre Archie faire une remarque où il est question de notre prochain baiser. Son ton badin, associé au fait qu'il a posé pied à terre, et est donc plus court que moi d'une demi-tête, me fait sourire et dissipe mon stress.

" Héhé, ne crois pas pouvoir obtenir des trésors de la part d'un voleur aussi facilement !
Bon, et maintenant, il faudrait faire quelque-chose pour ta tenue, tu ne peux pas rester éternellement en caleçon. "


D'autant plus que ce léger baiser n'est pas resté sans effet sur le corps d'Archie, comme en témoigne une bosse à son entrejambe. Est-moi qui lui fait autant d'effet, ou juste le baiser ? Soudain, je me mets à souhaiter pouvoir lire l'esprit des gens, pour savoir ce qu'archie pense réellement de moi. Et aussi, que veux-t-il exactement de moi. Des choses que j'aimerai savoir, mais je n'ai pas le courage de lui demander maintenant.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le mercredi 03 avril 2013, 03:12:55
Ouf. Enfin, elle se évacue un peu son angoisse, et la mienne avec. Elle parvient même a avoir un mot amusant. Je souffle discrètement. J'ai rarement eu autant de mal à débloquer une personne... mais il faut dire que je n'ai pas souvent eu l'occasion de le faire. Maintenant que c'est passé, j'espère qu'elle ne régressera plus au stade inférieur. La faire évoluer jusqu'ici était trop difficile, trop épuisant, je ne sais pas si je pourrais produire de nouveau un tel effort émotionnel, du moins aujourd'hui. Je garde mon air enjoué, jusqu'à ce qu'une pensée gênante traverse son esprit. Je baisse les yeux, fais le même constat qu'elle, et grimace, gêné. Mes joues blanches prennent une teinte rosée, avant que je décide tout simplement de me retourner. Je bégaie un peu, en tentant de m'expliquer.

-Ça... c'est... enfin...

Je ne lis cependant pas de dégoût dans le fil de ses idées, elle semble plutôt intriguée par ce qui en est la cause. Moi-même, je n'en suis pas vraiment certain de la cause exacte. Je suppose que c'est un tout, quoique les deux éléments séparés pourraient sans doute me faire parvenir peu ou prou au même état. Je ne l'ai pas vu venir, et dans l'enthousiasme du baiser, ne m'en suis même pas rendu compte. Je suis furieux contre moi-même. J'ai l'habitude de contrôler mon corps de façon beaucoup plus rigoureuse.

-Excuse, je me suis laissé emporté, et puis...

Mais n'est-ce pas ça justement, au fond, l'amour ? Un phénomène irrationnel, se laisser emporter, faire une croix, ne serait-ce qu'un instant, sur son cerveau puissant comme cent ordinateurs ? Je ne sais pas si je confonds le désir physique et l'amour en lui-même, mais d'un autre côté, les deux vont assez souvent ensemble. Toujours est-il que, je le sais bien, et malgré que ce soit quelque-chose de naturel, ce n'est pas le genre de chose qu'on est supposé montrer. Surtout lorsque la relation est naissante. Enfin, je crois. Du moins, pas quand l'une des deux parties, voire les deux, sont aussi peu à l'aise sur le sujet.

-Hm, tu sais, tu n'as pas vraiment besoin de poser les questions que tu as en tête... Je peux les lire tout seul...

Elle s'interroge, de fait. Je suppose que ça embêterait pas mal de monde d'être ainsi lu en permanence par quelqu'un qui analyse et classe leurs moindres idées. Que ça donnerait à beaucoup l'impression de ne plus avoir d'intimité. Peut-être n'en a-t-elle pas totalement pris conscience ? L'esprit paraît souvent être aux gens leur seul jardin secret absolument inviolable, consultables d'eux-seuls. S'ils savaient. S'il y a un monde à la fois terriblement pire et infiniment meilleur que le monde réel, c'est bien celui des pensées. Ou alors, elle est d'une sincérité tellement absolue qu'elle considère ne rien avoir à cacher. C'est peut-être aussi pour cela que je l'aime, après tout. C'est la première fille qui n'ait jamais pris conscience de ma différence, et qui m'ait accepté en l'état, sans protester.

-Tu sais, je suis un garçon... Allez, je suis sûr que tu peux faire plus évident encore comme déclaration, Archie. Juste un être humain... Super, une fausse évidence, maintenant. Donc, enfin, c'est au niveau hormonal, tu vois, naturel j'y peux rien... Mais je ne ferai rien dont tu n'aurais pas envie...

Va lui expliquer que ma libido est le fruit de millions d'années d'évolution. Qu'elle est la clef d'un système qui incite les représentants d'une même espèce à s'accoupler, pour la perpétuer. Génial. Je ne me suis jamais senti illégitime en lisant les pensées des gens. Cependant, ne pas être honnête avec elle serait profondément injuste.

-Si y'a d'autres choses que tu veux savoir, tu n'as qu'à les penser, si tu veux. C'est plus facile, comme ça.

Reste le problème de ma tenue. C'est bien le cadet de mes soucis, mais il faut quand même le régler, elle a raison.

-Je n'ai plus d'argent sur moi... tu penses que je peux rentrer au terrain vague juste avec ça ? Je ne sais pas ce qu'irait s'imaginer Lena ou les garçons...

En même temps, ils n'auraient pas nécessairement tord de s'imaginer des choses, je songe, à moitié amusé.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le vendredi 05 avril 2013, 23:09:20
Et bien et bien, on dirait que j'ai mit le doigt sur un problème épineux, enfin, façon de parler, bien sur. Archie semble gêné d'être vu ainsi, et pour être franche, ça me rassurait. Tout ce qui touchait d'un peu trop près au sexe me mettait mal à l'aise, alors sa gêne m'aide à surmonter ça. Surtout que le voir s'emmêler dans ses justifications est somme toute assez hilarant.

Désolée pour toi Archie, mais pour ça, il te faudra patienter longtemps... Ce n'est pas dans mon programme.
Bon, utilise mon manteau, le temps que l'on atteigne un marchand de vêtements. Tu ne vas pas rester dans cet état indéfiniment, et surtout pas avec ces trucs dans le dos.


Joignant le geste à la parole, j'ôte mon manteau, que je tends à Archie. Le fait d'être en tunique courte et short ne me dérange pas, la saison est clémente au niveau des températures. Archie enfile le manteau, qui ne lui va pas trop mal, tout compte fait. Un modèle plus sombre, pour contrebalancer son teint de peau, lui donnerait fière allure.

Si je te surprends à sentir mon manteau, je serai sans pitié, d'accord ?

Je dois être bien détendue pour plaisanter à ce sujet...
Je me mets en route, Archie sur mes talons. Une chance pour nous, le parc est à coté du centre-ville, il est donc assez facile de trouver la bonne boutique. Après avoir lâchement abandonné Archie face aux assauts des vendeuses, je commence à réfléchir. Et maintenant ? On peut dire qu'entre lui et moi, il y a plus qu'une simple amitié, ou une histoire d'honneur. En fait, c'est bien d'une histoire d'amour dont il est question. Archie a embrassé la chose sans problèmes, mais moi, j'ai encore du mal. Maintenant que la pression des derniers événements est retombée, force est d'avouer que je recommence à douter.

Ce n'est pas tant de mes sentiments que je doute (quoiqu'un peu), mais de leurs implications. Archie pourrait-il vivre avec une voleuse ? Il n'est pas voleur lui-même, en fait, il ignore tout du monde dans lequel je vis. Je me demande si nos deux univers seraient compatibles. Pour le moment, ça semble possible, en effet, mais dans le futur ?
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le dimanche 07 avril 2013, 02:39:41
Je ne m'attendais pas vraiment à ce qu'elle s'engage plus que cela, quoiqu'il en soit. Ou peut-être un peu, mais je parviens sans grand mal à masquer ma déception. C'est elle qui a raison, il faut que je me calme un peu. Il n'y a pas d'urgence autre que celle de mon désir, qui, quelques-fois, passe outre ma raison. Surtout qu'au final, même si je sais que c'est une façon de me repousser, elle ne condamne pas totalement la perspective. Patient, je ne suis pas sûr de pouvoir l'être sur l'instant, lorsque les esprits sont échauffés, mais assez paradoxalement, je pense l'être plus que personne sur le long terme. Et si la frustration est un peu trop forte, j'ai toujours dans ma mémoire quelques souvenirs capables de la calmer. Enfin, ça, elle n'est pas vraiment obligée d'être au courant. Je hoche la tête.

-C'est toi qui vois.

De toute façon, si la moindre once d'envie la traversait, je crois bien que j'en serai le premier au courant, peut-être avant même qu'elle ne s'en rende compte elle-même. Enfin, elle évoque encore une fois la nécessité de m'habiller, et l'aspect de mon dos. Autant que je lui en dise un peu plus, histoire qu'au cas où elle aurait à parler de son... ami, copain, petit ami, amoureux, compagnon, amant ? Quel terme utiliserait-elle ? Ça me fait un peu bizarre : sans doute quelque-chose de plus neutre... elle n'ait pas à nommer ce qu'il avait le long de la colonne vertébrale ''trucs''.

-Ce sont des implants, en fait, ils ne sont pas qu'extérieurs. Ils plongent jusqu'à ma moelle épinière, à l'intérieur de ma colonne vertébrale, tu vois le genre ? Je ne connais pas son niveau en anatomie. Au moyen-âge, sur Terre, celui de la population était ridiculement bas, mais les connaissances semblent quand même un peu plus poussées sur Terra. Ils me servent à faire un tas de choses, en autre, à penser. Il n'y avait pas assez de place, dans ma tête, pour mettre l'intégralité de mon cerveau artificiel... Et comme c'est la deuxième zone la plus connectée à mon cerveau biologique, ben, ça c'est retrouvé là. Pas très esthétique, hein ? Elles servent aussi à réguler ma chaleur interne. J'en aurais besoin d'un peu plus, quand t'es là, faut croire !

Surtout qu'elle a retiré son manteau pour me le donner, et qu'elle n'est pour sa part pas très densément vêtue dessous non-plus. Je ne peux pas m'empêcher -enfin, il faut dire que je n'essaie pas, pourquoi aurais-je honte ?- de jeter quelques coups d’œil à son allure sans l'ample vêtement. Je m'attarde particulièrement sur ses membres fins et taillés par l'effort à la fois. Ce ne sont pas vraiment des traits que l'on retrouve chez beaucoup de filles, sur Terre, plus occupées par des activités d'un niveau intellectuel variable que par les épreuves physiques. Je ne peux pas nier que la simple beauté de ses gestes, même lorsqu'elle ne fait que marcher, me la rend désirable. Ce n'est pas rationnel, mais c'est ainsi. Néanmoins, si intérieurement, j'assume cette attirance, l'image qu'elle donne de moi dans sa plaisanterie me décontenance un peu.

-Yebat ! Je fais pas ce genre de... truc... ou alors, seulement quand t'es pas là...

Je souris, à moitié-honteux. Bon, elle a peut-être une meilleure idée des désirs qui me traversent que je ne le croyais. Quand même, aller jusqu'à chercher l'envie dans l'odeur de son manteau... Je me remémore alors son parfum, lorsque nous étions plus proches. D'accord, j'avoue. Ça peut être tentant. En parallèle, je suis assez stupidement fier qu'elle me trouve fringant, avec son propre habit. C'est vrai qu'il ne me va pas si mal, même s'il est un peu grand. Je prends en note ses conseils sur les couleurs qui m'iraient le mieux, avant qu'elle ne se sépare de moi pour me laisser discuter avec le tailleur.

Finalement, je ressors avec, en plus d'un pantalon en toile sombre et de sandales, une tunique noire à capuche, moins ample que son manteau, mais tout-de-même assez couvrante. Je n'ai rien trouvé de mieux à un prix raisonnable. Je suis plutôt sensible à la chaleur, et le temps n'est pas mauvais, alors ça n'aurait servi à rien de prendre des vêtements plus épais. J'espère que ça lui plaira... après tout, c'est son argent. Sauf si elle compte le voler. Elle ne compte quand même pas le voler ? À ce propos, je surprends certaines de ses pensées, et engage la discussion à ce propos.

-Tu sais, mon univers, dans mon monde, c'était l'université. Je n'en suis presque jamais sorti avant d'arriver ici. C'est un lieu avec beaucoup de jeunes et de livres, où des professeurs viennent dispenser du savoir dans de nombreux domaines. Je ne pense pas que vous ayez quelque-chose d'équivalent sur Nexus, et même là-bas, j'avais un peu atteint les limites. Bref, mon univers, je peux plus y aller, alors c'est comme s'il n'existait plus : ici, je n'en ai pas. J'ai essayé de pénétrer un peu celui des chasseurs de primes, mais ça ne m'a pas bien réussi...  enfin, tu vois. Je ne serais jamais un grand voleur comme toi, je crois. Mais je pourrais sans doute trouver autre-chose à faire ici, j'ignore encore quoi, mais je ne suis pas totalement incapable non plus. T'inquiète, j'essayerai de faire en sorte que tu n'ai pas à avoir honte de moi...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le jeudi 25 avril 2013, 21:48:38
Archie revient finalement avec un ensemble qui ne lui va pas trop mal. Un peu de métal de ci de là, et il pourrait passer pour un baroudeur endurci. J'aime mieux le voir ainsi, il a déjà plus fière allure. Enfin, avec quelques muscles pour remplir sa tenue, ça serait mieux, mais on ne va pas demander la lune... Sous son regard, je paye les vêtements comme une cliente normale. L'idée de partir sans payer m'avait effleurer, mais après toutes les crises traversées, je n'ai pas envie d'en commencer une nouvelle. Puis Archie répond à mes pensées.

Pas à avoir honte de lui... J'aimerai que ce soit aussi simple. Vivre en tant que voleur est déjà compliqué en soi, alors avec un compagnon qui n'en est pas un lui-même... Le problème, c'est le danger que je fais peser sur lui, et lui sur moi. Dans notre monde, l'amour est interdit, c'est même un des enseignements majeurs. Car c'est une faiblesse exploitable par l'ennemi. Si l'un de nous est prit en otage, alors l'autre se retrouve pieds et poings liés. Et c'est notre chute à tout les deux. Je ne pense pas être capable de voir Archie mourir sous mes yeux, et encore moins me savoir responsable de sa mort. Non, je n'en suis pas capable, tout simplement.

Sans m'en rendre compte, nous avions marché jusqu'à une de mes caches. Comme beaucoup d'autres, c'est un bâtiment peu fréquenté, à l'écart des grand axes. L'endroit que j'occupe est bien sur sous les combles, discret et difficile d'accès. Un peu d'escalade plus tard, je dégage l'accès et m'engage dans la petite pièce. Archie ne tarde pas à me rejoindre. J'essaie de le regarder, de lui parler, mais mes yeux l'évitent, et les mots restent coincés dans ma gorge...
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le vendredi 26 avril 2013, 03:21:54
Sa remarque, enfin, sa pensée, me fait tiquer. C'est le désavantage de lire les esprits : on perçoit tous  les commentaires de chacun sur sa personne. Mais finalement, passé la vexation, ou la perte d'assurance, que cela peut causer, c'est plutôt une bonne chose. Je peux ainsi prendre en considération ces remarques pour tenter de corriger mes défauts, et ainsi améliorer mon attitude par rapport à cette personne. Certains spécialistes de la communication, sans aucun pouvoir, beaucoup plus entraînées que moi, parviennent, simplement en observant la posture et le regard de leur interlocuteur, à déduire des choses assez poussées quant à la meilleur manière de paraître devant elle. Je n'ai jamais eu ce talent, bien au contraire. Même en percevant précisément les idées qui traversent le cerveau des gens, en société, je fais bien souvent des erreurs.

-Ah ? Tu préférerais que je sois plus musclé ? Ben... je vais y réfléchir, alors.

Je reste un peu songeur. C'est vrai que je ne suis pas épais, c'est un euphémisme de le dire. Je n'ai jamais vraiment pensé à ma musculature, assez ridicule, comme à un élément esthétique, et encore moins de séduction. Il faut dire que ce ne sont des sujets qui m'intéressent que depuis extrêmement peu de temps. Je ne suis jamais entré dans une salle de culturisme de toute ma vie. Si je sais à quoi cela ressemble, c'est uniquement par l'intermédiaire des pensées d'autres personnes, ou des médias. Je vois nettement ces sortes de bancs où l'on soulève de la fonte à longueur de journée, ou ces machines compliquées destinées à travailler d'autres parties du corps.

Pas certain, cependant, que même si je m'entraînais intensément, mon organisme me permette de prendre beaucoup de masse musculaire : je mange déjà beaucoup sans grossir pour autant. Toutefois, si Vincente y tient, je devrais pouvoir faire un effort. Lui montrer que ce n'est pas si difficile, en tout cas, pas la lune, comme elle l'a pensé. Sur le chemin, je capte encore certaines de ses interrogations. Je ne peux faire autrement que d'y répondre, même brièvement.

-Je suis peut-être pas Schwarzenegger, mais je sais quand même me défendre ! Si c'est ma sécurité qui te préoccupe, ça devrait aller. Je n'ai jamais été autant en sécurité que sur Terra !

Je lui souris, tout en pensant qu'elle ne doit avoir aucune idée de qui est, ni à quel attribut se rapporte, Schwarzenegger. Je lui envoie une discrète association d'idées, entre le nom de l'acteur de Terminator et une grosse masse musculeuse. Cela devrait suffire à ce qu'elle considère le concept comme vaguement familier...

Puis nous arrivons dans une de ses nombreuses caches. Je ne sais même pas pourquoi nous sommes ici. Elle ne l'a pas pensé une seconde, et trop accaparé par la lecture de son esprit, je n'y ai moi-même pas vraiment fait attention. Je me suis laissé guider. À mon grand désarroi, je constate qu'elle est de nouveau bloquée par son mutisme. Retour à la case départ ? Je pensais que le baiser que nous avions échangé la détendrait un peu, mettrait au moins les choses au clair. Je dois m'être de nouveau trompé. Je comprends, à présent, les hommes qui lancent sur un ton à la fois fataliste et gaillard, au coin d'un bar : « putain, ce qu'elles sont compliquées, les gonzesses ! ».

La bonne nouvelle, c'est que j'ai quand même un objectif à peu près précis. Et une fois cet objectif identifié, mon cerveau est capable de penser suffisamment vite pour m'offrir de nombreuses solutions. Aussi, très vite, un procédé inédit me vient. Il est assez aléatoire, vraiment risqué, mais il a ses chances, après tout. En tout cas, j'en ai moi-même assez envie, il me plaît bien. C'est quelque-chose que je n'ai jamais pu tenter avec personne. Je m'assois tranquillement sur le rebord de la petite couchette, dans un coin de la pièce. Enfin, je m'adresse d'une voix posée à Vincente.

-Pas mal de gens se disent que les choses seraient plus faciles s'ils pouvaient lire dans les pensées des autres. S'ils en avaient la possibilité, comme moi, ils seraient sans doute moins catégoriques. Peut-être que si c'est si... difficile, c'est parce qu'on est pas sur un pied d'égalité. Je sais tout ce que tu penses, mais moi, tu sais que ce que je veux bien te dire. C'est un peu injuste, dans le fond.

Je suis content de mon idée, comme un gamin excité par la perspective d'un jouet nouvelle génération. Je sais que les conséquences pourraient être désagréables, sur l'instant, ça ne me préoccupe pas trop. Plutôt que d'ouvrir de nouveau la bouche, je lui envoie un message télépathique, qui résonne calmement dans son esprit.

Un peu de technique, si ça te dérange pas trop ! Pour communiquer comme ça, sans parler, il y a deux étapes principales. D'abord, je fixe un seuil, au-delà duquel mon interlocuteur pourra percevoir mes pensées. Il y a plusieurs niveaux de pensées, en fait : la pensée verbalisée, tout en haut, les pensées de surface, et le travail de l'inconscient plus en bas. Il y a aussi certains signaux nerveux qui ne passent pas nécessairement par le cerveau, comme les réflexes. Ils sortent de mon champ de pouvoir. Généralement, je fixe donc le seuil au niveau de la pensée verbalisée. Puis, il me suffit d'articuler nettement dans ma tête ce que je souhaite envoyer. Avec un peu d'entraînement, j'ai réussi aussi à envoyer des images, des idées, plutôt que simplement des phrases. C'est souvent plus simple que d'aller créer la même chose directement dans l'esprit de l'interlocuteur, ce qui est possible, mais plus contraignant, et ça me donne moins l'impression d'aller altérer sa façon de penser.

Je la regarde, mon visage reflète un grand enthousiasme. J'espère qu'elle a réussi à tout suivre, j'ai essayé d'aller vite, alors que le sujet est infiniment plus vaste. Voit-elle où je veux en venir ?

Je te propose donc de t'envoyer mes pensées avec un seuil beaucoup plus bas qu'actuellement. Jusqu'à un niveau où je suis un peu moins maître de moi-même que lorsque je parle simplement. En fait, à peu près celui auquel j'ai accès, chez-toi. Nos deux esprits rentreront ainsi en contact plus étroit, ils s'influenceront l'un l'autre dans leur propre raisonnement. En fait, c'est assez intime, pour moi, mais de ton côté, ça ne change pas grand-chose. Avec la concentration, j'aurais une perception plus attentive de tes idées, mais pas plus profonde. Qu'est-ce que tu en dis ?
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le samedi 27 avril 2013, 00:31:26
Archie perçoit mon trouble, aussi il me propose une méthode pour y remédier. Son explication me laisse perplèxe, principalement parce que je n'en ai comprit que la moitié. Mais dans les grandes lignes, il propose de faire en sorte que nos esprits communiquent directement entre eux, de telle sorte que chacun de nous deux comprenne ce que pense l'autre. J'hésite un moment, avant de finalement accepter. Si ça peut nous aider à mieux nous comprendre...

Sitôt qu'Archie m'ouvre son esprit, je suis hapée par le tourbillon de ses pensées. Il m'avait dit penser très rapidement, mais je me rendais compte à quel point maintenant. Ses idées filent à une telle vitesse que je n'ai pas le temps d'en saisir le sens. C'est comme être emporté par des rapides. Le corps est balotté par les flots, sans qu'il soit possible de réagir.

Puis, peu à peu, le flux se calme, me permettant de commencer à analyser ses pensées. Ce qui me frappe alors, c'est l'amour qu'il m'exprime. Plus que des sentiments, c'est une vraie passion qu'il nourrit à mon égard. Un désir brulant pour ma personne. Un désir qui l'habite depuis notre affrontement.

La scène se rejoue devant moi, à travers les yeux d'Archie. Nue à l'exception de mon boxer, le surplombant, je vois ma main, et la lame à son bout, se lever et frapper. Vue ainsi, la scène est terrifiante, pourtant, je perçois les sentiments d'Archie à ce moment. Ma rage, ma violence et ma nudité, tout cela s'additionne dans son esprit, et au delà du danger de mourir, lui y voit une forme de beauté. Puis vient la fuite face à la garde, et ma blessure. L'inquiétude qui le tenaille de me  savoir entre la vie et la mort.

Plus que des mots, je ressens directement ses émotions, et elles me traversent violemment, au point de causer une vraie douleur. L'amour qu'il disait avoir, je peux le sonder désormais. C'est vraiment chaque parcelle de mon être qu'il aime. C'est ce que je suis, ce qui fait de moi Double V, qui le séduit, qu'il désire.

J'intercepte alors une de ses pensées. Je vois à ce moment que son désir n'est pas seulement sentimental, mais également physique. Le fait d'être seul avec moi, dans cette pièce exigue, il ne peut s'empêcher de nourrir des envies d'ordre sexuel. Une de ses pensées semble alors vouloir échapper à mon regard. J'insiste, je veux savoir. Et je vois. À partir de souvenirs qu'il avait, Archie s'est masturbé, fantasmant sur moi. Les détails sont incertains, comme s'il voulat la cacher, mais l'idée est claire.


Je ne sais pas combien de temps nous restons ainsi, nos esprits liés l'un à l'autre, mais quand l'expérience s'arrête, je suis pantelante. Je regarde Archie. Maintenant que jai pu ressentir ce qu'il éprouvait pour moi, je sens mes propres sentiments se décupler. Je me jette sur lui et le serre contre moi. Mon coeur bat à tout rompre, il doit surement le sentir. Je ne pensais pas que je pourrais un jour être aimée d'un amour aussi sincère et complet que celui d'Archie à cet instant.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le dimanche 28 avril 2013, 01:22:37
Je doute un instant qu'elle accepte. Je comprendrais qu'elle ait peur de ce qu'elle pourrait trouver dans ma tête... moi-même, il y a certaines choses que je crains un peu, mais porté par mon enthousiasme, je n'y pense pas. Puis, lorsque je lis dans son esprit l'acceptation, mon visage s'illumine. L'instant qui précède, je la regarde fixement dans les yeux. Je n'ai plus vraiment de difficulté à le faire. Ça ne sert strictement à rien, sur un plan purement technique, cependant, j'essaie de soigner un peu la mise en scène. De toute façon, bientôt, ça n'aura plus d'importance. Elle verra indirectement ce que je vois, et plus encore.

Je suis déjà en communication avec son cerveau, il ne me reste plus qu'à abaisser le seuil. Je prends une grande inspiration, puis je m’exécute. Un moment, je ressens comme un blanc dans ma tête, comme si je retenais de formuler la moindre idée originale, par pudeur. Enfin, je ne peux me retenir plus longtemps, et les pensées fusent de nouveau, avec la vitesse qui les caractérise. J'espère, qu'elle sera capable de suivre, malgré tout. Mon rythme est plus élevé que la plupart des humains, même si une grande partie, traitée par la partie artificielle de mon encéphale, doit tout juste apparaître ; et qu'elle même, véloce et imprévisible dans ses raisonnements, n'est pas en reste. Je lui souris, avant d'ajouter une sorte de préface, qui se détache nettement de mes autres songes, sans être aussi nette qu'il y a quelques secondes.

C'est un peu étrange. Je sais continue à penser normalement, avec la même facilité. Beaucoup plus grande que celle que j'ai à parler. Pourtant, je sais que tu es avec moi, que tu m'écoutes. Je ne peux plus rien penser qui ne te sois pas immédiatement retransmis. C'est assez stressant. Même moi, je ne peux pas juguler parfaitement mon esprit... du moins pas sans une concentration intense. Et même si je le pouvais facilement, ça ne serait ni honnête, ni vraiment intéressant. Si... si tu pouvais donc me pardonner... si, par hasard, tu tombes sur des choses un peu... troublantes.

Je la sens qui explore mon esprit, ma propre mémoire, à mesure qu'elle me revient à moi-même. Son regard vert, me rappelle d'autres regards. Ceux, inquiets, des enfants qu'elle protège et qu'elle nourrit, lorsqu'elle est revenue, blessée par un carreau, à demi-inconsciente. Je me sentais alors tellement coupable. Tout me semblait être de ma faute. J'avais été stupide, de vouloir la poursuivre, sans la connaître, sans connaître les motivations de ses agissements. J'ai failli, ce jour là, faire la plus grosse erreur de toute ma vie : j'ai failli condamner à mort la plus formidable personne qu'il ne m'ait jamais été donné de rencontrer. Elle est sceptique sur ce dernier point. Elle semble assez surprise d'avoir, à mes yeux, ce statut. Sa propre opinion d'elle n'est pas aussi reluisante, pourtant, je sais qu'elle doit bien se rendre compte que je suis sincère.

C'est sur une affiche, que la première fois, j'ai fait sa connaissance, ou plus exactement celle de double V. Rien ne me préparait à la confronter, en chair et en os. La grâce de son déplacement m'a presque tout de suite fasciné, mais dans un premier temps, mon émoi s'est arrêté là. La course-poursuite accaparait la plupart de mes pensées. Était-ce parce que je ne l'avais pas encore rencontrée ? Parce que je n'étais pas encore tombé amoureux d'elle ? Mes raisonnements, alors, étaient d'une froideur qui me surprend moi-même. Étais-je vraiment aussi sec et distant ? Comme une machine ?

Je crois que j'ai pas mal évolué, en très peu de temps. Je me suis ouvert, je suis devenu beaucoup plus humain... plus sentimental, aussi. C'est entièrement grâce à elle, voire à cause d'elle. Mon moi d'avant, c'est certain, n'aurait pas approuvé. Paradoxalement, alors que je campais un mental glacial, et extrêmement calculateur, c'est elle, qui, à présent, à le plus de mal à accepter les sentiments que je lui porte, et qui sont, je le constate enfin, réciproques. Malheureusement, ils semblent retenus par son professionnalisme. Elle me l'a expliqué clairement, l'amour, ça n'est pas pour les voleurs. Elle a apprise à se fermer à ce genre d'émotion, à être rationnelle. Ainsi, c'est le robot qui tombe ouvertement amoureux, et l'humaine qui n'appréhende pas avec sérénité le concept. Drôle d'histoire...

Notre premier moment de proximité physique -lorsqu'elle me domine, de sa nudité presque complète, furieuse, bestiale- resurgit, avec un luxe de détails, jusqu'au son de sa voix, jusqu'aux lumières sur son corps, jusqu'à son odeur. Cette scène, je la connais parfaitement. C'est sur elle que j'ai... des images nocturnes, de plaisir, traversent mon esprit. J'essaie de les balayer, mais elles apparaissent assez nettement.

Ça n'est, enfin... Désolé.

Nous y sommes, après tout. Même si j'en ai un peu honte, c'est un élément comme un autre. Alors oui, je me suis masturbé, me servant du souvenir que j'avais d'elle. Elle ne réalise pas à quel point elle est désirable. L'a-t-elle seulement envisagé ? L'envie que j'ai, à cet instant, où nous sommes physiquement si proches, de la prendre dans mes bras, de ressentir sa peau sur la mienne ? Elle est si pure, je n'ai jamais surpris, dans sa tête, la moindre pensée qui aurait pu trahir la moindre libido. Le désir charnel lui est étranger, peut-être même n'en a-t-elle jamais ressenti. Pire, je sens que le sujet la dégoutte, la répugne, l'origine en est profonde. Une blessure d'enfance, sa mère, elle m'en a déjà parlé.

Je crois que tu en as assez vu. Je commence à fatiguer. Je vais arrêter là, d'accord ?

Le flux de pensées arrête de lui parvenir, la laissant un peu confuse. J'avoue que pour ma part, retrouver un peu d'intimité me rassure. Je n'ai pas été trop libidineux, ni trop obscène, tout en restant fidèle à moi-même et ne lui cachant pas les choses. L'expérience m'a laissé fatigué sur le plan de mes pouvoirs : transmettre autant de matière est épuisant, mais extatique sur un plan physique. Mon cerveau, après cette communion, cette fusion partielle, après avoir communiqué si étroitement avec un autre esprit, est surexcité... comme le reste de ma personne. Heureusement, elle ne peut plus se rendre compte directement en lisant mes pensées, et je suis suffisamment habillé pour que ça ne se voit pas trop. Je remarque sur le coup que j'ai choisi un pantalon peut-être un peu trop serré.

Puis, soudain, je sens son corps contre le mien. Je ne sais plus à quoi je pensais, pourquoi j'ai raté le cheminement qui l'a mené à prendre une telle initiative, mais sur l'instant, je m'en fiche. Le mouvement vient d'elle, de sa propre volonté, je n'ai rien eu à faire. Elle a enfin fait un pas vers moi, d'elle-même ! Il me semble que c'est la première fois que cela arrive. Je tremble d'émotion. Je laisse échapper un petit son, entre le gémissement et le glapissement, entre la surprise et le ravissement. Je l'étreins à mon tour. Ma bouche hésite, timide, frôle son menton. Je me relève légèrement de ma position assise, pour être à sa hauteur. Son corps est si proche, presque aussi proche que m'a paru son esprit un peu plus tôt... sans doute pas tout-à-fait. Je n'en ai rien à faire. Ma bouche remonte vers ses lèvres. Je ne veux pas la dénaturer, aller contre sa volonté. Tant pis, si elle n'en a aucune envie, je m'y ferais. J'espère juste que mon érection, qu'elle peut peut-être sentir, dans cette position, ne gâchera pas tout. Si je suis capable de contrôler mes actes, je ne peux pas maîtriser parfaitement mon organisme. Ma bouche trouve la sienne. Je ferme les yeux.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 08 mai 2013, 19:04:51
Archie s'est relevé. Nous sommes tout les deux debout, nous tenant l'un l'autre. Je sens son visage bouger, ses lèvres viennent au contact des miennes. J'y réponds en appuyant un peu dessus, qu'il sache que je ne le repousse pas. Et en me serrant plus contre lui, je sens son excitation. Il m'est difficile de l'ignorer, puisqu'elle s'appuie sur ma cuisse. J'ai un léger blocage, mais je passe outre. J'ai confiance en Archie, il n'est pas du genre à abuser de la situation, non ?

Après ce baiser, je recule. Même en ayant accepté Archie, mes lèvres sont restées fermées. Et comme je ne sais pas trop quoi dire, j'esquive ma gêne en sortant des rations cachées dans un coin, et en en donnant à Archie. Manger occupera ma bouche, le temps que je trouve quelque-chose à dire. J'ai eu cet élan d'affection, je sais maintenant mes sentiments et ceux d'Archie, mais je reste encore peu sure de la marche à suivre. Je ne sais pas ce qui est à faire, et quand.
La collation se termine sans que je ne trouve quoi dire. Ce silence me pèse d'autant plus que c'est de mon fait, alors j'essaye de dire quelque-chose.
Je jette un oeil sur mon lit. Enfin, lit... Une planche avec un tas de couvertures dessus. Sans doute pas le grand luxe. Et puis, il est conçu pour une personne. Du coup, je commence à stresser. Moi, dormir dessus, j'ai l'habitude, mais Archie ? Pas sur que dormir dessus soit agréable pour lui...

" Il n'y a qu'un seul lit... Ça ira pour dormir ? "

Urg... Bien joué Vincente. Tu ne peux vraiment pas faire mieux ? Dis-lui qu'il gêne, aussi !

" Je veux dire, on y sera à l'étroit... et collés... "

D'accord, tu ferais mieux de te taire, en fait, tu ne sais pas dire tes pensées.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Archie le vendredi 10 mai 2013, 01:12:12
Je ne prête même pas attention au repas que je suis en train d'engloutir. Pour l'appétit, c'est très mauvais, peut-être aurais-je encore faim bientôt. Mais cette perspective, je ne la crains pas trop. Je regarde vaguement Vincente se nourrir de même. Les rations sont de toute façon roboratives, à défaut d'être réellement savoureuses, elles me maintiendront en forme. Il faudrait, un jour, que je lui montre la Terre. Que je l’emmène dans un restaurant gastronomique, que je lui fasse profiter d'une séance de cinéma. Elle n'y sera sans doute pas très à l'aise... ces derniers temps, je me suis demandé si elle n'est pas réellement dans son élément que lorsqu'elle est seule. C'est ce qu'elle pense plus ou moins, je crois ; j'essaie de me persuader du contraire. Que je peux lui offrir plus de bonheur que de gêne.

Je songe que nous avons quand même fait un grand pas l'un vers l'autre. Elle devrait avoir un peu moins de difficultés à me parler, à présent, maintenant qu'elle a pu ressentir mon esprit, qu'elle a vu que, si l'ont excepte peut-être la question de la sexualité qui la dégoûte, je n'étais pas dans une disposition tellement différente de la sienne. Elle a eu la confirmation de mes sentiments, aussi. Je suppose que peu de personnes ont pu en avoir dans leur vie une preuve aussi nette, aussi matérielle, du moins... pour peu qu'elle fasse confiance au processus, évidemment. Sans doute a-t-elle aussi fait le point sur ce qu'elle ressentait, elle, et finalement, c'était peut-être le principal, ce qui bloquait le plus.

Lorsqu'elle se remet à me parler, je suis un peu vaporeux. Mon cerveau, d'habitude hyperactif, est, passé la phase d'excitation, relativement calme. Il se repose des efforts intenses qu'il a eu à fournir, ce qui impacte légèrement sur ses performances, quand bien même elles restent largement supérieures à la moyenne. Je sursaute presque, et je dois me plonger dans ses pensées pour comprendre ce qu'elle cherche à me transmettre. Il faut dire que son message est un peu confus, cependant, j'en capte l'essentiel.

-Pour moi, c'est pas vraiment un problème. J'ai passé les deux dernières nuits dans la rue... enfin, je suppose.

Je lui adresse un sourire distrait, toutefois, cela me rappelle que cela doit maintenant faire quatre jours que ma seule toilette se résume à une plongée dans une fontaine. L'hygiène est loin d'être parfaite, sur Terra, encore qu'elle soit un peu meilleure que celle qu'engendrait la peur de l'eau du moyen-âge. Heureusement, je n'ai pratiquement pas bougé. Le soleil de Nexus aidant, je sens quand même un peu la sueur, c'est la seule odeur qui ressort réellement, le reste étant couvert par un parfum de brûlé. J'hésite à l'évoquer, puis je m'abstiens... Je ne vois aucune solution à ce problème de toute façon, je ne vais pas aller prendre une chambre dans une auberge, et les bains publics sont tous fermés à cette heure.

-Tant que ça te dérange pas. Je pense même que ce sera l'une des plus belles nuits de ma vie. Ça pourrait être n'importe où, tant que c'est avec toi.

Je détourne vivement le regard. Je maudits mon esprit qui multiplie les sous-entendus douteux. Autant mettre les choses au clair, je ne peux maintenant plus être sûr que l'un d'entre-eux ne l'ait pas traversée. Pour le coup, c'est moi qui devient un peu confus, et désordonné.

-'fin, je parle juste de dormir. Pas d'aller plus loin. Sauf, fin, sauf si tu veux, quoi...

''À l'étroit, collés'', ses paroles me reviennent, et il me semble que sa façon de l'évoquer n'est pas parfaitement chaste, elle même. Ou alors c'est moi qui délire, je ne sais plus quoi penser. Mais j'ai bien compris la leçon, et je crois que j'ai réussi partiellement à me résoudre. Je ne sais même pas pourquoi j'ai ajouté la dernière partie. Heureusement, elle était assez neutre sur le ton, elle ne devrait rien changer, rien briser de ce qui reste de la magie du moment. Je l'espère.
Titre: Re : Le coup de filet [VV]
Posté par: Vincente Valentyne le mercredi 15 mai 2013, 00:23:55
De toute façon, il est trop tard pour improviser une solution de rechange. Il ne me reste qu'à dormir au coté d'Archie. Je n'avais jamais dormi avec un garçon dans le même lit, mais pour autant, je n'avais pas les mêmes appréhensions avec le jeune garçon en face de moi. Il m'en restait quelques-unes, oui, mais pas autant que si ça avait été quelqu'un d'autre. On peut considérer cela comme une preuve, comme un progrès, non ?
Faute de mieux, je me prépare à aller dormir. Je commence par me déséquiper de ma dague, mes ceintures et sacoches, puis ôte mon manteau et mes bottes. En jetant un coup d'oeil à Archie, je n'arrive pas à m'empêcher de penser : espère-t-il que j'en enlève plus ? Si tel est le cas, il sera déçu : les nuits sont fraiches, si je me déshabille d'avantage, je risque d'avoir froid. Puis sans autre forme de cérémonie, je me glisse entre les couvertures qui composent le "lit".

Je sens Archie me rejoindre, la chaleur de son corps quand il touche le mien. Je suis tellement troublée que j'en deviens incapable de parler. Si Lena me voyait ! J'entendrais parler du pays, à coup sur. L'étroitesse de la couche fait qu'il est impossible d'y tenir à deux sans être en contact, et je repense aux nombreuses fois où le corps d'Archie trahissait don état intérieur, sans parler des scènes aperçues dans son esprit. Il ne tentera rien, pas vrai ? Ce n'est pas son genre...
Puis, conditionnée par l'habitude, mon cerveau me plonge dans le néant. Juste avant de m'endormir, j'ai la satisfaction de savoir qu'au moins, j'aurais un allié pendant la nuit.