Quant l’hiver prenait possession des lieux, Hel se sentait chez elle. Depuis peu, quitter le Royaume des Glaces était devenu une sorte d’habitude. La déesse se plaisait à s’envoler et à voguer, à la recherche de misérables êtres à torturer – quand son humeur dévastatrice prenait vie – ou de statues de glaces à créer. Elle ne restait plus cloîtrée dans son royaume, à compter les morts. Ils avaient l’éternité, et pouvaient bien se permettre d’attendre un peu qu’elle fasse un petit tour ! Le monde hors des Enfers était si amusant pour elle … Des démons, des êtres fantastiques, des combats singuliers, des hommes et femmes avec qui s’amuser : elle avait un palmarès étonnant de petits jeux plaisant. Ainsi, en cette fin d’après-midi de Janvier, après un long ennui qui commençait sérieusement à lui casser les pieds, elle attrapa une délicieuse robe inspirée de la Renaissance [ http://www.corde-micante.de/images/damen/renawellenlitze100.jpg ], toutes en broderies blanches et bleu canard, un long manteau aux bords de fourrure blanche, toute en soie éclatante, choisissant sa coiffure habituelle et aux airs aristocratiques, et sortit de son palais.
Elle s’échappa rapidement, et posa vite pied sur terre. Une terre qui baignait dans la pénombre, annonçant une nuit des plus radieuses et des plus calmes. Elle observa les alentours attentivement, puis avança d’un pas presque sûr d’elle vers la ville, quittant les lieux désertiques. Ses talons – elle n’aimait pas sa petite taille – claquaient au sol avec un son raffiné. Ses yeux perçants regardaient face à elle, scrutant chaque détail, chaque marque de vie. A cette heure là, les enfants s’endormaient, et ne pouvaient pas se laisser bercer par la douce clarté de cette nuit délicieuse. Hel se balada dans ces rues, sans peurs ni craintes, la tête haute. Ses vêtements, qui ne dataient pas de l’époque actuelle, attiraient certains regards, auxquelles elle ne prêta pas attention. Elle ne désirait qu’une chose : l’eau.
Elle n’avait pas soif, non, vous n'y êtes pas . Elle ne voulait que voir l’eau, la mer, avec cette lumière béante de la lune qui laisse sa trace sur les flots. Quand elle arriva enfin à destination, elle eut un soupir de plaisir. La mer était légèrement soulevée par les vagues, c’était un délice. Le bruit entraînait déjà la déesse, et sonnait dans ses tympans avec un rythme exquis, et la lumière de la lumière faisait baigner une atmosphère presque mystérieuse en ces lieux sacrés autrefois, touristiques aujourd'hui. Elle se posa donc, rapidement, sur le sable, debout, les mains posées sur son ventre, dans une position statuaire, tandis que sur ses lèvres naissait un sourire insidieux. Elle leva, tout à coup, vivement, les mains, et ouvrit ses paumes en direction de cette mer si douce, si vivante.
En un instant, les vagues s’immobilisèrent, et, sous le choc, sa coiffure tomba, dévoilant sa chevelure blanche longue, qui tomba tout autour de ses épaules, coulant sur elle. Une partie de la mer, face à elle, venait de se transformer en glace. Une glace fine, une particule douce et tendre. Elle eut un rire, un éclat de rire soudain, et admira son travail, avec toujours ce sourire que vous jugerez malsain sur les lèvres. Elle fit rapidement demi-tour sur elle-même, laissant le plaisirs aux humains, le lendemain, de constater cela, et d’alimenter des légendes plus ou moins glauques à son sujet. Elle avança donc, faisant dos à la mer, et s’arrêta un peu, admirant ce spectacle : la partie glacée se faisait frapper par les autres vagues, qui, elles n’avaient pas cessées de remuer. Et, comme une voleuse, elle rabattit sa capuche sur son visage, camouflant sa figures aux lueurs lunaires, avant de recommencer sa marche calme.