Marie n'a que faire de ces deux crétins, excités de baiser en public.
Le japonais, qui doit se croire irrésistible, mais est d'un ridicule sans nom, avec sa chemise tâchée, et ses faux-semblants de karatéka. En plus, son lien fait de la veste de costume était minable.
La française, qui lui a provoqué un haut-le-coeur en passant devant elle, et qui ne semblait même pas se rendre compte de la puanteur qu'elle dégageait. Comment peut-on exciter un homme ainsi?
« La bonbonnière, voilà un salon de thé à vite oublier ! ». C'est vrai que, entre les petits vieux impassibles et les jeunes aux jeux stupides, ça n'a pas la quiétude et la courtoisie qu'on est en droit d'attendre de tels lieux. Au moins le thé était-il savoureux, et d'un prix modique.
Mais Marie est contrariée, car cette odeur nauséabonde continue à lui picoter le nez, et c'est alors qu'elle se rappelle que quelques éclats des rejets de la donzelle ont jailli sur ses bas. Avec horreur, elle aperçoit même trois ou quatre tâches orangées qui achèvent de lui retourner le cœur. Décidément, elle n'aurait pas dû se mêler des affaires d'autrui, d'autant plus que c'était pour prendre la défense d'une allumeuse qui n'attendait que de se faire sauter !
« Bon, voyons, où vais-je trouver des bas noirs ? D'ailleurs, ça se dit comment, ça ? ». Marie a fait quelques pas dans les rues piétonnes de Seikusu, mais les enseignes ne sont guère parlantes, et elle n'a aucun moyen de demander son chemin, qui plus est pour trouver une boutique de lingerie ou autre magasin vendant des dessous. Et, quand elle découvre la réponse de son traducteur quant à l'idéogramme désignant une boutique de lingerie, c'en est fini de ses espoirs ! Autant déambuler, en regardant les vitrines, jusqu'à ce que...
Cette fois, ce n'est plus contrariée mais agacée, qu'est Marie. Si elle avait Bruce Lee sous la main, elle l'attacherait sur le cheval d'arçon, et lui zébrerait les fesses à grands coups de lanière, avant de lui défoncer l'anus avec le tout dernier strap-on qu'elle a trouvé, et de le jeter, juste assommé d'un petit cachet pour anesthésier sa mémoire proche, sur un trottoir. Nu et le cul en sang, il aurait dans le meilleur des cas la honte de sa vie sans en savoir les origines, et il subirait dans le pire des cas ce que Marie avait enduré lorsque ses tortionnaires l'avaient jetée dehors. Juste retour des choses !
Quant à la donzelle, elle aurait tout autant à répondre de ses actes, si Marie lui tombait dessus. Tiens, elle la forcerait à ramper à terre, jusqu'à venir elle-même lécher ses relents, et redonner leur perfection à ses bas noirs. « Peut-être même que je lui ferais lécher aussi les semelles de mes escarpins » se dit Marie. « Hum, ça doit être excitant de réduire à moins que rien une telle traînée, et de faire claquer la badine au moindre mot de travers, surtout qu'elle semble prédisposée à défier l'autorité ». De troublantes images se laissent alors glisser dans l'esprit de Marie, tandis que son sexe sent très nettement la chaleur monter.
« Alors ma chérie, désolée pour ce cinéma mais je meurs de faim, tu ne pourrais pas m'offrir un pain au chocolat ? ». Au moment où elle entend ces mots, d'une voix qu'elle n'a pas oubliée, Marie sent aussi une main enserrer son poignet droit. Geste d'auto-défense, elle tire aussitôt, mais l'autre tient bon, à lui faire presque mal. Marie se retourne, vraiment furieuse.
« Alors, ma cocotte, vous allez bien m'écouter, et ce sera la dernière fois. Déjà que je n'avais pas envie de me faire sauter par votre minable, je suis encore moins votre chérie, surtout vu comme vous empestez! Donc, s'il vous faut juste de quoi vous payer un truc à manger, pas de souci, je vous donne de quoi. Allez manger, allez vous laver, et oubliez-moi ! »
Ses yeux ! Il ne faut pas que Marie regarde ses yeux, ou elle va fondre, et l'autre va bien s'en rendre compte. Elle a de ces yeux, cette petite nana. À la fois piquants et doux. Piquants quand ils la défient pour que s'abatte la badine. Doux quand ils la supplient d'arrêter le supplice. Et sa main, sa peau si douce, qui doit être un délice à caresser. Les pensées folles accourent, et pourtant, Marie essaie de s'en dégager, mais l'autre tient bon.
« Bon, lâchez-moi maintenant, ça suffit ! Je déteste qu'on me tienne comme ça, et, en plus, j'ai très mal à cette épaule, par votre faute. »