Baignant dans le grand bain, Luna attrapa avec sa queue un produit, et le répandit dans l’eau, créant de la mousse et des bulles. Elle alla ensuite se coller contre le bout du bain, reposant son menton pour observer la scène. L’un des écrans s’agrandit, montrant la scène du combat, filmée depuis des caméras invisibles. Le guerrier avait un trident, et choisit de ne pas fuir, préférant tuer la volée de vautours, en utilisant une maison abandonnée pour s’en sortir. Le combat se poursuivit jusqu’à la place du Marché, et l’homme continua à les affronter, se servant de son trident pour enfourcher les vautours, se servant de leurs corps pour distraire les autres, afin de planter leurs pointes sur eux. Au bout d’un certain temps, le jeune homme réussit à s’en sortir. Silencieusement, le Drow avait observé le combat, jusqu’à ce que les vautours soient tués.
« Taux d’audience ? demanda-t-il à l’intention d’une femme.
- En élévation, Monsieur. Hardos se tient maintenant sur la place du Marché. »
C’était un lieu sinistre, où des étals étaient balayés par le vent, les anciennes toiles servant à protéger les tables de la pluie étant balayées par le vent. Une grande place assez sinistre., où on pouvait entendre les coassements des corbeaux. Luna s’extirpa du bain, et se faufila dans une serviette, roulant sur le sol, essuyant son joli corps. Elle se redressa, envoyant de l’eau un peu partout en secouant ses longs cheveux.
« Il est temps d’inviter le public à se prononcer, alors. »
La femme hocha la tête, et lança un programme annexe, un sondage à effectuer pour permettre au public de décider de la suite des évènements. Il suffisait de voter entre trois propositions. Avançant silencieusement, Luna se posta à proximité du Drow, sa queue remuant de droite à gauche, et elle regarda les différentes propositions qui circulaient sur l’écran :
1°) Hardos est attaqué par un Minotaure ;
2°) Hardos rencontre les rescapés de l’auberge ;
3°) Hardos tombe sur une bande de pirates réfugiés dans la ville.
Un compte à rebours se mit à filer, et le Drow regarda à nouveau ce qui se passait à l’écran, avant de contempler la neko. Cette dernière s’était mise un peu de parfum, sachant très bien que sa beauté était la seule chose intéressante. Le Drow la contempla froidement, et Luna se retint de poser des questions. Ça aurait été une raison suffisante pour qu’il la batte, et elle n’avait pas encore envie qu’on la frappe. Ne sachant pas trop ce qu’elle devait faire, Luna se lécha les doigts, s’allongeant à moitié sur le sol, et rejoignit une femme qui travaillait sur une machine, et qui était belle. Elle se frotta à sa jambe, faisant sursauter la jeune femme. Voyant cela, le Drow tira sur la chaîne, faisant tomber Luna sur le sol.
« Ne dérange pas le personnel !
- Pa… Pardon… »
Elle avait juste eu envie d’un petit câlin, mais c’était visiblement trop pour cet abominable Drow. Entre-temps, les votes s’étaient décidés pour la seconde option. Le Drow donna donc de nouvelles instructions.
L’auberge était à proximité de la place du Marché, et l’entrée était solidement barricadée pour se protéger des monstres qui rôdaient dehors. Cependant, l’auberge comprenait aussi, comme toute auberge, des caves à vins, et il existait, dans ces dernières, des trappes secrètes, hermétiquement fermées, qui menaient directement à des cavernes le long de la falaise. L’odeur des humains se répandit, et atteignit assez rapidement les narines de Warg qui avaient terriblement faim.
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Ils sentirent la nourriture, et se ruèrent en grondant vers l’auberge. Les sentant venir, les rescapés, terrorisés, ne comprenant rien à ce qui se passait, décidèrent de bloquer les portes des caves. Intriguée, Luan pouvait les voir, dans le grand salon. Ils avaient allumé un petit feu, et il y avait plusieurs enfants, des femmes épuisées, des hommes tout autant éreintés, équipés d’épées, d’arbalètes, et autres armes provisoires et rouillées.
« Qui sont ces monstres ? » s’égosilla une femme.
Un bébé se mit à pleurer, et le Drow sourit. Avec tout ce raffut, Hardos devrait logiquement se diriger vers eux. L’auberge était dans un coin de la place du Marché, et les pleurs des bébés ne manqueraient pas d’attirer du monde, ainsi que les cris des femmes. Le Drow tourna sa tête vers Luna, comme pour la narguer à nouveau.
« Tu as de la chance ; le Minotaure n’explorera pas à nouveau ton fessier… »
Luna ne répondit pas, grommelant. Le Minotaure avait beau être un monstre poilu, le monstre de sa Maîtresse disposait d’un membre masculin, d’une virilité, et, lors de la dernière épreuve, il avait littéralement écrasé la tête d’un malheureux entre ses doigts, et, en guise de récompense, avait eu droit au petit cul de Luna. La pauvre en avait eu tellement mal qu’elle avait du passer une semaine pour s’en remettre, ce qui, avec les pulsions sexuelles incessantes de sa Maîtresse, n’avait pas été bien difficile. La vie de neko, parfois, pouvait être très difficile !
Pour l’heure, les Warg continuaient à se remuer contre les portes, leurs coups furieux sur le point de faire céder la résistance des rescapés.
Le Général était mort, mais il était probablement encore trop tôt pour chanter victoire. Zaëlle, de son côté, s’était redressée, et entreprenait de suivre Hardos. Avec la mort de ce dernier, retraverser les différentes épreuves en fut pas particulièrement difficile. La Tekhane songea à recharger ses armes, se disant qu’ils ne sortiraient pas sans croiser d’autres saloperies. Ce serait autrement bien trop facile ! Ils remontèrent dans les hauteurs du temple, pour constater que les squelettes étaient désormais totalement inertes. C’était fini. Au moins pour eux. Restait maintenant à espérer que les Rejetés n’entreraient pas… Ceci ne fit qu’inciter Zaëlle à se dépêcher. Elle était blessée ici et là, avec quelques ecchymoses, saignait par endroits,
« Tout ça, c’est trop calme… Ça ne me dit rien qui vaille » lâcha Zaëlle.
Elle ne fut effectivement pas déçue. Dans une pièce, une demi-douzaine de singes leur tombèrent dessus ! Ils n’avaient toutefois rien à voir avec les singes affectueux des jungles tekhanes. Leurs yeux démoniaques suffisaient à s’en rendre compte. Les singes bondirent furieusement sur eux, utilisant leur agilité, mais ils ne posèrent pas vraiment de difficultés. Zaëlle s’en persuada en pointant son arme vers l’un des monstres. Elle appuya sur la gâchette, et une partie de la tête du singe explosa. Néanmoins, un autre singe bondit dans les airs, utilisant sa queue pour s’accrocher à une espèce de lustre ancestrale, s’en servant pour frapper avec son pied la tête de Zaëlle. Elle chancela, et le singe planta ses dents dans le bras qui maintenait son pistolet. Poussant un cri de douleur, Zaëlle tomba à la renverse en lâchant son arme, et utilisa son autre main pour sortir un couteau,
« Lâche-moi, saloperie ! »
Les yeux maléfiques du singe, ruisselant de rage, la regardaient, et elle sentait son sang s’échapper de ses blessures. Elle parvint néanmoins à sortir son couteau, et le planta dans la gorge du singe, qui poussa un faible couinement de douleur. Zaëlle le repoussa ensuite, et contempla sa blessure. Les longues dents de ce singe démoniaque s’étaient enfoncées dans sa peau, découpant sa combinaison. Furieuse, elle pointa son arme sur le singe qui l’avait mordu, et lâcha plusieurs balles supplémentaores.
« ’Fais chier ! » pesta-t-elle.
La blessure n’était pas vraiment superficielle. Zaëlle ne pouvait plus se permettre de traîner. Elle sortit une seringue, et se la planta dans le cou. La douleur en serait atténuée provisoirement, mais pas éternellement. Elle se dépêcha de partir, sans un regard pour les cadavres, et ouvrit une grande porte à double battant menant droit sur une espèce de salle circulaire. Il y avait au centre une table ronde, avec quantité de parchemins, de manuscrits, et de livres ouverts dessus. Intriguée malgré elle, Zaëlle inspecta les feuilles, et aperçut sur la gauche une porte défoncée, avec, à l’intérieur, une multitude de cages où des bruits s’agitaient… Comme si des choses tapaient contre les barreaux.
Sortant son arme, Zaëlle s’avança dans l’embrasure de la porte, et comprit d’où venaient les singes. Elle était visiblement dans une espèce de laboratoire, et pouvait voir quantité de singes frapper furieusement contre leurs cages, ces dernières tanguant sur place. Des singes aux yeux jaunes, qui luisaient furieusement. Dans des coins, rangées le long des murs, des tables avec des parchemins, des livres, et des produits chimiques se trouvaient là. Fronçant les sourcils, Zaëlle retourna vers la grande table, et consulta l’un des papiers. Il s’agissait probablement des notes du Général fou :
« 12 Février
J’ignore exactement ce qui se passe ici, mais, ce dont je suis sûr, c’est que ces artefacts drow nous aideront énormément dans mes recherches sur la génétique. Mitnik a bien fait de m’envoyer ici. Les archéologues ont découvert quantité de runes magiques encore actives, alors que tout indique que cet avant-poste a été abandonné il y a au moins des siècles ! La magie drow est vraiment fascinante… »
Fronçant les sourcils, Zaëlle trouva un autre papier.
« 39 Mai
MITNIK ! MITNIK ! MITNIK ! MITNIK ! MITNIK ! MITNIK ! TU ME PAIERAS ÇA, MITNIK ! COMMENT AS-TU PU ME FAIRE ÇA ?! »
Zaëlle fronça les sourcils. « 39 Mai » ? Ce type avait l’air sacrément atteint. Elle chercha d’autres papiers, d’autres notes, et en trouva une sur une table.
« 21 Mars
Les expériences sur les singes avancent vite. Les mutagènes fabriqués à partir de la magie drow ont produit d’excellents résultats sur le sujet Bêta-Douze. Il est malheureusement à regretter une forte agressivité… En réalité, je pense que le mutagène agit de manière irréfléchie sur les hormones. C’est ce qui ressort de l’expérience de séparation entre Bêta-Dix et Bêta-Onze. Ce problème d’accroissement hormonal entraîne une jalousie viscérale, une agressivité meurtrière… Il est temps de mettre fin à la ligne des Bêta, et d’améliorer le mutagène… J’en ai sûrement assez pour faire plaisir à Mitnik.
Je ne peux qu’espérer que ce dernier saura se montrer clément. Lors de notre dernière réunion, il a exigé des résultats convaincants. J’espère qu’il sera satisfait par ce que je lui montrerai. J’ignore ce que Mitnik recherche dans ces ruines, et ce qu’il fabrique, mais c’est assez fascinant. »
Zaëlle poussa soudain un cri de douleur, sentant des spasmes remonter le long de son corps.
« On a pas le temps pour ça… On fout le camp ! »
De ce qu’elle arrivait à comprendre, le Général était un ancien scientifique qui avait été trahi par Mitnik, et qui avait fait des expériences sur les singes. Ces derniers commençaient à s’échapper en renversant leurs cages, avant de les poursuivre. Zaëlle était naturellement loin de se douter que, là encore, tout avait été organisé par les services d’Anaulriina, par l’entreprise qu’elle dirigeait. La folie progressive de Mitnik était le résultat d’une intoxication lente utilisée par les Drow travaillant pour cette dernière, et c’étaient eux qui s’étaient débrouillés pour que cet alchimiste arrive aux services de Mitnik, et trouvent dans cet avant-poste des ruines drow. Le manque de connaissance que les espèces du Dessus avaient sur celles du Dessous, notamment les Drow, étaient ici un plus. Cet avant-poste drow était entièrement fictif, et n’avait jamais existé. Il était bien trop près de la surface pour convenir aux exigences des Drow, et on ne trouverait jamais dans un avant-poste drow des runes drow, ou des parchemins. N’importe quel Drow un tant soit peu cultivé savait pertinemment cela, mais on savait dans le fond très peu de choses sur les Drow.
Zaëlle et Hardos parvinrent de leur côté à sortir du temple, et coururent rapidement sur le sol, retournant vers le véhicule militaire. On pouvait entendre les Rejetés grogner et hurler, s’attaquant au temple. Le Général était mort, les monstres pouvaient désormais s’en prendre à ce dernier. Zaëlle et Hardos parvinrent sans difficulté près de la voiture, et, alors que Zaëlle allait se faufiler à l’intérieur, sentant la douleur revenir rapidement, un Rejeté sauta brusquement sur le toit de la voiture, faisant trembler cette dernière. Zaëlle n’eut pas le temps de réagir qu’elle vit le Rejeté rugir avant de la frapper du revers de la main à la tête. Sous le coup, la Tekhane tomba au sol, et le Rejeté bondit sur Hardos, tandis que d’autres ne tardèrent pas à débarquer. Zaëlle tenta de se relever, mais se reçut un coup de pied en plein milieu du dos. Un coup surpuissant, qui la fit hurler de douleur lorsqu’elle entendit plusieurs craquements singuliers. Un immense Rejeté la souleva comme un fétu de paille, poussant un hurlement, et la balança contre un pilier. Zaëlle n’eut pas le temps d’hurler qu’une main s’écrasa sur sa gorge comme un étau de fer. Elle vit la face haineuse du Rejeté, et les deux mains du monstre s’agrippèrent ensuite à chacune de ses joues, et commencèrent à tirer, s’enfonçant dans sa chair.
Le Rejeté fit preuve de sa force surhumaine, et ne tarda pas à proprement décapiter Zaëlle. Il arracha sa tête de son corps, et brandit cette dernière en poussant un rugissement victorieux, comme une espèce de trophée, tandis que le corps sans vie de Zaëlle s’écrasait mollement sur le sol.
« Voilà qui va bien nous rapporter trois points d’audience songea le Drow avec un léger sourire.
- Beurk ! s’épouvanta Luna. Qui pourrait aimer voir ça ?
- Les jeunes Tekhans, principalement », répliqua le Drow.
Le Drow tenait dans sa main la tête dégoulinante de sang de Zaëlle, et planta ses dents dans une joue, en arrachant une partie, l’avalant comme une côte de porc, avant de jeter la tête sur le sol, et de frapper avec ses poings son torse. Ce fut ensuite que la tête du Rejeté explosa. Des myriades de points rouges se mirent à pointer, et des balles frappèrent les Rejetés, tandis qu’un grondement terrifiant se faisait entendre. La cavalerie, comme à son habitude, arrivait en retard. L’espèce d’immense foreuse qui avait sauvé Hardos des araignées apparut à nouveau, ses immenses projecteurs éclairant la zone. Les tourelles de défense automatiques avaient tiré avec une précision exemplaire. Les munitions de Zaëlle, qui avaient un calibre de 13mm environ, n’étaient pas suffisantes pour percer la carapace solide des Rejetés. Celles des mitrailleuses automatiques faisaient environ 50mm. Suffisantes pour couper un corps en deux. La foreuse s’arrêta rapidement, et des hommes en armure en jaillirent, avant de voir le cadavre de Zaëlle.
« Officier à terre ! Je répète : officier à terre ! Procédons à l’extraction du civil ! Remuez vos putains de culs, les gars ! »
Deux soldats marchèrent rapidement vers Hardos, le soulevant, et le conduisirent dans la foreuse. Les Rejetés, après la surprise initiale, se mirent en effet à attaquer massivement la foreuse, sautant sur le toit, frappant les côtés, s’acharnant sur les vitres solides. Ils arrachèrent l’une des mitrailleuses, et la foreuse fit un demi-tour rapide, avant d’essayer de s’éloigner. Hardos, de son côté, fut amené à l’arrière de la foreuse, où les soldats s’entassaient. Au centre, une image tridimensionnelle montrait le Commandant Nella.
« Qu’est-ce qui se passe ? Je veux des explications immédiatement !
- Nous sommes attaqués ! »
Des coups puissants s’abattaient sur le plafond, et l’une des trappes permettant d’aller sur le toit fut arraché d’un coup sec, montrant la face hideuse d’un Rejeté.
« Ils sont entrés ! Feu à volonté !
- Bandes d’enfoirés !!
- HAAAAAAAAAAAAAAAA ! »
Un chaos de balles se mit à rugir vers le plafond, mais les Rejetés bondirent à l’intérieur, s’abattant sur les soldats. La foreuse, de son côté, tanguait dangereusement, et la communication avec le Commandant fut rompu. A l’avant du cockpit, un Rejeté avait réussi à briser la vitre, et sa main attrapa le chauffeur de la foreuse par le col, le soulevant. La tête du chauffeur heurta le plafond, et il perdit le contrôle de son véhicule, qui longeait un ravin. La foreuse partit sur la droite, et tomba dans le ravin. Elle rebondit sur les rocailles, décrivant une série de tonneaux, avant de s’écraser dans les profondeurs du ravin, se découpant en deux. Certains hommes furent largués hors de la foreuse quand elle fut ouverte, allant s’éclater contre les rochers, ou parvenant par miracle à survivre, tandis que la foreuse, quant à elle, termina sa chute spectaculaire en explosant contre le sol. Un champignon de flammes s’éleva dans les airs, avant de disparaître, laissant place à un incendie sinistre.
Près d’un cadavre, une radio lançait un appel désespéré :
« Ici… Nella… ‘Me recevez ?... ‘Port… Explications ! »
Du fourgon militaire, il ne restait plus qu’une carcasse enflammée et de nombreux cadavres, certains étant méchamment dispersés. Une belle image que Luna voyait avec un frisson d’horreur. Elle avait pitié pour ces pauvres hommes, et baissa la tête. L’heure approchait, elle pouvait le sentir. Mais elle se sentait bien mieux dans cette tour isolée que dans ce terrain de jeu. Même si elle savait que le Drow ne laisserait personne la tuer, sous peine de s’exposer aux foudres d’Anaulriina, ça n’empêchait pas qu’elle pouvait toujours être torturée. Anaulriina le faisait bien, et Luna était encore trop jeune pour accepter qu’on puisse la torturer. Elle essayait donc de se faire toute petite sur son tapis, comme si elle espérait naïvement qu’on l’oublierait. Peine perdue, naturellement, car, si Luna était effectivement la protégée de la responsable de cette organisation, le Drow avait une grande liberté d’appréciation, et comptait bien envoyer cette insolente sur le champ de bataille. Mais pas tout de suite… Pas encore…
« Vous avez repéré Hardos ? lâcha-t-il aux opératrices.
- Non, Monsieur… Mais ses signes vitaux continuent à émettre…
- Tant mieux. Le public a horreur de fins miteuses comme celle-ci. S’il est toujours en vie, retrouvez-le ! »
La chaîne diffusait pour l’heure en boucle l’image de la destruction du camion, montrant ensuite, de loin, le carnage. Finalement, les capteurs réussirent à retrouver la signature thermique d’Hardos, mais l’une des opératrices fronça les sourcils :
« Je… Euh, Monsieur, je… Je crois qu’il y a un problème…
- Lequel ? »
L’opératrice appuya sur un bouton, et, sur l’écran central, principal, on vit, non pas Hardos, mais une femme, qui avait l’air secoué, et parlait dans une radio. L’image parlait d’elle-même. Le Drow fronça les sourcils, et esquissa un léger sourire.
« Intéressant…
- Le risqué d’erreur est nul, Monsieur…
- Je me doute bien. Il semblerait qu’Hardos ait quelques atouts secrets, notamment des dons de polymorphisme… Ou peut-être une situation de métempsycose… Peu importe… Voilà qui améliorera le côté fan service de la chose… »
La nouvelle version d’Hardos n’avait pas l’air très débrouillarde. Elle s’adressa au Commandant Nella, et une nouvelle image montra instantanément cette dernière, qui était dans un grand bureau, avec une tasse de café chaud sur le bureau, et plusieurs adjoints, essentiellement des femmes. Avant de lui répondre, Nella tourna sa tête vers lesdites adjointes :
« C’est qui, cette conne ? » s’exclama Nella.
Il ne fallait pas entendre le mot au sens premier du terme. Nella était juste surprise. Les adjointes haussèrent les épaules. La reconnaissance vocale ne donna rien, et le Commandant pensa instantanément à une villageoise qui s’était égarée. Essayant de se contrôler, elle tâcha de répondre, malgré les fioritures sur la ligne. Harmony ne put donc entendre que quelques bribes d’explications :
« Civil… Situation… ‘Rien à… ‘Del de merde… ‘Veux parler… Officier… »
Nella trépignait sur son bureau, et frappa du poing, renversant un peu de son café, exigeant qu’on améliore l’état de la ligne. Harmony, de son côté, tentait de soigner un soldat, mais les blessures de ce dernier étaient bien trop graves pour ça, et il ne tarda pas, dès qu’il eut retrouvé l’usage de la parole, à parler, tout en crachant un peu de sang. En haut du canyon, on pouvait entendre les rugissements des Rejetés.
« É… Écoutez-moi, vous… Vous devez fuir, rejoindre le camp, et… Et leur dire… Vous devez partir, Madame, pas me soigner… C’est… C’est trop tard pour moi, et… Et… Un… Un Tekhan se sacrifiera toujours pour une femme. Nos radios sont bousillés, mais vous DEVEZ rejoindre le camp. Ne vous arrêtez pas. Courez. Te… Tenez… »
Le soldat en armure blanche sortit un pistolet, et le tendit à Harmony. Il cracha une nouvelle giclée de sang.
« C’est un Scorpion GT-1. Il tire des balles à un coup, mais les balles sont des mines explosives qui se fixent par voie magnétique. Ouvrez mon armure. Vite, putain, grouillez-vous… Là, ouvrez le compartiment sur mon bras droit… Prenez mon ordinateur portatif. Dépêchez-vous, merde ! Là, voilà… Mettez-le sur votre bras, et configurez-le pour vous ramener au point d’origine. Quoiqu’il arrive, ne vous retournez pas, et préparez-vous à courir. Ces… Ces monstres, ils ressentent la magie. Vous devez leur dire. Retournez au quartier général, et dites-leur que vous… Aaaah… Dites-leur… Dites-leur de les envoyer attaquer la Reine arachnide en utilisant une bombe magique dans son antre. L’explosion magique attirera les Rejetés… Maintenant, grouillez-vous ! Il y a dans cet ordinateur toutes les informations dont… Hum… Dont ils auront be… Besoin. Ne vous cassez pas le cul à me soigner, et courez. Allez, dépêchez-vous, ou je vous flingue ! »
Le soldat n’avait pas vraiment laissé le temps à Harmony de dire quoi que ce soit, tandis que les Rejetés descendaient, se rapprochant en grognant. Le Tekhan sortit une arme, une longue mitraillette, et la pointa vers les Rejetés.
« Bandes d’enfoirés d’enculés de suceurs de tétons refroidis ! HAAAAAA ! »
Le Tekhan appuya sur la gâchette, et une grenade jaillit, provoquant une violente explosion, dispersant les Rejetés. Le Tekhan, qui avait une jambe plus ou moins broyée, poussa un nouvel hurlement en ouvrant furieusement le feu. Un Rejeté courut vers lui, mais il se reçut une chevrotine surpuissante dans le ventre, l’envoyant s’écraser sur le sol, son corps se mettant à fumer à l’endroit où la cartouche perforante l’avait malmené. Harmony n’était plus là, mais elle put quand même entendre le hurlement d’agonie que le Tekhan poussa quand les Rejetés l’atteignirent.
Malheureusement pour elle, plusieurs Rejetés coururent rapidement vers elle, grimpant le long des murs et du plafond, leurs grognements et rugissements étant suffisamment audibles pour effrayer n’importe qui. Le Drow suivait avec attention leur évolution. Ils gagnaient de plus en plus de terrain. Trois Rejetés poursuivaient Harmony sur une longue grotte, une grotte qui semblait interminable, renversant des stalactites sur leur passage, sans que cela ne puisse les arrêter. Ils avaient après tout été conçus par une alchimie reposant sur de la magie noire. La magie blanche était une chose insupportable, et l’ordinateur qu’avait Harmony comprenait justement des informations sur cette attirance.
De plus en plus proches, les Rejetés s’avançaient à toute allure, et il y avait fort à parier que les Tekhans s’identifieraient bien plus à Harmony qu’à Hardos, cette dernière étant après tout une femme. Le Drow réfléchit sur un moyen de tricher pour essayer de la sauver, sans que cela ne se fasse trop voir, mais c’était risqué… Si la ficelle était trop grosse, il risquait d’en prendre plein sa matricule… La scène était digne d’un film d’action tekhan, et il ne manquait plus qu’une petite musique dramatique et nerveuse pour parfaire le tout. Harmony était bien moins débrouillarde qu’Hardos,e t les Rejetés n’étaient plus qu’à quelques mètres…
Ce fut à cet instant que le premier véritable raté de l’émission arriva, annonciatrice du désastre qui allait s’ensuivre.
Des neiges apparurent soudain sur toutes les caméras, ou du, moins sur toutes celles qui étaient à cet endroit précis, avec un message en rouge clignotant, surmonté d’un point d’interrogation :
« INTERFÉRENCES DÉTECTÉES !
SIGNAL PERDU !
Nous tâchons de récupérer ce dernier le plus rapidement possible. »
Le Drow faillit se décomposer sur place.
« Qu’est-ce que c’est que cette merde ?!
- Je… Je l’ignore, Monsieur… Il… Toutes les autres caméras fonctionnent pourtant…
- Réparez-moi ça tout de suite, ou je vous arrache la tête, et je la donne à bouffer à mes vorrens !
- Je… Je fais de mon mieux, Monsieur…
- Vous n’êtes pas payée pour faire de « votre mieux », stupide « dh’oine », mais pour faire l’impossible ! Rétablissez la connexion ! »
Le Drow fixait avec rage les neiges. Simple problème technique ? Rien ne le laissait présager pourtant… Derrière l’image brouillée, Harmony devait logiquement avoir senti le souffle de l’air à ses côtés, ainsi que les couinements des Rejetés. Trois coups brefs, suivis de trois masses qui s’écrasaient sur le sol. Si elle avait la curiosité de se retourner, elle verrait sûrement que les trois Rejetés avaient été tués, mais que leur assassin n’était pas visible. Tout au plus pouvait-on brièvement apercevoir une forme dans l’obscurité, avec deux petits yeux jaunes insistants la fixer. Une apparition qui ne dura qu’une ou deux secondes. Les yeux, à moins qu’ils ne soient le simple reflet de l’imagination, disparurent ensuite, et la connexion revint à la normale.
« Peut-être un piratage informatique… hasarda l’opératrice. Le service technique va faire un diagnostic sur cette caméra pour essayer d’identifier l’origine du problème… »
Le Drow ne dit rien. Ses sourcils étaient froncés. Il n’était pas un Drow, et il sentait quelque chose d’anormal. Son imagination ne l’avait jamais trompé sur ce sujet.
Il y avait un trublion qui venait de se joindre à la fête.
« Qu’est-ce qu’on fait, alors ?
- Je t’arrache la langue, et je te la fais manger répliqua, agacé, le Drow. Maintenant, si tu en as fini avec tes questions idiotes, laisse-moi réfléchir... »
Le Drow réfléchit pour le coup assez vite, et contacta le centre des opérations, dans le vieux phare.
« Où en sont-ils ?
- Leur bombe sera bientôt placée, Monsieur. Avez-vous trouvé l’origine de cette interférence ?
- Nous avons bel et bien un rôdeur. Je ramène la neko. Il faut que je parte en chasse. »
A cette idée, le cœur de Luna fit un bond de joie dans sa poitrine. Elle allait au phare ! Ouf ! Dès qu’elle y serait, elle filerait prendre un bain ! Cet endroit lui donnait la nausée. C’était froid, sombre, puant, et glauque. Mais qu’est-ce qu’elle fabriquait ici ?! Luna se sentirait tellement mieux dans une belle chambre, au repos, à l’abri, dans un confortable lit... Sa Maîtresse était bien cruelle de la conduire en ces lieux froids et morbides. C’était le sort d’une esclave, tout simplement. Baissant la tête, Luna était plongée dans ses pensées, jusqu’à ce que le Drow relève la tête, sentant une présence. Les narines de Luna perçurent alors une odeur pestilentielle, juste derrière elle, à quelques mètres...
Pendant ce temps, le groupe A roulait à vive allure dans la foreuse. Plusieurs araignées furent écrasées sous les énormes chenilles de cet engin, qui s’arrêta dans un virage serré au cœur du Nid. Tout autour de cette structure, les soldats tekhans s’étaient positionnés, installant leurs armes lourdes. Des gatlings montés sur des pivots, des lance-flammes... La trappe arrière de la foreuse s’ouvrit, et deux Tekhanes en armure lourde firent parler leurs gatlings. Au centre de la foreuse, il y avait une autre mitrailleuse lourde, qui largua également un déluge infernal de balles.
« Feu ! » hurla le Commandant Nella.
Les capitaines la rejoignirent en ce sens, et un déluge de plomb et de feu s’abattit sur toute la zone. Les araignées, prises au dépourvu, furent fauchées, mais ne tardèrent pas à réagir, dégringolant du plafond par centaines, recouvrant les murs et les plafonds. Elles descendaient le long de fils, et les Tekhanes ne pouvaient que prier leur chance. Elles avaient attaqué avant que les toiles du nid ne viennent recouvrir la totalité de la grande grotte. Autrement, jamais leurs canons n’auraient pu percer les fils d’araignées. Les araignées fondirent ainsi du plafond, comprenant rapidement qu’il y avait des ennemis autour du nid. Plusieurs Tekhanes et Tekhanes succombèrent sous la surprise, els araignées jaillissant du plafond, ou plantant leurs dards dans les fenêtres des galeries, répandant un venin mortel dans la gorge des malheureux et des malheureuses.
En contrebas, le groupe A s’avançait au milieu d’une nuée d’araignées, faisant coulisser la BIM. Une énorme bombe, qu’une technicienne s’efforçait d’activer, les Tekhanes l’entourant utilisant des lance-flammes et des gatlings. L’enfer se répandait autour d’elles, et un fil d’araignée attrapa la tête d’une Tekhane, qui poussa un hurlement, avant de disparaître dans un méandre d’araignées. Des centaines, des milliers, il était impossible de dire combien il y en avait, et ceux qui avaient le malheur de lever la tête sentaient le courage les abandonner en voyant la nuée d’insectes descendre, avec, dans le plafond, la forme immense de la Reine. Une terrifiante araignée géante, aux proportions cyclopéennes. Une créature infernale et maudite.
« La bombe est activée, Capitaine !
- Fais-là péter, bordel de merde ! »
C’en fut assez pour la technicienne, qui appuya sur une série de boutons. Il y eut quelques cliquetis, et la BIM explosa ensuite, répandant une puissante onde magique. La première partie du plan était terminée. Le plus difficile était maintenant à faire : installer des bombes sur les piliers, afin que la détonation entraîne l’effondrement de la grotte.
Les araignées étaient innombrables. Des milliers ? On avait presque l’impression qu’il y en avait des millions ! Alors que les Tekhanes continuaient à s’écrouler, les Rejetés débarquèrent, et la bataille, déjà confuse, vira au chaos le plus complet. Les Rejetés s’en prirent à la fois aux Tekhans et aux araignées. Un vieil adage militaire voulait que l’ennemi de mon ennemi soit considéré comme mon ami. Cette adage trouvait ici une solide exception. Les trois camps s’entretuaient dans un indescriptible chaos de chairs éclatés, de corps pulvérisés, de cris, de giclements de sang, et de hurlements.
Dans le QG tekhan, Nella, elle, restait ferme et inflexible, se refusant à écouter son cœur et la panique. Des soldats mourraient à chaque instant, et elle donna ses ordres.
« Que les équipes de démolition rejoignent le groupe A. Remuez-vous le fion, Mesdames !
- Lady, yes, Lady ! »
De nouvelles foreuses débarquèrent alors dans le Nid, et des Tekhanes supplémentaires jaillirent, utilisant leurs lance-flammes pour repousser araignées et Rejetés. Des Tekhanes furent également appelées pour soutenir les incendiaires, vu les pertes dans les galeries. Ce fut le cas de Mirei, qui réquisitionna plusieurs de ses soldats, et descendit en contrebas, dans le chaos infernal. Elle ne s’en sortit toutefois pas très bien, et Harmony dut descendre également. La situation tournait au désastre, et des missiles jaillissaient depuis les foreuses et depuis quelques lance-missiles, pulvérisant les araignées, détruisant certains piliers.
Une équipe d’incendiaires arriva près de l’un des gros piliers à détruire, utilisant leurs puissants lance-flammes pour souffler les bestioles autour.
« Placez la bombe, Soldate ! Vite ! »
La soldate s’effectua, sortant un puissant dispositif qu’elle colla sur le pilier, avant d’enclencher le minuteur. C’est à Nella qu’il reviendrait désormais d’appuyer sur le bouton. C’était le chaos général, mais il fallait encore au moins deux bombes. La seconde équipe d’incendiaires affrontait des Rejetés, et les morts ne cessaient de s’enchaîner. Harmony, en retrait, soignait ceux qui parvenaient à la rejoindre, quand ils n’étaient pas subitement tractés par des fils d’araignées.
Ce fut à ce moment, alors que la seconde équipe allait placer la bombe, que l’enfer débarqua. Une énorme araignée vint s’écraser sur deux Rejetés, écrasant leurs boîtes crâniennes. C’était la plus terrifiante des araignées du Nid, Arachne :
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La bête infernale fondit sur les incendiaires. Des balles heurtèrent son abdomen énorme, mais il en fallait plus pour en venir à bout. Elle s’écrasa sur les incendiaires, enfonça l’une de ses pattes dans le corps d’une des Tekhanes, et sa soie d’araignée s’enroula autour de la tête d’une Tekhane sous ses pieds, la faisant dé coller du sol pour l’envoyer voler. La Tekhane atterrit sur le toit d’une foreuse, et rebondit. Une foreuse explosa alors. Les tubes par lesquels des missiles s’échappaient furent bouchés par de la soie, et les missiles explosèrent à ce contact. L’intense explosion fit s’élever la foreuse en l’air, qui s’écrasa par terre, provoquant la mort du personnel à l’intérieur.
Arachne se concentra alors sur les foreuses, et l’une de ses toiles attrapa alors la jambe d’Harmony, la faisant glisser sur le sol, avant de la tracter vers elle, probablement pour l’envoyer se balancer contre un mur, afin de la fracasser.
Harmony, celle qui tenait le plus de sa mère, l'ange tombé amoureuse d'un démon qui a renié les siens pour être un père et un mari-modèle. Elle pouvait faire preuve d'une grande force, dans le nid, contre le Xylomid, hélas, tout ça était sous l'impulsion, la peur de voir perdre les siens, en temps normal, elle n'était pas si forte mais bon, le sentiment de vouloir protéger les autres rendait les gens plus fort que d'habitude. Rassurant la petite Luna, elle était contente de la voir heureuse même si cette dernière était en larmes. Avec Mirei, le trio pouvait reprendre son chemin jusqu'au manoir du baron, ce taré avait trop fait de mal, il fallait le tuer à présent ou au moins le stopper pour toujours! Harmony était contre la mort, hormis quand c'était vraiment grave mais ce baron, elle ne savait pas où le placer? Les morts d'office ou la prison à vie? Peut-être en voyant d'autres horreurs, elle saura faire pencher la balance? Elle n'avait pas l'esprit de justice, trop gentille pour devoir condamner quelqu'un. Le chemin à travers les arbres était calme, pas de monstre, de créatures se faufilant entre les arbres, rester en mouvement était surement la meilleure stratégie à adopter pour ne pas tomber sur une nouvelle créature dans cette forêt?
Suivant le chemin, elles avaient pu trouver un mort, un Drow apparemment. Était-il à plaindre ou avait-il ce qu'il méritait? Harmony ne savait pas trop? De ce qu'elle savait sur cette race, ils étaient en gros des méchants elfes, leur opposé donc sa mort ne devrait attrister personne? Il y a bien des exceptions dans les races, des personnes douces et gentilles malgré la nature horrible des membres et lui? Elle ne saurait dire et ne se réjouissait pas de sa mort mais elle n'éprouvait aucune haine non plus. Luna se frottait contre elle, pleurant de nouveau. La semi-ange passait une main dans ses cheveux, la pauvre devait surement être effrayé par tout ça? Elle ne rajouta rien, laissant Mirei lui dire quelques petits mots pour la réconforter et même elle, comptait bien protéger cette pauvre néko prisonnière de cette forêt depuis bien trop longtemps, surement? Mais cette mort ne fut pas la seule chose étonnante, la détonation au loin eut de quoi se faire voir et se faire entendre, surprenant aussi bien Luna, Mirei qu'Harmony.
Toutes regardaient en direction de l'explosion, ne se doutant pas de ce qu'il venait de se passer dans ce qu'il semblait être un vieux phare abandonné. La jeune femme espérait seulement que personne n'était mort ou affreusement blesser, surtout pas de femme et d'enfants. Mais comme la tékhane le disait, il fallait filer, oublié ce qui se passait à droite ou à gauche et se concentrer sur leur route, leur objectif, vaincre Mitnik! La route fut rapide quand on ne s'arrêtait pas pour un rien. Une fois devant le fameux manoir où le taré de service ne pouvait plus se cacher, le petit groupe se retrouva bloquer devant la grille mais heureusement, il suffirait de grimper un arbre pour passer de l'autre côté, là où l'herbe n'était pas très bien taillée, là où les statues sur les fontaines n'étaient pas du tout ravissantes, là où le manoir même rappelait bien des frissons à des tas de personnes? Vu l'ambiance de la forêt, vu ce qu'elles avaient pu voir du maître des lieux, qui sait ce qui allait les attendre une fois la porte refermé? Qui sait, il y avait peut-être une horde de zombies derrière? Prêt à mordre de la chair fraiche? À moins que ce soit une armée de soldats? Une armée de monstres en tous genres pour tuer ses trois petites gêneuses?
Mirei passa la première, se tenant sur le haut du mur pour aider les autres, Harmony aidait Luna même si elle n'en avait pas vraiment besoin avec ses griffes et son habileté à grimper aux arbres comme tous les chats et les nékos. S'aidant de quelques branches et quelques points d'appui sur l'arbre, elle arriva finalement tout en haut, aidée un peu par Mirei qui l'aida surtout dans les derniers efforts. La descente fut plus simple même si à l'atterrissage, elle s'était aussi rattrapé avec les mains, maquant de peu de se cogner contre le sol. Elles étaient maintenant dans l'enceinte du manoir mais rien ne serra de tout repos ici, si Mitnik savait ce qui se passait près de chez lui, les chiens de garde et autres protecteurs de ce lieu où trône la folie seront lâchés. Avant de continuer, elle ouvrit rapidement son sac, prenant son trident, elle se sentait déjà un peu plus en sécurité même si Mirei avait réglé son arme après la surchauffe. Plutôt que de passer devant, il serait plus judicieux de trouver les autres entrées, moins commune.
« Mirei, cherchons une autre entrée, on ne sait jamais... »
« C'était prévu Harmony. C'est inutile de se jeter dans la gueule du loup comme ça. »
Contournant le manoir, les alentours n'avaient rien mais absolument rien de mignon ou de charmant! Les quelques coins de fleurs étaient pourri depuis des années, les coins sombres laissaient surtout pensé qu'un monstre s'y cache et aucune lumière n'émanait d'une fenêtre dans le manoir. Ça ressemblait surtout à un manoir hanté oui! Alors qu'à l'opposé de l'entrée principale se trouvait une porte plus discrète en métal, les gongs étaient rouillés, elle semblait relativement simple à ouvrir si la situation ne tournerait pas rapidement à l'urgence. Dans l'ombre, des créatures hideuses avaient trouvé de quoi se nourrir un peu, et ce n'était pas de la viande crue et déjà préparer, c'était mieux quand la proie était vivante, comme le pensait chaque bête sauvage. Sauf qu'eux, ils étaient aussi le résultat de nouvelles expériences du baron fou.
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Une langue se glissa rapidement jusqu'au mollet de la petite néko et son cri alerta de suite les deux autres. Mirei braqua son fusil en direction du monstre pour tirer quelques balles pour le faire lâcher Luna alors qu'un second lança sa langue autour de la taille d'Harmony. Son trident étant trop encombrant pour cet adversaire si proche, la jeune femme tira en rafale sur le monstre sans peau à quelques mètres. Les balles trouaient son corps bien qu'il était loin de mourir puis, quand il relâcha la jeune femme, elle bondit vers lui, plantant son arme dans le cou du monstre pour l'accrocher au sol, le laissant se débattre alors qu'il se vidait de son sang. Douce mais aussi dangereuse, on voyait ce qu'elle tenait comme côté de son père démoniaque. Comme ses monstres étaient loin de n'être que deux et que des renforts ne tarderaient surement pas, Luna se dirigea vers la porte et l'ouvrit sans problème bien que le bruit était bien audible.
« Vite, replis! »
Mirei de son côté en avait tué deux ou trois, plusieurs balles dans la tête, ça pardonne pas! Refermant la porte derrière elles, le râlement de ses monstres se faisaient encore bien audibles même si elles se sentaient déjà un peu plus en sécurité ici. L'entrée s'allumait toute seule quand quelqu'un ouvrait ou fermait la porte et elles pouvaient découvrir un petit coin qui servait surement de cuisines, quelques fourneaux laissé à l'abandon, poussiéreux, crasseux, il y avait bien quelques boîtes de conserves périmées ouvertes mais l'odeur restait vite insoutenable! Il fallait à présent trouver Mitnik et le vaincre pour que, espérons-le, son empire sombre avec lui, comme le capitaine sombre avec le navire.
« Mirei, tu n'aurais pas un plan des lieux? Au moins sa localisation? »
D'une voix discrète et silencieuse alors qu'elle passait ses mains sur les épaules de Luna pour la rassurer après cette épreuve où elle était de nouveau la cible. À croire que cette néko était vraiment importante au point de devoir l'éliminer?
Que ce manoir était lugubre ! La pauvre neko était complètement désemparée. Cette forêt était sinistre, affreuse, monstrueuse. Rien à voir avec la forêt enchanteresse de ses souvenirs, cette belle et magique forêt où les arbres semblaient protecteurs et accueillants, ou l’air-même de la forêt était apaisant et bienveillant. Ici, il n’y avait que souffrance et malheur, et l’air de cette forêt était tout, sauf bienveillant. Ce manoir semblait être l’épicentre de tout ce mal lointain, ancestral, mais non moins vorace, ce mal dont on faisait les contes de fées, dont on chante la terreur lors des soirées autour de feux de camps. Il était grand, sombre, et semblait... A mi-chemin entre « hanté » et « abandonné ». S’y aventurer était pour Luna une bien mauvaise idée, mais, à la réflexion, toute cette histoire n’était rien de plus qu’une très mauvaise idée, dont la neko peinait à voir l’étendue.
*J’ai peur...*
Elle suivait machinalement les deux femmes, en enjambant sans trop de difficulté la grille. Comme Harmony le remarqua, grimper à un arbre était quelque chose d’enfantin pour Luna, comme se suspendre à une branche. En utilisant la branche pour rejoindre l’intérieur du manoir, elle se rappela, encore une fois, des souvenirs de sa lointaine enfance, où elle se suspendait de la même manière à des branches d’arbres. C’était un petit défi entre jeunes nekos : voir jusqu’où on serait capable d’aller en grimpant. Les mâles se suspendaient aux branches pour impressionner les femelles, mais ils étaient surtout ridicules, et ça faisait bien rire l’ensemble des autres nekos... Jusqu’à ce que les adultes s’en rendent compte, et ne les grondent.
Descendant sur l’herbe foulant le périmètre, elle continua à suivre les deux femmes, tremblant de tous ses membres. Le Drow qui veillait sur elle était mort, tout comme ceux se trouvant dans le phare. L’intelligence de Luna, limitée par sa frayeur, lui disait qu’il se passait des choses graves, et qu’elle n’avait plus aucun lien avec sa Maîtresse. C’était toutefois tellement inconcevable, tellement impossible qu’elle n’ait plus aucun intermédiaire entre elle et sa Maîtresse, que l’esprit de Luna se refusait à envisager ce scénario. C’était impossible, et ça défiait la logique ! Maîtresse était sa réalité, sa protection, son amour, et sa seule source de vie. Sans elle, Luna était complètement perdue. Il lui suffisait de se rappeler quand Maîtresse l’avait provisoirement abandonné, et qu’elle s’était retrouvée face à de cruels bandits. Cette scène l’avait traumatisé, lui provoquant parfois des cauchemars à l’idée que Maîtresse n’envisage à nouveau de l’abandonner. Peut-être... Peut-être que tout cela était une machination de cette dernière, un plan démentiel et génial, digne de la sagacité de Maîtresse, pour l’amener à tester sa dévotion et son amour.
*Idiote de neko ! Tu ne dois pas laisser tes peurs t’envahir, et rester une bonne esclave. La fidèle esclave de Maîtresse, qui lui lèche affectueusement les pieds en ronronnant. Autrement, tu finiras avec un collier explosif autour du cou !*
C’était une perspective guère réjouissante, avouons-le, et Luna baissa la tête, continuant à suivre les deux femmes. Elle ferma les yeux, retenant ses larmes, sous l’émotion, qu’elle ressentait, quand son flair perçut une odeur de chair en putréfaction. Harmony et Mirei se rendaient alors à l’arrière de la demeure. Une sinistre odeur qui amena Luna à regarder à droite et à gauche. Elle croyait percevoir des ombres se mouvoir sur les tours sinistres de cette maison plongée dans la nuit. Des nuages recouvraient la lumière de la lune, et, tout le long de la forêt, elle voyait de nombreux yeux jaunâtres sortir de l’obscurité, devinant ici et là des monstres, des créatures affreuses, des araignées géantes, des loups-garous, des arbres qui vivaient, dont les branches devenaient des bras griffus et immenses. L’imagination de Luna la rendait folle, et elle se sentait trembler nerveusement.
Et ce fut à ce moment qu’elle sentit quelque chose de froid et de gluant s’enrouler autour de sa cheville.
« MAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAWWWWW !!! » rugit-elle.
La langue la tira d’un coup sec, et sa tête heurta le sol, les feuillages et les racines, comme à l’époque du Xylomid, la contraignant à planter ses griffes dans le sol, alors que des créatures terrifiantes bondissaient dans son dos. Elle sentit tous ses poils se hérisser à nouveau, et se débattit dans les airs, griffant le vide, jusqu’à ce que la pression s’exerçant autour de sa jambe ne se relâche. Elle bondit alors en avant, heurtant Mirei. La Tekhane pesta, et hurla à Luna quelque chose que la neko ne comprit pas. Elle voyait désormais plus clairement les ombres descendant le long des fenêtres, et entendait également des hurlements, des aboiements qui se rapprochaient. Ceci lui rappelait les chiens des raiders, et ceux de Maîtresse, quand elle la menaçait de servir de repas à ces derniers.
Tremblant, Luna s’acharna sur la porte, des coups de feu résonnant tout autour d’elle, et parvint finalement à l’ouvrir. Les deux femmes la rejoignirent rapidement, fermant la porte. La lumière s’alluma alors, et Luna sursauta, les yeux grands ouverts. Elle regarda tout autour d’elle, et se rapprocha de l’Ange, essayant d’obtenir un peu du légendaire courage angélique. L’Ange sembla percevoir les angoisses de Luna, car elle lui caressa les épaules, et Luna, en soupirant, frotta sa tête contre les jambes de la femme, ayant tout d’un coup envie d’un gros câlin. L’Ange demanda ensuite à la soldate si elle avait un plan, et cette dernière secoua la tête, répondant assez rapidement :
« Malheureusement, non, s’excusa-t-elle. Il y a trop d’interférences magiques pour nos satellites ici. Et je pense que ces monstres ne sont pas venues par hasard... Et que nous les reverrons sûrement à l’intérieur du manoir. Il nous faut trouver le Baron, et mettre fin à ses expériences génétiques. »
Mirei fit la moue, s’avançant un peu. Elles étaient dans une espèce de cuisine ancestrale, abandonnée et rapiécée. Luna voyait des araignées jaillir d’interstices, des mouches piégées dans de grosses toiles, et sa queue se releva, frottant les cuisses de l’Ange. Mirei tenait toujours son fusil d’assaut, et le brandit vers un sombre couloir. L’éclairage du manoir restait très faible, donnant à ce dernier un ton sinistre. Brève inspection du couloir, avant que Mirei n’aille voir la pièce, et ne finisse par détecter des petits capteurs noirâtres.
« Des détecteurs de mouvement tekhans... Cet endroit n’est pas aussi abandonné qu’on le dirait. »
Elle se mordilla les lèvres, puis commença à avancer dans le couloir. Luna resta désormais entre les deux. Il y avait des portes à gauche et à droite. Mirei en ouvrait prudemment certaines, donnant sur des pièces abandonnées et poussiéreuses à outrance. Des volets étaient parfois fermés, des rideaux tirés, mais les fenêtres étaient tellement crasseuses qu’on ne voyait rien au travers. Mirei préféra ranger son fusil d’assaut pour sortir un pistolet avec un couteau, équipement plus adapté pour un combat dans des endroits clos. Elle continua ensuite à avancer, jusqu’à arriver à une intersection. Elle regarda brièvement à gauche, puis à droite, sans voir âme qui vive.
Mirei utilisait accessoirement un ordinateur intégré à sa combinaison pour avancer. Si le commandement choisissait d’utiliser de telles tenues pour son armée, ce n’était pas que pour satisfaire des fantasmes enfouis, mais aussi parce que ces combinaisons étaient spéciales, et comprenaient de nombreux capteurs pour relever leurs signes vitaux, ou leur taux d’infection au virus formien. L’ordinateur intégré établissait progressivement le plan du manoir, au fur et à mesure que le trio avançait. Mirei menait la marche, et s’arrêta soudain en entendent un lointain gémissement.
OooooOOooooooOooooohhhHHHHH
Elle s’arrêta, interdite, se demandant si ce n’était pas là un écho du vent, et se rapprocha, pointant son arme, en posture de combat, les muscles tendus. Le gémissement émanait d’un escalier sombre qui se perdait dans les profondeurs.
« Restez alerte » ordonna-t-elle simplement, en commençant à descendre.
Un pas devant l’autre, une marche après l’autre. Des torchères s’allumaient sur la gauche, montrant une rampe, et Liana soupirait lentement. Il y eut un nouveau gémissement, bien plus sonore, mais il n’était pas, en soi, menaçant. On aurait plutôt dit le cri d’une bête en train d’agoniser. Le cœur de Mirei bondissait dans sa poitrine. Elle en avait vaguement conscience ; un cauchemar terrifiant l’attendait en contrebas. Elle en était convaincue, et serrait ses mains autour de la crosse de son arme. Mirei atterrit la première dans un couloir sinistre, ressemblant à une espèce de tunnel minier... Ou plutôt à un couloir pénitentiaire. A gauche comme à droite, il y avait d’énormes portes, et elle ouvrit des panneaux pour regarder à travers. Lorsqu’elle ouvrit la première, une odeur nauséabonde agressa ses narines, la forçant à se reculer instinctivement, alors que des espèces de mouches jaillissaient. Elle éclaira ensuite l’intérieur de la pièce... Et poussa un cri de stupeur en voyant une espèce de forme ramassée contre le coin de la pièce, les poignets attachés au mur par des chaînes en fer. C’était un corps nu, chauve, avec un œil plus gros que l’autre, des boursouflures roses et rougeâtres tout le long du corps. Une forme difforme et affreuse qui était envahie par des insectes... Et dont l’un des yeux se mit à cligner et à bouger quand le reflet de la torche du pistolet passa dessus.
Cette créature était vivante ! Mirei poussa un cri de stupeur, et bondit en arrière, heurtant le mur.
« Mon Dieu... »
Luna la regarda en fronçant les sourcils. Qu’est-ce que la soldate avait vu pour être à ce point éprouvée ? Elle s’avança plus rapidement, et atteignit une sorte de salle commune où elle sentit sa raison vaciller. Un vertige s’empara d’elle, et elle se recula, se tenant le front en s’appuyant contre un mur, ressentant une furieuse envie de vomir.
« Les enfoirés... » grinça-t-elle entre ses dents.
Luna put voir... Elle vit une grande salle rectangulaire, avec de sinistres tables sanguinolentes où des corps étaient attachés sur des sangles, en train de gémir. Elle vit des horreurs, des abominations, des enfants à qui on avait greffé deux têtes, elle vit un tableau dans un coin avec une série de feuilles, des cahiers sur des bureaux comprenant des radiographies, des individus avec une tête disproportionnée, un homme avec un œil plus gros que l’autre, une femme à qui on avait remplacé les seins pour n’en mettre qu’un seul, un autre qui avait une jambe sortant de sa tête... Un terrifiant musée des horreurs. Luna n’arrivait plus à penser, et ce fut quand une forme frôla ses jambes qu’elle se sentit perdre contact avec la réalité. En tournant la tête, elle vit une espèce de long serpent ramper sur le ventre, s’aidant de ses multiples bras pour avancer. Son regard croisa celui de cette chose, et elle lut dans la posture de son corps une insondable honte. Ses espèces de lèvres remuèrent mollement, comme si elle essayait de dire quelque chose, mais elle ne fit tomber que de la bave sur le sol.
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Luna se recula, et poussa un cri hystérique, suraigüe, avant de se mettre à fuir à bride abattue en pleurant. Elle n’alla pas bien loin, se prostrant contre un mur devant toute cette démence, cette folie qui défiait l’entendement. Mirei, de son côté, ne put retenir sa nausée, et se mit à vomir devant un tel spectacle.
« Ma... Manipulations génétiques, réussit-elle à dire. Les... Les ratés de Mitnik et des scientifiques dégénérés qui ont travaillé avec lui ! »
Le regard d’Harmony croisa alors celui d’un homme dont l’un des bras était trois fois plus gros et plus épais que l’autre, et qui, difficilement, parvint à articuler quelques sons :
« Tu... Tuez... Moi... »
Le message de ces créatures était clair. Qu’on daigne faire ce que le baron leur refusait : leur offrir le droit de mourir.
Quand cet enfer allait-il cesser ? C’était tout ce que Luna souhaitait : que ça se termine, que ça cesse, qu’elle ouvre les yeux et sorte de ce mauvais cauchemar pour se retrouver entre les confortables bras de sa maîtresse adorée. Sa cruelle et difficile maîtresse, mais qui lui manquait tellement... Yeux clos, elle était roulée en boule dans un coin, et même quand Harmony revint la voir, et qu’elle entendit les coups de feu Mirei, Luna ne se détendit pas. Bien au contraire, elle était toujours aussi nerveuse, anxieuse, à la limite du coma. Tout cela, ce n’était pas pour elle. Elle n’était pas une neko guerrière, mais une neko domestique. Domestique ! Elle n’avait absolument rien à faire ici. Rien ! Luna tenta de se relever, quand Harmony la serra contre elle, et qu’elle renifla une autre présence. Une curieuse créature s’avançait à l’aveuglette dans la pièce, et tapa contre un objet. Une espèce d’abominable bourreau avec des griffes en acier. Luna écarquilla les yeux, sentant la peur exploser n elle, comme à l’époque où elle avait vu le Wendigo. Elle ferma les yeux.
*Disparais, disparais, disparais !*
Elle répétait ce mot comme un leitmotiv dans sa tête, et entendit alors une série de coups de feu. La Tekhane qui les protégeait réussit à se débarrasser du gardien, en tirant sur une excroissance orange dans son dos, ce qui eut probablement pour effet de le tuer. La bête s’écroula, inerte, sur le sol, et Harmony remercia Mirei. Cette scène sortit Luna de sa torpeur, qui avança lentement, reniflant un peu en séchant ses larmes, et renifla le corps. Il était bel et bien mort.
« Reste près de nous, Luna. J’avance la première. »
La soldate s’avança prudemment, regardant devant elle, pistolet pointé, explorant les recoins en avançant dans un couloir sombre et étroit. Luna restait derrière, se sentant ailleurs, comme si elle n’était pas vraiment là, comme si tout ça n’existait pas vraiment. Au bout de quelques minutes, Mirei vit une porte ouverte, et descendit un escalier en colimaçon particulièrement étroit... Qui la conduisit dans une espèce de laboratoire souterrain où elle entendit des machines crépiter.
« Et ben ça alors... Si je m’attendais... »
Ébahie, la Tekhane allait de surprise en prise dans ce manoir infernal ! Après cette cave aux horreurs, elle pénétrait dans une espèce de complexe scientifique souterrain. Il y avait de la lumière, et elle pointa son arme, vigilante, s’attendant presque à voir débarquer des commandos ou des scientifiques en blouse blanche... Mais il n’y avait rien de ça. Le complexe semblait abandonné, mais les machines continuaient à fonctionner. Elle descendit un escalier métallique la menant dans une grande pièce, un grand hall constitué de plusieurs couloirs se composant, à gauche comme à droite, de cages en verre dans lesquels des cobayes semblaient flotter. De nombreux tuyaux pénétraient dans leur corps, et ils semblaient inconscients. Il y avait de nombreuses machines, des casiers, et des moniteurs devant les tubes indiquaient les signes vitaux, le traitement suivi, et le numéro d’identification d cobaye.
« Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? »
Luna regarda à droite et à gauche. La lumière émanait de grands néons en hauteur. Elle voyait des cobayes, des humains, des Terranides, des monstres, qui semblaient flotter dans ce liquide verdâtre. Elle s’écarta un peu d’Harmony et de Mirei. Mirie, en effet, avait trouvé un terminal, et l’alluma. Un moniteur noir devant elle s’alluma, et un nom de code apparut. PROJET GÉNÉSIS. Elle appuya sur l’écran, et ne tarda pas à voir un bureau s’afficher, avec un écran de commandes. Elle tapota sur le moniteur tactile, cherchant une description du projet, et comprit alors quel était cet endroit. C’était le laboratoire secret mentionné par Zaëlle, l’endroit où les Tekhanes avaient, il y a des années, tenté de concevoir un virus.
PROJET GÉNÉSIS
HISTORIQUE
J+000 : Le Sénat alloue une partie du budget tekhan à des recherches militaires en vue de concevoir une arme bactériologique contre les Formiens. Le projet est voté sous le nom de « PROJET GÉNÉSIS ». L’état-major nomme responsable du projet le major CALDWELL.
J+005 : Le major CALDWELL livre à l’état-major les conclusions d’un rapport pour l’implantation du Site-1. Le lieu désigné est sur la périphérie du territoire ashnardien, sur les terres d’un baron isolé. L’endroit est réputé maudit, et le baron, qui reste cloîtré dans son manoir, a laissé ses terres dépérir. Une évaluation des lieux permet d’estimer que le Site-1 est à portée de bombardement de la base de King’s Way.
J+012 : L’état-major donne son approbation à l’implantation du Site-1.
J+016 ; Données manquantes. Fichier corrompu.
J+027 : Des camions sont envoyés depuis King’s Way pour permettre l’implantation du Site-1. Il est décidé de passer par la falaise, afin de ne pas éveiller des autochtones. Les travaux d’excavation commencent.
J+102 : Le Site-1 est opérationnel.
Mirei se mordilla les lèvres. Tout était là, tout le déroulement de l’opération. Les Tekhanes avaient vraiment merdé sur ce coup-là. Mitnik n’avait été qu’un pion. Elles avaient capturé des cobayes dans la zone, des créatures, des humains, et même de simples Terranides, afin de tester la résistance de leur virus. Les morts avaient été brûlés dans de grands fourneaux, et les erreurs génétiques, les « Rejetés », supprimés... Dès lors, comment expliquer qu’il y en avait toute une chiée dans la grotte ? Il y avait des trous, des blancs, à compléter, et Mirei poursuivit ses recherches, fébrile. Elle découvrit ce qui avait eu lieu. Même dans un coin reculé, des dizaines de disparitions ne pouvaient pas passer inaperçus. Le prévôt local avait mené son enquête, et avait réussi à alerter le duc local. Ce dernier avait visiblement envoyé des agents enquêter, et le Site-1 risquait d’être découvert. Devant le risque imminent que cela posait, l’état-major avait fermé le Site-1. Mirei tremblait de rage devant un exposé macabre. Elles s’étaient prises pour des Déesses ! Le pire, c’est que Caldwell avait été promue. La femme siégeait maintenant à l’état-major. Des expériences génétiques sur des êtres humains... On se croirait dans un mauvais film d’horreur tekhan.
Parallèlement, d’autres projets avaient été menés sur des Formiens, afin de créer des espèces de super-Formiens qui chasseraient les autres. Les scientifiques tekhanes avaient mis des gigaoctets de données sur des formules scientifiques et des équations complexes pour réussir l’impossible : reproduire une version en éprouvette du phéromone formien, créer des clones de Formiens améliorés. Tout ça défiait l’entendement, et Mirei, surtout, n’arrivait pas à comprendre... Si le Site-1 avait été fermé, qui l’avait rouvert ? Le baron ? Elle continua ses recherches, tandis que, pendant ce temps, Luna continuait ses explorations, et atteignait maintenant les clones des Formiens. Des créatures affreuses, indescriptibles, qui flottaient dans du liquide, et qui semblaient inanimés. Elle sentit son flair l’attirer près de l’un des cobayes, une espèce d’immense guerrier noir dont la peau était faite en pierre. Il avait un corps de mâle, sans sexe, et faisait bien dans les deux mètres. Chauve, la peau sombre...
« Qu’est-ce qui a rouvert ce site ? Qui ?! »
Elle continua ses recherches, explora d’autres documents, et finit par s’étrangler en voyant enfin l’explication.
« O.P.T.I.K.A.... »
O.P.T.I.K.A. était un nom de code désignant une I..A expérimentale. L’I.A. avait alimenté plusieurs usines et laboratoires de recherche de l’armée, avant qu’un défaut dans sa programmation ne soit repéré. O.P.T.I.K.A. avait sonné le déclin de la recherche expérimentale en matière d’intelligence artificielle, dans la mesure où O.P.T.I.K.A. s’était avérée trop extrémiste dans ses recherches. Elle menait à bien sa mission, sans tenir compte des pertes humaines, et imposait aux humains une cadence et une mécanique de travail insoutenables, allant jusqu’à séquestrer, menacer, et torturer des employées. Les informaticiennes avaient repéré qu’O.P.T.I.K.A. avait un défaut de programmation qui l’amenait à contourner des protocoles de sécurité, au nom de la « Mission » et des « Objectifs ».
« O.P.T.I.K.A. continue à fonctionner ici... Mon Dieu... Harmony, c’est elle qui contrôle tout, c’est elle qui...
- Alerte de sécurité. Intrus repérés dans le laboratoire de recherches. Brèche de sécurité. Brèche de sécurité. Prototype en vie repéré. Signes vitaux détectés. Alerte danger. Alerte danger. Verrouillage de la zone, et application du protocole d’urgence D-457. »
O.P.T.I.K.A. venait de les repérer. Mirei se mordilla les lèvres, et une énorme porte blindée s’abaissa derrière elles, les empêchant de sortir, tandis qu’une espèce de gaz se mettait à filer dans la pièce. Luna, de son côté, se rapprochait de la créature, et vit son nom : « ISAMOV ». A cet instant, les yeux d’Isamov s’ouvrirent, et deux pupilles bleuâtres chargées d’énergie fixèrent Luna.
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Isamov
La cage en verre explosa brutalement, Isamov descendit, les tuyaux le retenant s’arrachant. Il s’avança vers Luna, qui poussa un hurlement, et se replia rapidement. Isamov se téléporta alors dans un jet d’éclair, et arriva à côté de Luna. Son pied se leva, et il la frappa au ventre. Luna poussa un hurlement étouffé et décolla du sol, s’envolant comme un fétu de paille avant de s’écraser contre un bureau. Elle poussa un couinement, et Isamov tendit la main vers Luna, prêt à envoyer une décharge électrique terrifiante. C’était un mutant, un ancien humain avec qui on avait croisé de l’ADN formien, et qui, si Luna connaissait les comics, aurait été comparé à Elektro.
« Je vais essayer de désactiver les systèmes de sécurité ! Harmony, dépêche-toi, va protéger Luna ! Et... Bordel, méfie-toi ! »