La Fortune sourit aux audacieux. [Hiro]

"Full de rois et de huit. Monsieur Penbar remporte la partie."

Seikusu, Casino Red Ribbon, 22h35. Ce n'était que la deuxième fois que le détective Penbar mettait les pieds ici, et ce soir, il était en veine. L'ambiance était bonne: du jazz enjoué en fond sonore, le bruit des machines à sous, et au milieu de ça, attablé à une partie de Poker, Nathéo restait là, inflexible, alors que le croupier poussait les jetons vers lui. Il avait prévu de gagner gros, et avait amené avec lui une mallette spéciale, rien que pour y ranger les crédits de l'établissement. Les quelques spectateurs l'applaudissaient, après une partie rondement menée. Il sortait avec l'équivalent de cinq millions de yens, sur une partie à 12 personnes. Son dernier adversaire succomba au stress qu'il avait accumulé durant le jeu:

"Cet horrible sourire figé! Arrête-ça! Je... J'AI TOUT PERDU A CAUSE DE CA! EST-CE QUE TU ES SEULEMENT HUMAIN?"

Il en avait les joues creusées, c'était comme une obsession. On aurait même dit que ses yeux allaient sortir de son crâne, comme si toute la frustration qu'il avait cumulée explosait d'un coup. Et devant lui, l'homme en costard ne fit que réajuster sa cravate, gardant la même expression, avant de rétorquer:

"Je suis humain. Je suis juste meilleur que vous."

Deux agents de sécurité accompagnèrent l'homme vers la sortie, alertés par ses éclats de voix. Il se mit à menacer Nathéo, qui se contenta de lui adresser un petit signe de la main pour lui dire au revoir. En tout début de partie, ce type s'était vanté d'avoir été champion régional. Le détective avait donc décidé de le garder pour la fin, sans mentionner qu'il avait déjà coulé de nombreux concurrents sur Terra en jouant les marchandises. Ce qui allait de soit, puisque ce n'est pas le genre de choses qu'on va crier n'importe où. Une hôtesse vint alors l'aborder alors qu'il se levait, d'une voix mélodieuse et presque envoûtante:

"Monsieur? On m'a demandé de vous conduire dans les quartiers V.I.P, afin de disputer une partie avec nos clients plus... Civilisés."

L'employée lui rappelait vaguement l'un des "animaux domestiques" qu'il avait sur Terra, et qui justement était affairée avec lui, à des choses inavouables qui de toute façon n'avaient rien à voir. Il accepta volontiers et la remercia courtoisement de porter sa valise avant de lui emboiter le pas: il traversèrent un couloir, montèrent des escaliers et passèrent deux gorilles avant d'atteindre de grandes portes qu'elle lui ouvrit: ils pénétrèrent dans une vaste pièce au milieu de laquelle trônait une table verte éclairée par un lustre -dont les diamants suspendus n'étaient surement pas de la simple verroterie. Il y avait un autre garde près de l'entrée, un autre près du comptoir, et un dernier juste à côté de la porte des toilettes. Ça le changeait énormément des vieux tripots dans lesquels il avait joués. Outre le barman et les serveuses, il y avait également un pianiste pour seule ambiance musicale, qui s'affairait sur un rythme enjoué. Il y avait également cinq autres personnes, dont une femme: ils étaient bien vêtus, et étaient tous secondés d'employés qui transportaient leurs jetons. A dire vrai, même avec son costume hors de prix et ses bijoux, Nathéo passait totalement inaperçu. La femme qui l'avait guidé jusqu'ici l'informa:

"Profitez des apéritifs et autres rafraichissements, la partie débutera lorsque les deux autres participants seront arrivés."

Il la remercia à nouveau et se dirigea vers le comptoir pour commander une coupe de champagne, en examinant discrètement chaque personne avant même que les jeux ne commencent: il préférait retenir leur faciès avant, de façon à déceler plus facilement les mimiques, et les gestes trompeurs. L'idée lui vint d'investir dans un salon privé de poker dans l'une de ses résidences Terranes. Bah, pour l'instant, ce corps devait se concentrer, il relégua cette idée à un autre.

Saluant les employés, comme à mon habitude, j’étais entré dans la vaste salle qu’était le casino Red Ribbon, deux hommes bâtis comme des armoires à glaces, tenant chacun fermement une mallette, sur mes talons. Je venais dans cet endroit de péché à tous les mois; l’argent fait de la prostitution devait bien être blanchi et, pour être honnête, j’adorais les jeux d’argent… Mais la roulette, le jeu de black jack ou tout autre jeu de chance, très peu pour moi. Je préfère utiliser ma cervelle, là ou la notion de chance existe seulement si on suppose que la main gagnante était réellement la plus forte; le poker.

Rapidement, à force de grimper les escaliers, on pouvait entendre l’écho d’un piano, alors que les sons cacophoniques de la classe moyenne se perdaient dans le néant, n’arrivant à rejoindre mes tympans. Une fois arrivé à la salle V.I.P., je m’installai à mon habitude au bar, faisant un signe de salutation à tout le monde, en attendant le début de la partie, alors que mes hommes s’installaient à leur place habituelle; une petite table faiblement éclairée par un chandelier à l’abat-jour doré, histoire de ne pas jurer avec le tapis vert et les murs plaqué d’ébène, tirant légèrement sur le verdâtre. Comme à leur habitude, ils vont prendre quelques verres, faire des concours de tir au poignet, et boire encore, aux frais du perdant… Ils n’étaient pas des penseurs, à mon grand dam.

Eh bien, si ce n’est le détective Penbar… Whiskey sur glace, merci… Il y a eu un meurtre dans le casino? Ou Nexus ne vous suffit plus, vous devez venir me chourer des parts de marché à Seikusu?

Bien, maintenant que tout le monde est arrivé, nous pouvons commencer… Prenez la place que nous vous avons assignée lors de votre arrivée.

Prenant mon verre, je me détournai du bar pour aller m’asseoir à une chaise, avant de prendre un sous-verre pour ne pas abimer la partie plus haute, servant à poser nos breuvages, de la table de jeu. Un des deux gorilles ouvrit l’une des deux mallettes devant un employé du casino, lui remis et vint me porter les jetons, valant le montant du contenu de la mallette, soit 100 millions de yens.

Bon, la majorité d’entre vous connaissent les règles, mais il y a des nouveaux, donc nous allons les réciter : Il n’y a aucune limite maximale, mais la mise de départ de chacun d’entre vous est 1 millions de Yens, à intervalle de trois mains différentes, le petit et le big blind sont augmentés de 500 000 yens. Aux premiers tours, le petit blind est 500 000 Yens, et le big blind est 1 000 000 yens. Une pause sera imposée à toutes les heures, à la fin de la main… Des questions? [/b]

Ça y est, le croupier a déjà commencé à distribuer les deux cartes à chacun des six joueurs à la table…La face de mes cartes cachée par la table, je soulevai le coin de celles-ci pour qu’elles me dévoilent leur secret… Un deux de carreau, et un sept de trèfle… Le croupier lança alors la phase « River » : Un trois de cœur, dix de pique, et un As de carreau. Merde ça commençait mal…

1 000 000 yens, sans surenchérir.

Je ne prévoyais pas m’éterniser sur cette main, mais il fallait tout de même jouer!

C'est en discutant avec le barman qu'il avait appris que des millions passaient sur la table à chaque manche, et qu'il n'irait pas loin avec les cinq millions qu'il se promenait, aussi bon joueur soit-il. Alors qu'il accusait l'information, un corps sur Terra réunissait une somme conséquente en crédits tekhans, et un autre apprêtait une esclave humaine de façon particulière: une carte spéciale, qui lui permettait de convertir les crédits en yen, et une carte de retrait. Une opération simple qui prendrait environ une demie-heure. Et pour renforcer sa crédibilité, il s'éloigna du comptoir, pas trop loin pour être entendu, et passa un appel fictif à "sa sœur".
Les trente minutes passèrent, durant lesquelles l'avant-dernier candidat arriva: un homme d'environ soixante ans,à la moustache et aux cheveux blancs comme neige, feutre et costume noir. Il s'appuyait sur une canne ouvragée et sertie, et son regard était aussi perçant que celui d'un aigle majestueux. Nathéo appréciait beaucoup ces hommes qui savaient en imposer par leur stature. Et il avait la chance d'en faire partie.
Et puis le dernier arriva, notre détective faillit esquisser une grimace. Hiro Atayoshi, un avocat suffisamment talentueux pour gagner un procès face à une avalanche de preuves compromettantes. Et surtout, un concurrent de taille pour Lord Slaver. C'était selon Théo, un homme de science et un excellent businessman. En soit, un adversaire redoutable. Il reprenait son sourire figé. L'homme venait s'adresser à lui.

"Eh bien, si ce n’est le détective Penbar… Whiskey sur glace, merci… Il y a eu un meurtre dans le casino? Ou Nexus ne vous suffit plus, vous devez venir me chourer des parts de marché à Seikusu?"

Il se sentit quelque peu insulté. Non pas qu'il était blessé par les propos d'Hiro, mais qu'il soigne si peu ses mots... Un homme de verbe comme lui était capable de piques bien plus cinglantes, selon Nathéo.

"Allons Maître Atayoshi, s'il y avait eu un meurtre dans ce casino, l'assassin se cacherait déjà dans vos jupons... Je suis ici pour me distraire, mes finances me le permettent. J'espère que vos affaires vont bon train, vu le peu de ventes que vous avez faites à Nexus cet après-midi..."

L'avantage de Nathéo à toujours été d'avoir des yeux et des oreilles partout, au sens littéral du terme. Suivre le cours du marché en Terra lui était très facile, et ce quand il n'en était pas lui-même l'origine. L'avantage d'avoir des clients influents, c'est de pouvoir créer la mode. Et depuis deux mois, la noblesse s'arrachait les terranides hermines. Ils était rares, très rares. Et Nathéo avait la chance d'en avoir un couple. Les Dames adorent avoir des enfants pour leur servir de pages ou de valets de pied.

"Bien, maintenant que tout le monde est arrivé, nous pouvons commencer… Prenez la place que nous vous avons assignée lors de votre arrivée."

Alors que Lord Slaver rejoignait sa place, une employée l'interpella, lui remettant une mallette que sa "sœur" avait laissée pour lui à la réception, et qui avait été convertie en jetons selon ses instructions. Il savait ce qu'il y avait dedans: 120 millions, à ajouter aux cinq qu'il avait déjà. Comment un détective pouvait-il posséder une telle somme? Et bien, les privés coutaient plutôt cher, et il y avait toujours l'excuse des actions en bourse. Aucun soupçon ne pesa sur lui, il montra ses jetons et s'installa.
Il fut impressionné en voyant combien Atayoshi avait à miser. 100 millions, dans une seule des mallettes? Selon ses observations, il n'y avait que deux adversaires véritables: l'avocat à lunettes, et le vieil homme à la canne. Les autres étaient sans doute doués, mais ils ne représentaient pas un vrai défi en soi.

River.

Le détective révélait ses cartes, à lui et à lui seul. Les habitudes du métier sans doute, mais il jeta un bref coup d’œil aux gorilles d'Atayoshi. Les businessman de leur calibre étaient capable de fourberies, et les avocats étaient pires. S'ils n'étaient pas là que pour veiller à la sécurité, il le saurait bien assez tôt. Les détectives... Non, les "hommes comme eux" n'allaient pas loin sans entretenir une pointe de paranoïa. Un de leurs concurrents, appelé le Don, était après tout un maître des subterfuges. Oh, la main de Nathéo? Trois de trèfle, huit de cœur. Il avait une paire de trois, youpi. La femme suivit, puis son tour vint.

"Un million, je suis."

Je relance. Trois millions.
 
Tous avaient suivis, sauf le vieillard. Réajustant mes lunettes, je tournai la tête vers mon voisin de droite, un petit sourire amusé animait mes lèvres.
 
Vous savez que le médecin vous a fortement déconseillé de prendre des risques, c’est mauvais pour votre cœur, Matsumoto.
 
Je n’ai aucun compte à rendre à mon médecin, ni à vous, maître Atayoshi.
 
D’un petit rire, je repoussai mes cartes vers le croupier.
 
Pour ma part, je ne continue pas cette main… Serveuse? Remplissez mon verre, je vous prie. Exactement comme le premier.
 
Si on y pense bien, c’est une excellente initiative que de laisser le premier tour se jouer sans moi. Je pourrai désormais scruter chacun de mes adversaires, alors qu’eux sont occupés à regarder les cartes… Enfin, je connais déjà la grande majorité des joueurs et joueuses, mais Nathéo est celui qui m’intéresse le plus, surtout du fait qu’il venait tout juste de faire apparaître 120 millions en Yens. Faussement curieux, et comme personne n’avait fait de remarque sur la provenance des fonds, je ne pus m’empêcher de le gratter un peu :
 
Je ne pensais pas que les hommes ayant peur d’être cocus représentaient une aussi viable entreprise, à moins que vous ne vendiez au détail, peut-être? Vous savez, il n’y a rien de mal à avoir quelques à côtés, j’ai moi-même quelques bâtiments lucratifs à Seikusu!
 
Je ne m’intéressais même plus aux cartes que le croupier pouvait poser. En fait, j’étais plutôt intéressé par les expressions faciales du seul adversaire digne d’avoir mon attention. Les autres joueurs, mis à part M. Matsumoto, je ne les avais encore jamais croisés, mais ils ne semblaient pas assez doués pour que je ne me sente agressé. Après tout, ce qui fait qu’un joueur de Poker est, c’est sa capacité à analyser ses adversaires avant même d’avoir jeté la première main.
 
Vous savez, le poker est un jeu très relatif, car les cartes en elles-mêmes représentent une importance relative; le gagnant d’une main donnée n’est pas nécessairement celui qui a la plus haute combinaison de cartes. C’est ce qu’on appelle le bluff!

Au moment où on m’apporta mon verre, je jetai un regard à mes deux gorilles. Les deux secouèrent la tête. Mauvais présage. Repoussant le verre sur le côté, je portai mon attention sur la partie.
 

(HRP: J'ai confondu les termes "flop" et "river" lors de mon post précédent.)

Nathéo n'avait pas décollé ses yeux des cartes sur la table depuis la relance de l'aîné. Son sourire inexpressif demeurait cependant, mais il préférait ne pas examiner les réactions de ses adversaires pour le moment: les gens cherchent à se cerner le plus vite possible, ce qui signifie qu'ils baissent rarement leur garde dès le premier tour. D'autres, comme notre détective, préféraient les faux-semblants et les approches délicates. Un homme qui fixe bêtement les cartes en souriant? Pauvre enquêteur, amateur dans le monde cruel du jeu d'argent.
L'avocat, lui, avait choisi une stratégie offensive. Il semblait passif, mais il s'en était déjà pris au vieillard, et maintenant c'est sur lui que les remarques tombaient. Il était intéressant de constater qu'Atayoshi avait lui aussi jeté sa méfiance vers celui qu'il nommait Matsumoto, et l'ancien était demeuré inflexible et stoïque. Le ton de Nathéo demeurait plat, et calme. Il ne releva pas les yeux lorsqu'il répondit:

"Je possède de bons placements. Plus que de surveiller les infidélités, mon job consiste à tout savoir. Surveiller les marchés boursiers est une chose, mais garder un œil sur ce qui fait le cours des actions en est une autre. Par ailleurs, je m'occupe autant des cocus que vous des voleurs à l'étalage."

La bourse, bonne excuse par excellence. Avec des actions et de l'argent virtuel, ses propos étaient invérifiables. Quand bien même, l'homme le plus à même de fourrer son nez dans les affaires des autres dans cette pièce n'était autre que lui-même. Don't try to fool me! Lorsque vint son tour, Nathéo suivit la relance de Matsumoto. Il perdrait sans doute cette manche ou s'arrêterait au turn, mais la réaction du vieil homme l'intéressait. Il faudrait voir la suite. Toujours les yeux rivés sur le flop, le gentleman poursuivit:

"Par ailleurs, je suis surpris de vous voir si léger, après cette fameuse affaire Koga. Mais je vous remercie de trouver le temps de vous inquiéter sur mon budget. Pour ma part, je m'inquiétais pour vous, Mr. Hamachika..."

Il releva les yeux vers un autre des participants, qui était resté silencieux depuis le début de la partie. Et comme il s'y attendait, plusieurs regards convergèrent vers ce même homme. Lorsqu'un investigateur vous pointe du doigt, la foule suspicieuse n'a d'yeux que pour vous.

"... Les actions de votre société déclinent, don't they? Je suis heureux de savoir que votre compte en Suisse vous permet toujours ce genre de divertissements."

Ses yeux se perdirent en bas à droite l'espace d'un instant, preuve qu'il était indisposé. Personne ne réagit de peur que d'autres révélations croustillantes ne soient étalées au grand jour, mis à part la femme qui laissa échapper un discret petit rire. Elle seule n'avait rien à cacher ici. Car tout le monde savait qu'elle vivait de la fortune de son sixième et actuel mari, que ses divorces et autres héritages lui avaient assuré un compte en banque bien fourni, et que dans la liste de ses ex-maris figuraient justement cet Hamachika.

Turn. Le croupier posait une nouvelle carte. Roi de pique. Damn!

Un petit sourire s’afficha sur mes lèvres. Bien qu’en apparence nous étions de chaque côté de la balance de la justice, Nathéo, ou le « Lord Slaver », et moi sommes pareils, justifiant que je ne l’aime pas beaucoup… Après tout, le pire ennemi d’un cobra est justement un autre cobra, non?
Ce détective semblait avoir fait ses devoirs sur tout le monde! Quelques piques ici et là, déstabilisant un certain joueur qui ne se contenta que de balbutier une excuse incompréhensible avant de donner ses cartes au croupier. Amusé, je pris un de mes jetons avant de commencer à le faire rouler entre mes doigts.
Personne n’est innocent, cher détective! Même si aucune preuve n’y est reliée.
C’était ma réponse passe partout, même si la dernière moitié était surtout reliée à l’affaire Koga… Le sourire que mon visage arborait toujours présent, je regardai distraitement la tablée. La bourse… Bonne excuse. Malheureusement je ne pouvais pas renchérir là-dessus, je me contentai donc de voir comment tout ça allait tourner.
Un rapide coup d’œil à mon verre pour remarquer une petite bulle s’étant formé, tel une bulle d’huile dans un verre d’eau… Mieux vaut ne pas en faire tout un plat!
Donc je peux en conclure que vos investissements se sont avérés fructueux… Je n’ai malheureusement pas ce don, ma seule force, c’est mon talent d’orateur!
La vente et le droit nécessitent seulement une bonne parole, et des bons outils, mais quand on y met le prix, les outils se trouvent rapidement!

"Oh, j'ose espérer que vous avez d'autres atouts dans votre manche. Je doute que la parole ne vous soit de quelque secours lors d'une partie de poker."

Si, bien sûr que si. Et ils l'avaient déjà tous deux prouvé. Mais la soi-disant pique avait amusé l'assistance, à l'exception bien sûr de Matsumoto. Cela les confortait dans l'idée que l'avocat n'était pas hors d'atteinte, et permettait de distinguer les imbéciles parmi les joueurs. Même le croupier avait souri. Nathéo était passé à cette fausse offensive simplement par distraction: il avait couché ses cartes devant lui tout en parlant, et personne mis à part le croupier ne l'avait relevé. Même dans la défaite, il avait su montrer les crocs.
Nathéo profita de son recul par rapport à la manche en cours pour faire le point. Il y avait deux choses importantes à savoir sur Hiro Atayoshi. La première était qu'un avocat ne présente que les preuves qu'il désire présenter. Et la seconde était que le plan d'un esclavagiste va toujours au-delà des apparences. Il faisait face à son plus grand rival, à un businessman tout aussi talentueux que lui. Absolument rien ne prouvait que l'avocat n'avait aucun complice parmi les joueurs. Même si rien ne prouvait cet état de fait non plus, la possibilité n'était pas à exclure.

Le détective songeait de plus en plus à user de sa capacité de possession sur un joueur de la tablée. Mieux, s'il pouvait avoir le corps d'un des gorilles d'Atayoshi, il pourrait s'infiltrer dans les affaires de son ennemi. C'était une chance inesperée. Malheureusement, il lui faudrait un moment seul à seul avec son "hôte", le temps de créer un clone remplaçant, puis de prendre le corps. Il ne savait ni sur qui jeter son dévolu, ni s'il aurait l'occasion de le faire. Il avait déjà, en de rares occasions, truqué des parties de poker ainsi. Il est plus aisé de remporter une partie quand vous savez ce que l'un des autres joueurs a en main, encore  plus s'il fait tout pour vous faire gagner. Et sur Terre, nul ne pourrait soupçonner l'utilisation de ce procedé.

La manche se termina sur la victoire d'Hamachika. L'espace d'un instant, il sembla que le doyen de la tablée était satisfait, comme s'il l'avait... Non! Etait-ce sa façon de se laisser sous-estimer?

Nouvelle donne.