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L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

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Ludmilla

E.S.P.er

 

C'est un cri qui la réveilla. Un cri suraigue, qui eut le mérite de la faire grimacer comme une enfant contrariée. Le corps dissous de Ludmilla redevint celui d'une jeune femme, et elle atterit à nouveau sur ce matelas aussi froid et dur que le marbre, quittant à regret son statut d'étoile perchée hors de la réalité, au creux du cosmos. Son regard bondit vers la lucarne, là, à côté d'elle. Dehors, il faisait encore noir. La lune, dorée, dodelinait dans le ciel, et les étoiles semblaient s'entrechoquer silencieusement. La jeune fille remonta sa couette sur ses jambes, et se surprit à trembler. De froid. De peur. Elle n'en savait foutrement rien. Un battement de cils, et ses paupières se couchérent sur ses orbites. Puis ce cri résonna à nouveau dans cette immense salle, où dormaient tous les esclaves à vendre. Elle put sentir que certains remuaient sur leurs couches, intrigués et effrayés. Cette fois, elle se redressa carrément, cherchant à se diriger vers ce son inquiétant ... Mais elle tomba. Les liens à ses pieds, l'empêchait de remuer comme bon lui semblait. Elle serra les dents, s'emmitoufflant dans cette couette dont l'odeur la répugnait, lui rappelant celle de caves dans lesquelles elle avait pu se cacher, un jour, pour éviter des coups trop violents. Ludmilla secoua la tête. Cesse de penser. Il fallait qu'elle dorme. Cette nuit serait son dernier répit avant la vente.

Et bien, évidemment, elle ne parvint pas à se rendormir. Si bien que, le lendemain, lorsqu'à 7 heures, on installa les esclaves, enchainés dans des cages, sur le marché de Nexus, Ludmilla avait ce regard fuyant et épuisé propre aux insomniaques. Les mains et les pieds libérés de leur carcan, la petite s'agita dans cette cage bien trop grande pour elle. On aurait pu y faire tenir quatre comme elle en largeur, mais elle ne pouvait même pas tenir debout tant la cage était basse. Elle avait la sensation d'être un animal de foire, que l'on regarde en ricanant, à qui l'on jette des piècettes ou de la nourriture. Oubliant sa situation dégradante, la jeune fille prit la peine de bailler, quand son propriétaire s'approcha d'elle. Pour venir clouer, sur le devant de la cage, une pancarte. Les coups de marteau la firent couiner, tant la cage remuait, tant elle en était assourdie. Son unique réflexe fut de se replier sur elle-même, au centre de la cage, en espérant que cela cesse vite. Et cela se conclua sur un coup de pied rageur de son propriétaire, qui fit remuer violemment le carcan tout entier, et Ludmilla par la même occasion.

- Tu as intêrét à ne pas trop remuer, petite conne !

C'était son surnom, ça. Petite conne. Depuis un an, on la nommait ainsi, au point qu'elle en oublie son véritable patronyme. La jeune esclave se faufila vers un des coins de sa cage, pour espérer y lire ce qu'il y avait d'inscrit sur cette foutue pancarte.

"L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile."

Elle poussa un long soupir. C'était donc à cela qu'on la reconnaissait, maintenant ? C'était ces 10 mots-là qui décrivaient sa vie et ce qu'elle était ? Elle n'avait même plus de prénom, juste une lettre ... Elle envoya un coup rageur contre un des barreaux de la cage ... Mais cela lui fit plus de mal que de bien. A nouveau, elle couina, venant embrasser cette plaie comme l'aurait fait une mère qu'elle aurait pu avoir. Dans une autre vie. Je suis perle tombée d'un collier, au mauvais endroit, au mauvais moment, songea t'elle en baissant les yeux sur sa peau rougie. Je suis tombée sur du velours. Personne ne m'a entendue. Personne ne s'est baissé pour me ramasser. Puis elle se cala dans un des coins de la cage, proche du mur, en éprouvant la fraicheur un moment. Un vent frais, de ceux que l'on ne croise que le matin, vint la faire frissonner, tandis qu'elle remettait correctement son sari.

Une tenue rouge, orange, dorée, gravée de milles motifs exotiques. C'était là sa seule toilette. Le plus amusant, sur elle, ce n'était pas ce vêtement atypique, mais bien la quantité de bijoux qu'elle pouvait porter, pour une esclave. Des bracelets aux chevilles, dont l'un était couvert de clochettes qui tintaient quand elle dansait. Et puis, d'autres bracelets, en cascade, sur ses poignets fins. Une ribambelle de boucles d'oreilles. Et une myriade de colliers, comme des amulettes. Elle ressemblait à une princesse déchue. C'était aussi triste que beau.

Calée contre ce mur, elle ferma un moment les yeux, pour éviter les regards de ces gens qui la dévisagerait sans peine. Autour d'elle, tous les esclaves s'agitaient, hurlant, proférant des insultes dont elle ne soupçonnait même pas l'existence, cherchant à mordre ceux qui s'approchaient de trop près. Bandes de sots, vous vous ferez battre, pensa t'elle, sans le dire. Car, oui, Ludmilla ne parlait plus. Depuis presque un an. Elle couinait, parfois, pour exprimer sa douleur. Elle murmurait, souvent, des comptines pour rassurer ses comparses. Mais cela faisait un an qu'elle avait oubliée le son de sa propre voix. Cela n'embêtait pas plus que ça ses propriétaires, qui préféraient une esclave muette plutôt qu'une hystérique. On n'exige pas d'une esclave qu'elle ouvre sa gueule, juste qu'elle la ferme et qu'elle encaisse.Ce qu'elle faisait depuis sa naissance, en somme. Alors, elle resta là, immobile, les jambes repliées contre sa poitrine, maintenues par ses bras nus, le visage et les yeux fermés. Il était agaçant de deviner, tout de même, malgré ces barreaux et ce lieu insalubre - une sorte de préau immense suitant l'alcool et la sueur - qu'elle restait délicate, et presque noble.


"On a tous plus ou moins envie de disparaitre. Où qu’on soit. Et où qu’on aille. Tant que c’est loin, et différent. Alors, moi, quand la nuit vient, quand mes paupières se couchent sur mes orbites, quand je me tourne, me retourne, me détourne sur les draps, quand ma chevelure mord l’oreiller, je deviens une étoile. La plus douce, la plus paisible des étoiles .. Celle qui se pense libre de vagabonder où bon lui semble, quitte à foutre en l’air la galaxie toute entière. Je m'évapore. Je me dissous. Je rejoins le cosmos. Et ne reviens que lorsque mes songes prennent fin."


"Si tu m'apprivoises, je connaitrais un bruit de pas qui sera différent des autres. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Alors, s'il te plait, apprivoises-moi."

Rien à redire.
Rien à ajouter.

William Dolan

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 1 dimanche 10 juin 2012, 14:52:43

Machinalement, l'homme se racla profondément le gosier puis cracha un énorme glaire sur le sol poussiéreux de la rue. William suivit l'immondice des yeux puis reporta un regard blasé sur son interlocuteur. Celui-ci, n'ayant pas remarqué le coup d'œil désapprobateur, se gratta l'entre-jambe avant de continuer le discours qu'il tenait d'une voix grasse et désagréable.

-M'sieur Dolan, j'ai trouvé un lot pour pas cher : 25 mille. - Il désigna une cage remplie d'une quinzaine de terranide au regard vide et à l'aspect famélique -. C'est pas de la grande qualité mais y faudra juste les remplumer un peu.

William observa l'homme aux dents jaunes – lorsqu'il y en avait encore – et aux joues noirâtres, où on ne savait pas vraiment si c'était de la saleté ou bien des touffes de barbe mal rasées. Pourquoi devait-il toujours tomber sur des collaborateurs de cet acabit? Peut-être parce que seules les vermines parvenaient à trouver d'autres vermines.

-C'est bien Berrick, fit William en détournant la tête pour se soustraire à l'haleine fétide de l'homme. Nous avons le compte. Rentrons maintenant.

-Heuuu, j'ai promis au gars qui me les a vendu qu'on lui achèterait aussi un esclave dans son stand haut de gamme. Mais faut pas vous inquiéter, j'comptais prendre une p'tite gazelle pour moi t'façon. Héhéhé!

-Faites! Qu'on en finisse.

Berrick hocha la tête et décocha à William un sourire édenté avant de se rediriger vers le vendeur qui avait repris ses affaires. Les deux hommes s'entretinrent quelques instants et ils se dirigèrent vers une cage individuelle. Dolan ne s'intéressa pas à ce qu'elle contenait et supervisait plutôt le transport de la marchandise qu'il venait d'acheter. Ses hommes étaient déjà en train d'attacher les sangles au chariot pour maintenir en place la grosse cage en fer. Il était tous vêtu du même uniforme beige et ample, le visage masqué par un chèche de la même couleur. Sur leur flanc, un tulwar dépassait.

Un bœuf meugla fermement lorsqu'on l'attacha au convoi, comme pour donner le signal de la fin des préparatifs. Certains des hommes s'étaient déjà assis sur les bords du chariot tandis que l'un d'eux amena à William un cheval à la robe alezan. Tout étant prêt pour le départ, le jeune homme prit un air impatient et entreprit de cherche du regard Berrick qui lui faisait prendre du retard. Heureusement, sa colère naissante s'apaisa légèrement lorsqu'il vit revenir le bonhomme qui trainait derrière lui une esclave par une laisse. Bien entendu, l'homme ne faisait preuve d'aucune douceur et tirait avec amusement sur le collier pour faire trébucher la jeune femme.

-Elle est jolie, hein? Fit Berrick, une fois arrivé à la hauteur de son patron. Elle a couté chère mais je sens qu'elle vaut le coup. - L'homme pressa alors un sein de la jeune fille, jusqu'à lui faire mal, et renifla son odeur – Aaaaaah! Elle pue pas le vieux sperme, elle au moins. Mais ça risque de changer. Huhu!

Ignorant l'attitude répugnante de son homme de main, William observa l'esclave. Elle portait un sari et une montagne de bijou qui la faisait ressembler à une princesse. Cela avait du couter chère de l'acheter avec toute ces ornements sur le dos. Pourtant, ce n'était pas cela qui gênait l'avocat. En effet, il s'agissait d'une humaine et William avait une toute autre opinion des esclaves humains par rapport aux esclaves terranides. Les uns étaient des personnes et les autres des animaux. C'est pour cette raison que William grimaça avant de se détourner. Après tout, ce n'était pas son esclave et donc pas ses affaires.

Il grimpa alors sur son cheval et pointa son regard vert sur Berrick. Dire qu'il n'avait pas besoin d'être perché pour regarder les gens de haut, alors sur sa selle, on pouvait presque sentir son mépris venir vous embrasser. D'un geste, il tira sur sa cape pour la rabattre sur son épaule, laissant voir sa chemise de lin blanche, où des fils en argent s'entrelaçaient sur son torse. Ceux-ci formaient un motif qui représentait un faon empêtré dans les ronces, symbole de la famille Dolan et de la noblesse qui parcourait son sang.

-Mettons-nous en route, déclara-t-il en faisant faire volte-face à son hongre.

Berrick acquiesça et entraina son esclave en tirant vigoureusement sur la laisse. Il la souleva ensuite et la chargea comme un sac sur le chariot du convoi. Il la rejoingnit bien vite, en soufflant comme un buffle sur le coup de l'excitation.

-Y va bien falloir s'occuper pendant le voyage. Hein, p'tite princesse? Fit l'homme en tentant déjà de glisser ses grosses paluches sales dans le décolletée de la jeune femme.

-Certainement pas, tonna la voix de William avec colère. Vous profiterez de votre... acquisition lorsque nous serons arrivé et hors de ma vue!

Le ton de Dolan avait non seulement été colérique mais haineux, attirant quelques regards curieux des gardes qui avaient interrompu leur activité pour observer la scène. Berrick lui lança alors un regard penaud, ne comprenant pas vraiment ce qu'il avait fait de mal, et chercha ses collègues du regard en quête de soutien. N'en recevant pas, il commença sagement par retirer ses mains de son esclave, puis émit un faible « d'accord, d'accord » à l'adresse de William.

Ce dernier continua à fixer l'homme pendant quelques secondes supplémentaires avant de lever la main, lançant ainsi le signal du départ pour le désert de l'ouest.
« Modifié: mardi 12 juin 2012, 20:10:42 par William Dolan »

Ludmilla

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 2 dimanche 10 juin 2012, 16:58:33


Non, elle n'avait pas émit le moindre son. Ni quand ce sale type était venu la regarder, essayant de jouer avec comme l'on s'amuse d'un chaton affaibli. Ni quand on l'avait sortie de sa cage sans douceur, la traînant sur le sol sans aucune considération. Ni même quand cet homme dégoutant passa une laisse autour de son cou, manquant de lui arracher ses nombreux colliers. L'habitude, sans doute. Sa peau meurtrie rougit davantage en effleurant les pavés qui constellaient le sol de ce préau sordide, et elle manqua de s'ouvrir la main avec un morceau de verre qui traînait, là. Elle ne dut son salut qu'à ce sale type, qui tira violemment sur la laisse pour qu'elle se dirige vers lui. Un hocquet. Mais pas un son. La jeune esclave le laissa la tripoter sans rien dire, laissant juste une maigre grimace transparaître sur son visage si doux. Encore une fois, elle ne protesta pas, n'hurla pas comme l'aurait fait une autre esclave, encaissant silencieusement sa dignité qui s'égrenait. Son regard d'écume s'égarait sur la contemplation du sol, des murs, mais ne se perdait jamais à regarder un être humain. On pouvait prendre cela soit comme du mépris, soit comme une soumission certaine. Ou un peu des deux.

Le seul son qui outrepassa la barrière de ses lèvres arriva pour trahir sa douleur, au moment où il la jeta sur le chariot. Ludmilla se releva, prenant appui sur les paumes de ses mains, sans broncher. Et quand il s'approcha d'elle, elle ne remua pas non plus. La jeune fille en était venue à se dire que ce n'était qu'un mauvais - voir très mauvais, vu l'allure de cet homme - moment à passer. Et cela prit fin. L'esclave ne put s'empêcher de lever un moment les yeux vers cet homme, qui semblait fort noble, et à qui elle devait le salut - au moins temporaire - de sa virginité toute fraîche. Et son nouveau propriétaire se retira. Je suis une perle tombée d'un collier. Au mauvais endroit. Au très mauvais moment. Ludmilla se cala contre le mur, pour regarde ce type s'éloigner, sans rien ajouter. Tous ses bijoux tintérent dans cet ultime effort, tandis qu'elle fermait les yeux.

Ne plus voir. Ne plus parler. Ne plus entendre. C'en était presque libérateur. Et elle savait que cela la ménerait au sommeil. La nuit avait été bien trop courte pour elle, et l'épuisement griffait ses muscles, au point qu'elle se mette à rêver d'un sommeil réparateur. Les cris, de cette nuit, provenait des plaintes d'une esclave qui se faisait soit battre, soit violer par leur propriétaire. De temps en temps, il en choisissait une. L'idée même que cela puisse être elle, là, qu'il choisisse, la terrifiait encore. Elle ne put s'empêcher de caler sa tête contre le sol, s'installant en position allongée avec tout le naturel du monde. Après tout, elle n'était qu'une esclave ... Dormir ainsi, sans se soucier d'une quelconque dignité, était devenu son lot quotidien. Un soupir, et elle ferma les yeux. Un autre, et le sommeil vint la happer. Elle avait cru comprendre qu'ils feraient route, cela lui laisserait le temps de reprendre un peu ses esprits.

Ce qu'ignore Ludmilla, c'est ce qu'il se passe quand elle dort, étant donné que ça se passe, justement, quand elle dort. Ce qu'une personne aurait pu voir, là, à cet instant précis, c'est le corps de la jeune esclave qui se dissout dans l'air, jusqu'à devenir une petite boule lumineuse, blanchâtre. Une petite boule qui, d'un coup d'un seul, s'évapore vers les cieux. Car, si l'on ne voit pas les étoiles en plein jour, cela n'empêche aucunement Ludmilla de rejoindre une constellation quelconque pour s'y réfugier un moment. Son absence devenait l'effluve même de la nuit. Si William, ou un autre, avait le regard dardé sur elle à ce moment, croyez-moi, il n'aurait rien compris. Mais alors rien.

Car n'oubliez pas qu'il est impossible de réveiller une étoile. Il faut attendre que ce soit elle qui en fasse le choix.

« Modifié: dimanche 10 juin 2012, 17:07:25 par Ludmilla »
"On a tous plus ou moins envie de disparaitre. Où qu’on soit. Et où qu’on aille. Tant que c’est loin, et différent. Alors, moi, quand la nuit vient, quand mes paupières se couchent sur mes orbites, quand je me tourne, me retourne, me détourne sur les draps, quand ma chevelure mord l’oreiller, je deviens une étoile. La plus douce, la plus paisible des étoiles .. Celle qui se pense libre de vagabonder où bon lui semble, quitte à foutre en l’air la galaxie toute entière. Je m'évapore. Je me dissous. Je rejoins le cosmos. Et ne reviens que lorsque mes songes prennent fin."


"Si tu m'apprivoises, je connaitrais un bruit de pas qui sera différent des autres. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Alors, s'il te plait, apprivoises-moi."

Rien à redire.
Rien à ajouter.

William Dolan

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 3 lundi 11 juin 2012, 22:44:41

William releva un pan de son chèche beige devant sa bouche tandis qu'une bourrasque de sable lui fouettait le visage. La caravane avait bien progressé dans le désert et les bœufs meuglaient leur désaccord d'être ainsi malmenés par les éléments. Il jeta alors un coup d'œil à ses hommes dont les silhouettes s'évaporaient parmi le brouillard de sable.

-Halte, cria William.

Avant même d'avoir terminé son ordre, il savait que personne ne l'avait entendu tant les vents dévoraient toutes les paroles. Certains avaient pourtant entendu quelque chose car ils se tournèrent vers William dans l'expectative. Il leur fit alors signe de s'arrêter du mieux qu'il pu et désigna l'arête d'une dune qui pouvait servir d'abri précaire. La tempête était plus incommodante que vraiment dangereuse, mais il était inutile de se fatiguer pour rien. En tous cas, les hommes semblaient avoir compris les signes de Dolan et certains s'approchaient déjà du bœuf de tête pour faire bifurquer sa trajectoire. Le brave ruminant obéit de bon cœur et ne fut pas mécontent de se retrouver à l'abri. La partie de la dune dos au vent offrait une protection toute relative, mais il n'y avait pas d'autre endroit pour attendre la fin de la tempête.

Celle-ci finit tout de même par se calmer lentement, mais malheureusement, il n'était alors plus l'heure de repartir. Le soleil commençait à se coucher et il était hors de question de voyager de nuit. Le désert était traitre et il pouvait masquer des trous et des ravines qui ne pouvaient être aperçus que de jour. Il fallait donc monter un bivouac. William descendit de son hongre et détacha le morceau de tissu qui cachait son visage. Il s'apprêtait à donner quelques instructions lorsqu'il entendit un cri de rage près du chariot des esclaves.

-OU EST-ELLE? Vociféra Berrick.

L'homme s'agitait comme un forcené et souleva une cage vide qu'il balança par terre. Soudain, il se jeta sur l'immense cage qui abritait toute les terranides, en attrapa une et la secoua violemment contre les barreaux.

-TOI! JE SAIS QUE TU L'AS VU PARTIR! OU EST-ELLE?!

La pauvre neko cria de peur et de douleur tandis que l'homme la cognait contre les barreaux de sa cage. Avec colère, William s'empara alors d'un fouet qui servait habituellement à corriger les esclaves et d'un geste vif, l'enroula autour du cou de Berrick. Ce dernier émit un bref couinement lorsque la natte de cuir lui serra le larynx et tomba à la renverse lorsque Dolan tira avec force pour l'éloigner de la terranide. D'un mouvement ample, il relâcha un Berrick suffoquant, et se mit à le toiser de son habituel regard glaçant.

-Que signifie ces éclats, demanda-t-il d'une voix calme mais autoritaire.

Berrick se redressa, la face violacée, par la colère ou l'intervention de William qui ré-enroulait tranquillement le fouet en attendant patiemment les explications de son homme de main.

-Mon esclave a disparu! S'exclama l'homme avec un brin de désespoir dans la voix.

William fronça alors les sourcils et dut convenir que c'était vrai puisque la cage sur laquelle Berrick avait déchargé sa colère était vide. La petite futée avait sans doute profité de la tempête pour s'enfuir par un moyen quelconque. Le jeune homme sourit par devers lui. Finalement, il était bien aise que cette petite se soit enfuie. Personne ne méritait d'être le jouet sexuel de cette immondice de Berrick. Pour une fois, le destin était du bon côté.

Pourtant, ce n'était pas l'avis de Berrick qui, devant le manque de réaction de William, souffla avec colère et empoigna la crinière du cheval le plus proche de lui. Celui-ci émit un hennissement de surprise et trébucha alors que le bonhomme y hissa son corps massive. Par sa poigne et son manque de délicatesse, il parvint bien vite à dompter le cheval qui s'agitait et lança à William un regard déterminé.

-Désolé sir Dolan, mais c'est deux mois de salaire qui s'est enfui dans le désert, fit le bonhomme avec le plus grand sérieux. Je vais rattraper cette petite garce. Elle n'a pas du aller bien loin.

William ne répondit pas et ne fit que lui jeter un regard sombre. Puis finalement, il hocha la tête à contrecœur pour lui donner son approbation. Berrick donna alors un grand coup de talon dans les flancs de l'équidé et partit au galop dans le désert qui commençait à s'assombrir.

« Pauvre fille », se dit William tout en ordonnant que la cage vide soit de nouveau hissée à sa place. Il était préférable qu'elle meurt dans ce désert plutôt qu'elle retombe entre les mains de cet abjecte personnage.

Ludmilla

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 4 mercredi 13 juin 2012, 20:20:51





... Et, bien évidemment, Ludmilla ne se rendit compte de rien. Enfouie dans son immense cocon étoilé, réduite à l'état d'une simple surbrillance dans le ciel, la jeune fille dormait. Elle ne rêva pas, laissant un long songe noir et apaisant prendre possession de son esprit pendant quatre heures. Oh, pour elle, cela dura une éternité. Si ce n'est plus. Quand on dort, le temps s'écarte et s'écartèle, avant de se dissoudre dans un battement de cils. Alors, après ce battement de cils libérateur - ou destructeur - la belle dormeuse s'éveilla, enfin. Son corps réapparut petit à petit dans sa cage étroite, la froideur des barreaux mordant sa peau, le vent giflant son visage. Elle releva doucement la tête, et une bourrasque vint loger quelques mèches dans sa bouche. Silencieusement, encore, elle pesta, remuant son visage à la manière d'un animal. Prés du convoi, dans une immense cage, d'autres esclaves tiquaient, soucieux de cette tempête et agacés de se prendre du sable dans le visage. Ludmilla grinça les dents, et sentit le sable crisser sous elles. Un couinement, et elle cracha sur le sol. La jeune esclave remarqua que le vent se couchait petit à petit, demeurant néanmoins franchement violent. Parfois, son cri s'atténuait, tant il était essoufflé, puis le vent reprenait de la puissance et crachait sur tous les visages. Quand elle était enfant, Ludmilla prenait les bourrasques pour des injures des dieux à son égard.

Se redressant, son regard fouillait les environs. La nuit était tombée, et ils étaient à l'abri. Il faisait plutôt froid, et ces larges gifles du ciel n'aidaient en rien à ce qu'elle se réchauffe. La jeune fille se replia sur elle-même, essayant de calmer les frissons qui l'agitaient désormais. Oh, elle aurait donné beaucoup pour dormir très longtemps ... Se réveiller en pleine nuit était franchement déplaisant. Elle s'agita légèrement, et chercha du regard son propriétaire.

- Tu es revenue ?

Ludmilla sursauta. C'était une esclave, une Terranide rousse aux grandes oreilles de renard, qui s'adressait à elle. Immédiatement, elle fronça des sourcils, ne comprenant foutrement rien à ces propos.

- Tu étais partie, hein ? continua t'elle, sans prendre la peine de chuchoter.

La jeune fille mima un signe d'incompréhension, paumes levées au ciel. La Terranide grimaça.

- Ton propriétaire est parti t'chercher, y'a bien quatre heures. Et il est toujours pas rev'nu. Si y crève, ce s'ra de ta faute. J'espère que t'aime le fouet.

Mais Ludmilla s'était recouchée dans sa cage, montrant son dos à cette créature. Créature qui semblait bien entamée, voir complétement tarée, et qui s'exprimait avec un langage qu'elle devinait issu des pires campagnes de Nexus. Dieu, qu'elle détestait cela ... Même si elle 'nétait qu'une esclave, elle appréciait qu'une personne sache s'exprimer avec soin. Et voilà qu'elle se prenait à parler de disparition, de réapparition, comme si Ludmilla n'était qu'un esprit. Si j'étais partie, jamais je ne serais revenue, songea t'elle en fermant les yeux à nouveau. Elle attendit de n'entendre plus aucun son provenant de la cage voisine, pour épier ceux des humains qui dirigeaient ce convoi. Cet homme, là, qui lui avait sauvé la mise, où était-il ? Elle s'en voulait presque de ne pas l'avoir remercié d'un sourire. Cela ne coûtait rien, après tout.

Un long soupir, et elle chercha à tendre le cou pour voir le campement. Des formes remuaient, à gauche et à droite, et elle devinait la chaleur d'un feu, non loin d'elle. Elle aurait donné beaucoup pour s'y réchauffer un peu, elle qui mourrait presque de froid. Les autres esclaves avaient eu droit à quelques couettes de fortune, mais on ne lui avait rien offert. Ludmilla secoua la tête, dépitée. Sa maigre consolation était que les bourrasques gelées s'étaient évaporée, au profit d'une bise incisive. C'est à l'instant où, repliée sur elle-même, elle cherchait à s'endormir à nouveau, qu'elle éternua. Une fois. Deux fois. Des couinements aigus accompagnaient ses éternuements, tandis qu'elle s'efforçait de rester aussi discrète que possible.




"On a tous plus ou moins envie de disparaitre. Où qu’on soit. Et où qu’on aille. Tant que c’est loin, et différent. Alors, moi, quand la nuit vient, quand mes paupières se couchent sur mes orbites, quand je me tourne, me retourne, me détourne sur les draps, quand ma chevelure mord l’oreiller, je deviens une étoile. La plus douce, la plus paisible des étoiles .. Celle qui se pense libre de vagabonder où bon lui semble, quitte à foutre en l’air la galaxie toute entière. Je m'évapore. Je me dissous. Je rejoins le cosmos. Et ne reviens que lorsque mes songes prennent fin."


"Si tu m'apprivoises, je connaitrais un bruit de pas qui sera différent des autres. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Alors, s'il te plait, apprivoises-moi."

Rien à redire.
Rien à ajouter.

William Dolan

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 5 jeudi 14 juin 2012, 22:50:20

De petits nuages de vapeur apparaissaient et disparaissaient devant la bouche des hommes emmitouflés dans leur couverture. Certains avaient fait de petits feux avec le peu de combustible qu'ils avaient dans leur paquetage, car la végétation inexistante du désert ne permettait pas d'en trouver sur place. Les esclaves se battaient pour les maigres haillons troués dont personne ne voulait, et se blottissaient les uns contre les autres pour se tenir chaud. Personne n'avait encore remarqué que l'esclave disparue était retournée dans sa cage sans crier gare.

William, quant à lui, lisait des documents à la lueur d'une lanterne. Il avait beau être un soi-disant noble Nexusien, gardien des sceaux de la couronne, et tous les titres pompeux et sans substances qui s'en suivaient, il restait un avocat, consacrant chaque minutes de son temps libre à relire ses notes. Cependant, la fatigue commençait à lui piquer les yeux et la faible lueur de sa chandelle avait du mal à percer les ombres de la nuit.

Il décida donc de se lever, frottant ses yeux douloureux. C'est alors que, par hasard, son regard passa sur la cage supposée vide et dut se rendre à l'évidence que son occupante était revenue. William s'en approcha donc, posa la lanterne sur le rebord du chariot, et jeta un coup d'oeil soupçonneux à son occupante. Il ne dit rien mais commença à inspecter la porte de la cage en passant son doigt sur les jointures afin de déceler toute forme d'effraction. Il vérifia ensuite que la serrure était toujours fermée, puis repointa un regard méfiant sur l'esclave sans dire un mot.

C'était Berrick qui n'allait pas être content. Peu importe, comment elle s'était échappée, elle devait avoir une bonne raison d'être revenu et si ce n'était pas pour faire tourner son maitre en bourrique, les autres raisons avaient de grandes chances de lui causer du tord.

-Toi, fit Dolan non pas en désignant la jeune femme mais une terranide derrière elle. Dis-moi comment elle est rentrée dans cette cage et tu es libre.

Bien entendu, il ne posait pas cette question à celle qui était concernée, sachant très bien qu'il n'aurait qu'un mensonge en guise de réponse. William avait un ton très calme et doux, comme si sa question n'avait d'autre but que de satisfaire sa curiosité. La terranide s'agita alors sous l'effet de l'excitation que lui instillait une telle promesse et se mit à parler.

-J'sais pas. Elle avait disparu et elle est r'venu, s'empressa de raconter l'esclave. Mais on dirait qu'elle est un peu simplette, elle s'rend pas compte de sa disparition... Alors... Vous allez me libérer?

-Non, rétorqua tout simplement William. Tu ne m'as pas dit comment elle a fait.

-Elle... Elle a crocheté la serrure avec sa magie, s'empressa de mentir l'esclave.

Mais William ne lui prêtait plus d'attention. De toute façon, il ne comptait pas lui rendre sa liberté, surtout pour un information dont, finalement, il n'avait pas grand chose à faire. En effet, la curiosité de William Dolan ne s'étendait qu'aux frontières de ce qui pouvait lui être profitable, ou préjudiciable. Toujours sans un mot, il s'éloigna et revint quelques secondes plus tard avec une grosse couverture de laine qu'il passa à la jeune fille à travers les barreaux de sa cage. Puis, sans un mot ni un regard, il s'éloigna...

* * *

L'aube.

Les grandes étendues de sable permettaient de voir le soleil émerger lentement des eaux diaprées de l’horizon, comme un océan d’or en fusion accueillant l’astre diurne dans une fanfare de couleurs. Au nord, sous un amas de nuage gris, une frise de lumière rivalisait encore avec le soleil timide, irisant de rouge l’étroite bande de ciel enchâssée entre cet ilot de jour et les premiers hérauts d’un très lointain orage.

Sur terre, les hommes s'agitaient sur les ordres clairsemés, mais autoritaire de Dolan. Il y avait maintenant suffisamment de luminosité pour voyager sans risque. C'est alors qu'un bruit de cavalcade étouffé attira l'attention du jeune homme. C'était Berrick qui revenait au galop forcé. Aussitôt, arrivé au niveau du convoi, il sauta prestement à terre et décrocha une gourde d'eau afin d'y boire d'amples gorgées ruisselantes. A voir son cheval, dont les pattes tremblaient, il avait dû couvrir une longue distance durant ses recherches. Le fait qu'il soit bredouille n'avait pas dû le rendre de bonne humeur.

-Pas trouvé, s'expliqua-t-il d'un air sombre. J'ai fait tout le chemin qu'elle aurait pu parcourir à pied. Je l'aurais forcement croisé. Elle a du s'enfoncer dans le désert, dans l'autre direction, et elle va y crever comme la dernière des...

Berrick interrompit son discours amer lorsque ses yeux noirs se posèrent sur la petite cage qui abritait son esclave. Les yeux ronds, il la fixait d'un air ahuri.

-Il semblerait qu'elle soit revenu d'elle-même pendant la nuit, déclara William d'une voix neutre, qui prouvait bien qu'il ne compatissait absolument pas.

William voyait bien que le bonhomme essayait de se calmer, mais connaissant l'animal, c'était peine perdue. Celui-ci se dirigea à grand pas vers la cage et eut un sourire mauvais à l'adresse de son esclave. Berrick sortit alors la clé qui reposait dans le fond de sa poche et ouvrit patiemment le cadenas. Il attrapa ensuite la laisse qu'il avait laissé à son cou et tira avec force pour la faire tomber par terre. Il ne s'arrêta pas là et traina même la fille dans le sable, pour finalement la relever, en lui serrant le cou. Il arborait un sourire mauvais, remplit de cruauté et de malveillance, qui promettait mille souffrance à celle qui s'était moquée de lui.

-T'es revenue voir papa, dit-il entre ses dents serrées. Et bien tu ne vas pas le quitter dans ce cas.

Avec une force qu'il ne maitrisait pas, il serra la jeune fille dans ses bras au point de lui rompre les os puis lui infligea un « baiser » qu'il était difficile de qualifier comme tel, tant il était violent et dépourvu de la moindre douceur. Il fit ensuite passer sa langue sur sa joue, tout en lui murmurant des promesses d'agonie, et finit par la caler sous son bras pour la transporter comme un vulgaire sac.

William n'avait eu aucune réaction et observait simplement Berrick de son habituel regard perçant.

-Alors sir Dolan, on y va? Fit-il avec entrain. J'ai une pêche d'enfer ce matin!

-Tant mieux pour vous, Berrick, déclara William d'un ton égal. Ouvrez donc la voie, ça vous occupera.

Avec un sourire ravi, le bonhomme acquiesça et s'éloigna avec son fardeau. Cependant, il dut s'arrêter lorsque Dolan l'interpella.

-Et à propos Berrick, commença William tout en enfilant sa cape beige. Cette fille m'appartient maintenant. Veuillez la lâcher sur le champ.

Berrick ne comprit pas tout de suite les propos de l'avocat et le regarda d'un air bête. William n'ajoutant rien d'autre, et il dut donc pousser un « Quoi? » décontenancé. Le noble ne lui prêtait pas attention et comptait plutôt les pièces d'or qu'il introduisait dans une petite bourse en cuir. Lorsqu'il eut fini, il jeta la bourse qui atterrit devant Berrick.

-J'espère que vous n'avez pas exagéré en prétextant qu'elle vous a coûté deux mois de salaire, sinon j'aurais l'impression de me faire flouer.

Berrick ne répondit rien et ne fit que fixer la bourse de cuir. Cela dut lui faire réaliser que Dolan ne plaisantait pas, et il finit par plisser le nez pour signifier son désaccord.

-Cette garce est à moi et elle est pas à vendre, sir Dolan.

-Je ne demande pas, je commande, rétorqua aussitôt l'avocat dont la voix commençait à se faire orageuse.

Avec une lenteur délibérée, sa main glissa sur son côté, repoussant la cape qui masquait la garde de sa rapière. Elle se posa sur le manche et la lame eut un tintement lorsqu'elle commença à glisser le long du fourreau. A vrai dire, William ne faisait pas tant peur que cela. C'était surtout ses hommes qui commençaient à approcher dangereusement de Berrick, qu'il fallait craindre en priorité. Ce qui ne l'empêcha pas d'hésiter longuement, lançant des regards désespérés à Dolan pour qu'il se rende compte de l'injustice qu'il était en train d'opérer. Pourtant, ce dernier restait imperturbable, sa lame à moitié hors de son fourreau, ses hommes attendant qu'elle soit totalement sortie pour transpercer Berrick de leur tulwar. Finalement, l'incrédulité de Berrick se changea en colère et il lâcha la jeune fille sans douceur, la laissant sur le sable avant de décocher un dernier regard haineux à William, et de s'en aller à grand pas.

-Venez, fit doucement William en tendant sa main vers la jeune fille.

L'incident était clos. Dolan avait rengainé sa rapière et les hommes retournaient à leur préparatif. Il n'y avait que lui qui ne bougeait pas, proposant sa main avec patience.

Ludmilla

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 6 jeudi 14 juin 2012, 23:38:10

... Hop !



Ludmilla l'avait entendu, dans la nuit, s'approcher de sa cage. Cet homme, qu'elle avait vaguement cherchée du regard tandis qu'elle ne parvenait pas à s'endormir. Ce type dont elle n'avait saisie que le regard. Il avait interrogé cette Terranide affolée au langage de charretière. Terranide qui s'était empressée de mentir, d'ailleurs. Mais, durant ce court interrogatoire, Ludmilla n'avait strictement rien dit. Si on avait pu voir son visage, on aurait pu y deviner un certain apaisement, comme si sa situation ne l'affolait pas. Elle se doutait que, que son maître revienne ou non, elle morflerait méchamment. C'était son lot quotidien. Ce n'était pas aujourd'hui qu'elle se prendrait à rêver de changement. Ainsi, elle n'avait - encore une fois - pas mouftée, tentant de ne plus éternuer. Elle avait bien trop peur de se prendre un coup en retour. Ce n'est que quand il lui offrit une large couverture de laine qu'elle osa remuer, sa main attrapant sans un seul mot le lourd morceau de tissu. La couette fraiche absorba petit à petit la tiédeur de la peau de la jeune esclave, pour devenir une seconde peau, dont elle s'enveloppa petit à petit. Cette nuit, elle le savait, elle ne dormirait pas. Aucune once de sommeil n'alourdissait ses paupières. Alors, elle se retourna dans sa cage, orientant son visage vers le ciel, pour le regarder s'éclaircir au fur et à mesure du temps.

Aucun écho d'ange ne la berça.[/url]



! Hop ...

C'est donc ainsi que Ludmilla attendit que la matinée s'éveille. Les corps, autour d'elle, remuèrent, gémirent, couinèrent même, alors qu'elle restait immobile, calme, dans sa cage. C'en devenait presque agaçant, tant de silence et tant de paix. Le souffle de l'aube, chaud, caressa ses joues. Et le soleil qui se levait amena vers le campement un de ceux qui ne lui manquait guère : son propriétaire. Elle devinait ses pas, lourds, sa voix, pesante, sa respiration, suffocante comme celle d'un fumeur en fin de vie. Alors qu'elle s'apprêtait à se relever pour lui faire face, cherchant comment parer d'éventuels coups ou comment les encaisser sans rien dire, elle sentit son odeur, là, dans l'air. C'était peut-être la première chose qu'elle détestait chez lui. Il lui évoquait une bande de lard grillée, cramée sur les bords, graisseuse et collante. Rien de très appétissant, en vérité. L'homme tourna patiemment la clé dans la serrure, tandis qu'elle soutenait son regard sans rien dire, laissant juste sa respiration affolée trahir ce qu'elle ressentait.

Ce n'est que quand il la jeta sur le sable, tirant comme un forcené sur la laisse qui l'entravait, que Ludmilla couina comme un petit animal. Sa peau, à ce niveau, était rougie à force de mauvais traitements. Pour elle, qui avait eu une peau douce et soignée pendant près d'un an et demi, c'était une horreur que de la voir ainsi séchée. Son corps s'abimait au fur et à mesure du temps qu'elle passait dans ces cages glauques. L'étreinte ne lui arracha aucun cri, tant elle serrait les dents, à s'en briser la mâchoire. Son corps fin remua contre celui de cet homme, la faisant ressembler à un vulgaire poisson arraché des eaux. Ludmilla encaissa le baiser sans tiquer, se contentant de cracher au sol quand il la cala sous son bras. Dieu, qu'il sentait la sueur ... La jeune femme en avait la nausée, aussi cracha t'elle sur le sol à trois reprises, tout en remuant tant bien que mal. La pression qu'il exerçait sur son corps pour la maintenir contre lui lui faisait un mal de chien. Mal en point, elle ne put saisir la conversation qu'au moment où elle fut relâchée sur le sol. Au regard de celui qui venait de la malmener, elle cru comprendre qu'il était passé du stade de "propriétaire" à celui d'"ex-propriétaire" ... Et Ludmilla ne pouvait dissimuler sa joie.

Elle ne put se retenir de lui sourire allégrement, quand il daigna lui adresser un dernier regard. Elle leva même timidement sa main, pour lui offrir un signe d'adieu rempli d'ironie. Enfin. Elle ignorait si son nouveau propriétaire serait aussi malsain et violent, mais préférait ne pas y penser. C'est alors elle passait une main sur sa taille pour palper sa peau endolorie qu'elle l'entendit.

" Venez. "

Ludmilla tourna sa tête vers celui qui lui avait parlé, et le reconnut. C'était ce même homme a qui elle devait son salut, l'autre fois, et surtout celui de sa virginité toute neuve. Et du peu de dignité qui lui restait. Son regard oscilla entre le sien, et sa main tendue. Était-ce un test ? Allait-il la gifler si elle osait le toucher, là, s'appuyant sur lui pour se redresser ? Même en cherchant bien, elle ne décelait aucune haine dans ce regard émeraude.

Alors elle s'appuya sur sa main, se relevant avec ce qu'elle avait de grâce. Un de ses os craqua, et elle laissa une de ses mains appuyée contre sa hanche, espérant calmer ainsi cette vive douleur. Il lui avait éraflé la peau, ce con. Puis elle relâcha cette main, pour la passer dans sa chevelure fine et couverte de sable. Ses cheveux étaient aussi secs que du crin de cheval. Un hochement de tête, pour exprimer sa sympathie, sans qu'elle n'ose remuer un seul muscle. Ludmilla demeurait debout, à demi voûtée, une main sur sa taille, l'autre dans le vide, ses yeux fouillant le paysage sans oser fixer ceux de son nouveau propriétaire. Quand elle chercha à remuer, une grimace apparut vivement sur son visage, déformant ses traits. Sa peau était à vif, sous ce sari aux couleurs enchanteresses.
"On a tous plus ou moins envie de disparaitre. Où qu’on soit. Et où qu’on aille. Tant que c’est loin, et différent. Alors, moi, quand la nuit vient, quand mes paupières se couchent sur mes orbites, quand je me tourne, me retourne, me détourne sur les draps, quand ma chevelure mord l’oreiller, je deviens une étoile. La plus douce, la plus paisible des étoiles .. Celle qui se pense libre de vagabonder où bon lui semble, quitte à foutre en l’air la galaxie toute entière. Je m'évapore. Je me dissous. Je rejoins le cosmos. Et ne reviens que lorsque mes songes prennent fin."


"Si tu m'apprivoises, je connaitrais un bruit de pas qui sera différent des autres. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Alors, s'il te plait, apprivoises-moi."

Rien à redire.
Rien à ajouter.

William Dolan

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 7 samedi 16 juin 2012, 19:18:50

William accompagna la main de la jeune fille pour qu'elle se relève. Tandis qu'il la regardait grimacer de douleur, l'avocat se demandait ce qu'il allait pouvoir faire d'elle. Elle ressemblait à une petite princesse capturée par de vilains bandits avides d'une rançon. Il n'aurait même pas été étonné de voir un prince charmant sur son cheval blanc, surgir pour lui reprendre la douce jeune fille. Car, en effet, elle était bien à lui. C'était quelque chose de plutôt difficile à assimiler, bien qu'il soit un esclavagiste notoire. En effet, William ne faisait qu'acheter des terranides pour les vendre à des milliardaires oisifs et excentriques, mais il n'avait jamais pris d'esclave pour lui-même. Et puis, le fait qu'elle soit une femme humaine changeait beaucoup de chose quant au respect qu'il était sensé lui témoigner.

L'émeraude de ses mires tentaient de couler dans les eaux turquoise des yeux de la jeune femme, sans qu'il n'esquisse le moindre geste. La grâce naturelle qui émanait de la jeune femme et sa féminité délicate avait tout pour plaire à William. Sa beauté le captivait et il ne se retenait pas de s'en abreuver. Pourtant, il ne souriait pas, ni ne semblait sous le charme. En fait, il considérait sérieusement la possibilité de la libérer sur le champs, afin qu'elle ne traine pas dans ses pattes, mais où pouvait-elle bien aller dans ce désert implacable? Pour l'instant, il devait donc la garder avec lui, et assez près pour que Berrick ne soit pas tenté de le défier en portant atteinte à la jeune fille pendant qu'il avait le dos tourné.

-Tu ne parles pas beaucoup, n'est-ce pas? Fit remarquer Dolan, avant de lâcher un bref soupir. Au moins, tu ne me casseras pas les oreilles.

William s'approcha alors d'elle et lui retira la laisse qu'il jeta négligemment à terre. Il posa ensuite délicatement ses mains sur ses flancs, prenant garde d'éviter sa taille qui semblait la faire souffrir. Il la souleva ensuite avec une exclamation d'effort et la posa de biais sur la selle de son cheval.
Il devait l'emmener avec lui, mais il ne comptait pas chambouler son emploie du temps pour elle. Là où il irait, elle devrait suivre, sans rechigner. De toute façon, la petite princesse se rendrait très vite compte qu'il faisait plus bon vivre d'appartenir à un avocat richissime, vouant une sorte de culte à la gente féminine, qu'à un gros bras puant au déviances sexuelles maladives.

Lorsqu'il fut assuré qu'elle tenait bien en place, William fit passer les rênes de son hongre par-dessus son encolure et le fit avancer derrière lui en le tenant par la bride. C'était un spectacle plutôt incongru pour les terranides qui observaient sans comprendre un esclavagiste marcher à côté de son cheval, monté par l'une de ses esclaves. Ce n'est pas banal.

Le soleil était au zénith et le paysage tremblotait sous l'effet de la chaleur étouffante du désert. William avait remis son chèche beige et avait donné une des couvertures de laine à son esclave pour qu'elle puisse protéger sa tête des rayons du soleil. Le jeune homme commençait à s'épuiser et regrettait presque de ne pas être monté avec elle sur le cheval. Il lui jetait parfois des coups d'œil, tantôt pour la surveiller et tantôt par simple plaisir. C'est alors qu'un homme le héla en prononçant un mot étouffé par son chèche. De toute évidence, tout le monde semblait l'avoir compris car son intervention fut saluer de nombreuses ovations. Leur destination était en vue. Enfin.

Cette dernière ne payait pas de mine. Il s'agissait d'une minuscule ruine à moitié ensevelie par le sable. Il n'y avait que le haut d'une tour à peine plus large qu'un homme qui surgissait du sable, accompagné de quelques murs crénelés par l'érosion. Pourtant, on pouvait deviner que la structure était bien plus grande qu'elle n'y paraissait et que ce qui était sous le sable devait être bien plus imposant. Le convoi fut conduit près des ruines. Là, entre la petite tour en ruine et le vestige d'une pièce que l'on pouvait deviner grâce à ses quatre murs encore debout, se trouvait un draps déchiré, tendu sur plusieurs mètres entre les murs. Le morceau de tissu ondulait gracieusement, de façon presque irréelle.

-Procédez! Ordonna William.

Tous les hommes s'étaient rassemblés autour du chariot qui contenait les terranides. Certains mirent des caches sur les yeux des bœufs qui renâclaient d'un air mécontent. Rendu aveugle, on leur asticota ensuite l'arrière-train avec des bâtons pour qu'ils avancent droit vers le voile. Alors qu'il aurait dû écarter le morceau de tissu pour passer dans la pièce qui se trouvait derrière, celui-ci dévora plutôt les bœufs sans un bruit, jusqu'à ce qu'ils disparaissent. Ce fut ensuite le tour de la charrue, du chariot et de la cage dans laquelle les terranides criaient d'effroi devant ce phénomène qu'elles allaient devoir expérimenter contre leur gré.

Berrick s'avança après le convoi et après avoir lâché un « On se revoit de l'autre côté » d'un ton boudeur, disparut également, avalé par le voile. L'un des hommes s'avança ensuite vers William et le salua à la manière de Nexus, en guise d'adieu.

-Bon retour, sire, souhaita l'homme d'un air gauche.

William ne fit que hocher la tête, avant de tirer son cheval et l'occupante qui le trônait, vers le portail. Les hommes avaient pensé à masquer les yeux de l'équidé pour qu'il ne panique pas et il n'opposa don aucune résistance lorsqu'il franchit le drap immatériel.

De l'autre côté, c'est les échos d'un brouhaha caractéristique des grands espaces clos, qui prit la place du sifflement de la brise du désert. La chaleur tomba d'un seul coup, laissant la place à l'air artificiel mais agréable de la climatisation. L'éclat du soleil était remplacé par de long néons qui zébrait ce qui ressemblait à un immense hangar aménagé. Dans son dos, on pouvait voir une grande arcade dans laquelle ondulait le même voile déchiré. Des hommes commençaient déjà à décharger les esclaves de leur chariot pour les mettre dans les nombreuses cages que l'on pouvait apercevoir, sous les vociférations de Berrick qui tentait de faire passer ses insultes pour des ordres autoritaires. Le bonhomme intercepta ensuite une terranide à l'œil hagard et l'emmena sans ménagement avec lui, prenant la direction des toilettes. Nul besoin de se demander ce qu'il allait faire avec, mais William décida de laisser couler cette fois. Il se fichait éperdument du sort des nekos.

L'avocat dut enfin reporter son attention sur son cheval qui frappa le sol d'un air mécontent, sans doute effrayé par le changement d'atmosphère. Le jeune homme lui retira alors les caches qui lui masquait la vue et la bête se calma.

-Bienvenue sur terre, déclara William en présentant une nouvelle fois sa main afin que la jeune femme puisse descendre.

Ludmilla

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 8 samedi 16 juin 2012, 21:33:41


Une petite princesse … Oh, Ludmilla l'avait été. Une jolie petite femme dont on prend soin, que l'on chérit, que l'on couvre d'attentions et dont on prend en compte chaque caprice, les exécutant tant bien que mal. Cette époque là lui manquait. Vraiment beaucoup. Depuis cette époque, Ludmilla avait la sensation que chaque matin n'aurait rien à voir avec le précédent. Tout était dû au hasard, tout pouvait s'inverser et se renverser le temps d'une expiration. Si l'on prenait en compte sa vie, elle n'avait après tout été que chamboulement. Un jour, elle était couverte d'or et admirée, le lendemain traînée dans la boue et violée. Et voilà qu'elle se retrouvait, actuellement, à son point de départ : vierge, couverte d'un sari soigné et de bijoux étincelants. Comme une offrande.

- Tu ne parles pas beaucoup, n'est-ce pas?

Ses bracelets tintèrent, comme seule réponse, tandis qu'il continuait à parler.

- Au moins, tu ne me casseras pas les oreilles.

Elle ne put retenir un sourire. Il avait bien raison. Le silence est d'or, disent certains. Elle, elle estimait que ce n'était qu'une cicatrice de son mode de vie : muette parce qu'elle n'avait rien à dire. Juste à entendre. Cela lui suffisait amplement.

Lorsqu'il lui retira sa laisse, elle crut mourir de bonheur. Elle devinait son cou irrité, sa peau asséchée, mais n'en avait cure. Retirer cette laisse, c'était lui offrir un goût de liberté. Minime, mais délicieux. Elle se laissa hisser sur le cheval, toujours sans mot dire, savourant le simple fait de ne plus être dans cette carriole qui sentait la sueur et la poisse. Certains Terranide, déjà, la montrait du doigt. Elle lui offrit simplement un doigt d'honneur en retour, récoltant quelques insultes. Celles là étaient promises à un avenir peu brillant, auquel elle avait bien trop goûté. Alors, autant profiter de ce moment, là, précis, où tout allait à peu près bien pour elle. Durant ce trajet, la jeune fille ne fit que penser. Elle n'était pas épuisée. Elle n'était pas affamée. Elle ne craignait pas le soleil et ne pipait pas mot. Le rôle de princesse muette lui allait à ravir.

C'est quand il arrivèrent à destination qu'elle sentit une vague de frayeur l'envahir, manquant de la faire tomber de cheval. Des Terranides étaient extraites de leur cage, emmenée ici et là par des types aux allures peu rassurantes, et Ludmilla se mit à craindre qu'il lui arrive la même chose. Allait-on la balancer à ces types en manque de cuisses grandes ouvertes et de gémissements étouffés ? Non, non, elle avait donnée. Son regard affolé se perdit dans la contemplation effrayée des lieux, ne se posant nulle part, quand …

- Bienvenue sur terre.

Elle baissa les yeux. Il était là. Il lui tendait la main. Et son cœur cessa de menacer de lui déloger des vertèbres, calmant sa frayeur. Maladroitement – elle tremblait encore – elle attrapa cette main tendue, s'y appuyant doucement, pour venir toucher le sol de ses pieds nus. Elle resta un moment à le regarder, sans rien dire.

- ... Merci.

Un miracle. Un mot. Une voix. Aussi fine qu'on aurait pu l'imaginer, laissant entendre qu'elle savait divinement chanter et conter. Récupérant sa main, elle la plaça devant sa bouche, frottant ses lèvres comme pour les sceller, tandis que son cœur s'était remis à battre. Il semblait tout affolé, qu'elle sache parler, et elle-même ne reconnaissait même pas le son de sa voix. Cela faisait bien un an qu'elle s'était tue. Un an, c'est long, reconnut-elle. Puis, de sa main, la jeune esclave vint caresser son sari, un peu froissé, pour l’aplanir un peu. Elle était esclave, certes, mais ne devait pas ne pas être présentable pour autant.

Son regard se perdit à nouveau dans le paysage, et, avec un pincement au cœur, elle vit disparaître derrière de lourds murs une des Terranides qu'elle avait un jour bercée par des comptines apaisantes, après qu'elle se soit fait battre. Un voile de tristesse passa dans son regard d'écume, puis elle se tourna vers William, hochant la tête en mimant un sourire pour le remercier encore. Elle lui devait beaucoup, sur ce coup là. Si ce n'est plus.
« Modifié: samedi 16 juin 2012, 21:39:47 par Ludmilla »
"On a tous plus ou moins envie de disparaitre. Où qu’on soit. Et où qu’on aille. Tant que c’est loin, et différent. Alors, moi, quand la nuit vient, quand mes paupières se couchent sur mes orbites, quand je me tourne, me retourne, me détourne sur les draps, quand ma chevelure mord l’oreiller, je deviens une étoile. La plus douce, la plus paisible des étoiles .. Celle qui se pense libre de vagabonder où bon lui semble, quitte à foutre en l’air la galaxie toute entière. Je m'évapore. Je me dissous. Je rejoins le cosmos. Et ne reviens que lorsque mes songes prennent fin."


"Si tu m'apprivoises, je connaitrais un bruit de pas qui sera différent des autres. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Alors, s'il te plait, apprivoises-moi."

Rien à redire.
Rien à ajouter.

William Dolan

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 9 dimanche 17 juin 2012, 23:36:04

Le jeune homme n'était pas vraiment surpris que la petite princesse soit effrayée. Il faut dire que ce hangar souterrain l'était incontestablement. Par contre, il ne s'attendait pas à ce qu'elle lui réponde et encore moins au timbre si doux de sa voix. William aurait dû le supposer. Il aurait dû prévoir qu'une si jolie frimousse ne pouvait être qu'associée à une voix du même acabit. Il eut donc un temps d'arrêt, avant de passer outre, et de constater que la princesse était bien plus étonnée que lui d'avoir réussi à produire un son. Aussi, il se montra patient et ne chargea pas dans la brèche pour lui poser toutes sorte de questions.

Le problème de ce qu'il allait faire d'elle n'était toujours pas résolu. Il ne pouvait décemment pas la mettre avec les autres bestioles. Déjà qu'il assumait difficilement son trafic d'esclave, tentant de dissocier les terranides du genre humain pour lui faciliter la tâche, ce n'était surement pas pour vendre cette fille à n'importe qui. William avait une conscience. Ce n'était pas comme ces imbéciles de gros vilains que l'on voit dans les films. Eux sont mauvais parce qu'ils se complaisent dans la cruauté et le malheur des autres. William, lui, c'était un choix et non pas une nature. Il était capable d'éprouver tout le panel de sentiments possibles, mais il pouvait également exercer sa volonté afin de l'ignorer.

-Monsieur Dolan, s'introduit un homme en costume qui griffonnait quelques notes sur son iPad. Nous avons déchargé et nous allons faire examiner la cargaison par le toubib.

Le consultant et William s'entretinrent quelques minutes. Ils parlaient de l'aspect famélique du stock, du délai avant qu'il ne soit vendable, des acheteurs potentiels. Un observateur extérieur aurait pu croire qu'ils parlaient de quelconque bétail, car jamais ils ne parlaient de personnes ou n'évoquaient quoique ce soit qui puisse les associer à des humains. Leur champs lexical était celui du commerce et des produits.

-... Et enfin, lorsqu'on les aura suffisamment nourri, on pourra faire les photos et on pourra les proposer aux clients, acheva le consultant qui leva son stylo électronique et jeta un coup d'œil à Dolan comme pour attendre son feu vert.

Celui-ci acquiesça, et l'homme à l'iPad rangea son engin d'un air satisfait, puis s'en fut à grand pas. William garda un air froid en permanence, comme s'il se méfiait de ses propres hommes et qu'il ne voulait surtout pas leur donner une seule occasion de tenter la moindre familiarité.

William se tourna ensuite vers la princesse et lui attrapa la main. Lui non plus ne parlait pas beaucoup et il n'avait pas envie de lui lancer des instructions à chaque fois qu'il voulait qu'elle marche, qu'elle s'arrête. Au moins, en lui tenant la main, il savait exactement où elle était et où il l'emmenait.

Le jeune homme franchit donc l'immense pièce qui abritait le portail et passa entre les cages qui abritaient les esclaves. Leurs yeux mornes de celles qui étaient là depuis quelques temps suivaient Ludmilla avec une curiosité restreinte, tandis que les terranides fraichement arrivées s'agitaient dans leur nouvel environnement.
Ensuite, le premier sas fut franchi, la princesse arrivait dans le quartier des gardes. L'ambiance y était plus confortable, un peu moins spacieuse mais plus chaleureuse. Il y avait différentes salles dédiées au sport, au divertissement ou à la détente. Cela n'était pas dû à un mouvement social qui aurait obligé William à accéder à tous les caprices de ses employés mais plutôt à une nécessité, pour compenser le fait qu'ils ne sortaient jamais durant leur mission qui pouvaient durer plusieurs semaines d'affiler.
Le deuxième sas fut franchit également. La sécurité y était doublée à grand renfort de badges divers et de contrôles. En fait, William appelait ça des sas, car ils permettaient de séparer la terre et terra de façon parfaitement hermétique. Les terriens n'allaient jamais sur terra et ceux qui comme Berrick avaient le droit de passer le portail ne pouvaient jamais dépasser le deuxième sas et entrer dans le monde auquel ils n'appartiennent pas. Le point positif pour Ludmilla, c'est qu'elle ne le reverrait plus.

Pendant ce temps, William s'était débarrassé de ses vêtements du désert. Il avait recouvert son chemisier style renaissance avec une blazer beige. Il tenait toujours sa princesse par la main, l'entrainant avec lui à travers les méandres de ses installations. Ils débouchèrent alors sur un ascenseur à demi dissimulé dans le mur qui ne s'ouvrait que grâce à un interrupteur absorbé par le décor, tel un mauvais film policier. La petite pièce mobile ne s'éleva pas pendant très longtemps et donna sur une porte de service à l'aspect innocent. Ils la franchirent puis, le brouhaha vint les cueillir sur place.

Une cinquantaine de personnes en costume allaient et venaient dans l'immense hall du building Dolan. Les immenses baies vitrées laissaient passer le peu de lumière qui parvenait jusqu'au rez-de-chaussée. C'était un monde différent, loin de la violence et de l'injustice. Il pouvait paraître froid, inhospitalier, et déroutant, mais là, on ne vous jugeait pas pour ce que vous êtes mais pour ce que vous faites. Il n'y avait pas d'esclave ici, et encore moins de noblesse.

William tenait toujours la jeune femme par la main et l'entraina dans la foule, jusqu'aux ascenseurs qui la distribuaient sur les 50 étages. Certains lancèrent des salutations au jeune PDG, et celles-ci leur fut rendu avec un sourire franc. William s'était totalement décontracté au moment même où il avait quitté son bunker souterrain. Il souriait presque, comme un poisson de mer heureux d'avoir retrouvé l'eau salée.

Bien sûr, les employés présent dans l'ascenseur s'étonnaient de voir une femme en sari accrochée à la main de Dolan, mais ils eurent au moins la délicatesse de ne pas poser de question, se contentant de lui jeter des regards appuyés. Au milieu d'une mer de costume, la princesse en sari et bijoux passait difficilement inaperçue. Bien entendu, le dépaysement ne s'arrêta pas là, William l'entraina de nouveau dans des couloirs de moquettes et de lumières artificielles. Les portes vitrées se succédaient, tout comme le bruit des machines qui crachaient leur paperasse, le ronflement de la ventilation et le doux clapotis des doigts sur les claviers. Ce monde n'avait rien à voir avec terra. Cependant, William ne laissait pas de temps d 'adaptation à la jeune femme. Il n'avait pas assez de patience pour ça.

Au final, William déboucha sur une zone plus tranquille, grâce à une porte d'accès qui s'ouvrait encore une fois avec un badge et qui semblait éloigner les fourmis ouvrière en costard cravate. La décoration du lieu changea lui aussi. Les bureaux et chaises modernes avaient fait place à du mobilier un peu plus ancien, dont le bois verni amenait une certaine chaleur. Au fond de la pièce, un jeune femme au visage avenant et à la longue crinière d'une noire d'encre, tapotait un stylo bic contre sa joue, ne se rendant visiblement pas compte que celui-ci fuyait et que l'encre maculait maintenant son joli visage. Visiblement habitué aux maladresses de sa secrétaire, William ne le lui fit pas remarquer.

Niji cessa de jouer avec son stylo lorsqu'elle aperçut son patron. Elle le cueillit ensuite avec un large sourire qui se figea légèrement de surprise en s'apercevant qu'il traina à la main une jeune fille déguisée.

-Monsieur Ekio est dans votre bureau, fit-elle d'une voix absente, ses yeux de nuit fixés sur Ludmilla. Je lui ai dit que vous étiez absent mais il a insisté pour vous attendre. Il n'a pas l'air content.

William grogna d'un air agacé, exprimant ainsi son mécontentement, puis lâcha enfin la main de l'esclave.

-Si vous pouviez vous occuper de... cette demoiselle pendant que je vais régler le problème, merci.

L'avocat avait brièvement hésité en voulant l'appeler par son nom, mais avait réalisé qu'il ne le connaissait pas. Avec un hochement de tête qu'il voulait rassurant en direction de celle-ci, il poussa la grande porte à double battant et entra dans son bureau. Niji resta donc seule avec Ludmilla en ne pouvant s'empêcher de la détailler du regard, puis comme si elle se rendait compte de son manque de délicatesse, son sourire irradia de nouveau la pièce.

-En attendant, vous voulez une boisson? J'ai aussi des magazines, un accès internet et, oh! J'ai aussi une PSP dans mon sac. A moins que vous ne vouliez quelques chose à grignoter? Je m'appelle Niji et vous?

Le raz de marée de questions concaténées les unes aux autres sans ordre logique, avait été dit d'une traite, sans respirer. Si Ludmilla avait trouvé un autre compagnon silencieux avec William, ce n'était pas vraiment le cas de la très extravertie secrétaire. D'ailleurs, elle trouva la force de se taire afin de la laisser en placer une.

Ludmilla

E.S.P.er

Re : L. 20 ans. Née à Nexus. Vierge. Calme et docile. (PV)

Réponse 10 lundi 18 juin 2012, 00:56:03



La jeune fille s'était laissée emmener comme une enfant. A l'instant même où l'avocat avait saisit sa main, sa poigne s'était resserrée autour d'elle. Cet homme qu'elle ne connaissait pas était devenu, le temps d'un échange, son seul point de repère. Famille aurait été un mot grossier pour le désigner, étant donné que la jeune esclave s'estimait, et à juste titre, éternelle orpheline, livrée à des personnes différentes chaque jour. Point de repère lui suffisait amplement. Une personne dont elle ne devait pas se détacher, pour la simple et bonne raison que l'argent les liait. Ludmilla avait un prix, et il l'avait acheté. Les maigres relations qu'elle entretenaient avec les êtres vivants se résumant à cela, la plupart du temps, elle s'y fit.

La déambulation dura un moment. Elle passa au travers d'endroits qu'elle ne connaissait pas, qui l'effrayaient plus qu'autre chose d'ailleurs, ses yeux ne trouvant aucun point d'accroche. Elle avait sur le visage cet air que l'on prête aux animaux affolés, perdus dans un lieu qu'ils ne connaissent pas, leurs regards trahissant à la fois la crainte et la curiosité. La jeune fille le suivit sans poser aucune question, jamais, n'osant même pas évoquer la douleur qu'elle ressentait le long de la plante de ses pieds. Ce n'est que quand ils changèrent d’atmosphère qu'elle laissa un lent soupir de surprise outrepasser la barrière de ses lèvres. Un « Woah. » enfantin. Tout ces gens qui grouillaient autour d'elle, comme des insectes en quête d'une quelconque nourriture, et qui croisaient son regard, l’amenèrent à sourire, amusée. Non, non, elle n'affichait plus cet air perdu. Elle les regardait, sans comprendre, et cela l'amusait franchement. Si eux se plaisaient à la dévisager, elle les ignorait. Elle était dans un autre monde. Ludmilla remarqua qu'un sourire planait sur le visage autrefois grave de son nouveau propriétaire, et cela la fit sourire davantage. On aurait presque pu croire qu'elle planait.

Lumières artificielles, sons des claviers d'ordinateur qui chantent sous des doigts agités, vitres immense dévoilant un paysage de verre et de béton … L'esclave ne savait plus où donner de la tête. L'endroit sentait le propre, et l'odeur même lui piquait les narines, la faisant éternuer discrètement. Ce lieu avait une beauté assez épurée, qui lui rappela les quelques photos qu'elle avait vu de constructions islandaises, du temps où elle était mariée. Si elle n'avait jamais mis un seul pied sur terre, Ludmilla pouvait se targuer d'avoir bouquinée beaucoup de magasines de photographies. Aussi ce paysage tout neuf, aussi imposant fut-il, lui donna la sensation d'être dans une photographie, hors de Nexus. L'idée même lui réchauffa le cœur.

L'arrivée dans le bureau fut assez éprouvante. La jeune femme au visage taché ne cessait de la regarder, tout en parlant à … Monsieur Dolan, puisqu'on l'avait nommé ainsi un peu plus tôt. Et il la laissa là, face à cette jolie femme au regard de nuit et à la peau diaphane. Ludmilla la trouva belle, comme une noble de Nexus, que l'on respecte. Par contre, le son de sa voix la fit sursauter, et elle regarda vers où partait son propriétaire, sans pour autant le suivre. Docile, elle l'était, surtout en terre inconnue. Pas question de faire de bêtises.

- En attendant, vous voulez une boisson? J'ai aussi des magazines, un accès internet et, oh! J'ai aussi une PSP dans mon sac. A moins que vous ne vouliez quelques chose à grignoter? Je m'appelle Niji et vous?

Un silence léger s'installa après cette déclaration enjouée, le temps que la jeune esclave puisse digérer ces propos. Elle ne comprenait pas la moitié des mots. Mais elle bafouilla cependant, d'une voix toujours aussi cristalline, comme si le temps n'avait aucun impact sur elle.

- … Ludmilla.

Elle battit des paupières, regardant autour d'elle en étouffant un sourire. Les lieux étaient beaux, aussi beaux que les photographies qu'elle avait vue autrefois, aussi beaux que les yeux de son nouveau propriétaire. Elle se sentit, d'un coup, bien. Comme si elle avait trouvée un terrier où se planquer, le temps qu'on la laisse tranquille. D'un pas vif, comme une petite danse, Ludmilla s'approcha d'une des fenêtres, pour admirer le paysage. Une lueur enfantine passa dans son regard, tandis que ses yeux suivaient la route d'une voiture noire, en bas du bâtiment. Elle avait le souffle coupé, toutes ses perceptions étaient brouillées. Puis elle se tourna vers Niji. Elle lui rendit un sourire, sincère et doux. Les mots étaient une denrée rare, pour la jeune fille. Qui se mit d'ailleurs à jouer avec un de ses colliers, l'égrenant à la manière d'un chapelet, son regard hésitant entre le paysage agité, au dehors, et  Niji, qui semblait ne pas savoir quoi faire.

- Thé ?

Osa cependant la jeune esclave, en fixant intensément Niji, de ses grands yeux bleus.

- Je vais vous chercher cela !

Et la femme au visage taché quitta les lieux, laissant là Ludmilla, qui supposa que ce devait être une délivrance pour elle. Devoir veiller sur une personne qui ne parle pas devait être éprouvant, pour quelqu'un de loquace comme Niji. Dés qu'elle n'entendit plus le son de ses talons, la jeune esclave vint ouvrir une des vastes fenêtres, laissant le vent réveiller son visage. Elle se sentit brusquement vivante, et presque libre. Une sensation grisante qu'elle ne connaissait plus depuis un long moment. Trouvant un appui, elle se hissa sur le rebord de fenêtre, pour s'y poser en toute insouciance, ne se rendant même pas compte que, si la fenêtre venait à se rabattre, c'était le saut de l'ange qui attendait la petite princesse. Elle voulait boire la liberté, comprenez-la ... Et s'asseoir ainsi au bord d'une fenêtre, les jambes dans le vide, les bras comme seul appui, c'était être libre, pour elle.


« Modifié: lundi 18 juin 2012, 01:25:53 par Ludmilla »
"On a tous plus ou moins envie de disparaitre. Où qu’on soit. Et où qu’on aille. Tant que c’est loin, et différent. Alors, moi, quand la nuit vient, quand mes paupières se couchent sur mes orbites, quand je me tourne, me retourne, me détourne sur les draps, quand ma chevelure mord l’oreiller, je deviens une étoile. La plus douce, la plus paisible des étoiles .. Celle qui se pense libre de vagabonder où bon lui semble, quitte à foutre en l’air la galaxie toute entière. Je m'évapore. Je me dissous. Je rejoins le cosmos. Et ne reviens que lorsque mes songes prennent fin."


"Si tu m'apprivoises, je connaitrais un bruit de pas qui sera différent des autres. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une musique. Alors, s'il te plait, apprivoises-moi."

Rien à redire.
Rien à ajouter.


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