Petite voleuse, prends-garde à toi ... ( Hiro )

Ce soir, Ishtar était en forme. Elle avait dormie comme un loir toute la journée, nichée entre les draps du lit qu'elle occupait dans l'ancienne maison de geisha où elle vivait. Un lieu pour le moins insolite, qui était presque devenu une maison close non-déclarée ... On amenait à Ishtar et à ses autres colocatrices et colocataires des jeunes hommes et femme à dépuceler, des voyageurs égarés, des personnes qui avaient besoin de se détendre et d'être massée ... Bref, tout un panel de choses agréables étaient possible quand on passait le pas de la porte de la demeure qu'on avait renommé " Maison verte ", à cause de la façade rongée par quelques plantes grimpantes, et à cause de la réputation de prostituées qu'on offrait au locataires du bâtiment. Mais ici comme ailleurs, rien n'était gratuit ... Les gens avaient beau payer, il arrivait que les personnes de cette maison verte se servent dans leur porte-monnaie. Bref, cette fois, la jeune femme n'avait rien fait. Ni massage, ni autres caresses. Elle avait dormie pendant 16 heures, sans interruption, avant d'ouvrir les yeux vers 22h, avec une seule idée en tête : Jouer à la voleuse.

La jeune femme chipa un kimono pourpre et doré à sa voisine, l'enfila, coiffa sa chevelure avec une fausse néglicence, se maquilla légérement, enfila trois bracelets dorés sur le poignet droit et sortie dans la rue. La soirée était fraiche, aussi se dépécha t'elle de trouver un lieu où elle pourrait s'amuser comme elle l'aimait. Elle se glissa dans un vernissage, embarqua une montre, un collier, trois porte-feuilles. Ensuite, elle n'eut aucun mal à entrer dans une boîte de nuit, à draguer celui qui s'occupait des vestiaires et à se servir dans les manteaux accrochés une fois qu'elle parvint à le mettre en confiance. Ishtar était loin d'être épuisée, et malgré le magot qu'elle portait, elle avait encore envie de voler quelques choses ... L'adrénaline qui courrait dans ses veines l'électrisait, elle ne se contenait plus. La jeune femme rentra chez elle pour y cacher ses trouvailles, avant de continuer son petit jeu ...

Aussi parvint t'elle à s'immiscer dans une soirée remplie de gens guindés. Le bonheur ... Etait-ce un vernissage, une exposition, un concert ? Elle l'ignorait, et s'en foutait. Sa seule envie : dérober ... Ce qu'elle fit à nouveau avec plaisir. Un bracelet et un billet ici, un porte-feuille et un collier là. Elle s'amusait, et alors que sonnait 23h, elle envisagea de rentrer pour compter son butin ... Mais ce qu'elle ne savait pas, c'est qu'on l'avait repérée, et que tout n'allait pas se passer comme prévu ...

Si je le pouvais, je hurlerais mon ennui! Cependant, ce ne serait pas vraiment bien vis-à-vis les hommes qui m’avaient invité à cette enchère d’œuvres d’art. Non, je ne vous dirais pas que les profits allaient à des œuvres caritatives pour sauver les pauvres de la faim, je vais être honnête avec vous : s’était pour qu’un gros bonnet de la société japonnaise, déjà multi-milliardaire (en euro je parles bien sûr), s’en mette encore pleins les poches avec des œuvres qu’il a réussi à s’acheter au fil des années, et qui a attendu pour qu’elles prennent de la valeur. En gros, de la spéculation artistique, quoi. Mais, pour ma part, j’avais été là, non pour acheter un Van Gog ou encore un Picasso, en fait, s’était surtout pour étendre mon influence à ses hommes pleins aux as qui ne demandaient que d’avoir de la main d’œuvre qui ne coûte que presque rien. Or, ça je pouvais leur offrir.

On me présenta à quelques hommes très influents, beaucoup plus que le simili gouvernement, histoire de faire un peu d’argent sur le dos de pauvres Terranides qui ne valent presque rien sur leur plan, mais qui en valent beaucoup sur celui-ci. Ce qui m’intéressait le plus, c’était de pouvoir franchir les mers, de faire affaire avec des barons allemands, des Ducs français (car il y en a encore!) ou encore des membres de la royauté anglaise – la corruption et l’esclavagisme s’étend à tous les niveaux de la ramification de notre monde, j’en ai bien peur –

Cependant, une fois quelques transactions effectués, je n’avais plus rien à faire; ces hommes étaient généralement avec leur femme, dansant, ou encore discutant du cour de n’importe quelle devise… Je n’étais pas un homme de parole, mais bien d’action, ainsi, rester planté là avec mon verre de Don Pérignon à la main, ce n’était pas vraiment ma tasse de thé.

Puis, une femme entra dans la salle. Elle était belle, plus que toute autre personne dans cet endroit, mais ce n’était pas ça qui m’avait fait la remarquer : c’était une voleuse, et une professionnelle. Ce qui me faisait affirmer une telle chose? Elle venait tout juste de voler une montre en or à un homme qui la portait au poignet – il ne s’en est jamais rendue compte – avant de chaparder un collier de perles a une autre femme qui avait eut la mauvaise idée de la mettre sur la table un petit instant. Soudain, pendant une soirée que j’avais la seule envie de me saouler la gueule pour pouvoir m’amuser un peu, cette même soirée pris une tournure plus divertissante.

Je regardai alors ma montre : 23 heures. Ça sembla être son heure car elle avait arrêté sa petite activité pour se diriger vers la sortie. La suivant jusque sur le trottoir, de loin, je me mis à accélérer le pas, jusqu’à la bousculer légèrement, faisant tomber un des portes-feuille qu’elle avait dérobé, quelques instants plus tôt.

Oh vraiment désolé.

Me penchant, j’attrapai le porte-feuille pour le tendre à la jeune femme.

Tenez, votre butin de ce que vous avez délesté à l’horrible allemand à l’haleine de cheval…

Je souris en coin, regardant le visage de la voleuse changer un peu devant l’évidence qu’elle venait tout juste de se faire repérer. Avant qu’elle ne puisse le prendre, je le mis hors de sa portée.

Mais j’y pense, ce serait beaucoup mieux pour mes affaires si je lui ramenais, en te dénonçant, qu’en penses-tu?

La jeune femme fronça les sourcils immédiatement, quand il la menaça. Sur ce coup là, elle s'était loupé ... Et en beauté. Ishtar serra les dents, les poings, et chercha la moindre arme autour d'elle - ou même n'importe quoi qui servirait à la tirer de cette fâcheuse situation - mais ne trouva rien.  Pour s'en sortir, il faudrait la jouer fine. C'est entendu ... Elle fit s'envoler cette moue fâchée et arbora un sourire franc. Le sourire de celles qui n'ont peur de rien, de celles qui ne se laissent pas abattre ... Aussi provocant et assuré que possible, d'ailleurs. Elle croisa les bras sous sa poitrine, regardant ce portefeuille qui se balançait au bout de sa main. Il devait y avoir bon nombre de choses, là-dedans ... Elle devinait déjà le crissement des billets, les cliquetis des pièces ... C'était grisant.

Ainsi donc, elle se décida à ne pas se laisser abattre. Ce type devait être comme les autres, après tout ... Un de ceux que l'on charme facilement, que l'on assomme sans difficulté et qui nous laisse détaler sans rien pouvoir faire. Alors, féline, elle s'approcha de lui, son sourire s'accentuant légérement, un de ses sourcils venant se hausser pour accentuer cette moue aussi décadente que possible. Comme par magie, son kimono tomba pour dévoiler son épaule nue, chose à laquelle elle ne porta aucune attention. Tout était minutieusement calculé ...

- Pourquoi me dénoncer ... ?

Une moue faussement triste s'afficha sur ses traits, tandis qu'elle s'arrêtait à trois centimètres de lui, levant son visage vers le sien sans pour autant en venir à le toucher. Il n'y avait que le ballet de leurs souffles ...

- Nous pourrions nous arranger ... Qu'en pensez-vous ?

Pour Ishtar, le schéma était déjà tout tracé ... Séduit, il accepterait, et elle récupérerait son argent avant de s'arranger pour qu'il tombe dans les pommes. Elle n'avait que faire du fait qu'il connaisse son visage, beaucoup de gens le connaissaient, mais peu s'en souciaient ... Tous ne prenaient garde qu'à ses courbes. Courbes qui lui permettaient d'assouvir bien des caprices, et de régler une myriades de soucis ...

Pour être honnête, elle était de loin plus belle de près, dû au fait que je pouvais la voir sous toutes ses coutures, avec des expressions faciales que je n’aurais su voir de loin. Cependant, il était clair qu’elle jouait les allumeuses pour pouvoir plus facilement me poignarder dans le dos, mais je n’en faisais pas une grosse affaire… Elle me proposa soudainement une belle chose en échange du portefeuille et son contenu, l’air charmeuse. Un petit sourire conquis aux lèvres, je la regardai droit dans les yeux, les paupières légèrement tombantes.

Il est vrai que ce serait assez plaisant, surtout du fait que je n’ai rien à faire de ce portefeuille, sauf que…

Cric… À quelques reprises, j’ai eut l’occasion, mauvaise occasion je vous l’accorde, d’avoir l’embout froid du canon d’un pistolet, soit sur le front, ou encore dans les cotes, mais jamais sous le menton. Ça doit être assez terrifiant de savoir que quelque chose peut nous tuer, et on ne sait même pas quand ça va arriver.

Sauf que je n’ai pas l’intention de te laisser me charmer pour que tu puisses me le piquer pour foutre ton camp. Connaissant le propriétaire de ce « fourre tout », il doit y avoir des choses pas nettes, bien rangées hors de vue. Et je n’ai pas l’intention de perdre ce client… À moins que tu n’aies quelque chose de mieux à m’offrir…  Et pour que ce soit vrai…

Ma main libre se posa sur son épaule dénudée, puis j’utilisai ce don qui m’avait été gratifié de par ma nature d’ESPer; la persuasion. Bientôt, toutes les fibres de son corps réagiront comme je leur dirai. Dès maintenant, une voix tentait par tous les moyens de briser chacune des défenses mentales de cette jeune voleuse, pour briser sa volonté, et la faire devenir momentanément honnête, une fois dans sa vie. Dans le fond, ce n’était pas si affreux pour elle; je nous donnais simplement la chance de conclure un marché où elle pourrait avoir ce qu’elle avait durement gagné en ayant la capacité de pouvoir y gagner quelque chose…

Alors? Tu crois qu’on pourrait y aller franc jeu, si tu veux ce portefeuille, c’est le seul moyen…

[HRP : Désolé,court!]

Ishtar sursauta en sentant l'arme sous son menton. Elle vit sa vie défiler en l'espace de quelques secondes, s'imaginant qu'il allait la tuer. Elle se revit courant dans le jardin de la demeure de sa mère, puis l'arrivée de Don, son père dont elle n'avait jamais entendue parler, qui avait faillit la violer dans son propre lit, puis quand elle du s'enfuir, une fois sa mère rendue à nouveau à l'état d'esclave ... Mais non. Il n'appuya pas sur la gachette ; pas tout de suite, du moins. Elle sentait son coeur battre la chamade, terrifiée.

Pour dire vrai, elle comprenait à moitiée ce qu'il lui disait ... Elle hoqueta avant de répondre, restant aussi droite qu'elle le pouvait. Quand il posa sa main sur son épaule nue, elle faillit réagir, mais n'osa pas. Elle était terrifiée ... La mort était sans doute sa plus grande angoisse. L'idée même de se retrouver dans un état de cadavre, à même le sol, la terrifiait ... Si jeune, si belle, elle risquait sa peau chaque jour avec nonchalance, mais là ... Là, ce n'était plus pareil. S'il appuyait, elle mourrait sur le coup, sans souffrir.

- Je ... je ...

Bafouilla t'elle, cherchant ses mots.

- Qu'attendez-vous exactement de ... moi ?

Elle était prête à tout, pour ne pas mourir ... Puis la peur parla.

- Ne me tuez pas, je vous en supplie ...

Je n’ai jamais compris pourquoi les humains avaient si peur de la mort; quelque chose de si inéluctable, on se devait de l’accepter pour pouvoir vivre chaque jour. J’ai accepté que, malgré la faveur que Charon m’avait accordé, ce dernier me rappellerait à lui, et je ne pourrai pas utiliser l’escalier des âmes. Un jour je paierai pour tout ce que j’ai fait, mais pas maintenant. Non, aujourd’hui, je ne fais qu’ajouter des éléments à la facture.

Oh je crois que tu sais précisément ce que j’attends de toi… et Arrêtes d’avoir ce stupide air terrifié au visage, ta mort ne m’intéresse pas.

La main qui était posée sur l’épaule de la voleuse glissait maintenant sur les trapèzes, allant jusqu’à son cou. Cette femme m’avait donné envie de m’amuser avec elle, et ce n’est pas parce qu’elle me supplie que j’allais arrêter si facilement.

Comme je t’ai dit, ce portefeuille appartient à un client potentiel, probablement qu’on pourrait y trouver beaucoup de choses répréhensible, imagine à quoi j’aurais droit si je lui retournais ce petit paquet de cuir, ainsi que la voleuse sur un plateau d’argent…Mais je suis un optimiste, et on peut assez facilement me faire changer d’idée…

Je souris en coin avant de retirer l’arme du corps de la jeune femme. Plaçant le porte-monnaie entre nos paires d’yeux, je poursuivis.

Tu as tout de même raison, on peut arriver à s’entendre, et peut-être même trouver une solution agréable, qu’en penses-tu?