Du désert à la montagne [PV Calliope]

Voilà quelques jours que j’étais perdu dans cet étrange monde, j’avais réussi à en apprendre plus sur les portails, qu’on appelait, apparemment, les failles. Une chose aussi surprenante, les Dieux semblaient exister, enfin, c’est ce qu’on disait et, de la manière dont on les décrivait, les Grecs de Terre semblaient avoir raison… Moi qui trouvait ridicule l’idée d’avoir un Dieu, une équipe de Dieux, et la présence d’un « Mont Olympe » était tout aussi surprenante… Mais tout ça n’était qu’une simple rumeur, car personne n’avait vu ce Mont où résidaient les Dieux, et encore moins les Dieux eux-mêmes!

Quoique certains disent que les Dieux marchent parmi nous, qu’ils se déguisent comme un humain normal pour pouvoir mieux passer inaperçus… À ce moment, je me disais qu’ils divaguaient que c’était la même chose que les gens sur Terre,  à quelques centaines d’années près… Plus les choses changent plus elles étaient pareilles. Je n’avais pas idée à quel point je me trompais à ce moment là, et la journée qui venait tout juste de débuter allait me le confirmer. Ma vie allait changer le plus drastiquement que n’importe quel changement auparavant!

Ma journée avait commencé avec mon réveil dans un petit campement que j’avais  fait dans un désert, mon aventure m’avait mené ici, certaines personnes m’avaient dit qu’il se pouvait qu’une faille permanente était dans cet endroit… Mais chercher un portail invisible dans un désert… Putain à quoi j’avais pensé!?! Armé de mon pistolet et mon couteau, on ne sait jamais quel genre de saloperie peut nous tomber sur la tronche, surtout dans un désert, je défis mon campement, puis marchai, entrant dans chaque petites grottes, qui n’étaient pas très nombreuses laissez moi vous le dire,  mais je ne trouvai rien. Patience Mik, patience…

Quelle heure était-il? Tout ce que je me rappelle, c’est que le soleil allait se cacher sur le vaste océan de sable qu’était ce désert. Le désespoir commençait à me gagner lorsque je  m’assis  sur un bout de bois, sec, cassant, d’ailleurs c’est ce qu’il fit. Je me retrouvai dans une très mauvaise posture, quasi incapable de me relever, je roulai sur le côté pour me retrouver allongé, sur le dos, à contempler le ciel dégagé, il faisait étrangement beau et doux… Enfin, pour un désert.

Quelque chose m’éclaira le visage, puis une lumière blanche enveloppa mon corps, je ne pouvais même pas bouger… j’étais pris au piège et je me demandai vraiment ce qui arrivait, surtout que je n’entendais plus le bruit du vent désertique… Puis je me retrouvai dans un véritable coin de paradis, une grande montagne où on pouvait voir le coucher du soleil. Ébahit, je ne remarquai pas tout de suite la femme qui me regardait, un petit sourire amusé aux lèvres.

Les humains. Ils sont drôles. Ils fourmillent et évoluent, certains savent que les Dieux existent, d'autres pas. Ceux qui se tiennent dans l'ignorance sont les plus amusants! Ils attribuent leurs péripéties, bonnes comme mauvaises, au hasard! Quelle simplicité d'esprit admirable! Cela dit, ceux qui croient en eux ne sont pas vraiment mieux... Certains sont si pieux qu'ils ne veulent plus prendre la moindre initiative, le moindre risque, et supplient encore et toujours les différents divins du panthéon de les aider dans leur tâche, aussi simple soit-elle. Les pauvres... En plus de les fatiguer, ils passent à côté de leur vie. Dommage pour eux.
En ce qui concerne Calliope, Muse de l'Éloquence possédant la suprématie sur ses autres soeurs Muses, elle est parfois sollicitée par les orateurs, lorsqu'ils ont besoin de rédiger un discours, mais aussi par tout un chacun cherchant ses mots. Ce qu'elle préfère, c'est inspirer les hommes pour leurs demandes en mariage. La muse apprécie les choses romantiques, alors ça, ça lui plaît plus que tout.

Enfin bref, pour résumer, selon elle, les humanoïdes les plus intéressants de tous sont ceux qui ne prient que lorsqu'ils en ont besoin. C'est vexant bien sûr, comme de n'appeler un ami que lorsqu'on n'a besoin de quelque chose, mais... En ce qui la concerne, elle ne s'en formalise pas. Ils sont si éphémères comparés à elle, les humains. Elle, demain elle sera encore là, égale à elle-même. Eux... Ils seront morts, tout simplement.

L'apparente jeune femme bâilla et s'étira, puis s'extirpa des bains où elle se détendait depuis une bonne heure déjà, pendant qu'une prêtresse de rang inférieur brossait ses cheveux. Cette dernière lui donna un linge propre pour qu'elle se drape, avant de se retirer, laissant Calliope au reste de sa toilette. La muse se sécha sommairement, passa une toge de lin blanc classique pour une prêtresse, remonta son impressionnante masse de cheveux en un chignon sommaire qu'elle coinça avec une barrette agrémentée de fleurs sauvages, et se rendit au coeur du Mont Olympe, afin de jeter un oeil sur les terranides, et un en particulier. Celui-là, elle le suivait des yeux depuis plusieurs jours déjà. Il avait un faciès agréable, mais surtout... Il était entre deux eaux, ce qui amusait Calliope. Croire ou ne pas croire, cruel dilemme s'il en est, surtout quand croire ne coûte rien... A part peut-être quelques déceptions, de temps en temps. Enfin comme on dit, aide toi et le ciel t'aidera. Quoiqu'il en soit, ce jeune homme avait entreprit une tâche bien périlleuse. Partir à la recherche d'une faille dans un espace immense, seul, et sans rien qui ne puisse la détecter pour lui! Une entreprise suicidaire selon la Muse, qui se demandait ce qu'il aurait bien pu faire si elle ne s'était pas intéressée à lui.

Elle poussa un soupir. Il fallait cependant reconnaître à cet énergumène qu'il avait une chance de tous les diables de ne pas être tombé sur des monstres tentaculaires à la libido exacerbée. Après tout, ils pullulent dans le désert... Mais peut-être la muse avait-elle songé trop vite. Elle pouvait le voir approcher, discret... S'il faisait ce qu'il voulait de Mik, Calliope ne pourrait plus jouer avec! Elle leva donc les yeux au ciel et esquissa un mouvement ample, presque flegmatique, passa sa main au-dessus du miroir à vision. Elle se dématérialisa alors du coeur des temples des Dieux pour gagner les jardins qui les entourent. Après tout, il y avait une limite à ce que les humains pouvaient voir du domaine divin. Au moment où elle arrivait, manifestement contente de son acte de part le sourire qu'elle affichait, son invité prenait pied à son tour. Au mieux, il croirait que c'était un rêve et il n'y aurait pas de retenue. Au pire, il deviendrait hystérique et elle devrait l'assommer et le rendre au monstre. Funeste destin, n'est-il pas? D'un claquement de doigts, Calliope fit se matérialiser une table avec différents mets, ainsi que de vin. Un bon vin, certainement pas de Bacchus, mais délicieux tout de même. Elle en servit deux coupes, une pour le jeune homme qu'elle lui tendit, une autre pour elle-même qu'elle porta à ses lèvres, en s'affaissant avec flemme. Dans le vide d'abord, puis ses fesses rencontrèrent le siège d'une riche balancelle, face au coucher de soleil. Un rire lui échappa.

"Bonsoir à toi! J'imagine que tu dois te sentir... Désappointé. Sais-tu où tu te trouves?"

La température avait drastiquement changé, j’étais passé du climat Sec et torride à quelque chose de beaucoup plus doux, qui me fit grandement bien. Combien de temps avais-je passé dans ce désert? Je ne saurais même pas vous dire combien de temps j’étais pris sur Terra. Tout ce que je me rappelle, c’est d’être parti le 13 Janvier. Pourquoi cette date? Car ma sœur aînée aurait eut 29 ans… Enfin passons, il y avait plus important que les jours passés sur Terra, comme :

Ou suis-je? Et comment se fait-il que j’étais dans le désert il y a quelques secondes et que maintenant je suis ici?

Je sais, ce n’est pas très poli de ma part et très soudain, mais je venais tout juste de me faire téléporter du désert a la montagne… Il faut me comprendre aussi, ce n’est pas tous les jours que je me fais téléporter… Mes yeux devinrent grands lorsque je regardai la table se matérialiser entre moi et la jeune femme, avec toutes ses denrées, mais je ne bougeai pas. Elle me tendit une coupe de ce qui semblait être du vin, mais comment faire confiance a quelqu’un qui utilisait la magie comme on utilise une télécommande? Je trouvais ça louche… Peut-être était-ce une déesse? Enfin, c’était une des pistes possibles, mais si c’était une déesse, aussi bien ne pas se la mettre a dos. Je pris donc la coupe en la graciant d’un petit sourire

Merci… Puis-je avoir l’honneur de connaître votre nom?

Ce monde devenait de plus en plus étrange, et  mon petit monde tout monotone et triste commençait a me manquer, quoique ce monde était pas mal non plus et il faut dire que j’étais pas mécontent de sortir de cet enfer, déjà que je me considérais comme chanceux d’avoir pu sortir du désert sans rencontrer personne, ayant entendu dire d’atroces choses sur cet endroit, dur de ne pas imaginer le pire. Voyant que la jeune dame prenait du vin, je me dis qu’il ne devait pas être mauvais, donc je pris une petite gorgée, toujours debout, en face de la déesse.

Je sais que c’est beaucoup de question, mais, pourquoi m’avoir amené ici?

Bon, assez de question pour l’instant, attendons les réponses. La table garnie de nourriture me tentait beaucoup, étant donné que je n’avais mangé depuis quelques jours, mais je me concentrai sur la mon interlocutrice, je cherchais des réponses mais surtout, si elle était une déesse et que j’étais bien sur le Mont Olympe, elle pourrait m’aider a trouver  une faille pour que je puisses enfin retourner dans mon monde!

Blablabla, c'était toujours le même refrain... Qui suis-je, où suis, dans quel étagère etc. C'était lassant à la fin cette manie qu'avaient les mortels de poser question sur question... Ne pouvaient-ils pas simplement accepter d'office les faveurs que leur offraient les Dieux, avec un simple petit « merci » bien entendu? Etait-ce trop leur demander que d'avoir une once de jugeote? Ou peut-être un rien de résignation? On ne pouvait certes pas leur demander de se laisser aller à tout et n'importe quoi, mais en l'occurrence, lorsqu'une belle femme offrait nourriture et boisson et tirait d'un mauvais pas, ne serait-ce que par reconnaissance, on se tait et on accepte. Mais non, il fallait nécessairement connaître le dessous des choses pour apprécier un présent...

Calliope poussa un soupir, mais conserva son sourire. Elle était trop habituée à ce genre de comportement pour s'en formaliser. Et puis, s'il avait besoin de cela pour se sentir bien, pourquoi pas? Ca ne lui coûtait pas grand chose. Il voulait son nom, et son lieu, rien d'extraordinaire en somme. S'il pouvait vivre avec le souvenir d'une nuit sur le Mont Olympe, résister à l'envie d'en parler sous peine d'être pris pour un fou, et bien soit. Dans le cas contraire, Calliope effacerait ses souvenirs et il retournerait à son désert, et à sa mort...

"Si tu l'aimes tant ton désert, je peux t'y renvoyer."

Moqueuse dans ses paroles, son sourire s'étira plus largement encore. Elle ne se trouvait pas spécialement cruelle, mais les dédales des susceptibilités étaient trop obscurs pour qu'elle n'ait la moindre envie de s'y aventurer. Avec une grâce divine, elle s'extirpa de la balancelle, pour faire correctement face à son invité. Joignant ses mains devant elle avec prestance, elle le dévisagea avec intensité, et espièglerie.

"Je m'appelle Calliope. Je suis la Muse Suprême, celle de l'éloquence et de la poésie épique. Tu te trouves actuellement sur le Mont Olympe, dans les jardins divins, en ma compagnie. Pourquoi? Et bien parce que j'en avais envie. C'est aussi simple que ça."

Elle lui adressa un regard éloquent, et haussa légèrement les épaules.

"Toute plaisanterie mise à part, un monstre du désert était prêt à abuser de ta personne, encore et encore. Je peux te rendre à lui si tel est ton souhait."

Cette pensée la fit rire, légèrement.

"Dans le cas contraire, je te conseille de te restaurer. Cela ne peut te faire que du bien."

Et elle cessa là ses bavardages, se détournant de lui pour retourner s'assoir sur la balancelle, sa coupe de vin revenue dans sa main, elle-même la sirotant.

Elle était bel et bien une Déesse. Et bah la, mes convictions en prenaient un sacré coup! Moi qui croyais que tout ce qui m’était arrivé n’était dû au simple hasard, et non que mon existence
était dû aux simples caprices des Dieux.  J’en savais déjà un peu sur le désert et tout ce qu’il y cachait, mais ce que Calliope me dit me fit frissonner. Apparemment, les monstres n’étaient pas comme ceux qu’on décrivait dans les histoires, à vouloir tout manger, mais ils cherchaient seulement à violer tout ce qui bouge. Non, mieux valait que je me retrouve ici.


"Dans le cas contraire, je te conseille de te restaurer. Cela ne peut te faire que du bien."


Mouais, je crois que c’est une bonne idée, surtout que cela fait des jours que je n’ai pas mis la main sur de la nourriture, mais hors de question de me jeter sur les denrées comme un simple affamé. J’attrapai donc une pomme, mon couteau à la main, je tranchai un cartier de la pomme et mangeai un morceau. Je regardai ce magnifique coin de paradis, endroit que je n’avais vu nulle part ailleurs depuis que j’étais sur Terra. À bien y repenser, sur Terre non plus il n’y avait pas ou très peu d’endroit pareil.  J’étais un peu… intimidé à savoir l’endroit où j’étais et surtout le fait que j’étais en compagnie d’une déesse…


Au fait, merci de m’avoir sortit de cet enfer…[/]

Je trouvais étrange qu’elle ne me veule absolument rien. Habituellement, on ne fait rien de gratuit, on n’a rien pour rien dans la vie… Mais après tout, qu’est-ce qu’un simple humain pourrait apporter à un Dieu? Ça bonne question…

La Muse ignorait pourquoi, mais cet homme lui semblait sceptique, voire blasé. Elle haussa un sourcil. Comment pouvait-on être blasé d'être en compagnie d'une Déesse, dans le repère même des divins?! Ça dépassait l'entendement... C'était même affreusement décevant. Ses précédentes expériences, ainsi que celles de ses soeurs, avaient été plus concluantes, plus gratifiantes même. Les hommes ou les femmes s'étaient toujours estimés heureux, même honorés, d'être invités pour une durée plus ou moins longue à rester auprès des Dieux et des Prêtresses. Lui en revanche, ne manifestait aucun signe extérieure d'excitation, d'engouement, ou de fascination...

Calliope retint un soupir, blasée à son tour. Peut-être devrait-elle le renvoyer aux tentacules du monstre désertique pour une heure ou deux, histoire que, une fois qu'elle le ferait revenir ici, il loue son nom et chante ses louanges pour la grâce qu'elle lui ferait... Il paraissait aux yeux de la Déesse être l'incarnation même de la maxime « on n'a rien sans rien », or, lui n'avait pas eu à lever le petit doigt pour se retrouver ici, ni à subir quoique ce soit de pénible, alors pourquoi savourerait-il sa chance? C'était horriblement injuste quand on connaît le nombre d'hommes ayant perdu la vie en chemin pour l'Olympe!

Mais soit, la Muse n'allait pas passer son temps à ruminer. Elle avait mieux à faire que cela. Qu'il boive et mange à sa faim, ça serait toujours cela de pris pour lui. Il eut tout de même la décence de remercier Calliope pour son intervention, il faudrait donc qu'elle se contente de cela. Et bien, n'aurait-elle été plus résignée, elle s'imaginait fort bien faire passer un mauvais quart d'heure à son invité, mais au lieu de cela, elle resta la charmante hôtesse qu'elle avait l'habitude d'être. Aussi se leva-t-elle à nouveau, quittant la balancelle, et désigna un chemin de pierres blanches d'un geste de main, lui adressant également un doux sourire.

"Je t'en prie. Outre le fait que tu n'as ni mangé ni bu, le désert n'est pas ce qu'il y a de plus saillant en matière d'hygiène. Souhaiterais-tu te rafraîchir dans nos thermes?"

Ce n’était pas que je n’avais pas d’émotion, et que je ne ressentais pas une joie immense d’être en ce lieu au lieu d’être encore dans le désert, mais je me disais que la simple manifestation d’une joie quelconque serait un manque de respect envers la Déesse. Déjà que je me retenais pour ne pas la regarder dans les yeux…

"Je t'en prie. Outre le fait que tu n'as ni mangé ni bu, le désert n'est pas ce qu'il y a de plus saillant en matière d'hygiène. Souhaiterais-tu te rafraîchir dans nos thermes?"

Ça je ne l’avais pas vu venir, une Déesse qui me proposait d’aller dans les thermes du mont Olympe! Je n’étais pas un pur et dur en ce qui concerne la religion, loin de là, mais je savais que le moment que j’y passerais, peu, voire aucun, humain ordinaire avait passé un moment dans les Thermes divines! Cette fois, je ne pu réprimer un large sourire, enfin si, mais une fois que la Déesse le vit, s’est à dire, un peu trop tard.

Oui, je… j’accepte volontiers, merci

Je me dirigeai vers le chemin de pierre blanche en remerciant une nouvelle fois Calliope de son hospitalité, puis marchai jusqu’aux sources. Mis à part le fait que tout ça était divin, les thermes se ressemblaient d’un endroit à un autre. Je regardai au loin, puis les alentours de l’endroit où je me trouvais. Personne dans les environs, enfin, peut-être, mais je ne les voyais pas. Calliope était très aimable de m’avoir sauvé, d’ailleurs qu’elle pourrait avoir des problèmes si un homme était retrouvé dans les thermes… Et peut-être que non aussi, peut-être que les Dieux font se qu’ils veulent sur le mont Olympe et qu’aucun n’a le droit de véto sur ce qu’un autre Dieu décide de faire. Mais bon, tout ça est un peu trop compliqué pour moi, je ne connais pas la manière de faire des Dieux et ne le saurai probablement jamais.

 Enfin, aussi bien profiter du moment au lieu d’essayer de s’arracher la tête avec des histoires que je ne comprendrai probablement jamais, je vais devoir le faire bien assez tôt pour rentrer sur Terre… Je me dévêtis  donc, retirant tous les vêtements que j’avais acheté dans une petite boutique de Nexus pour pouvoir passer inaperçu, et, nu comme un ver, je descendit tranquillement dans un des bassins qu’il y avait.

Je mit ma tête sous l’eau, puis, revenant la tête immergée, je  posai mes bras sur le rebord du bassin, les yeux fermés, je ne fit que me détendre, chose que je n’avais fait depuis un bon moment

Il fallait savoir accueillir les invités, et Calliope avait toujours mis un point d'honneur à ce que les personnes qu'elle faisait venir près d'elle, dans ce qu'elle considérait comme sa maison même si elle devait la partager, ou bien qui venaient d'elles-mêmes devaient être traitées avec la plus grande des courtoisies, leur offrir un moment inoubliable et donner l'assurance aux mortels conviés que les Dieux savaient être hospitaliers, voire extrêmement généreux; qu'ils savaient, au-delà de régenter chacun leur domaine de par le monde, être hommes dans leur comportement et prendre du temps pour savourer des plaisirs divers et variés.

Mik ne dérogea donc pas à la règle, après plusieurs jours dans le désert il était plus que normal que l'optique de prendre une douche le ravisse. Le contraire aurait été inquiétant... Calliope tint donc parole et conduisit le jeune homme jusqu'aux thermes, avant de le laisser seul. Elle avait beau être perverse, elle n'en était pas voyeuse pour autant. De ce fait, le jeune homme pu prendre son bain tranquille, sans avoir la désagréable surprise de trouver la Déesse dans son ombre. Néanmoins, elle prit tout de même le soin de lui envoyer une pulpeuse prêtresse blonde. Silencieuse et gracile, elle se faufila sans peine jusqu'aux bras de Mik et s'agenouilla devant lui, avant de passer sa main dans ses cheveux.

"Bonjour! Tu voudrais être massé?"

Elle lui adressa un grand sourire, et lui présenta un panier emplit d'huiles essentielles aux parfums divers et variés. Pendant ce temps, l'hôte de Mik était retournée dans les jardins divins.
Le soleil était encore haut, mais elle savait qu'Apollon ne tarderait pas à venir le chercher. Ce Dieu avait toujours, parmi les autres, eu sa préférence, Aphrodite mis à part. Il appartenait au monde de l'art, tout comme elle et ses soeurs, et si la Déesse de l'amour n'avait pas voulu d'elle, sans doute serait-elle restée avec lui. Mais à l'heure actuelle, elle se contentait d'apprécier le passage de son char, et les quelques échanges qu'elle avait parfois avec lui.

Les yeux fermés, en train de relaxer, aidé par l’eau chaude, je ne m’étais pas aperçu  qu’une très belle jeune femme s’était glissée près de moi, et sursautai légèrement en entendant la voix mélodieuse de la jeune prêtresse blonde.
"Bonjour! Tu voudrais être massé?"

Euh bonjour. Un massage ? Merci mais je…

J’étais à deux doigts de dire non, mais après tout, on pouvait bien s’amuser un peu non? Et de toute façon, je ne crois pas que mon hôte allait aimer que je refuse la jolie compagnie de sa servante. Déjà que j’avais été un piètre invité plus tôt… Non, la logique voulait que j’accepte la proposition et que je la laisse faire, et faut dire que cette idée me plaisait bien.

Tout compte fait, je vais accepter votre proposition!

Je souris à la jeune dame alors qu’elle posa le panier au sol et en prit un. Là, je pourrais vraiment me décontracter au maximum, mais quelque chose me disais que ça ne resterait pas dans les « limites professionnelles » des masseuses, enfin, je verrais bien, c’était bien mieux que tout ce qui pouvait attendre dehors.

Mais je ne devais pas garder mon objectif principal de vue; trouver un portail pour retourner sur Terre. Certainement que non que je ne vais pas l’oublier, mais on peut bien le mettre au rancart pour quelques heures, de toute façon, c’est pas si mal ici, sur le mont Olympe! Mais bon, faut pas que je prévoie rester ici éternellement, les dieux vont très probablement me foutre à la porte de l’Olympe d’ici quelques heures, dans un jour maximum. Reste à profiter au max de l’expérience que très peu d’hommes vont avoir la chance de profiter au cours de leur vie.

Contrairement à ce qu'espérait Mik, la prêtresse ayant eu l'amabilité d'accepter la demande de Calliope ne se montra pas des plus entreprenantes. Bien sûr, elle offrit au jeune homme un massage d'une qualité extrême, ayant patiemment attendu qu'il sorte de l'eau et accepte de s'allonger sur une table rembourrée, et avait alors laissé ses doigts parcourir avec savoir le corps de Mik... Mais ça n'était pas allé plus loin. La raison était simple. C'était l'invité de la Muse, pas le sien. Elle n'avait donc pas à proposer d'activité de son propre chef, puisque la prise en main de l'humain était à la Déesse. Elle prit donc congé, après avoir enduit le jeune homme d'une huile essentielle de musc et d'opium mêlés, et lui désigna une pile de vêtements, des tuniques de lin blanc, toutes simples, afin qu'il puisse se changer s'il en avait le désir plutôt que de remettre ses vêtements emplis de sable.

Après un dernier sourire, elle disparut au coin du couloir, et l'invité des prêtresses se retrouva seul. Pendant ce temps, Apollon avait fini par emporter le soleil de son char, et Calliope avait quitté les terrasses. Laissant à Mik tout le temps qu'il lui fallait pour profiter de son massage, elle-même exploita ce temps pour s'acquitter de ses devoirs envers Aphrodite. Elle passa donc par ses appartements, troqua sa toge blanche contre une rouge sanguin, agrémenta sa chevelure d'une rose de la même couleur, puis se rendit dans la salle des offrandes. Cette étape coûtait toujours à son orgueil, mais la Déesse de l'amour avait toujours été clémente à son égard, de par sa parenté. Après tout, Calliope était fille de Zeus! Ainsi, plutôt que de se mettre à genoux et de prier comme les autres de ses soeurs, la Muse ouvrit plutôt un parchemin et rendit préférentiellement hommage à la divine blonde par un poème de sa composition. Chaque jour, elle écrivait de nouveau vers et allait les déposer négligemment là où doivent finir toutes les offrandes. Muse de l'art poétique épique, rien n'était plus aisé pour elle, et au-delà de ça, elle savait que la fille de l'écume et d'Ouranos était sensible à ces petites attentions.

Alors qu'elle s'apprêtait à repartir pour ses appartements, elle croisa dans les couloirs du temple la jolie prêtresse blonde qu'elle avait envoyée s'occuper de son invité. Celle-ci l'informa qu'elle avait accompli sa tâche, et lui avait laissé de quoi s'habiller. Calliope la remercia et lui adressa un sourire, avant de prendre le chemin des bains. Si elle devait croiser  Mik, ce serait probablement dans ces environs là.

Ce n’était pas que j’espérais quoique ce soit, mais, dans ce monde, je devais m’attendre à tout. Surtout que depuis mon premier jour sur Terra, j’ai vu des choses pas trop nettes du genre qu’un homme vendait des esclaves à d’autres bourgeois d’une manière frauduleuse et, ce qui m’a le plus dégouté, au vu et au su de tous, sous le nez des gardes. Dire que Terra était plus corrompue que la Terre serait un mensonge, je savais comment les terriens étaient corrompus, je l’étais aussi, c’est juste que sur Terre, pour la corruption, le mot d’ordre et la discrétion. Ici, cette même corruption se pratique en pleine rue, pendant qu’un mec paie un garde pour qu’il ferme les yeux sur un meurtre commis de sang froid sur une femme ou tout autre humanoïde.

Je sortis donc du bain et m’allongea sur la table, sur le ventre. Le massage était un véritable délice. Les mains expertes de la jeune prêtresse glissaient avec aisance sur mon dos. Je risque de me répéter mais… bon sang, je ne m’étais jamais senti aussi reposé et détendu. J’aimais cet endroit, c’était un véritable paradis, ce qui doit être véridique, puisque c’est la maison des Dieux, mais je ne pouvais m’empêcher de penser à mon appartement, ma voiture, mon job… Tout ça commençait à me manquer, et l’envie de retourner chez moi se faisait de plus en plus ressentir. Je ne suis pas quelqu’un de nostalgique, au contraire, j’aime le nouveau, mais là, un peu trop de nouveau à mon goût ces derniers temps, et pas que du bon nouveau!

La jeune femme eut vite fait de mettre un terme au massage et me désigna des vêtements blancs qui, à l’œil, semblaient fait de lin. Bon, ce n’est pas mes bons vieux jeans délavés, mais c’est toujours plus confortable que les vêtements que j’avais acheté pour contrer le sable et la chaleur torride du désert. Quoi qu’il fallait que je les garde, car on me renverrait probablement d’où je viens, alors j’aurai besoin de ses vêtements. Je m’habillai avec les vêtements qu’on m’avait fournis et, à ce moment, j’entendis quelqu’un entrer dans la pièce. Je me retournai et sourit à la Déesse.

Bonsoir… Cette toge vous va très bien. Merci pour la charmante compagnie de votre… servante?

Il est vrai que je n’ai pas pris le temps de discuter avec la jolie blonde et que je ne savais pas si elle était servante ou employée ou prêtresse ou autre… Enfin bref, tout cela m’importait peu.

Il était frais, propre. Il sentait bon, c'était un véritable délice que de voir le Mik transformé par un simple bain, suivi d'un massage. Il semblait détendu, apaisé. Comme s'il avait compris que les Dieux, et Calliope en particulier puisque c'était elle qui l'avait fait venir, ne souhaitaient ni sa perte, ni n'exigeaient quoique ce soit venant de lui. Certes, la Muse l'avait attiré à elle dans l'espoir qu'il lui offre une soirée plus originale que celles auxquelles elle avait droit, mais quel était l'intérêt si ça n'était pas spontané? Quel était l'intérêt d'orienter les choix du jeune homme? Il n'y en avait strictement aucun. Néanmoins, elle était heureuse de lui avoir offert l'hospitalité, un repas ainsi qu'un bain, et de l'avoir sauvé de viols en série qui aurait eu la fâcheuse conséquence de l'éloigner du sexe, ce qui n'aurait pas été profitable à sa parente, Aphrodite. En cela, son intervention n'avait rien de regrettable.

 Qui plus est, lui-même sembla apprécier ce qu'il voyait en la personne de Calliope, puisqu'il la complimenta au sujet de ses vêtements. Elle en fut flattée, et rendit son sourire à l'aventurier. La remarque concernant la prêtresse blonde cependant, la fit rire légèrement. Des servants... Il n'y avait que les humains pour inventer de tels concepts.

"Merci. Vous semblez reposé et détendu, c'est une bonne chose. La femme qui s'est présentée à vous s'appelait Halix. Ce n'était pas une servante, mais une prêtresse de l'amour, au service d'Aphrodite. Ici, nous n'avons guère de servants, ceux qui vivent ici étant des créatures privilégiées parmi les privilégiées. Il y a une certaine hiérarchie à observer, mais au-delà de ça, ce n'est pas un rapport maître/esclave qui nous régit, les uns vis à vis des autres."

A la suite de ce petit discours, elle pivota tranquillement, et désigna un temple dont le chemin était éclairé par des torches plantées de part en part d'un petit sentier de pierres blanches, ou bien les jardins. La nuit tombée, des lucioles étaient venues habiller les corolles colorées des fleurs.

"Je vous invite à m'accompagner, soit au temple, soit aux jardins. Vous pouvez aussi émettre le souhait d'en voir d'avantage, et je vous conduirai. Si cependant vous étiez hâté de nous quitter, je vous renverrai chez vous. Prenez votre temps pour vous décider."

La Muse lui adressa un sourire tranquille, et se détourna de lui pour prendre le chemin du temple. Ses offices étaient peut-être terminés, mais il y avait toujours de l'animation au temple de la déesse de l'amour.

Donc, il n’y avait pas de relations maîtres/esclaves ici, c’était bien, même si, comme elle l’avait soulevé, la hiérarchie existait, même au temple des dieux. Il ne faudrait pas  non plus que ça tombe dans l’anarchie. De la manière qu’elle parlait, il semblait que ce soit Aphrodite qui « gouvernait » le royaume des Dieux, et non Zeus, comme le veut l’histoire Grèque… Enfin, il y a tellement de chose que je ne comprenais pas, quoiqu’il y en a encore aujourd’hui, après ce périple…

Elle m’offrit de me conduire jusqu’à un temple ou me ramener vers les jardins. Certes, les jardins olympiens sont très beaux, mais je souhaitais en voir plus, alors je décidai d’opter pour le temple. C’est alors qu’elle me fit une proposition alléchante; en voir plus du royaume des Dieux, là où tout a commencé… Ma curiosité était très forte, mais je ne pus me résoudre à accepter la proposition, de un par respect pour les Dieux, et de deux, car si je connaissais tous les recoins de l’Olympe, et je n’aurai donc plus de question sur l’existence, que des suppositions. Certaines questions sont faites pour rester sans réponses, c’est ce qui donne un sens à la vie de l’homme, enfin, excepté du plaisir que nous, humains, procurons aux Dieux lorsque nous nous acharnons sur tout comme si nous étions maîtres de nos destins… La déesse ne m’attendit pas et prit le chemin du temple. Je la rattrapai.

  Je crois que je vais venir avec vous au temple, si je peux en avoir l’honneur bien évidemment…

Le temple était comme tout ce qui était, ici, sur la montagne divine : grandiose, pur… énorme. Qui plus est, celui-ci semblait bien animé, quelques  dizaines de personnes étaient à l’intérieur, peut-être pour une cérémonie qui m’échappait… J’espérait être bien reçu et que les Dieux ne voient pas ma présence d’un mauvais œil, quoique j’était en compagnie de Calliope, alors ça devrait bien se passer, pas vrai?