Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

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L'errance de trop. [PV Law]

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Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 45 jeudi 23 décembre 2010, 19:28:26

Bien.

Café englouti, pomme terminée. Après un nouveau morceau de viande emporté par ses doigts jusque ses dents voraces, puis un autre fruit dont Andrea ne connaît ni la provenance ni la qualité, à l'image de ce qu'elle venait de faire découvrir à ses papilles, il lève ses fesses et, hop ! disparaît à une vitesse impressionnante par là même où il était apparu.


Malgré tout ce qu'il peut affirmer, la vie de Law est difficile. Moralement. Entendre chaque jour les nouvelles et instructions dispensées par son fidèle second, devoir recevoir ses clients souvent trop exigeants, et ses fournisseurs trop intraitables, ordonner, discipliner, sanctionner, bénir.. Il y a largement de quoi défaillir une dizaine de fois chaque jour, surtout au rythme intenable qu'il s'impose. C'est d'ailleurs pour cela qu'il soumet son corps au supplice, et son esprit à la géhenne : il faut absolument que jamais ils ne les déçoivent, restent sans faille, invincible jusqu'à la dernière seconde pour mener son armée, car le général se tient debout sur la proue de son navire, il survit, et coule avec son esquif, fut-elle réduite en lambeaux et que toute l'armée déserte. "Le pays attend que chaque homme fasse son devoir" : l'apophtegme est d'autant plus valable qu'il fut prononcé par un puissant leader d'armée, et qu'en ce sens, de tout les serviteurs à devoir honorer par leur courage et leur dévotion la cause qu'ils défendent, c'est avant tout le meneur de tout les fantassins.
Mais en quittant ses quelques minutes de loisir ou de repos, c'est tout le poids de son Empire qui vient s'abattre sur sa personne, faisant ployer ses genoux jusqu'à ce qu'ils traînent par terre, et peser, encore, encore, et quand enfin sa face vient s'écraser au sol, et que son visage se recouvre d'un voile de la poussière de marbre noir, résultat de la combustion des dizaines de corps -ou des centaines ?- dont Law avait, directement ou indirectement, la responsabilité de la mort, et dont les cadavres avaient été immolés sur l'autel de sa cruauté, une grimace atroçe déchire ses traits habituellement harmonieux, résultat de la douleur de cette pression éléphantesque, creusant de profonds sillons dans le masque de la réalité qu'il affichait. Alors ce même empire prenait ses aises, il s'étendait, se délectait du confort qu'offrait son propre géniteur, si peu malléable et pourtant tellement changeant, si peu pratique à manipuler et pourtant tellement polyvalent. Et quand il parvient à lever la tête, pour se retourner vers un miroir subtilisé quand le Colosse dont il est le père et l'équilibre avait le dos tourné, il ne voyait qu'un vide affreux. Rien. Sa face n'était que l'entièreté d'un néant que sa fonction matérialise, pour le dépersonnifier. Law était avant tout Tyler Raine, celui qui dirige. Mais qu'en était-il du Law qui a un jour rêvé d'aimer ? Rêvé de s'amuser ? Evidemment, le Polyglotte s'amuse tellement quand il distribue des punitions, quand il administre, mais ce ne sont pas des loisirs d'homme commun. Peut-être aimeraient-ils, oui, faire ce que Law fait. Et si Law trouve une distraction dans tout cela, c'est parce qu'il s'est, au fil du temps et des apprentissages, habitué à ce genre de choses. Il a acquit l'amour du commandement, et en est devenu un véritable artiste.

D'accord, vu comme ça, on dirait qu'il tire sur l'ambulance. Il est le cerveau d'un vaste complexe, capable d'engloutir des milliers de gens, résultat de pléthores d'affaires, de manipulations, d'évènements, calculés ou hasardeux, et cette gigantesque forêt éparse s'est muée en un seul arbre, et Law, qui en est le tronc, doit s'assurer constamment que les branches savent se tenir, qu'elles donnent de beaux fruits, et que les racines nourrissent correctement l'ensemble, sans jamais déborder violemment sur la plaine alentour. Tout se fait en douceur. Et il trouve le moyen de se plaindre..

Les japonais pensent, à raison, que l'eau est l'un des éléments le plus puissants de la création, si ce n'est le plus puissant. Et dans toutes les cultures d'ailleurs, il revêt une symbolique de monstre, dévorant, balayant, mais aussi de Dieu salvateur, qui apporte ses bienfaits et purifie les corps et les âmes. Law est merveilleusement admiratif de ce genre de pensée. D'ailleurs, c'est quand enfin, il s'est mis complètement nu, que ses pieds se posent sur les galets figés, et que l'eau chaude coule sur son visage et sa peau qu'il se sent débarassé des impuretés et salissures qu'il a accumulé dans ses journées et nuits de parvenu. Il s'accorde même la fantaisie de manger un fruit sous l'eau.

Un bruit, lui a-t-il semblé. Il sort de sous le jet dans son ample cabine, penche sa tête sur le côté.. et la voit apparaître là, juste devant lui, et s'avancer. Encore habillée. D'ailleurs, ça le surprend, et il la regardera, dans ses sous-vêtements, en souriant vaguement. Il  la place à l'endroit précis où il se tenait quelques secondes plus tôt. Et pour une fois, ce sera lui l'esclave. Sans qu'elle ait le moindre mot à dire, il s'était saisi d'un cube blanc, qu'on devine être un savon, avec lequel il la frottera lentement, partout, posant un genou à terre comme un chevalier devant son seigneur pour s'appliquer sur ses jambes, avec délicatesse.


Tu ne dois pas te forcer. Si tu n'en avais pas l'envie, je ne t'en aurais pas voulu.

Même si la relation classique avec Law était plutôt composé dans cet ordre précis : Baise, Douche, Baston, Abandon. Là, ce fut totalement le contraire. Il l'a sortie de sa perdition. Puis ils se sont mutuellement agressés. Enfin, la douche. Bon, quant à la 4ème étape, laissons-la tomber pour l'instant. De toute façon, il n'en a toujours pas envie. Quoique.. Hm, la situation ne l'aide pas.

Parfois j'ai un esclave qui fait ça. Mais comme ce sont plus souvent des garçons qui sont dévolus à cette tâche, et que tu es une fille, je ne voulais pas être inconvenant vis-à-vis de toi. Tu as déjà une idée de comment tu vas dépenser l'argent gagné au casino hier ?

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



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Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 46 vendredi 24 décembre 2010, 13:22:07

En deux ans, on a le temps et l’occasion d’apprendre une foultitude de choses. Comment se comporter avec les gens, comment modeler ses expressions, que dire en quelle situation ... Se programmer des réactions automatiques, adaptables et ajustables aux détails particuliers de chaque instant. Quelques mois après l’anniversaire de ses dix-sept ans, Andrea avait passé quelques mois dans le flou le plus total. On s’était inquiété, bien sûr. Parce qu’il y a des comportements qu’on juge anormaux, parce qu’une jeune fille fraiche et ouverte qui tout d’un coup fuit toute personne susceptible de lui adresser la parole, ça interroge. On a mis ce retrait et l’agressivité constante née dans son regard sur le compte de la crise d’adolescence. Il est évident que quand une jeune personne ne se comporte pas comme on en a l’habitude, c’est la faute à son âge. Une rébellion, un mal être, des propos durs et injustes ? L’adolescence. Facile. Combien ont pu entendre cette excuse, murmurée par les adultes avec un froncement de sourcils désapprobateur ? Certes, la plupart du temps on peut effectivement rejeter la faute sur les hormones et le phénomène de groupe qui pousse les gens à rejeter les autres, ceux qui ne font pas partie de leur cercle. Seulement, seulement, il n’y a pas que le contexte qui fait parfois dire des choses brûlantes de vérité ou de révolte. Parfois, il y a aussi une graine d’intelligence qui s’est développée sagement, attendant son heure. Sans être pour autant écoutée. Mais par principe, ce qui sort de leur bouche n’est qu’idées reçues, postulats repris ici et ailleurs, belles phrases empruntées à d’autres. Par habitude, ils répètent sans intégrer, sans vivre leurs dires. Alors comment considérer ces ados qui clament leurs envies, leurs pensées sans que personne ne les prenne réellement au sérieux ? Ce sont les oubliés de la société, qu’elle soit restreinte à leur famille ou étendue à une nation. C’est seulement à leur majorité que l’on commencerait à les identifier comme des êtres doués de raison ... Parce qu’ils obtiennent du pouvoir. Simplicité dans la démarche.

Et donc oui, Andy avait subi sa crise avec un peu de retard. Vous savez, cette attitude prostrée, cette envie constante de dormir et de s’isoler dans sa chambre. Ce désir d’être seule, de ne plus bouger, cette incapacité à entreprendre des actions, des mouvements. Apragmatisme. Cette fuite de la réalité, de la conversation. L’esquive de toute nécessité de communiquer, de s’exprimer et d’ouvrir la bouche pour induire un avis, l’enfermement d’une voix qui n’aurait rien d’autre à dire que sa peine. Alogie. Et puis cette perte évidente d’énergie, ce découragement devant tout, cette paresse caractérisée par l’incapacité physique d’entreprendre quoi que ce fut. Apathie. Autant de symptômes inquiétants mais révélateurs d’un passage à vide dans l’existence. Tant qu’ils se résorbent, c’est que tout va bien ? Pas forcément. Parce que continuer à détruire quelqu’un déjà à terre peut soit l’achever soit le rendre résistant aux coups. Andrea, c’est la deuxième configuration. Après des semaines de repli et d’oubli, ses efforts piétinés par un bourreau sans aucun regret ni pitié, la jeune femme avait baissé les bras. Elle se souvient encore de l’instant où elle a abandonné, faisant le plaisir de tout le monde, la croyant alors en meilleur état. Evidemment, son esprit ne souffrait plus puisqu’il s’était désolidarisé de son enveloppe corporelle. Deux en un, chacun vivant de son côté. Ses pensées et ses émotions furent barricadées en quelques secondes dans un coin de sa tête, et elle retrouva instantanément l’ombre d’un sourire qu’elle avait autrefois ressenti. C’était un soir, au moment du repas. On lui avait demandé si tout se passait bien à l’école, on envisageait de lui proposer un quelconque soutien. Elle avait tout d’un coup changé d’attitude, déculpabilisant ses parents, rendant Seiji intéressé et prêt à la briser une fois encore.

Sauf qu’il n’y parvint plus, et dut se contenter de s’amuser avec une poupée docile qui ne bronchait ni ne disait mot. Avec lui, elle restait de marbre, toujours. Fixant le plafond d’un œil assuré, un sourire triomphant aux lèvres. Il n’avait plus d’emprise sur elle, et c’était délicieusement jouissif. Certes, pour parvenir au résultat qui avait été elle il y a de cela quelques heures, Andy avait mis des semaines. Le temps de comprendre quand il fallait sourire, faire la moue, éclater de joie. Pleurer. Ce dernier point avait été épineux, puisqu’elle ne l’avait même pas fait lorsqu’on l’avait réduite à un simple objet ou passe-temps. Elle avait dû se forcer tout particulièrement là-dessus, et ce que la jeune fille maitrisait le mieux était encore les démonstrations de plaisir et de contentement. Andy avait appris à simuler n’importe quel sentiment, efficacement et rapidement. Si bien qu’on l’avait laissée tranquille aussitôt, avec ces histoires de soutien ou de passage adolescent brutal. Personne n’avait vu que, sous son sourire radieux, le vide demeurait. Il n’y avait aucune joie dans ses rires, aucune tristesse dans ses faciès défaitistes, pas un soupçon de compassion dans ses paroles réconfortantes, aucun plaisir dans ses simulations. Andrea s’était employée à vivre pour les autres plutôt que pour elle, leur offrant ce qu’ils attendaient et ainsi les dissuadant d’aller chercher plus loin. Il était si aisé de jouer un rôle, d’endosser la peau de quelqu’un qu’elle n’était plus. Seul peut-être Seiji se doutait qu’il l’avait atteint plus que de raison, de sorte à ce qu’elle perde une partie de la sienne. Mais si cela pouvait la rendre inaccessible, ce n’était pas grave. La jeune femme n’était pas heureuse, soit. Mais au moins, elle ne souffrait plus. Valait-il mieux ressentir un poids brûlant et étouffant tout au long de ses journées ou s’éloigner de tout et anesthésier ses sens ?

Face à la douleur, il y a ceux qui supportent tant bien que mal jusqu’à n’en plus pouvoir et ceux qui mordent dedans, déchirent la peau et les tissus pour souffrir une bonne fois pour toute et enfin annihiler cette souffrance  irradiant dans toutes les directions, cet insupportable élancement sourd qui pulsait dans les veines. Il n’y a pas de solution miracle, pas de remède simple et efficace, pas de conseil qui résoudrait tout. Il y a simplement l’adaptation. Les capacités d’une personne à affronter la vérité de la douleur, ou bien la lâcheté qu’elle a en l’évitant et la repoussant de toutes ses forces. Cependant, qui peut juger si ce n’est la victime ? Andrea se savait dans la voie de la facilité, celle qui ne lui faisait rien perdre ... mais rien gagner non plus. Pas même le mérite d’avoir affronté, de s’être débattue. Simplement la constatation de son abandon, de sa résignation. Cela lui apportait une force bien étrange, celle de ne jamais plus se faire atteindre, celle de savoir tout contrer d’un seul geste, d’une parole. Et maintenant Andrea était vulnérable. Quand on vous rend le cœur que vous aviez consciencieusement caché, on ne sait plus bien comment le protéger ni comment le garder des agressions extérieures. Tout d’un coup, projetée en pleine lumière, la jeune fille devait faire avec. Faire avec ce qui lui passait par la tête, agir sur une impulsion, ne pas exactement savoir où tout cela allait la mener. Composer face à son cœur qui se réveillait et lui soufflait que tout ce qu’elle avait établi comme défenses pendant deux ans, ce n’était rien. Rien de bien.

Et maintenant, elle hésitait un peu. Cette situation ne lui était pas familière, dans la mesure où Law n’était pas n’importe qui. Déjà, comprendre en quoi et pour quelle raison elle était restée habillée était un défi de taille. Eut-ce été quelqu’un d’autre qu’elle aurait réagi différemment ? Certainement. Son corps n’était pas un tabou, il avait été maintes et maintes fois touché, aimé, étreint. Et pourtant, devant lui, elle le retenait. Andrea ne voulait pas s’exposer entièrement, sentiment d’hésitation qui la poussait en avant tout en lui intimant de ne pas dévoiler l’entièreté de son être. Le corps devenait quelque chose, prenait une signification depuis qu’il avait renoué un lien fragile avec l’esprit qui le dirigeait. Et il n’était pas évident alors de l’offrir aux yeux de quelqu’un, comme si c’était la première fois qu’un regard l’effleurait. Tendue, Andrea ne savait plus bien où se mettre, si bien qu’elle se laissa volontiers guider par Law, qui réagit avec une extrême prévenance à cette intrusion on ne peut plus étrange de sa part. Ainsi, elle se vit installée sous l’eau qui commençait déjà à ruisseler sur ses épaules, et traitée avec beaucoup d’égards. Tant qu’elle mit quelques instants pour s’en rendre compte. Law était là, devant elle, installé comme un soupirant devant sa dame, et avec douceur et tendresse, il entreprit de faire ce qu’elle-même aurait pu faire, bien que cela eut été moins agréable.

La dernière fois qu’on avait pris soin d’elle comme ça, sans arrière-pensée évidente, sans idée dérivée, sans compensation ... Non, elle ne s’en souvenait plus. Andrea abandonna donc volontiers ses jambes à cet exercice, qui lui faisait peu à peu prendre conscience d’elle-même et de cette enveloppe qu’elle découvrait comme une enfant. La chaleur de l’eau, le contact des mains de Law, la sensation de plénitude lui montaient à la tête et Andy sentait ses joues se colorer de rouge devant l’inhabituelle situation, tentant de ne pas se montrer trop déstabilisée en lui répondant le plus naturellement du monde.

- Je crois que je ne sais plus ce qu’est se forcer, depuis hier soir. C’était une habitude, c’en est devenu un concept lointain. D’ailleurs, si j’avais dû le faire, je pense que je serais directement arrivée dans une autre tenue.

Et elle le regardait faire, tandis que ses dents mordillaient l’intérieur d’une joue, d’impatience et d’hésitation. Après qu’il eut repris la parole, Andy se décida enfin et vint poser un très léger baiser sur le crâne de ce qui semblait être, pour ce court moment, son serviteur attitré. Son contact était une addiction, et cette simple démonstration lui suffisait à se rassurer, à se conforter dans son idée et surtout, à lui exprimer par un simple geste tout ce qui ne franchissait pas la barrière consciente de ses lèvres.

- Acheter le strict minimum en matière de vêtements plus ... adaptés. Et le reste, si reste il y a ... Le garder en cas de besoin, je pense. Ou le miser de nouveau, si j’y prends goût, qui sait.

La dernière phrase fut lâchée avec une légèreté toute particulière, comme si cela lui était venu à l’instant. A vrai dire, elle n’y avait pas pensé une seule seconde. Loin de songer au profit ou même aux gains qu’elle avait pu faire, Andy avait eu bien d’autres choses en tête. Mais il fallait redescendre sur terre, et se contenter de la réalité plus que du rêve. Moins onirique, mais plus tangible et surtout durable. D’autant plus que les deux se rejoignaient en la personne de Law. Avant tout, maintenant, elle avait envie de découvrir son monde. De profiter des couleurs qu’elle n’avait pas vu de nuit, des rues de Nexus et de l’agitation qui régnait dans toutes les villes de la terre, que ce soit dans son monde ou dans un autre. Mais surtout, elle avait envie de parler d’elle s’il le lui demandait, Andrea voulait apprendre à se confier, à laisser sortir des choses qui la caractérisait, qui faisaient d’elle ce qu’elle était, en définitive. Au-delà des différents masques qui se superposaient devant son image, au-devant des idées préconçues qui pouvaient courir à son contact. D’ailleurs, cette simple pensée lui inspira une remarque qu’elle voulait totalement spontanée, et appréciative. Un compliment bien déguisé, en quelque sorte.

- Je crois que tu es le premier à ne me faire que cela dans un endroit pareil. Tu arrives à rejeter tous les aprioris qu’on peut se faire à ton sujet avec une simplicité débordante ...
Tomorrow comes to take me away
[Eagle Eye Cherry]

>  On ne devrait pas vivre que pour le plaisir. Rien ne vieillit comme le bonheur.
>  L'émotion nous égare : c'est son principal mérite.
[Oscar Wilde]


Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 47 lundi 27 décembre 2010, 12:54:46

Law n'a jamais été intéressé par l'art. Il trouve de la beauté dans l'architecture, la grande architecture. Il trouve plaisant les grands tableaux, les toiles qui représentent avec beaucoup de fidélité une réalité parfois banale, mais qui, sous forme de peinture ou de sculpture, représente soudain quelque chose de fort exceptionnel. Mais jamais il n'a étudié, ou n'étudiera, l'art sous sa forme scientifique. Car Law est un terre-à-terre, cruellement attaché au concret. L'économie n'a rien d'abstrait ! Ce n'est après tout qu'une succession de données effectives, de calculs précis. Évidemment, il y a des fluctuations, des variations imprévues qui minent parfois les équations prédéfinis, à base de gains, de pertes. Mais cela n'a rien d'un hasard : Tout est prévisible dans la finance, pourvu qu'on puisse réunir toutes les informations dont les spécialistes de cette obscur savoir, régulateur du bon vivre de leurs décideurs, ont besoin pour appliquer leurs méthodes.

Tout ce qui est "sûr" découle de fondements solides, compréhensibles à tout un chacun, accessible après quelques études plus ou moins profondes.

Bon, exception faite du commandement, qui, même après le potassement des centaines d'ouvrages, se révèle être dans les tripes. On est bon ou on ne l'est pas. Le talent peut venir, mais cela n'a rien de mathématiques. C'est savoir anticiper, s'adapter, étudier ce qui doit l'être ou oublier ce qui le mérite.

Mais l'art, le vrai. Celui des artistes, donc. Ceux qui déploient un trésor d'imagination pour pondre des représentations magistrales de scènes, de personnages. Le don d'artiste se travaille évidemment, mais il est aussi et surtout inné. Et c'est là que notre très cher polyglotte échoue lamentablement. Il n'a pas la notion des lignes, des tracés, des proportions. Il peut affirmer qu'il trouve "beau" quelque chose, mais il ne saura dire pourquoi. Voilà, c'est joli, c'est bien fait, c'est tout. Ce qui distingue une croûte d'un David ? "Bah... Euh.. La croûte c'est pas beau !" Rien d'autre.

Mais il vient de se découvrir une passion pour l'art. Soudainement. L'anatomie plus précisément. Oui, sa manière de caresser les muscles d'Andrea, de vouloir saisir chaque détail de chaque cellule de son derme, d'imprimer sur l'extrémité de ses doigts l'empreinte du corps de la jeune fille, ça a quelque chose d'académique. Ca y est, il lui voue un culte, comme une statue d'une déesse latine qu'il vénèrerait depuis sa plus tendre enfance, et dont il rêve de pouvoir en effleurer sa représentation. Voeu exaucé.


Tout en l'écoutant parler, il parcoure chaque parcelle de son être, jusqu'à tomber nez-à-nez (si je puis dire) avec la culotte qu'elle porte encore. Maudite. Pas parce qu'elle cache quelque chose que Law serait en droit de trouver "intéressant", mais parce qu'elle l'empêche de continuer l'étude minutieuse à laquelle il se livrait. Fut-ce un gant ou un corset qu'il eut intérieurement pesté tout autant ! Alors il se retrouve cruellement confronté à la réalité : Il doit, pour l'instant, se résigner à oublier momentanément une partie de son corps. Perdu dans ses contemplations, il doit avoir oublié qu'il lui reste un autre bout de tissu, plus haut. De quoi le frustrer pour les milles années à venir. Fronçant les sourcils devant cette obstacle, il tente de se faire à l'idée qu'il y a, quelque part, un Dieu qui lui refuse apparemment un bonheur total. Une petite tâche sur le tableau, et Law déteste ça.
Les jambes propres comme elles ne l'ont jamais été, le jeune homme ralentit ses mouvements et, considérablement inconscient, paumé dans l'admiration d'une merveille, il plante ses dents dans le haut du tissu, au niveau de l'élastique, et le tire en arrière de quelques centimètres. Comme subissant le fouet du tortionnaire qu'est l'aterrissage brutal à la réalité, il relève alors les yeux vers elle, maintenant qu'elle venait juste de finir de parler. Il se sent bête, et il y a de quoi. Il relâche la pression de ses dents, fermant épisodiquement les yeux pour les protéger des gouttes qui y tombent, puis se redresse, l'air habituel, sûr de lui, neutre, détaché.
Il n'a qu'une demie-seconde pour prononcer une parole. Ne pas la laisser réfléchir ou se faire de fausses idées : Il faut qu'il éclate l'oeuf avant même que l'on puisse affirmer qu'un poussin allait y naître.

Parce que tu pensais que j'allais te faire quelque chose ? Enfin, si tu en as envie, je veux bien.. Je ne veux pas dire que je n'en ai pas envie, mais que je n'y vois pas forcément une obligation.

Encore une fois pas de mensonge. Il fait preuve de self-control, il ne laisse pas se déchaîner ses bas instincts. Et il n'a même pas à se forcer : Aussi étrange que ça puisse paraître, même à lui-même, c'est un état dont il se pare tout naturellement. Sans devoir recourir à la moindre exigence de sa part.
Il la contourne, passe derrière elle. Le savon passe désormais sur ses bras, son dos. Il la masse avec ses mains, reprenant lentement le chemin du lyrisme visuel, de la bête adoration d'un corps qu'il eut voulu connaître plus tôt. Quant à son âme.. Elle, il aurait préféré qu'elle l'accompagne il y a bien longtemps. Pour avoir été autre. Plus heureux, peut-être. Moins Tyler, c'est sûr.

Un bruit se fait entendre. L'esclave de tout à l'heure qui, sans un mot ni même un regard, dépose deux serviettes fumantes, presque bouillantes, sur le rebord d'un lavabo en métal, et repars le plus discrètement possible.


Surtout, ne te forces plus jamais à rien. Et si tu trouves l'envie de faire quelque chose, de vouloir quelque chose, de dire quelque chose, alors n'hésite pas un seul instant. D'accord ? Tu es une décideuse maintenant. Tu n'as plus à te soumettre.


Sur ces mots, ses mains entourent le ventre d'Andrea, non pour la câliner mais pour atteindre et frotter délicatement son ventre et ses flancs, sa tête se penchant pour embrasser ses épaules couvertes de ses cheveux trempés.

Tu peux parler et agir librement ici. Surtout parler. Pour agir, il faudra que tu apprennes à maîtriser les choses.

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



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Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 48 lundi 27 décembre 2010, 16:06:38

Dire Adieu à un monde. Entrer dans un nouvel univers qui n’accepte ni souvenirs, ni infidélités. Un espace auquel il faut se dévouer seulement au présent, mettre de côté le reste et accepter de tomber soit de l’un, soit de l’autre. Fléchir, choisir, ou laisser le temps décider pour soi. Andrea avait décidé de plonger dans les eaux troubles de Nexus, pour échapper à la clarté mensongère de sa petite vie bien rangée et orchestrée. Elle disait Adieu à un quotidien, des habitudes, des certitudes et des valeurs. Ici, il faudrait s’en créer de nouvelles. Dépasser les limites physiques, les différences matérielles et se servir d’une expérience -bien maigre- durement acquise pour apprendre un monde, une vie inconnus. L’adieu n’est que vérité devant Dieu, de ces incontournables faits qu’on ne peut réfuter une fois le mot franchi. Lorsqu’il faut s’en défaire, le chemin passé ne disparait pourtant pas en quelques instants, reste là, ancré dans une mémoire faite de sons et de couleurs qu’il n’est pas si facile de faire déguerpir. La magie de l’esprit humain, se souvenir. Mais dire Adieu, c’est donner un point final à cette route tracée, à ce qui est fait et que l’on préfère maintenant effacer. D’un son, tout réduire en poussière. D’une parole, remettre les compteurs à zéro. Mais il y a toujours quelqu’un pour se souvenir, pour faire ressurgir des méandres sombres de l’Oubli des scènes difficiles, de celles que l’on croyait définitivement anéanties. Si ce que l’on efface ressort toujours quand on s’y attend le moins, tout le reste est lettre à écrire. C’est cela vers quoi il faut avancer, ce qu’il faut prendre en compte et épouser pour arriver à se hisser hors d’une fange faite de mauvais souvenirs. Les remplacer par de meilleurs.

L’adieu est une infinie diligence, où les chevaux ont dû souffrir. Un voyage compliqué, lent et tortueux. Qui commence en général par la prise de conscience de ce que l’on va perdre. Puis l’expérimentation de la démarche, des mots à trouver, des décisions à prendre. Le pour, le contre, évaluer les risques et les dommages collatéraux non prévisibles. Comme un cœur qui se brise, comme ceux qu’on ne pourra plus revoir en ne tournant le dos qu’à un seul. Comme un environnement qui disparait. Se retrouver alors tout à coup au point d’arrivée, au bout de la route. Renaitre, trouver de nouveaux repères, des marques neuves dans un pays inconnu. Comme Andrea, faire l’expérience d’un autre monde qui rappelle tant le sien qu’on n’en est que plus déstabilisé. Et ceux qui portent ce voyage s’épuisent, ceux qui le vivent n’y arrivent entiers que rarement. Entreprendre une telle démarche peut en toucher plus d’un, et toujours une partie de soi y laisse quelque chose en échange. Les reflets de l’absence de quelqu’un peuvent parfois marquer l’ombre du plaisir d’un autre, tandis qu’il faut fermer les yeux sur le reste, et se contenter de ce que l’on gagne. Même en admettant que le change soit largement avantageux, demeurent le pincement au cœur et la gorge qui se serre, de piétiner plus que la source du mal et la raison de l’abandon.

L’adieu, c’est deux corps qui se séparent sur la rivière du temps qui passe. Seul le temps peut en imposer ainsi les règles, lui seul permet de réaliser vraiment que l’un a quitté l’autre. Car si Andrea savait avoir prononcé ce mot fatidique, irréversible envers un passé qu’elle connaissait alors mauvais, elle seule en prenait conscience. Il n’était pas rare de ne pas la voir revenir plusieurs jours de suite chez elle, aussi Seiji et son père ne s’inquiéteraient-il pas, le premier attendant sans aucun doute patiemment le retour de sa poupée de chair. Combien de temps faudrait-il à ces deux hommes pour admettre qu’elle ne revenait pas, qu’elle disparaissait de leur quotidien ? Mais surtout, la jeune femme pouvait-elle accepter ce mot, alors que personne ne savait pour qui elle partait, et qu’elle-même ignorait qui ils embrassaient de leurs inquiétudes, de leurs regrets. Peut-être pouvait-elle concilier les deux, accepter d’oublier et de repartir, un pied dans chaque monde. Il suffisait d’un peu d’organisation, un peu de volonté pour que tout change, sans devenir complètement autre. Est-ce que Andy avait peur de tout laisser derrière elle ? Oui. Car on ne mesure pas la force de la manipulation et du pouvoir sur la victime, on ne comprend pas toujours l’attachement aux certitudes, aux règles. La possibilité de savoir où aller, de comment s’y rendre était apaisante. Ne pas craindre pour autre chose qu’à l’ordinaire, accepter le meilleur et refuser l’angoisse et les contraintes. Mélanger deux fluides qui n’avaient aucun compatibilité et qui, de fait, ne pouvaient se retrouver unis.

Non. Ce n’était pas possible de vouloir tant de choses, de désirer le changement tout en demeurant dans la sécurité du passé. L’adieu, c’est le sanglot long des horloges et les trompettes de Waterloo. L’échec cuisant, la consécration d’une erreur qui ne peut se résoudre que par l’abandon d’un des deux partis. Que l’autre soit d’accord ou pas, qu’importe. Il y a victoire, injuste, de celui qui n’ose pas mettre fin à quelque chose de douloureux. Le véritable courage et d’accepter de plier l’échine et de clore une insupportable situation, de dire soi-même à tous ceux qui s’interrogent que l’amour et une part d’espoir est tombée à l’eau. Qu’il n’y a plus lieu de croire ou d’attendre une issue favorable. D’admettre qu’Andrea doive se retirer de son confortable quotidien malsain et pathogène. C’est ouvrir les yeux sur un bateau ivre de tristesse, qui a rongé ses passagers principaux. D’admettre qu’ils sont en détresse, et de constater que ne rien faire reviendrait à laisser se noyer deux êtres qui se débattent, avec plus ou moins de force. Car ce n’est pas le dominé le plus faible, puisque le pouvoir facilement acquis a de ses airs de résignation et de faiblesse criante, montrant que le seul espoir et d’écraser pour survivre, en comptant sur l’abdication de l’autre. Défaite, victoire, l’Adieu c’est l’Armistice parfois forcée qui remet les accords en position de départ et abandonne les hostilités, pour repartir chacun d’un côté.

Mais l’adieu transpirait surtout dans la peur d’Andrea, dans sa volonté d’être ici autant que dans celle de retourner là-bas. Son esprit et son cœur se dissociaient encore, créant divers conflits d’intérêt, la plupart de ses envies de repli n’étant dues qu’à l’angoisse de ne pas se faire une place ici, de ne pas connaitre, de mal apprendre. Comme le chaton qui devrait choisir entre le chien enragé derrière lui et l’inconnu effrayant que peut être une bassine d’eau, qui a l’air terrifiante pour lui comme ça, mais qui en fait le sauve d’un plus grand mal. Et qui va l’accueillir les bras ouvert, dans les meilleures conditions possibles. Car Andrea avait vraiment eu de la chance en tombant ici, et si cela n’avait pas été le cas, sans doute se serait-elle trouvée dans une toute autre position. Sans retrouver la maitrise de ses émotions pour autant, elle n’aurait fait que ce qu’elle savait le mieux exécuter. Jouer son rôle, accepter en silence.

Déjà comblée de sa simple présence aux côtés de Law, sans doute la jeune femme aurait-elle pu rougir si elle savait l’admiration qu’il était en train d’avoir pour elle. Loin de se douter des mots que ses yeux lui renvoyaient, Andrea ignorait tout de l’émerveillement que son corps, si sale et tellement repoussant à son avis, suscitait chez lui. De ses mains, de ses pensées, il nettoyait bien plus que la peau mal réveillée, se débarrassant également des caresses qui y avaient été apposées auparavant, des gestes sans amour qui y étaient constamment associés.

Elle ne remarqua pas non plus spécialement la frustration que ses propres vêtements lui procurèrent, simplement une hésitation et un visage qui se fige, qu’elle mit sur le compte de la déception première. Mais c’était stupide de penser cela, puisqu’elle était à présent suffisamment confiante pour le savoir plus avant que cette simple considération. Elle le regarda tout de même s’en prendre à cet obstacle qui apparemment endossait plus de frustration qu’elle ne l’eut pensé. S’obligeant à ne pas penser immédiatement à ce qu’elle ne voulait admettre, Andrea observa avec curiosité le maitre des lieux s’attaquer à un morceau de tissu désobligeant, usant de sa bouche pour abolir ce qui le maintenait en place. Et c’est ainsi qu’il croisa les prunelles de la jeune femme, à la fois teintées de surprise et d’amusement de le voir aussi spontanément pris dans une démarche dont elle ne percevait que le détail visible. S’il eut l’air mal à l’aise l’espace d’un très court instant, cela disparut bien vite et Andy retrouva le Law nonchalant, au regard assuré et non un peu perdu dans un océan qu’elle devinait en être la créatrice, sans bien savoir comment. Et cette étrange tentative s’écourta bien vite, puisqu’il prit la parole afin d’effacer toute tentative de la part de la jeune femme de croire autre chose. S’expliquant, son diligent et dévoué serviteur entreprit de continuer sa tâche, évitant de s’attarder sur ce qui l’avait un instant déstabilisé. Andrea aurait pu l’aider et faire un geste, un seul. Mais ce n’était pas adéquat, après ses paroles. Elle ne voulait pas se perdre dans un mauvais sens, s’effacer dans une direction qui n’avait rien de pertinent. Se tromper de voie n’était pas dans ses directives, et Andy se refusait à ignorer l’attitude de Law, qui n’était en rien dirigée vers ce dont elle avait l’expérience.

Qu’était-il au final, pour elle ? Cette interrogation jaillit alors qu’elle cherchait un terme pour le qualifier. Amant, non. Compagnon, pas forcément. Sauveur non plus, même si dans les faits cette réalité demeurait Andrea refusait de les voir eux deux sur quelque chose d’autre qu’un pied d’égalité. Et elle se rendait compte qu’il ne lui restait aucun mot à mettre sur son visage. Il était Law, elle était Andrea. Ils étaient eux, mais « eux » était irremplaçable par quelque mot que ce fut. Et ne pas pouvoir en poser un était difficile, dérangeant, presque regrettable. Mais le regret d’Andy de ne pouvoir en parler comme elle le souhaitait fut stoppé net par l’arrivée des deux serviettes demandées, qui même de loin donnaient envie de s’y blottir. Il était pourtant hors de question pour la jeune femme de se soustraire à l’action délicieuse des mains de Law tant que celui-ci ne l’abandonnerait pas de lui-même. Ses mots comme ses doigts parcouraient ses épaules, galvanisant sa volonté d’une force qu’elle ne connaissait pas. Celle de commander, de décider, de vouloir. De formuler des dires, des demandes, des ordres. Frissonnant au moins autant sous les délicates attentions de Law aux alentours de sa nuque que sous le poids que ses déclarations faisaient peser sur elle, Andrea n’aurait à présent voulu être ailleurs pour rien au monde. Néanmoins, vint enfin le moment de reprendre la première de ses interventions et d’y répondre avec franchise et aplomb.

- J’en ai trop l’habitude pour me rendre compte que ce n’est pas une fatalité. Et l’envie, je ne sais plus bien ce que c’est. Je veux que tu continues toujours à me toucher comme tu le fais. Je veux constamment sentir ta main sur moi, j’ai besoin que tu me regardes comme tu es en train de le faire. Sentir que je suis là, et pas ailleurs, pas quelqu’un d’autre. Law, Andrea. Juste ici.

A ces mots elle posa sa main sur les siennes, suivant avec lui le mouvement qu’il imposait à ses poignets. Il était si facile de parler sans subir le possible jugement d’un regard qu’elle voulait encore appréciateur, et pas rempli d’une pitié qu’elle n’accepterait pas. Si simple de confier au mur ses pensées, tellement aisé de tenter de s’ouvrir vers lui sans le fixer, et ce bien que ses lèvres contre sa peau avaient quelque peu l’action de la déconcentrer. Des petites décharges couraient sous son épiderme à chaque contact, électrisant la partie de son corps qui se réchauffait à ce simple toucher. Puis, elle reprit.

- C’est ça, l’envie ? Ou c’est simplement sa découverte ? Je n’en ai absolument aucune idée, tu l’auras remarqué. Je n’y ai pas eu accès depuis un peu trop longtemps.

Nouvelle pause, qui dura un peu plus longtemps et dans laquelle Andrea glissa un soupir.

- Et je veux aussi que tu en viennes à trouver cela indispensable. Comme moi je pense pouvoir le découvrir avec toi. Sinon, ça n’a aucun sens, sinon ça n’aura aucun sens. Comme jusqu’à présent.

Elle se trouvait naïve, tout à coup, et sans doute trop sérieuse sur le sujet. Le sacraliser ? Normalement, non. Ce n’était rien. Et pourtant, la simple idée de cette concrétisation avec Law faisait naître chez elle une sorte de sirène d’alarme, qui la suppliait de bien y réfléchir. Comme si son cœur savait avant sa tête que ce n’était finalement pas si « rien » que ça, parfois. En l’alarmant, quelque chose lui demandait soit de ne pas y mettre trop, soit d’être sûre de ne rien perdre. Et si elle y mettait trop, si finalement Andrea ne pouvait pas envisager cela autrement ? Si son corps était plus fort et se souvenait que le plaisir n’était rien qu’un ensemble de manifestations feintes ou provoquées par la simple mécanique des choses ? Si son espoir perdait, la jeune fille allait vivre un mauvais moment. Pire, une déception énorme. Il lui fallait attendre, sans doute s’assurer que le mythe n’était pas infondé, le toucher du doigt sans trop s’y impliquer, et attendre l’agréable surprise. Ne pas se laisser aller à la simple expérience d’une erreur qui briserait tout ce qui s’était construit depuis la veille.
Tomorrow comes to take me away
[Eagle Eye Cherry]

>  On ne devrait pas vivre que pour le plaisir. Rien ne vieillit comme le bonheur.
>  L'émotion nous égare : c'est son principal mérite.
[Oscar Wilde]


Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 49 lundi 27 décembre 2010, 22:18:32

Tu es trop mignonne. L'envie, c'est de vouloir. Si tu veux quelque chose, considères que tu en as envie. Le désir est un peu supérieur. Le désir, c'est la volonté plus poussée. Sonde-toi. Demande-toi à toi-même.

Son ventre savonné, ses bras de même. Il n'y a que ses seins et son bassin qui ont échappés au traitement, sans doute à son grand dam. Mais pour une fois dans sa vie, il ne fera pas cas de cette omission et même, il ressent un profond respect, quelque chose d'admiratif en plus, pour cette fille qui est arrivée, comme une fleur, pas complètement déshabillée, couvrant encore sa pudeur, là où lui était habituée aux nanas se retrouvant totalement nues avant même qu'il n'apprenne leur âge, voire même parfois leur nom. D'ailleurs, pour elle, c'était plus ou moins la même chose : Se mettre à nu, se donner, ça ne valait rien pour elle. Alors le fait que cette fois-là particulièrement elle cachait un peu de son corps donnait à ce geste tout son sens, et donc son caractère exceptionnel se retrouvait hautement estimé. Law avait pris conscience que ce n'était pas forcément simple pour elle, pas à cause d'elle, mais à cause de lui, d'eux. Et ses mots sont tellement expressifs et touchants qu'il ne peut que fondre, bien plus vite que ne peut le faire le savon. Savon qui retrouve sa place originelle loin du jet d'eau.


Je peux éteindre l'eau ?

L'eau, Law. Punaise quel "humouriste" je suis !.. pardon.

La jeune fille ne répond pas. Peut-être est-elle dans ses questionnements. Eteindre ou pas ? Le Polyglotte tranche aussitôt, sans même lui laisser le temps de parvenir aux conclusions de ses tortueux cheminements psychiques de conséquences à sa réponse. Oui, non.. Et bien : Non dans l'immédiat, mais Oui un peu après.


Compris, je la laisse encore quelques secondes.


Et il revient s'immerger sous la pluie artificielle, serrant contre l'une de ses paumes une main d'Andrea, l'autre passant sur son corps, attentif, pour s'assurer qu'il ne reste rien de la matière purificatrice avec laquelle il venait de lui prodiguer ses soins.

Je disais.. Demande-toi si mon contact t'inspire quelque chose. Une envie ?.. Peut-être un baiser. Ou plus. C'est naturellement que ça doit venir. Laisse-toi aller. Libère ton esprit. Fais-le galoper et s'interroger sur ce que tu veux obtenir, sur ce qui serait bon pour toi.

Il tire ensuite son bras en arrière pour le caler dans son propre dos, la forçant à se rapprocher de lui. Il n'a pas réellement à faire plier sa volonté : Il est sûr qu'elle ne refusera en rien ce contact. Et il la prend dans ses bras, la tête faisant bouclier pour la couvrir du liquide qui s'écoule sur eux. Où qu'elle ira, il la protègera, comme si sa vie en dépendait, même si il doit recevoir les injures d'une pluie de feu, même si il doit se parvenir et rompre un serment, même si il doit se lancer à corps perdu du haut d'une falaise immensément haute, risquant de se briser les os dans moults souffrances sur d'hypothétiques récifs, il n'hésitera pas à le faire, dans la seule optique qu'il ne lui arrive rien. Aussi bien qu'il fait de lui-même une couverture contre le jet de douche pourtant fort large, il n'hésitera plus à se sacrifier pour elle. Aussi bien qu'il sait qu'elle va le faire redevenir un peu plus Law, il s'écorchera chaque muscle pour qu'elle redevienne un peu plus Andrea. Qu'ils retrouvent ce qu'ils ont chacun perdus, et abandonnent les poids qu'ils traînent.
Le contact dure de longues secondes, pendant lesquelles, interdits tout les deux, on entend rien d'autre que l'eau qui bat une mesure discordante et irrégulière au sol. Jusqu'à ce qu'il ouvre ses yeux, qu'il eut fermés par mécanisme. Son regard, vide, lancé vers un mur à côté, est plein de fatalité. Il doit s'estimer heureux d'avoir Andrea contre lui : Elle ne peut pas voir ses yeux qui ressemblent à ceux qui contemplaient sa vision de Neige, quelques heures plus tôt.


J'ai peur.

Et avec cette parole, il rompt l'étreinte, et la laisse au milieu de cette douche pour aller tirer une chaîne en métal cuivré pendante qui, une fois baissée d'une vingtaine de centimètres, stoppera totalement l'écoulement de l'eau. Plus rien, sinon quelques épisodiques goutelettes, rebelles qui veulent rejoindre leurs camarades tombées au champ d'honneur, dont les cadavres ont traversées les quelques perforations au sol, et dont l'âme glissera jusqu'au fond des canalisations souterraines.
Les égoûts. Paradis des bribes d'eau qui se sont vaillamment battues lors d'un héroïque assaut contre la saleté.

Law va ensuite se saisir d'une des serviettes, encore chaudes, d'une blancheur immaculée, et la déplie. Celle-ci est large et haute, et quand il la tient dans ses deux bras, elle traîne presque au sol. Il passe derrière Andrea et lui pose le tissu sur l'épaule, dégageant ses cheveux qu'il libère de l'emprise tempérée et met au dehors pour qu'ils puissent s'égouter tranquillement. La voilà revêtue d'une véritable capeline, et peut-être devra-t-elle s'habituer à en porter désormais, si c'est à son goût.
Puis, il va chercher ce qui est censé être la sienne, de serviette, et l'étend elle aussi. Mais il ne la passe pas autour de lui : Il l'utilisera pour sécher avec prudence la chevelure trempée de sa belle, celle-là même qu'il tripotait précédemment.


Je ne sais pas vraiment de quoi j'ai peur. Peut-être de ne pas être à la hauteur. Ou que tu ne trouves pas ça assez bien. C'est la première fois que je ressent ça, tu sais. Peut-être que ça me deviendra indispensable. Mais si toi tu n'aimes pas ça, l'échec serait le plus cuisant de ma vie. Et pourtant, j'en ai subies des défaites, et dans tout les domaines. Mais là vraiment ce serait.. Hmf.. Je pense que je me considérait comme... Impropre à pouvoir te toucher. Enfin, je ne sais pas si je suis très clair.

Les cheveux débarassés d'un peu de leur humidité, il réitèrera le processus avec beaucoup moins de soin sur lui-même, et le séchage sommaire vite expédié, il plie la serviette en deux et la passe autour de son bassin.

Je suis tout de même conscient que.. l'acte.. une fois lancés, ça devient naturel. Mais je veux que tu deviennes accroc à ça, autant que moi je pourrais le devenir.

Un faible sourire, un brin forcé, s'affiche sur son visage, alors que, face à elle, il la contemple. Il ressent tellement de désolation vis-à-vis de cette situation nouvelle.

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



Je suis pour la réhabilitation des Userbars.
Les userbars sont VOS amies. Elles sont gentilles.
Utilisez des userbars. <3

Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 50 mardi 28 décembre 2010, 12:47:59

Pour commencer par une bien étrange réflexion, on peut parfois être légitimement amenés à se demander, qu’est-ce que le sexe ? Pour certains, tout. Pour d’autres, rien. Et le juste milieu ? Il se fait tout petit, chacun essayant de partir à la recherche d’une sensation, d’une émotion qui caractériserait cet acte purement physique et pourtant étonnamment proche des émotions. Bien plus que ne l’est un serrement de mains, dans la rue, quand on retrouve quelqu’un que l’on n’a pas vu depuis longtemps. Bien plus que le simple fait de recouvrir une tranche de pain de confiture. Une affaire de culture ? Certainement, mais pas seulement. Le sexe, c’est avant tout un moyen de reproduction. Certains laissent ce pouvoir immense libre de toute entrave, mais dans une société où il n’est plus possible de faire totalement confiance, où les gens volètent de ci de là et dans laquelle une grande famille est un fardeau plus qu’un véritable bonheur, c’est une illusion profondément ancrée dans la bêtise humaine. D’autres le brident, tentent de dominer un pouvoir bien supérieur au leur. Faire plier les lois de la Nature ne réussit pas à l’Homme, cela a été maintes et maintes fois montré. Alors quoi, dans une culture qui sacralise un acte pourtant commun dans l’esprit de certaines autres, il est bien difficile de l’intégrer et de lui faire une place, entre les obligations et les limites imposées par le temps. Mais ce pouvoir premier n’est pas unique, et l’acte en lui-même peut se parer de milles déclinaisons, de complications ou de détournements qui prennent toujours plus d’importance que la tartine de pain et sa confiture.

Mon premier, c’est désir. Celui qui brûle, celui qui consume l’envie pour faire place à une impulsion violente, passionnelle et dévorante. Qui ne peut espérer être assouvie que par sa consécration. Du serrement de cœur au corps qui se manifeste bruyamment, à grands coups de regards langoureux et d’approches plu ou moins subtiles, le désir est imminent. Il prend à la gorge, vous empêche toute réflexion, vous soumet à lui. Résister parait alors bien futile, quand on prend conscience de la force que le désir dégage à lui seul. De quoi rendre fou si on tente le contre-courant, parce qu’aller dans le sens inverse des envies les plus inconscientes mais également les plus virulentes, c’est annihiler toute la logique de son être. S’y soumettre, ou le ravaler en vain et le voir s’exprimer dans toutes les manifestations moins évidentes de sa personne ... Mon deuxième, du plaisir. C’est évidement la principale raison qu’évoque la majorité des gens. Evidente, peut-être trop, c’est la réponse idéale à la définition du sexe, c’est le pourquoi tout le monde le fait, la valeur intrinsèque et inaltérable. Ceux qui ne rentrent malheureusement pas dans cette case inévitable le disent rarement, ceux qui ne comprennent pas pourquoi ce partage a tant de valeur. Pourtant, ça n’a pas tant d’incidence que cela, pourtant cela fait surtout plaisir à l’autre. Sensation d’être un peu à part, de ne pas être normale. Se questionner, se culpabiliser, savoir que quelque chose là-dedans ne fonctionne pas. Pour diverses raisons, on se fiche desquelles, ces pantins de chair ne vivent pas cet instant, n’en retirent rien si ce n’est un questionnement un peu flou. Cette déferlante de plaisir, ils ne la connaissent pas. Cette envie de toujours découvrir, d’aller plus loin, de voir partout ailleurs si c’est identique. Désirer, se fondre dans la jouissance du corps, être à l’écoute d’une enveloppe qui n’est pas en adéquation avec ses émotions, c’est l’inconnu. Se sentir à part, complètement rejeté de la plus simple et la plus évidente des choses, vu de l’extérieur. Ce qui unit les êtres, ce qui les rassemblent, ce qui les rend un, même pendant un court instant, même si ce n’est que pour un soir. Le plaisir, qui se fait surtout remarquer par son absence.

Mon troisième, c’est souffrir. C’est une technique impayable qui, même lorsque tout plaisir est absent, permet de briser, de déchirer un cœur, une âme. C’est la soumission, la fin de quelque chose. C’est le souvenir honteux d’un moment, d’un soir, qu’on regrettera toute sa vie. Cette ruelle qu'il ne fallait pas emprunter, cet homme qu’il ne valait mieux pas rencontrer. Pas de meilleur moyen, sans doute, de dominer quelqu’un en peu d’effort. Un peu de force, et il n’est même pas besoin de tortures ou de violence physique, piétiner un sacre habité par une image positive et plaisante suffit. La culpabilité, les remords, la souffrance s’invitent sans attendre et rongent, font partir cet esprit torturé en miettes, n’en laissant que de vagues bribes comme ultime réminiscence. Il suffirait de ne pas accorder à la chose l’importance qu’on lui porte, il suffirait de fermer les yeux et de ressentir cette soumission comme une simple claque. Rien de plus difficile, pourtant, que de modifier sa perception d’une chose, d’en rendre l’impact moindre et de rejeter toute retombée qui aurait une force inouïe. Et mon tout fait des souvenirs. Parce que le corps se souvient, parce que le cœur est meurtri bien plus qu’on ne le pense, parce que les images et les bruits reviennent sans cesse. Le choc sourd et régulier d’une canalisation qui fuit, déversant des larmes sur le sol, les faisant éclater en un infime bruissement que seul l’esprit totalement ouvert à son environnement pourra déceler. Le crissement des roues des voitures qui passent à l’extérieur, les paroles indistinctes de quelqu’un dans les étages. Mais aussi la couleur des rideaux qui encadrent les vitres sombres et mal nettoyées, la table si peu éloignée qui devait soutenir un gâteau d’anniversaire. Les bougies qui ne sont pas là, les rires d’amis qui ne sont jamais venus. Et surtout, ne pas écouter les mots de la seule chose importance de la pièce.

Ne pas déchiffrer les sons faits de mots, les phrases qui brisent, le ton victorieux et fier de sa proie, les murmures éhontés qui glissent jusqu’à une oreille sans parvenir au cerveau de celle qui prie pour que tout cela s’arrête. Puis finalement, l’indifférence. Revoir la scène encore et encore, la vivre souvent même. Ne rien faire pour la fuir, pour l’éviter. Se convaincre qu’on le mérite, justifier l’acte du traitre en reprenant ses propres mots, les intégrer et les faire siens, comme pour éviter de se disloquer dans l’espace et l’infini désespoir qui vous guette. Devenir distante, se barricader derrière un mur et laisser son corps faire semblant d’apprécier ce que son esprit refuse. Se détacher de tout, et voir la scène de l’extérieur, plaindre la victime sans avouer que l’on aurait envie de se secouer pour se réveiller. Ouvrir les yeux sur l’horreur est trop difficile, encore vaut-il mieux tout refuser en bloc et se perdre dans le même temps. Faire mine d’apprécier, se convaincre de jouer la simulation. Et pourtant il faut vivre, ou plutôt survivre. Être heureux, malheureux, mais vivre pour toujours là où les vieilles fleurs se fanent, là où les autres baissent les bras. Se raccrocher aux couleurs d’un futur qui peut se construire à deux, en pensant aux souffrances infinies qui naissent chaque jour, se dire qu’on n’est pas le plus malheureux. Quand dans la confiance tout s’effondre, il reste toujours la misère du monde, qui n’est rien devant un adieu. Et puis l’espoir, celui de l’union de deux êtres. La signification ultime, celle dont toute jeune fille rêve dans son adolescence. On peut la trouver d’emblée, la perdre immédiatement. N’en garder qu’un lointain souvenir ou la retrouver par la suite, quand on ne l’attend plus. La pressentir, y croire, la deviner sans vouloir la précipiter. En dessiner des contours incertains, se dire que peut-être, il y a quelque chose derrière tout cela. Que peut-être, la lumière au bout du tunnel n’est pas qu’une invention pour rassurer les plus démunis devant la défaite. L’espoir, celui d’Andrea. Que le désir peut amener le plaisir, sans passer par la case souffrance. Que la fatalité n’est pas destruction, mais au contraire renaissance.

C’est plus ou moins là-dedans que la jeune fille s’était enfermée quand Law lui demanda quelque chose qu’elle n’entendit même pas, trop occupée à se faire du souci pour essayer de devancer la déception ou au contraire la satisfaction que sa rencontre avec lui pouvait faire éclore. Elle n’émergea de ses considérations que lorsqu’il revint sur ses propres questions. Son contact, une envie ? Définitivement, oui. Sa main posée simplement là, contre la sienne, éveillait déjà ses sens. Un baiser, bien sûr. Plus, sans doute. Elle imaginait son corps se découvrir et se blottir contre le sien avec la plus grande réalité possible, fermant les yeux pour chercher en elle ce que cette image lui évoquait. Un sourire, quelques frissons le long du dos et également une vague de tendresse et d’assurance qui la traversait de part en part. Ce qui était bon pour elle ? Lui. Son assurance, sa simplicité, sa spontanéité. Mais aussi ses baisers, sa prévenance, ses délicates attentions dont elle ne revenait toujours pas. Son cœur, qu’elle sentit soudain battre contre elle alors qu’il l’attirait à lui. Son corps, qui se collait au sien tandis qu’elle acceptait avec plaisir ce rapprochement délicieux. De plus, Andrea peut encore lever son regard clair vers lui, puisqu’il protège son visage de l’eau gambergeant sur leurs peaux, ce qu’elle fait sans hésitation. Pour tenter de capturer, encore et encore, les courbes acérées qui font d’un simple corps un visage qu’elle n’est pas prête de vouloir oublier.

Pas un mot ne s’écoule, et seul le liquide brûlant le fait. Andy ne bouge pas d’un muscle, blottie qu’elle est dans un écrin irradiant la chaleur et la douceur. Elle a rarement été aussi bien, et se refuse à briser l’appréciation qu’elle a de cet instant en des paroles inutiles. Elle lui dirait plus tard, plus tard. Et ce fut une riche idée, puisque cela permit sans doute à l’esprit de Law de l’amener vers la suite des événements, alors que son visage échappe au regard d’Andrea, alors qu’il se perd seul dans un monde qu’elle ne peut plus atteindre. La jeune femme sent ses bras se resserrer instinctivement autour du corps qui la tient à l’écart de l’agressivité de l’eau qui tombe en cascade, dans un bruit qu’elle n’entend pas vraiment. Elle sait que tout d’un coup, le sol se fait instable, friable. Se rend compte que leurs pensées sont mises à nues avec autant d’efficacité que leurs corps le sont. Dans la moiteur de la pièce, un froid se crée. Pas forcément de ceux qui vous prennent au sang, étreignant un corps qui se tétanise. Plutôt celui qui s’insinue, se répand dans les veines et distille son mal, ouvrant tout obstacle devant lui et permettant aux mots de franchir tout seul le barrage de la pensée. Andy reçoit en silence la confession de Law, voudrait ajouter quelque chose mais se retient, préférant le laisser libre de développer ou non ce qui vient de lui passer par la tête.

Alors qu’il se détourne et arrête le flux incessant de la douche, Andrea laisse son regard errer dans la pièce, sans vouloir toujours revenir à lui pour l’inciter à continuer, sans l’oppresser. Un miroir qui ne reflète plus grand-chose à travers la buée qui le recouvre, pas de fenêtre. Une salle aux dimensions respectables sans être excessives, permettant cette sensation de confinement, de proximité qui y est donnée lorsque l’on s’y trouve à deux. La jeune femme s’éloigne du sol trempé et glissant pour atterrir directement dans le duveteux accueil qui l’attend, alors que Law l’emmitoufle comme une véritable princesse, s’occupant d’elle tel qu’un propriétaire d’une poupée fragile ou un amoureux prévenant pourrait le faire. Une fois Andy presque sèche, elle frictionne le tissu autour de ses membres pour terminer le travail tandis que son compagnon s’occupe de lui plus sommairement. Une fois débarrassée de toute humidité, elle conserve encore un peu la chaleur qui l’entoure et, devant l’expression de Law, ouvre les lèvres presque à regret de ne pouvoir le rassurer entièrement.

- Je ne vais pas te dire que tout se passera bien. Je ne vais pas te dire que je vais aimer ça, ni que je comblerai tes attentes. Parce que je ne peux rien te promettre, juste découvrir. Réapprendre.

Marquant un silence, la jeune femme hésite, cherche ses mots. Affichant une moue qui se mue en grimace quand elle prend conscience de la précipitation qui jaillit de sa bouche.

- Ce que je peux dire, c’est donc que j’ai envie. Parce que quand tu es là, contre moi, j’ai des papillons dans le ventre qui me poussent en avant. Les pensées qui partent dans tous les sens, mais qui finissent toujours par arriver vers toi. Je te veux, j’ai donc envie de toi ? Oui, alors, je crois bien que c’est ça.

Andy s’avance, lui caresse la joue avec une expression qu’elle veut rassurante. Remonte, effleure ses cheveux d’une main aimante, et se prend à utiliser des mots qu’elle n’aurait pu s’entendre dire dans aucun de ses rêves les plus fous. Ce genre de déclaration qu’on aurait pu lui dire si quelqu’un avait eu suffisamment d’intérêt pour elle à l’époque, mais qu’elle aurait reçue d’un vague sourire pas vraiment convaincu.

- Je suis morte de peur depuis que je t’ai rencontré. Parce que tu fais bouger certaines choses, parce que tu en éveille d’autres sans même t’en rendre compte. Tu arrives, comme ça, tu tires de sa prison une Andrea qui n’avait pas vu le jour depuis longtemps. Tu l’aveugles, tu la protèges, tu la secoues et tu la remplis d’émotions. Tu la rends faible, et à la fois tu la pares d’une force incroyable qu’elle ne connaissait pas. Laisse-moi faire pareil. Ayons peur ensemble, je m’en fiche que l’avancée se fasse à tâtons, je me fiche même de savoir si tu vas tout ressusciter sur ton passage.

A savoir qu’elle ne doutait pas qu’il puisse y arriver, non. Mais il fallait lui enlever ce poids des épaules, qu’il ne se sente pas trop investi de quelque chose d’aussi difficile. Elle refusait qu’il se complique la vie, qu’il hésite et se mette dans cet état en pensant à elle. Andrea voulait d’avantage voir un sourire que de la peine sur ses traits. Puis, sûre de ne pas briser d’espoir puisque, elle le sait, lui-même a cette envie retenue, elle reprend :

- Mais on a le temps, et je refuse d’alimenter immédiatement cette peur qu’on partage. Pas aujourd’hui, peut-être demain ou encore après ... Quand la retenue aura perdu devant le désir.

Et, pour éviter de demeurer comme cela devant lui et de donner trop de sérieux à une scène qu’elle ne veut pas oppressante ou anxiogène, Andrea se déplace de quelques pas, toujours enfouie sous un tissu blanc confortable, ramasse son pantalon et l’enfile sur ses jambes, quand bien même le tissu serait quelque peu mouillé, son ultime vêtement étant encore humide. Boutonnant agilement le jean, elle se baisse à nouveau et ramasse sa chemise. Puis, enlevant la serviette et la pliant avec application sur le lavabo, la jeune femme passe ses mains derrière son dos et détache prudemment sou soutien-gorge, le laisse glisser le long de ses bras puis de ses poignets avant d’enfiler prestement son vêtement. Comme ça, elle n’aurait pas la désagréable sensation du tissu mouillé contre son corps propre. Certes, elle vient de s’exposer furtivement. Mais pas dans une volonté d’aller plus loin. Juste pour lui montrer que la confiance et l’assurance arrivent, qu’elle est prête à avancer tranquillement jusqu’à lui. Finissant de fermer son maigre habit, Andy relève le visage et fixe Law, les joues rougies par la chaleur qui règne encore dans la pièce. S’il veut, il y trouvera une porte de sortie pour éviter une discussion qui pourrait, à terme, le lasser. Et cette prévenance attentive surprend Andrea, peu habituée à autant d’égards pour une seule personne, dans un registre qu’elle ne connait absolument pas. C’est fou comment, en quelques heures, cet homme a pris de l’importance dans sa vie. Comment il résume la vie qu’elle a décidé d’emprunter à présent. C’est devenu son point d’ancrage, sa référence, son protecteur et son guide. Beaucoup trop. Pas assez.

C’est ça, l’amour ?

Andrea frissonne. Le mot à ne pas penser, à ne pas prononcer. Il a bien trop d’impact, il empêche tout retour en arrière, il peut faire trop mal. Non, ce n’est pas ça. N’est-ce pas ?
Tomorrow comes to take me away
[Eagle Eye Cherry]

>  On ne devrait pas vivre que pour le plaisir. Rien ne vieillit comme le bonheur.
>  L'émotion nous égare : c'est son principal mérite.
[Oscar Wilde]


Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 51 mardi 28 décembre 2010, 22:00:27

La retenue.. Que savait-il de la retenue ?
Cela faisait bien longtemps que Law - Tyler - avait abandonné cette notion. Tyler, c'est le patron exhubérant, exagérément gai, atroçement dépravé. Tyler, c'est ce type qui entre dans une taverne, une maison de jeu, ou tout autre endroit où les gens viennent se fourvoyer, juste dans l'optique de défier le propriétaire des murs. Tyler, c'est ce fou, ce dégénéré mental qui ajuste le col de son ample manteau de cuir avant de distribuer des pains au tout-venant, alignant un à un les molosses et les brutes, armées ou non, avec une rigueur qui fait pâlir les jeunes filles, et leur fait manifester quelque sentiment d'admiration. Tyler, c'est ce pervers, l'homme qui emmène une femme sur un toît pour dominer Nexus, et lui montrer que taire ses hurlements, c'est mal. Il fait tout pour qu'elle crie son plaisir, que toute la Ville-État l'entende, à tel point que la maréchaussée doit s'en venir pour les déloger. Mais Law n'arrête qu'une fois qu'il estime la demoiselle rassasiée, quitte à fuir pour reprendre ailleurs. Le risque, s'afficher, tout ça, il adorait. Mais Tyler, c'est aussi ce monstre de travail qui veut pouvoir, à tout moment, contrôler son Empire. Les nouvelles vont de plus en plus vite grâce au réseau qu'il s'applique à déployer, toujours plus grand, toujours plus tentaculaires, s'insinuant dans toutes les couches de la population, au point que chaque quartier, chaque rue, chaque maison est parasitée par son emprise diabolique. Il sait souvent, il voit parfois, mais tout le temps, il agit. Mais le monde n'attend pas ! Le temps ne prend de pause pour personne, même le surhumain Law. Alors, quand quelque chose doit être réglé en urgence, il doit pouvoir donner des ordres. Même si il faut le réveiller en pleine nuit pour cela. Même si il torture un soldat tombé entre ses mains lors d'un assaut en terre ennemie. Même si il est en train de sauter, avec tout le manque de dignité et d'honneur, l'une de ses prostituées allongées sur son bureau, qui n'hésite pas à déchaîner son plaisir sans vergogne.

Tyler, c'est cet homme, et rien de plus, qui se rend compte qu'il est nu devant une jeune femme qu'il désire, et dont il ne souhaite que le bonheur. C'est ce fort devant tout le monde, mais ce faible devant elle, qui sait lui faire remettre en question ses acquis qu'il eut pu affirmer être millénaires. Si elle ordonnait, il saurait renoncer à tout. Mais ce n'est pas ce qu'elle veut, bien au contraire. Elle veut devenir un peu Law, pour qu'ils règnent à deux. Non, je ne regrette rien. Et jamais je ne regretterais quoique ce soit. Le regret, c'est pour les faibles. Il faut savoir se départir des erreurs du passé et ne pas avoir à s'en excuser, juste les réparer et ne jamais plus les commettre.

Qu'elle était belle. Encore plus le buste nu. Quelle vision de paradis s'offre-t-il là.. Brusquement rompue par son habillage prompt. Alors de nouveau, il atterrit, et toutes les paroles qu'elle a prononcées auparavant s'assimilent lentement. Oui, il est rassuré. Non, mieux : Elle vient de le rassurer. La version est plus juste. Plus valorisatrice. Elle est un doux fléau, une délicate souffrance, et s'efforce aussitôt, sans se rendre compte de quoi que ce soit, de changer cet état de fait. Alors oui il avait peur, mais les paroles qu'elle lui avait assénées changeaient tout. La peur, Law dira aussi que c'est pour les faibles. Mais n'est-il pas infiniment faible devant elle ? Devant cette.. magnifique.. resplendissante.. bouleversante...

Andrea..

Law vient sans doute de rencontrer Dieu une nouvelle fois. C'est contre sa volonté, encore. Mais ça ne lui déplaît pas. S'approchant, il lui prend un baiser, un peu court comme à son habitude, mais désormais, elle verra que la vie est plus longue, plus profitable, elle pourra comprendre que l'instant qui passe n'est qu'un instant parmi des millions d'autres. C'est l'avenir qui vient, et le bout du tunnel est loin. L'embrassade furtive, c'est la promesse de plus, un peu plus tard. Oui, il accepte d'attendre. Il accepte tout ce qu'elle veut. Le sexe veut dire trop de choses avec elle, qu'il n'a pas envie d'en savoir le quart de la moitié du commencement d'une tout de suite. Tout viendra, le submergera, quitte à s'en étouffer, à mourir de trop d'Elle.

Viens. On sort.

En guise d'acceptation, de tout ce qu'elle a dit, et même de ce qu'elle n'a pas dit. Il a toujours sur le coeur, comme un poids, la dette qu'elle doit à quelqu'un. Et même ici à Nexus, il sait qu'elle n'est pas réglée pour autant. Il lui en parlera, mais plus tard. Il veut savoir ce qu'est ce mal, pour l'éradiquer.


Remontant le couloir, l'homme file jusque son bureau et sa chambre. Là, il laisse tomber sa serviette et se mettra en quête d'habits convenables. C'est cul nu, donc, qu'il choisir un vêtement singulier : De l'extérieur, on dirait une jupe longue qui descend jusqu'aux pieds. Mais à l'intérieur, il y a deux jambes, comme dans un pantalon. Après un simple caleçon noir - pas très local visiblement -, il enfile ce qui lui couvre entièrement les jambes. Et, surprenant, ça lui donne la grande classe. Surtout torse nu, d'ailleurs. Il s'en rend compte, et se retourne un instant vers Andrea, s'admirant un peu. C'est d'ici, ça ? Peut-être n'apprécie-t-elle pas. En tout cas, lui adore. Peu de liberté de mouvement en apparence, mais si il veut, par un système de liens, il peut fendre complètement de la partie considérée habituellement comme "féminine" pour se retrouver avec tout ce qu'il y a de plus masculin, un futal noir qui pourra lui permettre de courir et se battre à l'aise, sans la moindre gêne. Par-dessus cela, un haut près du corps, qu'il surmonte d'une veste plus ample, fermée par trois sangles. Il se saisit aussi de deux plaques de métal courbée, chacune s'emboîtant comme un puzzle, nul doute qu'auparavant ces deux parties ne formaient qu'un seul et même objet. Et le manteau, trônant au porte-manteau de sa chambre. Le voilà fin prêt. Température baissée, pour pas qu'il ne fasse trop chaud le soir à venir, et il ferme la porte, s'engageant de nouveau dans le couloir.


Je vais m'en acheter un nouveau et tu en profiteras pour te prendre quelque chose. Ensuite on filera à un tailleur que j'apprécie. Et puis on marchera un peu, juste histoire de se balader. Si il n'y a pas trop de monde, je passerais à un temple. Mais je ne veux pas t'imposer cela. Enfin, nous verrons sur le moment.

Saluant ses quelques employés en cette matinée qui s'annonçait merveilleuse, il traversait bien vite le casino très vide, où l'on trouvait tout de même quelques joueurs courageux toujours pas couchés, pour finalement se retrouver dehors. Le froid n'était pas mordant en ce jour : Doux, il avait laissé l'agressivité de côté.

Tu ne demandes plus. Tu exiges. Pas besoin de jouer la grosse bourge un peu radasse, reste simple. Mais ici, le client est vraiment roi. Surtout vu ta position nouvelle. Si l'un d'eux t'es désagréable, tu lui colles une mandale. Mais en général, ils sont assez serviables. Et ceux chez qui je t'emmène sont habitués à moi, alors tu n'auras vraiment aucun problème. Pour tes vêtements, dépense sans compter. Je ne veux pas que tu aies l'impression de te faire entretenir.. Il est normal que je t'aide à accéder aux choses essentielles. T'habiller, te nourrir. Oh, et tu voudrais un esclave ? Je sais que chez toi c'est très mal vu.. Mais dis-toi qu'un esclave sera toujours mieux chez moi qu'ailleurs. Je leur rend service, en quelques sortes ! Et puis, après, retour au travail. Et là tu auras de quoi apprendre. Tiens, c'est là.


Débouchant sur une grande place carrée remplie d'étals divers, Andrea aurait pu se croire revenue des centaines d'années en arrière. Nexus l'agonisante d'hier soir était aujourd'hui des plus vivantes. Les gens se bousculaient dans les allées, les marchands hurlaient. Des parfums inconnus montaient aux narines. Un gamin jouait avec son petit animal de compagnie, un petit chien tout bleu avec des attributs très reptiliens : Queue, yeux, oreilles. Law l'esquive, tenant désormais son Andrea par l'épaule. Il fallait qu'elle suive la cadence, qu'elle ne se perde pas. Et un accident était si vite arrivé. Esquivant les badauds, Law prenait le chemin de l'une des maisons-boutiques qui formaient le contour de la place. La vitrine était large, en plein air, et respirait le fer forgé. Un armurier, donc. L'un des vendeurs, derrière ses étalages d'armes et d'armure, apercevant Law qui s'était arrêté devant un large panel de casques, s'avançait vers lui.

-"Sire Raine ! Quelque chose vous serait agréable aujourd'hui ?"
-C'est cassé, dit-il en sortant les deux morceaux d'armure d'une large poche.
-"Oh.. J'espère que vous ne vous êtes pas blessés pour autant !"
-Non, juste le choc.
-"Le Maître est désolé de ça.. Le prix du neuf sera un peu baissé pour le désagrément. La demoiselle veut quelque chose ?"
-Oui. Une arme.
-"Une belle dague du Maître ?"
-Oui. Enfin, pas forcément belle. Solide, légère. C'est juste "au cas où". Elle n'a jamais touché d'arme de ce genre alors, aidez-là à s'aiguiller.
-"Mais parfaitement. Suivez-moi."


Et le sympathique quarantenaire leur demande de faire le tour des étalages, pour pouvoir entrer dans la boutique. Il n'y avait personne ici, rien qu'eux. C'était un véritable foutoir : Dans un espace assez réduit, des centaines d'armes étaient plus ou moins rangées par catégories, beaucoup d'armures qu'on devinaient solides. Le commerçant emmène Andrea visiter le rayon des lames courtes, voire très courtes pour certaines.

-"Tenez, n'hésitez pas, essayez. Prenez-en une fine.. Celle-ci par exemple, ou celle-ci si vous préfèrez. Elle n'a pas de garde, elle est plus pratique, mais attention à ne pas faire glisser sa main. Sinon, celle-ci est un modèle assez classique. Ce sont des armes de premiers choix, vous ne trouverez que de la qualité ici. Prenez celle-là, pesez-la. Dites-moi si elle est trop lourde.

Pendant ce temps-là, un peu plus loin, Law s'appuie sur une hallebarde, contemplant l'employé faire son travail consciencieux de vente appuyée. Il espère qu'elle ne se sent pas trop opressée.

-Choisis bien, tu devras la garder sur toi en cas de nécessité. Tu ne t'en serviras peut-être jamais, mais je préfère te savoir avec ça à portée de main.

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



Je suis pour la réhabilitation des Userbars.
Les userbars sont VOS amies. Elles sont gentilles.
Utilisez des userbars. <3

Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 52 mercredi 29 décembre 2010, 13:26:48

Mentir, c’est avoir l’intention de tromper. Que ce soit pour le bien de l’autre, pour sa propre satisfaction, pour faire de la peine ou pour éviter d’en faire. On peut être habité des meilleures intentions lorsque les mots surgissent, faux, déformant une vérité qui est pourtant toujours bonne à dire. Toujours ? L’humanité a besoin de vérité, mais elle a plus grand besoin encore du mensonge qui la flatte, la console, lui donne des espérances infinies. Sans le mensonge, elle périrait de désespoir et d’ennui. L’être humain est-il sensiblement pareil à la société qui le porte ? L’omission ou la claire intention de tromper sont-elles des choses aussi primaires et importantes qu’on peut le croire ? Chacun vit baigné de mensonges, tout le monde y puise une source de réconfort, de plaisir, une certaine forme de jouissance, même. Car la flatterie et le ton mielleux qui vous couvre des meilleurs compliments vont toujours de pairs, et s’installent avec une facilité déconcertante dans les habitudes d’un homme. Pour la cible comme pour l’instigateur, cela devient un prérequis à toute relation, à tout contact. On ne peut plus imaginer la rencontre sans enjoliver un peu son image, sans en rajouter sur ses qualités tout en évitant de parler de ce qui pourrait décevoir l’autre. La socialisation n’est qu’un grand échiquier géant où chaque pièce doit se déplacer dans la direction qui l’arrange le plus, sans que ses adversaires en soient conscients. Avoir un coup d’avance, devancer les réactions de l’autre, contrer ses projets, deviner le bluff. La vie, c’est comme un grand jeu de stratégie. A qui mentir, quoi dire, comment bien se faire voir, tenter de percer la carapace de l’autre et apercevoir les faiblesses qu’il cache par trop de fioritures. Mentir, oui. Mais sans trop en faire.

La seule règle du mensonge est de le tenir jusqu’au bout, de ne jamais céder sous la pitié ou les remords, ne jamais regarder en arrière et y préférer une vérité qui fera d’autant plus mal qu’elle a été cachée. Souvent, c’est une couverture. Pour soi ou pour l’autre, peu importe tant que cela protège, enrobe, soulage. Le mensonge est une arme délicate qu’il faut apprendre à manier avec subtilité. A tout moment, elle peut être réduite en poussière par un seul mot de l’adversaire alors que le reste du temps, elle est inaltérable par l’habileté du bretteur. Se révéler trop, ne pas en dire assez. Les deux extrêmes conduisent au même cuisant échec, qui vous met hors-jeu et vous retire votre droit de participer. Identifié, les autres savent. Ils savent ce que vous vouliez cacher, et que vous avez tenté de le faire. Se remettre dans la course ne sert plus à rien, une fois éventée, la stratégie ne peut se redresser et laisse pantois et démuni un général abandonné de ses troupes. Mais l’illusion peut tenir. Elle peut avoir été élaborée avec tant de soin que rien ne peut la fendiller, ni même l’approcher. C’est le cas de ces mensonges que, finalement, personne ne veut élucider. Ceux qui arrangent tout le monde, qui permettent de ne pas réfléchir, de ne pas se poser de question. Qu’il soit de grande ampleur ou concernant une unique personne, ce type de mensonge facilite la vie des gens qui l’entourent, arrange le cadre dans lequel ils vivent. Comme par exemple le mensonge d’Andrea Leevi. Le plus énorme qu’elle ait jamais eu à faire, le seul qui soit facilement identifiable, mais également l’unique qui ne le fut jamais vraiment. Parce qu’il arrangeait, parce qu’il plaisait. La voir se mentir à elle-même avait tant d’efficacité que cela pouvait convaincre tout le monde. Surtout que personne ne s’intéressait de savoir si son attitude était réelle, tant qu’elle le paraissait avec une superbe ressemblance.

Mais Andrea avait décidé de ne plus mentir. Parce qu’au fond, si cela faisait plaisir à plus d’un, elle était la seule à ne rien en retirer. La jeune femme, à force d’avoir eu à ses côtés pendant quelques heures déjà quelqu’un qui pensait à elle, en venait enfin à se questionner sur ses intérêts, au lieu de toujours voir ceux des autres. C’est comme cela qu’elle était parvenue à expliquer à Law ce qu’elle lui avait confié. C’est comme cela qu’elle réussirait sans doute à lui dire bien d’autres choses. Jouer un rôle sur un plateau géant n’était plus dans ses cordes, et maintenant qu’elle avait trempé ses lèvres dans la délicieuse réalité des sentiments véritables, Andy ne pouvait s’en passer et refuser la coupe qu’on lui proposait. Dorénavant, c’est du bord du jeu qu’elle contemplerait les autres se rouler dans leurs mensonges et dans leur bien être factice. C’est comme si la jeune femme avait épuisé ses réserves et qu’elle ne pouvait plus manipuler des sentiments qu’elle n’avait pas. Maintenant qu’elle les avait retrouvés, il lui devenait impossible de les tordre à sa guise. Bien sûr, elle pourrait se résoudre à plonger ses mains dans les mensonges essentiels, ceux de tous les jours, ceux que toute personne haut placée doit savoir faire. Mais rien de plus. A Law, c’était hors de question. Rien que l’idée la répugnait, tant elle ne pouvait que confier la vérité aux deux yeux sincères et admirateurs qui se posaient toujours sur elle. Imaginer reprendre son rôle si profondément ancré en elle dans ses bras était chose difficile à accepter, et Andy se promit de tout faire pour ne jamais lui mentir par commodité ou gentillesse. Ce qu’elle aimerait, elle le lui dirait. Le reste aussi, et tant pis si cela devait le blesser ou non. L’homme a besoin du mensonge pour se survivre, pour être flatté et soutenu. Mais Law n’avait pas besoin de cela, et Andrea était certaine que ne pas lui dire quelque chose serait bien plus douloureux, pour eux deux, que la simple réalité des faits.

Lorsqu’il prononça son prénom, la jeune femme s’attendait un peu à ce qui allait suivre. Il n’y avait nul besoin d’en rajouter sur ce qu’elle avait dit, nulle nécessité de revenir sur quelque chose qu’apparemment ils partageaient. En tout cas, son intervention avait sans doute été nécessaire, puisqu’à présent Andrea sentait son compagnon légèrement, imperceptiblement plus détendu. Certes, elle n’avait pas fait face à la gelée de ses pupilles lorsqu’il avait annoncé la couleur du sentiment qui l’étreignait. Mais il n’y a pas que le regard qui soit le miroir de l’âme, comme on dit. Andy était habituée à ne rien partager avec son corps, mais les comportements des autres l’avaient toujours fascinée. La tension dans les épaules, les muscles qui se crispent, la mâchoire qui se serre ou la peau du visage qui se tend, autant de signes devenus évident pour la jeune femme, qui les avait auparavant classés dans des cases très fermées de son esprit, afin de ranger tout aussi facilement les individus qu’elle rencontrait. A présent, il était évident que tout devenait plus flou, moins carré et facile à identifier. Les séparations se muaient en de larges portes, mélangeant les certitudes et les très académiques conclusions de la jeune femme. Pas besoin de tout cela, néanmoins, pour deviner ce qu’allait faire Law quand il se rapprocha d’elle, venant cueillir de ses lèvres un très rapide contact, qui ne s’attarda pas mais qui permit de clôturer une discussion, dont l’épilogue était d’un commun accord partagé.

Quand il s’éloigna, elle le suivit et s’attarda quelque peu sur les murs nus des pièces communicantes qu’ils avaient quittés auparavant. Restée dans le bureau, elle progressait plus lentement que lui, qui s’affairait. Après tout, elle était prête. Et si son regard erra vers sa silhouette rassurante et imposante, ce ne fut que pour apprécier la vision qu’il lui offrait. Sous la douche, elle n’y avait pas fait attention alors que c’était sans nul doute l’endroit le plus approprié pour cela, trop concentrée qu’elle était sur ce qu’elle sentait poindre dans son ventre, irradiant dans tout son corps comme une décharge sourde et lente qui se propage, accompagnée d’un délicieux sentiment d’abandon. C’est seulement maintenant qu’elle se rendait compte de la puissance des muscles qui courraient sous sa peau parsemée de cicatrices plus ou moins récentes. L’épiderme roulait, contenant des heures et des heures de travail assidu, renfermant la force et l’agilité qui le caractérisait. Andrea jaugeait avec un air appréciateur le spectacle de cet homme destiné à l’affrontement et au perfectionnement. Un corps formé pour un poste, pour un homme entièrement dédié à sa vie et son quotidien mouvementé. Une musculature adaptée qui n’avait rien de la brute épaisse, une ligne formidablement tenue, et les témoignages du déroulement journalier de ses nuits ne faisaient que perfectionner une image à la fois dangereuse et tendre. Andrea ne pouvait s’empêcher de le voir de ces deux points de vue totalement paradoxaux, admirative qu’elle était de se retrouver face à lui, aussi assuré et offert mais également certaine de ne jamais rien avoir à craindre de ce même corps, qui semblait hurler la protection que Law lui promettait de diverses manières depuis la veille au soir.

Elle se sentait bien misérable dans ses habits de terrienne, et se trouvait étrangement impatiente de mettre un pied dehors dans cette ville inconnue, qu’elle n’hésitait pas à imaginer périlleuse et redoutable, pour se trouver des vêtements plus convenables. Histoire d’honorer la silhouette débordante de charisme qui se trouvait à présent devant elle, lui lançant un coup d’œil auquel elle dut se résigner à répondre d’un sourire. Ce n’était sans doute pas le moment de lui expliquer à quel point elle le trouvait digne d’une admiration non retenue. Et pourtant, il y avait de quoi, surtout dans le superbe juste milieu entre la simplicité du nu et la bien regrettable obligation d’être un minimum habillé pour s’en aller promener. Andy aurait bien profité un peu plus longtemps de ce qui lui était offert, mais elle dut se résoudre à oublier l’image d’un Law à demi-nu l’observant avec attention. Parce qu’ils avaient, sinon mieux, autre chose à faire. Alors qu’il finissait de s’habiller, Andrea le précéda dans le couloir et l’attendit quelques instants, puis ils se mirent en route d’une même impulsion tandis que Law lui exposait le déroulement de leur journée. Emplettes, puis découverte de la ville, cela lui convenait très bien. Se contentant de hocher la tête, n’étant pas quelqu’un qui parlait beaucoup pour ne rien dire ou simplement acquiescer, Andy n’avait pas d’autres envies, aussi se contenta-t-elle d’accepter sans rechigner ce programme. Lorsqu’ils croisèrent des gens, employés comme clients, le premier réflexe de la jeune femme fut de baisser la tête et de ne pas fixer son regard sur eux. Mais elle se reprit dans l’instant, fière d’être là bien qu’elle n’eut sans doute aucun réel mérite à l’être. Andrea devait à présent oublier son humilité et la timidité première, qui la poussaient à s’effacer dans un endroit inconnu. Nexus ne lui était pas encore familier mais ce n’était pas en courbant l’échine que cela allait changer. Hors de question de se cacher, de se plier au regard des autres. L’inverse lui semblait plus prometteur.

D’ailleurs, les paroles de Law lorsqu’ils pointèrent le nez dehors renforcèrent seulement les pensées qu’elle s’appliquait à intégrer depuis que la jeune femme réalisait que sa nouvelle vie était ici. Exiger, punir s’il y avait lieu. Se considérer à présent sortie de la fange des misérables détritus rampants et s’extraire de cette vision réduite et réductrice du monde. S’improviser forte, juste mais dure et exigeante. Et, bien qu’elle conserve tout de même la vague impression de se faire entretenir, telle une princesse dans sa tour, Andrea ne dit rien. Pour l’instant, elle était là, pataude dans un monde inconnu, mais le temps viendrait où Nexus ne serait plus ni une énigme ni une épreuve, où cet espace serait également le sien et où l’impression d’être simplement là disparaitrait. Elle serait plus que bêtement présente, et cet univers deviendrait familier. Elle allait tout faire en ce sens, et l’apparente frêle et fragile Andrea ne manquait pas de détermination. D’autant plus que l’adrénaline et le goût de la nouveauté pouvaient lui faire faire bien des choses insoupçonnées pour ce corps tout en longueur que n’importe qui aurait cru pouvoir briser d’une simple torsion. L’image du coup de pied fracassant une tempe lui revint en mémoire, arrachant un sourire lointain à Andy. Oui, c’était quelque chose qui pourrait lui plaire, certainement. Avant qu’ils n’arrivent, cependant, elle eut juste le temps de rebondir brièvement sur cette histoire d’esclave.

- Pas d’esclave pour l’instant. Il va me falloir un peu plus de temps pour m’habituer à ça qu’au reste, question de culture.

Bercée par la température agréable de cette matinée, Andrea ne put, une fois sûre de ne pas se perdre puisque guidée par l’épaule de Law contre la sienne, son bras enserrant son omoplate, s’empêcher d’admirer la ville. Si les beautés de sa planète n’avaient jamais paru aux yeux d’Andy comme de réelles petites merveilles, il lui suffisait d’être dans un endroit inconnu pour en retrouver le goût. Kyoto n’avait jamais été à son goût, trop de monde, trop de tout. Les rues lui semblaient transparentes depuis le temps, et plus aucun détail n’attirait son attention dans les chemins redondants empruntés chaque jour. Rien ne meublait son quotidien, et que ce soit sous la pluie, le soleil ou la neige, sa petite ville était semblable, toujours, à ce qu’elle en connaissait. Tel un fantôme dans sa cité, Andrea n’avait jamais pu saisir la beauté de son Japon adoptif,  préférant les longues étendues désertes de sa lointaine Finlande, non loin du lac Inari. Et en fait ... Elle ne s’attendait à vrai dire pas à cela. Nexus lui avait laissé le souvenir d’une ville un peu à l’image du Law qu’elle y avait rencontré. Une beauté cruelle, impitoyable, dangereuse. Mais à la lumière du soleil, c’était la couleur qui primait, et le bruit des rires échangés. Un marché géant couvrait les dalles des rues finalement plus grandes que dans ses souvenirs. Plus rien n’avait l’air inquiétant, et il régnait une atmosphère à la fois paisible et d’un dynamisme électrique.

Tout se précipitait pour arriver jusqu’aux yeux, oreilles, narines et autres sens d’Andrea. Elle n’avait jamais vu une activité aussi intense dans un si faible espace, bien que la place sur laquelle ils avaient échoués soit grande. Law ne lui laissa pas le loisir de s’arrêter pour admirer tel ou tel détail, mais Andy s’abreuvait de tout ce qu’elle pouvait voir, que ce soit des objets ou des aliments en vente qu’elle ne connaissait pas forcément, ou des vendeurs et commerçants aux sourires joviaux et à la voix qui portait exceptionnellement loin. Ouvrant grand les paupières pour tenter de ne rien perdre de ce spectacle inhabituel, Andrea tendit un bras et effleura, du bout des doigts seulement, le bois des bien maigres étalages supportant difficilement les produits proposés. Jetant un coup d’œil à gauche, elle apercevait une mère de famille négocier un prix de groupe pour ce qui semblait être une importante quantité de viande. A droite, un homme d’un certain âge jetait un œil appréciateur et envieux sur quelques bijoux, sans aucun doute pour une femme qu’il eut aimé conquérir. Au milieu de tout ce remue-ménage, Andrea ne put s’empêcher de glisser une main dans celle de Law, furtivement. Juste un instant, pour lui communiquer son plaisir à être là, maintenant. Elle le laissa cependant alors qu’ils arrivaient apparemment à destination, ne voulant pas l’incommoder par une attitude dont il ne voudrait pas. Examinant la devanture du magasin devant lequel ils s’arrêtèrent, Andrea nota toutes les sortes d’objets pointus, tranchants, perçants et autres actions pas des plus agréables pour celui qui serait visé.

Un armurier, donc. Andy, légèrement moins dans son monde que dans un magasin de vêtements, se tint un peu en retrait, pourtant c’est bien rapidement qu’on la mit à contribution. Le vendeur se pliait avec élégance aux demandes de Law, aussi se fit-il un plaisir de les accompagner dans un intérieur vide de tout badaud, avant de lui proposer obligeamment de le suivre. Ce qu’elle fit, lançant un regard mi-amusé mi-angoissé à Law, n’étant pas bien sûre que la laisser choisir, même avec l’aide du vendeur, soit une excellente idée. Pourtant, tout commençait bien par quelque chose et son incursion dans Nexus avait pour passage obligé sa mise en garde et son acquisition immédiate d’un moyen de défense. La jeune femme ne prêta pas attention à tout ce qui courait sur les murs, préférant éviter d’imaginer de si grandes armes dans les mains du premier venu dans cette ville légèrement plus dangereuse que la sienne. Se dirigeant directement vers l’endroit indiqué par le vendeur, Andy se concentra sur les lames de toutes les tailles, aux manches plus ou moins colorés et ornés. Il lui en fallait donc une ... Soit. Elles défilèrent dans ses mains, et la jeune femme tentait de sentir laquelle serait la plus appropriée. Elle en mit certaines de côté, instinctivement. Trop lourde pour elle, puis trop longue. Absorbée par son choix, elle ne remarqua pas que Law les observait, pas plus qu’elle ne répondit immédiatement à celui qui la guidait dans son choix.

Finalement, après quelques mouvements de tête négatifs, Andrea s’arrêta sur une lame assez courte, facile à ranger et d’une légèreté toute particulière. Son manche était d’une simplicité évidente, uniquement bardé de stries qui maintenaient sa main en place. La préhension était bonne, le mouvement se faisait ample alors qu’elle fit danser l’arme un instant au bout de son poignet. Oui, celle-ci paraissait bien. Adéquate. Le vendeur lui glissa que le choix était pertinent pour une jeune femme, et qu’elle ne serait pas déçue. Lui lançant un sourire, Andy confirma son choix.

- Elle semble parfaite. Je la prends.

A vrai dire, elle l’aimait déjà. Rapide, discrète, la lame semblait suffisamment tranchante et longue pour atteindre sans trop de problème un organe vital rapidement. Enfin, il lui faudrait encore apprendre à s’en servir. A partir du moment où elle indiqua son choix, le vendeur revint vers Law, sans doute pour régler les détails de sa commande à lui. Et puis, il n’était pas bête, il avait bien compris qui payait. La jeune femme ne prêta pas plus d’attention que cela à ce qu’il se passa à côté d’elle, trop occupée à faire jouer la dague dans ses mains, à en observer la taille et la simplicité de décoration. Efficace. Cela lui convenait très bien, comme adjectif, et espérait un jour pouvoir s’accoler le même. Il ne restait plus qu’à régler les derniers détails, qu’Andrea ne suivit que d’une oreille distraite. Ce ne fut que lorsque Law vint la tirer de son observation qu’elle remit un pied dans le monde réel. Se saisissant du fourreau sanglé que lui tendait le vendeur, Andrea remarqua qu’il était réglable. Pour la cheville ou pour l’avant-bras, donc. Sans doute. Elle décida dans un premier temps de choisir la première solution, et enserra la lame qu’elle n’avait pas lâchée dans son écrin de cuir pour se baisser et le nouer sur sa jambe. Pour l’instant, ça irait très bien.

Law devait déjà avoir réglé l’armurier, puisqu’ils partirent tout de suite après, pour se rendre quelques rues plus loin. Andy restait concentrée sur l’effet que faisait le petit fourreau sur sa cheville. Pas de gêne à la marche, pas de frottement désagréable et une tenue parfaite, pas de doute c’était du bon matériel. Elle n’eut pas le temps de remercier Law, ce qu’elle ferait de toute façon plus tard, qu’ils arrivaient d’ores et déjà en vue de la suite de leurs courses. Le fameux tailleur. Et sa vitrine remplie de vêtements apparemment classiques ici mais qui donneraient un style assez particulier sur Terre. Là encore, ils furent accueillis par le vendeur, qui portait sur son bras un bracelet surmonté d’une boule rigide rouge dans lesquelles des aiguilles et autres moyens de retouches étaient plantées. Apparemment, cet homme était également le tailleur de la boutique. Enfin, homme. Si Andrea n’avait pas vu l’étrange être gardant les appartements de Law, sans doute eut-elle un mouvement de recul inconscient. Elle parvint toutefois à demeurer stoïque et immobile devant l’homme-tigre qui les recevait avec un grand sourire sympathique, qui contrastait assez fortement avec les mouvements de ses mains, qui lui donnaient l’air embarrassé ou tout simplement réservé. Il les invita à entrer, les laissant précéder le mouvement, avant de prendre leur suite ... et de trébucher sur la petite marche à l’entrée du magasin, se rattrapant tant bien que mal à un mannequin en cours de construction qui eut la bonne idée de se trouver à cet endroit.

Là, Andrea ne se priva pas pour admirer les différents modèles exposés, du plus simple au plus complexe, du plus sobre au plus bariolé. Une avalanche de couleurs, de contrastes parfois inattendus se présentaient à elle sans la moindre logique, se déversaient avec force. Il y régnait une atmosphère calme, feutrée qu’Andy aima immédiatement. Elle allait pouvoir obtenir une de ces créations, des vêtements qu’elle n’avait jamais portés. Déjà, elle pensait à un long pantalon large ou à un short plus court, collant à ses longues jambes pour lui permettre de bouger plus facilement. De la couleur, ou du sombre. Tout dépendait surtout de l’usage qu’elle allait en faire. Des étoiles plein les yeux, Andy ne savait même pas par quoi commencer et se contenta d’un sourire prometteur qu’elle afficha avec plaisir sur son visage. Se retournant vers Law, elle ne put réprimer une réaction certes un peu naïve mais témoin de son émerveillement et de sa satisfaction à être ici. Avec lui.

- C’est splendide. Je n’arriverai jamais à choisir.

Elle ne se rendit même pas compte que le compliment, lancé très spontanément, fit rougir les joues de l’homme tigre qui les observait jusque-là en silence. Ce n’était que pure vérité, de toute manière. Adieu, mensonge.
« Modifié: mercredi 29 décembre 2010, 14:23:28 par Andrea Leevi »
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Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 53 mercredi 29 décembre 2010, 19:40:19

Il ne saura dire si le choix d'Andrea était judicieux. Et d'ailleurs, il était mal placé pour juger. Chaque arme est unique, et il y a forcément une lame adaptée pour un bras. Quelque soit le propriétaire du membre, son sexe, son origine, sa corpulence, comme dirait un commun slogan de pub, "il y a forcément un matériel de mort qui vous correspond". En l'occurence, la jeune femme venait de trouver le sien, qu'elle semblait jauger avec amusement, avant de finalement porter son choix entièrement dessus. Ce n'est peut-être pas le genre de Law, mais tant qu'il lui va à elle, alors c'est parfait. D'ailleurs, il vient seulement de remarquer le style de la hallebarde qui contrebalance son poids, soutient ses appuis. Il se redresse, la détaillant. De bonne facture. Le manche n'est pas à sa convenance malgré tout. Trop long, trop droit. Par contre, le bouquet de métal en son sommet, divers tranchants formant successivement hache, pointe large et pointe fine, ouvragées, gravées d'élégants motifs et harmonieusement percées d'ouverture en leur intérieur, il la trouve d'une beauté rare. De quoi faire pâlir tout bretteur un peu friand des armes d'hast, tel que lui, même s'il préfère en général les lames de taille ou d'estoc. Un point de divergence s'ouvre alors en sa conscience : La prendre, ne pas la prendre ? Il ne s'en servira sûrement pas.. Ce serait donc pour la décoration.. Et qu'est ce qu'elle est jolie !

.. Mais pas autant qu'Andrea, sur qui il reporte bien vite son attention tandis que le vendeur s'approche. Malgré qu'il lui parle, notamment du prix total, incluant la nouvelle pièce d'armure qu'il a requis plus tôt, Law n'a véritablement d'yeux que pour elle. Elle n'était qu'un gosse devant son cadeau de Noël. Si ce n'est que la gosse approche ses 20 ans, et que le cadeau en question est un objet de guerre. Mais peu importe. Ce qui compte c'est qu'il lui plaise, et qu'elle apprenne à s'en servir le plus activement du monde, jusqu'à pouvoir réellement se défendre avec. Quand enfin, le fer deviendra intégralement le prolongement de sa chair, il la saura plus en sécurité. Pas totalement.. Mais c'est déjà un début. De toute manière, il gardera toujours un oeil sur elle. Personne ne pourra plus la toucher impunément. Personne ne pourra lui faire de mal. Il s'en fait un serment. Et si quiconque l'assaille, elle devra se venger elle-même. Sparshong récompensera cette action, il la bénira, la protègera quand elle éviscèrera l'impudent qui a osé avoir l'idée de s'attaquer à elle. Que ce soit un pauvre junkie dans la rue, ou un nanti ennemi de Law.
Le silence, et un penchement de tête du vendeur, le fait revenir de sa douce torpeur.


Pardon.. Combien vous avez dit ?




Sortis de la boutique, il ne la saisit pas cette fois-ci. Une volonté soudaine de ne pas se montrer possessif. Si elle souffre de ce manque de contact, il ne l'empêchera pas de se rapprocher. Lui a envie de lui laisser un peu d'air pour respirer, il a envie qu'elle se sente comme l'aigle qu'elle deviendra, puissante mais surtout libre, totalement.
Il la regardait jauger l'impression qu'elle se donnait avec sa nouvelle acquisition, admirant l'effet du matériel sanglé avec toujours cette innocence quelque peu enfantine dans le regard. Là encore, il a envie de lui dire qu'elle est vraiment trop mignonne ainsi. Ce n'est pas tant la dague qui fait cet effet-là que sa façon de regarder, de bouger avec ce qui devenait une nouvelle partie d'elle-même. Puis, la boutique momentanément gérée par le tigre anthropomorphe que Law connaissait fort bien. La bête perte d'équilibre fit sourire ce dernier, et il se corrigea bien vite devant un regard un peu gêné de l'animal humanoïde. Celui-ci demanda rapidement à Law si tout allait bien, et, répondant positivement, le polyglotte lui indiqua d'un signe de tête de s'occuper d'elle plutôt que de lui, ce que le commerçant fit avec discrétion, ne disant plus un mot en la surveillant. Tandis qu'elle avançait la difficulté grandissante à porter son choix - plus que pour les armes, c'est bien une fille ! -, Law répondit, désinvolte, comme si rien n'avait d'importance, pas même le prix ou son avis personnel, car ce qui compte, encore une fois, c'est qu'elle en veuille, point barre.


Prend tout ce que tu veux. Quitte à vider la boutique, Ja' ne s'en plaindra pas.

Le désigné sourit bêtement, avant de saluer poliment un client qui entrait et passait derrière Law pour s'engager dans les rayonnages. Le Boss, quant à lui, n'apporta pas la moindre attention au type. Un cafard de plus. Si il faut tous leur dire bonjour, sa langue finira par être trop sèche pour pouvoir ordonner. Alors, fatalement, il est condamné à tous les ignorer. De toute manière, la seule qui mérite sa sollicitude.
Une nouvelle fois, Law ne prendra rien. D'ailleurs, Andrea n'aura rien à porter en sortant : Sûrement à sa surprise, Jalil mit tout ses choix dans divers sacs, qu'il promit, avec toute sa prévenance et son envie de satisfaire, de livrer dès qu'il aurait quelques minutes de libre.



De nouveau rendus dans la rue, le côté protecteur de Law reprit le dessus. En effet, sortant des rues marchandes pour s'engouffrer dans des allées bien plus petites, moins éclairées, pas mal famées pour autant mais tout de même oppressantes, il préfère savoir qu'il a un bras autour d'elle au cas où il y aura le moindre problème. Une petite arcade de style antique, assez mal placées pour l'endroit, semble attirer l'attention du Seigneur des Bas-Fonds qui s'arrête d'ailleurs devant, jaugeant les quelques pékins qui s'animent vaguement à l'intérieur de l'alcôve dans laquelle il s'apprête à entrer.


Je ne t'oblige pas à venir prier. C'est un petit temple. Il est un peu considéré comme secret. Il est uniquement dédié à Sparshong. Je viens le remercier pour ma bataille d'hier. C'est moi et mes hommes qui nous sommes battus mais je ne peux négliger la protection d'un Dieu, après tout mes ennemis le font aussi. Et depuis le temps que je sacrifie des gorges en son nom, il ne m'a jamais déçu. Reste ici ou entre, comme tu veux.

Un baiser offert sur son front, et il entre dans le lieu de culte faiblement illuminé de quelques lueurs de bougies. Au mur, une immense gravure, face à la seule issue, confronte les entrants au Dieu Vengeur : Le reptilien Sparshong, au physique semblant humain emmitouflé dans une épaisse toge et aux traits calmes, mais menaçants, bien plus serpents qu'hommes. Si tant est qu'une représentation de lui - magistralement dessinée - puisse dégager la même impression que le vrai, alors Sparshong fait peur. Son regard soutenu et vide démontre parfaitement son manque de pitié. Il ne semble pas pour autant adepte de la violence.. et pourtant. C'est avec des lames que ses fidèles viennent prier, avec des blessures, et du sang. La chapelle est tout à fait ronde, et aux extrémités du disque formé par le sol, plusieurs têtes d'ophidiens en pierre noire semble jaillir du sol, la gueule grande ouverte.
Law retire son manteau et, comme les deux autres fidèles présents, pose ses genoux devant l'une de ces reptiles sculptures. Quelque peu fabrile, il sort de son manteau une petite fiole de sang, dont il fait sauter le bouchon et vers le contenu entre les crocs de l'animal figé, le tout coulant jusque.. jusqu'où ? Seul l'architecte du lieu le sait. Ca n'a pas d'importance : le buste droit, les mains désormais vides, et la tête baissée, Law récite sa litanie, à voix mi-basse. Il faudrait être près de lui pour l'entendre. Il raconte la force qu'il lui donne, celle de se venger de ses ennemis, de trancher la haine et l'injustice. Il lui parle comme à un ami bienveillant, le remerciant d'avoir sauvé son bras malgré cette protection de bras qui sauta sous le coup de masse d'un opposant. Il fini enfin en disant qu'il voulait qu'à jamais, il veille sur Andrea comme il veille avec sagesse sur lui, que ses Léviathans écrasent et anéantissent ceux qui voudraient s'opposer à son destin. Il termine par quelques secondes de silence, dans lesquelles il attend un parole du Dieu, puis se relève en se frottant très peu pieusement les genoux. Séance terminée. On retourne au marché, en silence.




Marché rejoint quelques secondes plus tard où, cette fois-ci, Andrea pourra se balader librement entre les étals, accélèrer ou ralentir le pas, s'arrêter où elle veut, et pourquoi pas acheter ? Si c'est son choix. Enfin, toujours est-il que Law parle. Et pas de religion. Ni de pouvoir.. Enfin, pas tellement.


J'ai longtemps pensé que certains m'étaient supérieurs. C'était la vérité, à l'époque. Ils avaient le dessus sur moi pour deux raisons. D'abord, parce qu'ils s'en donnaient les moyens. Et ensuite, parce que même si je me mettais à joure l'insoumis, tacitement, j'acceptais cette situation. Alors, oui, ils m'étaient supérieurs. Vint le jour où j'ai décidé de changer totalement cette situation. J'ai compris que je ne devais pas répéter bêtement qu'un jour, je serais leur maître. Je devais agir ! Alors j'ai agis. J'ai tout fait, tout. J'ai travaillé plus longtemps, plus dur. J'ai obtenu des faveurs, j'ai souffert plus qu'eux. Et un jour, je les ai surpassés. Pas que moralement, mais aussi socialement, physiquement. Réellement quoi. Ce n'était plus simplement dans ma tête, c'était pour de vrai. Du jour au lendemain, et grâce à ma volonté de toujours vouloir repousser mes propres limites, ces caïds étaient devenus de simples hommes de main. Ils n'ont évidemment pas supporté cette situation.

Et là, il marque une pause. Pour une fois, il ne cherche pas à donner d'effet, il réfléchis juste à ses mots.

Ils ont tous essayés de m'assassiner lâchement, d'un commun accord. Mais ils m'ont raté. Quand je les ai retrouvés, un par un, il y a eu plusieurs réactions. Quelques uns ont tenté de se dérober, de disparaître. La grande majorité a essayé de s'opposer à moi. Alors qu'est ce que j'ai fait ? Je les ai tués. Si j'en avais le temps et le pouvoir, je les faisait souffrir avant de les achever, beaucoup. J'ai tué les fuyards pour leur apprendre que s'échapper lâchement n'est pas une solution. J'ai tué ceux qui , malgré mes menaçes, se rebellaient encore, mais ça, tu comprendras pourquoi je l'ai fait. Si je les avais laissés en vie, ils auraient cherchés leur revanche tôt ou tard. Un seul, un seul d'entre eux s'est platement excusé en me voyant venir. Il s'est mit à terre, il rampait et il pleurait en disant qu'il regrettait et que maintenant il me sera fidèle. Je l'ai tué aussi. Si il avait voulu se faire pardonner, il n'aurait pas attendu que la mort soit si proche de lui. Si quelqu'un veut le pardon, il doit le chercher dès la faute commise. Il doit se rendre compte qu'il a fait le mal et faire quelque chose de concret pour mériter l'indulgence. Ce n'est pas en répétant "je suis désolé" qu'on obtient l'absolution. Ces trois cas de figure, tu les rencontreras toute ta vie. Les revanchards, les lâches, et les faux repentis. Parfois même, certains cumulent. Tu devras faire table rase d'eux. T'éloigner ne sert à rien tant qu'ils hantent ton esprit. C'est toi qui doit porter l'estocade. Je viens de le dire : Fuir ne sert à rien. Maintenant tu es forte. Tu n'as plus à fuir. Tu dois attaquer.

Là, il s'arrête enfin pour de bon, portant ses yeux sur un large panel de fruits élégamment présenté dans diverses couleurs. Malgré la température hivernale, certaines de ses denrées poussent encore très bien, et il en repète deux ou trois dans un état parfait. Hm.. Il a faim, soudain. Mais il ne s'attarde pas sur ce genre de basse considération : il veut entendre Andrea d'abord. Ses réactions.. Ses aveux ? ...

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



Je suis pour la réhabilitation des Userbars.
Les userbars sont VOS amies. Elles sont gentilles.
Utilisez des userbars. <3

Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 54 jeudi 30 décembre 2010, 13:10:19

En fait, ce n’était pas une finalité pour Andrea que de s’intéresser aux vêtements dans la boutique du dénommé Jalil. Ce n’était pas son côté « fille » qui ressortait, ni une ancienne habitude à se pâmer devant les couleurs et les formes d’une boutique aussi chatoyante et attractive que celle-ci. Non, car Andrea était arrivée au Japon durant sa scolarité, ce qui lui avait valu la découverte de l’uniforme. Ce tissu informe qui en rend plus d’une complexée par ce qui n’a pas lieu d’être. Cette absence de singularité, dans un océan d’écoliers ou de lycéens tristement identiques. Une mare de jupes ou de pantalons bleus et blancs était devenue son quotidien, et à la maison la jeune fille le gardait souvent jusqu’à l’heure de se mettre au lit. Le week end, une seule tenue revenait régulièrement sur son corps, simplement pour avoir le temps de laver complètement son trousseau d’uniformes. Cette culture n’était pas la sienne, et Andy ne s’était jamais réellement faite à cet habit qu’elle portait pourtant souvent, et plutôt bien. Ayant eu la chance d’avoir un physique assez agréable, la jeune fille n’avait jamais souffert d’une jupe trop courte, des chaussettes montantes qui moulaient des jambes parfois un peu trop potelées, quand le corps change. Cette idée d’uniformiser une classe de la société l’avait tout d’abord beaucoup intriguée, puis finalement Andy s’était lassée. Ce costume, à peine un déguisement, était pour elle plus une prison de tissu qu’autre chose. On ne lui laissait pas exprimer ses envies, ses impulsions. A l’école, pas de fantaisie. Elle en amenait déjà suffisamment avec ses cheveux, blonds d’origine, sa grande taille et ses yeux immenses. Elle était et resterait l’étrangère au sein d’un pays toujours amical, mais suffisamment fermé pour vous réserver un accueil des plus singuliers.

N’ayant que peu d’amies, sans doute du fait de plusieurs facteurs se rejoignant, Andrea n’allait jamais faire les boutiques avec des filles de son âge. Plus d’une fois, elle avait enviée ce groupe d’adolescentes hystériques devant des vitrines bariolées, à l’idée de faire des essayages et de devoir prendre des choix au moins aussi draconiens que celui de choisir telle ou telle paire de chaussure. Pas de connivence pour choisir une robe d’anniversaire, pas de chuchotements à propos de tel ou tel garçon, pas d’entraide pour raccourcir une jupe toujours trop longue lorsque les années lycées s’installaient ... Bien sûr, Andrea en avait souffert. Et, bien qu’on lui ait souvent servi de multiples excuses pour ne pas trop l’approcher, Andy savait bien. Elle était trop différente et attirait d’avantage les garçons que leurs congénères féminines, ce qui avait bien évidemment le don de les énerver. Son visage d’ange lui attirait autant de compliments, pas toujours très distingués, que d’insultes ou de rumeurs. Pire, l’indifférence qu’elle avait appris à endosser face à ces réactions puériles et blessantes n’avait fait qu’exagérer la chose, ses détracteurs s’étant attendus à un peu plus de faiblesse de sa part. Alors l’amitié, le partage de goûts et les après-midis entiers passés à choisir des vêtements, Andrea ne connaissait pas. Son monde, c’était l’uniforme strict et pesant de sa scolarité.

Pourquoi alors porter ce déguisement de lycéenne était resté une habitude, même après la fin de ses études ? Parce que la jeune femme n’avait pas envie de choisir seule, de s’habiller simplement pour le plaisir de le faire. Si personne ne la regardait et appréciait, alors ça n’avait plus d’importance. De plus, Seiji aimait bien à la voir encore comme une adolescente qu’elle n’était plus, et appréciait particulièrement la tenue qu’elle ne quittait que rarement. Elle était ridicule ? Oui, parfaitement. Mais on ne lui avait pas laissé la chance de ne pas l’être. Tendre la main à quelqu’un qui représente tout ce que l’on veut fuir et tout ce qui dérange n’est évidemment pas facile, et il serait bien sot d’en tenir rigueur à des enfants, en groupe qui plus est. Il aurait peut-être fallu que le père d’Andy fasse un effort et l’accompagne au moins une fois dans un magasin pour son anniversaire, au lieu de la couvrir d’argent de poche dont elle ne pouvait pas faire grand-chose, seule. Alors non, à la différence de bien d’autres femmes de son âge, Andrea n’y connaissait rien en vêtements. Seul son bon goût pourrait la guider dans ses choix, et éventuellement une ou deux approbations de Law, qu’il ne semblait pourtant pas être prêt à donner au vu de sa désinvolture totale. La jeune femme sentait bien qu’elle avait carte blanche ... et elle allait en profiter un peu. La première chose qu’elle fit fut d’extirper de la poche de son pantalon actuel une pince à cheveux légèrement abîmée par le temps. Relevant sa crinière indisciplinée et à présent totalement sèche, elle la replia et vint l’attacher derrière son crâne afin de la laisser flotter, avec moins de liberté tout de même. Simplement pour se mettre à l’aise et découvrir avec facilité le monde de couleurs qui l’entourait.

Après des essayages accompagnés de grands sourires de sa part à elle comme de celle du vendeur, appréciateur, Andy avait fixé son choix. De nombreux allers retours avaient été nécessaires entre la cabine et les rayonnages, et la jeune femme occultait totalement le monde extérieur, même celui qui l’attendait, la regardant de loin. Elle fut merveilleusement guidée et assistée dans ses choix par l’homme-tigre qui l’avait, au début, un peu impressionnée. Il se trouvait être en réalité une personne très agréable à côtoyer, discret et maladroit mais extrêmement judicieux dans ses remarques. Orientée par des goûts qu’elle n’avait pas vraiment dans ce domaine, Andrea réussit tout de même à se trouver satisfaite des tenues qu’elle avait dégagées. La première était d’avantage pour les couleurs et les formes, pour le simple plaisir de se trouver jolie. Ses longues jambes se trouvaient alors recouvertes d’un tissu rouge et orangé, formant de larges pans bouffants retenus à la cheville par un petit nœud qu’elle pouvait défaire afin de laisser flotter les pans de l’habit. Là-dessus, elle avait choisi un haut à manches longues d’un rouge plus foncé, tirant sur le grenat. Les formes étaient un peu asymétriques, et là-dedans Andrea se trouvait si pleine de vie qu’elle se reconnaissait à peine. Bien loin du simple jean et de la chemise qu’elle arborait quelques instants plus tôt, la jeune femme venait de transformer complètement son image. Encore un peu déstabilisée par ce qu’elle voyait dans le miroir, Andy hésita longuement avant de se décider là-dessus, mais décida finalement de prendre le tout, cela lui redonnant un aspect vivant qui lui manquait cruellement.

Puis son choix se porta sur une tenue bien plus pratique. Un t-shirt gris sombre, aux manches assez courtes, simple et avec un col rond qui encadrait ses épaules. Avec, un short marron vint orner ses cuisses. Avec les bottes noires légèrement montantes mais sans talon qu’elle avait remise après leur douche, seul habit venant de chez elle qu’elle portait encore, la jeune femme avait l’air prête à courir un sprint ou se fondre dans n’importe quel endroit. Parfaitement adapté à une vie qu’elle devinait exempte de sécurité totale, cet ensemble retint tout de suite son attention et fut immédiatement adopté. La suite ne fut pas aussi simple, étant donné qu’Andrea trouvait tout sublime mais ne s’imaginait pas porter d’aussi belles et voyantes tenues. Elle plutôt discrète et n’aimant pas se faire remarquer physiquement trouvait déjà que le pantalon aux couleurs chaudes était une exception ... Aussi reprit-elle des habitudes plus simples. Un pantalon noir, sans grandes fioritures si ce n’était quelques poches bien utiles, lui donnant une aisance de mouvement satisfaisante tout en épousant d’assez près sa peau. Avec, elle hésita longuement et décida donc de prendre deux hauts, l’un aux manches longues et d’une couleur bleutée qui rappelait ses yeux, sur lequel elle s’était permise un léger décolleté. Sur l’autre, c’était un vert très doux qui primait, avec une longueur intermédiaire et adaptable selon la saison. Satisfaite, Andrea garda cette dernière tenue, avec le contraste bleu et noir qu’elle aimait beaucoup, avant de se décider pour une veste assez chaude, noire doublée de rouge à l’intérieur et pourtant assez mince et légère à porter. Il ne faisait pas si froid que cela, mais sans une couche supplémentaire il était assez inconscient de sortir dehors sans plus de formalités. Une fois parée, Andrea ne décollait pas son regard de la silhouette que lui renvoyait le miroir. Elle s’y trouvait presque jolie, chose d’une extrême rareté chez la jeune fille. Sans doute l’effervescence de pouvoir se permettre de tels achats, ou la sensation d’être si bien entourée dans un domaine qu’elle ne connaissait absolument pas auparavant. Un de plus.

Si Andrea se sentit mal à l’aise d’être la seule à dépenser un argent qui n’était pas le sien ? Normalement, oui. Mais là, trop heureuse qu’elle fût, cette idée ne l’effleurait même pas. Et alors qu’elle s’apprêtait à récupérer les sacs bien chargés, qui contenaient également ses anciens vêtements, l’homme-tigre lui expliqua qu’il n’allait pas lui donner cette peine et que tout serait disponible à domicile. Le rêve de toute jeune femme ... Encore plus pour Andrea qui n’avait en temps normal aucune attirance envers ce genre d’activités. Ce fut donc les bras complètements libres qu’elle ressortit de la boutique, toute pimpante et un grand sourire naïf sur le visage. Il y avait trop de découvertes, trop de nouvelles choses pour la faire s’en départir pour l’instant. D’autant plus que, alors qu’un peu plus tôt il l’avait laissée libre de tout mouvement, Law la prenait de nouveau contre lui, pour l’emmener à présent bien loin de la place principale. Andrea se doutait un peu qu’ils se dirigeaient vers le temple dont Law lui avait parlé, et c’est avec une curiosité mêlée d’un peu d’appréhension conséquente à l’aspect religieux que prenait la balade qu’elle le suivit, s’autorisant pourtant quelque chose qui lui paraissait proprement indispensable. Se serrant un peu plus contre son bras, elle lui souffla avec une satisfaction enfantine :

- Merci pour tout. C’est ... je n’en ai pas l’habitude, et j’avais bien besoin de nouveaux vêtements.

Il sembla balayer le sérieux de ses remerciements d’un silence, ce qu’elle apprécia, avant de confirmer son impression première. Le bâtiment devant eux était manifestement le lieu de culte où il comptait se rendre, et avec toute la prévenance dont il est utile de faire cas dans ces moments, il la laissa décider d’entrer ou non. Et accompagna cela d’un baiser posé à la naissance de ses cheveux. Andrea le laissa entrer devant, et hésitait encore. L’histoire du Dieu auquel il faut faire des sacrifices, ce n’était pas trop son truc. Déjà que l’idée de Dieu en elle-même est assez difficile à accepter pour une jeune femme qui n’en a vu aucune manifestation dans la pourriture qu’est l’homme, mais alors admettre qu’il y en a plusieurs et qu’ils sont réellement présents dans ce monde étrange ... Toutefois, elle entrera. D’un pas hésitant et bien après Law, mais elle entrera. Franchissant avec un respect teinté de prévenance l’alcôve qui invite les fidèles à découvrir plus avant le temple, Andrea se dirigea bien vite contre un mur juste à côté de l’entrée. Hors de question de s’aventurer plus loin, encore moins de participer à un culte dont elle ne sait pas grand-chose. Mais cela l’intéresse, puisque Law est concerné. C’est donc en tentant de conserver l’esprit ouvert qu’Andy laisse voguer son regard sur le bâtiment arrondi, le cercle étant le symbole de la divinité, quelle qu’elle soit, suppose la jeune femme. Ce lieu froid et vide lui donnera tout de même un frisson non retenu, devant le carrelage qui non seulement avait l’air glacial mais qui dégageait également et réellement une impression de froid venu d’ailleurs. Peu rassurée, Andy se colla un peu plus contre le mur, comme si elle voulait s’y fondre. Un peu comme les statues qui en sortaient.

Ou pas exactement, mais quelque chose du genre. La jeune femme ne grimaça pas devant les têtes peu rassurantes des reptiles -elle ne se serait pas aventurée à parler de lézard géant-. Enfin, presque pas. Seule sa gorge se noua brièvement, l’obligeant à déglutir un peu plus fort que prévu. Heureusement, tout le monde sauf elle était concentré sagement sur leur rite et leur prière. Dont Law. Un peu plus loin, l’homme qu’elle apprenait à connaitre était sérieux, le visage fermé en un mutisme et une concentration propre au culte que l’on peut vouer à une quelconque divinité. Elle arriva alors qu’il versait quelque chose dans la gueule menaçante d’une des statues fixées au mur. Andrea réalisa alors deux choses. La première, elle ne voulait pas savoir ce qu’était ce quelque chose. La seconde, crisper ses mains contre le mur froid n’allait pas la détendre, loin de là. En fait, la jeune femme s’était presque attendue à voir le serpent, ou quoi que ce fut, déglutir. C’était étonnant comme les artistes de ce monde revenaient aux valeurs fondamentales du réalisme, alors que sur Terre on y préférait de loin l’art moderne. Pas si mauvais, finalement, ce qu’elle avait quitté. On n’avait pas idée de rendre des grosses bêtes aussi dangereusement réelles. Regrettant presque d’être entrée, Andrea hésitait à faire un pas sur le côté et se retourner pour patienter dehors. Mais, alors que ses jambes commençaient à se dire que c’était effectivement une bonne idée, celui qu’elle attendait se redressa et se dirigea vers elle.

Sans dire un mot, respectueuse du moment sans doute important qu’avait dû être pour Law cette prière, la jeune femme attendit de retrouver le marché pour reprendre un rythme cardiaque stable. Pas forcément impressionnable, l’aspect religieux et extrêmement sérieux des regards reptiliens l’avait quelque peu ébranlée. Pas assez, cependant, pour qu’elle ne retrouve pas l’émerveillement premier une fois les pieds de nouveau en contact avec les dalles de la place, lesquelles étaient jonchées, comme dans tous les marchés, de feuilles de salade, d’un ou deux fruits qui étaient tombés d’un étal ... Bref, la vie. Bien loin de quelque chose qu’elle ne pouvait qu’observer sans comprendre, peu sûre d’en ressortir totalement assurée. Alors qu’il parlait, Andy buvait ses paroles tout en ne pouvant s’empêcher d’ouvrir des yeux attentifs, se retournant parfois sur une babiole dont elle ne devinait pas l’utilité, sur une friandise qui semblait délicieuse ... Mais ne perdait pas un mot de ce que Law racontait. Ce par quoi il était passé pour arriver en haut de son empire, le nettoyage qu’il se devait d’opérer sans aucune pitié s’il voulait conserver son pouvoir et sa vie, les choix qui n’en étaient pas forcément ... Son cœur à elle se serrait, consciente que ce n’était pas si évident de se hisser sur un trône instable, friable. D’autant plus qu’il lui confiait tout avec une facilité déconcertante, cherchant parfois la manière de s’exprimer, mais toujours avec assurance et simplicité. Ce qu’elle admira, et apprécia à une valeur dont il n’avait sans doute pas idée. Lorsqu’il eut fini, elle ne répondit pas en de grands discours. Ils étaient inutiles, d’autant plus que la seule chose qu’elle pensait vraiment se résumait en peu de mots.

- Je suis rassurée de n’avoir pas à compter outre mesure sur la chance pour te voir revenir. Je préfère largement te faire confiance, c’est beaucoup plus sûr. Et j’ai toute confiance, tu es encore plus fort que je ne pensais. Y’a-t-il quelque chose qui t’atteindra, un jour ? Une faille dans cette armure inébranlable ...

C’était plus des questions de rhétorique, et la jeune femme n’attendait pas de véritable réponse. Pourtant, c’était clair que la moindre faiblesse serait exploitée contre lui, et elle en priait presque pour qu’il n’y ait rien qui l’atteigne jamais. Andrea ne pouvait s’empêcher d’être inquiète. Quand on vient d’un monde sécuritaire et où la mort est quelque chose de grave et réellement traqué et puni, on ne peut s’habituer à la violence partout, à l’empire sombre et sinueux qui s’infiltre dans une ville qui ne le soupçonne pas toujours. Etre plongée au cœur de ce monde d’affrontements et de danger n’était pas si facile que cela à accepter, quand on avait quelqu’un à qui se raccrocher, quelqu’un à attendre. Puis, quand le silence s’installa, il se fit pesant sur le cœur de la jeune femme. Lui se confiait si facilement à elle qu’Andy se sentait mal à l’aise, avec ses secrets et ses doutes. Et tout d’un coup, le marché n’eut plus aucune importance. Le prenant sans rien dire par la main, elle l’entraina légèrement à l’écart. Au lieu du centre de la place, ils occupaient à présent un bord, là où les oreilles indiscrètes ne pouvaient pas réellement les écouter sans rien en laisser paraitre. Et dans une grande inspiration, Andrea décida qu’il était venu le moment de faire sortir un peu d’elle, à travers ses lèvres incertaines. Même si cela pouvait faire très mal, il n’y avait plus aucune hésitation à avoir. Même si l’endroit n’était pas le plus adéquat, le moment l’était. Et puis, il était évident que Law attendait quelque chose d’elle. Même s’il ne la forcerait jamais, elle le savait. La seule solution était donc de s’obliger elle-même à commencer à rebondir, doucement d’abord. Puis plus franchement.

- Je crois que, si je suis ta logique, j’ai quelqu’un à étriper. Le problème c’est que chez moi ce n’est pas quelque chose que l’on fait aussi facilement ...

Ça, c’était l’introduction. Une simple phrase qui l’obligeait à continuer. Car si elle s’arrêtait, il demanderait des précisions. C’était un peu son travail à elle de le devancer et de prendre un peu sur elle pour continuer. Même si chaque mot lui arrachait la bouche, même si les mots semblaient poison sur ses lèvres au fur et à mesure qu’ils les franchissaient avec difficulté.

- Je t’avais parlé d’une dette. Un poids, qui me pèse chaque jour depuis deux ans. Qui s’est allégé hier soir. C’est une histoire de famille ... Mais je crois qu’il va falloir que je commence par le début du commencement.

Cela paraissait même plutôt logique, pour qu’il comprenne. Et puis, comme ça elle pourrait toujours s’arrêter en route ... Non, Andrea ne voulait pas accepter de limiter ce moment si plein d’importance, tout à coup. Se confier à quelqu’un qu’elle connaissait si peu ... Et pourtant, Law comptait plus pour elle en deux jours à peine que tous ceux qu’elle avait rencontrés auparavant dans sa petite vie tranquille.

- Tu as remarqué que ma langue d’origine est le finlandais. J’y ai vécu plusieurs années avec mes parents, mais je suis arrivée au Japon avec mon père à mes dix ans, au divorce de mes parents. Et mon demi-frère. Seiji, né d’une précédente union, m’attendait là-bas.

Son ton était lourd, son visage se fermait. Mettre des mots sur quelque chose qui la faisait autant souffrir lui était difficile. Même après deux ans, surtout après deux ans. Elle s’était habituée à ne pas ressentir, et les émotions qui affluaient depuis la veille rendaient le mélange difficile. Car les souvenirs, au lieu de glisser sur elle comme des gouttes d’eau sur une pierre, lui entaillaient à présent le cœur. Comme autant d’aiguilles acérées chauffées au fer rouge, Andrea ne put s’empêcher de refermer ses bras autour de ses épaules. Comme pour se protéger, et ne rien laisser filtrer. Puis elle se reprit. Il était impératif de s’ouvrir maintenant, alors qu’on le lui proposait. Sinon elle ne le ferait jamais. Sinon la douleur reviendrait, recommencerait, et l’empêcherait totalement de faire revenir la part d’Andrea qui existait encore au fond de ses yeux fantomatiques. Un cercle vicieux qui la détruisait avant de lui faire espérer, et de la reconstruire.

- C’était ... ma deuxième moitié. Quelqu’un de formidable, qui prenait soin de moi, remplaçant l’affection que mon père distillait dans les bras d’une nouvelle venue. Des années merveilleuses, malgré la barrière difficile de la langue et des coutumes. Il ... me protégeait.

Son regard se ternit un peu, le dernier mot s’étrangla dans sa gorge. Un voile passa, et Andrea, sans le savoir, était dans sa douloureuse et lointaine souffrance belle à en pleurer. Son visage se figeait dans une expression très lointaine, celle qu’elle avait eue ce jour-là. Comme si son esprit débloquait le temps qu’elle avait essayé d’arrêter, pour revenir deux ans auparavant. Mais ce n’était pas vraiment le moment de relever la tragique beauté que cela lui conférait, aussi n’est-il pas utile de s’attarder sur la finesse cruelle de ses lèvres, tordues en une grimace qu’elle voulait camoufler tant bien que mal.

- Et j’ai eu dix-sept ans. Le jour de mon anniversaire, Seiji a ... changé. C’était pitoyable. Je crois que je n’aurais peut-être pas dû le laisser croire, pas l’encourager ... Je ne sais pas bien ce que j’ai fait, mais tout a basculé.

Andrea se sentait misérable, à ne pas mettre les bons mots, à ne pas expliquer, prévenir à quel point elle avait été actrice de cet instant oh combien regretté.

- Imagine deux minutes une personne de confiance, une salle vide dans laquelle aucun invité ni gâteau d’anniversaire ne t’attend. Un homme, une femme.

La voix se perdit de nouveau. Andrea fit un énorme effort pour prendre sur elle, ne pas craquer. Son visage se ferma un peu plus, sa mâchoire se serrant sous la douleur et la persévérance. Ne pas se rendre ridicule, essayer de ne pas paraitre pitoyable et de tomber dans le drame.

- Il a brisé quelque chose, qui m’a permis pendant deux ans de supporter qu’il recommence. Si je découvre tant de choses avec toi, c’est que depuis lors j’avais tout enfermé quelque part. Pas de larmes, pas de cris. Une façon pour moi de lui payer ce que je lui devais pour son amour, pour ses soins, pour sa protection. Tu comprendras que je n’ai pas vraiment l’habitude de la tendresse et de la retenue. D’autant plus que pour oublier et tout faire passer, il m’a suffi d’ouvrir les jambes. Encore, et encore. Me donner au premier qui passait pour me permettre de ne pas rentrer chez moi, un soir de plus. Essayer de se perdre ailleurs. Ce n’était rien que de donner cette ... chose.

Elle désigna son propre corps d’une moue dégoûtée et distante. A présent, son esprit se replongeait dans son fonctionnement. Les mécanismes de défense qu’elle avait façonnés pour se protéger. Qui normalement doivent rester inconscients, mais qui à présent lui apparaissaient clairement, déchirant sa logique, réunifiant deux entités qui ne se côtoyaient plus. Une frontière se brisait et un nouveau monde renaissait à l’intérieur d’une frêle jeune femme, qui tenait à peine sur ses jambes.

On peut trouver la culpabilité d’Andy ridicule, puisqu’il était évident qu’elle n’y était pour rien. De même, on peut s’étonner de son envie de trouver des excuses à Seiji, de le justifier, d’expliquer qu’elle avait sa part de responsabilité et que c’était plus un crime à deux auteurs qu’à un seul. Mais quand on est réduit à moins qu’un être humain, à moins qu’un animal ou qu’une poupée de chair, que reste-t-il à part la sensation d’exister, au moins pour une personne ? Alors que tout le monde s’éloignerait de celle dont on connaitrait le passé tourmenté, au moins le bourreau prend-il soin de sa victime. Il la chérit, l’entretient, la détruit puis la reconstruit pour s’en amuser encore. C’est la seule silhouette à accepter entièrement la réalité. Andrea était persuadée que personne ne pourrait prendre ce qu’elle était vraiment, tout savoir sur sa bien pitoyable existence, et la chérir tout de même. Au moins, Seiji savait. Il l’accompagnait, lui susurrait ce qu’elle voulait entendre. Il avait toujours été là pour elle, contre une bien maigre rétribution. D’ailleurs, Andy n’arrivait plus, après deux ans de traitement éhonté et manipulateur, à voir l’horrible et cruelle réalité de sa condition. Soupirant en retenant des larmes qui n’avaient pas lieu d’être, Andrea jeta un regard sur le marché qui les narguait de loin. Ses paroles passaient pour celle d’une martyre, c’était ridicule de se faire plaindre de cette manière. La jeune femme avait l’impression de faire passer Seiji pour le méchant et l’unique responsable de l’histoire, alors même qu’elle ne se rendait pas vraiment compte que c’était le cas.

- Mais ... ça va. Je suis toujours là, et puis je t’ai maintenant.

Et elle jeta vers lui un regard teinté d’humidité, alors que ses lèvres s’étiraient dans un maigre sourire, un peu tremblotant. Elle ne savait plus bien si elle avait besoin de son visage à lui pour arriver à fondre en larmes ou pour parvenir à y résister. En tous les cas, c’était devenu un indispensable. A peu près autant que celui de retourner chez elle si elle trouvait une once de pitié dans le regard de Law. Il suffisait d’un instant et elle ferait demi-tour. Seiji devait l’attendre, encore une fois. Et il était si lointain mais si proche qu’y retourner ne serait pas grand-chose. De plus en plus, l’idée germait alors qu’un silence s’installait, palpable, rempli d’une tension que la jeune femme faisait naître de ses muscles tremblotants.

On aurait dit un chaton abandonné sous la pluie, le poil triste et le regard suppliant.
Tomorrow comes to take me away
[Eagle Eye Cherry]

>  On ne devrait pas vivre que pour le plaisir. Rien ne vieillit comme le bonheur.
>  L'émotion nous égare : c'est son principal mérite.
[Oscar Wilde]


Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 55 mardi 04 janvier 2011, 00:00:11

L'histoire avait de quoi déstabiliser. Et pour cause. La raison au malaise, à cette gêne, à ce qui la rendait différente des autres garces humaines, c'était un profond traumatisme, ancré depuis des mois et des mois en elle, et chaque exécution d'un outrage supplémentaire sur cette petite par ce cinglant immoral qu'était son frère ne faisait sans doute que la conforter dans sa position, celle d'une morte, un cadavre emmitouflé dans les épais rembourrages d'un cercueil qu'elle a apprit à apprécier, et où certains, inconsciemment coupable, complice du crime de ce Seiji, jetaient des mottes de terre pour remplir un peu plus son trou. Mais loin de lui, loin de son monde, elle était sorti de sa léthargie morbide. Elle venait d'ouvrir les yeux, et de briser le couvercle du sarcophage. Malgré ce qu'elle eut pu croire, elle n'était pas embaumée, et tout ses organes étaient encore bien présents. Oui, elle vit, ou du moins, elle le peut. Elle était encore dans la phase où, se mettant à 4 pattes, l'astucieux enterré tente de faire pression avec son dos pour soulever toute la masse du tombeau et tenter de s'en extirper. Law, lui, ne fait que l'encourager. Il ne doit pas l'aider, surtout pas. Si l'animal sorti de l'oeuf n'affronte pas les étapes naturelles de son développement, les plus élémentaires obstacles et les terribles dangers, alors une fois grand, il sera trop faible pour survivre efficacement. Mais pousser avec ses muscles pour faire de son corps un ascenseur qui soulève des centaines de kilogrammes d'un sol d'argile, ce n'est pas le plus éprouvant, malgré les apparences. Bientôt, elle devra manger toute cette boue infecte, elle devra y nager, s'y faufiler, exécuter des efforts démesurés pour conduire son corps à l'air libre. Quand enfin, elle respira, elle sera sale, épuisée, moralement atteinte. Mais neuve. Et grandie. Puissante. Tout le monde l'aura cru morte, mais elle venaient de prouver à tout un univers qu'elle était plus forte que la mort, plus forte même que la terrassante volonté commune.

Law ne se projetait pas en ce bourreau. Ca n'avait rien à voir. Évidemment.. Il fallait bien qu'il se trouve différent. Il détruit pour reconstruire. Ses viols, ses tortures, ses meurtres sont amplement mérités, toujours. Il ne laisse jamais une fille souillée de sa luxure dans une rue, à demie-évanouie, pleurant toutes les larmes de son corps. Il la garde toujours près de lui, pour qu'elle puisse apprendre à son tour à devenir plus forte que ça, et voir en ce Law quelqu'un de meilleur qu'un vulgaire agresseur. Oui, il se dédouane. Il se fait pardonner, en quelques sortes. Comment pourrais-t-on arriver à faire preuve d'indulgence envers lui ? Il pense réussir.. Il espère.. Non, il réussit. Pour preuve qu'aucune encore n'a tenté de le tuer. Il sait qu'elle ne fomente rien. Il détecte les moindres signes avant-coureur d'une trahison. Il les surveilles toutes et tous et connaît leur fidélité. Il les a sauvé, les a fait devenir plus grand. Ils sont tous plus au moins sortis d'une poubelle ou d'un caniveau et sont plus ou moins heureux désormais, avec un travail plus ou moins stable et un avenir plus ou moins sûr. Tout ça grâce à un bienfaiteur (ahem), j'ai nommé Law.

Son visage s'était fermé. Ses traits s'étaient crispés. Là encore il tente de réprimer les instincts primals, qui lui hurlent de dévaster le pâté de maison, se munir de toutes ses escortes et d'aller incendier tout le Japon jusqu'à débusquer ce sale rat de Seiji et lui faire manger les pires souffrances de l'Enfer, de sorte que même le purgatoire devienne un lieu de plaisance une fois qu'il y sera condamné.


C'est un poids que tu garderas à jamais sur toi. Même ici, dans un autre monde, loin, protégé par tout ton environnement nouveau et surtout par moi, il restera quelqu'un qui t'as cassé, Andrea. Je ne vois qu'une solution.

Non, en vérité, il en voit quatre. Enumérons-les une par une.
   
   1 - L'approche gentille.
      Car Law sait être gentil si il le désire. Ca ne consiste en rien de plus qu'aller le voir et lui demander de s'excuser, en faisant mentalement pression sur lui quitte à l'écraser. Finalement, le japonais lèchera les bottes d'Andrea car face à Law, on finit toujours par se soumettre. Inconvénient de cette situation : Trop léger. Bien trop.

   2 - L'approche moins gentille.
      Car Law aime être "moins gentil". Il lui fait peur, lui met une mandale. Il renverse toute la maisonnée, menace, rend impotent par sa force. Il lui fait comprendre qu'il a péché et qu'il doit désormais se repentir. Ca manque de légèreté, de finitions, mais en général c'est plutôt efficace sur les esprits faibles, ceux qui ne sont pas assez habitués à la violence et à la peur. D'autant plus que le bourreau se croit en position hiérarchique haute. Il domine ? Lui montrer qu'il doit courber l'échine saura le mettre vite fait sur de bons rails.

   3 - La torture.
      Physique. Mentale. Le faire souffrir avec cruauté pour lui détruire totalement l'esprit. La meilleure des tactiques. Pas besoin de descriptif. Law laissera voguer son imagination sur les flots du sadisme.

   4 - La mort.
      Qu'il n'exécutera pas, tout simplement parce que le châtiment est trop gentil. Et si le monde, après la mort, était plus beau que sur terre ? Il est hors de question de l'assassiner ! Non, cette solution est dores et déjà rayée de la liste.



Le coeur de l'Impitoyable balance, rien qu'un dixième de secondes. On n'aura même pas capté la moindre pointe d'hésitation qu'il avait déjà choisi. Mais le vote est à bulletin secret, alors Andrea ne saura pas ce qu'il a choisi. Mais vous, lecteurs et lectrices, vous voulez savoir, n'est-ce pas ? Allez, je spoil. Ceux qui ne veulent pas savoir sautent la fin de ce paragraphe !
Il a tranché : Il est à cheval entre le 2 et le 3. Il compte lui faire goûter quelques menus délices masochistes, tout en lui montrant son pouvoir, pour le faire se repentir totalement.
Une autre question est lancée : Celle de l'implication d'Andrea. Elle ne doit surtout pas rester aveugle. Plus jamais elle n'aura les yeux bandés ! Alors.. Doit-elle être simplement spectatrice, ou actrice ? Si elle doit agir dans le processus de décomposition de l'âme de celui qui l'a maltraitée tout ce temps, l'expérience sera assez traumatisante pour qu'elle puisse surmonter à jamais le choc des épreuves passées. C'est tout à fait ce qu'il veut. Mais le voir et l'entendre s'excuser, demander pardon, manger la poussière comme un animal pitoyable, n'est-ce pas suffisant pour qu'Andrea comprenne et transcende pour toujours ce qui l'a un jour rendu si peu humaine ? Avec si peu de sentiments, d'envies ? Peut-être pas.
Law avisera sur le moment.

Équipé comme il est, il sort d'une poche intérieure un petit carnet et un crayon en bois à mine très fine. Il prend une page au hasard, et le remet entre les mains d'Andrea.


Je veux que tu écrives là-dessus ton adresse. Celle où je pourrais voir ton frère. Je veux pouvoir le trouver. Mais, ne t'inquiètes pas, je ne lui ferais rien sans que tu ne sois au courant, et tu pourras toujours m'interdire de faire quelque action. Mais j'ai besoin de savoir. D'accord ?

Et avant qu'elle ne note quoique ce soit, il la prend contre son buste, le regard se perdant dans une étendue animée qu'il ne regarde même pas. Comme si sa vue venait de s'éteindre, que ses prunelles mourraient dans une affection soudaine et déchirante.

Oui, tu m'as. Je suis désolé pour toi Andrea. Tu retrouveras ce que tu as perdu, et tu découvriras des tas de nouvelles choses. Considère que tout est déjà terminé. Pour toujours. Tu n'auras plus à devoir vivre sous la contrainte, et tu n'auras plus à pleurer. Je t'en fais le serment. Et tu pourras toujours te confier à moi si tu en ressens le besoin. N'hésites jamais.

"Considère que", ça veut dire que ça ne l'est pas, mais que ça le sera sous peu. Et là, en l'occurence, le Law sait qu'il va lui faire oublier tout ce qui lui mine l'esprit, comme il se l'était promis au début.
Amis lecteurs/lectrices, pensez-vous que celui-ci réussira ? Evidemment ! Il n'a jamais raté aucune de ses entreprises. Celle-là est sans doute la plus ardue, car il n'osera pas la blesser. Peut-être le faudra-t-il ? Il devra à tout prix éviter. Elle a déjà trop souffert - même si elle s'est détachée de la souffrance.

Et c'est dans cette position où Andrea ne peut le regarder qu'il lance, inconsidérément :


Je t'aime. Beaucoup. Enfin je.. Bref, viens.


Et hop, l'air de rien, il la défait de son emprise et l'entraîne par les épaules sur les étalages qu'ils venaient de quitter. Gêné sans doute. Mais il ne doit pas le montrer. D'ailleurs, il ne rougit pas. Pas du tout.


Du côté de Law, cette entrevue, amis, manque cruellement de sentiments. Andrea a tout déballé et lui reste assez peu démonstratif. Au final, il devient un peu plus lui en sa présence, ce qui est une excellente nouvelle.

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



Je suis pour la réhabilitation des Userbars.
Les userbars sont VOS amies. Elles sont gentilles.
Utilisez des userbars. <3

Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 56 mardi 04 janvier 2011, 15:42:54

L’opinion générale commune tente de nous faire croire que nous vivons dans un monde de haine et de cupidité. Mais ce n’est pas tout à fait exact. Il me semble, à moi, que l’amour est partout. Souvent, il n’est pas exprimé clairement ni signifié avec une pancarte mais, définitivement, il est là. Les pères et leurs fils, les mères et leurs filles, les maris et leurs femmes, compagnon, copine, vieil ami qu’on n’aurait pas vu depuis des lustres ... L’amour actuel coule de tous les pores de notre bonne vieille planète. Et même des autres. Qu’on nous parle de violence, de cruauté et de tortures, l’amour en vient toujours à bout. On a vu des miracles se produire par la simple force de la foi en un seul être, par l’adoration que l’on porte à quelqu’un de Grand. On a vu des résistances se créer par la seule énergie de l’amour, alors que l’on ne vienne pas nous parler de chose plus forte encore. Les plus beaux actes sont faits d’amour, qu’ils soient pour un ami cher ou la femme de sa vie. Les plus beaux sentiments en sont directement inspirés, et il n’y a pas de plus douce musique que celle de l’extase émotionnelle procurée à la simple mention de son nom. Tant de délicates manifestations aussi criantes que naturellement discrètes, merveilleusement orfévrées par son créateur. On dit souvent qu’il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour.

Mais l’Amour, qu’est-ce que c’est ? Un mot à la grande majuscule imposante qui se veut forcé de toutes les idées qu’on lui porte, de toute l’attention qu’on lui offre. Ce n’est rien de plus qu’un sentiment, qu’une émotion. Parfois fugace, il ne commence ni ne finit comme on peut parfois le croire. Il est là, partout, évident. Tapi en chaque cœur il sommeille en attendant son heure, impatient de s’exposer au grand jour et au regard des curieux qui ne connaissent pas encore ce frisson, l’étendue de cette chaleur qui prend au cœur et ne lâche plus rien. C’est les beaux yeux de ce garçon qui passe, les longues jambes colorées de la voisine. C’est la tiédeur d’un rayon de soleil au sortir de l’hiver, mais aussi la simple beauté d’une nuit enneigée et silencieuse. L’amour c’est un secret dévoilé à tous, qui partagé se grandit et se rengorge d’une puissance proportionnelle à sa vivacité. L’amour originel explose en milliers de fragment et se loge dans l’esprit de chacun, germant tranquillement comme une fleur que l’on arrose de ses expériences, de ses hésitations et de ses découvertes. Un trésor qui se partage. La graine fleurit, s’ouvre avec magnificence et ce n’est qu’une fois installée qu’on la remarque, le jardinier étant alors bien incapable de la déloger. Les racines sont devenues trop profondes, et sectionner la partie visible n’aura pour conséquence que celle de faire souffrir le cœur responsable de toute cette floraison. Un amour nouveau est d’autant plus robuste qu’il est teinté d’espoir et de naïveté, et l’en arracher devient impossible. C’est sans doute la plus grande force de l’univers, qui ne cède ni ne recule devant rien. C’est à peine s’il sait se cacher pour se préserver. Comme une promesse de fragilité.

L’Amour, c’est une promesse. C’est la clé des secrets d’une âme qui s’offre totalement à l’autre, c’est l’offrande ultime qu’on ne peut vraiment refuser. La consécration finale, ou celle qui va ouvrir une porte et faire réellement débuter la vie. Car la vie et l’Amour sont la même chose, l’un sans l’autre ne peut exister et au premier cri de l’enfant qui nait, il y a cette tendresse caractéristique, ce besoin irrépressible de s’attacher à sa mère, d’y trouver réconfort et sureté. Tout homme en a besoin, chaque femme l’attire à elle. Vérité universelle, cet état de fait est sans doute le seul auquel il faut croire partout et en toute circonstance, puisqu’il n’abandonne jamais, même dans la trahison ou la haine. C’est l’émotion qui gouverne les passions, les impulsions et les conflits. La raison de tout, sans que l’on puisse trouver une raison à l’Amour. Car il est sa propre explication, son propre support. La raison de l’Amour, c’est qu’on aime. Jamais personne ne pourra le faire disparaitre, il existera toujours dans les cœurs de tous, même du plus impitoyable être vivant sur cette terre, ou une autre. Contrairement à ce que l’on croit, ce n’est pas toujours une faille et il peut incarner une force, une puissance incontournable qui justifie la cruauté et les crimes de sa seule existence. C’est donc en toute neutralité qu’il s’impose, n’étant qu’un outil que chacun a à sa disposition. Ce n’est pas l’Amour qui est bon est mauvais, mais l’usage qu’on en fait. Il peut se faire bataille, il peut se rendre guerrier ou au contraire réconciliations et bonheur.

L’amour, c’est le bonheur. Parfois. Mais aime-t-on vraiment si l’on ne connait pas le bonheur ? Sans doute Andrea eut-elle aimé avoir cette réponse, puisque son esprit devait très certainement se pencher sur cette question logique. Mais Andrea était bien lointaine de cette préoccupation, isolée dans un monde qu’elle voulait sien et dans lequel personne ne pouvait faire un pas. Le vide dans ses yeux reflétait celui de son cœur, asséché et privé de tout oxygène. Elle dépérissait sans en laisse beaucoup paraitre, mourant à petit feu dans la trop grande violence des souvenirs alors que son âme était à nue, que ses défenses étaient à terre. Il ne lui restait plus aucune protection si ce n’était Law, que ses yeux ne voyait plus. Même lui s’effaçait peu à peu devant la puissance dévastatrice de sa perdition. Sans doute pourra-t-on dire que, temporairement, la jeune femme perdit le contact avec son esprit. Sa raison venait de rendre le drapeau blanc et laissait place à la folie de ses pensées demeurant secrètes, la poupée qu’elle était à présent demeurait inerte tandis que sous son crâne, la bataille commençait. Ses ressentis, leur expression extérieure, tout ne serait que supposition puisque l’on ne lit rien d’autre sur son visage que le profond désespoir dans lequel elle est plongée. Aussi, pour un instant, me permettrais-je de rendre mon rôle de narratrice pour vous laisser entrer dans la tumultueuse rivière qu’est la pensée d’Andrea Leevi.


Tu as tué Andrea.

J’ai mal dans la poitrine. Je ne savais pas que le corps pouvait aussi comprendre ma tête. Je ne pensais pas que la souffrance physique pouvait relever d’une douleur purement psychologique. Je m’en fiche. Je n’ai pas vraiment mal, en fait. C’est comme si on prenait mon corps, en l’écartelant d’une violence inouïe et sans prévenir puis que l’on avait pansé mes blessures. Chacun de mes muscles me fait mal, d’un élancement sourd et insupportable, la seule possibilité de le faire comprendre serait de hurler. Mais ça ne suffirait pas. On me broie le cœur, si bien que j’ai déjà l’impression qu’il m’a été arraché avant d’être livré en pâture à ceux qui aimerait s’en repaître. Comment pourrais-je expliquer en mots ce que seuls mes yeux croient voir ? Ce désert au ciel sombre, fait de sel crissant sous mes pieds. Le sel des larmes de ceux qui sont passés ici, de ceux qui ont abandonné tout espoir d’en voir un jour le bout. Le désespoir à l’état le plus pur, dans son expression la plus évidente. La peur, la souffrance, l’errance. Le sol sous mes pieds est instable, je tombe sans cesse dans cet océan qui me donne soif, me dessèche et arrache ma peau petit à petit. Les cristaux déchirent ma chair, entament mon épiderme rendu fragile par l’acidité de l’air. Je me noie dans cette eau solide et venimeuse, dans ce monde hostile et brutal. Les souvenirs qui hantent ce lieu que je ne connais pas m’assaillent, mon esprit se tord et je ne vois plus rien qu’une sombre obscurité qui me tend les bras.

Je suis fatiguée de croire qu’il y a un moyen de s’échapper, je suis lasse de serrer les dents pour contenir le mal qui me ronge depuis deux ans sans que j’en prenne conscience. Car il a continué, ce démon vengeur que j’ai voulu arrêter de voir. Maintenant qu’il se tient devant moi, avec son sourire satisfait et un bout de moi dans sa main dégoulinante de mon propre sang, je sais qu’il ne m’a jamais quittée. Je suis trop précieuse, et je comprends alors seulement pourquoi chaque jour je me trouvais plus indifférente, pourquoi la mort et le risque ne m’importaient pas. C’était sous son impulsion, vil démon qui a presque fini son repas et rêve d’un autre hôte, souhaitant alors s’extraire de mon corps en miettes. Mais avant cela, la consécration, l’aboutissement de tant de semaines de douleur sourde ignorée. Réunir mon corps et mon esprit ont rendu les deux vulnérables alors qu’auparavant, livrer l’un permettait la survie de l’autre. Les retrouvailles se font en grandes pompes, et seules mes idées se déchirent, naissent et galopent sous mon crâne alors qu’à l’ordinaire, c’est cette enveloppe à présent immobile qui s’activait, me laissant en paix. Il fait noir, maintenant que j’ai ouvert les yeux sur la réalité de ma pauvre survie, de cet état que je croyais sûr et protecteur. Il fait noir sous mon crâne, c’est peut-être l’heure de fermer les yeux et de se laisser aller au cauchemar.

Viens te coucher, ne me laisse pas dormir seule. Je ne pourrais pas cacher totalement le vide que tu as laissé, je n’ai jamais voulu que ce soit si froid. Je préférais l’indifférence et l’instabilité. Maintenant, il ne me reste que mes yeux pour pleurer et une image de toi qui s’éloigne, le seul qui ait jamais accepté que je sois moi. Tu m’as privé de tout mais tu m’as offert une vie exempte de souffrance, tu m’as protégée pendant sept longues années alors que ce n’était pas à toi de le faire. Je me souviens de la brosse que tu passais dans mes cheveux le soir en racontant une quelconque histoire qui couvrait les bruits provenant de la chambre de papa et de sa nouvelle amie. J’étais encore jeune, et ta voix me passionnait tant que je n’en ai pris conscience que bien plus tard. Te rappelles-tu de mon conte favori ? Raiponce aux longs cheveux qui, enfermée par celle qu’elle croit être sa mère, ne retrouve le bonheur d’une famille unie et aimante qu’après avoir découvert son prince charmant ? Tu étais ce prince, même plus tard quand tu as commencé à grandir. Même après, après mon anniversaire. Tu venais toujours me trouver le soir pour apaiser mes insomnies et attendre que je m’endorme. Quand tu revenais au beau milieu de la nuit, j’attendais que tu t’attardes à mon chevet pour me souhaiter de beaux rêves. Même si après, tu me réveillais et faisais ton affaire avant de t’en aller. Ce n’était rien, tu n’avais juste pas assez bu pour me dire que tu m’aimais. Parce que tu m’aimais.

Je ne peux m’en tenir qu’à toi, tu es mon port d’ancrage, ma référence, ma sécurité. Celui dont les prunelles ont toujours brillé sur mon image, le seul qui ait pris le temps de s’intéresser à la petite Andrea. Sans toi, dans ce monde, je ne serai rien de plus qu’une étrangère pas à sa place, une paria qui ne parle pas la langue et qui en oublie des coutumes obscures et compliquées. Tu étais un père, un frère, un meilleur ami et un amant. Tu étais peut-être trop, mais c’était indispensable pour moi que tu ne t’éloignes pas. Et je ne t’ai pas repoussé, jamais. Je t’ai laissé me posséder encore et encore, avec la force et la passion que je te connaissais. Tu m’étreignais si fort que je voulais croire à un amour pas comme les autres mais ayant le mérite d’exister. D’une certaine façon, tu m’aimais. D’une certaine façon, je t’aimais. Enfin, je crois. Je le croyais.

Je me demande ce qui ne va pas chez moi. Tout à coup, je ne me souviens plus de tes paroles gentilles, celles que j’étais persuadée d’entendre toujours quand ça n’allait pas. Je ne revois plus la tendresse que je croyais te savoir utiliser. Où sont passés mes bons souvenirs de toi ? Est-ce le temps ou les hommes qui n’ont plus le temps de passer le temps, qui m’ont dérobés ces chères images emplies de souvenirs, de mon enfance à maintenant ? Il y avait dans le temps des fleurs qui poussaient dans le jardin que nous n’avions pas, mais le temps a passé et seules restent les pensées. Et dans ma main, comme dans la tienne, il ne reste rien.

Je ne vois plus rien, n’entend plus rien. Je me souviens à peine où je suis, avec qui. Ce que j’ai dit, ce que j’ai fait. Et aucun son ne me parvient plus, me laissant seule dans le terrible et effrayant espace noir et vide qu’est mon cœur.

Andrea te tuera.



Elle tente de fuir, se débat contre elle-même et, inconsciemment, désire revenir en arrière, ravaler ses paroles et demeurer transparente, sans consistance, si c’est le prix pour apaiser ça. Tout plutôt que d’avoir mal ? Préférer se cacher sous terre en attendant, en vain, que quelque chose passe et lui reprenne ses souvenirs ? Andrea sait bien qu’il est trop tard pour s’en retourner. Maintenant que les mots sont formulés, elle ne peut plus se convaincre que son imagination et que sa culpabilité lui jouent des tours. Il devient alors impossible de s’échapper, son cœur plaqué aux épingles dans sa poitrine, sans aucune défense ni artifice. Mis à nu, sous le joug des mots qui ont franchis la barrière de sa conscience. Andy a mal, mais c’est le coût à accepter pour avancer. Et, elle se l’est promise, elle avancera. Reprenant alors peu à peu la maîtrise de son esprit, la jeune femme entame doucement un processus d’acceptation. C’est un poids, il lui faudra le supporter toute sa vie maintenant qu’il est révélé et qu’il a fait preuve de son existence. Et rien ne pourra la sauver de cela, pas même son attitude passée. Car la présence, et même le souvenir de Law éveillent trop de choses chez elle pour qu’elle s’en retourne et accepte sans sourciller de recommencer le long travail d’oubli, de construction de barricades autour de ses sentiments.

Heureusement, le cerveau humain est une machine absolument admirable qui peut enregistrer des détails sans que l’on en ait conscience. Ou d’autres choses, comme des paroles qui n’auraient pas remontées jusqu’aux oreilles d’Andrea si sa mémoire n’avait pas agi d’instinct en enregistrant ce que Law lui répondait. A vrai dire, la jeune femme était encore dans une apathie profonde, presque léthargique, et sentir son corps flotter pour se dissoudre ne l’aurait pas étonné outre mesure. Ce fut, dans un imperceptible mouvement, le frottement du cuir et la lame buttant contre sa jambe qui la ramena progressivement à l’instant présent, dans un monde qui n’attendait plus qu’elle. Le vacarme assourdissant, pourtant présent bien avant, la prit par surprise et Andrea dut attendre quelques instants avant de se faire de nouveau à l’activité qui, autour des deux jeunes gens, n’avait pas cédé. Le contact inhabituel fut sans doute le détail qui lui permit donc de se secouer légèrement, frissonnant presque sous les agressions sensorielles qui lui parvenaient avec une netteté assez relative. Andrea fut donc ramenée -au moins un peu- à elle par sa toute nouvelle acquisition, simplement et juste au bon moment pour pouvoir entendre un ... Je t’aime.

Ah non, ça n’était pas une expression qui faisait partie de son quotidien, ni même de son vocabulaire. Personne ne lui avait jamais dit avec une sincérité et une spontanéité aussi évidente. En un instant, la mémoire de la jeune femme joua et lui permit de prendre conscience des paroles qui avaient été prononcées juste avant. Lui expliquant également pourquoi elle avait un carnet dans les mains, avec un crayon. Pourquoi elle se retrouvait tout à coup contre lui, sans rien en voir, juste en respirant la chaude odeur qui se dégageait de son corps rassurant. Pourquoi, aussi, cela ne dura qu’un instant, mais elle sentit ses joues se colorer d’une carnation totalement inconnue. Ce mot, cette émotion qu’il procure, la douleur dans la poitrine qui ne faisait plus mal mais répandait un doux baume apaisant, alors que son cœur s’emballait de surprise. Malgré sa maladresse à lui. Non, grâce à elle. Quelque chose qui valait bien plus de longs discours, que de grandes déclarations. Une hésitation, un petit rien, une gêne totalement inexistante qui renforçait l’aspect anodin et pourtant terriblement sérieux de la scène.

Alors un petit miracle se produisit. Après tout cela, d’un geste nonchalant de la main et en se laissant entrainer doucement vers le marché auquel ils avaient tournés le dos, Andrea sourit. Oh, un petit étirement timide de lèvres, rien de plus. Manifestation discrète de quelque chose qui devrait attendre, prendre du sens plus tard, plus loin. Aussi brièvement qu’il l’avait dite, Andy rangea vite la phrase légère et peu assurée dans un recoin de sa mémoire. Maintenant, celle dernière ne lui jouerait plus de tours. Ce n’était plus une ennemie, étant donné que la jeune femme n’y conservait plus uniquement un dégoût d’elle-même et des images qui la faisaient frissonner. Il y avait tous les bons moments passés avec Law, qu’elle gardait, en les chérissant avec plaisir. Il n’exprimait aucune pitié, mais une promesse d’accompagnement sans support assisté, sans dépendance d’elle à lui. Une nonchalance qu’Andrea, en cet instant, loua de toute son âme. Puis, sans relever ce qui lui semblait pourtant le plus important, elle remit doucement ses muscles en mouvement, avançant à son tour tout en griffonnant rapidement et avant de changer d’avis un chiffre, une rue, une ville. Le tendant à Law, dont elle ne croisa pas le regard afin de ne pas trébucher bêtement sur un obstacle dans son chemin, la jeune femme adopta une voix qui ne tremblait presque pas, encore un peu ébranlée mais si peu par le moment assez étrange qu’elle venait de vivre.

- Je t’interdis de le toucher avant que je ne puisse le faire.

Sans vraiment le savoir, cet épisode faisait d’Andrea une jeune femme grandie de sa fragilité extraite douloureusement de son corps. Elle était encore là, mais s’en défaire ne serait de toute façon pas possible. Autant continuer avec, l’accepter et mieux la comprendre. Pour l’instant, Andy était loin du compte. Mais sous cette simple phrase se cachait l’ombre de celle qui, un jour, incarnerait la nouvelle Andrea.

Et, dans un sourire qui restait un peu forcé et discret, la jeune femme saisit fermement d’une main celle de Law, et de l’autre elle repoussa une mèche de ses longs cheveux qui folâtraient dans le petit vent de cette matinée bien lourde de conséquences. Puis, en lorgnant sur un pain chaud qui semblait sortir de la boutique boulangère située juste derrière l’étal mobile qu’elle fixait, la jeune femme lança un regard furtif vers Law. Elle ne comptait pas s’appesantir sur un sujet qui, s’il n’était pas clos, ne méritait pas que l’on s’y attarde.

- Tout ça m’a donné faim. Et puis, tu sais, je t’aime aussi beaucoup.

Sans l’espace, le laps de pause entre deux mots, ceux-ci n’avaient plus rien à voir avec les précédents. Mais il comprendrait qu’attendre était le meilleur moyen de se voir l’obtenir. Parce que pour l’instant, il fallait que l’édifice à terre cicatrise et reconstruise ses fondations pour ensuite resplendir de nouveau. Parce que le dire était encore impossible alors qu’Andrea en comprenait tout juste le sens. D’abord, elle serait heureuse. Elle connaitrait le bonheur, pour ensuite saisir ce qu’était l’Amour, et apprendre à le dire, à le décliner. Le sentiment était là, peu importait que les mots suivent ou pas.

Et la pression de sa main à la sienne, rassurante et pleine de certitude, en était sans doute la meilleure expression. 
Tomorrow comes to take me away
[Eagle Eye Cherry]

>  On ne devrait pas vivre que pour le plaisir. Rien ne vieillit comme le bonheur.
>  L'émotion nous égare : c'est son principal mérite.
[Oscar Wilde]


Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 57 samedi 08 janvier 2011, 14:14:21

Aimer, c'est s'attacher à une personne sans pouvoir s'en détacher. C'est ne voir qu'elle, l'accepter avec ses défauts. Alors qu'il pourrait y avoir mieux, ailleurs, quelque chose qui nous conviendrait plus. Mais ce "mieux", on ne l'aime pas, on préfère rester cloué avec la personne adorée. L'amour, c'est aussi la contrainte. C'est devoir changer son esprit et ses habitudes, modifier ses plans, contrecarrer son avenir pour s'adapter à ce couple - ou cet espoir de couple -. C'est devenir autre, c'est devoir se faire moins violent, plus possessif, moins soi, c'est se muer en l'idéal qu'a l'autre alors qu'il est censé nous aimer comme un idéal. C'est être un fantasme, le fantôme de ce qu'on eut aimé être qui prend la forme de ce qu'elle veut qu'on soit.
Alors oui, l'amour est une plaie avant toute autre chose. Parce qu'être amoureux, et souffrir de cette attirance exceptionnelle, ça ne dérange pas. C'est aussi renier ses libertés une à une, alors que l'humain en demande toujours une.

Aussi, Law étant conscient de ce déplorable état de fait, lui-même y tirant profit financier, comment peut-il accepter d'aimer ?
Tout simplement car l'Amour est une guerre, le Sexe en est une bataille parmi d'autre.


Tous ici nous savons que Law est d'abord un guerrier avant quoique ce soit d'autre. Law est le sage martial, priant Athéna la réfléchie avant Arès le belliqueux. Celle-là lui est systématiquement supérieure : La brute se soumet toujours à la tactique. Les Grecs avaient tout compris avant les stratèges modernes : pour écraser une armée intelligente, il ne faux jamais avoir recours à une puissance uniquement basée sur la force brute (ou alors celle-ci doit VRAIMENT être forte, et brute).
Mais être stratège n'est pas donné à tout le monde. Aussi, dans le jeu de l'Amour, Law doit pouvoir sortir son épingle du jeu, se démarquer par son habitude des relations sociales, son sens aigü des prévisions, sa capacité à anticiper les décisions de l'autre.. Bien sûr qu'il va gagner. Après tout, il n'a jamais réellement perdu. Ses seules défaites ont été de menues échecs, qu'il a prit soin de rattraper vite fait par une sévère rouste à celui qui avait osé lui infliger un revers.

... Si. Si. Il a subi une défaite. Une énorme qu'il a dû faire payer au centuple. Ce jour où il a changé du tout au tout. Ce jour..



*************************


Flashback ! http://www.youtube.com/watch?v=CAHGxMq1IUI


La rue est déserte à cette heure. Etrange. D'habitude, les bas-fonds sont encore pleins de vie. Le soir est tombé il y a peu et pourtant.. Un évènement grave a dû arriver. Serait-ce en rapport avec l'incendie s'étant déclaré il y a peu, selon un ivrogne croisé en sortant de ce troquet ? Peut-être.. D'ailleurs, je remonte la piste de ces flammes. La lumière qu'il produit dans la nuit est comme un phare, et je ne suis qu'une bête luciole. Mais au fil de mes pas, je trouve ce chemin étrangement familier. Enfin, non, rien d'étrange. C'est plus ou moins le trajet que je fais plusieurs fois par semaine en sortant de chez mon employeur - et depuis peu, de chez moi - pour me rendre dans les quartiers plus bourgeois, afin d'y trouver acheteurs ou vendeurs. Le commerce d'esclave rapporte. Et maintenant que c'est mon établissement à moi, les profits n'en seront que plus conséquents.

Que.. c'était.. mon établissement.

Arrivé devant l'incendie, je constate qu'il m'appartient. Oui, ce bâtiment tombant en ruine, d'où le feu dévorant, infernal, torrentiel s'élève, c'est mon travail, ma maison. C'est ma vie. Surtout, c'est mon héritage. C'est là qu'est mort mon père spirituel il y a quelques jours. C'est là que je me voyais un avenir riche et radieux. C'est là que tout se finit. J'écarte lentement la foule pour me rapprocher. Je suis obnubilé. Ce phare est tellement prenant.. et c'est pourtant tellement effrayant. Je retiens mes larmes. Le traumatisme est violent. Que milles cavaliers me piétinent.. je n'en reviens toujours pas. Qui a pu faire ça ? Qui ? Qui m'en voudrait ? Je ne suis qu'un marchand.. Pourquoi m'en voudraient-ils ? Ai-je offensé quelqu'un en capturant l'un de ses proches ?
Je suis démuni. De tout. Je ne sais pas vraiment combien de temps s'est déroulé. Je suis toujours à fixer l'incendie. Personne ne bouge. Personne ne bouge pour les bas-fonds, de toute façon, même ceux qui y habitent. Le feu ne semble pas encore progresser dans les habitations alentours.. Ca ne saurait tarder. Je n'arrive pas à hurler, malgré mon envie. J'aimerais qu'on y amène de l'eau, qu'on fasse quelque chose. J'aimerais invoquer la pluie. Non. J'aimerais revenir quelques heures en arrière et empêcher le fils de chien qui a mit le feu à mon établissement de commettre son crime. Et si je ne le peux, je voudrais périr dans les flammes.

Alors, là, j'ai perdu toute notion. Temps. Espace. Ca fut tellement dur de pouvoir mettre des mots sur ce qu'il s'est passé.


Il avait fendu la foule et je n'avais rien vu. Il s'est précipité vers moi, et quand je me tournais vers lui, impuissant, je sentais sur ma joue toute la puissance qu'il a mit dans son bras pour me frapper avec sa barre en métal. Il me toisait, moi à terre, recroquevillé comme un chien. Mes larmes coulaient enfin, se mêlant au sang jaillissant des sillons creusés sur mon visage. Il était animé d'un sourire malsain. Je le reconnus. Et lui parlait, me traînant faiblement pour m'éloigner sans aucune conviction.

-Ubel.. Tu as toujours été un traître.. Moi et les autres, on te le fera payer.. Tu vas souffrir..
-Les autres ? Ils sont tous avec moi. Tu es tout seul, Law. Tout seul. Tout aurait dû NOUS revenir. Tu as été le dernier arrivé. Tu n'es encore qu'un gosse ! Et tu penses nous avoir ? Quelle honte.

Ainsi donc ils m'avaient tous abandonnés. Je souffrais le martyr mentalement. Il s'occupait de mon physique en m'assénant des coups de barre, et personne autour ne bougeait.

Sauf Elle.

Un Ange dans les bas-fonds, l'eussiez-vous cru ? Elle s'était jetée, toute faible qu'elle était, sur le monstre qui voulait me battre à mort. Elle tentait de l'arrêter. Il lui avait asséner une violente gifle, avant de l'empoigner par le cou dans le but de l'étrangler. La punir.
Je me suis senti un courage inouï, et me relevant d'un bond, mon coude heurta son visage avec force. J'avais la rage du désespoir, et lorsqu'il s'écrasait à terre, malgré mes blessures, mon corps brisé, ma psyché en lambeaux, j'étais quand même en position de domination. Alors je l'ai frappé, encore et encore, seulement quelques secondes, mais c'étaient des soulagements sans égals. Je l'ai ensuite traîné, usant de mes dernières réserves d'énergie, jusqu'à m'approcher dangereusement de l'incendie qui avait consumé mes sens auparavant. La sueur m'envahissait déjà, je n'étais qu'à quelques centimètres des flammes, j'allais m'évanouir.. Et je l'ai laissé là, à l'entrée même de son méfait, là où une porte s'était écroulée. Ma botte est venue lui assomer l'esprit, et ainsi dans les vappes, je pouvais le laisser à son sort. Je m'éloignais difficilement.. Avant de tomber moi-même, dans la rue, sur le sol.

Une semaine de repos, auprès de celle qui m'avait sauvé, et tiré de là. Elle était bienveillante, et j'éprouvais un grand respect pour elle. Ce fut ma première véritable expérience de passion. Loin des quelques baises passagères et vaguement amusantes d'auparavant, j'ai connu avec elle une puissance charnelle incomparable. Je crois que je me suis tout simplement évanoui à la fin.

À mon réveil elle n'était plus là. J'ai pris sur moi de me lever, de la chercher. La petite demeure était vide. Personne dans le voisinage ne la connaissait, personne ne l'avait jamais vue. Et moi, plus jamais je ne vit son visage.

Et j'ai retrouvé mes sens, et mes souvenirs, enfin.


Je ne suis pas triste. Je ne suis pas malheureux. Je n'étais pas amoureux d'elle.. On ne tombe pas amoureux des déesses, elles nous sont trop supérieures. Elle m'a sauvé. Elle m'a rendu un service. Depuis je la vénère, autant que Sparshong. Mais cette déesse n'a pas de temple. Elle est irrationnelle, au-dessus même des autres Dieux. Chercher à l'identifier serait folie.


*************************


Il se saisit du papier, le regarde d'un air distrait, avant de serrer le poing. L'instant d'après, la note d'Andrea s'était évanouie. Elle n'était plus ici, mais ailleurs, et seul Law saura où. Le choc de ses propres mots passés, Andrea lui en infligera un nouveau. Plus difficile. Il aurait dû s'y attendre, mais pour le coup, il a laissé sa faiblesse l'envahir un peu. Il ne réitérera plus.
Mais ce n'est pas pour autant qu'il n'a pas saisit ses mots. Au contraire.. D'ailleurs, c'est la première fois qu'on lui dit. Il sent son esprit se brouiller un instant. D'ailleurs, il s'était arrêté de marcher. Il faut se trouver un bouclier. Manger ! Oui ! C'est de ça qu'elle parlait juste avant.


Il est l'heure. On va manger.

La main fermement tenue l'emmène plus loin. Ses repères se refont lentement.. trouver un restaurant. Cherche, Law, cherche.
Ca y est.


Tu aimes les escaliers j'espère.

Une maisonnée semblant habitable est son objectif. Il y a de quoi se questionner : les fenêtres ne laissent apparaître aucune cuisine, aucune salle à manger. Y a-t-il une subtilité dans ce monde ? S'invite-t-on chez l'habitant pour se nourrir ?.. Non. Un escalier de pierre longe le mur, entoure le bâtiment. Il grimpe les deux séries de marche et ainsi arrivé au deuxième étage, c'est un spectacle insoupçonné qui attend la jeune femme. Au sommet, sur le toit aplani, des tables et chaises sont disposées, et certains y mangent. Deux soldats en uniforme et armure légère ; un couple de jeunes tourtereaux qui s'embrassent ; trois types accompagnés d'une esclave silencieuse et calme tandis que eux sont très exhubérants.
Pas peur du vide (pas comme moi =D), Law prendra une table au bord, de quoi pouvoir apercevoir le marché et les rues. Paaaarfait. La vue d'un Roi sur ses sujets. Quoi, la grosse tête ?.. Pas du tout.

Même pas de contemplation du contrebas, juste celle du visage d'Andrea.. Interrompu par l'arrivée d'un type en toge bleu foncée, qui s'incline bien bas avant de quérir la commande.


Elle choisit.

Sourire narquois.. Ce n'est rien qu'une petite épreuve.

*************************


Law est néanmoins certains d'une chose : Andrea est une envoyée de cette entité salvatrice. C'est elle qui me l'a offerte pour qu'elle veille sur moi et me sauve une nouvelle fois.

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



Je suis pour la réhabilitation des Userbars.
Les userbars sont VOS amies. Elles sont gentilles.
Utilisez des userbars. <3

Andrea Leevi

Humain(e)

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 58 samedi 08 janvier 2011, 19:10:13

Il a beau y avoir des malheurs et des déceptions que l’on ne souhaite à personne de connaitre, certains sont plus ou moins faciles à amortir quand on en possède le bagage affectif et l’expérience nécessaire. Donner une claque à un enfant avec la même intensité que l’on emploierait face à un adulte pour ne serait-ce que lui faire ressentir une faible douleur est, par exemple, une hérésie. L’enfant est par définition un être sans aucune protection, sans muraille pour se protéger. Le mythe du gosse qui sauve le monde doit rester un conte pour émerveiller les enfants du même âge, on ne peut pas imaginer que la responsabilité pèse sur de si fragiles épaules. Pas plus qu’on ne peut trop en demander à un si jeune être, dont la seule mission et l’unique rôle doivent être la découverte du monde, de ses couleurs et de ses joies. Les peines sont autant d’inévitables dommages, mais certaines sont superflues pour en retirer quelque chose.

Il y a cet exemple assez pertinent d’un trajet effacé, d’un destin malmené par de simples mauvaises décisions, par trop de choix nocifs, trop tôt. La petite fille qu’on voit à la télévision, l’enfant prodige qui danse, joue, pleure et sourit à volonté. Celle qui a ce don de la comédie, transportant les spectateurs qui l’observent d’un simple rire cristallin. Deux grands yeux qui se remplissent d’un liquide translucides, et les mouchoirs se font légion dans la salle. C’est la manipulation du jeu, du rôle, de la fiction et de l’illusion. La petite fille s’expose, présente son don tout particulier, on la qualifie d’enfant prodige, de future brillante actrice, de promesse évidente du cinéma et d’un monde rempli de paillettes. Mais est-ce que quelqu’un a pensé aux amis qu’elle ne se faisait pas alors qu’elle manquait l’école ? Songé que parfois le rire d’un camarade sonne beaucoup plus juste pour elle qu’une façade qu’elle se crée ? La petite fille resplendit, se couvre de gloire et d’admiration, mais dans l’ombre de la scène on la fuit, on l’ignore, on la jalouse. Car les enfants sont francs, ne mentent pas pour faire plaisir mais uniquement pour se défendre. Ils ne prennent pas la peine de faire semblant et leurs mots sont durs, blessants, aussi coupants que des lames de rasoir. Et le visage lisse de la petite fille masque une représentation d’elle tailladée à force de méchanceté, de cruelles attentions. Si le rire est automatique, perd de sa force et de son impact, les larmes et la solitude rendent plausible à l’extrême le rôle parfaitement adapté à son visage las et ses yeux sombres, vides de toute connaissance du monde mais brillants d’une certaine maturité inquiétante, d’une connaissance déstabilisante de la déception et la résignation.

Puis, l’espoir. Celui de rencontrer un jour une autre perle montante, celui de croire que l’amitié est possible dans un univers de compétition et de bataille. Les projecteurs se partagent-ils, pour éclairer de façon égale deux petits corps évoluant avec aisance et grâce sur scène ? Les gouttes de sueur incertaines roulent sur deux fronts appliqués, dont les regards se perdent dans la dimension de l’effort et de l’excellence. Il suffirait que l’une des deux ne défaille ne serait-ce qu’une fois, et ce serait la fin. Et bien sûr, tout arrive. La réplique se voit écrasée, mais reprend le dessus et piétine avec force celle qui a osé croire à une amitié uniquement motivée par la cupidité et la concurrence. La petite fille s’effondre, laissant la place à celle, triomphante, qu’elle a cru voir comme une ressource dans un monde effrayant, un monde complots et de calculs. Un de plus. Trahison, douloureuse et sanglante. Échec, celui de ne pas réussir à se relever. Ramper à terre et supplier, tenter de hurler sans qu’aucun son ne sorte. Comme Tantale qui avait cru pouvoir voler l’ambroisie des Dieux pour la porter aux mortels, la pauvre naïve pensait avoir droit à un délice qui lui avait été enlevé en contrepartie d’un succès qu’elle n’avait pas désiré ... Refusant d’ouvrir les yeux, comme son homologue grec avait nié son crime, tous deux se retrouvaient condamnés à une éternité de supplice, doublée d’une angoisse terrible. Ici on ne parle pas du cours du fleuve qui fuit les lèvres assoiffées du pauvre hère, ni du vent qui chasse les fruits de ses dents avides d’y croquer, et encore moins du rocher en équilibre menaçant de s’écrouler à chaque instant, non. Mais il lui faudra apprendre à contempler toujours ce qui ne lui appartiendra jamais, à trembler devant les autres et leurs habitudes, leur cruauté, leurs codes qu’elle n’a pas pu apprendre.

Souffrance, de grandir loin des autres et de la norme, de ne pas savoir ce qui est bien ou mal, bon ou mauvais. Devoir expérimenter, essayer et attendre les félicitations ou les remontrances. Se mettre en danger presque volontairement pour savoir qui peut lui venir en aide, s’offrir aux crocs acérés qui la surveillent et se font un plaisir de lui apprendre une réalité inconnue, aveuglée qu’elle a été par les caméras qui lui ont toujours fait face. Un, deux, trois, entrechat, délié et on recommence. Mais peu à peu, elle grandit. Ne peut empêcher son corps d’aller de l’avant, tandis que son esprit reste bloqué, il y a longtemps, dans ce temps béni où la douleur était moins forte. Maintenant qu’elle a été surpassée, il ne lui reste même plus le plaisir d’être la seule, l’unique, le centre de tous les compliments et autres admirations. Juste son miroir pour lui rappeler qu’elle n’est plus rien, mais que son existence est déjà de trop.

Puis, l’espoir. Encore. Celui d’avoir trouvé un endroit adapté, aussi calme qu’il est dangereux. Viennent ici les gens à fleur de peau, ceux un peu imprévisibles, ceux qui cachent beaucoup trop de choses. C’est un condensé inconnu, fascinant de figures et de comportements si similaires et pourtant si différents de ses habitudes. La petite fille, qui a grandi, voit enfin la promesse de jours meilleurs, le bonheur qui pointe son nez après beaucoup d’efforts et d’erreurs. Elle pose un regard nouveau sur le monde, ouvre grand les paupières et admire un peu curieusement la réalité qui l’entoure, qui n’est pas la sienne. Tant de choses à découvrir après s’être lassée d’un quotidien où on regrettait son succès passé. Ici elle n’est plus rien, mais elle a le droit de vivre. Comme les autres, elle peut se frayer un chemin dans l’incertitude, écarter les obstacles et se calquer sur leur vie. Rien de plus facile pour celle qui souffrait trop de sa déchéance, associée à une non-reconnaissance d’elle. Il suffit d’être une parfaite anonyme, d’oublier la scène et ses brillants reflets aguichants, et de se fondre dans une masse grouillante et pourtant, à ses yeux, délicieusement plaisante. Cette petite fille vous fait penser à quelqu’un ? C’est totalement fortuit. Un destin comme il en nait des tas, une tranche de vie qui n’a rien d’exceptionnel. Loin de moi l’idée de vouloir faire des parallèles maladroits, de vous ennuyer ou de me permettre des raccourcis qui n’auraient rien à faire là. L’intérêt est plutôt de changer totalement de point de vue, de regarder l’existence de quelqu’un par un autre bout du monde, et de poser un regard lavé de toute habitude. Redécouvrir, comprendre par l’exemple et s’imprégner par la force de la translation.

Solitude, espoir, trahison, échec, souffrance, espoir à nouveau. Bonheur, à venir. Celui, par exemple, de se noyer de nouveau sur l’image de Law. Andy avait eu quelque mal à se replonger dans la réalité qui l’entourait, mais maintenant c’était chose faire et elle ne comptait plus lâcher la faible assurance qui habitait son être, après tant de bousculade. D’autant plus qu’elle sentait que Law avait été un peu secoué, lui aussi. Peut-être à cause de ses mots à elle, qui n’étaient pas ceux auxquels on se serait attendu à entendre dans une telle situation. Tout observateur extérieur aurait en effet pu mettre sa main à couper que la déclaration, le point décisif, allait venir d’elle. Faible sentimentale, sans doute était-ce logique que le guerrier, stratégique et pas prêt à s’engager dans l’inconnu sans être persuadé de vaincre quelle que soit l’attaque ne fasse que recevoir, et répondre. Il était étrange de voir cette toute jeune femme à peine sortie de l’enfance accueillir avec émotion ce qu’elle aurait dû émettre en premier lieu. Stéréotype, préjugé, appelons-ça comme on le souhaite, il n’empêche que toute pensée allant dans ce sens en serait un, se fiant à l’apparence fragile et ... féminine, d’Andrea. Qui était au demeurant bien plus imperméable qu’on ne le pensait de l’extérieur. Fière, au moins, de ce qu’elle pouvait à présent percevoir comme une qualité, afin de ne plus se laisser atteindre -tout était question de dosage-, la jeune femme aurait pourtant préféré lui offrir une réponse plus satisfaisante.

Même si elle le savait, cela ne tarderait pas. Il lui fallait simplement un peu de temps pour se sentir totalement en accord avec elle-même et lui offrir ces mots, n’ayant jamais franchis ses lèvres, quand il serait bon de le faire. Quand son cœur le lui hurlerait, laissant exploser l’impulsion du moment qui viendrait tôt ou tard, lorsqu’elle serait devenue incapable de se retenir. Pour l’instant, c’était par de muettes paroles qu’Andrea s’exprimait, heureuse de sentir une paume contre la sienne, la voix de Law coulant jusqu’à ses oreilles, et leur excursion du moment reprenant. Comme s’il ne s’était rien passé, alors que la jeune femme savait très bien que pour eux deux, c’était beaucoup. Et ce n’était pas minimiser l’impact que de passer à autre chose, bien au contraire. Parler était proprement inutile une fois que tout était dit, et Andy appréciait bien plus le silence, puis l’agitation, que toute autre réaction. Aussi fut-ce avec plaisir qu’elle laissa ses jambes retrouver assez de force pour se mettre en mouvement, s’empressant de suivre le rythme imposé par Law. A la vue de ce qui semblait, en toute logique, être le lieu de leur repas, Andy tiqua. La bâtisse devant elle ne laissait rien présager, mais c’est en se souvenant de la remarque précédente de son compagnon qu’elle aperçut soudain les marches qui se détachaient peu dans le décor, enserrant les murs d’une étreinte presque amoureuse. Dans leur ascension, Andrea accéléra et doubla rapidement celui qui l’avait guidée partout jusqu’ici, prenant quelques marches d’avance en les gravissant presque en courant, heureuse de la simple accélération à laquelle son organisme était soumis et dont elle découvrait les sensations. Arrivée triomphante en première, elle n’eut que quelques secondes à attendre pour qu’il la rejoigne, et pendant ce temps elle examina l’endroit choisi par ses soins.

Une terrasse qui occupait toute la superficie du bâtiment se déroulait sous ses pieds, un léger rebord les entourant tous afin d’éviter de glisser malencontreusement sa chaise sur le sol de pierre et finir, tout aussi malencontreusement, quelques mètres plus bas. Largement plus bas, d’ailleurs. C'était un espace plutôt chaleureux, malgré la présence de ce qui semble être des militaires ou autres représentants de l’ordre de la ville, où les amis ne se gênent pas pour rire franchement, où les sourires fleurissent souvent et où il fait bon vivre. Tout simplement parce que, dans l’air agréable, surtout pour la saison, un petit vent soufflait, venant effleurer avec délicatesse le visage admiratif d’Andrea. Encore une fois, il avait eu du goût pour lui faire ouvrir de grands yeux émerveillés, cette fois-ci devant le panorama qui s’étalait sans complexe quelques étages en contrebas. Le marché vu d’en haut, coupé du bruit qui tentait pourtant de s’infiltrer dans l’air et de se mêler aux conversations qui occupaient l’endroit, était un spectacle sinon plus au moins aussi intéressant que lorsqu’on s’y trouvait. On aurait dit une place grouillante d’activité, qui ne s’arrêtait jamais et continuait inlassablement, alors qu’eux même se tenaient à présent loin de toute cette agitation. Andy put d’avantage apprécier la vue lorsque Law l’entraina vers le rebord, au-dessus duquel elle ne craignait pas un instant de jeter de longs coups d’œil, partagé qu’elle était entre le panorama et les yeux qui la fixaient.

Cruel dilemme que de devoir choisir entre deux sources de son admiration et de son contentement. Ce fut finalement Law qui gagna, et elle lui accorda de nouveau toute son attention.

- Nexus est superbe, de jour. Je n’ai jamais vu autant d’agitation sur aussi peu de place. J'ai hâte d'en savoir plus sur son revers, que je n'ai fait qu'entrapercevoir hier.

Andrea salivait d’avance, devant les plats qui jonchaient les tables avoisinantes. Encore beaucoup de mets qu’elle ne connaissait pas, reconnaissant vaguement quelques associations qui lui semblaient ressembler à ce qu’elle côtoyait auparavant. Alors, quand quelqu’un s’approcha d’eux, la jeune femme réfléchissait déjà. Aussi ne fut-elle pas prise au dépourvu par l’affirmation de Law. Du moins presque pas, étant donné que cela la mettait dans une position tout de même inconnue, et surtout imprévue. Mais s’étonner de lui n’était plus quelque chose qu’Andy faisait sans cesse, se préparant toujours à tout pour ne plus hausser les sourcils dès qu’il prenait la parole. Il était fini le court laps de temps où Nexus n’était pas chez elle, à présent elle composait avec les éléments que Law lui distillait, et la perche qu’il lui lançait n’avait rien d’empoisonné, au contraire. Il fallait simplement voir si elle saurait se débrouiller ... D’un air qu’elle voulait assuré, sans fuir le regard de celui qui attendait docilement, Andrea fit mine de réfléchir et commanda, sans questionnement ni recherche d’approbation. Après tout, il lui avait laissé la main.

- Pour moi, ce sera un plat de poisson parfumé aux herbes, et des légumes en accompagnement. Pour lui ...

Réflexion d’une poignée de secondes, détaillant rapidement le visage moqueur de Law qui l’observait avec attention, un sourire aux lèvres. Il ne perdait pas une miette de ses réactions, cherchant sans doute la faille qu'elle se fit un plaisir de ne pas afficher.

- Ce sera un sauté de viande rouge, et du riz complet si possible. Avec une corbeille de pain, et une carafe d’eau, simplement.

Oui, simplement. Andrea n’avait pas cherché la difficulté, loin de là. Mais c’est parfois dans la plus simple évidence des aliments qu’on les savoure d’autant plus. Et puis elle n’aimait pas les plats en sauce, les assiettes trop remplies, les associations maladroites ... La commande reflétait ce que la jeune femme aimait à cuisiner les longues journées qu’elle passait seule chez elle, et donc sa réflexion n’avait pas porté bien loin, d’autant plus que si jamais Law n’était pas satisfait, il ne s’en cacherait sans doute pas et rectifierait sa commande. Il était hors de question que la jeune femme commence à verser dans la tention, l’incertitude de ne pas faire le bon choix, de se laisser guider constamment. Elle était toute autre, maintenant, et une fois la commande faite, elle remercia d’un sourire celui qui était venu les voir avant de repasser à Law.

- Je me demandais ... Ce qu'il y a de plus important à savoir pour moi, ici. Par quoi commencer ? Je me sens tellement étrangère que je serai incapable de le dire ...

En d’autres termes, qu’est ce qui allait lui tomber sur le coin du crâne une fois qu’ils seraient rentrés ? Andrea était à présent avide de combler le trou dans sa poitrine, et d’oublier qu’il y a quelques instants elle se sentait prête à fondre en larmes et à se liquéfier par terre.
Tomorrow comes to take me away
[Eagle Eye Cherry]

>  On ne devrait pas vivre que pour le plaisir. Rien ne vieillit comme le bonheur.
>  L'émotion nous égare : c'est son principal mérite.
[Oscar Wilde]


Law

E.S.P.er

Re : L'errance de trop. [PV Law]

Réponse 59 mercredi 12 janvier 2011, 23:04:37

Pour le coup, la belle avait eu beaucoup de goût. En tout cas, un certain discernement efficace quant aux choix qu'aurait pu faire de lui-même le polyglotte.

L'on admet habituellement que la force est affaire d'homme, la précision étant en revanche le glaive de ces dames. Au sexe fort (oui, fort !) la pointe, l'estoc. À leur opposé viril le tranchant, ou l'imposante masse dans certains cas. Pourtant, la symbolique même du caractère phallique de ces bêtes sauvages n'attribut-elle pas à ces mâles-nommés un certain penchant pour le coup puissant, direct, droit, celui qui pénètre en profondeur, qui se plante et s'abîme dans le gouffre des chairs ? Ils s'infiltrent, échouent au fond de l'invocatrice du péché de luxure sans avoir jamais à s'égarer dans d'ardus gestes d'escrime : rien n'est plus simple que le terrassement, méthodique mais sensuel, singulier mais commun, atroçe mais divin, des dernières barrières résistantes de la chair par une lame piquant vers son but comme le rayon de soleil s'abattant après sa course céleste et directe sur la terre. Tout cela est donc l'histoire d'un coup précis, et jamais d'une force démesurée.

Ainsi, Law sera phallique plutôt que stéréotypique, car ce sera à lui d'apporter la finition après les coups de burin quelque peu grossiers assénée par sa jolie partenaire, en arrêtant la toge avant même qu'elle ne puisse avoir l'idée de s'éloigner.


Tout ce que vous avez de meilleur, première qualité. Légumes variées, et frais comme jamais. Cuisson impeccable. Et vous m'obtiendrez le nom de l'esclave là-bas.

Avec un sourire qui en dit long - non, en fait, qui ne dit rien, Law fixe de nouveau Andrea et tout ce qu'elle porte sur elle. À ses yeux, c'est une magnificence naturelle, un avenir, le changement, l'accompagnement, la difficulté, la nouveauté.. Tant de concepts dont il est le seul à voir les contours sur ceux de cette jeune perdue de Nexus.

Livrons-nous à un petit exercice. Hm.. Voyons. Ferme les yeux.

Cette phrase prête souvent à sourire. L'on se remet à l'inconnu, voilant l'un de ses sens pour tenter de rendre les autres plus aiguisés, plus attentifs. Il y a un peu d'appréhension, et le goût de la surprise. Evidemment, Law attendra qu'Andrea s'attèle à la condition imposée. Puis il parle.

Dis-moi, Andrea.. Réfléchis. Qui est le plus dangereux sur ce toit ? Après moi, évidemment. Qui est le plus propice à être sujet à ta méfiance ? Les soldats peut-être. Ce sont les premiers à qui on penserait, d'instinct. Ils sont armés, et les combats sont leurs gagne-pain. On pourrait se dire qu'il faut faire attention à eux.. Éviter de leur tourner le dos. Et puis on se ravise. Les hommes plus loin, ils sont trois, donc plus nombreux. L'un d'eux est d'ailleurs ostensiblement bien équipé pour une bagarre, ce n'est pas un couteau à beurre qu'il a posé à côté de son assiette, mais un poignard affûté. Tu l'avais vu, j'espère. En plus, ils ont une esclave. Son propriétaire doit donc avoir des moyens. Bon, imagine. Tu es quelqu'un avec un niveau de vie plus que correct. Et ce midi tu décides, par pour loisir, de venir manger sur un restaurant un peu original, avec deux de tes amis, tout en traînant ton objet avec toi. Tu lui accordes même un repas dans ce restaurant. Tu es sur une grande place commerciale, donc, à priori, assez sûre. Et malgré tout ses facteurs, tu emportes avec toi une arme, par ailleurs pas toute neuve, et tu la poses à tes côtés de sorte que tu puisses la saisir même si tu devais être pris au dépourvu. Soit tu cherches à te défendre car une quelconque menace est sur toi, soit tu joue la frime auprès de tes compagnons. Allons un peu plus loin.

La Toge se ramenant avec la carafe d'eau demandée, Law la videra d'un peu de son liquide pour en remplir les deux verres, tout en corrigeant Andrea si jamais celle-ci en venait à ouvrir ses yeux, sait-on jamais.


Continuons l'analyse somme toute assez paranoïaque. On a donc affaire à un possesseur d'esclave, et ce dernier n'a pas l'air très bien dans ses bottes. On peut légititement avancer que l'esclave en question n'est pas la plus heureuse de Nexus, right ? So, ce type a peut-être un équilibre mental assez fragile au niveau de ses droits et ses devoirs. Il doit se considérer supérieur aux autres humains, tout comme je le fais, mais nos raisons sont sensiblement différentes. Enfin bref. Extrapolons en disant que ce genre de personne là, il doit avoir pour projet de te coller une beigne si jamais tu oses regarder le contenu de son assiette, après t'avoir fait quelques menaçes. Bon. Et maintenant, tu te dis que tu as oublié le couple. Qui se méfierait de deux tourtereaux innocents qui se lèchent les gencives ? Et pourtant. Et pourtant.

Il fait une pause, avec un regard appuyé et pas du tout gêné sur les deux personnes qu'il désigne dans son discours.

Ne suis-je pas un esclavagiste moi aussi ? Et je suis avec toi. Si l'envie m'en prenait, et que je tombais sur une fille seule dans une ruelle, qu'est ce qui m'empêcherait de l'assomer pour la ramener jusque chez moi, où j'en ferais une servante docile ? Ta présence peut-être ? Ohoh. Comme si j'allais préserver tes petits yeux innocents de l'horreur de cette ville. Une horreur quasi quotidienne, et plus encore dans les bas-fonds, là où tout les deux nous passeront une moitié de notre vie, voire plus. Et puis, quoi de plus dangereux qu'un garçonnet amoureux qui sentirait sa demoiselle en danger ? Qui sait ce dont il serait capable si c'était pour la sauver. Il te livrerait, te tuerait si cela devrait le préserver. En somme, il y aurait de quoi avoir quelques réserves à les approcher eux aussi. Evidemment, si ça se trouve, on a affaire à deux soldats gentils et serviables, à trois amis sympathiques et débonnaires avec une esclave un peu réservée, et à un couple fou amoureux loin de toute pensée négative tant ils sont enfermés dans leur bulle de passion. C'est possible aussi ! Tout ces facteurs additionnés, tu peux reconsidérer la question du départ. À savoir : Qui est le plus dangereux de ce toit, après moi. Tu peux ouvrir les yeux.


Elle aura eu tout le temps de laisser son imaginaire jouer les représentations de ce qu'il racontait, projetant contre le voile de ses paupières le film qu'il lui livrait. Il prenait son verre d'eau et s'humectait l'intérieur de la gorge avec, digérant l'air consommé lors de son laïus. L'orateur a les cordes souples, toujours. Il doit pouvoir murmurer et hurler, pour convaincre, pour tenir ceux qui l'écoutent.
Désormais, Andrea peut observer d'un oeil différent ce qu'elle a aperçu précédemment. Remarque-t-elle de nouveaux détails ? Envisage-t-elle de nouvelles possibilités ? A-t-elle des objections ? Des commentaires ? Des suggestions ?


Le plus triste dans tout cela, c'est que ses paroles sont finalement pleines de fatalité, et on croirait bien que Nexus, c'est avoir peur sans cesse, de tout, tout le temps. Pas la frousse, non, mais se méfier, se questionner, surveiller. Se retourner derrière soi. Se demander si son meilleur ami, son voisin, son employé ne serait pas un traître audacieux, un criminel sans pitié, ou toute autre genre de fréquentation que l'on se refuserait de côtoyer. "Ribambelle de margoulins" comme diraient nos mamies, ou, comme l'énonce plus clairement et modernement le célèbre guide du savoir-survivre-en-toutes-circonstances que je n'ai désormais plus à présenter, j'ai nommé, le Manuel des Castors Juniors : "Une sacré bande de salopards."

Ancien Despote, admirateur de Moumou la Reine des Mouettes, président/trésorier/unique membre de l'association des cultistes de Frig, directeur du club des Persos Vitrines, Roi des Bas-Fonds de Nexus, grand-maître de l'ordre du caca masqué, membre des Jmeféchié, médaille triple platine de l'utilisation du Manuel des Castors Juniors, premier gérant de l'association "Cthulhu est votre ami", vénérateur de la cafetière, seigneur de la barbe et des cheveux, chevalier servant de ces dames, Anarchiste révolutionnaire, extrémiste de la Loi.



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