Chacun trouvera bien son bonheur... (Elda Oreza)

Yuichiro Takezo. Ce vieux péteux arrogant et borgne avait une allure digne, mais dans son unique oeil sombre, entouré de rides, brillait toute sa méchanceté.

Hana ne l'aimait pas. Elle lui servit du thé, tandis que le vieil homme et son oncle, Dante, parlaient affaire. Il n'était pas bon de se mettre les Bertinelli ou les Ochinose à dos, surtout sur le marché de la drogue. Ce que venait de faire l'héritier de Takezo, Daichi.

"Encore un qui porte mal son nom... Il n'a pas l'air si sage que ça, le Daichi...", pensa Hana alors que, d'une courbette, elle disparut dans la pièce à côté. Et une fois la porte fermée, elle y colla son oreille. Son cousin Sergio s'agenouilla pour en faire de même.

- Ca pue." murmura-t-il en italien.
- Ouais. Mais le vieux Takezo n'y est pour rien. Par contre, faudra mater le petit."
- Le petit Daichi est plus vieux que toi, Rachele."
- La ferme."

La discussion fut longue, mais il n'y eut jamais un mot plus haut que l'autre. Yuichiro Takezo était plein de bonne volonté, il ne fallait pas en douter - mais son petit-fils, c'était une autre histoire... Daichi fut appelé à se présenter, et il insulta proprement l'hôte de son grand-père. Terrible erreur, surtout quand le haut-parleur résonne dans toute la pièce. Hana eut un sourire mauvais : ce petit salopard allait payer. Il voulait s'imposer ? Elle avait hâte de voir ça.

Elle passa les trois nuits suivantes à se renseigner sur Daichi Takezo - ses préférences, ses lieux favoris. Encore un qui pensait qu'il pouvait hériter du fief de son grand-père et en faire ce qu'il voulait, comme il voulait, sans subir la moindre conséquence de ses actes. Vêtues de son costume de Huntress, Hana veillait. Elle avait fini par jeter son dévolu sur ce qui semblait être la planque favorite de Daichi : son entrepôt d'armes. Il y avait aménagé un étage, insonorisé, où il faisait actuellement la fête avec sa bande de lèches-cul et quelques prostituées de son marché. Huntress renifla dédaigneusement. Il y avait pas mal de gardes, qui ne lui poseraient aucun soucis... C'était la façon de donner une leçon mémorable à ce petit péteux qui s'avérait plus compliquée. Perchée dans un arbre, elle observait à l'aide de jumelles vers l'entrepôt, cherchant ce qu'elle pourrait faire - et comment le faire.

Oreza se présenta devant un vieil entrepôt rouillé. Il entendait les bruissements de feuilles. Sur lui, il avait 10 bouteilles de gaz. Juste pour un entrepôt, il pressentait la présence de beaucoup de gardes. Il s'était inquiété de cet attroupement autour de ce vieux truc la nuit, et il était allé discrètement voir ce que c'était, pour seule lumière, son briquet fidèle. Il découvrit avec stupeur que c'était un entrepôt d'armes.
"-Huhu. Cherchons bien, je trouverai bien de quoi m'amuser."
En effet, il trouva quelques bouteilles d'oxygène, un lance-flammes et un katana. Il prit les bouteilles d'oxygène, ne s'encombra pas du lance-flammes assorti, et rangea le katana et son fourreau à sa ceinture. Ca faisait longtemps qu'il n'avait pas pratiqué son style personnel, appris il y a longtemps en Amérique. Hell Circle of Sword, comme s'appelait l'école ou il apprit à manier le katana.
"-Parfait. Il ne me reste plus qu'à effacer mes tra..."
Il se stoppa net en voyant une ombre bouger dans un arbre.
"-Excusez-moi mademoiselle, mais malgré votre discrétion sans égale, il semblerait que mes yeux soient meilleurs."
Il sentait le mépris et la haine dans sa posture, aussi il proposa galamment un accord.
"-Il semblerait que vous veuillez vous venger de je ne sais quoi. Faisons-le ensemble. J'ai besoin de m'amuser, et vous pourrez vous venger, si mon impression est bonne."

Huntress sépara ses yeux des jumelles, et baissa la tête vers le garçon qui venait de la déranger. Elle soupira son exaspération, et dévisagea le nouveau venu. Drôlement vêtu, son équipement était d'autant plus étrange, attirant la curiosité de la jeune femme. Enfin, elle pouvait parler, dans son costume de super héroïne tout droit sorti d'un comic book, et surtout masquée ! Elle rangea les jumelles à leur place, sur l'accroche de sa ceinture, et bondit de la branche pour se retrouver face à Elda. Elle ne le quitta pas des yeux, mais lui tourna autour, comme un juge autour d'un chien de compétition à un concours de beauté. Huntress sourit quand elle se retrouva de nouveau devant lui.

- Un pyromane, hein ?

Facilement repérable à son doux parfum - et à deux trois petits détails, qu'un fin observateur ne pouvait pas louper. Exactement ce qu'il lui fallait ! Bon, un incendie, c'est un peu désordre, avec ces flammes incontrôlables. Mais c'était une solution à son problème : donner une leçon au petit Takezo. S'il cramait avec ses armes, ce serait tant pis. S'il s'en sortait, Hana espérait qu'il imputerait cet incident à sa famille, et qu'il reprendrait le droit chemin, se contentant du terrain que les Bertinelli lui laissait pour refourguer sa came - et éventuellement, même, réduire un peu l'espace, ça lui apprendrait.

- Je n'ai aucune haine pour le mec qui fait la fiesta, la dedans. C'est juste... Que j'aimerai lui donner une leçon savoir vivre. Qu'il n'oublie pas qu'il joue dans la cour des grands. Tu vois le genre ? Pourquoi tu m'aiderais, hm ? Et que veux-tu en échange ?

Tout accord se devait d'avoir des clauses bien définies. Dante avait veillé à ce que sa nièce ne se fasse jamais avoir sur les tous petits caractères dans le bas de la page.

Les mots "Cour des grands" fit pouffer Elda. Après les 19 familles influentes qu'il a détruit à lui seul, ce n'est pas un petit entrepôt avec une sous-merde gardé de partout qui lui posera le moindre problème. C'est en sortant son katana et les bouteilles d'oxygène qu'il dit :
"-Pourquoi t'aider ? Pour le plaisir de voir la seule invention de l'Homme dont il a peur, le feu. En échange ? Le plaisir de m'amuser avec la poudre contenue à l'intérieur de ce vieux truc. TU veux buter le petit con avant, ou JE peux m'en occuper ?"
Sans attendre la réponse, il partit en rangeant les bouteilles d'oxygène, puis dégaina le katana, courut vers l'entrepôt. De l'endroit ou se trouvait Huntress, on entendit :
"-Qui va là... ! ARRRRRRRRRRRGHHHHHHH !"
Plusieurs cris ainsi se propageaient. Plus tard, Elda revint, taché de sang, un bras gauche dans sa propre main gauche, un sourire sadique sur les lèvres, mais intact. Il souffla juste :
"-Je t'en laisse, don't worry.''
Sur ce, il entra dans l'entrepôt et le truffa de bonbonnes de gaz. Il hurla alors :
"-Maintenant, faites gaffe à ce que vous faites. Amenez votre boss minable, ou vous lui dites au revoir en périssant avec !"

Huntress crut devenir dingue. Mais que faisait-il !! Elle n'avait pas eu le réflexe de le rattraper - et les gardes criaient ! Elda fit l'erreur de revenir vers la jeune femme, qui le saisit par le col et elle dut le suivre jusqu'à l'entrepôt, tuant proprement les gardes qu'il restait avec son arbalète. Quand elle pénétra l'entrepôt, il était déjà en train de beugler. Le sang de l'italienne ne fit qu'un tour, et elle le saisit par le col, le plaqua contre un mur. Elle n'avait pas les yeux revolver, plutôt... Gateling.

- Espèce d'abruti !! La discrétion, tu connais ? Et regarde-moi ça !!!

Elle leva son bras gauche pour lui désigner le bras qu'il tenait encore. Que de désordre !!! Son esprit devenait dingue, et c'était visible sur son visage à ses yeux légèrement injectés de sang. Huntress allait en avoir, du boulot. Elle avait seulement espéré que ce crétin mettrait proprement le feu - pas qu'il mettrait toute cette pagaille !! Elle le repoussa de ses mains tremblantes contre le mur alors qu'une porte, à l'étage, s'ouvrait sur un japonais aux cheveux décolorés légèrement bourré. Instinctivement, Huntress prit son arbalette et tira ; sa fléchette se planta dans le front du jeune homme. Elle arma de nouveau son jouet et le pointa sur Elda :

- Tu. Ne. Bouges. Pas. D'ici. Ou je te jette dans ton propre feu. (Abruti.)

Elle a souligné chacun de ses mots en appuyant la pointe de son arbalète sur le torse du jeune homme. Bon sang !! Heureusement que la salle de jeu était insonorisée, ce qui expliquait pourquoi l'autre idiot de Takezo n'était pas sorti ! Huntress ne savait pas si elle devait commencer par aller ramasser les corps ou par aller assommer celui qui voulait marcher sur ses plates bandes. Et elle opta pour la seconde solution - il serait bien temps de jeter les blessés et les morts dans le feu quand il sera allumé.

Alors la jeune femme masquée monta un escalier, ignorant dès à présent Elda. Elle se faufila jusqu'à la porte, et l'ouvrit comme si elle y était invitée, entra dans la pièce en roulant des hanches. Ce qui se passa à l'intérieur ? Des injures, quatre carreaux d'arbalette tirés, et un coup de pied dans le torse de Takezo qui lui brisa au moins deux côtes. Oh. Et la promesse que cet entrepôt allait finir dans un brasier énorme.

Restait à savoir si Elda avait allumé ses pétards pendant qu'elle était à l'intérieur...

Huntress, ayant laissé la porte ouverte, laissa à Oreza un bon spectacle auditif. Des injures italiennes, dont il était content de connaître la signification, le bruit de quatre carreaux sortant d'une arbalète, des cris d'agonie et un *PAF-CRAC!!* qui le laissa perplexe sur sa signification. Puis il entendit un murmure. Il entendit les mots "entrepôt" et "brasier". Il crut entendre aussi "pyromane" et "gaz". Il comprit aussitôt qu'il n'allait pas tarder à mettre ses bouteilles à la verticale. Quand Huntress redescendit, elle parut soulagée, pour une raison inconnue. Il eut le temps de lui dire :
"-Alors, la discrétion ? Heureusement qu'il n'y avait plus personne en bas. Moi j'ai tout entendu. J'ai même pu entendre de nouvelles injures. "Sala cagna" c'est quoi ?"
Huntress sortit, le regard noir fluo, et Oreza comprit qu'il allait pouvoir passer à l'action, la belle justicière qu'on croirait sortie d'un comic étant sortie. Il plaça ses bouteilles en diagonale, les 34 jets de gaz se regrouperont au centre, pensait-il. Il monta voir le spectacle. 4 gardes gisaient, un trait d'arbalète fiché dans le corps, et un type en costard-cravate gémissait de douleur en se tenant les côtes. Quand celui-ci aperçut Oreza, il fit :
"-Petit ! Je t'en prie, amène-moi à l'hôpital. Je suis monsieur Takezo. Je suis un homme important, tu sais ! Je pourrais te payer grandement !"
Le regard d'Oreza se durcit. Il s'approcha lentement de Takezo, dont le regard s'agrandissait d'espoir, et prononça cinq mots, le ton venimeux et cassant.
"-Tu as fait trois erreurs."
Le regard de Takezo montra qu'il était stupéfait et lui-même se décomposait. Il se recula autant qu'il pouvait, avant de tomber sur le dos d'un fauteuil cuir. Oreza lui envoya un coup de pied dans la mâchoire, tout en faisant attention à ce que Takezo reste conscient. Celui-ci hurlait, aucun souci. De plus, personne ne pouvait venir à ces hurlements, Oreza avait pris le soin de refermer la porte.
"-Primo, l'argent ne m'intéresse pas."
Il dégaina son katana et lui coupa la main. Takezo hurlait. Oreza, avec un air cruel, murmura qu'il fallait cautériser et lui brûla le moignon restant avec une petite bouteille.
"-Secundo, tu es tombé sur un des plus grands anti-mafieux. Elda Oreza, la bombonne de gaz ambulante, salaire même des pompiers de Seikusu. Je te connais bien, Takezo."
Finalement, il décida de trancher la tête de Takezo. Il arma son katana sous l'aisselle droite, l'envoya sur la droite, puis remonta et trancha en diagonale droite-bas. La coupure était nette. Pour les quelques secondes de vie restantes à Takezo, il lui dit :
"-Tertio, tu as froissé une jeune dame de ma connaissance. Et ca, c'est pire que tout."
Il s'en alla, allumant le premier étage avec 9 bouteilles de butane. Il descendit au rez-de-chaussée, ouvrit les 34 robinets, sortit craqua une allumette, et la jeta au centre des 34 bouteilles. Il courut, se retourna, et vit l'explosion.
"-Joli feu d'artifice. Je savais bien que la poudre serait marrante à utiliser."
Il marcha donc vers sa destinée, les mains dans les poches, le katana à la ceinture, les bouteilles de gaz très bien dissimulées.