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Le destin du sang

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Elore

E.S.P.er

Le destin du sang

vendredi 13 juin 2008, 22:21:30

Une goutte, Glacer le sang

Morte. Gran’Ma était morte. Comment cela avait-il pu arriver ? Et pourquoi ? Elle avait beau tenté de refouler ses larmes, rien ne pouvait apaiser son chagrin. Elle avait lu quelque part qu’avec tout changement, il y avait une conséquence. Jamais elle n’aurait imaginé que son existence-même causerait tout… Tout ça. Tout était de sa faute. Elle ne méritait ni le pardon, ni la pitié. Gran’Ma… Je te vengerai !

Yshan se réveilla. Elle était complètement en sueur. Les yeux grands ouverts, encore choquée par les images qu’elle venait de voir, la jeune fille tenta de se calmer. Il lui suffisait d’utiliser une des méthodes de méditation qu’on lui avait apprises. Son souffle se fit plus lent, plus profond, son cœur adopta un rythme de battements normal et elle sentit son corps se détendre. Parfait.
Le soleil perçait à travers les rideaux tirés de sa fenêtre. Un coup d’œil à l’horloge posée sur sa table de nuit confirma ses doutes : la journée était déjà bien avancée. Maugréant dans sa barbe inexistante, Yshan dut se lever, bien à regret. Comme tous les jours, elle fit son lit tranquillement tout en se regardant discrètement dans le miroir accroché en face d’elle.
Elle rencontra dans son reflet ses yeux pourpres. Longtemps, elle avait cru que c’était la plus belle couleur dont on puisse rêver, mais bien vite elle avait appris que ce n’était qu’un moyen en plus pour les repérer. Depuis peu, ses cheveux, auparavant d’un blanc pur, s’étaient noircis, conformément à la tradition. Pourtant, elle ne se souvenait pas d’avoir jamais vu quelqu’un avec des cheveux aussi noirs que les siens. Gran’Ma elle-même, avait les cheveux gris.
Gran’Ma… Son cauchemar lui revint en mémoire soudainement. Elle la revoyait encore, baignant dans son sang, étalé de son long dans la cuisine, des larmes striant son visage défiguré par l’horr… Non ! Ne pense plus à ça… Je risque de devenir parano si je continue. Ici, nous sommes bien cachés.
Yshan s’habilla et ouvrit en grand les rideaux de sa chambre. La pièce fut inondée de lumière. Les traits doux et délicats de la jeune fille rehaussaient ses yeux mauves si expressifs sous la caresse de l’astre. Pestant contre ses cheveux rebelles, elle entendit soudain un sifflement familier.
Descendant les escaliers quatre à quatre, luttant contre l’apesanteur, Yshan sortit en trombe de la maison pour tomber dans les bras de la vieille femme… Ce qui fit tomber tous les sacs que celle-ci tenait dans les mains.
— Y… YSHAN ! Regarde ce que tu as fait !... Yshan ?
— Gran… Gran’Ma…
Gran’Ma s’appelait ainsi depuis dix ans, depuis qu’elle l’avait recueillie. À cet époque, Yshan n’était âgée que de cinq ans, ainsi n’ayant connu que des vieux Valéens, elle avait pris la femme pour une grand-mère. D’où son nom à présent…
Gran’Ma devait avoir entre cinquante et soixante ans. Yshan le déduisait seulement des rides sur son visage, car rien d’autre dans sa posture ou son apparence ne donnait d’indices : son corps était mince et musclé, son dos droit et jamais elle ne se séparait de ses armes avec lesquelles elle s’entraînait tous les jours. Ses longs cheveux gris étaient parsemés de tresses et reposait sagement sur ses épaules. Yshan l’en avait toujours envié, possédant –selon son point de vue- les cheveux les plus indisciplinés de Manoa.
La « vieille » femme serra la jeune fille contre elle. Quelque chose n’allait pas. Il y a deux jours, Yshan avait eu quinze ans. Il faudrait bientôt qu’elle lui explique tout. À cette pensée, le cœur de Gran’Ma se serra.
— Que s’est-il passé, Yshan ? demanda-t-elle doucement.
Yshan secoua la tête. Comment pourrait-elle lui raconter ce qu’elle a vu ? Impossible, elle me prendrait pour une folle. Elle se contenta de la serrer plus fort.
Gran’Ma lui caressa les cheveux en soupirant. Puis elle la lâcha et ramassa les courses qu’Yshan avait fait tomber. Elle contempla un instant la jeune fille qui avait le menton tremblant. De quoi avait-elle si peur ?
Soudain, Yshan perdit sa petite moue effrayée pour acquérir un petit sourire sarcastique sur le visage. Elle vit les convictions de Gran’Ma s’effriter en quelques secondes. De sa voix la plus perfide, l’adolescente déclara :
— Avoue, tu y as cru pendant une minute…
Avec un amusement croissant, elle vit Gran’Ma lutter contre elle-même pour retenir un juron. Se tordant les mains, la vieille femme pointa un doigt accusateur derrière ses sacs.
— Toi… lui dit-elle d’un ton de rage contenue, si je t’attrape, tu passeras un très très mauvais quart d’heure.
Retenant une remarque ironique, Yshan eut un dernier sourire sardonique avant de laisser sa très chère Gran’Ma rentrer dans la cuisine. La faire tourner en bourrique constituait l’un des seuls plaisirs disponibles dans cette petite vallée tranquille portant le doux nom –ô combien haï par Yshan- de Rosemove. Tandis que Gran’Ma rangeait les courses, Yshan faisait la table, en « bonne-fille-polie-travailleuse », comme à son habitude. Cela éveilla pourtant la suspicion de la vieille femme. On ne la lui faisait plus, cela faisait dix ans qu’elle habitait avec… avec cette fille diabolique.
Méfiante, elle ne lui accorda pas un seul répit avant le petit-déjeuner (mieux valait éviter toute occasion à Yshan de placer un mot). À table, elles mangèrent en silence… pendant quelques minutes.
— Gran’Ma ?
— Mmmmh ?
Cette réponse n’avait rien d’engageant. Bien qu’une petite voix intérieure lui conseillait de se taire, Yshan, habituée au caractère exécrable de Gran’Ma, poursuivit, impavide.
— Aujourd’hui, il y a la fête de la Moisson à la place du village… J’aimerais y aller, s’il te plaît Gran’Ma.
— Non.
La réponse était tombée comme une enclume, au point même où Yshan eut le souffle coupé. Elle gémit sans s’en rendre compte. Elle se calma rapidement, reprit contenance et usa de ses nombreux atouts.
— Mais… Pourquoi ? demanda-t-elle d’une voix pleine de détresse.
— Parce que, rétorqua impitoyablement Gran’Ma, nous sommes des Illgaines, Yshan, ne l’aurais-tu pas oublié ?
Si cela avait été le cas, elle n’en montra rien. Illgain… Gran’Ma n’avait pas hésité à sortir le seul argument valable pour faire fléchir Yshan. En effet, depuis toute petite, Yshan  avait été éduquée dans les préceptes de la vie Illgaine, jusqu’à ce que la guerre décime son peuple et l’oblige à vivre caché. À Rosemove, beaucoup d’Illgains avaient pu trouver un abri : peu d’habitants du village avait des préjugés envers ce peuple totalement pacifique. Mais au fur et à mesure du temps, les Illgains s’étaient vus dénoncés par des mauvaises langues, tant et si bien qu’aujourd’hui seuls Yshan, Gran’Ma et Gem –un vieil ami de Gran’Ma-, habitaient encore dans la vallée. Si la menace d’être trahi ne leur pendait pas sous le nez, Gran’Ma aurait certainement accepté qu’Yshan aille à sa foutue fête, mais pas maintenant. Surtout qu’elle venait d’atteindre l’âge.
Yshan blêmit légèrement. Elle n’avait pas le choix. La jeune fille avait pensé que Gran’Ma n’oserait pas aller jusqu’à invoquer leur race pour la retenir ici. Maintenant, elle ne pourrait plus rien répondre.
— Bon… Alors j’irai aller cueillir les pommes. J’espère que tu feras une belle tarte pour te faire pardonner !
Elle avait perdu une bataille, mais pas la guerre ! Usant de son ton le plus plaintif, elle réussit à arracher la promesse à la vieille femme de trouver à son retour un dessert encore chaud. Yshan finit par quitter la table, la tête remplie d’audacieuses recettes et ses yeux mauves brillants d’anticipation.
Gran’Ma soupira. La mauvaise volonté d’Yshan n’avait d’égal que sa gourmandise. Et quand on savait qu’elle avalait trois bols de fraises sans sourciller… Elle entendit alors Yshan fredonner sur le chemin et l’imagina, un panier sous le bras, inconsciente de qui elle était vraiment.
Quand oseras-tu, vieille sorcière, à lui raconter la vérité ?
Certainement jamais…
, répondit une voix sournoise. Tu aimes trop cette vie pour l’abandonner.
Gran’Ma écarta ses pensées d’un mouvement de la main. Ça pouvait encore attendre. Elle allait laisser Yshan profiter de ses jours de paix qui lui manqueraient bientôt. La vieille femme soupira. La vie était bien cruelle.
Alors qu’elle préparait la farine et le lait pour la pâte, Gran’Ma entendit des pas dans l’allée, sur le petit chemin qui menait au refuge d’elle et Yshan. Méfiante, elle jeta un coup d’œil par la fenêtre avant de reconnaître la silhouette de Gem, ainsi que sa démarche traînante. L’Illgaine sortit pour accueillir son ami de longue date.
— Gem ! Ça fait longtemps que nous ne t’avons plus vu ! Entre, je prépare justement une tarte pour Yshan, tu mangeras bien un morceau avec nous.
— Yshan… répéta la voix grave de Gem.
Malgré ses cheveux gris coupés courts et sa stature râblée, Gem cachait une force hors du commun. Comme Gran’Ma, il s’entraînait tous les jours, faisant preuve d’une grande dextérité pour les armes. Les années avaient gravé dans son visage de profondes rides, mais toutes témoignaient d’une vie remplie de combats.
La vieille femme lui sourit.
— Oui, Yshan. Elle est partie cueillir des pommes… (Gran’Ma secoua la tête) Cette petite est vraiment incorrigible.
Gem resta silencieux. Gran’Ma était habituée : l’Illgain avait toujours été taciturne. Elle lui fit un signe et ils entrèrent tous les deux dans la cuisine-salle à manger- salle de séjour de la petite maison. Gran’Ma lui tourna le dos et mélangea les ingrédients pour la pâte. Alors que sa main incorporait d’un geste énergique le lait, elle demanda à son ami :
— Alors ? Quelles sont les nouvelles de Qwae ?
Qwae était le lieu de rassemblement des Illgains. Depuis la guerre, depuis que leur sublime ville avait été détruite par les Valéens, les Illgains avaient été chassés et tués sans aucune pitié par les vainqueurs de cette guerre absurde. Certains, comme Gran’Ma, Yshan et Gem, s’étaient réfugiés dans des villes ou villages en se faisant passer pour des simples Valéens, d’autres s’étaient groupés à Qwae et préparaient depuis bien longtemps leur vengeance.
Gran’Ma se demandait quand exigeraient-ils la présence d’Yshan.
— Aucune nouvelle, dit Gem d’un ton neutre.
— Tant mieux ! Ça me laisse encore quelques temps… Tu sais… Je ne te l’ai pas encore dit, mais la petite a passé le cap de la Couleur. Comme nous le pensions, c’est bien elle. Qwae demandera bientôt tous les enfants de son âge à l’appel. Je dois tout lui expliquer avant ce moment.
— Tu veux dire qu’elle ne sait pas encore qui elle est ? poursuivit l’homme.
— Non, je… je n’ai pas osé.
Gran’Ma commença à pétrir la pâte avec force. Elle semblait décharger toute sa frustration sur la malheureuse mixture.
— Parfait, commenta l’Illgain. Elle est donc inconsciente de ce qu’elle peut faire.
— Qu’est-ce que tu veux dire par l… ?!
— Adieu Frani… Tu n’es plus d’aucune utilité.
La vieille femme se retrouva avec un couteau dans les mains, comme s’il était apparu par magie, mais ne réagit pas assez vite. L’homme l’entourait déjà de ses bras. Ce ne fut qu’à ce moment que Frani, ou Gran’Ma, put apercevoir ses yeux noirs, dépourvus de pupille.
— Tu n’es pas Gem… Tu es un... !
Et elle sentit l’étreinte mortelle de son adversaire. Des larmes coulèrent de ses yeux.
Fuis… Fuis avant qu’il ne soit trop tard !

***

Yshan chantonna en ramassant sa dixième pomme. Depuis toujours, c’était ce qu’elle préférait. Chanter, pas ramasser des pommes… Avec orgueil, elle avait constaté que sa voix était plus douce et envoûtante que les autres et avait profité de ce don. Pourtant elle n’avait jamais chanté pour quelqu’un d’autre qu’elle-même, laissant sa timidité gagner la bataille. Elle se contentait donc de s’écouter chanter, à défaut de s’écouter parler.
Alors qu’elle apercevait sa onzième pomme, Yshan se remémora les paroles de Gran’Ma. Illgaine… Combien de fois avait-elle murmuré ce mot sur un ton une fois amer, une fois réjoui ? Elle ne se souvenait que très peu de l’âge d’Or Illgain. Après tout, elle n’y avait connu que cinq de ces années.
Les Illgains ont toujours été un peuple extrêmement pacifique. Ils vivaient dans une ville flottante dans les airs baptisée Illgae et y coulaient des jours tranquilles. Ils adoraient une divinité du nom de Kaäh, qui était la mère de toute chose et leur permettait de rester dans les airs. Ils passaient la plupart du temps à travailler, partageant tout dans une communauté assez restreinte.
On ne devenait adulte chez les Illgains que le jour où ses cheveux se coloraient. En effet, les bébés naissaient avec les cheveux blancs et, arrivé entre quinze et dix-sept ans, ceux-ci se coloraient durant une nuit, nuit que l’on appelait cap de la Couleur. Cette couleur révélait alors pour quelle vocation on était fait. Il n’existait dans ces gens qu’une très petite partie d’entre eux fait pour le combat. On les appelait les Tisseurs de Vent.
C’est pourquoi il y a dix ans, Illgae fut mise à feu et à sang en une seule nuit. Sans aucune raison, les Valéens détruisirent la ville et tuèrent bon nombre de ses habitants. Depuis, les Illgains fuyaient. Ils cachaient les cheveux blancs de leurs enfants, leurs yeux mauves qui ne verdissaient qu’avec l’âge et qui les trahissaient si facilement. Ils nourrirent peu à peu une haine pour un peuple à qui ils devaient tant de souffrance et de peur.
Les Valéens n’étaient pourtant pas de mauvaises personnes. Dépourvus de magie, ils brillaient dans la technologie et resplendissaient de richesse. Dirigés par un roi qu’ils adoraient, les Valéens passaient leurs journées à cultiver des champs. Beaucoup d’entre eux s’engageaient dans l’armée et protégeaient leur territoire avec une grande férocité. Ils constituaient le peuple le plus présent à Manoa et donc le plus dangereux. Quand leur roi mourut lors d’un assassinat, ils se déchaînèrent en recherchant son assassin. Il ne fallut pas longtemps pour que les Zaphiriens et les Illgains furent montrés du doigt et accusés. Ils n’étaient pas vraiment normaux après tout, et beaucoup moins nombreux… Des victimes toutes désignées. Ainsi les trois peuples connurent la guerre.
Les Zaphiriens, dernier peuple de Manoa, un peu plus nombreux que les Illgains, mais moins que les Valéens, étaient des guerriers réputés. Depuis leur enfance on les éduquait dans le respect d’un code d’honneur très strict et extrêmement difficile à suivre. Ils vivaient reclus dans les Hautes Montagnes Zaphiri et ne se mêlaient que rarement aux Valéens. On raconte que leurs mains seraient aussi dures que du diamant et qu’elles leur permettraient de grimper sans peine les Montagnes. C’est peut-être pour ça que depuis qu’ils ont perdu la guerre, ils sont chargés de récupérés des Pierres de feu qu’on ne retrouve que dans les versants rocheux du Trou du Démon…
Yshan songeait à cela, songeait à l’époque trouble durant laquelle elle était née. Elle bénissait et maudissait Gran’Ma de lui avoir tout appris sur les batailles qui s’étaient produites et toutes ses informations précieuses sur les autres peuples, même si elles n’étaient pas nombreuses. C’était mieux que rien, et elle lui servirait le jour où elle aurait à explorer Manoa.
Alors qu’elle formulait cette pensée, elle sentit ses muscles se raidir. Son souffle se coupa de lui-même. Elle fut prise d’un horrible pressentiment. Son sang était glacé. Une seule pensée lui venait à l’esprit : fuir.
La jeune fille lutta contre cette idée. Que se passait-il ? Ça ne lui était jamais arrivé avant… Elle ne savait pas pourquoi, mais elle avait l’impression de revivre son cauchemar. Quel était cet effroyable doute enserrant son cœur ? Elle se prit la tête entre les mains. Yshan sentait son crâne être criblé de milliers d’aiguilles. Sa bouche sa bouche s’ouvrit dans un cri douloureux.
Lorsqu’elle émergea de sa crise, elle se leva, les yeux encore brouillés de larmes et courut vers sa maison. La vitesse d’un Illgain était supérieure à celle de n’importe quel être vivant : leur métabolisme habitué au manque d’oxygène que leur imposait leur mode de vie à Illgae rendait la terre paradisiaque, améliorant leurs aptitudes physiques considérablement.
Dix minutes lui suffirent. Rien ne semblait avoir changé : la cheminée crachait de la fumée, les oiseaux chantaient… Yshan craignit un moment de s’être inquiéter pour rien. Elle calma les battements de son cœur et avança précautionneusement : se casser la figure ferait du plus mauvais effet devant Gran’Ma. Le souffle court, les joues rougies par l’effort, Yshan sentait ses jambes rappeler leur existence par une lancinante douleur. Voilà qui lui apprendrait à ne pas s’entraîner. Elle s’en voulut pour toutes les fois où elle s’était moqué de Gran’Ma et ses exercices quotidiens. À l’instant, elle aurait donné n’importe quoi pour oublier cet étirement de ses ligaments. La jeune fille serra les dents, roula les épaules et posa la main sur la porte.
Celle-ci glissa dans un grincement terrifiant. Yshan aurait pourtant juré l’avoir fermé avant de partir. Pas de panique, Gran’Ma devait l’avoir ouverte pour ne pas mourir de chaud dans la cuisine. Mais pourquoi pas une fenêtre ouverte ? Elle fit taire sa pensée pessimiste avant de s’engager dans le couloir. Les sens exacerbés, Yshan entendait les gnii, gnii habituels du plancher trois fois plus fort que d’habitude. Ce son, qui avait en temps normal un effet apaisant, faisait remonter à présent des frissons sur son échine.
— Gran’Ma ? demanda-t-elle, incertaine.
Ignorant les coups sourds retentissant dans ses oreilles, elle avançait vers la salle de séjour. Peut-être Gran’Ma préparait-elle la délicieuse pâte de sa tarte aux pommes, ainsi elle gronderait Yshan quand elle la verrait, les mains vides. Cette simple idée la fit sourire. Oui, elle réagirait vraiment comme ça, tout en se plaignant sur la paresse de l’adolescente. Elle n’avait qu’à passer la dernière porte pour en avoir le cœur net.
Sa main s’arrêta à quelques centimètres du bois.
Un bruit.
Elle avait entendu un bruit dans sa chambre.
Un rire nerveux dépassa ses lèvres. Je deviens complètement folle ! Elle secoua la tête. C’était sûrement l’effet de son imagination. Étrangement, une fois qu’elle le pensa, elle fut prise d’un mauvais pressentiment. Combien de livres avait-elle lu où, une fois cette formule exacte utilisée, un événement vraiment négatif se produisait ? Trop, beaucoup trop. Et ça ne lui plaisait pas.
Yshan prit son courage à deux mains et franchit le dernier rempart entre elle et la cuisine/salle de séjour/salle à manger. À première vue, personne n’y était.
— Gran’Ma, tu es là ? répéta-t-elle.
Seul le silence lui répondit. C’était à prévoir. Son inquiétude refit rapidement surface, mais fut coupé dans son élan par la vue d’une mixture étrange posée de l’autre côté de la table, sur le buffet : la pâte de sa tarte.
Le combat s’engagea.
La pâte avait l’air délicieuse, sucrée à souhait, mais d’un autre côté Gran’Ma était peut-être en difficulté…
Devoir ou Besoin ? Obligation ou Gourmandise ?
Il n’en fallut pas plus pour Yshan. Elle fit le tour de la table, salivant d’avance. Soudain, elle se figea, le visage à mi-chemin entre l’horreur et le dégoût. Comment… ?!
Elle se tenait là, affalée par terre. Sa gorge était mauve de son sang Illgain. Elle n’avait pas trouvé la paix dans la mort : son visage était transfiguré par l’horreur et quelques larmes avaient creusé de profonds sillons dans ses joues. Ce ne fut pas la douceur de la pâte qu’Yshan goûta, mais l’amertume de la douleur. Morte. Gran’Ma était morte.
Cette scène avait un goût de déjà-vu. Oui, Yshan était certaine d’avoir déjà vécu ce moment. Elle était incapable de se rappeler où et comment, incapable de réfléchir. Ses yeux brûlaient des larmes qu’elle tentait d’endiguer.
— Ô Kaäh !
— Il ne te servira à rien d’appeler un Dieu pour te protéger, Yshan.
La jeune fille se tourna en entendant la voix. Elle plissa les yeux pour essayer d’apercevoir la personne qui lui avait adressé la parole. La gorge nouée, elle reconnut Gem. Ou du moins, elle crut le reconnaître.
— Gem !? C’est toi Gem ? Gra… Gran’Ma ! Elle est…
— Morte, je sais…
Il avança quelques pas et laissa le soleil le détailler. Sa bouche était pourpre, salie par l’essence de Gran’Ma.
—… parce que c’est moi qui l’aie tuée, termina-t-il sur un ton neutre.
Dire qu’Yshan avait peur serait un mensonge. Yshan était terrorisée. Ses yeux s’étaient écarquillés et menaçaient de laisser la voie libre à son chagrin. Quand ils rencontrèrent les pupilles noires de l’être en face d’elle, l’adolescente fut hypnotisée. Elle était sensible à cet aura étrange qu’il dégageait.
Lorsqu’elle retrouva la voix, elle se sentit obligée de meubler ce pesant silence.
— Qui… Qui êtes-vous ? Vous n’êtes pas Gem, n’est-ce pas ?
— La question qui se pose réellement est : que suis-je ?
Elle fut étonnée par son ton remplie d’ironie. Quel genre de monstre était-il pour lui parler d’un ton badin alors qu’il venait de tuer sa Gran’Ma ? Yshan le fixa froidement. Elle n’allait pas se laisser faire.
— Quel terrible regard tu poses sur moi Yshan ! Je vois, tu es susceptible, n’est-ce pas ?
Elle sentit tout à coup une main caresser ses cheveux et son cou. Quand avait-il réussi à se mettre juste derrière elle ? Sa vitesse était semblable à celle des Illgains. Mais était-ce vraiment étonnant de la part de Gem ? Ou plutôt de celui qui le contrôle ?
—… J’adore ça ! (Il évita habilement le coup qu’elle tenta de lui asséner) J’aime beaucoup jouer avec toi, petit chaton, mais il est temps de partir rejoindre le Maître.
Petit… chaton ?!
Yshan esquiva inconsciemment la main du faux-Gem. Celui-ci fronça les sourcils, surpris de la vitesse de la jeune fille, avant de sourire. Elle recula de quelques pas en le fixant.
— Vous… vous n’avez pas répondu à ma question ! dit-elle au bord de l’hystérie.
Elle cherchait désespérément un moyen de sortir de l’habitation, de partir le plus loin possible. Cette homme lui faisait peur et à la fois la fascinait. Néanmoins en ce moment, la répulsion était plus forte. C’est pourquoi Yshan le faisait parler, tactique typique de la manipulation du premier degré, pour le détourner de ses objectifs actuels.
L’imposteur ne quittait pas son sourire. Il semblait amusé de la réaction de la jeune fille et jouait avec elle, tel le chat joue avec la souris. Il avait exactement le même regard gourmand que l’animal. Yshan sentit un frisson remontant sur sa colonne vertébrale.
— Aurais-tu peur Yshan ? Pourtant je ne suis qu’un humble serviteur au service de mon Maître, dit-il avec une fausse soumission.
Elle entendait le M majuscule de Maître. Ce n’était pas la première fois qu’il en parlait. Qui était donc cette personne ? Yshan continuait à reculer, bientôt son dos cogna le mur. La jeune fille mesura d’un regard discret la distance qui la séparait de la porte, de la sortie de secours, de la liberté… Il n’y avait que quelques pas à franchir, mais ils semblaient insurmontables à cet instant.
— Qui est donc ce « Maître » ? demanda-t-elle, poursuivant sa stratégie.
— Tu n’as pas besoin de le savoir pour l’instant… Mais tu peux le découvrir si tu viens avec moi…
— Ça… Jamais ! cria Yshan alors qu’elle courait à travers la pièce pour atteindre la porte.
Quelle ne fut pas sa surprise de ne pas voir son chemin barrer. Elle ouvrit la porte et sortit en trombe de la pièce, puis de la maison. Elle filait sur le chemin entre les champs, les poumons en feu tant l’effort la fatiguait. Bientôt, elle ne devint qu’un point pour la mystérieuse créature, restée au pas de la porte du logis. Celle-ci secoua doucement de la tête.
— Tss… Que lui trouve le Maître ? Mais maintenant qu’elle s’est enfuie, ça deviendra beaucoup plus intéressant… Yshan… Prouve-moi que tu es digne d’intérêt.
Et il éclata de rire ; rire qui avait l’air plein de funestes promesses. Puis il disparut, ne laissant derrière lui que de sombres changements qui bouleverseraient beaucoup d’autres vies.
Afin de me créer une vie, j'espionne celles des autres...
Mais ne dit-on pas que la folie consite à répéter inlassablement la même action, et à espérer que le résultat change ?

Elore

E.S.P.er

Re : Le destin du sang

Réponse 1 vendredi 13 juin 2008, 22:22:41

Voilà un de mes écrits...

Bon, évidemment il est toujours en cours d'écriture, mais c'est toujours intéressant d'écouter les avis...

Bref...  ;D Prête à écouter les commentaires et critiques ^^
Afin de me créer une vie, j'espionne celles des autres...
Mais ne dit-on pas que la folie consite à répéter inlassablement la même action, et à espérer que le résultat change ?

Don

Avatar d'Aphrodite

Re : Le destin du sang

Réponse 2 vendredi 13 juin 2008, 22:38:55

^^ Geinal, un bon texte, il me tarde de voir la suite, mais ça manque un peu d'espaces et d'alinéas non?Ca rendrais le tout plus visible. C'est un projet que tu viens de commencer?
Oh mon dieu vous avez vu l'heure?

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Elore

E.S.P.er

Re : Le destin du sang

Réponse 3 vendredi 13 juin 2008, 22:41:49

Yep.

Ben en fait, sur Word j'ai les alinéas... :-\

Je sais pas comment faire sur le fofo pour les alinéas... :P
Afin de me créer une vie, j'espionne celles des autres...
Mais ne dit-on pas que la folie consite à répéter inlassablement la même action, et à espérer que le résultat change ?

Don

Avatar d'Aphrodite

Re : Le destin du sang

Réponse 4 vendredi 13 juin 2008, 22:57:48

Erf :s alors là...Bah tant que tu les as mis sur word ça devrais aller alors!
Oh mon dieu vous avez vu l'heure?

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Engel Zwitter

Humain(e)

Re : Le destin du sang

Réponse 5 mercredi 30 juillet 2008, 16:47:56

Ah joli texte !!
Moi mon roman c'est un truc assez space...je vais peut-être le poster xD


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