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Créatures de mythes et légendes.

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Saïl Ursoë

Créature

Créatures de mythes et légendes.

lundi 27 avril 2009, 00:10:48

Ah, courir, galoper, bondir, ruer, il n’y avait que ça de vrai ! Entendre l’air siffler à ses oreilles comme la clameur bruissante d’une foule en délire congratulant un marathonien pour sa performance ; avoir conscience de chacun des muscles de ses grandes pattes s’activer comme les bielles d’une invincible machine que personne ne pourrait jamais arrêter ; sentir son cœur battre puissamment dans sa poitrine à la mesure des foulées qu’il exécutait, avalant les kilomètres sans que la fatigue se mît à poindre ; se moquer de la froideur ambiante qui trouvait un obstacle infranchissable dans l’épaisse fourrure qui le recouvrait ; se gargariser de toutes les odeurs qui entraient par le biais de l’enivrant oxygène dans ses narines frémissantes en des inspirations courtes et saccadées pour ressortir de sa grande gueule hérissée de crocs massifs et pointus sous forme de petits nuages qui semblaient les panaches de fumée d’un train lancé à travers la jungle locale, véritable engin infernal.
, quelle belle proie que son museau avait perçue ! Décidément, l’odorat dont il était doté ne cesserait jamais de le surprendre tant il pouvait s’avérer d’une performance hors norme : en l’occurrence, rien qu’une poignée de phéromones lui apprit qu’il y avait un mammifère male de belle taille, probablement quadrupède, qui se trouvait à à peine quelques dizaines de mètres de sa position actuelle. Le scientifique qu’il restait aurait bien voulu pouvoir mettre un nom sur les diverses espèces qu’il avait rencontrées jusqu’ici au cours de ses pérégrinations nocturnes, mais telle entreprise lui était très vite apparue comme vaine et dénuée de toute pertinence : les contrées du Chaos portaient bien leur nom, étant peuplées d’une faune aussi bizarre que variée, aucune espèce ne semblant ressembler à une autre tant les mutations qu’elles subissaient apparemment de manière permanente en ces lieux chamboulaient le biotope pour lui donner des formes aussi incongrues que grandioses. Bien souvent, Saïl ne pouvait s’empêcher de se demander si une telle étrangeté ne résidait pas tout simplement dans une sorte d’intervention à échelle divine plutôt que dans des causes à proprement parler naturelles… mais au fond cela n’avait sans doute que peu d’importance tant cela était du domaine de la théorie. De toute façon, Khral s’en moquait bien lui, et en ce moment, cet homme-loup qui chassait était un traqueur et non un savant, aussi se moquait-il bien du nom de ce qui mourrait sous ses coups du moment que c’était bon et consistant.

Mais allons, retour à l’action ! Il était d’instinct un chasseur émérite, et en freinant l’allure suffisamment tôt pour progresser sans bruit sous le vent et à couvert, il aurait pu bondir en toute furtivité sur sa proie pour lui sauter à la gorge et ainsi l’abattre proprement, mais l’adrénaline que sa course effrénée l’avait fait sécréter l’avait mis dans un tel était qu’une manœuvre aussi fastidieuse lui apparut comme beaucoup trop barbante et lente pour qu’il concédât à l’appliquer, de sorte qu’il préféra poursuivre sur sa lancée à haute vitesse pour culbuter l’animal sans autre cérémonie. En toute logique, la bête tenta une fuite précipitée dès qu’elle s’aperçut qu’une masse de près d’un quintal et demi la chargeait, mais elle n’eut qu’à peine le temps de prendre de la vitesse avant que les griffes mortifères qui scintillèrent un instant sous la lumière nocturne ne la cinglassent au ventre, labourant ses chairs si impitoyablement qu’elle passa en quelques secondes de vie à trépas avec une expression hagarde sur son visage, à la plus grande satisfaction du loup-garou dont l’estomac réclamait depuis quelques bonnes minutes déjà de la viande fraîche et abondante.
Le quadrupède tué ressemblait à une espèce de croisement entre un cerf et un yak, tenant du premier sa silhouette élancée et ses bois hardis, et du second sa toison laineuse d’une épaisseur étonnante qui ne laissait qu’à peine voir sa peau, et que son sang rouge et épais tachait déjà à gros bouillons. Raison de plus pour se mettre aussitôt à table, impératif auquel Khral obéit joyeusement, se jetant sur sa récompense pour fouailler dans ses entrailles toutes juteuses de fluide vital et s’en délecter sans retenue, se gorgeant de protéines avec des bruits de succion et de mastication peu ragoûtants. La bonne chère que voilà ! L’humain n’avait jamais eu qu’un appétit assez peu prononcé pour la viande, mais le loup en raffolait tellement que c’était une de ses plus grandes joies simples que de pouvoir se bâfrer comme il le faisait en ce moment même sans avoir à se soucier d’aucune marque de décorum et sans avoir d’autre souci que de combler son grand estomac de chair de bonne qualité.

Bien sûr, les premières fois qu’il s’était laissé aller à ripailler de la sorte, Saïl avait eu honte, percevant de tels actes comme une infâme barbarie, mais au fur et à mesure, plutôt que de s’efforcer d’agir avec plus de retenue, il s’était accordé une conduite moins civilisée lorsqu’il allait se nourrir : après tout, cela faisait simplement partie de ce système circulaire connu de tous sous le nom de chaîne alimentaire, et à tout prendre, mieux valait qu’il déchaînât ses pulsions sur des victimes animales que sur des êtres qu’il aurait été beaucoup plus irréparable de blesser, voire de tuer. C’était en quelque sorte son moment de défoulement ; l’un des rares où il se permettait de ne pas agir avec le plus grand sens de la mesure et la plus grande circonspection afin de ne pas se départir de sa part résolument humaine qu’il voulait faire de son mieux pour conserver. On ne lutte pas contre sa nature, comme on dit, aussi mieux valait lâcher la vapeur un bon coup de temps en temps plutôt que de laisser de mauvaises humeurs bouillir dans son foie et les voir un jour ressortir violemment en une explosion de colère qu’il aurait été bien en peine d’endiguer.
Une fois qu’il eut fini de festoyer, ne laissant pas grand-chose d’autre de son plat de résistance que quelques morceaux de chair, des os pour la plupart brisés et évidemment un gros tas de poils qu’il se promit de ramener chez lui pour en faire bon usage, il s’assit avec un grognement de satisfaction qu’il ponctua d’une éructation sonore puis se saisit d’un morceau de squelette suffisamment pointu pour se nettoyer les interstices de sa mâchoire. Bien sûr, ses griffes auraient pu très facilement remplir pareil office, mais c’était une rémanence de ses manières d’humain que de faire le plus souvent usage d’un cure-dent pour un nettoyage de ce genre. Ainsi, dans les ténèbres de l’épaisse forêt que venaient à peine éclairer un croissant de lune si étroit qu’il paraissait les prémices du sourire torve du chat du Cheshir ; alors que se faisait très légèrement entendre le faible crissement de l’ustensile de fortune de Khral, ce fut ce moment de répit qu’il choisit pour faire le point sur sa situation.

Celle-ci était bonne à dire vrai : il avait eu comme but premier en s’aventurant dans ces lointaines frondaisons d’obtenir quelques plantes diverses pour la confection de l’Humanis Simplex, et même s’il n’avait pas pu en récolter autant qu’il aurait pu l’espérer, il avait tout de même pu faire l’acquisition d’herbes fort utiles, notamment une bonne quantité d’une graminée qui ferait certainement un catalyseur de la plus grande utilité ! Tout cela était désormais entreposé sur lui, car comme le port d’un sac de quelque type qu’il fût l’irritait désagréablement, il avait cousu avec mille précautions des poches de cuir dans l’intérieur de son pagne, ce qui lui donnait ainsi la possibilité d’emmagasiner ses trouvailles sans s’encombrer inutilement.
Oui, véritablement, les activités du jour auraient difficilement pu être qualifiées d’infructueuses, et Saïl pouvait à bon droit conclure d’aujourd’hui quela journée s'tait très bien passée… enfin il ne fallait jurer de rien, car la soirée, elle, n’était pas encore finie, et il avait appris à ses dépens qu’affirmer pareille chose pouvait porter malheur ! Ce fut avec un grondement de déplaisir qu’il remua l’épaule au souvenir d’une de ses mésaventures les plus récentes et resserra brusquement les mâchoires, cassant sans peine l’os en deux dont il broya les morceaux dans sa bouche avant de les recracher contre un tronc proche dont ils percutèrent l’écorce avec un bruit crépitant.
Bon, mieux valait se détendre quelques minutes le temps de digérer plutôt que de remuer de déplaisantes remembrances : le plus confortablement possible, l’homme-loup se cala le dos contre un arbre derrière lui et se mit en position semi allongée, léchant paisiblement ses mains encore sanglantes en des coups de langue automatiques, détendant ses muscles. Laissant le soin à son ouïe et à son odorat de détecter une éventuelle menace en approche, son regard se perdit dans le vague, signe que son imagination s’envolait vers on ne pouvait trop savoir quelles rêveries. Il prenait soin de ne pas s’endormir, réservant cela à son retour à sa tanière sécurisante plutôt qu’à ses bois potentiellement hostiles, mais s’accordait un petit temps de repos en attendant que la fatigue du chemin parcouru disparût, après quoi il ferait certainement demi-tour pour la maison.

Certes, cela supposait qu’il pourrait repartir comme il était venu sans encombres, et une sorte de sixième sens lui soufflait que cela n’allait pas être aussi simple qu’il se le figurait mais il repoussa ces indicibles tiraillements de mauvais augure, préférant ne pas se laisser aller à penser voir surgir de chaque feuille cent dangers mortels. Si péril il y avait réellement, il y réagirait comme il faudrait allons !
Et pourtant, la sensation persistait avec une insistance perturbante.
« Modifié: lundi 04 mai 2009, 19:25:51 par Saïl Ursoë »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Kira

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 1 lundi 27 avril 2009, 12:56:05

La soif, l’impitoyable soif titillait toujours sa gorge, et chaque parcelle de son être par la même occasion. Cela faisait des jours qu’elle ne se nourrissait plus que d’animaux au goût bizarre, sûrement dû aux modifications génétiques qui avaient eu lieu dans le corps de la proie qu’elle s’était choisie. Le liquide rouge dont elle se gorgeait lui apportait une meilleure source d’énergie que les autres mais il y avait des répercussions sur son organisme, qui devenait plus puissant mais aussi incontrôlable à certains moments. Là, par exemple, après avoir vidé de son sang une sorte de félin avec des allures de loup, elle se retrouva dans une forme proche de celle d’un tigre. Son pelage, cependant, était aussi sombre que la nuit qui l’entourait et qu’elle fendait à une vitesse étonnante, vestige du vampire qu’elle devrait normalement être. Ses prunelles étaient d’un rouge vif et ses pupilles étaient fendues. Son monde n’était pas de couleur mais de sang : elle percevait chaque pulsation de chaque cœur qui l’entourait. Bien sûr, elle ne se prenait pas les arbres, percevant la sève de ce dernier couler en lui. On ne se doute pas, au premier abord, qu’un arbre fonctionne de la même manière qu’un humain, mais c’est à peu près la même chose. Quoi qu’il en soit, sa nouvelle vision ne déplaisait pas à Kira, qui pouvait trouver d’autant plus facilement les endroits où le sang affluait. Généralement, c’était à la gorge, ce qui la réjouissait. La peau du ventre et celle de la gorge étaient très fines et lui permettait de planter très facilement ses crocs ou ses griffes dedans afin de l’arracher.

Ses pattes étaient puissantes, elle en avait conscience. D’un seul bond, elle pouvait parcourir plusieurs mètres. Ses muscles étaient saillants et vibraient constamment, l’empêchant de rester en place. Mais elle s’en fichait. Son dernier repas, remontant à quelques heures, l’avait largement remplie et elle se sentait bien, vivante. Les autres créatures fuyaient quand elle prenait la direction de l’endroit où ils se cachaient, même s’ils n’avaient plus rien à craindre pour leur sang. Ils avaient raison, après tout. La vampire avait toujours ses pulsions sadiques et il lui était facile de démembre n’importe quel chose se mettant sur son passage uniquement pour s’amuser. Mais elle devrait s’arrêter, et son nouveau corps ne le lui permettait pas… Donc, elle courait, sautait sur tous les arbres assez hauts pour lui permettre de leur monter dessus sans les briser et de là, sautait à nouveau, le plus haut possible, dans le ciel étoilé. On ne voyait qu’une ombre, qui redescendait toujours avec un animal volant entre ses crocs. Elle ne ratait jamais son coup… Soudain, elle s’arrêta, poussant un grognement. La douleur reprenait, plus forte que la première fois… Qu’allait-il encore lui arriver ? Avec une sorte de crainte mêlée de curiosité, elle vit ses pattes devenir des mains humaines, blanches et fines, puis son bras suivit, et son corps de même. Marchant avec peine, elle se traîna jusqu’à une sorte de lac. Elle avait entendu l’eau grâce à son ouïe surdéveloppée. Regardant son reflet, elle eu un petit rire. Elle avait eu peur pour rien. Ce qu’elle avait sous les yeux était l’image de son état vampirique normal.

Soulagée d’être enfin redevenue celle qu’elle était avant d’avoir stupidement bu le sang d’une créature qu’elle ne pouvait pas nommer, elle se releva. S’étirant avec plaisir, Kira constata qu’il lui était désormais plus simple de réfléchir. Sa vue était comme avant, elle n’avait plus à se concentrer sur ce qu’elle voyait pour lui donner une signification. Donc, une part de son esprit était libre, l’autre était quelque peu endormi car il ne servait que lorsqu’il y avait une proie en face d’elle. Sa nature de prédatrice… Ravie, elle se cambra, sentant l’air fouetter sa peau. Comme d’habitude, il était chaud puisque sa chaleur corporelle frôlait le zéro absolu. Elle avait dû dépenser plus d’énergie, par là même de sang, qu’elle ne l’aurait crû, en gambadant de la sorte. Il lui fallait encore chasser. La vampire soupira, mais se mit à courir à la même vitesse hallucinante qu’avant. Tandis qu’elle voyageait de la sorte, elle croisait des proies et les classait. Une sorte de lapin. Oh non, elle ne voulait pas se retrouver affublée d’oreilles trop longues et d’une queue en forme de pompon. Quelque chose qui aurait pu se confondre avec une fourmi, s’il n’avait pas mesuré dans les quatre mètres de long. Horrible, tout bonnement horrible. De plus, son sang était épais et poisseux, elle le sentait couler difficilement.

Finalement, au loin, elle sentit un cœur battre puissamment. Elle sourit, dévoilant ses crocs, longs et tranchants. Son rythme de croisière s’accéléra. Elle le sentait, même, tellement elle se concentrait sur lui. Il n’y avait plus rien d’autre que ce cœur, qui faisait circuler un bon sang, ni trop liquide ni trop épais, juste comme elle les aimait. De plus, il y avait quelque chose d’autre. Elle connaissait la créature. C’était un loup, un loup bien normal. Du moins à première vue. Après, vu les choses qu’on trouvait ici, ce n’était pas sûr. Mais au moins, le sang qui coulait dans ses veines ne risquait pas de la transformer en loup. Au bout de quelques minutes, elle remarqua qu’il ne bougeait pas, puisque les pulsations étaient toujours situées au même endroit. Cependant, il était tendu. Il devait lui aussi l’avoir sentie. Son rythme cardiaque était trop élevé, transportant assez de sang dans tout son organisme pour lui permettre de se préparer à une rude bataille. Était-il vraiment un loup ? Normalement, il aurait dû fuir, elle l’aurait poursuivi et lui se serait fait tuer dans un coup de mâchoire puissant qui aurait brisé sa colonne vertébrale. Au lieu de ça, il semblait même lui faire face et l’attendre.

Au bout d’un moment, elle arriva dans la clairière où il se trouvait. Entre ses pattes, un corps –ou du moins ce qu’il en restait- couvert de sang et d’os. Ou plutôt, un corps essentiellement composé de poils, de sang recouvrant les poils et de bouts d’os. Il était vraiment puissant, lui aussi. Elle s’arrêta donc. Plantant son regard de braise –au sens propre du terme- dans le sien, elle constata qu’il la fixait avec intelligence. Un loup pourrait-il avec des yeux comme cela ? Elle en doutait. Il était plutôt du genre grand et massif. Une vraie brute. Enfin, pas pour elle, mais pour un humain normal, si. Kira retroussa ses lèvres sur ses crocs, pour les mettre bien en évidence. Elle n’avait plus tellement envie de s’attaquer à un truc du genre, mais si jamais il se sentait menacé, lui n’hésiterait peut-être pas. De sa voix envoûtante, la créature des ténèbres chuchota :


-   Gentil chien… Tu veux une baballe, peut-être ?

Elle n’avait pas peur de parler ainsi. Si la créature était vraiment intelligente, elle comprendrait ce qui signifiaient ces paroles et se froisserait. Si elle ne l’était pas et que Kira s’était trompée, elle ne ferait rien qui montrerait qu’elle avait compris. Son plan était simple : Si c’était un simple loup, elle le tuerait sur le champ. Si c’était plus que ça, elle mettrait au point une sratégie.



La brûlure de la glace, la solitude éternelle, le poids de l'immortalité... Un vampire

Saïl Ursoë

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 2 lundi 27 avril 2009, 14:30:56

Un froissement dans l’air, si feutré qu’il se confondait admirablement dans le bruissement que le vent produisait au contact de la végétation environnante, mais que l’esprit alerte de Khral se refusa instinctivement à assimiler à des causes naturelles… si l’on pouvait donner un tel qualificatif à ce qui était monnaie courante en ces bois surréalistes. Il avait l’intuition que quoi que ce fût qui approchait ne le faisait sciemment pas avec discrétion, mais cela n’empêchait pas la progression de la créature de se faire si imperceptiblement que même les sens affûtés de l’homme-loup ne purent la repérer qu’au dernier moment, avant qu’elle parût dans toute sa splendeur à l’embouchure de la clairière où il se reposait. Et au moment même où la première parcelle de l’étoffe dont elle était vêtue se découpa dans les ténèbres ambiante, il sentit les poils de son échine se hérisser comme pour murmurer muettement avec une crainte alerte : « La voilà ! ». Oui, c’était bien cet… être qui avait perturbé sa tranquillité ; c’était bien cela dont ses perceptions extrasensorielles avaient tâché de l’avertir, il en avait la certitude absolue maintenant qu’il se trouvait devant le fait accompli, et si assuré de sa puissance qu’il fût, il se doutait qu’il n’avait pas là affaire à du menu fretin, et se décida par conséquent à cesser de rêvasser pour mieux se concentrer sur l’humanoïde qui approchait à pas aussi assurés et mesurés que ceux d’une geisha impériale faisant son apparition au milieu d’une cour médusée.
La comparaison était particulièrement bien choisie si l’on faisait le rapprochement avec la vêture de la nouvelle venue : un kimono dont la facture était d’une qualité qui n’avait rien à envier à celle de vêtements de défilés de mode (du moins d’autant que pouvait en juger Saïl qui était tout sauf coutumier de ce genre d’exhibitions), et dont les teintes se mariaient étonnamment bien de par ses coloris sombres qui faisaient ton sur ton avec la noirceur que l’heure tardive avait fait acquérir à la forêt. A ajouter à cela un masque de tête de chat rabattu sur le côté auquel la décoration donnait un air matois et roublard, et dont les yeux en fentes paraissaient guetter les alentours de sa propriétaire : en vérité, avec un tel ornement, et en prenant en compte la furtivité naturelle de la dame, on aurait pu la croire tout droit sortie d’une représentation de nô. En ce qui concernait la personne elle-même, elle était superbe à n’en pas douter ; tout à fait le genre de beauté que l’on peut trouver représentée sur des estampes japonaises, mais une beauté de glace de par la blancheur surnaturelle de sa peau autant que par l’expression dénuée de toute chaleur qu’elle arborait, la froideur qu’elle dégageait semblant en réalité refroidir l’atmosphère même. Le loup-garou n’était pas du genre à se faire des films ou à s’inquiéter pour rien, mais il avait la certitude qu’il ne s’agissait en aucun cas d’une humaine normale : même en mettant de côté ses traits plutôt extravagants pour le commun des mortels, il émanait d’elle une aura qui la classifiait sans l’ombre d’un doute parmi les créatures surnaturelles et qui donnait à Khral l’envie de retrousser ses babines pour laisser apercevoir ses crocs en un rictus féroce ponctué d’un grondement menaçant, voire de bondir sur ses pattes pour sauter à la gorge de cette intruse qui le mettait si étrangement mal à l’aise. Cependant, il n’en fit rien, tenant fermement la bride de ses velléités le temps de voir au moins quelles seraient ses intentions et si elle pouvait représenter un réel danger.

Ainsi, en attendant, il la fixa le plus placidement qu’il lui était possible de ses yeux noisettes qui n’avaient rien perdu de ce pétillement puissant d’intelligence propre au savant qu’il avait été, et on peut dire qu’il ne fut pas déçu du voyage : non pas qu’il eût grand-chose d’un chasseur de têtes, mais dans toute son existence, il avait rarement croisé un regard d’une telle intensité. Oh, bien sûr, cela ne voulait pas dire que d’autres personnes paraissaient inexpressives en comparaison, mais le fait était que cette inconnue avait littéralement un regard de braise, deux perles de lave en fusion flamboyante semblant incrustés dans ses orbites en lieu et place de globes oculaires. Il n’aurait pas su dire si l’impression que cela lui faisait était positive ou négative, mais il était sûr que cela le marquait… et ce qui le marqua encore plus fut le ravissant râtelier de dents que la donzelle possédait, et dont les canines n’avaient rien à envier à Dracula lui-même.

(Un Corps-froid !)


L’appréciation était un peu simpliste, mais elle ne manquait pas de bon sens, et rendait au fond plutôt bien ce qu’était cette jeune femme surgie de nulle-part : une vampire ! Comme tout bon érudit, Saïl s’était occasionnellement penché sur le mythe de ces effrayants morts-vivants au cœur réputé plus froid que la pierre et au charme digne des aristocrates les plus maniérés, buveurs de sang, ennemis du jour, rôdeurs noctambules indétectables… bref, chacun aura compris ce dont il est question. L’idée de se retrouver face à une entité légendaire d’un tel calibre aurait pu lui donner des sueurs froides, mais en réalité, il était davantage intrigué, voire fasciné, qu’autre chose, son esprit scientifique analysant par des coups d’œil semblables à des clichés d’appareil photographique chaque parcelle visible du corps de cette étonnante rencontre, se demandant bien comment un être à la constitution si exceptionnelle pouvait fonctionner et quelle pouvait être sa mentalité.
En tout cas, pour cette dernière, elle avait quelque chose de retors et de hautain que son attitude altière laissait supposer, et que ses paroles moqueuses vinrent confirmer. Encore une fois, les poils de l’homme-loup se hérissèrent, mais il contint la pointe de colère que cette pique avait fait naître en lui, se disant qu’il aurait été prématuré de jouer de la griffe et du croc alors qu’ils commençaient tout juste à faire connaissance. De plus, si la partie humaine était intéressée, la partie loup se sentait pour sa part joueuse : il avait eu son content de chair lacérée, d’os brisés et de sang versé, et un déchaînement de violence lui apparaissait désormais comme superflu. Pourquoi vouloir de battre tout de go contre cette vampire alors qu’elle était la promesse d’un divertissement si enrichissant ? N’oublions pas également que, pour parler simplement, Khral ne se prenait à bon droit pas pour de la merde : sa robustesse et sa puissance naturelle ne lui avaient jusqu’ici jamais fait défaut, la preuve en étant qu’il était toujours en un seul morceau et aussi opérationnel qu’à son premier jour vécu sur Terra… et même davantage encore, ses mois passés à mener la vie rude qui était le lot de tous les habitants des contrées du Chaos lui ayant forgé la mentalité, les réflexes, les habitudes et les comportements propres à survivre bien et longtemps.

En l’occurrence, il ne se montrait peut-être pas très prudent à conserver la même posture insouciante que celle dans laquelle la suceuse de sang l’avait trouvé, mais il considérait qu’il pouvait bien s’accorder une certaine marge d’erreur ne fut-ce que pour pimenter la situation. De toute manière, si besoin était, il saurait réagir aussi vite qu’il le faudrait, se sachant capable de jaillir aussi vivement qu’un ressort si la nécessité se faisait d’aventure sentir. Naturellement, il n’avait jamais eu à se frotter à un vampire, et ses connaissances restaient de l’ordre théorique, mais après tout, leur mentalité ne devait pas être si éloignée que ça de celle d’un humain, et il se concevait de toute manière sur un pied d’égalité avec elle à tout moins : elle était un vampire ? Hé bien il était bien ce qu’on pouvait appeler un loup-garou, et elle se mettait le doigt dans l’œil si elle espérait le voir réagir avec l’intelligence et la présence d’esprit d’un clébard mal dégrossi ! Il songea un moment à prendre au pied de la lettre ce qu’elle venait de lui décocher, mais choisit plutôt de ne pas jouer à l’imbécile et de montrer qu’il pouvait suivre la danse et faire preuve de répartie :

« Ça dépend de la « baballe » »
Dit-il d’un ton quelque peu pensif et mutin avec un sourire affable qui rendait étrangement sur son faciès animal, ponctué d’un léger haussement d’épaules. « Qu’est-ce que tu proposes moustique ? »
« Modifié: lundi 04 mai 2009, 19:47:41 par Saïl Ursoë »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Kira

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 3 lundi 27 avril 2009, 20:40:55

La vampire pouvait voir que son ennemi naturel –après tout, c’est ce qu’étaient les vampires et les loups-garous- avait ses poils qui se hérissaient à son approche, ce qui l’amusait au plus haut point. Sous son pelage, elle pouvait voir des muscles épais et dangereux, et le simple fait de savoir qu’elle lui faisait au moins un peu peur la réjouissait. Elle n’avait pas l’habitude de s’affronter à des créatures qui lui faisaient face et semblaient même l’attendre, d’ordinaire elle voyait plutôt le dos de ses victimes. Mais elle n’était pas une grosse brute qui craint ceux qui osent s’attaquer à elle, au contraire, la partie ne serait que plus intéressante. Cette fois-ci, elle allait peut-être voir si elle avait du talent au corps à corps. Peut-être. Car elle préférait éviter de s’attaquer à quelque chose qu’elle ne connaissait pas, et n’agirait que si ladite chose la chargeait. Ce qui semblait peu probable, vu qu’elle se tenait tranquille et se contentait de la regarder. D’ailleurs, elle remarqua qu’il la fixait comme un scientifique fixait ses expérimentations, avec un intérêt purement objectif. Il ne voulait pas la tuer mais l’observer, comprendre comment elle fonctionnait. Ce qui la fit sourire. Elle se savait attirante pour n’importe quel humain, cela allait de soi. Ses longs cheveux noirs et brillants, ses formes agréables à regarder et sa beauté froide et malsaine faisaient d’elle une sorte de déesse aux yeux des pauvres humains qui passaient pas là et se laissaient séduire avant de lui donner gentiment leur sang en échange de plaisir, si ils avaient été gentils, de douleur infinie si ils s’étaient montrés peu coopératifs.

Le loup qui lui faisait face sembla mal prendre sa pique, mais il n’en montra rien. Son regard brillait d’une intelligence peu commune, ce qui la surprenait toujours autant. Elle se demandait toujours qui il était vraiment. Ou plutôt, ce qu’il était vraiment. Un animal, ou bien un humain avec une apparence animale ? Ou peut-être même un dieu qui avait prit une apparence animale pour tromper son monde et s’amuser, comme le racontaient les légendes ? Quoi qu’il en soit, la créature parla. Sa voix ne ressemblait pas à un grondement, comme Kira s’y attendait, mais à une voix plus douce et humaine que celles des grosses brutes qu’elle avait auparavant côtoyées. Il lui lança une répartie qui la fit sourire. Cependant, il sourit, lui aussi, et alla même jusqu’à hausser les épaules pour lui montrer son côté humain. La vampire fit un pas en avant, captivée par la bête qui la regarda, toujours en souriant. L’effet était plutôt bizarre. Enfin, voir un canidé sourire, ça l’était déjà. Mais voir un canidé sourire, hausser les épaules et tenter de te casser, c’était pire. Kira réfléchit un quart de seconde puis se dit que de toute façon, elle n’avait rien à perdre. Avec une vitesse surhumaine, elle disparut du champ de vision du loup, pour y réapparaître une seconde plus tard, armée d’un crâne de ce qui aurait été autrefois un lapin mutant. Son sourire sadique ne la quittait pas. Avec joie, elle lança la tête décapitée au loin, puis lança :


-   Tu vas la chercher ?

Elle aurait voulu rajouter que si il ne le faisait pas, c’était la sienne qui lui servirait de prochaine jeu, mais se tu. Il n’avait pas l’air menaçant, autant rester dans cette situation. Elle ne s’était pas vexée pour l’appellation « moustique », d’habitude on lui faisait pire. Genre la tique. Mais bon, la personne qui l’appelait comme ça voyait généralement son espérance de vie descendre d’une façon tragique. La vampire se fichait totalement de l’heure qu’il était, ce qui pouvait étonner un observateur extérieur, les vampires ayant pour habitude de craindre le lever du soleil. Kira aurait juste à changer son masque de position et à le mettre devant ses yeux, la conversation pouvait donc durer très longtemps.



La brûlure de la glace, la solitude éternelle, le poids de l'immortalité... Un vampire

Saïl Ursoë

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 4 lundi 27 avril 2009, 22:02:50

Quelle représentation ! Le nô avait été précédemment évoqué, et en vérité, la situation avait comme une résonance de ce genre de par l’atmosphère typiquement théâtrale : après un prologue de chasse, le rideau –rouge comme certaines parties du kimono de la vampire- s’était levé sur le premier acte les représentant tous deux, se jaugeant et s’estimant mutuellement. Aucun ne méprisait l’autre ou, en tout cas, si elle ressentait du dédain pour lui, elle ne commettait manifestement pas l’erreur de le prendre pour une bête sans cervelle comme le prouvait sa démarche prudente, son air réfléchi et son maintien alerte en dépit de la nonchalance qu’elle affectait par son sourire et ses manières suffisantes, tout comme Saïl d’ailleurs se prêtait au jeu d’une espèce de rendez-vous pseudo-mondain. Malgré cela, ils étaient tout aussi conscients l’un que l’autre de la puissance qui bouillonnant dans le corps de l’être auquel ils faisaient face, de la violence qu’il était certainement capable de déchaîner : créatures mythiques, leurs essences paraissaient crépiter dans l’air nocturne, prêtes à s’embraser au moindre faux mouvement. Jusqu’ici, il n’en était rien, chacun maintenant sagement une distance de sécurité, mais il avait comme l’intuition que cela n’était que les préliminaires à quelque chose de beaucoup moins gentillet que des échanges de répliques : tout comme deux bretteurs donnent quelques coups dans le vide et frôlent la pointe de l’arme de leur adversaire de la leur, ils s’entre-tâtaient le pouls avec circonspection pour voir ce qu’il était de cette rencontre inattendue.
Lorsqu’il la sentit amorcer un mouvement de course, Khral s’apprêta à se remettre sur pied en vitesse, mais en voyant qu’elle ne semblait pas l’avoir pris pour cible de sa charge soudaine, il ne bougea en fin de compte pas, conservant la même posture relaxée que jusqu’ici dans l’attente de ce qu’elle pouvait bien avoir en tête. Et à propos de tête, il s’avéra que la dame à la peau blanche ne déméritait nullement niveau chasse lorsqu’elle reparut en un clin d’œil, brandissant celle de ce qui aurait pu être un lapin ordinaire si son profil n’avait pas été aussi anormalement élancé, signe d’une morphologie faite pour la vitesse. De fait, ces bestioles pouvaient galoper incroyablement vite en cas de danger, et malgré cela, la diablesse en avait occis une en un temps record, ce qui donnait un aperçu suffisamment éloquent de ce qu’elle savait faire niveau capacités de combat. Décidément, elle était tout ce qu’il y avait de plus intéressante comme partenaire de jeu, et même s’il n’avait pas forcément envie de se battre, le loup-garou n’aurait pas été contre un bon corps à corps avec elle, et ce pas uniquement dans un contexte purement guerrier !

(Héla, du calme, canaille !)


Décidément, son tempérament animal souvent trop sanguin à son goût se voyait exacerbé au cœur de la nuit, tout juste après une bonne partie de chasse. Il allait falloir veiller à ce que le loup ne l’emportât pas trop sur l’humain de manière à ce que son attitude ne donnât pas des résultats dommageables : il ne s’agissait pas là d’un quidam rencontré à la terrasse d’un café mais d’une entité morte-vivante d’une grande puissance à ne pas sous-estimer sous peine de surprises fort déplaisantes.
Quoi qu’il en fût, il observa avec un dédain ostentatoire la caboche de lapin figée dans une expression mortuaire grotesque filer dans les airs en laissant sur son passage quelques gouttes de sang, et répondit sans se départir de son sang-froid avec une petite moue paresseuse :

« Pas trop envie non. Ça trouble la digestion. »

Prenant ensuite une expression songeuse sans quitter des yeux l’enfant peu commune, il prit un petit moment pour approfondir une pensée qui lui était venue à l’observer : comme elle ressemblait à cette héroïne à laquelle la plume du sieur Le Fanu avait donné vie, cette jeune femme fatale mystérieuse et mystique aux penchants immoraux qui fascinait autant qu’elle effrayait, aux allures félines, aux propos troublants et aux habitudes déstabilisantes qui savait si bien tromper son monde jusqu’à ce qu’il fût trop tard pour la victime ! Et dans ce cas, était-ce cet homme-loup qui était inscrit au menu ? Un sacré plat de résistance à n’en pas douter, et si elle voulait l’avoir dans son assiette, l’addition allait être plutôt salée car elle se rendrait très vite compte qu’il n’était pas du petit gibier !
Mais par Newton, plutôt que de se perdre en conjectures, pourquoi ne pas poser directement la question à l’intéressée ? Après tout, ça ne coûtait rien de demander, et cela permettrait de faire rebondir la conversation sur un nouveau sujet au lieu de la laisser sur un refus :

« Plutôt qu’une balle d’os et de chair, si tu lâchais quelques morceaux d’informations à ce bon chien, Carmilla ? » Proposa-t-il non sans une pointe d’amusement enjoué alors qu’il se mouvait à gestes mesurés pour redresser sa jambe droite sur laquelle il posa son coude, prenant toutefois bien soin de masquer ses parties intimes de la gauche. « Par exemple, qu’est-ce qu’une chauve-souris peut bien vouloir à un loup ? »

En vérité, il avait déjà son idée sur le sujet, mais bon, c'était avant tout une question de pure forme, et d'ailleurs, qui savait ? Peut-être percevait-elle l'homme-loup qu'il était comme autre chose qu'une gourde géante rempli d'un sang nourrissant : Saïl ne pouvait pas prétendre pouvoir prévoir ses réactions, et il n'était pas impossible qu'elles dépassassent ce à quoi il s'attendait, ce qui aurait été tout à son honneur.
« Modifié: lundi 04 mai 2009, 20:14:16 par Saïl Ursoë »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Kira

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 5 mardi 28 avril 2009, 15:06:34

Le fait qu’elle ait rapporté une tête de quelque chose de rapide et difficile à attraper à première vue semblait jouer en sa faveur, Kira remarqua que le loup la regardait avec plus de méfiance que jamais. Cependant, il y avait aussi de la curiosité dans son regard, ce qui ne l’étonna que peu. Après tout, on ne voyait pas si souvent des vampires dans sa vie. Peut-être était-ce dû au fait que lorsqu’on en voyait un, on pouvait déjà être immensément soulagé si on en ressortait vivant. Du moins, jusqu’à présent, toutes les proies que Kira s’était désigné n’avaient sûrement pas eu l’occasion de retomber sur un suceur de sang. Ou plutôt : un suceur de sang n’avait sûrement pas eu l’occasion de tomber sur une de ses proies. Pourquoi ? Parce qu’il était difficile de tomber sur un cadavre vidé de son sang et enterré assez profondément. Et de là où il était, ledit cadavre ne pouvait tomber sur personne. Mais tout cela, le loup l’ignorait. Ou pas. Quoi qu’il en soit, il ne semblait pas décidé à l’attaquer, ce qui était plutôt encourageant.

La tête de lapin s’éleva dans les airs pour disparaître dans l’ombre d’un buisson situé plusieurs mètres plus loin, laissant sur son passage des gouttes de sang odorantes. Ainsi, le loup ne pourrait se tromper sur la localisation de sa nouvelle balle. Cependant, il eu un regard dédaigneux lorsqu’il regarda Kira, qui semblait vraiment croire qu’il irait la chercher. Elle comprit aussitôt qu’il ne voudrait pas, avant même qu’il ne fasse une moue paresseuse. Il lui répondit que ça troublerait sa digestion, ce qui la fit sourire. Le loup-garou était plutôt amusant, malgré son air songeur. Mais elle n’avait pas franchement envie de lancer une nouvelle pique, cela commençait à l’ennuyer. Elle avait soif, et devrait bientôt boire avant de se mettre à sauter sur la première chose appétissante qui passait sous son nez. Remuant un peu, gênée par ses pensées, elle se concentra néanmoins assez vite sur la conversation lorsque le loup recommença à parler. Il lui donna un surnom qui l’amusa, mais après tout il ne pouvait faire autrement, ignorant son vrai prénom. Il lui demanda donc ce qu’elle lui voulait. Elle aurait répondu directement si elle ne l’avait pas observé cacher ses parties intimes tout en s’appuyant confortablement sur une de ses jambes. Ceci l’amusa à un si grand point qu’elle ne pu s’empêcher d’en rire. Une créature aussi puissante que lui et qui pouvait faire peur à n’importe quel humain qui le croisait, assez timide pour se cacher d’une vampire comme elle, qui pouvait tenter de le tuer à tous moments. C’était plutôt comique. Mettant quelques secondes à calmer son hilarité, elle prit une pose moins défensive, se détendant visiblement. Si il n’avait été qu’un homme loup stupide, une bête, il n’aurait pas éprouvé le besoin de cacher son intimité des yeux d’une demoiselle comme elle, immortelle et sadique ou pas.


-   Eh bien, tu es un grand timide, en fait ! Ne t’inquiètes pas, j’ai plusieurs siècles d’existence et j’en ai vu beaucoup, des sexes ! Ce n’est pas le tien qui va me gêner. Tu sais, à première vue tu es une grosse brute, mais après quelques minutes à te parler, on change vraiment de point de vue ! Je n’ai pas de nom, il y a des décennies que j’ai oublié celui dont m’avait affublé ma « mère ». Mais tu peux m’appeler Kira, je préfère ça à Carmilla.

Elle semblait vraiment s’amuser, maintenant. Avec sa vitesse toujours aussi impressionnante, elle disparut du champ de vision du loup, pendant plus longtemps, cette fois-ci. Lorsqu’elle revint, environ dix secondes plus tard, elle réapparut à l’endroit même qu’elle avait quitté, mais avec la différence que du sang d’un rouge brillant coulait le long de ses lèvres. Avec son index, elle essuya son menton avant de lécher le doigt couvert de sang. Désormais, elle n’aurait plus à s’inquiéter de sa soif. Elle avait eu le temps de courir jusqu’à une sorte de cascade, de décapiter le jaguar qui y buvait, et de revenir après avoir bu tout son sang. Elle s’approcha d’un pas conquérant de la créature qui lui faisait face et alla même jusqu’à s’appuyer de ses mains sur ses genoux, pour bien planter son regard vif dans le sien. Le feu qui y brûlait avait presque disparut, laissant la place à deux pupilles, qui brillaient certes d’un éclat anormal, mais qui étaient douces et exprimaient une sorte de curiosité.

-   Tu m’as demandé ce que je pouvais vouloir de toi. Au début, comme tu sembles le croire vu la façon dont tu me regardes, je voulais me nourrir de toi. Si tu savais ce que peut produire le son des battements de ton cœur aux oreilles d’un vampire, tu n’en serais pas étonné. Mais maintenant que j’ai pu étancher ma soif, je suis plutôt intéressée. Qu’est-tu ? J’ai certes vu plusieurs créatures étonnantes ici, mais jamais une comme toi. Tu peux parler et tu as une apparence qui peut rappeler les humains. Tu as de l’esprit et de la répartie. Je me demande si mes pouvoirs d’hypnose marcheraient sur toi. Et ce que tu peux ressentir en me regardant. As-tu peur, comme tous ceux que j’ai croisé jusqu’à présent ? En tout cas, tu ne t’es pas enfui, et tu mérites donc mon admiration la plus totale.

Elle espérait que son discours lui avait attiré la sympathie du loup car elle désirait connaître cette créature un peu mieux. D’ailleurs, elle lui montrait qu’elle n’avait pas peur de lui en se tenant ainsi à ses genoux, laissant sa douce gorge blanche à découvert. Si il connaissait bien les êtres comme elle, il saurait que c'était là une marque de confiance, puisque s'il lui tranchait la gorge, elle mettrait du temps à se reformer. Quoi qu'il en soit, elle n'avait pas peur, au contraire. Elle était puissante et le savait. Si il l'attaquait maintenant, cela marquerait sa perte à lui, pas la sienne.



La brûlure de la glace, la solitude éternelle, le poids de l'immortalité... Un vampire

Saïl Ursoë

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 6 mardi 28 avril 2009, 21:30:13

Le grand gaillard poilu qu’il était ne put s’empêcher de prendre un air renfrogné en constatant dans quel état d’hilarité son souci pour la pudeur mit la vampire : on aurait dit une grande dame se gaussant royalement en voyant un petit garçon cacher maladroitement son entrejambe en serrant les cuisses et en y portant ses mains en un geste dérisoire qui le faisait involontairement s’attirer une sympathie condescendante de la part de l’adulte chevronnée qu’il avait en face de lui et qui appelait un chat un chat. En l’occurrence, contrairement à ce que sa pâleur mortelle aurait pu faire penser, le teint d’une blancheur immaculée que possédait la peau de l’inconnue ne semblait pas avoir grand-chose à voir avec la virginité si l’on jaugeait sa décence à l’aune de ses propos plutôt crus : Saïl n’avait rien d’un religieux, mais conformément à ce que les mythes chrétiens disaient sur ces créatures suceuses de sang, celle-ci avait en tout cas bien l’air d’être l’incarnation du péché. La Luxure pour son manque de prévenance à l’égard de l’intimité d’un corps, la Gourmandise pour la soif de sang plus qu’apparente qui pouvait se lire dans ses yeux, l’Orgueil pour les manières hautaines et dénuées de politesse qu’elle avait, la Colère pour l’aura de violence potentielle qu’elle dégageait… et pourquoi pas l’Envie pour la vie de suceuse de sang dépendante de « simples mortels » qu’elle menait, l’Avarice pour sa tendance à certainement prendre sans donner en retour, et la Paresse pour la nonchalance dont elle faisait preuve dans son attitude et dans ses paroles ? Enfin bon, il ne fallait pas non plus jouer les oies blanches : niveau vice, lui-même aurait été bien hypocrite de se prétendre un saint, et admettait être loin de n’avoir que des bons côtés… et puis autant laisser le bénéfice du doute à cette étrangère dans la nuit qui n’avait jusqu'ici entrepris aucune action hostile à son égard en dépit de ses penchants manifestement prononcés pour la traque à la viande fraîche.
En tout cas, elle était sacrément perspicace pour avoir pu lire à travers ses dehors bestiaux, et cela ne manqua pas de l’impressionner : niveau décryptage de son comportement et mise en évidence de sa nature réelle, elle marquait des points en ce qui concernait la vitesse, étant certainement celle qui avait pu le plus rapidement voir qu’il n’était pas un sauvage sans cervelle mais un être civilisé capable de bonnes manières, d’attention et de bienveillance. Cela n’atténua pas vraiment le coup de la rebuffade que son rire lui avait fait subir, mais cela la fit du moins davantage remonter dans son estime que si elle l’avait pris pour un toutou bien élevé. En réalité, à ce qu’il semblait, ses éclats venaient davantage d’un sentiment de surprise que de moquerie, et Saïl était le premier à concéder que voir un loup-garou faire preuve d’égards au lieu de vous sauter dessus en une furie de griffes et de crocs était quelque chose qui avait de quoi déconcerter.

« Gêne ou pas, c’est une question de principe. » Grogna-t-il donc d’un ton un peu guindé mais d’une mauvaise humeur qui n’en tempérait pas moins l’absence d’hostilité qui pouvait se lire dans son regard.

Dans le même temps, il intégra l’identité de sa rencontre dans l’infatigable banque de données qu’était la mémoire du scientifique qu’il restait, non sans un sentiment de perplexité issu du commentaire qu’elle venait de faire à ce propos : il s’était bien attendu à ce qu’un vampire pût mener une existence d’une longévité qui dépassait celle de toute autre espèce tant leur statut de mort-vivant leur conférait une certaine immortalité, mais de là à ressentir une telle indifférence, et même un tel dédain pour sa vie passée… cela avait quelque chose de triste qui remua dans le bon docteur une inéluctable pitié. Certes, on disait bien parfois que la pitié n’était que pour les faibles et, de fait, baisser sa garde face à Kira pouvait certainement s’avérer fatal pour lui, mais l’altruiste personnage qu’il était n’avait cure de cela : elle paraissait réellement avoir une méthode de pensée et de raisonnement humaine par certains aspects, ce qui poussait Saïl à lui laisser une chance raisonnable de tisser une relation plus ou moins amicale. D’ailleurs, quand bien même elle aurait pu profiter de la brèche qu’il lui offrait pour lui tomber dessus à bras raccourcis, il lui restait toujours sa force et son endurance surhumaines pour assurer ses arrières et faire en sorte de ne pas manger les pissenlits par la racine à la première menace venue.

Toutes ces réflexions lui traversèrent l’esprit durant le temps que dura l’absence renouvelée de l’entité ténébreuse qui se fit cette fois plus prolongée, ce dont Khral ne s’inquiéta pas : elle paraissait trop intriguée par lui pour prendre pour de bon la poudre d’escampette, et les capacités sensorielles peu communes qu’il possédait étaient des garde-fous efficaces contre des attaques surprises. En fait, il se doutait bien de la raison de son départ précipité, et cela lui donnait des impressions mitigées : d’une part, il lui était reconnaissant de faire ainsi attention à garder ses réserves sanguines à un niveau suffisant pour qu’elle ne cédât pas à l’envie de pomper ses fluides vitaux à lui, mais d’autre part, cela l’inquiétait. A quelle fréquence devait-elle renouveler ses stocks, et à quelle vitesse les brûlait-elle ? Et l’apport énergétique que lui fournissait le sang qu’elle buvait dépendait-il de la nature de ce sang ? Selon celle-ci, l’absorption pouvait-elle avoir des effets différents ? Tant de questions qui se succédèrent dans son esprit, l’une entraînant l’autre, et la plus audacieuse qui lui vint fut « Qu’est-ce que le sang d’un loup-garou donnerait sur le métabolisme d’un vampire ? ». Il était conscient qu’en filant un coton pareil, il jouait avec le feu, mais ce n’était pas vraiment comme si cela l’avait arrêté jusqu’ici… et puis il n'allait pas non plus sauter étourdiment à pieds joints dans une zone aussi dangereuse : il prendrait évidemment soin d’entourer une pareille expérience de toutes les précautions qu’il pourrait et de la réaliser avec la plus grande circonspection qui fût si jamais elle devait avoir lieu.
Et ce fut sur cette pensée que survint le retour d’une Kira, plus assurée que jamais qui avait manifestement satisfait ses besoins si l’on en jugeait par son air désormais plus paisible –mais non moins pénétrant- et aussi et surtout par le sang qui lui coulait encore le long du menton qu’elle s’empressa d’essuyer comme si de rien n’était avant de s’approcher de Khral comme d’un lion couché avec l’assurance ostentatoire que la bête ne se lèverait pas tout à coup pour l’attaquer. En cela, elle ne se trompait pas, car comme il l’a été dit, il avait décidé de se montrer plus conciliant envers elle, et ce fut pour cette raison qu’il la laissa s’approcher de lui sans faire montre de défiance, et qu’il ne broncha pas lorsqu’elle se servit de ses genoux comme reposoirs. A cette occasion, il put sentir à travers sa toison brune que la donzelle avait les mains anormalement froides, même à une température ambiante aussi peu clémente que celle de ces bois : de fait, ses doigts paraissaient autant de poinçons de glace qui s’arrimaient à sa peau, ce qui n’empêcha pas le loup-garou au cuir épais de ne pas plus réagir que s’il s'était agi d’une prise humainement ordinaire. Même à moitié allongé comme il l’était, elle n’avait qu’à peine à se baisser pour lui faire dûment face, mais malgré cet ascendant physique qu’il pouvait prétendre avoir sur elle, sa présence n’en restait pas moins saisissante, surtout à une aussi faible distance : malgré tout ce qu’il avait de posé, le regard de Kira en imposait beaucoup, et s’il s’était agi du Saïl d’il y avait un peu plus d’un an, il n’en aurait certainement pas mené large, mais le fait était que l’homme-loup dont il avait pris la forme avait davantage de tripes que l’humain qu’il avait été, sans compter qu’au cours de ses mois de vie sur Terra, il avait pu s’habituer à des choses parmi les plus étranges.

De son côté, la vampire paraissait désormais beaucoup plus bavarde, concédant en une tirade à satisfaire sa curiosité, bien que la conversation se détournât très vite du sujet originel pour porter sur Khral. Pour autant, cela ne le laissa pas insatisfait, lui permettant de se livrer à d’enrichissantes computations : bien entendu, il se doutait déjà que son sang hors du commun devait être un met de choix pour une créature suceuse de sang, mais qu’il pût la surprendre l’étonna quelque peu. S’agissait-il là d’un beau subterfuge pour endormir sa méfiance en flattant son ego ? Peu probable, car en réalité, elle avait plutôt l’air de vouloir jouer cartes sur tables en dépit de son parler envoûtant, et malgré les louanges ronflantes qu’elle lui accordait, elle paraissait consciente qu’il n’était pas du genre à se laisser conquérir par des caresses, si habiles fussent-elles.
En revanche, détail étonnant de la part d’un être aussi vraisemblablement expérimenté qu’elle, elle ne semblait pas être au courant de ce qu’était un loup-garou. Évidemment, qu’ils pussent exister, Saïl n’aurait pas été parmi les premiers à pouvoir l’admettre, mais il pensait que le folklore de pareilles créatures était assez répandu pour que quiconque pût être capable d’en identifier une à vue ! Bon, d’un autre côté, il était vrai qu’il n’était pas vraiment un loup-garou dans le sens où il ne se transformait pas à la pleine lune, mais il n’en avait pas moins des ressemblances assez prononcées avec ces monstres légendaires peuplant contes et films d’horreur. Enfin bref, ce n’était peut-être pas plus mal de cette manière : cela permettrait de partir sans a prioris, et c’était donc parti pour la divine explication puisqu’elle était demandée si gentiment !

« Je m’appelle Khral. »
Commença-t-il d’un ton professionnel sans la quitter des yeux tout en réfléchissant à comment il pourrait présenter sa transformation sans partir dans des raisonnements de généticien qui seraient sans doute beaucoup trop abscons pour Kira. « Pour définir ce qui m’est arrivé simplement… j’imagine qu’on peut dire que je me suis donné les caractères d’un terranide à un point très poussé. C’est pour cette raison que je ressemble autant à un loup tout en conservant une morphologie à peu près humaine. » Il eut ensuite un petit sourire en pensant à ce qu’il allait dire. « Quant à l’hypnose, vous pourriez toujours essayer, mais j’ai la tête plutôt dure. »

Enfin, il leva un de ses index dangereusement griffus qu’il posa sur le cou de son auditrice, aussi délicatement que lorsqu’il maniait de sensibles produits chimiques. Dans cette posture, il pouvait d’un simple mouvement lui trancher la gorge, mais il ne le ferait pas, et il faisait confiance à la vampire pour s’en douter… d’ailleurs, cela s’avèrerait-il réellement aussi efficace ? Rien n’était moins sûr, et cet homme-loup bien peu porté aux coups en traître se passerait bien de le vérifier.

« Ce que je ressens en vous regardant, c’est de la curiosité… beaucoup de curiosité, autant scientifique que psychologique : comment êtes-vous devenu ce que vous êtes ? Comment votre organisme fonctionne-t-il ? Quels sont vos modes de pensée ? Tant de questions… »
Termina-t-il sur un ton rêveur.

Tout le long de son discours, il avait laissé son doigt remonter le long de la gorge blanche jusqu’à la joue, puis jusqu’au front en frôlant presque imperceptiblement le globe oculaire au passage, avant de laisser sa patte en suspens avec quelques mèches de cheveux d’obsidienne dessus. Tout cela avait été exécuté avec un doigté attentif semblable à celui que possèderait un tailleur prenant les mesures d’une cliente, et le constat était édifiant : aucun pouls n’agitait ses veines, et pourtant sa peau avait conservé un grain tout simplement parfait et ne laissait voir aucun signe de nécrose, ses organes –sensoriels en tout cas- restant en toute logique aussi fonctionnels que son œil dont il avait pu constater l’intégrité. Pour finir, ses cheveux avaient exactement la même texture que ceux d’un humain, et étaient même admirablement soyeux, contrairement à la sensation rêche et filasse à laquelle on aurait pu s’attendre venant d’une morte-vivante. Fascinant…

« Qu’en pensez-vous ? » Demanda-t-il sur le même ton convivial qu’il aurait utilisé pour inviter une classe d’étudiants à réagir à ce qu’il venait de dire.
« Modifié: mardi 05 mai 2009, 07:57:26 par Saïl Ursoë »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Kira

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 7 mercredi 29 avril 2009, 13:28:42

Ses rires lui attirèrent un regard qui montrait à quel point le loup garou avait été vexé. Mais elle s’en fichait un peu, il s’en remettrait bien un jour après tout. Elle qui était habituée à ce qu’on lui montre ses vices et ses désirs les plus bruts et cachés… Non, c’était décidément trop drôle. De toute sa vie immortelle, elle n’était jamais tombée sur un être aussi étonnant. Il était grand, plutôt baraqué, puissant et pouvait la tuer d’un seul coup de ses grosses pattes griffues, mais il était trop pudique pour ne pas cacher son entrejambe. Il lui répliqua en grognant qu’il s’agissait d’une « question de principe », ce qui la sourire, malgré ses efforts pour s’en empêcher. Vu son expression, il devait juger la jeune femme d’après ce qu’il savait d’elle. Elle ne pipa mot, curieuse de savoir ce qu’il pensait d’elle. En même temps, elle observait son corps étrange. Vraiment, il ressemblait à un homme qui se serait vêtu d’une peau de loup ainsi que de sa tête. Ses yeux s’attardèrent sur les muscles bien dessinés sous l’épaisse toison. Il avait de quoi envoyer bouler un démon. Cela ne l’empêcha pas de partir se nourrir, lui offrant la perspective de son dos –si du moins ses yeux de bête lui permettaient de le voir.

Il ne réagit même pas lorsqu’elle s’approcha de sa démarche fière et assurée, encore moins lorsque leurs peaux respectives entrèrent en contact. Pour Kira, cela n’avait rien de désagréable, la chaleur que dégageait l’autre réchauffait même un peu ses doigts gelés. Par contre, il était étonnant que l’autre ne dise rien, gardant même un air impassible. D’habitude, sa température corporelle déstabilisait même les plus puissants et sûrs d’eux. Mais peut-être qu’à cause de sa toison, il sentait moins le froid. Ou alors il était trop poli pour montrer une expression dégoûtée. Presque allongé, il forçait le vampire à baisser sa garde en se penchant sur lui pour bien le regarder dans les yeux. Il ne semblait pas la craindre, n’eut pas de mouvement de recul lorsqu’elle se rapprocha encore plus de lui. Avait-il vu pire ? Ou bien avait-il compris qu’elle ne l’attaquerait pas ? Quoi qu’il en soit, il était tranquille, comme s’il n’avait pas en face de lui l’un des êtres les plus dangereux et sadiques qui soient. Certes, les loups-garous l’étaient aussi, mais celui qu’elle avait en face n’avait pas l’air d’en être un. D’abord, il était calme et ne se jetait pas sur elle, alors qu’un loup-garou était réputé, d’après ce qu’on lui avait dit, pour être violent et incontrôlable. Ensuite, il parlait et semblait intelligent, pas comme les brutes avec lesquelles on aurait pu le confondre à première vue. Enfin, la lune n’était pas pleine, quoique très visible.

Suite à ses questions, Kira appris que la créature se dénommait Khral. Elle se demandait s’il avait choisi son propre nom ou si quelqu’un l’avait fait à sa place. Et si c’était cette dernière solution, quelle créature avait pu engendrer un être comme celui-là ? Elle n’en avait jamais vu auparavant. Son ton était presque sévère, mais elle se douta qu’il analysait ce qu’il pouvait lui dire pour qu’elle comprenne clairement. Bien sûr, elle n’était pas dépourvue d’intelligence, et avec des siècles d’expérience, elle avait appris beaucoup. Mais le langage de certains scientifiques pouvait sembler tout bonnement incompréhensibles pour d’autres oreilles que les leurs. Ce qui pouvait lui faire penser qu’il en était un ? Il n’était pas né comme il était désormais, il avait fait des recherches pour le devenir et était devenu le sujet de ses propres expériences. Pourquoi un loup ? Pourquoi devenir un terranide alors que les humains en général leur voulaient du mal ? Autant de questions qui pourraient demeurer sans réponse si elle ne les prononçait pas. Mais peu importe, Kira savait maintenant ce qu’elle avait voulu savoir. À part pour l’hypnose, mais elle n’avait pas envie d’essayer, du moins pas pour le moment. Si elle le faisait, soit elle réussissait et la conversation tournerait court, soit elle ratait et ferait un faux pas aux yeux de Khral.

Avec douceur, il leva un de ses doigts afin de le poser sur sa gorge. Confiante, elle se laissa faire sans broncher. De toute façon, sa peau était tellement dure qu’il lui faudrait prendre un peu d’élan pour pouvoir la transpercer, même avec des griffes de cette taille. Lentement, comme pour ne pas l’effrayer, il remonta sa patte, tout en l’effleurant. Se contentant de le regarder d’un air interrogateur, elle n’en écoutait pas moins ses doutes et ses questions. Il semblait rêveur, comme si de nouvelles perspectives s’ouvraient à lui maintenant qu’il l’avait rencontrée. Elle attendit qu’il eu fini son inspection, laissant sa patte à quelques centimètres de son visage, une mèche de ses cheveux dessus, pour répondre. De toute façon, ce n’est que là qu’il l’encouragea vraiment à prendre la parole.


-   Je vais être franche, Khral. Je n’ai jamais tutoyé personne, mis à part lorsque j’étais humaine. Donc, ne te vexe pas si je ne le fais pas maintenant. Tu peux me tutoyer aussi, cela m’importe peu. Maintenant, tu veux savoir comment je suis devenu une vampire. C’est plutôt simple. J’étais une humaine comme les autres, dans un village perdu au fin fond d’une forêt. Nos hommes avaient souvent tenté de la traverser, mais ils n’étaient jamais revenus, et au final ils cessèrent de s’intéresser à ce qu’il se passait à l’extérieur du village. Personnellement, j’ai maintenant compris qu’il s’agissait d’un vampire. C’est pour cette raison qu’il vint s’installer au village : plus personne ne sortait, il ne pouvait donc attendre bien tranquillement qu’une proie vienne à lui. Néanmoins, il a réussi à attraper une fille qui s’était égarée dans la forêt, en pleine nuit. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il ne l’a pas tué pour boire son sang, il s’est juste livré à des expériences avec elle. Il l’a mordue et l’a vidé de son sang puis lui a fait boire le sien sang ainsi que celui d’une chauve souris qu’il avait attrapée. Je ne sais pas si le fait que la lune était pleine ce jour-là a un rapport avec la transformation. Mais la jeune fille, une fois qu’elle eu repris conscience, comprit ce qu’il lui était arrivé. Malgré les menaces de son bourreau, elle l’attaqua et bu tout son sang. Son propre sang, en quelque sorte, puisqu’il s’agissait de celui qu’elle lui avait donné quelques temps plus tôt. Cela a drôlement influé sur sa vie, puisqu’elle peut désormais sortir au grand jour, même si la peau de son visage et ses yeux sont trop sensibles pour résister au soleil. Elle est donc obligée de porter un masque, mais peut quand même vivre parmi les humains. Je te laisse deviner de qui il s’agit.

Elle se tu, n’ayant pas l’habitude de dévoiler autant de choses sur sa vie. Mais après tout, il était le premier à l’avoir interrogée, il méritait donc qu’elle le fasse. Maintenant, ses autres questions. Grâce à sa mémoire hors du commun, elle se souvenait facilement de tout ce qu’il lui avait demandé. Il voulait savoir comment fonctionnait son organisme et quels étaient ses modes de pensée. Prenant une profonde inspiration, comme un humain l’aurait fait à sa place, elle continua de parler. Sa voix était douce et ressemblait plus à un chant qu’à un discours. Mais elle était faite ainsi, pour séduire n’importe quelle proie et avaler sa vie.

- Je ne puis dire exactement comment mon enveloppe corporelle fonctionne, je ne me suis jamais vraiment souciée de le savoir. Des fois, j’ai terriblement soif, je ne peux me retenir et j’attaque ce qui passe sous mon nez. C’est tout ce qu’il y a à retenir de la vie d’un vampire : la soif et cette sensation de puissance. Comme si tous ceux qui nous entourent n’étaient que des proies faciles à tuer. Je peux bouger à une vitesse stupéfiante, même si le sang qui coule en moi lorsque je le bois n’apporte plus d’oxygène à mes muscles. Je sais que c’est une explication stupide pour un scientifique, mais je crois qu’il s’agit de ce que nous sommes en droit d’appeler la magie. Mon corps est fait pour séduire. Et si ça ne marche pas, il doit avoir assez de puissance pour terrasser n’importe quoi. Je n’existe que pour me nourrir de la vie des autres… Sinon, mes cheveux ne poussent que lorsque je les coupe, pour atteindre la taille qu’ils ont maintenant. Mes dents poussent lorsque je le désire. Mes ongles peuvent se transformer en griffes. Je tue, je bois le sang de ma victime et ce sang se transforme en chaleur et en énergie. Après, cela dépend du sang. Par exemple, celui des démons peut presque me rendre humaine. Celui des créatures d’ici change mon organisme. Après, je crois avoir en grande partie répondu à ta dernière question. Quoi que… Je pourrais ajouter que lorsque je n’ai plus soif, je me comporte et je pense comme une humaine. Comme tu peux le constater, d’ailleurs. Alors ? Que penses-tu de moi ?



La brûlure de la glace, la solitude éternelle, le poids de l'immortalité... Un vampire

Saïl Ursoë

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 8 mercredi 29 avril 2009, 17:41:17

Quelle ambiance plaisante en vérité : ils étaient tous deux des monstruosités réputées pour être des machines à tuer à répétition sans aucun problème de conscience, et de fait, même si le tempérament de Khral tenait le plus souvent davantage de l’humain que du loup, il ressentait indubitablement et en permanence ce désir de se déchaîner, cette soif de sang qui lui donnait l’envie plus ou moins prononcée de s’adonner au carnage. Bien évidemment, sa nature calme et douce tempérait toujours ses humeurs et empêchait de pareils débordements, et même si le loup était plus visible qu’à l’ordinaire après cette partie de chasse, il se tenait tranquille, rassasié de boucherie qu’il était. Tel était aussi le cas de Kira, dont la survie même dépendait du fluide vital d’autres créatures qu’elle devait dérober pour assurer le fonctionnement de son propre corps (un corps admirablement performant de bien des points de vue d’ailleurs), mais ce que Saïl ne parvenait pas bien à déterminer, c’était si elle avait le même respect pour la vie que lui prenait soin d’observer : à en juger par la manière dont elle était capable d’occire divers animaux, faire passer de vie à trépas n’était aucunement un problème pour elle, ce qui était bien normal du point de vue de l’homme-loup, mais restait à savoir si elle se laissait aller aux mêmes écarts de conduite relativement à des êtres humains. Le scientifique jugeait les données qu’il possédait insuffisantes pour apporter une réponse valable à un pareil questionnement, même si les manières de la vampire qui avaient quelque chose de carnassier le mettait un peu mal à l’aise. Toutefois, il n’en montrait rien, autant par professionnalisme que pour ne pas laisser l’autre croire qu’elle avait la main haute sur lui : il en était bien conscient, il évoluait sur un terrain plutôt glissant, et se devait donc de progresser avec un minimum de précautions pour ne pas faire de gaffe en présence d’un sujet aussi sensible.

En tout cas, l’immortelle donzelle se montrait de son côté disposée à ce qu’ils fumassent le métaphorique calumet de la paix en faisant progresser la familiarité qu’ils partageaient en lui proposant de passer lui aussi au tutoiement, ce pour quoi il n’était pas contre : après tout, entre monstres, on pouvait bien se laisser aller à ne pas se montrer plus collet-monté qu’il n’en était besoin, car ce qu’ils vivaient tous les deux en ce moment était loin d’être un rendez-vous huppé. Par conséquent, nulle nécessité de faire preuve d’un comportement guindé qui ne ferait qu’entraver la bonne progression de leur conversation si instructive et passionnante : qui aurait pu se targuer d’avoir pu mener un tel entretien avec un vampire et de se faire narrer par le menu son histoire avec semblable clarté ? Voilà que le fantasme d’Anne Rice était réalisé, et ce dans des circonstances pour le moins peu communes ! De plus, le récit à la troisième personne que Kira se plaisait à broder renforçait cet effet romancé, et comme l’amateur de bons contes qu’il était, Saïl était tout oreilles : même s’il conservait des dehors aussi impassibles que jusqu’à maintenant, le pétillement qui scintillait dans ses yeux laissait peu de place au doute quant à l’intérêt qu’il prenait à se voir raconter le destin de celle qui avait jadis été une fillette comme les autres si l’on se fiait à la narratrice. En réalité, ces fragments de biographie étaient aussi fascinants que celle dont ils étaient l’objet de par leur caractère proprement surnaturel, et si succinctement qu’ils fussent rapportés, cela n’empêchait pas le loup-garou de s’imaginer la scène en une sorte de demi rêve auquel il se laissa assez facilement prendre au piège pour ainsi dire : quelle fureur, quelles larmes, quel fracas transparaissaient à travers ces différentes scènes qui se succédaient devant les yeux de l’homme-loup par le biais de son esprit ! Il en était littéralement un spectateur direct, et n’allait pas sans éprouver comme une pointe de jalousie saugrenue à se rendre compte de ce que ce le destin de Kira avait eu de rocambolesque comparé au sien qui avait tout bonnement été au fond de s’injecter une dose de Terranis, substance qui, si révolutionnaire qu’elle pût être, restait un bête produit chimique.
Et à propos de science, l’histoire se valait également de cet aspect : Saïl savait désormais à quoi rimait ce masque, ainsi qu’à quoi s’en tenir en ce qui concernait cette hypersensibilité à la lumière que l’on prêtait aux vampires. Ainsi, elle n’y était vulnérable que de façon mineure… voilà une donnée qu’il était important de prendre en compte pour rectifier certaines erreurs que le commun des mortels se faisait sur ces entités mortes-vivantes. Bon, il était vrai que le spécimen qu’il avait en face de lui était plutôt unique en son genre (tout comme lui l’était !), et il devait donc prendre les informations qu’il recevait avec des pincettes. D’ailleurs, cela l’amena à se poser d’autres questions sur les faiblesses que l’on prêtait aux vampires, notamment ces histoires d’ail, de crucifix, de pieux dans le cœur et d’eau bénite qui étaient supposés être autant de moyens de se débarrasser d’eux, mais il ne les posa pas, conscient qu’il était de ce que des demandes pareilles pouvaient avoir de désobligeant : lui-même aurait réagi assez tièdement si on lui avait demandé si l’argent pouvait réellement lui déchirer les chairs comme du papier.

Une fois qu’elle en eût fini avec son récit, elle marqua un temps de pause, sans doute autant pour laisser à son auditeur le temps d’encaisser un tel discours que pour reprendre son souffle… quoiqu’il ne pouvait être certain de ce dernier point : étant donné qu’elle n’était plus vivante, son corps n’avait-il plus besoin d’oxygène, et le besoin d’inspirer n’en devenait-il pas superflu ? Peut-être alors avait-elle gardé cette habitude comme un souvenir de l’humaine qu’elle avait été, comme un tic de son existence passée ; c’était difficile à dire, mais peut-être ce qu’elle s’apprêtait à poursuivre lui apporterait-il la réponse à une telle interrogation ? A ce sujet, la bougresse était d’ailleurs une sacrée discoureuse : elle devait avoir été oratrice dans une autre vie (notion plutôt ironique pour un vampire, mais bon) pour pouvoir faire montre d’un tel talent, car si ses mots n’étaient pas forcément aussi merveilleusement choisis que ceux d’un plaidoyer cicéronien, ils n’en restaient pas moins prononcés d’une façon pénétrante avec des intonations au caractère envoûtant qui faisait se demander à Saïl s'il ne s'agissait   l’hypnose dont elle s’était vantée et le poussait à redoubler de vigilance sans pour autant avoir le cœur de se montrer buté et renfermé. Comment l’aurait-il pu alors qu’elle se montrait si obligeante à partager ainsi des traits de son passé, de sa morphologie et de sa psychologie alors qu’elle était manifestement d’ordinaire une personne qui faisait bien peu de cas des êtres qu’elle rencontrait ? Pour l’occasion, le cerveau de l’homme-loup s’était transformé en véritable bloc-notes de grande ampleur sur lequel le crayon des paroles de Kira pouvait inscrire à son gré tout ce dont elle jugeait bon de lui faire part.

Et justement, voici qu’elle passait à la partie qui titillait le plus la satisfaction du scientifique qui était en lui, et qui portait précisément sur sa physiologie et sur ses habitudes de vie. Pour la première partie, rien qui ne fût réellement étranger au loup-garou qu’il était, car bien qu’il ne s’agît pas exactement de la même forme de prédation, ils avaient tous les deux l’instinct d’un chasseur qui coulait dans le sang : rôder, dénicher, traquer, assaillir, abattre, et tout cela avec une aise propre à ceux qui se situaient au sommet de la chaîne alimentaire, voilà ce qu’ils brûlaient de faire lorsqu’une proie se présentait à leurs yeux ! A la différence bien sûr que Khral s’en était toujours tenu à des cibles animales, alors que rien n’était moins sûr en ce qui la concernait : il n’excluait pas la possibilité qu’elle eût fait passer de vie à trépas plus d’une existence humaine, et se promit de lui en toucher deux mots dès qu’il en aurait l’occasion. Mais pour l’heure, c’était plus à sa curiosité d’être satisfaite qu’à sa moralité, et cela ne loupa pas lorsqu’il eut la confirmation que l’oxygène n’était plus indispensable à cette extraordinaire créature. « Comment son organisme fonctionne-t-il alors ? » fut la question qui lui vint immédiatement à l’esprit, et la réponse par laquelle il y remédia fut la même que celle que Kira lui apporta à son grand ravissement : non seulement elle avait pu deviner ce à quoi il pensait, mais en plus elle était un minimum versée dans l’art délicat de la science, compétence tout simplement exceptionnelle à Terra, où la magie imprégnait à ce point les mœurs que la physique, la chimie, la biologie, et tous ces autres domaines avaient été délaissés. Non pas qu’avoir recours aux sortilèges s’avérât moins performant, au contraire –hélas-,  mais œuvrer en savant avait le mérite d’une méthode d’agir et de raisonner efficacement que Saïl revendiquait et dont il était fier pour ce qu’elle pouvait lui apporter, ne fut-ce que pour l’aider à mieux réagir aux situations les plus inattendues et les plus insolubles en apparence.

Pour ce qui fut de la suite du monologue, elle fut plus sensible : la vampire parla de ses « talents » et de ses objectifs sans pudeur aucune, mentionnant son habileté naturelle à la séduction comme elle avait présenté le reste. Il était vrai qu’il ne pensait pas avoir vu un corps ciselé avec un tel art, et une telle perfection avait quelque chose de purement surnaturel qui déstabilisait autant qu’il attirait. Bien sûr, l’humain prenait garde de ne pas se laisser prendre au piège de formes aussi dangereusement attractives et de conserver autant sa maîtrise de soi qu’il le pouvait, mais le loup, de son côté, se montrait beaucoup moins vigilant, et Khral se léchait intérieurement les babines à la pensée de ce dont ce corps d’albâtre était capable, considérations fort peu prudentes qui obligeaient Saïl à redoubler d’attention pour ne pas risquer de se faire embobiner, surtout lorsqu’elle revendiqua vivre pour se « nourrir de la vie des autres », perspective qui fit réprimer au loup-garou un frisson soudain et le poussa à s’enhardir pour faire face.
Afin de recentrer mieux ses idées, il se concentra sur l’aspect purement technique de ce que Kira partageait à présent avec lui, s’émerveillant des fonctionnalités impressionnantes de son enveloppe charnelle et de ses atouts qui n’avaient rien à envier aux siens : si lui-même était d’une robustesse et d’une puissance brute qui surpassaient sans doute celles de la vampire, elle pouvait opérer d’une manière beaucoup plus insidieuse, se glissant à travers les défenses de son adversaire pour frapper les points sensibles et ne laisser aucune chance de récupération. Il avait l’impression d’être à deux doigts d’une veuve noire, cette araignée au poison si extraordinairement performant qu’il pouvait faire manger les pissenlits par la racine à un être humain en quelques secondes à peine : ce qu’il ressentait était un mélange de fascination et d"une méfiance dont il ne parvenait pas à se départir, et ce à plus forte raison lorsqu’elle dit tuer ses victimes pour boire leur sang, perspective tout simplement révoltante pour l’altruiste qu’il était. Cependant, il ne fit pas d’esclandre, et se décida plutôt à réagir dans le plus grand calme pour faire part de son opinion. D’ailleurs, il s’avéra qu’elle ne prenait pas pour cible que des proies potentiellement innocentes et sans défense, mais également des êtres démoniaques… des démons ? Curiouser and curiouser ! Saïl ne s’était pas attendu à ce que des entités pareilles pussent exister même sur Terra, et même s’il fit de son mieux pour ne pas le montrer, cela le frappa et l’intrigua fortement : aurait-il l’occasion d’en croiser ? L’idée l’enchantait et l’effrayait à la fois, mais pour le moment, il avait affaire à quelqu’un d’autre qui faisait naître en lui les mêmes sensations, et qui lui retournait justement la question qu’il lui avait posée il y avait quelques minutes.

« Tu es fascinante. »
Répondit-il en toute honnêteté, attribuant ce qualificatif d’une voix tranquille et assurée tout en rivant son regard dans le sien avec un mince sourire. « Et dangereuse aussi : tu ressembles à un chat qui aimerait jouer, mais qui serait capable de sauter à la gorge de son partenaire dès qu’il se sent blessé ou énervé, qu’il a faim ou tout simplement qu’il se lasse. »

La métaphore lui semblait bien choisie, et ce d’autant plus que c’était justement l’animal en lequel Carmilla qui avait précédemment été évoquée se transformait pour fuir le lieu de son crime… et dans le roman éponyme, Carmilla finissait par être détruite après avoir trop attiré l’attention par ses victimes répétées. Le bon homme-loup se sentait coupable de vouloir faire son possible pour éviter un tel sort à Kira alors qu’il aurait pu être dit qu’elle le méritait, mais comme elle l’avait elle-même fait remarquer, elle n’était pas dénuée d’un côté humain, et la bienveillance exacerbée de Saïl lui donnait de toute façon l’impératif de toujours venir en aide à son prochain autant qu’il le pouvait. Enfin en tout cas il espérait que c’était ça et non une dévotion issue du magnétisme surnaturel de la vampire…

« Cependant, je n’arrive pas à accepter que tu puisses tuer des gens pour te nourrir. Tu ne peux pas simplement prendre ce qu’il te faut de sang, sans pousser jusqu’à la mort ? »

Ce disant, il avait posé ses pattes sur les mains de l’intéressée en un contact amène, comme pour lui transmettre pacifiquement la chaleur pulsante de vie qui courait dans son corps et animait son âme et ses convictions. La froideur de ces doigts glacés pénétra dans un premier temps ses paumes qui, bien qu’épaisses, n’étaient pas velues comme le reste de son corps, mais il sentit rapidement que la température à cet endroit se stabilisait à un niveau plus doux.
« Modifié: mardi 05 mai 2009, 19:27:26 par Saïl Ursoë »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Kira

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 9 dimanche 10 mai 2009, 21:41:17

Kira avait raconté son histoire à l’homme loup qui lui faisait face sans rien avoir omis d’important ou ajouté de détériorant ou de faux. Elle espérait que quelque chose la récompenserait de son efforts, car il lui était plutôt difficile d’admette qu’elle avait été humaine. Bien évidemment, elle savait très bien qu’un jour, elle avait été comme ces créatures faibles et qui passaient si facilement de vie à trépas, mais elle trouvait cela honteux, dans sa biographie. C’était comme si un humain avait été une souris dans sa vie antérieure et qu’il était capable de s’en souvenir, alors qu’il était allongé dans un champ, un petit corps en train de griller dans le feu à son côté. Que penserait-il ? « Je n’arrive pas à croire que j’ai été cet être si faible, qui s’est laissé tuer presque sans opposer de résistance… » ? Il serait sûrement dégoûté en regardant l’être sans vie. C’était ce que ressentait Kira lorsqu’elle se laissait aller après un festin. Néanmoins, son histoire avait plu à l’être qui lui faisait face, elle pouvait le voir dans ses yeux. Il était vraiment étonnant : ne pouvant exprimer ses sentiments avec l’expression de son visage, il le faisait avec son regard. Très peu de créatures pouvaient prétendre pouvoir faire de même.

Lorsqu’elle parla de ses talents légendaires en matière de séduction, elle vit un éclat briller dans le regard de son interlocuteur. Elle ne croyait pas avoir réussi à le séduire comme elle avait séduit bien des hommes, mais elle était sûre de l’avoir intéressé, même si c’était tout au fond de lui. Bien des créatures avaient cédé aux impulsions que donnait un corps aussi bien sculpté que le sien : démon, terranides, humains et anges, tous tombaient devant elle. La vampire, pour cela, avait acquis avec les ans une arrogance qui pouvait la rendre détestable a première vue, mais qui fondait assez vite quand on lui donnait une occasion de la laisser aux oubliettes. L’être qui la regardait semblait partagé entre ce qu’il avait ressenti en écoutant son discours qui aurait apitoyé n’importe qui et quelque chose d’autre. Peut-être était-il très méfiant et pensait-il qu’elle le tuerait dès qu’il ferait mine de baisser sa garde. Quoi qu’il en soit, elle continua de répondre à ses questions, allant même jusqu’à avouer à quoi rimait l’existence d’un vampire. À ce niveau-là, le loup se tendit. Même s’il s’était battu pour ne pas le montrer, Kira avait très bien vu qu’il avait été dégoûté voire indigné de ce qu’elle avait dit. Vraiment, quel étrange loup-garou il faisait. D’après ce qu’elle savait sur eux, ils étaient pires que les vampires, qui eux avaient le mérite d’avoir leurs proies sans qu’elles ne se débattent. Les loups attaquaient leurs victimes et les déchiraient avec leurs crocs, sans aucune pitié. Lui qui avait voulu être un terranide, il n’était rien d’autre qu’un humain avec une apparence canine. Les terranides, eux, avaient au moins le mérite d’avoir des pensées et des instincts d’animaux.

Ne dévoilant pas ses pensées, après tout, les loups étaient connus pour être les ennemis naturels des vampires et c’était peut-être cela qui la dérangeait dans la situation présente, elle se concentra pour éviter de sauter à la gorge de l’autre. C’était dans sa nature, chaque fois qu’elle sentait une menace, elle se devait de l’éradiquer dans le but de survivre. Après tout, à quoi bon se démener à voler la vie des autres si quelqu’un venait les mains dans les poches pour vous prendre la vôtre ? Quoi qu’il en soit, l’autre aussi sembla faire des efforts pour penser humainement. Il n’appréciait pas de savoir qu’elle tuait ses victimes alors qu’elle pouvait les laisser en vie, cela ne faisait aucun doute. Mais les laisser en vie, ce serait risquer qu’elles répandent la nouvelle de l’existence des vampires, et ces derniers n’existaient que parce que leur secret était gardé par la mort elle-même. De plus, elle avait besoin de beaucoup de sang pour vivre, si elle en laissait juste assez pour que sa proie vive, elle devrait trouver deux fois plus de victimes et donc deux fois plus de créatures capables de trahir la cause des vampires. Non, elle devait tuer ses proies pour se nourrir. De toute façon, c’était dans la nature, les prédateurs chassaient et tuaient leurs proies sans pitié afin de se nourrir, elle ne voyait pas en quoi ça changeait quelque chose si l’être était humain ou pas.

Tout ce qu’il ressentait, c’était de la fascination et de la crainte. Kira était déçue. Cependant, il était normal qu’il ne ressente rien d’autre à son encontre, étant aussi fort et animal qu’elle. La comparant à un chat, il lui dit qu’elle était dangereux, et pour cause : elle pouvait se montrer joueuse et souriante puis tuer son maître la seconde d’après pour une raison futile. Elle sourit à ce discours, ravie qu’il la voit ainsi, car elle avait toujours adoré les chats et regrettait de n’avoir pas été une neko. Au moins, elle aurait été indépendante et aurait pu vivre une vie à peu près normale. Non, le sang lui aurait trop manqué. Mais… Désormais, elle ne savait plus si elle aimait le sang ou si c’était juste ses besoins qui le lui faisaient croire. L’homme loup lui demanda enfin ce qui semblait le tracasser depuis quelques minutes, à savoir si elle ne pouvait pas se contenter de prendre assez de sang pour se nourrir, et laisser sa victime en vie. Prenant un air plus sérieux, elle lui répondit, de sa voix enchanteresse :


-   Non. Enfin, si, je pourrais. Mais je ne le ferais pas. Tu comprends, les humains ne sont jamais vraiment consentants. Oh, ils peuvent être séduits et laisser un vampire boire leur sang par amour, mais si ils reprennent le contrôle d’eux-mêmes, ils se débattront car ils auront honte de ce qu’ils ont pu penser ou faire. Et nous autres, vampires, ne pouvons laisser partir un humain en qui nous n’avons pas confiance. Il irait répéter à tout le monde que nous existons, et ce serait la fin. Il y a des moyens de nous tuer, comme le feu. Si tu coupes la tête d’un vampire et que tu cautérises la plaie, à moins de recouper en dessous, la tête ne pourra pas repousser. Même si nous sommes des parasites, nous avons le droit d’exister. Après tout, il y a bien des humains qui tuent d’autres humains sans autre but que de se divertir. Et tu tues des animaux pour te nourrir, n’est-ce pas ? Qu’ont les animaux de si différents des humains ? Tu dis ça parce que tu es toi-même humain, malgré ton apparence.

Mine de rien, il avait posé ses paumes sur les mains de la vampire afin de la réchauffer. Il était brûlant, et elle sentit la température de sa chair augmenter en seulement quelques secondes. Le remerciant à voix basse, elle le fixa dans les yeux de son regard pénétrant, attendant sa réponse.



La brûlure de la glace, la solitude éternelle, le poids de l'immortalité... Un vampire

Saïl Ursoë

Créature

Re : Créatures de mythes et légendes.

Réponse 10 mardi 12 mai 2009, 15:40:56

Il y avait quelque chose de vraiment étrange qui sourdrait d’elle lorsqu’on l’examinait, quelque chose qui se dégageait non pas tant dans ses caractéristiques purement physiques que dans son attitude, dans la manière dont elle s’exprimait et réagissait instinctivement à ce qui lui arrivait : à la voir, Saïl avait comme l’impression de se retrouver face à deux entités distinguables incarnées dans un même corps. L’une était la créature vampirique flamboyant d’une présence carnassière qui se manifestait principalement par le biais de ces yeux dont le rougeoiement s’intensifiait lorsque la soif de sang gagnait en impériosité, et c’était là la partie de Kira qu’il y avait de plus redoutable, d’une humeur de bête fauve terrifiante et implacable qui aurait été capable de ruer comme une furie pour s’approprier ce qu’elle désirait. L’autre était la rémanence sans doute plus puissante que l’on aurait pu le croire de la jeune fille qu’elle avait été, de cette humaine aux goûts d’une sage simplicité et à l’humeur tempérée qui se laissait distinguer par la modération et la sociabilité dont elle faisait preuve au lieu d’assaillir l’homme-loup comme ses pulsions l’y poussaient sans doute.
Bien sûr, il était loin d’être impossible qu’il se trompât, mais il lui paraissait qu’elle lui était semblable dans la mesure où lui-même était à la fois loup et humain, et devait constamment mener la barque de sa mentalité de manière à rester aussi alerte et vif que l’animal sans se laisser aller à sa brutalité et à son impulsivité qui le poussait en ce moment même à charger la vampire pour lui montrer de quel bois il était fait et lui en faire voir de belles. Pour partager sa nature dans une certaine mesure, il savait toutefois qu’il aurait été une erreur d’assimiler un tel état d’esprit à un dédoublement de personnalité : certes, il y a avait toujours un côté qui faisait davantage surface que l’autre selon les circonstances, mais il ne s’agissait pas tant d’une lutte sous-consciente d’influences que d’une question de variabilité du tempérament. De la même manière qu’une personne pouvait se montrer d’une inflexibilité inébranlable en public et tendre comme une nourrice dans son intimité, leur comportement à elle et à lui variait en fonction de ce à quoi ils faisaient face et de leur humeur.

Aux premières paroles qu’elle prononça, il lui sembla que c’était la dévoreuse d’humains qui parlait en laissant s’exprimer son égoïste soif de sang sans égards pour les vies qu’elle prenait, et cela donna envie au loup-garou de montrer ses crocs devant une pareille désinvolture : quoi, alors qu’elle aurait pu faire preuve de miséricorde et épargner des victimes peut-être innocentes, elle préférait se servir sans aucun sens de la mesure et pomper avidement ce fluide si précieux en faisant fi de l’hécatombe qu’elle provoquait ainsi à long terme ? Cependant, il savait qu’il ne fallait pas ruer dans les brancards en se fiant à la première impression pour tirer de trop hâtives conclusions, et tint ainsi la bride de ses velléités le temps au moins de voir ce que Kira allait pouvoir avoir à dire pour sa défense… et il s’avéra qu’il eut raison lorsqu’elle montra que son refus de faire dans la demi-mesure venait de préoccupations fondées et non d’une paresse aux accents de violence gratuite : c’était qu’elle avait malheureusement raison, et en se mettant à se place –ce qu’il ne put tout de même pas faire sans un frisson de répulsion-, il concevait tout ce que l’existence d’un vampire avait de maudit, car c’était une non-vie de parasite comme elle le disait elle-même. Ni vivant, ni mort, condamné à jamais à tracer le chemin de sa vie en peignant sa route de sang, obligé de faire passer de vie à trépas ceux dont il partageait jadis l’appartenance raciale… non, véritablement, en dépit de tout ce que des créatures pareilles pouvaient avoir d’horrible et de malsain, il ne pouvait laisser le rejet et le dégoût prendre le dessus sur la compassion et la pitié : il restait altruiste jusqu’au bout des griffes, et était incapable de se résoudre à classifier purement et simplement quelqu’un comme un rebut indésirable avec pour seul fondement d’un tel ostracisme son appartenance raciale. En vérité, le statut de la jeune femme de marbre était d’autant plus précaire qu’elle n’était pas aussi invulnérable que sa nature extraordinaire aurait pu le faire penser : les vampires ne représentaient qu’un petit groupement comparé à la masse des humains et autres créatures humanoïdes qui, si elles venaient à prendre pleine conscience d’une pareille menace, auraient bien été capable de mettre sur pied une traque sans pitié pour exterminer ces « monstres » jusqu’au dernier. Saïl lui-même savait bien que dans le cas ou un raid organisé aurait été lancé sur sa tanière, il n’aurait peut-être pas été capable de le repousser même en utilisant le maximum de ses capacités meurtrières, et qu’il y aurait eu de fortes chances qu’il fût forcé tôt ou tard à rendre les armes.

Kira aurait pu en rester là, mais elle ne se contenta pas de si peu, rebondissant sur le sujet pour le retourner contre l’homme-loup et même enfoncer le clou en faisant dévier l’atteinte afin de rediriger l’épée de l’argument contre lui, en pointant la lame acérée contre sa poitrine et lui en assenant de petites attaques à coups de questions et d’accusations pour l’acculer au pied du mur et le forcer à répondre. Serrant les dents et recroquevillant ses pattes postérieures en une attitude plus défensive, il accusa difficilement le choc, les rouages de son cerveau tournant à toute allure pour trouver une réponse digne de ce nom à la contre-attaque verbale ; et ce n’était pas évident de répliquer, car ce qu’elle mentionnait là était le noyau dur de la cruauté du monde et des impératifs de la survie : « Manger ou être mangé » (ou mourir de faim), c’était ainsi que s’énonçait la dure loi de la jungle que des savants comme Darwin ne faisaient que raffermir le plus objectivement du monde. Bien sûr, cette notion portait sur les animaux, mais malgré tout ce qu’un humain pouvait prétendre du haut de son orgueil, qu’est-ce qui différenciait un homme d’une bête dans le fond ? Ils avaient tous les deux autant envie de survivre, et fuyaient résolument la mort, criant désespérément lorsqu’ils la sentaient approcher : qu’est-ce qu’il pouvait y avoir à dire contre ça ?
Il devait bien y avoir quelque chose quand même ! Tous ces siècles de savoirs n’avaient pas pu buter sans cesse sur un tel obstacle sans pouvoir y trouver une réponse valable, et Saïl était certain d’avoir entendu plus d’une fois des théorèmes sur l’absence d’âme chez un animal, mais comme le faisait remarquer le cynique Woody Allen, « c’est ça l’ennui avec la philosophie ; elle n’est pas tellement fonctionnelle une fois qu’on est sorti de l’école. »

Mais en fin de compte, en fouillant dans ses souvenirs et en s’activant les méninges, il finit par parvenir à l’argument précis qui affirmait qu’ôter la vie d’un animal n’avait rien à voir avec le fait de prendre celle d’un homme, en ce qui lui parut sonner comme une révélation pour laquelle Terra était pour ainsi dire tout indiquée :

« Les animaux n’aiment pas. » Souffla-t-il, tête baissée, avant de la redresser pour faire dûment face à Kira et développer son point de vue après avoir pris une bonne inspiration : « Une lionne peut protéger ses petits, mais c’est uniquement pour perpétrer l’espèce. Un chien peut être fidèle à son maître,  mais c’est une relation d’intérêt et de loyauté aveugle. L’instinct et les automatismes régulent les affects des animaux alors que les humains peuvent aimer. Bien sûr, les humains peuvent haïr et être haïssables, mais ils sont aussi capables d’aimer et d’être aimables. L’amour est ce qui différencie l’animal de l’homme, et c’est pour ça que je concède à me nourrir d’animaux alors que je refuse de blesser une créature humaine. »

Comme une conclusion de son argumentation, il laissa ses larges pattes quitter les mains de la demoiselle morte-vivante et remonter doucement pour prendre prise de part et d’autre de son visage qu’il englobait sans aucune difficulté, l’étreinte délicate incluant même une partie du cou et du crâne, ne laissant qu'un espace afin de ne pas masquer le champ de vision des yeux rubis. Comme un masque bienfaisant, les paumes diffusèrent à nouveau leur inépuisable chaleur, ravivant les parcelles de peau glacées un moment auparavant, et si dans une posture pareille, Khral aurait pu lui tordre le cou ou attirer sa tête à lui pour lui arracher la gorge, l’absence totale d’hostilité dans ses gestes aussi bien que dans son regard laissait entendre avec une éloquence muette qu’il n’en ferait rien. C'était que les propos reconnaissants de l’immortelle donzelle n’étaient pas tombés dans l’oreille d’un sourd, et voyant qu’un tel traitement lui était agréable, il était plus qu’heureux de le poursuivre et de lui transmettre avec toute son énergie tout ce qu’elle pourrait trouver de bienfaisant de sa part.  Le bon docteur Ursoë faisait plus que jamais surface depuis le début de la rencontre de la vampire et du loup-garou, et il s'exprimait avec toute la force et tout l'allant de son humanisme, la flamme de sa conviction brûlant sans agressivité dans ses pupilles à la tranquille couleur noisette.

« Et toi, Kira. »
Reprit-il d’une voix placide et amène, prononçant son nom avec des intonations affectueuses et de bienveillantes. « Ne préfèrerais-tu pas ne pas tuer des êtres qui aiment ? »
« Modifié: vendredi 22 mai 2009, 13:05:42 par Saïl Ursoë »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.




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