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Intempéries sur Seïkusu. (Supergirl)

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Imogen H. Pierce

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Intempéries sur Seïkusu. (Supergirl)

lundi 16 septembre 2013, 16:34:21

Rodna IV, 2357 :

Le bruit des tirs résonnait dans tout le quartier. Les habitations flambaient, explosaient ou implosaient et causaient autant de dégâts collatéraux que les tirs perdus. Des cris déchiraient la nuit, ainsi que des plainte et des mises en garde. C'était le chaos.

Moi, je me tenais dans l'encadrement d'une porte, sur le seuil d'une maison. Face à moi, il y avait Me'Ro, le leader de l'une des factions du gang qui nous occupait actuellement. Je le regardais, d'un air froid, et pointais mon arme sur lui. Il eut un réflexe étonnant, et fit un bond vers moi pour me désarmer. Son bond gigantesque, lui fit franchir les deux mètres qui nous séparaient avec une grâce et une agilité étonnante. Il réussit à me prendre par surprise, et mon rayon électrochoc frappa la porte derrière lui avant que son pied griffu, tel une main, ne m'arrache l'arme. Cette dernière valsa, loin derrière moi, tandis que je me reprenais aussitôt et que, de ma main libre, j'attrape le pied de Me'Ro. Utilisant sa force contre lui, je le retournais et il s'écrasa au sol, me labourant la main.

Sans grimacer, je me jetais aussitôt sur lui pour essayer de l'immobiliser, mais il rétorqua en me propulsant, avec les muscles puissants de ses cuisses, jusque dans le porche de la maison d'en face. Mon dos vibra méchamment, me faisant serrer les dents, tandis que je me redressais après avoir roulé sur moi-même. A peine debout, je contrais son attaque avec mon avant-bras, ses poings s'écrasant dans le vide au-dessus de ma tête. Mon pied droit partit pour lui écraser l'une des deux articulations de ses jambes, mais l'enfoiré sauta et évita lestement mon attaque. Il m'entraîna avec lui, et je me retrouvais le dos au sol, le souffle coupé, avec son bassin assis sur mes hanches.

Je n'étais pas pour autant immobilisée. Profitant de ce qu'il essayait de me lacérer de partout, je ramassais trois pierres dans ma main droite et les écrasais avec violence sur le côté gauche de son visage. Il grogna, et partit à la renverse sous le coup. Je me libérais de son emprise, mal en point, et sortit mon arme de secours qui se trouvais entre mes seins. Je tirais trois fois. Seulement une salve d'énergie atteignit sa cible. Le dernier coup. Il avait évité les deux premiers, bondissant sur le côté droit. Pour le dernier coup, j'avais anticipé, et il a sauté pile à l'endroit où je visais.

La salve d'énergie, pourtant puissante, ne le mit pas K.O. A moitié sonné, il tenait encore debout et sa rage redoubla. Je visais soigneusement, profitant de ce qu'il n'avait pas encore la capacité d'éviter une seconde salve, et tirais.

Le temps sembla suspendre son cours. Alors que la salve d'énergie fonçais sur lui à grande vitesse, il sortit tout à coup une petite arme de poing et tira. En plus de stopper mon tir, il me le renvoya.

« Connard... »

Suspendue dans les airs durant un instant, je me tordis de douleur lorsqu'un grand éclair blanc m'aveugla.

Au même moment, sur Terre, 344 ans plus tôt, en 2013 :

Un éclair blanc fracassa la nuit d’un noir d’encre. Un trait de feu fit exploser une maison, sur les quais. Un cratère, au centre des ruines, abrita un cocon de métal. Lentement, celui-ci se résorba et laissa une jeune femme, brune, bien amochée, au centre du cratère.

La femme inconsciente resta ainsi, toute la nuit, dans les flammes mourantes qui laissèrent des braises incandescentes.
« Modifié: mardi 17 septembre 2013, 01:25:17 par Imogen H. Pierce »
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E.S.P.er

Re : Intempéries sur Seïkusu. (Supergirl)

Réponse 1 mardi 17 septembre 2013, 10:57:59

*BANG !*

La balle du revolver S&W, une grande spécialité américaine, atterrit dans la tête du comptable. Sa cervelle vint s’éclater contre le mur, derrière le guichet, et l’homme s’écroula sur le sol. L’homme encagoulé se retourna alors, balançant le sac comprenant les billets de banque à son complice.

« Vite, vite ! »

L’homme tenait dans sa main un fusil à pompe, et dans l’autre le sac noir. C’était un sac de sport, qu’on utilisait généralement pour entreposer des bouteilles d’eau, des crampons, des vêtements de sport... Il sortit rapidement. Le soleil était paresseusement en train de se lever, baignant au-dessus de quelques nuages. C’était une vision enchanteresse, très belle, mais aucun des protagonistes présents n’avait le temps de s’y accorder. Il y avait deux morts dans l’agence, une petite agence de quartier. Les braqueurs étaient ici depuis une demi-heure, et avaient attendu que l’agence s’ouvre pour attaquer. L’agence ouvrait à l’aube, du côté du port, à la lisière de la Toussaint, et la petite bande envisageait de la braquer depuis un certain temps. Ils n’appartenaient pas aux Yakuzas, mais étaient une bande d’amis issu de la Toussaint. Un gang de rue, n’ayant rien à voir avec les Yakuzas, en ce sens qu’ils étaient indépendants. Ils faisaient parfois affaire avec les clans, mais se servaient parfois pour eux-mêmes. C’était la raison d’être de ce braquage. Ce que les braqueurs ignoraient, c’était que l’agence était sous la protection des Yakuzas, et que deux d’entre eux étaient à proximité.

Quand les coups de feu résonnèrent, abattant les deux employés, les deux Yakuzas, qui fumaient dans la ruelle, sortirent leurs armes. Rien à voir avec de vulgaires revolvers, ils avaient de puissants pistolets-mitrailleurs, et comprirent que des petits cons étaient en train de les attaquer. Ils portaient des vêtements élégants, des lunettes de soleil, et on pouvait voir leurs tatouages.

« Merde ! Viens ! »

Ils s’avancèrent dans la rue, et virent trois types près d’une voiture, ayant ouvert le coffre, balançant un sac noir à l’intérieur.

« Sales petits connards... »

L’un des revenus essentiels des clans de Yakuzas venaient de l’argent que tous les commerçants payaient pour leur « protection ». C’était l’une des grandes spécialités de n’importe quelle mafia, et, vu les coups de feu, il y avait sûrement des morts. En somme, les deux Yakuzas risquaient de se faire méchamment engueuler par leur supérieur, Koda, qui était leur kyodai. L’homme les visa avec son Ingram, mais les braqueurs les repérèrent, et firent feu également. Les balles de l’Ingram rugirent, et une dizaine de balles atteignirent le dos du braqueur qui refermait le coffre. Il ne poussa qu’un bref hurlement avant de chuter sur le sol, laissant une traînée de sang derrière lui.

La voiture se mit à démarrer, alors que le second braquer bondissait sur la plage arrière. Les deux Yakuzas firent feu, et plusieurs balles explosèrent le pare-brises, ainsi que l’un des feux arrière. Le braqueur répliqua en tirant au hasard, mais la voiture réussit à démarrer.

« On les poursuit ! Vite ! »

Le duo fila dans la ruelle, vers leur moto, une flamboyante Suzuki.

Dans la voiture, la situation n’était guère encourageante.

« Merde,c'est qui, ces pédés ?
 -  Ça va, Eiki ?
 -  Ils m’ont eu au bras... Et merde, ils ont eu Fumiaki !
 -  J’ai vu, putain ! Je croyais que cet endroit était pas surveillé ! C’est des Yakuzas !
 -  ’Faut qu’on rejoigne l’entrepôt. »

Le chauffeur, Fubuki, hocha la tête. L’entrepôt était le repaire de leur bande, et le groupe les attendait. Il portait des mitaines, et attrapa son Nokia, puis le balança vers Eiki, afin que ce dernier appelle Kuma, leur chef. Kuma leur avait dit que tout se passerait bien à l’agence. Et Fumiaki était mort ! Au moins quinze balles dans le corps !

Il regarda dans son rétroviseur, et vit une moto qui se rapprochait à toute allure. Ce ne pouvait tout de même pas être eux... Il se mordilla les lèvres, quand la moto se rapprocha, et qu’il vit que le motard à l’arrière de la moto tenait un pistolet-mitrailleur, et fit feu. Les balles explosèrent contre les portières, provoquant un tintamarre infernal. Fubuki, qui avait voulu être pilote de courses de rues, et qui explosait toujours ses potes sur Forza Motorsport 4, sentit la panique le saisir, et braqua à gauche, forçant la moto à piler. Il franchit la ligne continue, et vit un camion de marchandises face à lui.

« Fubuki, merde !! »

Fubuki fila sur la gauche, et alla sur le trottoir, longeant le port. Il heurta le mur, le rétroviseur extérieur explosant, tandis que le camion se mettait à klaxonner furieusement. Fubuki tremblait, moite, et fila sur la gauche, rejoignant une entrée du port. Il dut braquer sur la gauche pour éviter le mur d’un entrepôt, et dut pour cela piler. Malheureusement, piloter une voiture n’était pas comme dans un jeu vidéo. Les pneus se soulevèrent, la voiture fit une embardée, et Fubuki perdit le contrôle. La voiture fit une série de tonneaux, et Eiki, qui n’avait pas eu le temps de mettre sa ceinture, rebondit à gauche et à droite. Il eut un traumatisme crânien, entraînant une hémorragie cérébrale, tandis que Fubuki survécut, alors que la voiture s’arrêta en heurtant un autre entrepôt, stoppant sa course, un pneu tournant dans le vide.

Clignant des yeux, l’homme se mit à éternuer, regardant autour de lui. La voiture était en mille morceaux, ayant laissé derrière elle une traînée de débris. Il voyait une flaque d’essence couler, ainsi que quelque chose de poisseux entre ses yeux. Du sang. Des bruits de pas se rapprochaient.

« C’est Fubuki !
 -  Ce connard a ramené des Yakuzas... Récupérez le fric, vite ! »

Gémissant, Fubuki entreprenait de remuer son corps, mais sa jambe était comme coincée. Il essayait de parler, mais aucun son ne sortait de sa bouche. Il vit des souliers élégants, un pantalon blanc. Kuma s’habillait toujours avec une certaine élégance. On ouvrit le coffre, récupérant l’argent.

« Euh... Boss... Y a un truc vachement bizarre ici ! »

De quoi est-ce qu’ils parlaient ? Fubuki n’y comprenait rien, se demandant pourquoi on ne venait pas le secourir.

« Vous avez tué les motards ? Mettez les cadavres dans le coffre de la voiture, embarquez la moto... Et prenez la fille. Remuez-vous, merde ! »

La fille ? Quelle fille ? Fubuki n’y comprenait rien, et avait vu le portail d’un des garages de l’entrepôt s’ouvrir, montrant un garage clandestin de vols de voitures. On amenait la moto des Yakuzas, tandis qu’on balançait les deux cadavres à l’intérieur. Il vit également que plusieurs hommes traînaient une femme ayant l’air en piètre état. L’ensemble dura moins de cinq minutes, ne laissant plus que Kuma.

« Pas de témoins, mon gars... La vie est une pute, comme on dit. »

Il balança son mégot, et s’éloigna. Fubuki se surprit à réaliser qu’il pouvait hurler, après tout.
« Modifié: mardi 17 septembre 2013, 20:50:36 par Supergirl »

DC d’Alice Korvander.

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Imogen H. Pierce

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Re : Intempéries sur Seïkusu. (Supergirl)

Réponse 2 mardi 17 septembre 2013, 14:31:52

Je n'étais pas vaillante. Je venais à peine d'émerger de l’inconscience lorsqu'on me saisit par les bras, me traînant jusqu'à une voiture dans laquelle on me poussa. Je ne reconnaissais pas ce type de voiture. Où étaient les propulseurs ? Je croyais voir une de ces antiquités qu'on ne trouvait plus que dans les musées.

Serrée sur la banquette arrière, entre deux hommes, je perdis à nouveau connaissance.

Quand je me réveillais une seconde fois, j'étais allongée sur un lit. Des draps blancs sales me couvraient. En voulant bouger, je remarquais que j'étais menottée aux quatre pieds du lit. Je bougeais, tentant de me défaire des liens de métal qui m'entravaient. Mais, bien que rustiques, ces menottes étaient solides.

Le bruit que je fis en remuant attira du monde. Un homme entra, et prit place sur la chaise à côté du lit. Il m'observa un long moment, sans rien dire. Puis il prit la parole :

« De quoi as-tu été témoin ? »

Je fronçais les sourcils. Je comprenais leur langue grâce à l'une des puce que j'avais, là n'était pas la question.

« De quoi devrais-je avoir été témoin ? »

Il haussa les épaules.

« Tu n'as rien vu ? Bien. Mais je ne peux pas te laisser vagabonder dans la nature. La prudence m'impose de te garder. »

Il déconne ? Je tirais une nouvelle fois sur les menottes, sans succès.

« Pardonne-moi. Je n'ai pas fait les présentations. Je suis Kuma. Et toi ? »

Le brusque changement de ton de Kuma, passant du froid au cordial, me surprit.

« Où suis-je ? »

Il ne répondit pas à ma question. Il embraya sur un autre sujet.

« Si tu ne te montres pas coopérative, c'est dommage. Mais je crois que je tiens, avec toi, un nouveau business. Et ça tombe bien, le précédent vient de tomber à l'eau. »

Il siffla, et un autre homme arriva, avec une seringue.

« Qu'est-ce que ça veut dire ? »

Il ne répondit pas, et s'approcha en faisant jaillir un peu de liquide de la seringue. Il immobilisa mon bras, malgré mes soubresauts pour échapper à sa poigne, et enfonça l'aiguille sans douceur. Il libéra le liquide dans mon corps tandis que je fermais les yeux pour faire en sorte de le neutraliser. Je le sentis clairement se répandre dans mon organisme, mais je répliquais et forçais mon métabolisme à le rejeter.

Je suais brusquement, rejetant le liquide par les pores de ma peau, en gardant juste un fragment que je conservais avec la ribambelle d'échantillons que j'avais déjà.

« Impressionnant. »
« Je vais me détacher, et te faire passer le goût du mystère. »

Je le regardais dans les yeux, froidement, tandis que je parlais. Il me tourna le dos pour toute réponse, et sorti de la pièce.

Refermant les yeux, j'entrais dans une transe légère pour activer les puces qui me permettaient de me connecter au réseau local. Les données que je reçu ne me disaient rien. J'analyserais ça tout à l'heure. Pour le moment, j'étais en train d'extraire le souvenir du visage de l'homme de ma mémoire pour le rentrer sur le réseau accompagné d'un alerte rouge "Enlèvement". Je restais dans ma transe par la suite, restant connectée, pour que ceux qui intercepteraient mon message d'alerte puisse me trouver. Géolocalisation quoi...
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E.S.P.er

Re : Intempéries sur Seïkusu. (Supergirl)

Réponse 3 mercredi 18 septembre 2013, 03:02:02

AIZEN

« Je crois qu’ils ont besoin d’une petite correction...
 -  Petite ?
 -  Ouais, bon, c’était un euphémisme… Ce que je veux dire, c’est qu’on va aller niquer la gueule de ces sales enfoirés.
 -  Alors, on est sûrs que c’est eux ?
 -  Non... Mais ça ne change rien, ça reste des connards malgré tout. »

Quand Koda avait appris que deux de ses hommes étaient morts, il avait été légèrement furieux... Ce qui n’était rien quand Aizen avait appris ce qui s’était passé. Au sein du clan, Aizen n’était pas n’importe qui. C’était le supérieur de Koda et des autres kyodai, le shateigashira du clan. Aizen avait été réveillé du lit en apprenant qu’une agence avait été braquée, et que deux employés avaient tué. On l’avait dérangé alors qu’il avait dans les bras deux agréables poulettes, des jumelles, qui lui avaient fait apprécier la beauté des courbes nippones. Des geishas des temps modernes, qu’on dissociait par leurs tatouages : « Dragon » avait un énorme tatouage de dragon enroulé sur son dos, tandis que « Papillon » avait un tatouage de papillon extrêmement réussi et sophistiqué à hauteur des omoplates.

Une bande avait attaqué leur agence, ce qui augmentait le nombre des braquages sauvages que le clan affrontait. Tout avait commencé il y avait trois semaines, quand des types encagoulés armés de fusils à pompes et de pistolets américains, des revolvers, avaient débarqué dans une épicerie, braquant l’épicier. L’épicerie était sous la protection du clan, et le propriétaire n’avait guère été content d’apprendre que les Guramu n’avaient pas pu le protéger efficacement. Or, les braquages avaient lieu sur le territoire géré par Aizen, un territoire où l’impôt obtenu de la part des commerçants constituait une manne de revenus non négligeable, bien plus que les putes ou la dope. En d’autres termes, cette petite bande était en train de le discréditer, et, plus cette affaire enflait, plus il avait peur que l’Oyabun ne le tue. Akihiro Guramu était le grand chef des Guramu,  probablement l’un des types les plus influents de cette ville. Tous les membres du conseil municipal étaient ses amis, de même que la plupart des commissaires de la ville, et on lui prêtait même des amitiés au sein du Parlement. Akihiro avait le bras long, et n’hésiterait pas une seconde à supprimer Aizen, si ce dernier échouait à pacifier la région. Et Aizen n’avait pas spécialement envie de mourir. Il n’aimait pas particulièrement Akihiro, mais il aimait suffisamment la vie qu’Akihiro lui offrait pour vouloir autre chose. Les Guramu ne respectaient guère les traditions, et étaient considérés comme l’un des clans les plus meurtriers de la ville. Le clan avait fortement gagné en importance au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, en aidant les Américains à débusquer les agents communistes envoyés au Japon. Ils avaient aidé à la reconstruction de Seikusu, qui avait été bombardée pendant la guerre, et qui avait perdu l’essentiel de ses ouvriers et de ses matières premières. Depuis lors, les Guramu avaient étendu leur influence sur Seikusu, et se répandaient peu à peu dans toute l’Asie du Sud-Est. Les Guramu avaient aussi réussi à obtenir une fructueuse alliance avec le Yamaguchi-gum, l’une des plus puissantes mafias du monde entier, avec un chiffre d’affaire estimé à plusieurs milliards de dollars par an, et plus de 30 000 hommes à son service.

Par conséquent, ce n’était pas une bande de petits cons qui allaient ridiculiser les Guramu. Aizen savait très bien qu’il n’était qu’un pion jetable au sein du clan, et avait donc mené son enquête. Il avait ainsi appris, en capturant plusieurs petites frappes, et en les torturant, un art dans lequel le crime organisé excellait, qu’il y avait, dans les rues, une petite frappe, qu’on appelait « Smoking ». Smoking était un malfrat qui prétendait protéger le quartier des Yakuzas, et voyait en eux un pouvoir obsolète et dépassé. Il multipliait les braquages pour montrer que la protection des Yakuzas ne voulait rien dire. Ses actions avaient conduit plusieurs commerçants, comme une laverie, à refuser de payer l’argent de leur protection. Aizen était dans une situation délicate. La procédure usuelle voulait qu’on envoie des casseurs pour mettre la pression sur les récalcitrants, mais cet exercice était compliqué. S’il faisait ça, il donnerait raison à Smoking, et risquerait de provoquer une guerre des clans avec des Yakuzas rivaux, qui y verraient une brèche. Aizen était d’ailleurs sûr que Smoking travaillait pour un clan rival. Si Aizen déclenchait une guerre, Akihiro ne se contenterait pas de le tuer, il exécuterait toute sa famille, probablement sous ses yeux, avant de lui faire sauter la cervelle, afin de rappeler à ses lieutenants qu’il ne fallait pas faire de conneries quand on servait Akihiro Guramu.

Aizen avait ordonné une réunion de tous ses lieutenants, ses kyodai, chez lui. Il n’avait pas encore emménagé dans sa maison, attendant que les travaux soient finis. Les différents lieutenants parlaient entre eux, tandis qu’Aizen, debout devant une vitre, fumait.

L’aube s’était levée depuis deux heures, maintenant, et il essayait de se détendre. Aizen était un homme musclé et bien bâti. Il portait un survêtement de sport, car, après tout, il était chez lui. Papillon et Dragon dormaient toujours, et il ne voulait pas faire de bruits, afin de ne pas les réveiller. C’était un gentleman, après tout. Il était amoureux des deux jumelles, et Dragon portait d’ailleurs son enfant, en gestation dans son ventre.

« Évidemment qu’ils ont besoin d’une correction ! Ce connard de Smoking m’a encore une fois ridiculisé ! Merde, vous savez combien de fric il y avait là-dedans ?!
 -  Ils ont une taupe, Aizen, c’est sûr... Quelqu’un leur dit qui... »

Devant cette réponse, qui était d’une stupidité sans nom, Aizen résista à l’envie de tirer une balle dans la tête de cet abruti. Akihiro l’aurait fait, mais, si en plus, Aizen se mettait à descendre les siens, Akihiro l’empalerait... Il se força à rester calme, tirant longuement sur sa cigarette.

« Je veux savoir la planque de ces fils de putes.
 -  J’ai peut-être une piste, Aizen… »

C’était Reita qui venait de parler... Le moins qu’on puisse dire, c’est que l’homme méritait son nom (en japonais, « reita » veut dire « grande sagesse »).

« Mes gars ont capturé un loustic hier... Proche de Smoking, un dealer à la sauvette. J’attendais de vérifier l’info’, mais je crois que le temps presse... Le gars a fini par être très correctif avec l’aide d’un pied-de-biche, et il a donné une adresse... Un entrepôt dans le port qui servirait de base à Smoking. Officiellement, c’est un garage de bagnoles, mais, d’après cette pédale, l’endroit sert aussi de couverture pour un trafic de vol de voitures. »

Aizen hocha la tête. C’était mieux que rien.

« Je vais aller voir. Vous, réunissez vos hommes, et tenez-vous prêts. Si ce trou à rats est la planque de cet enculé, je veux qu’on fasse le ménage là-dedans. »



KUMA

Kuma, alias « Smoking », était un homme qui, en toute circonstance, cherchait à conserver une certaine élégance. Il était né dans la Toussaint, dans ce quartier minable et pourri où on dealait de la drogue à l’âge de onze ans. Il n’avait pas fait exception. Bien qu’il ait un nom japonais, Kuma était un fils de Coréen. Ses grands-parents s’étaient réfugiés au Japon lorsque la Corée avait sombré dans l’ère du communisme. Persuadés que toute la Corée allait sombrer, et que les Occidentaux n’y changerait rien, ils s’étaient enfuis au Japon, à Seikusu. Les Yakuzas dominaient alors en maître, et son grand-père, un modeste pêcheur, revendait toute une partie de ses bénéfices aux Yakuzas, notamment les Guramu. Un beau jour, sa femme avait eu une forte pneumonie, mais son grand-père n’avait pas les moyens de payer, s’il continuait à reverser sa maigre pitance aux Guramu. Il avait choisi de payer les frais médicaux pour que sa femme se fasse opérer. Une semaine après, les Guramu avaient été le voir, lui avaient brisé les deux genoux avec des pieds-de-biches, avant de le tuer, d’une balle en pleine tête. Ils avaient également abattu sa femme, et battu son fils, soit le père de Kuma. Père était alors un adolescent courageux, mais ça ne l’avait pas empêché d’être frappé, sous les yeux de son fils. Ils en avaient profité pour saccager la maison, et placer sur la gorge de Kuma un couteau aiguisé, menaçant de lui trancher la gorge sous les yeux de son père s’il s’entêtait à ne pas vouloir payer.

Ce qui avait surtout révolté Kuma fut que son père n’avait jamais cherché à se venger, ou à appeler la police. Au contraire, il avait posément expliqué à Kuma que les Yakuzas constituaient la véritable police du Japon. Ils savaient tout, et la police était corrompue. Et lui n’était pas un héros, contrairement à tous ces personnages que Kuma lisait dans ces mangas, des individus courageux, héroïques, qui refusaient de se rendre face aux méchants, et qui cherchaient toujours à se battre. Kuma avait décidé de protéger son quartier contre les Guramu. Il avait suivi l’un des plus vieux principes de la guerre : se rapprocher de l’ennemi, afin de mieux le connaître que ses amis. Il avait travaillé pour les Yakuzas pendant des mois, afin d’apprendre qui ils étaient. Il avait découvert avec effroi que les Yakuzas formaient un empire tentaculaire virtuellement invincible, une Hydre immortelle qui se renouvelait constamment, et bénéficiait du soutien implicite des forces de police. Mieux valait une criminalité organisée et mafieuse qu’une criminalité à la sauvage, anarchique et incontrôlable, comme dans les favelas brésiliennes, devenus des zones de non-droits. Mais Kuma, lui, n’avait jamais oublié cette nuit où les Guramu étaient venus, et le tranchant froid de l’acier contre sa gorge, le baiser du poignard sur sa peau, et le fait qu’il avait mouillé son pantalon, faisant pipi dedans.

Smoking savait que ça allait barder. Les Guramu connaissaient bien trop la ville, et il savait qu’ils avaient enlevé Kim. C’était bien pour ça qu’il avait ordonné qu’on attaque cette agence. Kim était un ami, un Coréen, un vieil ami d’enfance, et il était probablement mort, maintenant. Cet entrepôt était leur planque principale. Kuma l’avait légalement racheté, afin d’en faire un garage, qui avait une activité légale, mais aussi illégale. Ses hommes réparaient des voitures pour pouvoir les voler ensuite, les désosser, et revendre les pièces détachées un peu partout. Bien sûr, ils effectuaient aussi du car-jacking, et volaient des voitures stationnées, multipliant les techniques. Une femme aguicheuse faisait de l’auto-stop pour que le riche banquier pervers s’arrête, ou ralentisse suffisamment, pour qu’un complice le jette à terre, et ne vole sa voiture. L’affaire avait suffisamment bien marché pour permettre à Kuma, qui connaissait des contacts auprès des Russes, d’obtenir quelques armes à feu, afin de mener des braquages. C’était une guerre pour reconquérir le territoire. Un loup aux dents aiguisés qui attaquait le flanc d’un autre loup fatigué.

Kuma avait été à la fac’. C’est là qu’il y avait rencontré Jun, une Chinoise qui avait réussi à faire ses études au Japon, et ne voulait pas retourner dans son pays. Ils s’étaient mariés, autant par amour que par politique, pour qu’elle puisse rester au Japon après avoir fini ses études. Ils avaient une maison dans un autre quartier de Seikusu, et Jun avait mis au monde leur fille. C’était cet évènement qui avait précipité la volonté de Kuma d’agir, de se constituer un solide réseau pour se protéger contre les Yakuzas. Et voilà où il en était. Les Guramu allaient attaquer, mais c’était un revers prévu. Kuma saurait comment rebondir. Ce qui l’inquiétait, en réalité, c’était cette femme qui se trouvait dans l’une des chambres en hauteur. On l’avait trouvé par hasard, dans ce qui ressemblait à un cratère d’astéroïde, et l’injection ne lui avait rien fait.

*Je n’ai jamais cru à ces rumeurs sur un autre monde... Mais il existe des individus qui volent en l’air, alors, partant de là... Il doit probablement s’agir d’une mutante du gouvernement...*

La rumeur disait qu’il se passait des choses bizarres près de la base américaine.

« Je vais me détacher, et te faire passer le goût du mystère. »

Il sourit légèrement, résistant à l’envie d’une cigarette, et attendit plusieurs secondes, avant de parler :

« Ça, je n’en doute pas, tu as l’air d’être une tueuse née... Tu es l’une de ces mutantes, hein ? Je me demande où est ton costume... Vous, les Américains, vous croyez que le Japon vous appartient, comme n’importe quoi en ce monde. Mais, aussi résistante que ton esprit puisse l’être, ces drogues-là ont été testées sur des militaires, et leur ont fait perdre l’esprit. J’ai assez d’ennemis comme ça pour ne pas avoir le gouvernement en face. »

Inutile donc de faire une demande de rançon, mais il savait quoi faire de cette petite. Il fit signe, et Daisuke, qui était un ami de la fac’, un médecin, s’approcha, et enfonça sa seringue, avec une drogue beaucoup plus forte.

« On est les derniers vrais héros de cette putain de société corrompue jusqu’à la moelle... J’ignore ce que tu nous veux, mais tu me permettras de rebondir quand j’en aurais fini avec toi. »

DC d’Alice Korvander.

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