Tempête du désert [pv]

Le désert rocheux s'étendait encore à perte de vue devant le convoi  ayant quitté Novac près de quatre heures plus tôt et la destination du petit groupe était encore à près de deux heures de route. De quoi rendre nerveux les membres de l'unité SABLE, qui escortaient le ravitaillement en vivres et armes d'une des dernières bases avancées érigées par l'archipel dans le cadre de la lutte contre les Formiens. Fort Viriginia était placé dans une partie du désert où les bestioles n'avaient encore que peu de positions et les soldats postés là-bas établissaient ce qui était destiné à devenir un solide tête de pont face aux arrières de la Ruche. "Un avantage tactique certain !" avait martelé le bureau de la Baronnie en charge de la défense, qui ne tarissait pas d'éloges sur la légion de l'armée régulière occupant Fort Virginia. Pensez donc, de courageux soldats livrés à eux-même dans une zone hostile, à plus de 6 heures des premiers renforts !
Mais en attendant, les courageux soldats-pionniers de Virginia avaient besoin de bouffe et de matériel, contraignant les membres de SABLE à se lancer dans une périlleuse épopée dans le désert dont bien des soldats se seraient bien passé. SABLE n'était pas une unité de débutants, pourtant. Un ramassis de soldates qui se retrouvaient assignées aux missions extérieures bégnines après avoir merdé à un moment de leur plan de carrière ne constituait pas pour autant un ramassis d'incapables, mais de l'avis de toutes cette mission ("Opération Lonewalker" selon les bordereaux de la défense) puait la merde. Trois camions certes blindés et possédant quelques tourelles transportaient le matos ainsi que les rations et deux Armpods vieille génération constituaient l'avant et l'arrière garde, en plus des membres de SABLE qui avait pour l'occassion revêtu le Bodyguard IV, ex-squelette adapté aux conditions dites extrêmes. Au moins, le sable ne gripperait pas les articulations de cette encombrante armure ancien modèle.

Dizzie Blade était postée sur le toit du blindé central à discuter vaguement avec son binôme à propos des dernières rumeurs concernant les affrontements avec les formiens quand sa radio crépita dans son casque comme dans celui de toutes ses camarades.

[Signaux thermiques relevés au 6/4.7. En approche rapide, à vos postes de combat !]

L'ordre vint trop tard et les premiers tirs de mortiers frappèrent de plein fouet l'Armpod d'arrière; qui s'écroula lamentablement au sol alors que les SABLES armaient les canons auxquels elles étaient assignées, faisant feu sur les premiers véhicules de pillards qui approchaient en hurlant, leurs propres armes se déversant sur le convoi novaquien qui fut rapidement immobilisé. En effet, le Pod restant jouait de la tourelle et faisait rugir ses canons mais préférait bêtement garder une position stable et arrêtée pour mieux viser. Seulement voilà, les blindés se retrouvaient coincés entre un Pod semblant enraciné dans le sol pour donner la chasse à des ennemis qui ne touchait pas vraiment et les débris d'un autre qui leur barrait toute retraite !

[Passez les tours en automatiques, soldates ! Mettez vous en formation et dégommez moi ces fils de pute !]

L'IA gérant les canons derrière lesquels s'étaient placés les SABLE se vit donc activée, les soldates ouvrant le feu grâce à leurs propres fusils pour multiplier leur puissance et l'acquisition de leurs cibles et cela ne manqua pas d'équilibrer la situation au moins un peu, les novaquiennes gardant à distance les pillards qui les harcelaient. Enfin l'Armpod se mit à faire mouche et ses tirs lourds entamèrent les rangs adverses jusqu'à ce que l'impensable se produise : les roches du sol semblèrent pousser et emprisonnèrent les pattes de l'appareil. Sous la surprise, le pilote arrêta de tirer pour juger la situation et tenter de s'en sortir, mais une langue de feu frappa alors son appareil avant que plusieurs mortiers ne le prennent pour cible et ne finissent par enfoncer son cockpit, les balles se mêlant aux flammes qui firent hurler la soldate aux commandes avant qu'elle ne rende l'âme.
Autant le dire, les filles du SABLE se faisaient descendre comme des pigeons d'argile malgré leur résistance acharnée. Leur petite quinzaine était réduite à une peau de chagrin. La magie qui avait grandement contribué à la perte du Pod les avaient déstabilisées, mais l'une d'elle ne comptait pas en rester là.

Dizzie quitta sa position sans trop d'hésitation et au mépris des hurlements radio de ses camarades qui préconisaient un regroupement dans l'espoir de tenir une sorte de siège, de quoi peut-être décourager les pillards. Attendre ? Pas le style de Blade, qui fonça tête bêche et fit rugir son fusil pour progresser vers lui qu'il lui avait semblé être le magicien du groupe d'attaque. Se mettant à couvert pour recharger et prendre le temps de sa respiration, Blade remontait le petit groupe lorsqu'elle se retrouva à court de munitions. Alors quoi, elle devait faire machine arrière alors qu'elle était arrivée à dessouder autant de pillards ? Hors de question pour elle ! Attrapant les armes de types qu'elle avait abattu après avoir allongé un homme à l'aide d'un coup de crosse de son propre fusil, Blade reprit sa remontée alors que les SABLE continuaient, lentement mais sûrement, d'avancer vers la mort.
Il ne restait plus qu'une poignée d'entre elles qui se défendaient comme de véritables diablesses. Dizzie se disait que si elle parvenait à allumer le magicien, elle pourrait faire fuir les assaillants et sauver celles qui restaient, mais elle présuma de ses forces. La dernière SABLE mourut sous une roche qui l'écrasa, ce qui provoqua le cri de victoire de la plupart des assaillants. Quant à Dizzie, la voilà qui s'était faite encerclée par des brigands goguenards qui estimaient probablement qu'ils auraient tout le loisir de jouer avec elle.

- R'gardez c'qu'on a en bonus du convoi, les gars... Une petite poulette de Novac tout fraîche !
- Ouais, une pute en conserve, j'avais jamais vu ça !
- On va pas te tuer tout d'suite, ma jolie, héhéhéhéhé ! Par contre, vu ce qui restera d'toi quand on sera vingt à t'avoir baisée, tu peux p'têt faire d'suite une p'tite prière !

Elle ne répondit d'abord rien, laissant tomber ses armes à terre alors que les pillards se congratulaient et enchaînaient les blagues grasses. Dizzie releva la visière informatisée de sa suit, puis se débarrassa complètement de son casque qui roula au sol avant qu'elle ne prenne même le temps de dérouler ses longues nattes qu'elle coiffait en macarons lorsqu'elle portait son armure. Des sifflets admiratifs se firent entendre ça et là, tandis que certains la regardaient en se touchant le sexe à travers le pantalon, riant grassement.

- Z'avez raison, les Pue-la-pisse. Je vais prier. Je vais prier les putains de gros tétons de la Baronne de pouvoir éclater la majeure partie de vos gueules d'enfoirés de mes propres mains.

Ses poings tapèrent l'un contre l'autre avec brutalité, donnant l'impression que sa force et la détermination qu'on pouvait lire dans son regard auraient suffi à entamer l'acier du Bodyguard. Seule contre ce nombre et même en comptant sur la mutation, pas sûr qu'elle gagne la partie. Dizzie n'était pourtant pas du genre à s'aplatir face à l'adversité, préférant tenter sa chance d'une façon où d'une autre.
Tout ce qu'elle aurait désiré à ce moment là, en plus de mettre la main sur le magicien qui avait manipulé les flammes et les roches, ç'aurait été une ouverture. N'importe quoi, un petit rien qui lui aurait permis de se lâcher contre les connards agglutinés autour d'elle.

Liste des Amazones présentes :

• Sélène ;
  
• Pirène ;
  
• Karla.

Les Badlands n’étaient pas un endroit où on pouvait faire du tourisme impunément. Cette longue région désertique s’étalant sur des centaines de kilomètres séparait Tekhos d’Ashnard, et l’une de ses pointes, la plus sauvage, remontait vers la Fourmilière. Jadis, il y avait eu ici une grande zone industrielle, avec plusieurs villes, puisant les ressources de riches gisements miniers. Malheureusement, un beau jour, un gros astéroïde avait cru bon de se poser ici, et des ribambelles de monstres avaient envahi la région. Cet endroit avait été le premier lieu concret de la guerre entre Formiens et Tekhanes, et ces dernières, prises au dépourvu, avaient repoussé la menace à l’aide d’une arme nucléaire, qui avait sinistré une bonne partie de la zone, contraignant cependant les Formiens à se replier. Depuis lors, la région était abandonnée, et, si les pics de radioactivité étaient retombés depuis tant d’années, il y avait encore des zones rouges.

Cet endroit était apprécié des ferrailleurs, des aventuriers, ainsi que des guildes, car on y trouvait des fortunes, que ce soit dans les mines, ou dans les villes abandonnées. En revanche, on y trouvait aussi pas mal de monstres particulièrement dangereux, ce qui en faisait une région dangereuse... D’autant plus que l’autorité légale n’existait pas vraiment, ici. C’était une véritable zone de non-droit, que les Tekhanes essayaient progressivement de récupérer, tout en essayant de s’en servir pour repousser les Formiens, ouvrir un second front afin de leur permettre de pénétrer dans la Fourmilière. La construction de Fort Virginia s’inscrivait dans ce sens, et cette construction n’était évidemment pas facile. Outre les raiders et les monstres, les Tekhanes devaient affronter une autre menace, sensiblement plus difficile : le Red Sun.

Le Red Sun était une organisation criminelle bien implantée dans l’État tekhan, en particulier dans cette région, où ils attaquaient les ferrailleurs, les aventuriers, et les expéditions des guildes. Pour rejoindre Fort Virginia, il fallait obligatoirement passer par la ville la plus proche, une bourgade mal famée, Zupeccha. Or, le Red Sun avait une solide influence à Zupeccha, agissant comme une espèce de mafia. En somme, quand un convoi militaire était passé par là, les fonctionnaires s’étaient empressés de prévenir le Red Sun, qui voyait d’un mauvais œil le retour de l’autorité légale dans cette région. Le Red Sun recevait beaucoup d’argent de cette région, et ne voulait pas qu’un concurrent s’installe. S’ils n’avaient pas réussi à empêcher les premiers convois de passer, le Red Sun entendait bien les laisser mourir dans ce désert austère et sinistre.

Une force de frappe avait rapidement été mise sur place. Outre les pillards traditionnels, des fous furieux décérébrés, le Red Sun avait aussi envoyé des mercenaires d’élite, ainsi que les services d’un homme mystérieux, qui ne s’était pas lié aux autres, et restait dans son coin, sans daigner se rapprocher d’eux.

« Les petits oiseaux arrivent... Il est temps d’aller à la récolte. »

Les mercenaires et les pillards se mirent en place, déferlant sur les Tekhanes. Elles n’avaient aucune chance. Il ne s’agissait pas d’un assaut stupide mené par ces sauvages qu’étaient les raiders, mais d’un assaut bien préparé, avec une artillerie, et de nombreux hommes, des professionnels. Ce fut un massacre.

*
*  *

« C’est ta trop forte confiance en toi qui te fait défaut, Karla » martelait Sélène à l’attention de la poupée Amazone.

Ce surnom était vraiment trompeur, mais Karla avait un visage angélique. Une beauté douce et pure qui dissimulait, sous son corps, une véritable hyène. Karla était l’une des Amazones les plus dangereuses qui soit, bénie par la Déesse, au vu de sa naissance très particulière. Durant toute son enfance, ainsi que son adolescence, elle s’était montrée une Amazone redoutable, extrêmement talentueuse. Elle avait commis son premier meurtre à l’âge de 12 ans, sans manifester la moindre hésitation. Elle avait planté son poignard dans le cœur d’un esclavagiste que les Amazones avaient capturé. Il avait craché du sang sur son visage, mais elle n’avait pas failli.

Sélène, Karla, et Pirène, étaient à quelques jours de cheval de la Horde. Le déplacement de cette dernière l’avait amené à longer une zone dangereuse, et Andromaque avait décidé d’envoyer des éclaireurs pour voir si la trajectoire était sûre, afin de pouvoir traverser rapidement ce désert. Compte tenu de la région, la Reine avait décidé d’y envoyer sa fille, la deuxième guerrière des Amazones, ainsi que deux autres Amazones compétentes, Karla et Pirène. La première était née dans un champ de bataille, et sa naissance était tout simplement miraculeuse, puisque sa mère avait été tuée par une flèche ennemie en la mettant au monde. La Chamane qui l’avait mise au monde avait eu les doigts remplis du sang de sa mère, en train de faire une hémorragie. Karla avait survécu, et était née rouge de sang, des pieds à la tête. Pour les Amazones, c’était la proximité de la mère avec un temple sacré qui avait permis à Karla de bénéficier de la protection de la Déesse. Pirène, quant à elle, n’était pas née au sein de la Horde, mais avait prouvé son appartenance à cette dernière en tuant ses parents. Son père était un salopard aigri qui la battait continuellement, et sa mère ne l’avait jamais aimé, étant jalouse de la beauté de sa fille. Elle n’avait eu aucune hésitation à leur trancher la gorge.

C’était donc un trio de choc qui se trouvait là, bivouaquant en paix. Cependant, Karla et Sélène ne tenaient pas en place, et avaient choisi de s’entraîner. Il était de notoriété courante au sein de la Horde que Tallia était la plus puissante des Amazones, la seule qui ait jamais réussi à dompter Sélène, et Karla faisait partie de ces Amazones qui avaient également envie de soumettre la Princesse. Et, face à Karla, il fallait savoir se battre. Karla était une vraie tigresse, mais qui avait une manière de se battre très particulière. Elle se mouvait de manière gracieuse, presque comme si elle dansait, et c’était tout à fait ça. Née sur un champ de bataille, baignant dans le sang de s amère, tuée au combat, Karla était prédestinée à se battre.

Les deux femmes s’étaient battues, et Sélène avait réussi à désarmer Karla. Pirène, de son côté, consultait la carte qu’elles étaient train d’annoter. La Horde comprenait des milliers de femmes. C’était un peuple à part entière. Déplacer la Horde était donc particulièrement difficile, et il fallait tenir compte de nombreux critères : le temps qu’une telle population mettait à se déplacer, le terrain, etc... La Horde comprenait des femmes endurantes et sportives, mais il y avait aussi des caravanes de provisions, de matériaux, ainsi que des enfants, de jeunes bébés qu’il fallait porter, et allaiter.

C’est dans cette circonstance, alors que Pirène lisait tranquillement sa carte, que les Amazones entendirent les coups de feu et les explosions.

« On dirait qu’il y en a qui sont en train de s’éclater... nota Sélène.
 -  Alors, qu’est-ce qu’on attend ? demanda Karla. J’en ai marre de tuer des vers de sable et des tigres stupides et gros. »

En soi, cette histoire ne concernait pas la Horde, mais il y aurait peut-être des items intéressants à récupérer. Et puis, les Amazones avaient besoin d’exercice.

« Allons-y » décida Sélène, qui avait, dans cette histoire, le dernier mot.

Les Amazones s’équipèrent, et descendirent de leur corniche, avançant rapidement, suivant les traces de fumée et les epxlosions. Elles étaient rapides et souples, et rejoignirent ainsi rapidement la zone de combat...

... Pour voir qu’il y avait une quinzaine d’hommes, au moins, qui entouraient une femme, avec de nombreux cadavres... D’énormes tours de fer, ces machines de combat que les Tekhanes utilisaient, avaient été détruites. Les Tekhanes étaient de bonnes guerrières, mais, du point de vue des Amazones, elles se reposaient trop sur leur équipement très avancé. Les Amazone snotèrent également, dans un coin, la présence d’un homme encapuchonné, qui restait bras croisés.

« Je reconnais ces écussons sur leurs armures, signala Pirène. Ce sont des pillards. »

Il n’y avait visiblement plus qu’une seule survivante dans tout ce convoi, qui était encerclée par les tueurs, brandissant ses poings.

« Elle est brave », signala Sélène.

Sa résistance semblait amuser les hommes autour d’elle, dont les gestes obscènes avaient toujours eu le don d’irriter profondément les Amazones. En temps normal, elles n’aimaient pas beaucoup les hommes, mais, dans cette situation-là, en plus... Sélène dégaina son épée.

« Allons-y. »

Karla sourit, heureuse, et les trois Amazones dévalèrent la pente depuis le promontoire où elles se trouvaient, et attaquèrent rapidement, lames dégainées. Elles profitèrent de l’effet de surprise pour fondre sur leurs ennemis. La lame de Sélène fila vers un ennemi, qui se retourna. Elle vit son sourire goguenard s’effacer pour laisser place, dans les yeux, à un éclair de terreur, alors que l’épée de Sélène venait lui arracher la gorge, manquant presque le décapiter.

« Bats-toi, femme, ordonna Sélène d’un ton impérieux, à moins que tu ne sois une fillette... »

Les hommes avaient commencé à tourner autour d'elle en se tapant sur les cuisses devant sa situation sans pour autant qu'aucun d'eux n'ai le courage de faire plus que de la pointer du canon de son arme. Dizzie avait beau être une tête brûlée modèle foutue emmerdeuse, elle n'en restait pas moins une guerrière qui obéissait à quelques codes, quelques règles. Se jeter sur une partie du groupe pour lui sauter à la gorge comme un chien enragé histoire de montrer qu'elle en avait de plus grosses qu'eux, la soldat n'y avait pensé que par fierté mais ne l'avait pas fait. Pas par peur de mourir -elle savait que dans cette situation, ça ne tarderait plus et ce d'une façon ou d'une autre- mais parce qu'elle ne voulait pas quitter ce monde abattue comme un animal sauvage qui aurait simplement lancé un regard de travers à ses maîtres. Si elle devait succomber, ç'aurait été après avoir fait sauter quelques dents et enfoncé quelques cages thoraciques. Pour l'honneur et toutes ces conneries qui différencient les guerriers des brutes épaisses.

Le bruit de descente dans les rochers cassa l'ensemble des hommes, qui relevèrent la tête du corps de Blade pour voir s'abattre sur eux une mort aussi grâcieuse qu'expéditive qu'aucun d'eux durant les premiers instants n'avait été capable peut-être de seulement comprendre. Dizzie n'était pas bien différente de ce ramassis de pillards mais s'en foutait pas mal, ne voyant que l'opportunité créée par cette intervention inopinée. Elle fonça également comme une furie, ses muscles bandés depuis de nombreuses minutes se détendant comme un coup de fouet. Ses poings joints et lancés en avant enfoncèrent les côtes d'un des hommes face à elle, les os brisés transperçant ses poumons et le faisant éructer du sang avant qu'il ne s'effondre. Un autre tenta bien de réagir, trop lentement toutefois pour que Dizzie soit inquiétée lorsqu'elle lui asséna un crochet du droit qui lui fractura l'arête du nez, la remontant vers son cerveau. Quant au dernier, une lame effilée lui dessina un large sourire sur toute la gorge et Dizzie n'eut qu'à se retourner pour faire face à la bretteuse qui se permit de lui donner un ordre.
Pas franchement la meilleure façon de saluer le lieutenant Blade.

La main de Dizzie fila à l'arrière du crâne de Sélène pour que sa tête se ramène avec force contre la sienne, leurs fronts se heurant sèchement tandis que la novaquienne plantait son regard dans celui de l'Amazone sans ciller un seul instant.

- On règle ce foutoir, pétasse, et après je t'apprendrai à me causer correct.

Blade relâcha Sélène après les avoir fait légèrement pivoter sur le côté, évitant ainsi le coup de couteau d'un homme qui goûta de son front en pleine mâchoire. Son poing acheva le travail et l'action lui laissa juste assez de temps pour se reprendre et faire sauter grâce à une commande manuelle d'urgence les petits verins qui fermaient son armure. Les parties du bodyguard s'ouvrirent alors et Dizzie put libérer son corps ajusté dans sa tenue échancrée, ce qui allait lui permettre de donner la pleine mesure de ses talents. Après tout, l'exo-squelette ne lui était plus d'une grande utilité à présent puisqu’il entravait grandement ses mouvements et malgré la protection qu'il pouvait encore tout à fait offrir, il n'était plus qu'un poids morts aux yeux de l'artiste martiales qui comptait dorénavant sur d'autres ressources.
Elle fila comme une balle vers un groupe d'hommes, s'abaissant au dernier moment tout près du sol pour y prendre appui et lancer un balayage aussi large qu'il fut rapide, suivi d'une action moins commune. En effet, sans que son coup ne semble perdre la moindre force, Dizzie se redressa sur sa seule jambe d'appui, l'autre montant dans le même temps à la perpendiculaire de son corps pour retomber comme une masse sur le thorax d'une de ses cibles. Les os craquèrent sinistrement sous la botte militaire qui écrasa les deux gorges des types restants avant de retomber sur le sol.

Sans se préoccuper davantage de Sélène et de ses acolytes qu'elle comprit être au nombre de deux, Dizzie continua d'honorer sa "petite prière" précédemment formulée : éclater quelques gueules mal rasées de ses propres mains.
Une véritable petite guêpe qui ne perdait jamais son dard après une de ses frappes mortelles.

« Pétasse » ? Est-ce que Sélène avait bien entendu, ou est-ce que cette nana venait de l’insulter ? La Princesse des Amazones n’eut pas vraiment le temps de répondre. Les quatre femmes étaient en infériorité numérique, et, même si les Amazones avaient bénéficié de l’effet de surprise, les ennemis se remettaient rapidement. En tout cas, cette femme... Avait du style. Elle se battait avec ses poings, ce qui, en soi, ne surprenait pas une Amazone. En réalité, Sélène était surtout surprise de voir une Tekhane être capable de se battre en étant privée de son arme à feu. Comme quoi, les préjugés n’étaient pas forcément toujours exacts. Elle n’eut pas le temps de s’y intéresser, ni de se pencher sur l’uniforme assez seyant de cette femme, car les pillards lui fonçaient dessus.

Elle en évita un, bondissant en arrière, et répliqua à l’aide d’un coup de pied retourné, qui atteignit l’homme à la joue. Elle ne lui laissa pas le temps de répliquer, le fauchant d’un coup d’épée dans le ventre. Vu leur proximité, les Amazones empêchaient les ennemis de se servir de leurs armes à feu, ceux essayant de les attraper étant immédiatement ciblés par ces femmes particulièrement rapides et vivaces. Elles bondissaient comme des serpents, et leurs épées étaient mortelles. Karla était notamment la plus réactive, bondissant à gauche et à droite, changeant constamment de pied d’appui, prenant à dépourvu ses ennemis, tranchant ici et là des membres, semblant en phase totale avec ses armes. Elle entendit dans son dos le cliquètement d’un chargeur, et se retourna, voyant qu’un mercenaire était en train de charger son fusil d’assaut. Elle s’élança vers lui, mais un mercenaire tenta de la stopper, tenant dans sa main une lame vibrante, une sorte de petite épée énergétique balançant des dommages électriques. Karla n’avait pas le temps de l’affronter, et le bout de sa lame heurta le sol, envoyant des jets de sable vers les yeux du mercenaire.

Poussant un hurlement de douleur, l’homme ferma les yeux, et elle bondit dans les airs, décrivant un élégant salto. Son pied gauche heurta la tête du mercenaire, l’envoyant dans le sable, et, tandis que le mercenaire était en train de tomber, Karla se servit de son corps comme point d’appui, bondissant à nouveau dans les airs, tandis que les balles du mercenaire fusaient. C’était comme si elle voyait tout au ralenti. Son visage tiré, ses dents mordant ses lèvres, cette expression de rage sur le regard. Karla tombait droit sur lui, et ramena son épée devant elle, avant de la renvoyer, en se rapprochant. Il y eut un bref couinement, et elle tomba sur le sol, se réceptionnant rapidement, tandis que l’homme s’écroulait sur le sol, des traînées écarlates s’échappant de son cou.

Honnêtement, ces mercenaires n’avaient aucune chance. Ils avaient de lourdes armes à feu, pensées pour le combat à distance. Les Amazones savaient comment se battre contre des tireurs. Il suffisait d’être au contact. Impossible de viser, de prendre le temps de pointer avec son arme. La cible était tellement grosse qu’elle aveuglait tout. La rapidité était quelque chose que les Amazones connaissaient bien, vu que les guerrières passaient leur temps sur Terra, à courir dans tous les sens, afin de protéger la Horde. Leurs armes de combat étaient ainsi de vulgaires poignards, des couteaux de combat, qui ne pouvaient rien faire contre leurs énormes épées. Pour autant, aucune des Amazones ne prenait ce combat à la légère, car elles savaient qu’il suffisait d’une hésitation, d’une seconde d’inattention, pour leur laisser le temps de dégainer une arme, et de les abattre.

Pirène massacra un groupe de mercenaires, et le dernier, en la voyant se rapprocher, jeta son arme au sol.

« Non, pitié, ne... »

La lame siffla, arrachant trois doigts d’une main tendue. L’homme tomba sur le sol en gémissant. La pitié n’était pas pour Pirène. En tournant la tête, elle vit qu’un pillard courait vers sa moto, dévalant une pente pour s’enfuir. Pirène regardait autour d’elle, et vit un couteau de chasse. Elle l’attrapa, le soupesa, puis bandit les muscles, et lança le poignard, en le tenant entre deux doigts, à l’extrémité de la lame. L’arme tourbillonna rapidement dans les airs, et se planta dans le dos de l’homme. Il s’effondra sur le sable, et roula sur lui-même, avant de s’écraser contre le flanc de sa moto.

« Mes doigts, oh mes doigts putain, ça fait mal, aaaahhh !! »

Pirène fit tournoyer son épée dans les airs, en voyant ses sœurs se rapprocher, et l’abattit en plein milieu de son torse. Il cessa de parler, du sang jaillissant de ses lèvres. Sa main ayant encore tous ses doigts agrippa le tranchant de l’épée, il tenta de la retirer, semblant se recroqueviller sur lui-même... Puis la vie le quitta. Pirène posa son pied sur son torse, et récupéra son épée, dont le bout tranchait de sang.

Du groupe de mercenaires, il ne restait plus qu’un seul homme : l’individu encapuchonné resté à l’écart. Le vent du désert faisait remuer le bas de sa cape d’ermite. Sélène se rapprocha de lui.

« Tu as eu la sagesse d’esprit de ne pas te battre... »

L’homme se mit à sourire.

« J’ai accepté cette mission pour gagner des crédits... Si je suis le seul survivant, toute la somme me reviendra. »

Sélène fronça légèrement les sourcils. Elle haussa les épaules, et rangea sa lame dans son fourreau, entreprenant de se retourner.

« Comment va ta mère, Princesse des Amazones ? » demanda alors l’homme, sur un ton légèrement ironique.

Sélène s’arrêta sur place, surprise, et se retourna, fronçant les sourcils.

« Comment connais-tu ma mère ?
 -  Qui ne connaît pas Andromaque ? s’exclama l’homme en tendant les bras, révélant une peau noire et solide. Les Amazones... Les plus grandes vagabondes de Terra, des clochardes qui se contentent de grappiller les restes des puissants, en se réfugiant derrière une mythologie bâtarde et stupide... »

Sélène fut piquée au vif. Elle sortit à nouveau la lame de son fourreau.

« Personne n’insulte impunément les Amazones en ma présence !
 -  Une vagabonde restera toujours une vagabonde... Même si elle est bien roulée... »

Sélène courut vers l’homme, et abattit son épée à hauteur de sa gorge. La cape avec la capuche fut déchirée, mais sa lame rebondit contre la peau de l’homme. Sélène en fut déstabilisée, et recula de quelques pas, incrédule.

« Mais... Mais qu’est-ce que... ?! »

Incrédule, elle vit la capuche tomber, révélant un corps massif et musculeux, avec des espèces de morceaux de terre noire qui se formaient sur son corps, formant ici et là comme une sorte de seconde couche, tandis que des lignes de feu semblaient brûler sur son corps :

Son épée avait heurté une espèce roche noire, l’égratignant, avant que la roche ne se reforme.

« On m’appelle Koth, jeunes femmes. Tu as de la chance, Sélène, j’ai toujours bien aimé ta mère. Alors, je veux bien vous laisser vivre, par respect pour elle... Mais le convoi est à moi. »

Dizzie n'étant nullement du genre spectatrice passive, elle n'admira pas les prouesses combatives des trois beautés qui avaient permit qu'elle se tire du guêpier dans lequel elle était tombée à la suite de l'assaut. Certes, la soldate apercevait du coin de l'oeil le style de combat aérien et efficace d'une des deux blondes. Si celle qui avait insinué qu'elle était une filette n'était pas en reste côté démonstration de combat, celle là était particulièrement remarquable. En d'autres circonstances, Blade aurait très sûrement prit le temps de l'observer plus à son aise avant de lui proposer de se mettre sur la gueule mais elle avait en l'état d'autres préoccupations plus immédiates.
Ses larges fouettés du pieds s'enchaînaient avec grâce et puissance, résonnant durement contre les corps qu'ils percutaient comme des coups de fouet cinglants et appuyés. Quand elle prenait le temps de reposer les jambes à terre, Dizzie jouait des poings et des coudes, se protégeant parfois des coups de lame et de baïonette qui lui étaient destinés en usant des pièces métalliques qui recouvraient ses avant-bras. Un moment, la blonde sembla tout de même se faire déborder puisqu'elle fut encerclée par cinq hommes qui s'avérèrent trop proches pour qu'elle puisse faire usage de ses coups de pieds et de ses fabuleux mouvements de hanches, mais Blade ne s'en laissa pas conter. Une de ses jambes se détendait vers l'arrière alors que son buste sembla s'aligner dans le même geste, formant ainsi un angle droit avec sa jambe d'appui solidement plantée au sol. Le type visé recula sous le choc, brisant l'encerclement  le temps que tout le tronc de Dizzie vienne se coller à sa jambe d'appui, laissant la seconde en l'air avant qu'elle ne retombe à l'opposé de sa position de départ. Le poids entraîna le reste du corps, qui resta en équilibre sur les mains de la novaquienne. Et la voilà qui était la tête en bas et les jambes ouverte en un grand écart qui prit tout son sens lorsque ses mains bougèrent sur le sol en accompagnant le mouvement de ses hanches, transformant la redoutable petite blonde en une roue qui percuta violemment ses cibles avant qu'elle ne retome sur ses pieds, le petit groupe à présent à terre.

Un homme la surprit, l'aggripant par-derrière et bloquant ses bras des siens qui la ceinturaient avec force. Et un de ses comparses de sortir une lame de chasse en hurlant, voulant la planter dans la gorge de Dizzie. Elle avança simplement la tête pour la ramener brutalement en arrière, brisant le nez de celui qui la retenait captive, l'attrapant au niveau de la nuque tandis que ses jambes se déarassaient du couteau tout en attrapant le second assaillant au cou. D'un violent mouvement de reins, Blade brisa les deux nuques avant de retomber à terre alors que la rousse du petit groupe féminin réglait son compte à un lâche qui avait tenté de s'enfuir devant la débâcle.
Ne restait plus que l'homme en capuchon, qui faisait face aux trois filles qui s'étaient réunies. Dizzie n'était qu'à deux pas derrière et écouta l'échange, toujours aux aguets. Ce mec ne lui plaisait pas, lui inspirait naturellement la méfiance.

Ainsi, elles étaient des Amazones ? Blade en avait entendu parler et partageait l'avis de l'homme à propos de leur nature, bien qu'elle avait elle-même constaté que leur réputation de farouches guerrières n'était nullement volée. Celle qui lui avait adressé la parole était donc leur Princesse ? Et ces filles envoyaient quelqu'un d'aussi important sur le terrain ? Bah. Au moins, elle n'était pas un poids mort.
L'attaque de Sélène fut vive, superbement portée. Le choc fut inattendu, puisque l'acier sembla arrêté par la nuque de l'étranger. Blade ouvrit de grands yeux sous la surprise, peu habituée finalement à ce genre de phénomènes. Néanmoins, la dernière tirade de celui qui dit s'appeler Koth convoqua au galop la férocité de Dizzie, qui fonça vers l'homme de pierre en sautant par-dessus Karla et Pirène, tendant le pied pour le coller dans la gueule de Koth. Celui-çi para mais Dizzie avait désormais toute son attention.
Elle retomba joliment face à lui.

- Et moi je suis le lieutenant Dizzie Blade, sac à merde. Ce convoi est la propriété de Novac et ni toi ni Pim, Pam et Poum ne mettrez les doigts dessus, à moins que je ne vous les ai tous pétés. T'as imprimé, Gueule d'Argile ?

Koth se contenta de sourire avant de lever le pied et de l'abattre sur le sol, provoquant une secousse plutôt inattendue qui destabilisa Blade suffisamment pour que l'homme ne lui colle un superbe direct en plein dans la figure, ce qui la vit valser en arrière aux pieds de Sélène. Alors que Dizzie se relevait d'un bond en écrasant un juron qui aurait rendu jaloux n'importe quel gougnaffier de Nexus, Koth enchaîna pour frapper le sol du poing cette fois. Ca ne trembla pas, non. Cela fit naître une avancée rapide de stalagmites qui prirent la direction du groupe et de la Novaquienne, qui roula de côté au dernier moment avant de se relever pour se ruer tête bêche vers Koth. Un assaut qu'elle confronta à l'arrivée de boules de roche qui fusaient presque comme des balles sur sa trajectoire, que le lieutenant parvint à éviter de justesse. Heureusement que l'entomorphie avait boosté ses capacités primaires...
Blade arriva à portée et sauta, un de ses pieds prenant appui sur le torse de Koth pour que l'autre vienne lui percuter le menton dans un mouvement d'arc-de-cercle qui amorca également un salto arrière prévu pour la faire retomber. 
Koth, sûrement moins sonné que l'attaque le laissait à penser, colla un de ses poings dans le dos de Dizzie qui retomba lourdement à terre tandis qu'il souriait.

- Et... C'est tout, lieutenant ?
- J'suis même pas encore chaude, bassine à chiottes.

Toujours était-il qu'il fallait qu'elle se relève et que Koth pouvait tout à fait profiter de ce laps de temps -certes court- pour faire une démonstration de ses petites capacités...

Comment ce mâle savait-il autant de choses sur les Amazones ? Sélène ignorait tout de lui, et, pourtant, elle n’était pas n’importe qui. Elle était la Princesse des Amazones, la fille d’Andromaque. Dès son enfance, son éducation avait été axée autour de deux axes : le combat, et l’éducation. Être la Reine, ce n’était pas savoir que se battre, mais également commander tout un peuple, ce qui impliquait d’avoir une vision politique des choses. Pour ça, il fallait savoir lire, écrire, compter, mais également savoir les grandes données géostratégiques de Terra, connaître l’Histoire de la Horde, connaître les ennemis, connaître des rudiments de diplomatie internationale. Les Amazones se considéraient comme une nation à part entière, et, dans l’échiquier des relations internationales et de la terminologie diplomatique, il y avait tout un écarte entre « nation » et « groupement de population ». La Nation bénéficiait d’une reconnaissance internationale dont un vulgaire groupement était dénué. Mais pouvait-on vraiment parler de « groupement » quand il y avait plus d’un millier d’âmes ? La Horde était une petite Nation, d’un point de vue démographique, mais, parmi ces âmes, plus de la moitié étaient des guerrières redoutables, formées dès la naissance au combat, dans des conditions rudes, à suivre une discipline de fer. Sélène savait tout ça, et, malgré sa bravoure, sa fierté et sa rudesse, elle était aussi très instruite, lisant beaucoup. Elle lisait essentiellement des livres de stratèges militaires, ainsi que des mémoires politiques, afin d’en savoir plus sur Terra, afin de savoir où guider sa Horde. Et elle n’avait jamais entendu parler de ce Koth, ce Koth qui, visiblement, connaissait sa mère.

Il insultait les Amazones .Sélène crachait sur sa proposition ! Elle n’avait qu’une envie : le tuer. Personne ne pouvait insulter les Amazones ! Et surtout pas en sa présence ! Elle réfléchissait à un moyen de percer son armure, de trouver le point faible de sa cuirasse, quand la soldate débarqua au milieu du groupe, expliquant que le convoi venait de Novac. Sélène connaissait de nom cet endroit. Un petit archipel où les femmes abandonnaient une part de leur humanité en se greffant des machines dans le corps. Une autre preuve, s’il en est, de l’état de soumission technologique que les Tekhanes faisaient, se soumettant à leurs propres technologies, au point d’en devenir dépendantes, et d’oublier que la liberté était la seule chose importante.

Dizzie Blade était agile et rapide, et frappa rapidement le visage de Koth... Qui para avec sa main sans la moindre réelle difficulté. Le bougre était rapide, et avait encore d’autres tours dans son sac. Levant le pied, il frappa le sol, provoquant comme une puissante vibration, dont il se profita pour frapper Blade, la repoussant. La soldate roula sur le sable, et Sélène bondit en arrière, avant de voir Koth frapper violemment le sol. Le sable s’envola autour de lui, et Sélène vit une ligne de stalagmites rocheux foncer droit sur elles. Elle roula sur le côté, évitant la ligne, Blade faisant de même. Les stalagmites explosèrent alors, envoyant des pics rocheux. Pirène se pencha sur la gauche, évitant de peu un projectile rocheux, qui lui égratigna légèrement la joue. Karla, quant à elle, faisant preuve de cette vivacité d’esprit exceptionnelle qui la caractérisait, déplaça son épée, interceptant un projectile rocheux. Blade fut la première à contrer, et courut droit vers le colosse.

Elle bondit en l’air, heurta le torse de Koth avec un pied, et frappa son menton avec l’autre, tout en tournoyant dans les airs, effectuant un salto pour se réceptionner. Blade s’écroula sur le sol, et Koth brandit le poing, prêt à la massacrer... Quand une épée le frappa dans le dos, émanant de Pirène. Au même moment, Karla arriva, fonçant droit vers l’homme, et bondit en l’air, joignant les pieds. Elle le frappa à hauteur du nez, faisant reculer l’ennemi, du sang perlant de son nez. Sélène ne fut pas en reste, puisqu’elle se déplaça également rapidement, et entreprit de lui faucher les jambes à l’aide d’un balayage. La triple attaque était la manifestation la plus criante de la manière dont les Amazones se battaient : il n’y avait eu aucune concertation préalable, mais un enchaînement naturel et logique d’actions instantanées. Elles se battaient ensemble depuis qu’elles étaient toutes petites.

Pirène l’avait déstabilisé, Karla l’avait sonné, et Sélène l’achevait. Koth tomba lourdement sur le sol, et les trois Amazones brandirent leurs lames, s’apprêtant à les enfoncer dans son torse. Les trois lames filèrent, mais Koth roula sur le côté, évitant les lames, et se releva rapidement.

« De vraies diablesses... nota-t-il. Et... Hum... »

Koth porta la main à son nez, sentant un peu de sang. Ceci le fit sourire.

« On ne m’avait pas blessé depuis fort longtemps... Je suis en colère. »

Il serra le poing en se relevant, et le sol se mit à vibrer dangereusement autour de lui.

« Misérables putes, de quel droit osez-vous me blesser ?! grognait-il, nettement plus agressif. Vous allez me payer ça ! »

Le sol se mettait encore à trembler, et des morceaux de terre s’enroulaient autour de la main droite de Koth, tendue devant lui. Les lignes de feu sur son corps brillaient encore plus, et une boule de Terre se forma dans sa main, avant d’être soudée par des jets de feu qui se formèrent à l’intérieur de cette dernière. N’ayant nullement envie d’attendre, Karla courut droit vers lui, et Koth, pris au dépourvu, envoya sa boule magique composée de deux éléments. Karla la vit venir, et bondit en l’air. Elle avait une détente phénoménale, et la boule explosa dans le vide, envoyant des jets de feu et des morceaux de terre, de petits stalagmites, qui foncèrent dans toutes les directions. Sélène avait mis en garde Karla de son empressement, et ceci se confirma. Un stalagmite l’atteignit au flanc, s’enfonçant dans sa peau, la déstabilisant, et elle s’écroula dans le sable.

« Karla !
 -  Votre amie est trop confiante en ses capacités... »

Sélène courut à nouveau vers Koth, qui envoya une boule de feu sur elle. Sélène ne chercha pas à l’esquiver, et se mit en position, tendant sa lame, coupant la boule de feu en deux, atteignant le noyau magique de cette dernière. La magie avait ses propres règles, et un sort magique reposait sur l’équilibre. En perçant le noyau, elle détruisit cet équilibre, et la boule de feu explosa en plein vol, provoquant quelques flammèches sans danger. Sélène fonça droit vers l’homme, et tenta à nouveau de le frapper avec son épée. Elle savait que le coup ne lui ferait rien, mais elle n’espérait pas le blesser. Elle l’atteignit sur le flanc, et sauta en hauteur, afin d’arriver sur son flanc, où elle en profita pour sortir une petite fiole de sa ceinture, la décapsulant pour l’asperger sur son épée, qui se mit à luire sous l’effet de l’huile. Sélène se rua à nouveau sur l’homme, en poussant un cri guerrier... Mais Koth bondit vers elle, et l’attrapa à la gorge, l’envoyant s’écraser dans le sable, la faisant lâcher son épée.

« Il suffit ! J’ai assez joué ! »

Koth releva Sélène, manquant lui briser les cervicales.

« Andromaque ne me pardonnera jamais de tuer sa fille chérie... Ce qui est sans doute un bon argument pour te rompre le cou, petite pute...
 -  Cette fois... C’est toi qui a été trop confiant... réussit à articuler Sélène.
 -  Qu... ?! »

Il n’eut pas le temps de terminer. Sélène avait dans sa main une autre fiole, et la posa sur le flanc de l’homme. Il s’agissait d’un acide corrosif aux propriétés magiques. Sur sa lame, il renforçait cette dernière, car elle avait été forgée dans un acier magique, mais, sur la peau de Koth, elle fissura sa couche. Il relâcha Sélène, tandis que sa peau se mettait à se craqueler. La terre recouvrant son corps se craquelait, et la roche se fissura, révélant sa peau.

« Pétasse... »

Sélène décida de profiter de son avantage, récupérant son épée, et l’abattit sur le torse de l’homme. Il poussa un hurlement de douleur.

« Personne ne menace impunément les Amazones, sale con !
 -  Allez crever ! »

Koth serra le poing droit, la main gauche tenant son front en train de brûler, et il frappa avec rage le sol, envoyant une décharge formidable, qui provoqua une explosion tout autour de lui. Soufflée par le choc, Sélène s’envola, un morceau de roche la frappant au visage. Elle roula le long de la dune, alors que tout le haut de cette dernière venait d’exploser joyeusement, la roche se fissurant. De longues lézardes filèrent le long du sol, provoquant des fissures abyssales, ainsi que de dangereuses vibrations sismiques.

Dizzie avait eu beau fanfaronner, Koth s'était montré plus rapide qu'elle une fois qu'elle se retrouva face contre terre après sa reception interrompue par l'homme. Ce dernier était prêt à abattre son poing sur elle sans qu'elle ne parvienne à esquiver à temps, mais les Amazones firent une démonstration d'un talent d'attaques coordonnées qui impressionna même Blade. Avachie là et en appui sur ses avant-bras, la novaquienne avait prit le temps -une erreur en soit, tout de même- de regarder Pirène, Karla et Sélène agir de concert pour mettre Koth à terre. Superbe. Leurs attaques respectives s'étaient montrées complémentaires tout en interdisant une éventuelle riposte puisqu'elles avaient pointé les faiblesse de la garde que Gueule d'Argile n'avait pas pu relever correctement.
Le coup de grâce ne vint pas, Koth esquivant justesse les lames de la Horde pour se remettre sur ses jambes à l'instar de Dizzie qui se décida à ne pas intervenir. Pour l'heure, le trio avait l'avantage d'un travail en équipe rôdé et efficace qu'elle risquait de mettre à mal en fonçant dans le tas. Néanmoins, Koth ne comptait pas plus qu'elle rester à l'arrière-plan de la scène.

Dizzie s'était rapidement mise en position quand le sol avait commencé à trembler. Solidement campée sur ses jambes, la soldate s'était attendue à peu près à tout ce que sa méconnaissance de la magie lui avait permit d'imaginer. Quelle mise en scène ! Tout comme Karla, Blade avait guetté la moindre petite ouverture mais l'Amazone réagit plus vite qu'elle et fonça vers Koth, profitant de son élan pour éviter un des projectiles bi-élémentaire du magicien dans un bond impressionnant. "Grenade à fragmentation", avait brièvement pensé Blade à l'explosion de la boule de terre et de feu. Par réflexe, la novaquienne poussa d'un fort coup d'épaule Pirène pour lui faire éviter quelques projectiles qu'elle laissa s'abattre sur ses gantelets de métal portés sur les avant-bras qu'elle avait joint devant elle. Quand à Karla, sa précipitation lui valu d'être touchée au flanc.
Dizzie s'élança vers elle tandis que Koth était occupé avec Sélène, arrivant au niveau de la blessée après avoir glissé sur les genoux sur le sol rocailleux pour se retrouver plus rapidement à son niveau. Après un rapide coup d'oeil à la confrontation qui opposait la princesse au pillard, Blade s’intéressa à la blessure de Karla.

Elle ôta d'un coup sec le reste de stalagmite du corps, venant presser fortement avec sa main la plaie à présent béante. Sans perdre de temps, la soldate arracha une partie de sa tenue échancrée et dévoila malgré elle une bonne partie de ses seins, usant du tissu obtenu pour compresser la plaie avant d'attraper la main de Karla pour remplacer la sienne.
Non loin, Sélène abattait sa seconde fiole après avoir été attrapée par Koth et renversait ainsi le cours du combat. Pas mal, assurément. Sans douceur, Dizzie aida Karla à se relever alors que le cri de douleur du magicien retentissait sous la lame de Sélène. Le poing qu'il leva, les vibrations... Dizzie n'eut que le temps de se rabattre sur l'Amazone en lui collant sa tête contre la poitrine tout en faisant barrage de son corps à l'onde de choc qui résulta de l'explosion causée par Koth. Les deux femmes roulèrent à terre, Blade tenant toujours Karla contre elle.

Le craquement puissant de la roche qui surplombait une Sélène sonnée gisait au pied de l'édifice naturel ne laissa plus aucune hésitation à Dizzie, qui libéra l'essaim grouillant en elle. Son organisme modifié laissa l'enzyme d'insecte se repandre et changer à une vitesse phénoménale l'écriture de son code génétique. Ses avant-bras se strierent d'agressives bandes d'un noir profond avant de gagner en volume tandis que ses jolies jambes se creusaient légèrement avant que la peau tendue et rougeâtre ne laisse appaître de façon spectaculaire l'apparence de ses muscles qu'on aurait cru à vif. Ses pieds griffus à la manière des criquets déchirèrent ses boots et son visage était légèrement changé, une légère carapace chitineuse lui faisant office de mentonnière alors que de part et d'autre de son front avaient poussé des antennes.

Karla était rapide ? Dizzie fut sans commune mesure lorsqu'elle détendit ses jambes pour effectuer un bond aussi puissant que rapide en direction de Sélène qu'elle récupéra au moment où les premiers morceaux de roches cédaient pour rouler le long de la paroi afin de l'écraser. L'éboulement empêcha Blade de fuir par le haut, mais cela lui importa finalement peu puisqu'il esquiva d'un bond de côté. Les vibration du sol lui empêchèrent certes de correctement prendre appui et manqua de la faire tomber à la réception. Toutefois, la novaquienne déposa la princesse aux pieds de Pirène, la faisant tomber à ses pieds comme un vulgaire sac. Pas le temps de faire mieux.

- Prend les deux poids morts et dégagez d'là, vous allez m'gêner. Je lui ferai sauter une chicot ou deux pour l'honneur et le joli p'tit cul des Amazones, tout ça.

Elle se désintéressa proprement du trio, lui tournant le dos tout en analysant la situation. De profondes fissures lézardaient sur le sol entre elle et Koth alors que les vibrations rendait chaque saut plus dangereux qu'il ne devrait l'être, mais ce n'était pas ce qui allait arrêter Dizzie maintenant. Se campant sur ses jambes, Blade bondit entre les lézardes en dardant son regard sur Koth, qui tenta de l'intercepter en saut grâce à ses boules de terre et de feu. Il présumait de son talent et sous-estimait Dizzie, dont les antennes l'informaient de chaque petite variation dans l'air et l'amenaient à prévoir grossièrement chaque trajectoire. Son jeu de jambes à présent boosté à l'enzyme se déploya pour éclater la roche en plein vol et ce au mépris des flammes présentes.
Et elle arriva devant Koth. Il tenta bien de lui asséner un coup de poing enflammé mais Dizzie bondit, ses pieds s'accrochant aux larges épaules de l'homme alors qu'elle pliait les jambes pour être un peu plus à son niveau.

- Tu m'as ignorée tout à l'heure, Fosse à purin. Tu as retenu le nom de la sainte patronne des clochardes du désert, tu te souviendra aussi du mien.

Une véritable grêle de poings s'abattit alors sur le visage de Koth, à une vitesse qui n'avait rien de naturel, tandis que Dizzie souriait comme une démente. Finalement, elle détendit ses jambes depuis l'appui des épaules de l'homme et l'envoya à terre avec force, tandis qu'elle effectuait un tour sur elle-même dans les airs avant de retomber entre deux fissures.

Il pouvait bien se relever encore et encore, Dizzie était prête à lui faire payer pour le sort de ses camarades et le fait de l'avoir dénigrée au coeur d'un combat auquel elle était mêlée.
Koth était peut-être puissant, mais il avait réveillé la colère du plus ancien des nuisibles et la fureur du plus meurtrier des prédateurs. Quoi qu'il puisse faire à présent, il n'en sortirait assurément pas indemne.

Koth était content, et l’explosion avait sonné Sélène, tout en l’égratignant. Son épaule droite était pleine de sang, des éclats qui avaient également atteint son torse. Elle crachait un peu de sang, et sentit une force la soulever, l’éloignant de l’épicentre de l’explosion. Elle se retrouva aux pieds de Pirène, la seule Amazone qui n’avait pas encore été blessée par Koth, la Novaquienne lui ordonnant de prendre soin des « deux poids morts », en dégageant de là. Pirène fronça les sourcils, piquée au vif, mais la soldate était déjà repartie. Pirène regarda la Princesse des Amazones.

« Elle se débrouille bien, la Tekhane...
 -  Lui aussi... » grogna Sélène.

Elle secoua la tête, regardant autour d’elle. Il y avait d’épaisses lézardes, et le sol vibrait. Sélène entreprit de lentement se redresser, luttant contre des vertiges. Un éclat avait aussi atteint sa tête, et du sang s’écoulait de son cuir chevelu. Un liquide poisseux, mais, à cet emplacement, le sang s’écoulait facilement. Toutes ses blessures étaient superficielles. Sélène réussit ainsi à se relever, tandis que, pendant ce temps, Blade avait utilisé à son avantage les vibrations de Koth. Il avait en effet affaibli le sol, et les puissantes attaques de cette dernière l’envoyèrent s’enfoncer dans le sol, formant comme une espèce de cratère, alors que Blade bondissait dans les airs, s’écrasant à chaque fois sur lui. Koth essayait de se redresser, mais se recevait à chaque fois les puissantes attaques de la Novaquienne, défonçant encore un peu plus le sol, explosant la couche de roche le protégeant.

Koth ferma alors les yeux, alors que Blade redescendait, et leva la main. Le sol vibra alors plus furieusement, et des projectiles rocheux jaillirent alors du sol, fondant droit sur Blade. En hauteur, et en chute libre, elle ne put rien faire d’autre que d’être atteinte par les projectiles jaillissant de la terre. D’énormes blocs de rochers qui explosèrent contre elle. Koth entreprit alors de se redresser.

« Pour qui vous prenez-vous, misérables ? »

Koth entreprit de se relever, et Pirène brandit son épée. Koth la vit approcher, et tapa du pied sur le sol. Le sable se souleva tout autour de lui, et Pirène planta l’épée devant elle, essayant de se protéger... Mais le sol explosait également, et elle glissa, chutant sur le sol. Le corps de Koth se nimbait de flammes, et il ne semblait vraiment pas content.

« Je ne suis pas entièrement convaincue que notre approche soit la bonne... » releva Sélène.

Les attaques physiques ne semblaient rien lui faire. C’était comme essayer de briser une montagne avec les poings. C’est bien pour ça que Sélène avait opté pour la magie, à l’aide de ses fioles. La fiole qu’elle avait balancé sur Koth comprenait un acide à base du Poison, un élément magique toxique et acide. Elle s’épongea la bouche, enlevant le sang qui s’y rapprochait. Koth était plutôt costaud, mais Sélène ne pouvait pas le laisser ainsi. Il avait humilié les Amazones, insulté la Reine. Ceci méritait la mort.

« Relève-toi, petite femme, souriait Koth. Frappe, je suis sûr que tu peux faire mieux. Est-ce là toute la rage dont les humains sont capables ? Tu es une poussière essayant de disloquer un bloc de granit. »

Sélène tenait son épée magique. La lame était toujours imbibée de Poison. Koth se reposait surtout sur la Terre, et, si elle se souvenait bien des traités magiques qu’elle avait lu, le Poison était un élément magique opposé à la Terre. Il faisait fondre la Terre, et elle avait noté que Koth y était sensible. Elle avait reçu des coups, mais, pour la Princesse des Amazones, ce n’était que de vulgaires égratignures. Elle se concerta silencieusement avec Karla et Pirène. Pirène était à côté d’elle, et Karla était rétablie, à l’opposé. Karla se mit à courir rapidement, brandissant sa lame, et Pirène partit également, avant que Sélène ne s’élance à sa suite.

Koth ne resta pas sans réaction, et frappa encore le sol, faisant trembler ce dernier. Pirène bondit dans les airs, et Koth envoya une boule de feu pierreuse vers elle. Sélène avait toutefois senti le coup venir, et s’arrêta, avant de balancer son épée avec les deux mains. L’épée tournoya dans les airs, et passa à côté de Pirène, heurtant la boule de feu, qui explosa à mi-chemin, aveuglant légèrement Koth. Il n’eut pas le temps de réagir que la lame de Karla s’abattit sur l’un de ses bras. Sous l’effet de l’explosion, la lame de Sélène termina sa course, et cette dernière la récupéra rapidement, rejoignant Karla.

« Vous... Me... Fatiguez ! »

Une onde de choc se mit à brûler autour de Koth. Des morceaux de pierre vinrent dans tous les sens, enroulant ce dernier, frappant dans le dos les Amazones, renversant Pirène. Karla dut prudemment se reculer, car les morceaux de roches s’accumulaient autour de Koth, jusqu’à former comme une sorte de cocon.

« Attention ! » hurla Sélène à l’attention de Karla.

Mais il était trop tard. La roche explosa dans tous les sens, la couche protectrice envoyant des boulets de pierre tout autour de Koth. Karla se les reçut de plein fouet, et décolla du sol, lâchant son épée en s’écrasant sur la terre. Sélène et Pirène eurent la sagesse d’esprit de se coucher sur le sol, mais plusieurs tirs égratignèrent l’une des mains de Sélène, ainsi que sa jambe. Koth, de son côté, s’avança vers Karla, et l’attrapa par la gorge. Elle ne réagit pas, inanimée.

« Encore en vie... Que ces femmes sont résistantes... »

Il la balança à côté de lui. Pour lui, elle était désormais sans intérêt.

Dizzie attaquait sans relâche, couplant la force de sa mutation insectoïde aux techniques déjà bien efficace du redoutable Daodando. Elle avait fait s'abattre sur le mâle une averse de coups de poing à une vitesse fulgurante -le "Gatling Gun" du Daodan- et avait ensuite bondit sur lui à plusieurs reprises, prenant son appui sur son corps pour détendre ses jambes dopées aux caractéristiques du criquer pour s'abattre comme un poids sur lui et réitérer plusieurs fois l'opération dans un "Tactical Bomber" parfaitement exécuté. Blade était certes rendue presque hystérique par la montée en elle des agressives enzymes, mais elle n'en perdait pourtant pas de vue un point crucial : sa mutation était limitée dans le temps, son corps devant finir par la rejeter et l'annuler. C'était dans ce qui lui restait de délai qu'elle devait en finir et elle en était parfaitement consciente. A l'amorce du dernier saut, elle concentra un peu plus ses muscles avant de bondir, montant bien plus en altitude. Arrivée au point culminant, elle attrapa ses chevilles et mit ses genoux en avant pour que le prochain impact asséné à Koth soit celui de ces os durs percutant sa gorge pour la lui broyer, lui brisant les cervicales au passage. La Novaquienne un peu trop sûre d'elle entama donc sa brutale redescente, persuadée qu'elle en finirait sur ce coup.

Les véritables hallebardes qui jaillirent du sol pour venir vers elle à une vitesse affolante la prirent de court, en vérité. Dizzie ne dut sa survie qu'à ses réflexes et à sa perception boostée mais ne put aucunement tout parer lorsqu'elle relâcha ses jambes pour tenter de briser les roches qui étaient destinées à l'empaler. Les dommages mortels furent miraculeusement évités mais l'action de Dizzie fut coupée net, tout comme sa chute qui s'acheva durement sur le sol pierreux. Une de ses côtes céda quand son corps percuta la roche et elle roula de côté, arrivant au bord de l'une des failles complètement sonnée. Tandis qu'elle se battait pour conserver ses esprits et essayer de se relever, Pirène entamait son round sans seulement parvenir à approcher Koth.
Lui, de son côté, se galvanisait de ses victoires enchaînées. Dizzie ne s'en trouva que de plus en plus énervée mais sa tête lourde et son corps meurtri l'empêchèrent de le signifier d'une façon où d'une autre, la soldate étant trop occupée à vomir le sang qui envahissait sa bouche.

De sa place, Dizzie observa les Amazones. Elle qui ne savait pas vraiment travailler aux côtés d'un autre prenait là une véritable leçon sur l'efficacité d'une action de groupe bien coordonnée, constatant que le jeu des trois filles avait bien plus d'effet que ses coups furieux distribués à l'aveugle. Indépendamment, les Amazones étaient sûrement inférieures à la novaquienne en combat, mais leur complémentarité les plaçait très largement au-dessus d'elle lorsqu'elles en usaient. Le talent de Karla allait de paire avec la stratégie et la réflexion de Sélène, tandis que Pirène qui semblait moins compétente offrait un soutien très efficace aux attaques.
Et Koth... Koth était assurément plus puissant qu'elles quatre, mais Blade s'apercevait que son pattern d'attaques était presque prévisible et surtout que l'homme négligeait grandement ses adversaires. Dizzie pouvait le comprendre, toutefois aussi sûre qu'elle pouvait l'être, la soldate n'aurait jamais laissé de côté un ennemi sans s'être assuré qu'il était bel et bien hors-combat. Pas dans un affrontement pareil, non. Toussotant en insultant mentalement son corps pour qu'il tienne encore un peu, le petit insecte élabora une esquisse de stratégie incluant des partenaires extérieurs.
Une grande première pour elle, à vrai dire.

Elle ne se mêla pas au combat en court, s'esquivant discrètement depuis sa position pour venir se placer à une distance plus que raisonnable du dos de Koth. En un seul de ses bonds, l'insecte novaquien aurait rapidement prit position et évitait en l'état le rayon des mouvements de Koth, focalisé sur les trois filles qui lui tenaient tête. Patiente, Blade attendit une chose : que le regard de Sélène croise le sien et que les deux s'accrochent clairement. Cela arriva dans le feu de l'action, mais Dizzie savait que ça suffirait. Comme une explication silencieuse donnée en un éclair, la soldate montra ses poings relevés à l'Amazone avant d'en faire sortir les imposants dards que la mutation lui offrait : des cônes effilés et suintant de toxine.
Les assauts de Dizzie n'avaient pas été inutiles. Elle avait comprit en le blessant que Koth était organique et qu'il pouvait saigner, donc laisser un poison transiter par son flot sanguin. Bien que le lieutenant doutait que le venin du Frelon puisse tuer l'homme de pierre, elle voulait miser sur le fait qu'il parviendrait à le paralyser ou au moins le ralentir une fois injecté. Son assaut ouvrirait surtout une voie royale aux Amazones, que Dizzie savait désormais assez aguerries pour l'utiliser. C'était pour cela qu'elle avait voulu que Sélène la voit avec ses dards, comme pour lui signifier qu'elle allait lui permettre de contre-attaquer.

L'explosion du cocon emporta Karla dans son sillage de projectiles et bien que Koth se déplaca pour attraper la belle à la gorge, il ne vit pas Dizzie qui s'était cachée derrière un petit monticule tant pour se prémunir de l'attaque que pour rester invisible. La surdouée n'eut aucune réaction, mais Blade ne s'en soucia pas. L'heure était à la stratégie et pour réussir, son timing devait être parfait. Koth ne devait rien voir venir.
Dès que le corps de Karla toucha le sol en faisant s'élever la poussière, Dizzie donna tout ce qu'elle avait dans une impulsion de saut parfaite qui la placa tout contre le dos de Koth. Ce dernier n'eut pas le temps de réagir que les bras armés de la novaquienne se relâchèrent avec violence, sa force parvenant à briser la roche entamée pour que les dards pénètrent sa chair et s'y enfoncent profondément. Mettant toutes les chances de son côté, Blade décida de vider en une seule fois le contenu de ses poches à venin tout en restant profondément fichée en Koth, ses pieds mutés agrippés à la roche pour que l'homme ne puisse pas trop bouger.

- AMAZONES, FRAPPEZ !

Ce fut tout ce qu'elle put dire avant qu'une pointe de roche de s'enfonce dans la partie gauche de son ventre, la transperçant pour l'empaler. Ses yeux s'écarquillèrent et elle cracha une large gere de sang sur l'épaule de Koth, mais serra les dents tout en affirmant sa prise.

- Qu'elles te... *cough*...crève...en-fant de p-putain... je...*cough* t'emporte a-avec...moi...

Pour ponctuer sa dernière provocation, Dizzie joua des bras pour remuer les dards dans le corps de Koth, verrouillant sa prise tant qu'elle le pouvait encore. Que les Amazones frappent rapidement, si elles voulaient avoir une chance de renverser la situation.
Aussi féroce qu'elle pouvait l'être, Blade n'était pas immortelle.

Karla était à terre. Elle avait été touchée de plein fouet par l’attaque de Koth, tandis que Sélène avait mal à la jambe. Un éclat l’avait touché là, et elle crachait du sang. Koth était vraiment costaud, un foutu roc de pierre increvable. Le poison lui avait abîmé le corps, mais il était toujours en bon état, toujours prêt à se battre. Ce démon était un fanfaron, un vantard, mais il n’exagérait pas pour rien. Blade prit alors la relève, en bondissant dans le dos du démon, et enfonça ses dards dans son corps. Sélène avait brièvement croisé son regard, et avait vu la flamme, l’œil de la guerrière. Elle ne s’arrêterait pas là. C’était peut-être une Tekhane, mais elle se battait avec la fierté d’une vraie femme. Elle enfonça le venin dans le corps de Koth, qui tituba, et Sélène s’élança... Mais trébucha à moitié. Pirène la doubla, allant devant Koth, tandis que ce dernier se mit à faire pousser une roche, empalant Blade.

« Tu... Tu t’accroches, hein ? Mais je... Je n’ai jamais aimé les femmes trop collantes ! »

D’autres piques jaillirent alors de son corps, et, sans empaler Dizzie, ils la repoussèrent violemment, la balançant au sol... Mais le venin était là, se répandant l’organisme de Koth, qui sentit un vertige le saisir.

« So... Sorcière, aaaah... Infâme petite pute, huuu... »

Il se mit à tituber, et Pirène le frappa à la tête, un joli coup de pied retourné qui le fit tomber sur le sol. Il posa une main par terre, tandis que Pirène levait son épée, et l’atteignit à la joue. Le sang perla, et il tomba sur le sol, se couchant sur le dos, le soleil lui explosant les yeux. Ses pupilles se dilataient à vue d’œil, alors que Koth se mit à avoir très froid. Pirène brandit son épée, mais Koth tendit sa main, et envoya des jets de pierre. Elle parvint habilement à les esquiver, tandis que Sélène arriva de l’autre côté, brandissant bien haut son épée.

« Crève, salopard ! »

Elle vit Koth tourner la tête, mais la lame fut plus rapide, et s’enfonça à hauteur de son omoplate gauche, là où il y avait une concentration de feu, à tel point qu’on avait l’impression qu’un œil de feu pulsait. La chair y était fragile, et Sélène l’enfonça solidement. Koth se mit à cracher du sang, ses yeux s’écarquillant sous une douleur suraiguë. Il se mit à trembler, et Sélène posa son pied sur son torse, récupérant sa lame. Elle s’écarta alors, et se dirigea vers Dizzie. Prostrée sur le sol, la guerrière semblait inanimée, luttant contre la mort, ainsi que contre une hémorragie interne.

« Merde... »

Pirène, de son côté, choisit d’aller voir Karla, dont l’état de santé l’inquiétait. Aucune des femmes ne pouvait donc voir que, pendant ce temps, du sang s’échappait de la faille que Sélène avait provoqué dans le corps de Koth. La blessure étant près du cœur, tout le sang y affluait, et Koth le faisait sortir par là, tout en enfonçant ses doigts pierreux dans le sol, afin de rentrer en contact avec le sol, y captant des substances minérales et organiques. Son corps les traitait. Un désert, comme tout endroit sur Terra, était une banque de ressources. Les cadavres de millions d’animaux résidaient dans la pierre, à l’état de fossiles, de poussières, et il absorbait de quoi renouveler son plasma dans le corps, tout en contrôlant sa circulation sanguine pour purger son corps du venin. C’était une guérison lente et difficile, mais qu’il était forcé de faire pour survivre.

Sélène avait appliqué un bandage autour de la plaie de Blade, et l’avait forcé à boire un élixir de soin, concocté par les Chamanes. Une guerrière ne méritait pas de mourir ainsi, et Dizzie Blade en était une. Elle méritait de survivre, mais Sélène n’avait pas les talents requis pour la soigner. Karla, de son côté, avait beaucoup de blessures, et Pirène appliqua sur elle un élixir de soin, qui devrait faire plus d’effet que chez Dizzie. Chez la Tekhane, l’objectif était surtout de ralentir l’hémorragie, et l’élixir ralentit donc sa circulation sanguine, la plongeant pour de bon dans le coma.

« Dépêche-toi d’aller chercher les chevaux, Pirène. Nous retournons voir la Horde. »

En d’autres circonstances, elle aurait sans doute vérifié le contenu de la cargaison militaire, afin de la piller un peu, mais l’heure n’était plus à ce genre de considérations matérielles. La survie d’une sœur était en jeu... Ainsi que d’une guerrière. Pour une Amazone superstitieuse, ce combat n’était pas du au hasard. La Déesse avait voulu que les Amazones rencontrent cette redoutable femme. Il était donc de son devoir de réussir à la soigner.

Dizzie était un détestable petit nuisible qui savait y faire pour emmerder son monde et mettre des bâtons dans les roues de ceux qu'elle affrontait. Les Rebuts de Novac s'en souvenait encore et elle était parfois citée en (mauvais) exemple par les instructeurs de la NDF et de l'armée régulière, bien que certains saluaient parfois son courage. Koth fit les frais de l'abnégation de Blade, qui même perforée de part en part par un pal rocheux ne lâchait rien. Ses dernières forces étaient monopolisées pour offrir aux Amazones une fenêtre d'action qu'elles n'auraient certainement plus par la suite. Avoir confiance en des étrangères... Dizzie s'en étonnait elle-même. Pourtant, la clé était dans cette efficacité qu'avaient démontré les sauvages.

- C'est...c-con...j'suis...*cough*...câ-câline à m-mort...

Les protubérances qui sortirent du dos de Koth ne s'enfoncèrent pas en elle, mais produisirent un choc qui la repoussa. Les dards quittèrent l'organisme de Koth après y avoir déversé leur poison et Dizzie fut envoyée une nouvelle fois contre le sol, roulant dans la poussière en se tenant le vente alors qu'elle se recroquevillait instinctivement en position fœtale. L'hémorragie était importante et son corps subissait en plus le contre-coup de sa mutation, ce qui achevait de la clouer au sol. L'oeil de plus en plus embrumé, Blade ne put que voir quelques formes en faire tomber une autre avant que les gênes d'insectes ne soient désamorcés et que sa transformation ne se résorbe lentement, lui rendant peu-à-peu son aspect originel. Sa conscience sombra alors que sa bouche libérait un nouveau et épais filet de sang, qui se répandit à terre.

Qu'il s'agisse du bandage grossièrement appliqué ou de la potion que Sélène lui fit ingérer de force, Dizzie n'eut conscience d'absolument rien. Sa fièvre la fit divaguer par périodes éparses qui la virent alterner larmes et réactions violentes. Des spasmes brutaux témoignèrent de la difficulté de son corps à évacuer l'enzyme mutée et nul doute qu'elle donna du fil à retordre aux filles chargées de la soigner. Même dans cet état, Dizzie ne perdait rien de son caractère de chien et de sa combativité, implorant parfois longuement le nom de Katerine sans même que son esprit ne soit éveillé.
Impossible de dire combien de temps elle resta dans le coma, mais il était facile de penser que cela se comptait en jours. En semaines, peut-être ?

Quand Dizzie émergea enfin, ses yeux fixèrent le plafond de l'endroit où elle se trouvait. Elle ne comprit pas tout de suite ce qu'elle regardait, avant que son cerveau ne l'informe que le toit était sûrement composé de peaux tendues et cousues ensemble. Grognant, la soldate se redressa et s'arrêta net, portant une main à son flanc sous la douleur. Elle était proprement pansée et de ce qu'elle vit, sa tenue était différente. Son justaucorps avait laissé place à des bandes de tissu qui couvraient ses seins ainsi que son intimité et ses célèbres fesses. Le strict minimum donc, qui la laissait toutefois libre de ses mouvements. Une rapide inspection de son corps lui fit constater que même les plaies et blessures mineures avaient été correctement soignées. Un joli boulot, en vérité.
Dizzie ne perdit pas plus de temps, quittant sa couche pour relever et faire quelques pas. Ses membres étaient engourdis et légèrement rouillés, rien quelques passes d'entraînement ne pourraient rapidement corriger toutefois. Bon, restait à savoir où elle était. A vue de nez, une infirmerie qui paraissait rudimentaire et bien loin des locaux aseptisés qu'elle avait connu par le passé. D'instinct, la belle sût où elle se trouvait.

- En plein chez les gonzesses de ce putain d'âge du feu, grommela t'elle.

Alors qu'elle s'apprêtait à sortir, Dizzie vit son attention être attirée par quelque chose. Revenant quelques pas en arrière, la novaquienne écarta un pan de mur en peau et attrapa à la gorge celle qui se trouvait là, fronçant les sourcils en levant le poing. Après un instant d'hésitation, Blade se ravisa. La méfiance excessive n'était jamais bonne et elle ne pouvait pas nier qu'on s'était plus que correctement occupée d'elle. Elle relâcha la jeune femme doucement, s'excusant presque du regard.

- T'es qui, toi ? Et combien de temps ça fait que je suis dans les vapes, hein ?

Une autre question la frappa tout de suite, lui semblant sur le moment presque plus importante que les deux premières.

- Les trois Amazones qui étaient avec moi, comment vont elles ?

La Horde était un immense camp sauvage et hirsute, faisant penser à un vaste regroupement de nomades. La Horde était un peuple comprenant mille guerrières et des centaines d’Amazones ouvrières. Il y avait donc environ 1 500 âmes qui devaient se déplacer, ce qui représentait un défi constant. Les Amazones ouvrières, faibles, étaient toutefois essentielles. Elles nettoyaient les armures, entretenaient l’équipement, préparaient la nourriture, et s’occupaient de l’éducation des jeunes Amazones, leur enseignant les préceptes amazones, laissant le soin aux guerrières de s’occuper de leur instruction militaire. Les ouvrières étaient aussi les pondeuses amazones, et c’était bien là leur principale fonction au sein du peuple : assurer le renouvellement des générations. Toutefois, les deux castes n’étaient pas séparées de manière étanche. Ainsi, il existait des sous-castes à mi-chemin entre les deux : les Chamanes, ou encore les métallurgistes.

La Horde comprenait quelques tentes correspondant à des fonctions précises : la Tente de la Reine, l’Infirmerie, la Forge... La Forge comprenait aussi l’armurerie, mais cette dernière n’était pas très remplie. En effet, il était courant, pour une Amazone, de porter sur elle son arme de combat. L’armurerie servait en réalité plus de dépôt d’armes qu’autre chose, les métallurgistes y déposant les armes et armures qu’elles réparaient ou amélioraient, voire qu’elles fabriquaient. Sur ce point, le savoir-faire des métallurgistes était impressionnant, ce qui, au même titre que les Chamanes, faisait des métallurgistes une faction indispensable pour la survie du peuple amazone.

Au sein de la Horde, il y avait une Chamane qui n’était pas comme les autres. Elle s’appelait Calypso, et dénotait avec le reste des Amazones, par sa sensibilité, sa douceur... Et sa timidité. Amoureuse de Sélène, et toujours vierge, Calypso était un bébé qui avait failli être abandonné à la naissance, suivant les rituels cruels et exigeants de la Horde. Elle avait toujours été faible, mais elle renfermait en elle un pouvoir magique qui avait fait que Mythilène, la plus puissante des Chamanes, avait décidé de s’en porter garante. Calypso était ainsi une douce Amazone, méprisée par un certain nombre de guerrières, qui estimaient qu’elle était lâche, et qui était amoureuse de Sélène depuis sa plus tendre enfance. Calypso, en effet, avait grandi étroitement avec elle, et Sélène avait, à plusieurs reprises, protégé Calypso des autres enfants qui lui tiraient les couettes. Calypso aimait et respectait Sélène, la voyant comme un modèle qu’elle cherchait à atteindre, tout en sachant très bien que la Princesse des Amazones ne s’abaisserait jamais à coucher avec une femme aussi faible qu’elle.

En matière de soin, Calypso était toutefois extrêmement douée, presque autant que Mythilène, et, quand les trois Amazones étaient arrivées ici, avec une autre femme, elle avait commencé par les soins les plus urgents : l’étrangère. Elle avait cautérisé les plaies, extrayant avec la magie les morceaux de terre encore fichés dans son corps, et avait utilisé des potions de sang pour renouveler le sang dans le corps de Blade. Elle s’était ensuite attaquée aux multiples plaies de Karla, et avait refusé que Pirène et Sélène sortent sans soins. Les Amazones n’étaient pas des guerrières arrogantes qui se moquaient totalement de leurs blessures. Elles savaient que même la plus petite des plaies pouvait s’infecter. Calypso avait inspecté en dernier le corps de Sélène, le manipulant... Et cette scène l’avait excité plus que de raison. Ainsi, elle s’était rendue dans la réserve de l’infirmerie pour se masturber, et n’avait donc pas senti Blade se relever, ou approcher.

Quand cette dernière l’avait empoigné, Calypso venait de jouir avec plaisir, et le retour à la réalité fut... Plutôt brute. Elle poussa un cri de panique, en sentant une main ferme se poser sur sa gorge, la plaquant contre le mur. La femme, une Novaquienne, d’après ce qu’on lui avait dit, sembla alors réaliser l’absurdité de son geste, et la relâcha. Calypso se massa la gorge, légèrement contrariée, mais entreprit de lui répondre.

« Je m’appelle Calypso, et je... C’est moi qui vous ait soigné. Vous récupérez vite, c’est impressionnant. »

Elle s’était attendue à ce que Blade reste dans les vapes au moins encore toute la journée, vu l’état de ses blessures. Au lieu de ça, la jeune femme semblait déjà debout... Ceci confirmait ce que Calypso avait noté en la soignant. Elle avait un corps... Très particulier.

« Vous êtes ici depuis... Cinq ou six heures. La Princesse Sélène et Pirène n’avaient que des blessures légères. La Princesse a du faire son rapport à sa mère, et... Pour être honnête, j’ignore où se trouve Pirène. Quant à Karla... Elle est dans l’infirmerie. Elle dort. »

Karla dormait à poings fermés. Son visage angélique lui donnait presque l’air d’un beau bébé quand elle dormait... Mais l’Amazone était tout, sauf un bébé.

« La Reine Andromaque désire s’entretenir avec vous dès que possible. Vous sentez-vous prête pour cela ? Et... Votre uniforme est à la Forge... Comme il était abîmé, nous l’avons enlevé pour le recoudre. Il doit être réparé, maintenant... Je suppose... »

Dizzie toisa l'Amazone qu'elle avait attrapée en haussant un sourcil. Si elle était aussi jolie que les trois qu'elle avait rencontrées durant l'attaque de son convoi, cette gamine n'en avait ni l'assurance ni l'esprit combatif. Elle semblait bien chétive face à elle, lui donnant l'impression qu'un seul de ses coups aurait fauché sa jeune vie. Toutefois, Dizzie ne fit absolument aucun commentaire ni une seule remarque désobligeante bien que son regard exposait clairement son avis. En vérité, la jeune femme lui évoquait tout à fait sa précieuse Katerine. Parfait contraste avec une Blade qui s'estimait déjà prête à retourner en découdre avec Terra tout entière alors qu'elle était encore loin d'être parfaitement guérie de ses blessures.
L'Amazone dit s'appeler Calypso et avoir été celle qui avait sauvé la vie de la novaquienne. Dans ses yeux ne se lisait aucun mensonge ni peur. Heureusement que la soldate avait recouvré son aspect originel, alors. L'apparence qu'elle présentait au cours d'une mutation n'aurait certainement pas été pour rassurer cette doctoresse un peu particulière, qui avait d'ailleurs les joues bien rouges et les cuisses qui se frottaient nerveusement.

- Lieutenant Dizzie Blade, se contenta t'elle de dire.

Le fait qu'elle soit si prompte à se remettre debout venant tant de l'opération d'entomomorphie qu'elle avait subie que de son excellente constitution génétique. De plus, Dizzie était de ces personnes qui étaient sûres qu'un corps entretenu pouvait venir à bout de presque tout et il n'était pas exclu que le soin qu'elle s'apportait eut aidé à la guérison. Ainsi, cela ne faisait même pas une journée qu'elle était alitée ? Parfait ! Elle pourrait donc espérer retourner au convoi avant qu'il ne soit intégralement pillé par tout ce que le désert recelait de charognards et de voleurs. Prenant bonne note de cette information, Dizzie se désinteressa de Calypso et alla parti à la recherche de Karla dans la tente, mais une nouvelle pointe de douleur lui vrilla le flanc et lui coupa la respiration. La soldate se retint à une armoire en serrant les dents, une main posée contre sa blessure. Bien qu'elle ne l'admettrait pas, Dizzie était clairement hors-combat. Pestant contre elle-même, Blade se redressa en respirant lourdement et revint à Calypso.

- Ta reine veut me parler ? A moi ? Ça tombe bien, j'ai deux mots à lui glisser aussi.

Attrapant le poignet de Calypso avec fermeté, Dizzie l'entraîna avec elle et sorti de la tente, s'arrêtant pour contempler un curieux spectacle. Devant elle s'étendait un camp nomade qui fourmillait d'activité. Les ouvrières s'affairaient ça et là pendant que quelques guerrières échangeaient des coups lors de ce qui devait être des séances d'entraînement. Des femmes... Des femmes absolument partout ! Il y en avait pour absolument tous les goûts et les âges, vêtues pour la plupart ce qui serait à Novac passé pour des fripes bonnes à mettre au rebut. Beaucoup étaient armées et semblaient savoir se servir de leurs lames, ce qui n'impressionna pas spécialement Dizzie.

- Ça en fait, des culs à botter.

Quelques Amazones se tournèrent vers elle pour la fixer et Blade soutint leurs regards avant de s'adresser à Calypso sans quitter des yeux les filles qui s'attardaient sur elle. Pas question de leur prêter le flanc ou de leur laisser l'opportunité de la surprendre, c'était clair. Dizzie ne se sentait pas en sécurité et continuait de penser en soldate, préférant rester sur ses gardes quoi qu'il arrive.

- Okay, fillette. Amène moi à la Forge histoire que je récupère mes fringues et ensuite, on ira dire bonjour à la sainte patronne des pin-ups du désert. Allez, bouge toi !

« Hey ! » protesta inutilement Calypso quand Dizzie sortit de l’Infirmerie en l’attrapant.

Elle était certes rétablie, mais son vertige indiquait clairement qu’elle devait encore se reposer. Cependant, Blade ne lui laissa pas le temps d’en placer une, et elles se retrouvèrent dehors. La Horde s’était installée dans un immense canyon, et le soleil commençait à se coucher. On était en train d’installer l’immense feu-de-camp principal, celui autour duquel toute la Horde dormait massivement, et qui devait durer toute la nuit. Les Amazones étaient regroupées en petits groupes, préparant à manger devant d’énormes chaudrons. Il n’y avait pas de cuisinières attitrées. Chaque Amazone récupérait les vivres auprès des chariots de ravitaillement de la Horde, et mangeaient en groupe, à une heure bien déterminée. Dizzie fut visiblement surprise par ce spectacle. Venant d’une région tekhane, elle devait être habituée à ne voir que des femmes, et ce constat était marquant au sein de la Horde, puisqu’un mâle ne pouvait y séjourner qu’à titre exceptionnel, au nom de l’hospitalité, un principe sacré de la Déesse. Un principe que les Amazones respectaient scrupuleusement.

Calypso récupéra son bras en grommelant, légèrement contrariée qu’on la trimballe ainsi. Certes, elle ne savait pas se battre, et ne connaissait que la magie blanche, mais elle était une Amazone ! Blade lui parla alors. Son surnom la fit légèrement rougir, mais elle décida d’obtempérer.

« Allons à la Forge... »

Elle s’avança rapidement, portant son espèce de châle noir autour du corps, qui cachait tout, tout en montrant tout. On pouvait clairement distinguer ses nombreux tatouages dans son dos, la preuve que, malgré sa fragilité apparente, Calypso disposait d’un réel pouvoir. On pouvait voir la courbe de ses fesses, la délicieuse croupe dans laquelle on rêvait tous de s’enfoncer. Quand elle vous regardait de face, on voyait la courbe de ses beaux seins, ses tétons, et il n’y avait guère que son intimité qu’on ne discernait pas vraiment. Calypso avançait au milieu de la Horde.

« Mets l’herbe maintenant, Petite sœur » glissait une Amazone à une jeune fille, de moins de dix ans.

Elle était toute bronzée, avec des cheveux noirs, et obtempéra, visiblement ravie d’apprendre à cuisiner en compagnie de ses sœurs aînées. Ce concept était difficile à comprendre pour les étrangères, et expliquait pourquoi une personne adulte avait bien du mal à rejoindre la Horde. La Horde n’était pas un État à la structure cellulaire binaire, comme c’était le cas dans les sociétés sédentarisées. Il n’y avait pas le cercle familial, et le cercle sociétal, mais un seul cercle, qui confondait les deux. Les 1 500 femmes composant la Horde estimaient toutes appartenir à une seule et grande famille. Il n’y avait pas de propriété privée, pas de famille au sens strict du terme. Une Amazone ignorait qui l’avait enfanté, et les jeunes Amazones pouvaient dormir auprès de n’importe quelle Amazone. En théorie, du moins... En pratique, il était constant qu’une jeune Amazone ait une grande Amazone comme tutrice principale, et se rende principalement vers elle. Il s’agissait généralement de l’une de ses deux mères, car, même si les Amazones ne voulaient pas séparer la société de l’individu, il y avait des liens solides, des liens de sang, qui étaient sacrés pour les Amazones. Très sacrés, même.

La Forge était reconnaissable. C’était une tente faite en bois, ce qui, en réalité, en faisait plutôt une petite hutte. Quand la Horde s’installait, il y avait au moins quinze Amazones qui s’affairaient à bâtir cette hutte. OIn entendait des vrombissements à l’intérieur. Les armes amazones comprenaient autant de l’équipement médiéval que futuriste, et les métallurgistes devaient être compétentes pour réparer et entretenir n’importe quelle arme. Il y avait donc, à l’arrière de la Forge, un gros générateur portatif qui fournissait de l’énergie, qu’on rechargeait à l’aide d’un matériel que des Amazones ramenaient de Tekhos. Plusieurs métallurgistes travaillaient sur des établis dehors, finissant de forger des lames en les plongeant dans des bains de feu, avant de taper dessus avec un marteau. Une Amazone métallurgiste, avec une petite, s’amusait à tanner le cuir d’une armure, lui prodiguant quelques instructions.

Dans la Forge elle-même, Cymé, une métallurgiste, était en train de finir de réparer les joints d’un puissant fusil d’assaut Puma. Des myriades d’étincelles sifflaient autour d’elle, et elle s’arrêta en voyant Calypso approcher.

« Bonjour, ma sœur lâcha Calypso.
 -  Bonsoir, ma sœur répéta Calypso en penchant la tête. Notre invitée est réveillée, et souhaiterait récupérer ses vêtements.
 -  Oh... Bien sûr... Entrez, et ‘faites pas attention au bordel. »

Cymé s’avança dans l’arrière-pièce, l’armurerie. Une odeur de soufre se dégageait de cette hutte. Elle ne tarda pas à revenir, tenant le justaucorps bleu, ainsi que le reste des vêtements de la femme.

« Voilà. C’est la mode de l’armée tekhane, non, de se sentir serrée dans ses vêtements ? »

Toute furieuse au combat qu'elle pouvait être, Dizzie était avant toute chose une solitaire dans l'âme qui s'était davantage renfermée sur elle-même à la mort de Katerine. Ses rares connaissances l'avaient lâchée après son furieux rodéo sanguinaire à travers tout Novac City et même une fois au sein de la défunte unité SABLE, Dizzie avait joué personnel. Elle n'envisageait plus la vie en compagnie de personne à part quelques soldates qui ne feraient que passer le temps d'une mission ou deux et la voilà qui se retrouvait plongée au coeur d'une société épousant des moeurs aux antipodes des siennes. Entre ces guerrières et la soldate ne demeurait qu'un lien ténu, celui du combat. Pour le reste, Blade n'avait plus rien à voir avec ces Amazones. Si elle avait au départ entraînée Calypso à la suivre, c'était la petite guérisseuse qui avait en fait ouvert la marche en laissant dans son sillage une Dizzie qui se sentait de plus en plus mal à l'aise et de moins en moins à sa place. Partout où elle pouvait regarder, la complicité qu'elle pouvait voir entre les filles de la Horde la perturbait. Là, deux guerrières échangeaient quelques conseils en se volant un baiser. Ici, des gamines jouaient de façon un peu turbulente avant de se faire réprimander. Dans un coin, deux femmes s'étreignaient avec tendresse avant de se lever pour aller aider une de leurs soeurs qui peinait à transporter une quelconque charge. Une vie en communauté, sans distinction. Un groupe hétéroclite qui réfléchissait comme une seule femme.
Tout ce que Dizzie ne parvenait pas à accepter où correctement appréhender. Perturbée -même si elle refusa de le montrer trop, par fierté- la soldate se concentra sur la chute de reins de Calypso sans toutefois la voir réellement. "Katerine aurait adoré pouvoir venir ici", pensa t'elle.

La Forge, effectivement, était reconnaissable du reste de la horde. Par contre, quel contraste au sein même de la hutte ! Entre les claymores et les fléaux d'armes gisaient des pièces de fusils d'assauts et les éléments de powersuits tekhannes, le tout dans une ambiance moyenâgeuse parsemée d'anachronismes. En effet, d'épais câbles électriques traînaient ça et là, entre deux compteurs à affichage digital. Le décalage des éléments de la Forge résumait assez bien l'ensemble du mode de vie des Amazones.
Calypso salua une femme, qui lui rendit avant de regarder un bref instant Dizzie qui hocha la tête en guise de signe de politesse. Ses yeux tombèrent sur le Puma, une des armes avec laquelle elle avait fait ses classes. Cymé disparu après la brève explication de Calypso et durant ce temps là, Dizzie attrapa le fusil.
Elle n'était pas spécialement experte en armes de poing mais possédait quelques connaissances au vu de sa formation militaire. Dizzie manipula l'arme, vérifiant quelques compartiments avant de le porter à l'épaule pour mimer un tir.

- Voilà. C’est la mode de l’armée tekhane, non, de se sentir serrée dans ses vêtements ?

Dizzie baissa le canon de l'arme tout en regardant Cymé. Dans un "clac clac" sec, la soldate referma le magasin de la batterie à énergie du Puma avant de sagement le reposer.

- C'est la mode des Amazones de se couvrir le cul avec des morceaux de cuir et de tissu tellement elimés qu'on ne sait pas si ça dit "baise moi comme la dernière des traînées" ou "j'ai pas un rond, je m'habille avec les fringues de ma p'tite soeur et je t'emmerde", non ?

Mine de rien, la pique sonnait plus comme de l'ironie humoristique que comme une provocation. Lâchant un discret merci, Dizzie récupéra ses vêtements et commença tranquillement à ôter la tenue que Calypso lui avait certainement mise pendant qu'elle comatait. Les agréables formes de son corps nu semblèrent venir d'ailleurs sous les étincelles qui surgissaient des coups de marteau autour d'eux, bien que le corps désirable de la soldate était strié ça et là de cicatrices. Elle enfila le justaucorps aisément, calant ses seins pleins et fermes à l'intérieur avant d'ajuster entre ses fesses fermes la partie échancrée de la tenue. Ses bottes puis ses protections d'avant-bras suivirent l'habillement avant qu'elle n'achève pas la toute petite cravate qui décorait le col montant. Touche finale, son fidèle beret retrouva sa place sur sa tête.
Une fois prête, Dizzie frappa comme à son habitude ses poings l'un contre l'autre d'un air satisfait en regardant Cymé.

- Merci Machine, c'est comme neuf. Pour te répondre, c'est pas spécialement une mode : c'est juste que ça épouse parfaitement les mouvements du buste tout en laissant les jambes parfaitement libres. Tout à fait c'qui m'faut.

D'un mouvement de menton, elle désigna une armure qui gisait dans un coin. Apparemment, l'équipement avait été par de nombreux tirs ennemis et Cymé (ou n'importe quelle autre métallurgiste, Dizzie n'en savait rien) semblait chercher à la réparer. Comme si ça avait été un petit travail "fil rouge" pour une bricoleuse qui avait peut-être un peu de temps à tuer. Ce qui avait interpellé Blade, c'était le fait qu'elle connaissait bien le modèle présent, un Secret-Claw. Une armure d'infiltration très utile pour le camouflage. Pas le genre de Dizzie, mais c'était sur un Secret qu'elle s'était fait la main en apprenant les rudiments de réparation qui l'avaient amenée à s'intéresser à la mécanique.

- Je serai toi, je vérifierai le revêtement intérieur avant de tenter une alimentation externe. Vu l'état du casque, l'IA de soutien doit être morte et ne te signalera pas les éclats incrustés dans le système de miroirs qui lancent la dissimulation tactique. Si tu vire pas les corps étrangers, même les plus p'tits, l'énergie sera mal acheminée et le Claw sera anormalement gourmand en alimentation tout en sapant ta capacité de camouflage. Elle haussa les épaules. Enfin, p'têt que tu l'sais déjà, tu me diras.

Dizzie se retourna alors vers Calypso, toujours aussi déterminée à aller au bout malgré ce petit interlude mécanique. Les petits plaisirs devaient attendre que les gros soucis soient réglés. La suite était donc l'entrevue avec Andromaque, à laquelle Blade n'avait absolument aucune intention de se dérober.

- On y va, Fillette. Amène moi à ta Reine, maintenant que je suis présentable.