Improbable binôme... (Gabriel Valmy)

Il y a des fois où, quand ça ne va pas, ça ne va pas. Des fois où c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Et cette fois-là, et bien s’en était une.

☸ C’EST LA DERNIERE FOIS ! Oui, la dernière fois. Je me fiche complètement de votre façon de voir les choses. Quand je donne un ordre, j’entends à ce qu’il soit exécuté ! Vous ne travaillerez plus en solitaire à présent. Je vais vous assigner un coéquipier. Et vous serez priez de le respecter, du fait de son ancienneté. Vous n’êtes qu’un bleu ici, Smith. Vous n’avez pas à me dire ce que je dois faire sous prétexte que vous avez quinze diplômes dans la poche. Vous n’avez pas l’expérience de terrain requise. A la prochaine incartade, vous serez suspendue !

Le commissaire n’avait pas été discret dans ses remontrances. La porte de son bureau était ouverte, en plus, par-dessus le marché. Tout le commissariat avait donc profité de sa tirade. Et tout le commissariat pourrait se foutre de la gueule de Lena lorsqu’elle sortirait.

Et Lena, justement, réprimait la répartie qui lui venait pour ne pas aggraver son cas.

☸ Bien monsieur.

Ce fut tout ce qui sortit de ses lèvres serrées.

☸ Parfait. N’oubliez pas, si j’ai à me répéter, ou si votre insubordination me revient encore aux oreilles, je vous suspends.

Elle hocha sèchement la tête.

Il se leva alors, et se posta sur le seuil de son bureau.

☸ Valmy ? Venez par ici.

Nouvelle dans ce commissariat-ci, Lena n’avait pas eu le temps de mémoriser tous les noms. Et celui-ci ne lui dit rien. Elle attendit, le dos droit, les épaules rigides, les lèvres serrées, et le regard sombre.

☸ Voici votre nouveau binôme.

Je suis de bonne, bonne, bonne, bonne humeur ce martin, y a des matins comme çaaaa ! Oui, le !moral était au beau fixe, Gabriel venait d’être réintégré dans le service actif. Il avait été suspendu deux semaines et ça avait manqué de continuer pour encore le reste du mois si on ne l’avait pas appelé. Tsubahana avait appelé et lui avait dit qu’elle pouvait très bien lui faire sauter cette suspension à conduition qu’il se calme un peu et qu’il ne fasse pas trop de vague et obéisse au patron.

A contre cœur, Gabriel avait promis, même si ça lui faisait chier, il s’agissait d’un con fini, un mec qui prenait sa vessie pour une lanterne, mais bon que voulez vous, c’était lui qui avait fait des études plus longue, pas Gabriel. Gabriel était devenu inspecteur grâce aux concours internes, il avait commencé à la circulation et aux sorties d’écoles en se faisant bien chier. Mais maintenant il était lieutenant, inspecteur si vous voulez, le terme signifiant la même chose. Il avait tourné sous pas mal de brigades avant de se fixer dans la crim’. C’étgait une bhonne chose surtout que Tsubahana dirigeait ce service à l’échelon préfectoral.

Il était à son bureau et comme si ça ne suffisait pas, c’était quelqu’un d’autre qui se faisait engueuler dans le bureau de ce trou du cul qui servait de commissaire dans cette infrastructure. Ça le faisait ricaner, il s’agissait d’une bleue qui y passait régulièrement vu le temps qu’elle était là, elle était en passe de battre le record jusqu’alors imbattable de Gabriel qui y allait plusieurs fois par semainer. Bon, pour atteindre ce score, elle avait encore du chemin à faire mais bon…

Il connaissait les discours de ce râleur impuissant par cœur et le trouvait étonnamment courtois et poli, il y avait anguille sous roche, il lui avait même dit bonjour avec un grand sourire ce matin, alors il avait commencé la journée à chercher un coup fourré, mais n’en voyant pas, il s’était dit que ça allait être une bonne journée…

Enfin, ça aurait du l’être, mais il entendit la douce voix lui évoquant une lente émasculation à coup de couteau rouillé, oui, il le détestait et c’était réciproque, mais il devait le supporter, et pire, pendant un temps il devait le faire sans broncher. Il se leva et se rendit dans le bureau du sac à merde » qui lui servait de commissaire et resta silencieux, retenant le chapelet de gentillesses plus acerbes les unes que les autres qui lui brûlait les lèvres à cause de la rétention.

« Euh, attendez, c’est quoi ce bordel ? »

Il venait d’entendre parler de binôme ? Vraiment ? Ce n’était pas une erreur de sa part ? Certain ? Temps mort, alors, il y avait une bleue qui foutait la merde à un degré moindre du sien et il devait s’en occuper ? Holà, une minute, se la taper, certes, mais bon, pas non plus de quoi s’y accrocher comme un rocher à une moule, il avait déjà le reste du monde à supporter, vu qu’il adorait se le mettre à dos, alors pourquoi elle en particulier ? Surtout que lui et le travail d’équipe… et là, ça sortit tout seul.

« Désolé chef, mais je ne comprends pas en quoi me coltiner une bleue incapable de différencier la crosse du canon d’un flingue faute d’expérience va l’aider à progresser, et je pensais que vous aviez mieux qu’un vélo englué dans de la semoule à la place du cerveau, merci de me rappeler la réalité, maintenant si cette blague est finie j’aimerai aller cloper et ensuite faire ma patrouille, comme d’habitude… »

Il commençait à comprendre pourquoi ce soudain côté amical àç son arrivée, ah, il en profitait le sac à ordure… un vrai politicien… il savait très bien qu’il n’avait pas le choix et avait essayé de se montrer le plus poli et le plus courtois possible… la preuve, il l’avait vouvoyé et ne l’avait pas envoyé se faire foutre dans une porcherie, lieu où il vait une place déjà réservée…

Il fut repris de volée à la bonne vieille manière. Passant de l’état de porc à celle de déjéction canine, il aboya sur Gabriel, poli, mais clairement en colère. Voilà, ça c’était le vrai chef !

« Valmy, tu boseras en binôme ou je m’arrange pour que tu retournes en suspension, t’as de la chance que Tsubahana t’ai sauvé la mise cette fois mais elle va pas pouvoir te couvrir à chaque fois, ne rêve pas, et à la moindre occasion… la moindre baisse dans les résultats que tu as et je te promets que tu voudras retourner à la circu… »

Gabriel pâlit légèrement, mais sans plus, restant relativement stoïque. Il hésita sur les propos et faute de pouvoir s’en prendre au commissaire, vu qu’il devait éviter un peu les ennuis, il s’en prit à la bleue, oph, pas méchamment, mais c’était juste une manière de marquer le ton. Il lui fit signe de la tpête de l’accompagner, il était résigné, il devait s’occuper du bleue, la chance… alors qu’il regagnait son propre bureau il y eut plusieurs commentaires salaces mais sans plus, une fpois à son bureau, Gabriel plongea ses yeux dans ceuxde la jeune femme et lui dit d’une voix ferme :

« A la limite il y a toujours une place sous mon bureau pour une partenaire, mais c’est tout… La bleue, file moi ton chargeur et tes munitions de rechange. Vite j’ai pas que ton éducation à faire. J’veux pas que tu me crée un deuxième trou de balle faute de savoir te servir de ce flingue, alors tu le garde mais tu tires à blanc ou tu ne mets pas de chargeur. Vu ? »

Incapable de différencier la crosse du canon ? A ces mots, Lena leva la tête pour fixer son regard sur son collègue. Il la croyait donc si novice que ça ? Elle n'allait pas l'accepter facilement. Même avec la meilleure volonté du monde. Il était furieux de devoir bosser avec quelqu'un ? Il n'était pas le seul. La meilleure chose à réaliser était de faire contre mauvaise fortune bon coeur. Mais, elle ne savait pas pourquoi, Lena ne le sentait pas sur ce coup-là.

D'ailleurs, la suite lui donna bien raison. Après que le Chef eut remis son agent à sa place, celui-ci se rabattit sur elle. Haussant un sourcil, avec l'air de dire "Tu rigole ou quoi ?", Lena secoua la tête. Non seulement il était grossier et insultant, mais il semblait bien misogyne aussi.

☸ Hors de question. J'ai eu d'excellents résultats aux épreuves de tir. Je sais ce que je fais.

Et elle restait poli, malgré tout. La présence de témoins à côté l'empêchait de l'envoyer paître comme elle aurait pu le faire ordinairement. Elle porta la main à son arme, pour s'assurer qu'elle garderait son arme et ses munitions, et redressa la tête.

☸ Je suis peut-être nouvelle dans ce commissariat, mais je ne suis pas ignare.

Elle camperait sur ses positions, c'est certain. Tout en le suivant à son bureau, elle jeta un oeil sur le bureau du chef.

Même si elle n'était pas là depuis longtemps, Lena savait qu'il n'était pas aussi sérieux qu'il le disait. Il ne bossait presque jamais. Il s'astiquait le manche sur des sites pornographiques, et disait être en visio-conférence quand on lui demandait pourquoi ses rideaux étaient fermés.

Okay, elle ne comprendrait sans doute pas pourquoi Gabriel lui tombait dessus comme ça, mais ce n’était certainement pas son problème ! Elle était sa cible et il allait lui en mettre plein la gueule jusqu’à ce qu’elle décide d’arrêter de jouer à la coéquipière et lui lâche les basques, ça n’avait même pas encore commencé qu’il en avait déjà marre, c’est vous dire ! Il l’avait juste fermé devant le chef poiur éviter de se choper une suspension, mais en dehors de ça, il ne lui ferait pas le moindre cadeau.

Bravo, elle savait tirer sur des cibles en carton ! Quel exploit ! lui aussi, il avait tiré sur des cibles en carton et il avait eut tout juste (pour une fois qu’il était bon quelque part aussi…), elle savait ce qu’elle faisait et c’était sans doute ça aussi qui motivait Gabriel à vouloir ses balles :  si elle lui tirait dans les miches ce serait volontairement et ça ne l’encourageait pas à lui faire confiance !: Et puis, la confiance et le respect de Gabriel, ça se méritait !

Et puis, elle était une belue, il se doutait bien que tiirer sur des cibles en carton et devoir tirer sur quelqu’un de chair et de sang, elle verrait ça comme quelque chose de très différent dans la réalité, d’autant qu’elle pouvait aussi lui tirer dessus par accident. Et ça, ça lui faisait un peu peur, mieux vaut se faire tirer dessus par quelqu’un qui en avait l’intentrion ;, plutôt que par accident, car qui sait ce que le prochain accident donnera…

« Bravo, tas des diplomes donc tu sais des choses, mais dis moi, tu sais, autrement qu’en théorie comment on calme un preneur d’potage ? Tu sais ravaler ta fierté et obéir à des putains d’ordre de connards armés pour sauver des vies innocentes ? Tu sais qui est dangereux et qui ne l’est pas dans le quartier de la toussaint. Tu connais les principaux membres de chaque triade et chaque mafia ? Inutile de me répondre, tu sais très bien que non, car t’es qu’une bleue et les bleus sont ignares, ne valent pas grand-chose ! Tant qu’on leur a pas fais prendre une balle dans le lard au moins une fois. Ça, pareil, tu sais pas ce que c’est que de se prendre une balle pour un coéquipier, moi si, et j’en prendrai pas pour toi tant que je te connaitrai pas et que je ne te ferai pas confiancxe. C’est pas à moi de prouver ce que je pêux faire, c’est à toi de montrer que tu mérites que je te traite différemment de lma bleusaille, jusque là, c’est écrit sur ton front pour tous les gens de la brigade, la bleue ! »

Il tapota son front du doigt juste une fois, et finit par ajouter, toujours sur un ton provoquant :

« Et par pitié fais ce que devrai faire tout gonzesse : fermer sa gueule, et s’occuper de ses moutards, alors faute d’en avoir, car je doute que tu en aies, vu que t’as pas l’air d’être du genre à être supportée par beaucoup de mecs potables, ferme au moins ta gueule pour me laisser bosser. Et promis, si tu es sage, tu auras peut être les clés de ma moto de patrouille… quoique… non, même ça, j’ai pas confiance, alors oublie ! Alors tu vas me filer tes balles ou je dois les prendre de force ? »

Réaction machiste de base sans doute, mais bon dieu ce que ça faisait du bien de se défouler sur quelqu’un….